Chapitre IX — Où le Philippidès de l’écriture monte sur Lyon, descend du Mont d’Or et parle boutique

Foin des clichés touristico-cuculinaires (rosette-traboules-gastronomie-bouchon-capitale-des-gaules-fourvière-croix-rousse-canuts-guignol-part-dieu), Lyon est une étape importante pour le marathon de notre tapuscribe car il y retrouve la chaleur amicale de Pierre-Yves (le bon-gentil-géant-chauve-et-barbu qui est le cœur battant de la framatrice) et ses potes. Loin d’être en terre inconnue, il est en terrain connu, littéralement chez Framasoft qui a son siège et sa permanence chez Locauxmotiv.

Le voici donc déterminé à mener un ultime contre-la-montre, anticipant déjà sur les classiques d’arrière-saison (relectures, hibernation, rumination sur le tome suivant de la saga…).

J’irai écrire chez vous épisode 9 : Lyon

On pourrait croire que j’ai bouffé du Lyon, mais non : c’était du Mont d’Or. Quoi qu’il en soit, entre de belles rencontres et de grandes discussions, je suis revenu dans la course avec des mots par milliers. Ça tombe bien : nawel approche !

Mon secret d’écrivain ? Le retard SNCF

Départ de Toulouse, revigoré et reposé, mais légèrement culpabilisant. J’ai six jours d’écriture dans les dents : autant dire que le seuil des 50 000 mots paraît loin. Alors je peux arguer qu’avec tous les billets de blog écrits, il y a facilement 10 000 mots de plus. Je peux mégoter : 50 000 mots ne suffiront pas à boucler ce livre III, donc ce seuil ne fait pas sens. Mais, alors que je pars pour Lyon, je me dis que ça le ferait bien. Pour la beauté du geste, atteindre même sur le fil la symbolique barre placée là par Le Meilleur des Mondes d’Aldous Huxley. Saint Christophe, patron des voyageurs, doit m’avoir à la bonne. Comme j’étais bien inspiré dans ce train, il m’a ajouté 1h40 de bonus-retard. J’écris ma plus grosse journée aux côtés d’un pote retrouvé par hasard dans le wagon. La classe américaine, quoi.

Pyg, la fourmi framasoftienne qui aime les cigales

L’enthousiasme de PYG, historique salarié de Framasoft, pour ce « J’irai écrire chez vous » fait chaud au cœur. C’est, je trouve, la personne qui définit le mieux ce qui est au cœur du principe : « Tu vois Pouhiou, même si je sais qu’un don c’est participer, là c’est encore mieux. Car en t’invitant chez moi, à ma table, je participe — même à la marge — à ton processus d’écriture de manière encore plus… personnelle. Je sais que ce qu’on va vivre va t’inspirer à un moment ou à un autre, et j’ai vraiment l’impression que tu m’inclus dans le truc. » Voilà. Pas mieux. C’est ça l’idée. Vous demander de participer… personnellement. Trouver comment appliquer les astuces de Miss Amanda Palmer quand on ne tourne pas en concert. À priori : ça marche.

<— Photo par Ana_Rey licence CC-BY-SA 2.0

J’ai donc écrit chez Pierre-Yves

Pierre-Yves est quelqu’un< de généreux, et cela se voit dans son attention. Il est de ces gens qui tentent d’écouter ce que tu veux dire, et d’y répondre de manière réfléchie, constructive. De ces potes qui ont toujours un gentil mot, une bonne bière et de la belle boustifaille à partager avec toi. Quelqu’un qui sait être là tout en te laissant disponible l’espace dont tu as besoin. J’ai bien écrit chez Pyg. J’ai bouclé le chapitre V qui pourtant au départ me donnait bien du mal. Il me tarde vraiment d’entamer mes premières relectures de décembre car ce livre-là peut être un délire assez casse-gueule… C’est un exercice à la fois exigeant et qui demande beaucoup d’abandon. Mais si ça fonctionne, ce sera redoutable (c’est très dur de ne pas détailler pour ne pas vous spoiler, j’ai l’impression d’être méga flou !).

Boutique Frama et atelier d’écriture

Bon le petit truc pas classe, c’est qu’en m’invitant, ben le Pierre-Yves il s’est retrouvé du boulot qui l’attendait le soir à la maison. Car le soir on a — aussi — parlé boutique : Framasoft. Si Framasoft peut se permettre de payer ses salariés, qui communiquent, animent, refondent l’infrastructure, se tapent l’administratif, accueillent et assurent la technique de sites web tels que noenaute.fr ou geektionnerd.net… C’est grâce à vos dons. Et on a besoin que ça continue, car ces projets on veut les poursuivre, tout en montant ceux qui sont dans les frama-cartons. Par exemple, cet atelier d’écriture qui n’a pas pu se faire à Lyon, ben avec un peu de temps salarié et d’huile de coude, ça pourrait devenir un atelier d’écriture… en ligne. Pour l’instant on en rêve, mais on est pas si loin d’y arriver…

Les copaings d’abord

C’est marrant le nombre de personnes que j’aime à Lyon. Il y a Thomas que j’ai vu sur Toulouse et dans le train. Il y a Muche que je râle d’avoir ratée cette fois-ci. J’ai eu le plaisir de faire goûter mes outrageous cookies à Mathias, avec qui j’aime tant rire… Puis Pyg a organisé une soirée « Mont d’Or ». Le Mont d’Or est un petit fromage serti dans du bois qui, une fois passé au four et posé près de patates chaudes, se partage entre amis avec une bonne bouteille de vin et des chouteurs de rhum. Et là, tu deviens le témoin privilégié d’une bande de potes qui sont juste heureux d’être ensemble. De partager, de revisiter le monde en allant à fond dans la collaboration cuisinière, coquetaillière, philosophique et amicale. Ils sont l’essence du libre sans même s’en rendre compte, la table et les oreilles toujours grandes ouvertes.

Philosophie de l’estomac

Dans sa vidéo The Art of Asking[1], Amanda Palmer se questionne quand elle voit que les gens qui hébergent son groupe pour le couchsurfing du soir se serrent dans une chambre pour LUI faire de la place… Est-ce que je mérite cela ? Comment se fait-il que l’on m’offre autant de choses, qu’est-ce que j’apporte en retour ? Elle trouve bien vite la réponse : elle apporte ce que les gens y trouvent. La possibilité d’échanger avec quelqu’un qui essaie de mettre ses tripes sur la table, qui essaie de s’exprimer avec sincérité. C’est peut-être à ça que ça sert, d’écrire des fariboles… À partager des fromages chauds, des pensées évanescentes et des amitiés.

Photo par traaf licence CC BY-SA 2.0

Déjà se pose la question de partager le livre IV… Mais pour l’instant, j’ai un défi à relever !

À dans trois jours,

— Pouhiou.

Notes

[1] Pour lire la transcription en français, cliquer sur Show transcript en bas à droite et choisir français




Chapitre VII — Petit couple et grosse fatigue

Là-bas tout au sud au pied des montagnes, là où l’Arget joint l’Ariège, Nelwyn et Kiro ont joint leur vie sous l’œil attendri de Pouhiou, ce grand romantique. Cet épisode est l’occasion d’une pause salutaire pour notre horizontal ludion qui éprouve, et c’est bien compréhensible, une certaine fatigue à force de disperser son énergie entre les rencontres, les déplacements et le défi d’écriture.

Le voilà pourtant déjà prêt à partir à la rencontre des libristes, représentant Framasoft avec un dynamisme sans faille dès aujourd’hui ! Passez le voir et l’encourager, vous lui donnerez son carburant préféré : l’échange.

J’irai écrire chez vous épisode 7 : Foix

C’est un peu de la triche. Je viens de passer trois jours chez mon petit frère. Qui, avec sa chérie, s’avèrent tous deux être des lecteurs des NoéNautes. Mais si j’ai choisi de m’arrêter là, c’est que j’ai une bonne excuse et elle est en forme d’histoire.

Ceci n’est pas leur histoire vraie

Nelwynn est une amie de lycée. On a traversé beaucoup de pérégrinations passionnées durant nos folles jeunesses ariégeoises et toulousaines.

la rue des Grands Ducs à foix

Foix, la rue des Grands Ducs, photo Jean-Louis Venet CC-BY-SA-3.0 via Wikimedia Commons

Kiro est mon cadet de huit ans. Le petit dernier à qui j’ai filé ses premières capotes, son premier magazine de cul (plus le conseil « le pr0n c’est pas comme la vraie vie ») et le « kit de survie du jeune hétéro » (localisation du clitoris + importance des préliminaires = ayé tu as les bases maintenant file te faire ton éducation).
Un jour, alors que Nelwynn était passée à la maison familiale, Kiro salue son départ d’un « Roh ! elle est toujours aussi belle, Nel’. Tu vois j’oserais pas, mais… elle me plaît bien, quoi. » Quelques jours plus tard, c’est à Nelwynn de m’avouer : « Putain ton petit frère, ça fait bizarre. Je l’ai connu ado, mais là il a 20 ans, et… c’est un beau mec, quoi… »

Surtout ne me faites pas ce coup-là.

Au bout de deux ou trois remarques d’un côté et de l’autre, je n’y tins plus : « Mais arrêtez de me faire chier et couchez ensemble, bon sang ! Vous semblez en avoir envie tous les deux ! » Puis, avisé, je modère d’un « par contre, me faites pas le coup de tomber amoureux l’un de l’autre, j’ai aucune envie d’être pris entre deux feux, hein ! »

Résultat ? Près de cinq ans après ils sont toujours ensemble, un beau petit couple de goths geeks qui vivent dans le péché et une jolie maison aux 10 000 statuettes… Mais il y a quelques jours, mon petit frère a demandé la main de ma meilleure amie. Je ne pouvais décemment pas manquer ça. D’où ce bel arrêt sur les hauteurs enneigées de Foix.

J’ai peu écrit chez Kiro et Nel

Honnêtement : je fatigue. Les voyages, les discussions, les rencontres et les idées se bousculent les unes les autres, et tout passe de manière floue comme par la fenêtre d’un train. Qu’on ne s’y trompe pas : j’adore cette expérience. Mais si je commence à me coller la pression, je me bloque et n’écris pas. Du coup je fatigue. Au moment où j’écris ces lignes, je n’ai pas tapé les 1667 mots du jour et je dois en avoir 2200 de retard. J’ai décidé de m’en foutre. Du moins de ne pas laisser l’amusement de ce défi se transformer en une obligation, une tâche, une peine. J’essaie au contraire de profiter des rencontres, qui nourrissent l’écriture de manière très… directe. Je ne peux rien dire sans spoiler, mais plus que les discussions, ce sont les vies des gens qui m’inspirent.

Garder la joie de la découverte.

J’ai peu écrit du chapitre V mais ce que j’ai pu écrire m’a surpris. Plus l’intrigue se resserre, plus certaines choses ressortent des personnages avec une profondeur que je ne leur soupçonnais pas. Je ne veux rien te dévoiler mais j’ai bien envie de te mettre l’eau à la bouche. Genre avec un petit extrait du début :

Il faut que je rassemble mes pensées. Pas facile, quand tu occupes un manoir rempli de télépathes. Mais je dois essayer de remettre un peu d’ordre dans toutes ces calembredaines. Rassembler mes pelotes d’indices, tricoter le fil de l’Histoire pour que se dessine à mes yeux le patron de ce jacquard qui se répète dans le temps

Alors oui : une nouvel narrateurice succèdera à Enguerrand et Cassandre. Oui, après Fulbert puis Enguerrand, un nouveau NoéNaute sera au cœur de l’intrigue de ce roman. Non, l’intrigue ne se déroulera pas en temps réel comme lorsque les romans sont blogués sur 4 mois… Ça donne envie ?

On se voit quand ?

Non parce que tu vas avoir l’embarras du choix ! Les 23 et 24 novembre, je tiens le stand Framasoft avec FraMartin au Capitole du Libre, où je pourrais faire des dédicaces. Avec de superconférences : Benjamin Jean, Jérémie Zimmerman, Benjamin Bayart… et même moi !

Le dimanche, on fait un atelier d’écriture collaborative : un épisode hors série des NoéNautes écrit à plein de mains ! D’ailleurs, on réitère cet atelier dans les locaux Lyonnais de Framasoft le mardi 26 novembre entre 18 et 20h avec Pyg himself. Pense à t’inscrire auprès de pyg chez framasoft point org et à apporter ton ordinateur portable ! Le but sera de faire un joli épisode et de l’élever dans le Domaine Public Vivant. Sinon, on peut aussi se retrouver avec Gee à Nice durant les derniers jours du NaNoWriMo (29 et 30 novembre) à l’occasion des Journées Méditerranéennes du Logiciel Libre, où nous dédicacerons nos fictions libres.

Tant de choses se passent…

C’est limite frustrant de ne pouvoir tout suivre que de loin. C’est un mois admirable pour la culture libre, j’ai l’impression, quand tant de positions bougent, que tant de gens expérimentent… De Ploum qui parle brillamment de financement libre, à Neil Jomunsi qui se lance dans la libre diffusion. De l’amendement sur les locked-books (ebooks fermés par un écosystème ou des DRM) adopté puis aboli en 24h au parlement ; à la Hadopi qui dit que partager des fichiers ne nuit pas à la culture et ne devrait pas entraîner de compensation. Des billets inspirants et inspirés de Thierry Crouzet à cette loi sur le Domaine Public qui représente une opportunité rare…

Tant de choses se passent. Dont une qui me tient à cœur : la campagne pour soutenir Framasoft. Voilà trois semaines que je bats la campagne dans ce but : montrer qu’il faut des lieux numériques où l’on peut abriter et faire grandir de libres expériences. Une auberge du libre, en quelque sorte, où on y trouve forcément bien plus que ce qu’on y apporte, tant les projets se nourrissent. J’espère que cette dynamique pourra perdurer et s’étendre… Et cela dépend de vos soutiens. Alors : « Allons-y ! »

À dans trois jours,

— Pouhiou.




Chapitre V — Où Pouhiou use le plancher, démarre le diesel et se souvient qu’écrire c’est pour rire

Ça devait arriver. Comme tout héros de bon road-movie,  Pouhiou repasse sur ses traces et dévoile les dessous des nuits parisiennes du Libre : on y chante du Brel et du Brassens (sans le déclarer à la Sacem !) devant une chouette machine à libérer les livres de leur support matériel.

Mais le plus important c’est tout de même que Pouhiou envisage de renoncer à sa thèse de narratologie, tétanisé tout à coup par la pratique de l’écriture de deux gamins doués : eh oui c’est aussi ça le nanowrimo, redécouvrir qu’écrire est un jeu ! 

J’irai écrire chez vous épisode 5 : re-Paris

Ben oui : retour à la capitale, à mi-chemin de l’aventure. Pas par jacobinisme, mais parce que Paris est au centre des routes. Et qu’on y découvre de merveilleuses personnes.

Chez Adrienne

J’avais rencontré Adrienne sur Toulouse. Sur une conférence « culture libre » à la médiathèque. Lors de mon premier Capitole du Libre l’année dernière. D’ailleurs, cet évènement libriste toulousain aura lieu les 23 et 24 novembre prochains, j’y serai et j’en serai… si vous voulez qu’on s’y retrouve…
Sous un premier abord courtois et modéré, on sent vite que cette illustre wikipédienne a un caractère passionné et un humour pétillant. Néanmoins, si on s’était croisés et appréciés, on n’avait pas vraiment eu le temps de beaucoup échanger. Du coup, quand elle a proposé de m’héberger dans ce romanesque tour de France, je me suis dit que l’occasion était trop belle de découvrir et la personne et son univers.

Des discussions généreuses

Mes aïeux, quelle découverte ! Des soirées de papotages jusqu’à trois heures du matin, où tous les sujets se rencontrent, se répondent. Je ne connais pas, ou mal, le milieu libriste. Adrienne, avec ses nombreuses activités au sein de Wikimédia France, a rencontré tout ce joli monde et m’en a fait visiter une partie, telle une guide bienveillante. On a parlé histoire, littérature, anecdotes familiales, société, éducation, mentalités… J’ai découvert le projet Afripédia qui vise avec pertinence et respect à entrainer le continent africain (et ses cultures) dans cette aventure du savoir encyclopédique partagé… Quand on voit les résultats humains de projets nés du numérique, on ne peut plus dire que « le net, c’est pas de l’IRL, de la vraie vie ». Un peu à l’image de ces partages qui jalonnent mon voyage d’écriture : vrais, intenses, des moments où on est juste contents d’être humains.

Les petits monstres d’Adrienne

Des personnes au caractère vif, épanoui. Deux êtres mus par une vraie soif de découvrir l’autre en échangeant avec lui. C’est très agréable de voir des enfants qui n’essaient pas jouer à faire l’enfant, ou alors avec un second degré bien dosé. Le deuxième soir, j’ai eu droit à un joli cadeau : ils m’ont lu leurs histoires. Le récit fantastique qu’ils écrivent. Ils maîtrisent si bien les codes harrypotteriens (jeune héros découvre son pouvoir / va dans une école / découvre un univers magique et ses castes) qu’ils en jouent avec une aisance folle. Magie élémentaliste, portes dimensionnelles, architecture, moyens de transports, uniformes : tout est pensé, tout fait sens dans une belle unité.

Être le témoin d’un jeu : un privilège.

Jusque dans le style et la narration, leur travail est admirable. L’histoire est écrite avec un vrai sens de la mise en scène. Le premier chapitre débute sur un dialogue pour nous immerger, puis des explications parsèment les descriptions quand le héros découvre/nous fait découvrir le monde imaginaire… Une découverte faite de dialogues et anecdotes qui rendent l’exploration vivante et amusante. les enfants d'adrienne alix racontent leur histoire à pouhiou Le lendemain, juste avant mon départ, ils ont une remarque — à priori anodine — qui me parle terriblement. Je leur dis l’admiration que je porte à leur compréhension/maitrise des codes et à l’inventivité qu’ils y insufflent. Là ils me répondent de manière très naturelle : « mais tu sais, c’est un jeu… » #Blam. Oui, je sais que c’est un jeu. J’ai juste mis 15 ans à me le rappeler. Je peux pérorer, du haut de mes grandes théories de « je n’écris pas, je digère », ou de « je joue avec mes amis imaginaires et ainsi j’écris mes romans »… Eux ils savent déjà, et n’ont eu aucun besoin de rationaliser tout cela dans des addenda (lis ceux de #MonOrchide et tu comprendras).

J’ai aussi écrit chez Adrienne

Non parce que mine de rien, on a bouclé le chapitre III. Un chapitre où j’ai pas mal joué avec des savoirs acquis lors de mes études, souvent en les démontant. Du coup, premier jour du chapitre 4, je n’ai écrit qu’une pauvre page (genre 600 mots). Il y a un schéma qui commence à poindre : débuter un chapitre est long. Une journée de tâtonnements, de recherches, à user un plancher qui n’est pas le mien en faisant les cent pas… Ben oui : je n’ai pas préparé mon roman à l’avance pour mieux le laisser me surprendre. Sauf que cette fois-ci le temps est resserré. Qu’importe, il me faut le prendre pour laisser éclore ces débuts de chapitre. Un démarrage difficile, diesel, suivi de journées d’écritures prolixes, appliquées et prenantes. J’explose de rire quand je me vois tout triste d’écrire la tristesse d’un personnage. Je tergiverse et trépigne lorsque je ne veux pas écrire une scène qui sera horrible dans sa violence minimaliste et déshumanisée…

Les soirées parisiennes

Bon, vu que ça ne sortira pas des internetz, je peux l’avouer : on s’est rendus au Quadrapéro. Les apéros ouverts tenus mensuellement par la Quadrature du Net. Si je veux faire sérieux, je peux dire que cette soirée est l’occasion de faire un point informel et informatif sur tous les sujets liberticides du moment.

Je peux ajouter que découvrir le BookScanner monté par Benjamin Sonntag est un émerveillement, dont on a envie de voir plein de petits émules tourner constamment à plein régime. 

Je peux aussi dire que découvrir Benjamin, parler avec Sylvain, retrouver Lionel ou observer Jérémie en monsieur Loyal… Bref que voir tous ces gens est une joie, un réconfort pour les petits combats qui nous tiennent à cœur et demandent nos énergies. Mais ce serait éclipser que les pizzas coulent à flots (parfois aidées de quelque liqueur) et qu’on peut finir par entendre quelques paroles de Brel et Brassens s’élever dans les voix…

Et, au lendemain de la fête, on part vers Limoges…
À la fois fatigué et empli.

À dans trois jours,

— Pouhiou.




Chapitre IV — Où notre graphomane fait le coup de la panne

Quand Pouhiou s’arrête à Rennes, il y retrouve des connaissances et donc des occasions d’échanges et de découvertes. Le défi d’écriture est en roue libre mais continue sa trajectoire par à-coups : une fois qu’il a négocié un virage délicat, le vaillant écrivain relance la machine et hop, reprend la route.

Si vous souhaitez retrouver les grandes heures de la geste Pouhiouesque, voici le lien magique. Et n’oubliez pas de lui envoyer un petit message d’encouragement @pouhiou.

J’irai écrire chez vous épisode 4 : Rennes (10-13 novembre)

Le mois dernier j’ai participé à Rennes en Biens Communs, pour une conférence, un atelier d’écriture et une rencontre au CGLBT. Il était impensable que je n’y revienne pas.

Les porcs tiquent entre Brest et Rennes.

Dans le covoiturage intensément breton, nous avons repéré les portiques des radars. Ceux qui se sont fait brûler par des bonnets rouges. Ceux qui tiennent encore debout, avec des gendarmes en faction à leurs pieds. C’est marrant, sur la route on a beaucoup parlé de péages. Les péages d’écotaxe, bien sûr, mais aussi les péages pour l’accès à la culture. Payer un livre ou un CD semble normal, j’achète un objet culturel. Un objet auquel je peux accéder gratuitement en bibliothèque (mais je l’achète malgré tout, tiens donc !).

Or, tout notre rapport à l’appropriation des œuvres s’est construit sur ce principe de posséder un objet-support de l’œuvre. Le droit d’auteur, lui même, fut créé pour favoriser les auteurs-éditeur-imprimeurs-libraires (Beaumarchais était en plus de tout cela un industriel papetier).

Et les péages dans nos têtes

Un fichier ne se possède pas : il se transfère par la copie. Du coup, me faire payer pour accéder à un fichier (epub, mp3, avi…) c’est mettre un mur d’argent entre un roman, un album, un film… et moi. Et vu tous les chatons qui trainent sur YouTube, tous les 10 conseils pour… en embuscade sur facebook, toutes les œuvres accessibles par torrents : je vais naturellement aller là où je circule librement. C’est curieux comme peu de créateurs se souviennent qu’avant d’être payé (et pour l’être) mieux vaut être lu, entendu, vu. Que la monétisation d’une œuvre dépendra directement de son rayonnement, et que c’est donc celui-ci qu’il faut favoriser. Le péage, c’est la meilleure solution pour ne pas être payé, en fait… Comme quoi, si les créateurs étaient un peu plus vénaux, stratèges et opportunistes, ils fonceraient vers la culture libre.

J’ai écrit chez Orianne…

J’ai rencontré Orianne au centre gay, lesbien bi et trans de Rennes, lorsque je suis venu y parler culture libérée dans la culture gay. Elle a adoré papoter sur ces sujets. Et elle a fini par me dire : « si tu reviens à Rennes, passe chez moi ! » Orianne est une jeune femme discrète, classieuse, mais d’une espièglerie et d’une sagacité rares. Chez elle, les livres de psycho et les grands classiques côtoient les BD de Buffy (parce que Josh Whedon c’est le bien). Et puis chez elle, j’ai trouvé la meilleure machine de l’univers intergalactique : l’épluche-vide-tranche pommes.

C’est marrant : Orianne et moi on a pris le temps de se respecter, de se laisser geeker l’un-e l’autre… mais on finissait toujours les soirées à parler et refaire le monde.

…enfin presque.

Je sais bien que ça arrive à tout homme à un moment ou à un autre, mais ça fait bizarre : j’ai eu une panne. Mon premier jour à Rennes, je n’ai pas écrit. Ou quasiment pas : une pauvre relecture où, à force de quelques retouches, j’ai ajouté 270 mots au compteur… bien loin des 1667 quotidiens du défi. Alors je sais que je dois me faire confiance. Je sais bien que c’est l’histoire qui m’impose son rythme, et non l’inverse. Toute exigence est futile, toute résistance une perte de temps. Je n’écris pas, je laisse un roman s’écrire, se dévoiler à moi, en un strip-tease excitant et frustrant… Eh ben on a beau savoir tout ça, il reste la croyance que « je maîtrise ». #EpicFail.

L’histoire avait besoin de se nourrir. J’ai fait des recherches. Plein de détails, de jalons, de repères se sont construits. Le roman avait besoin de faire une pause pour prendre forme. Le lendemain, je fais mon quota. les jours suivants je tourne à 2000 mots. Là j’ai hâte de finir ce billet et m’y remettre.

Retrouver les ami-e-s

C’est compliqué de trouver le temps pour tout faire. Écrire les scènes du roman. Écrire ces billets de blog, ce journal de bord. Organiser les trajets et voyager. Parler, échanger avec mes accueillant-e-s. Et retrouver des gens. Mais ça se goupille. Un restau avec Yann, Antonin, Orianne et Camille (la bande du CGLBT de Rennes). Un thé avec miss @Auregann, la wikipédienne qui m’a permis de venir sur Rennes le mois dernier. La découverte de son boss, de ses amis, et de MuséoMix. Puis une soirée finale avec le scooby-gang du CGBLT immortalisée par cette photo.

Ce ne sont pas de simples lecteurices, juste un prénom sur une dédicace. Ce sont des gens avec qui j’ai parlé, bu, refait le monde. Des gens que j’aime et dont je sais qu’illes m’apprécient. Je me demande combien d’auteurs peuvent dire ça… Mais moi, perso, je kiffe !

Et recevoir d’autres dons.

L’épisode 3 de mes aventures a dû donner des idées. J’ai reçu un don par paypal, et un en liquide, de la main à la main. Recevoir un billet comme don, c’est très concret. Étrangement, à ce moment là, le moraliste en moi me dit « tu devrais être gêné ». Ce moraliste croit que ça relève de la mendicité, et la condamne. Ce serait renier l’échange véritable qui sous-tend ces gestes, renier l’envie de soutenir une démarche, une œuvre. J’apporte des histoires : que ce soit celles que j’écris ou celles que je vis et fait vivre, les dons viennent encourager ces histoires à grandir. Croire que ça relève d’une « mendicité immorale » c’est croire que produire des histoires, qu’expérimenter d’autres façons de faire/vivre/interagir n’est pas un « vrai travail ». C’est aussi croire que l’argent salit l’échange, donnant une importance grandiloquente et morale à un simple outil : le fric.

Quand je reçois des dons, je ne suis pas gêné : je suis reconnaissant. Reconnaissant que mes propositions entraînent des élans de générosité. Heureux de voir que le courant est passé, qu’on a envie que ça continue. Comme quand je reçois un mot, un commentaire. Donc : merci. Et si tu veux donner des sous, fais-le à Framasoft. Frama travaille à défendre et soutenir des initiatives aussi tarées que les miennes, parce que ce sont les fous qui changent le monde. Or il est grand temps qu’on apporte un peu plus de Libres dingueries dans nos vies et celles de la famille Michu. Bref : on a besoin de sous pour perpétuer et améliorer les projets en cours, donc n’hésite pas : http://soutenir.framasoft.org !

À dans 3 jours pour conter des soirées parisiennes,

— Pouhiou.




Chapitre III — Post-it, grands maîtres et menue monnaie

Toujours plus à l’ouest, notre écriveur de fond est de passage à Brest, où l’on trouve par ailleurs des initiatives et des activités libristes bien intéressantes.

Le monde qui l’entoure, le Pouhiou le reluque et le relooke, il fait son équi-libriste sans fil et sans filet entre les rencontres roboratives, les jouissances de l’écriture et les fins de mois difficiles qui commencent le 10 novembre. Accompagnez Pouhiou, envoyez-lui de gros poutous et de petits touittes, encouragez-le tandis qu’il en est bientôt à mi-parcours de son défi graphomane.

Lisez-le.

J’irai écrire chez vous épisode 3 : Brest (7-10 novembre)

3 jours à Brest… c’est un peu frustrant tant ça passe vite. Les rencontres, les échanges sont si riches que j’ai parfois du mal à trouver le temps d’écrire. Mais mine de rien, on avance…

5 heures de blabla entre Rouen en Brest : check.

Pour aller de Rouen à Brest, j’ai retrouvé le bon vieux covoiturage. Avec la question qui tue : « qu’est-ce que tu vas faire là bas ? » — Je vais écrire. Mon 3e roman. Qui est libre de droits. Et je passe novembre à l’écrire chez les gens… Le voyage avec Eric, Cynthia et les autres fut une longue discussion passionnante : est-ce que le Libre, si ça se généralise, ça peut marcher ? Et là on rêve du monde de demain, genre relooking sociétal. Sous la pluie entre Rouen et Brest. On a envie d’y croire. On a peur des abus. On découvre que nous on n’a pas envie d’abuser. On réalise que certains (genre Apple) abusent. On s’échange des séries à télécharger, aussi. Et on partage la voiture d’Eric. C’est marrant comme parfois, le monde de demain s’invite dans aujourd’hui.

J’ai écrit chez Moosh

pouhiou chez moosh Arrivé à Brest, je suis rejoint par Moosh et Igor. Qui crient « Ninjaaa ! » pour traverser le passage piéton me séparant d’eux. Avec ses longs cheveux et sa frange encadrant son visage, Moosh pourrait avoir l’air d’une maîtresse d’école. Si ce n’était la joie pure, la gourmandise et la malice qui l’habitent constamment. Igor, lui, est un matou à la jolie barbe. Moosh et Igor, chez eux, illes se parlent avec des voix kawaï. Ils ont un panneau Keep Calm and Eat Cupcake et un grrros chat qui semble avoir suivi le conseil. Et tout leur décor est à l’avenant : coloré, épicé de petites touches qui, simplement, mettent en joie. Moosh et Igor semblent jouer à vivre, mais jouent avec le sérieux d’enfants espiègles et appliqués. Du coup, je leur ai fait des Outrageous Cookies.

On vit entouré de créativité.

Plus je voyage, et plus je rencontre des gens qui, à leur niveau, parfois même sans s’en rendre compte, créent. Peut-être que ça vient de moi. Il est possible que je n’attire que de dangereux esprits fertiles qui goupillent du code, des images, des histoires (et autres artisanaleries) dans leur coin. Mais n’empêche. C’est beau à voir. Les amis étudiants en cinéma. Le pote webdéveloppeur et photographe (résultat à suivre). La Moosh qui travaille à son roman à grand renfort de post-it sur de grandes feuilles. Moosh, elle, écrit comme un besoin : un besoin aussi impitoyable que la hauteur des barres qu’elle veut atteindre. Écrire c’est un jeu, et jouer est une affaire sérieuse. Moi, j’ai juste hâte de la lire.

Qui me dira comment qu’on fait ?

Moosh me fait découvrir des grands noms du story-telling. Des théoriciens qui ont passé beaucoup d’énergie à développer leur méthode pour expliquer le racontage d’histoire. La scénarisation. La caractérisation. Je sais que ce sont des outils passionnants. Quand j’ai fait du théâtre, j’ai fait le tour des méthodes : Jouvet, Stanislavsky, Artaud, Boal… Et je n’y arrive toujours pas. À chaque fois que je lis une théorie, je ne vois qu’un enfermement. Un angle toujours trop fermé, une formalisation forcément étriquée. Parce que personne n’est capable de couvrir toutes les façons de créer. Car aucune rationalisation n’a assez de mots et de concepts pour y parvenir. Un metteur en scène / prof de théâtre me disait : « on n’enseigne que soi ». Du coup, les maîtres qu’on présente comme des autorités : ça m’énerve. C’est marrant, c’est justement le thème du livre III : grands maitres et petits disciples.

Avancées…

Le livre III se porte bien. Je viens de finir le chapitre 2 (sur huit) et je suis vraiment surpris par les formes qu’il prend. Il visite l’histoire des NoéNautes à contre-courant, et c’est assez jouissif. Je sais maintenant que le premier jet ne sera probablement pas achevé au 30 novembre. Je crois réussir à écrire 50 000 mots, mais je vois que ce roman sera plus long. J’essaie de prendre le temps, mais le temps de vivre et le temps d’écrire ne sont pas séparables : ils se nourrissent. Et c’est là le nerf de la guerre : le temps. Du temps libéré par l’argent, comme toujours. On devrait pouvoir avoir le temps de vivre, d’écrire, d’échanger… sans qu’une journée ne coûte forcément X heures de SMIC. Mais non. Le revenu de base n’est pas à l’ordre du jour. Quoiqu’il y ait des citoyen-ne-s d’Europe qui croient que ça peut changer.

…et sous.

Donc je regarde le compte en banque. Il me reste 200 € (et le découvert ˆˆ) pour finir le mois. Trajets inclus. Ooops. Et là je reçois un email qui fait chaud au cœur. Un mec qui souhaite me faire un don, mais ne veut pas passer par des intermédiaires type paypal ou Flattr. Qui souhaite me faire un virement. Je lui envoie mon RIB. Et je découvre peu après qu’il m’a soutenu comme si tu achetais 30 livres des NoéNautes. Juste parce que (à l’instar de Ploum qu’il te FAUT suivre) j’expérimente des manières de se libérer de l’emploi. Voilà une aide inespérée qui tombe à point ! Ça et tous les flattr reçus le mois dernier (encore une fois : essaie flattr, teste le web payant et la reconnaissance directe !), et je suis paré pour continuer !
N’oublie pas que tu peux aussi (et surtout) faire un don à Framasoft, qui offre un cadre, un soutien et une voix aux expériences comme les miennes.
Moi, je file écrire et découvrir le chapitre III !

À tout biental,

— Pouhiou. keep clam eat a cupcake




Chapitre II — Où Pouhiou touche le nœud du truc

Avant de poursuivre vers l’ouest, le vrai, son périple scriptural et libérateur, le sémillant Pouhiou est passé par Rouen. Dans le sprint final, il a disposé facilement du régional de l’étape, un néophyte du nom de Flaubert, sponsorisé par Charpentier, Le voici maintenant moulinant du mot par milliers, un peu inquiet tout de même à l’idée de ne pas tenir la cadence. Mais qu’importe ! Retrouver un forçat de la route qui comme lui s’est donné le défi du nanowrimo lui a permis de comprendre que compter les mots n’est pas très sérieux et que beaucoup d’auteurs sont encore capables de dire : « Madame Marquet, c’est moi ».

J’irai écrire chez vous épisode 2 : Rouen (4-7 novembre)

Me voilà tout juste parti de Rouen, arrivé à Brest. Rouen, où j’ai été hébergé chez un NaNoteur : autant dire que les échanges furent riches.

J’ai écrit chez Mathias

La première chose qu’on remarque, chez Mathias, c’est son rire. Un rire franc, communicatif, un rire toujours content de se faire surprendre par la vie. J’ai connu Mathias chez Voisine (celle que je remercie à la fin de #MonOrchide). Il y couchsurfait pour pouvoir assister à un concert de Mars Volta. J’y connais rien en musique, mais je leur ai fait des pancakes avec de la pâte d’Ovomaltine. Et ça, ça facilite les échanges. Depuis, on se côtoie sur Facebook. On partage beaucoup des liens de féministes, LGBT, et autres infos qui font bondir les pensées bleu marine. Le 28 octobre, quand j’annonce que je me lance dans un NaNoWriMo, Mathias dit « cool ! on s’inscrit où ? » Et, sur un coup de tête, sans avoir la moindre foutue idée de où il va, ce mec se lance dans l’écriture d’un roman. Faut avoir une sacrée paire d’ovaires, quoi…

couverture roman de roussel

Quand je n’écris pas, je parle.

C’est un peu mon sport favori, et en côtoyant l’univers de Mathias, j’ai pu le pratiquer intensément. J’ai échangé avec Ben, dans une brasserie estudiantine, sur les radios associatives, les expériences prostatiques et les mises en scène. J’ai discuté avec JB (co-animateur de l’émission de musique de Mathias sur la radio Campus rouennaise sur la culture libre, le rôle prescripteur des bibliothécaires, les envies de mort et de bromure (sur lesquelles j’ai écrit deux pièces de théâtre librement diffusées sur http://pouhiou.com). Avec Anka, on a parlé de Roumanie, d’éducation, d’exigence et de chatons. On a rencontré Lutine, autre NaNoteuse rouennaise, qui se jugeait trop et n’arrivait plus à écrire. On lui a lancé le défi d’écrire une bonne grosse page de merde… Elle a échoué : ce qu’elle a écrit était bon. Et avec Mathias, on a partagé nos expériences de NaNoteurs…

C’est quoi être auteur ?

On avait tous deux déjà trois jours dans les pattes. Et Mathias commence à m’expliquer qu’il ressent déjà ses personnages lui échapper. Un en particulier, qui ne devait être que secondaire, une sorte de faire-valoir à son héroïne, mais qui prend de l’importance en lui et s’accapare le chapitre suivant. Moi, les voix de mes persos m’habitent. J’imagine des dialogues sous la douche puis je réalise où je suis et me demande si je n’ai pas vidé le ballon d’eau chaude. Plus tard, Mathias m’explique que le libre, c’est pas pour lui. Qu’il avait trop peur que l’on touche à son œuvre. Ça me semblait pas cohérent avec le côté avenant du gars, donc je le questionne…

— Mais tu as vraiment l’impression que c’est toi qui écris, que ça se fait dans l’effort ?

— Non… Je mets mon casque, de la bonne zique et je laisse le truc couler. J’ai un peu l’impression que l’histoire est par là et que j’en suis le scribe.

— Du coup, est-ce que ce que tu écris parle de toi ? Est-ce que ton histoire définit quel auteur, quelle personne que tu es ?

— Ah ben non, en fait… C’est juste une histoire que j’ai écrite, pas un morceau de moi…

Et là on touche le nœud du truc. Je comprends tous les auteurs qui sont d’un protectionnisme féroce avec leurs œuvres. Qui ont peur, qui ont des peurs, tant et si bien qu’ils arrivent à accepter la position de victime et celle de dragon-sur-son-tas-d’or. Des postures que le système, crée par et pour les industries de la culture, nous font prendre de manière insidieuse. Des poses que j’ai prises tant que j’ai eu peur, que j’ai eu des peurs. Des peurs qu’en touchant à mes histoires, mes contes, mes écrits… on touche à ma personne. Alors qu’aujourd’hui, ça n’a plus rien à voir…

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Le piège du WordCount

C’est bien beau de parler, rencontrer, échanger… D’aller voir Rouen qui est une ville magnifique, emplie de colombages et de toits en tuiles… Mais c’est pas ça qui va écrire le livre III. Alors j’écris. 2300 mots le lundi pour finir le premier chapitre qui développe une ambiance paisible très étrange. 1500 mots le jour suivant, ce qui me fait culpabiliser, un peu : je suis en dessous des 1667 quotidiens indispensables. 2200 mots le mercredi : ouf, on remonte et passe au dessus de la barre des 10 000, du cinquième. Sauf que Mathias est ingénieur en maths. Et que les maths sont impitoyables. On calcule : 8 chapitres d’environ 8000 mots. Je n’écrirai pas lors du Capitole du Libre (22-23 novembre sur Toulouse) ni lors des Journées Méditerranéennes du Logiciel Libre (29-30 novembre). Du coup, 64 000 mots en 26 jours, il faut écrire 2500 mots par jour (à une vache près, les maths c’est pas une science exacte). J’en suis méga loin. #MicroDéprime. C’est là que tu réalises que compter les mots, ce doit juste être un plaisir. Pas une tâche. J’écrirai ce que je peux. Si mon roman s’achève en décembre : ce n’est pas grave. Je ferai comme tous les auteurs, comme tous les NaNoteurs : de mon mieux.

Pouhiou regonflé. Des bisous, des mercis, une caresse à Kali (leur chatounette) et hop !

Co-voiturage direction Brest ! On se retrouve dans 3 jours ?

— Pouhiou.

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