L’ADULLACT, l’AFUL et Framasoft soutiennent l’amendement limitant les racketiciels du groupe GDR défendu par Mme Fraysse

21/06/2013 18:20 (Dernière modification : 21/06/2013 19:51)

Dans le cadre du projet de loi relatif à la consommation, L’ADULLACT, l’AFUL et Framasoft apportent leur soutien, sans réserve, à l’amendement 711 déposé par le groupe GDR et défendu par Jacqueline Fraysse. Cet amendement va dans la bonne voie pour mettre un terme au scandale des racketiciels, c’est-à-dire à la vente forcée de logiciels non demandés lors de l’achat de matériel informatique.

Les associations du logiciel libre appellent donc tous les députés, de toute tendance politique, à soutenir vivement cet amendement !

Au dernier épisode…

À l’automne 2011, le gouvernement de François Fillon avait proposé un projet de loi de protection du consommateur. Plusieurs députés avaient proposé des amendements censés apporter une meilleure protection du consommateur face aux pratiques commerciales déloyales de vente forcée des logiciels inclus dans le matériel informatique. Comme l’AFUL l’avait souligné à l’époque, le remède était pire que le mal puisque après une lecture juridique attentive, ces textes aboutissaient à un résultat totalement opposé au but recherché.

Lors des débats, les députés avaient bien identifié les faiblesses juridiques des uns et la dangerosité des autres et avaient finalement laissé la législation en l’état afin de réfléchir à de meilleures rédactions pour la seconde lecture. Seconde lecture qui n’a jamais eu lieu suite au retrait du texte par le gouvernement.

Aujourd’hui, un nouveau projet de loi de consommation est présenté à la nouvelle législature. Forts de l’enseignement tiré des débats de 2011 et des arguments issus des divers bancs, le groupe Gauche démocrate et républicaine sous l’impulsion de Jacqueline Fraysse, députée de la 4e circonscription des Hauts-de-Seine, propose un amendement ayant pour objectif de mettre fin aux pratiques commerciales déloyales de l’informatique grand public, dans le respect de la législation européenne.

Analyse de l’amendement proposé

L’amendement propose d’ajouter des obligations d’informations à la charge des professionnels dans un nouvel article L. 113-7 (l’article L. 113-6 étant créé dans l’article 54 du projet de loi) du Code de la consommation.

Après l’article L. 113-6 du code de la consommation, est inséré un article L. 113-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 113-7. – Le matériel informatique proposé à la vente avec des logiciels intégrés constitue une vente par lots. »

« Tout professionnel vendeur de matériel informatique fournissant des logiciels intégrés doit, avant tout paiement du prix par le consommateur, l’informer par voie d’affichage des caractéristiques essentielles et du prix public toutes taxes comprises du lot ainsi que du prix de chacun des logiciels composant individuellement le lot. L’indication de ces prix doit figurer sur la facture remise au consommateur. »

« La violation de ces dispositions entre dans le champ d’application de l’article L. 122-3. ».

Vente par lots

Tout d’abord, l’alinéa 1 aborde la question de la vente par lots en précisant désormais expressément que le matériel informatique vendu avec des logiciels préchargés constitue une vente par lots.

En effet, si la jurisprudence applique depuis longtemps ce principe (notamment depuis un arrêt de 2005 de la Cour de cassation), il est régulièrement contesté devant les tribunaux, forçant les consommateurs qui estent en justice à expliquer encore et toujours pourquoi matériel et logiciels constituent deux produits parfaitement distincts (l’un est un bien meuble, l’autre une prestation de services). En précisant désormais clairement qu’il s’agit d’une vente par lots, la réglementation spécifique à l’information due par les professionnels sur les lots, issue de l’article 7 de l’arrêté du 3 décembre 1987, s’appliquera.

Obligations d’information

L’alinéa 2 détaille les obligations d’information nécessaires : informer le consommateur par voie d’affichage des caractéristiques essentielles des produits proposés dans le lot.

Les caractéristiques essentielles sont l’ensemble des éléments permettant au consommateur d’effectuer un choix éclairé : par exemple, préciser que le matériel et les logiciels peuvent être vendus séparément, que les logiciels ne sont que des options non obligatoires ou encore que les logiciels fournis sont payants. S’agissant du prix des produits, il devra fait l’objet d’une information précise, non seulement pour le prix des produits composant le lot, mais également le prix de chacun des éléments du lot. La facture qui sera remise au consommateur comprendra donc le prix détaillé de tous les produits. Les procès initiés par les consommateurs ont mis en évidence que le prix des logiciels fournis préchargés, jusque là vendu de force, pouvaient représenter plus de 30 % du prix de la machine seule.

Sanctions

Le 3e alinéa aborde la question des sanctions. La directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 rappelle, au paragraphe 29 de son annexe 1, que la vente forcée est une pratique commerciale déloyale « en toutes circonstances » c’est-à-dire qu’il suffit théoriquement à un juge de constater que le professionnel a exigé un paiement sans commande expresse et préalable du consommateur pour que la pratique soit déclarée déloyale. Cette disposition a été intégrée dans le Code de la consommation par les lois des 3 janvier et 4 août 2008. Les textes ont d’ailleurs été remaniés avec la loi Warsman de 2011 qui a proposé une lecture plus claire de l’article L. 122-3 du Code de la consommation. Cet article prévoit des sanctions civiles de nullité du contrat avec une obligation de remboursement, ainsi que des sanctions pénales. Le texte est donc parfaitement adapté à la situation et permet aux consommateurs d’agir autant par la voie civile que par la voie pénale et d’espérer avoir ainsi du poids face aux entreprises concernées, le plus souvent multinationales.

Voter ce texte malgré les pressions

C’est ce texte qui doit être favorisé et que les députés sont encouragés à adopter massivement. Il faut tout de même rappeler qu’à l’occasion du précédent projet de loi consommation de 2011, des députés s’étaient plaints des pressions qu’ils subissaient pour ne pas voter ces textes favorables aux consommateurs et le député de la 5e circonscription d’Isère, François BROTTES, avait clairement dénoncé cette situation inadmissible. Sous la présente législature, c’est aujourd’hui que se mesurera le courage politique et l’engagement des députés pour l’intérêt général.

L’intérêt général d’abord !

L’intérêt du consommateur et l’ouverture du marché à tous les acteurs, notamment français, étant la priorité des élus de la nation, nous sommes confiants dans le fait que l’ensemble des députés verront le point d’équilibre atteint par cet amendement et qu’ils le soutiendront unanimement.

Cyprien Gay, membre du groupe de travail « non aux racketiciels » de l’AFUL indique « Voilà 15 ans que nous interpellons les politiques de toutes tendances sur cette question. Depuis le début des années 2000 ce sujet est évoqué à l’Assemblée. Cependant, la pression des éditeurs qui bénéficient de cette vente forcée a réussi jusqu’ici à conserver un statu quo qui leur est favorable, avec la complicité inexplicable des divers gouvernements. »

Christophe Masutti, président de Framasoft, déclare « Il est est plus que nécessaire de clarifier les pratiques de vente liée qui maintiennent une tension évidente entre d’un côté le droit du consommateur à l’information et de l’autre côté le recours providentiel aux directives européennes qui empêche les États membres d’interdire les “offres conjointes” assimilées à une pratique commerciale comme une autre, bien que la “vente forcée” soit, elle, condamnable. Ceci constitue un frein artificiellement entretenu au déploiement du formidable potentiel compétitif du logiciel libre. »

Dimitri Robert, administrateur de l’AFUL souligne « Les logiciels vendus de force avec les matériels informatiques sont édités hors d’Europe par des entreprises réputées pour leur évasion fiscale et l’évitement à l’impôt sur leurs activités en France. Il n’y a donc aucun intérêt pour la France ou pour l’Europe d’entretenir leur rente sur le dos du consommateur Français. »

Également interrogé, l’avocat de l’AFUL, Maître Frédéric CUIF, estime que « Il s’agit d’un texte de consensus qui devrait à la fois permettre une meilleure information des consommateurs mais aussi leur offrir la possibilité de dénoncer moins difficilement ces pratiques commerciales déloyales devant les tribunaux. Bien sûr, il faudra toujours passer par un juge pour faire cesser la pratique commerciale déloyale de vente forcée, mais c’est un premier pas évident en faveur des consommateurs en attendant une véritable prise de conscience nationale sur la question. »

Laurent Séguin, président de l’AFUL conclut : « Il est temps de faire cesser cette situation de concurrence faussée où l’on impose, depuis trop longtemps, un choix uniforme aux consommateurs. Des acteurs européens et français portent d’ores et déjà des solutions concurrentes crédibles et innovantes, notamment sous licence libre, aux logiciels vendus de force avec du matériel informatique. Malheureusement, ces racketiciels les empêchent d’accéder au marché sur un pied d’égalité. Aujourd’hui, avec ces textes justes et équilibrés, les parlementaires ont l’opportunité de faire triompher enfin l’intérêt général en faisant en sorte qu’en France, les effets de ce hold-up planétaire soient amoindris. »

À propos de l’Adullact (http://adullact.org/)

Née fin 2002, l’Association des Développeurs et Utilisateurs de Logiciels Libres pour les Administrations et les Collectivités Territoriales s’est donnée pour tâche de constituer, développer et promouvoir un patrimoine commun de logiciels libres métiers, afin que l’argent public ne paie qu’une fois. L’Adullact dispose d’une équipe permanente, pour encourager et aider les membres à mutualiser leurs développements sur la forge adullact.net, qui compte aussi les projets de la forge admisource. Structure unique en son genre, l’Adullact était accréditée pour le Sommet Mondial de Tunis.

À propos de l’AFUL (http://aful.org/)

Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres, l’AFUL a pour principal objectif de promouvoir les logiciels libres ainsi que l’utilisation des standards ouverts. Ses membres, utilisateurs, professionnels du logiciel libre, entreprises ainsi que d’autres associations, sont issus d’une dizaine de pays ou de régions francophones (France, Belgique, Suisse, Afrique francophone, Québec).

Interlocuteur de nombreux médias, l’AFUL est présente sur nombre de salons, conférences et rencontres. Elle agit notamment activement contre la vente liée (site Non aux Racketiciels, comparatif bons-vendeurs-ordinateurs.info et bons-constructeurs-ordinateurs.info), pour l’interopérabilité (membre de l’AFNOR, participation aux référentiels d’interopérabilité et d’accessibilité de la DGME, site formats-ouverts.org, etc.), intervient sur les problématiques du droit d’auteur ainsi que pour la promotion de l’utilisation de logiciels et ressources pédagogiques libres pour l’éducation entendue au sens large.

À propos de Framasoft (http://framasoft.org/)

Issu du monde éducatif, Framasoft est un réseau d’éducation populaire consacré principalement au logiciel libre et s’organise en trois axes sur un mode collaboratif : promotion, diffusion et développement de logiciels libres, enrichissement de la culture libre et offre de services libres en ligne.  Pour plus d’informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l’adresse suivante : http://www.framasoft.org/ et nous contacter par notre formulaire de contact http://contact.framasoft.org/

 

Contacts presse :

  • Laurent Séguin, président de l’AFUL, laurent.seguin@aful.org +33 (0)6 63 94 87 16
  • Me Frédéric Cuif, avocat au barreau de Poitiers, +33 (0)5 49 88 70 61
  • Cyprien Gay, membre GdT Racketiciel, cyprien.gay@aful.org +33 (0)6 61 89 49 82
  • Alexis Kauffmann, fondateur et chargé de mission Framasoft, aka@framasoft.org +33 (0)6 95 01 04 55
  • Relations presse – AFUL : presse@aful.org



Et si l’on pouvait enfin choisir son système d’exploitation ?

Est-ce le moment pour OSchoice.eu ?

BrowserChoice.eu, aussi appelé ballot screen ou écran de choix du navigateur, est un site web de Microsoft permettant de choisir son navigateur Web, lancé en février 2010.

Il est le résultat d’un procès intenté par l’Union européenne à Microsoft pour abus de position dominante.

À l’installation d’un système d’exploitation de Microsoft dans l’Union européenne, ou par le biais d’une mise à jour pour ceux installés avant l’apparition de BrowserChoice.eu, une fenêtre s’ouvre (une icône sur le bureau apparaît si elle est fermée), affichant une page web permettant de choisir parmi 12 navigateurs.

Et si, mettant fin une fois pour toute à la vente liée, il en allait de même pour les systèmes d’exploitation et qu’on nous donnait le choix entre Windows, Mac ou GNU/Linux au démarrage de l’ordinateur que nous venons d’acheter ?

Ceci est la traduction d’un article de Jacopo Nespolo paru dans FreeSoftwareMagazine
Traduction : Lolo le 13, Cédric Corazza, e-Jim, Eric/DonRico

Est-ce le moment pour OSchoice.eu ?

Dans mon article précédent, j’ai exposé l’histoire de la décision du Commission européenne à propos de la concurrence contre Microsoft Corporation qui a conclu par la mise en ligne du site browserchoice.eu pour permettre au consommateur de choisir librement son navigateur. Cependant, ce n’est pas suffisant. L’origine du problème se trouve dans le fait que la plupart des PC du marché sont vendus liés avec un seul système d’exploitation : Microsoft Windows.

Je vais tenter d’analyser comment dans cet environnement de concurrence quasi inexistante un site tel que OSchoice.eu pourrait changer la donne.

Introduction

Même si j’apprécie les efforts que la Commission a faits en vue de libérer le marché des pratiques anti-concurrentielles, je trouve que dans son approche du marché des ordinateurs personnels, elle a fait une grosse erreur : elle a cherché une solution aux effets, sans se préoccuper de la cause. Selon moi, le problème ne réside pas dans le fait que Windows Media Player ou Internet Explorer soit incorporé dans Windows, mais bien que Windows lui-même soit incorporé dans presque chaque PC. En six années d’utilisation de GNU/Linux comme seul système d’exploitation, j’ai rencontré beaucoup de difficultés et de frustrations à vouloir acheter un ordinateur —et c’est particulièrement le cas pour les portables et les netbooks— sans payer une licence Windows.

Jusqu’à présent, la Commission européenne a cherché une solution aux effets, sans se préoccuper de la cause

Il est intéressant de noter qu’un juge de la Cour de Florence, en Italie, a donné gain de cause à un utilisateur qui réclamait depuis longtemps à HP le remboursement d’une licence Windows qu’il n’utilisait pas. Des jugements similaires ont été rendus en France contre Asus et Acer1 et dans d’autres pays. Je ne suis pas certain que ces décisions soient encore en application aujourd’hui, car Microsoft a depuis mis à jour son Contrat de Licence à l’Utilisateur Final (CLUF). En effet, le CLUF de Microsoft Windows 7 indique qu’en cas des désaccord sur les termes du contrat, l’utilisateur doit « contacte[r] le fabricant ou l’installateur pour connaître les modalités de retour des produits (…) [et se] conformer à ces modalités qui peuvent restreindre vos droits ou exiger que vous retourniez l’ensemble du système sur lequel le logiciel est installé »2. Il faut également souligner que le prix réel que le consommateur paie pour une licence OEM de Windows est inconnu, puisque les factures de PC ne reprennent pas le prix des différents composants. De telles conditions de licences sont une grossière violation des droits des consommateurs, et ont pour conséquence l’impossibilité de fait d’acheter un grand nombre de modèles de PC sans souscrire également à une licence Windows.

L’offre des détaillants en ordinateurs portables sans Windows pré-installé est extrêmement limitée et souvent restreinte à des catégories très inférieures (les ordinateurs anciens et bon marché) et très hautes du marché (les ordinateurs chers). Parmi les 571 ordinateurs portables disponibles sur le site internet de la boutique italienne eprice.it, à la date du 1er août 2011, seules 13 machines sont vendues sans le système d’exploitation Windows, c’est-à-dire avec GNU/Linux, Free Dos ou même sans aucun système préinstallé. En d’autres termes, seuls 2,3% des ordinateurs portables disponibles sur ce site marchand sont vendus sans Windows pré-installé.

D’aucuns pourraient arguer que l’offre de 2,3% des grands magasins est plus ou moins en rapport avec la part de marché de 2,8% des systèmes d’exploitation autres que Windows et Mac OS3. Je rejette cette critique car le faible niveau d’adoption peut très bien être une conséquence —et non la cause— de ne pas offrir de choix pour les systèmes d’exploitation.

De plus, Microsoft a récemment annoncé que le futur Windows 8 nécessiterait de la part des fabricants de mettre en œuvre le démarrage sécurisé pour participer à son programme de certification5. Cela pourrait potentiellement rendre les choses vraiment compliquées pour les inconditionnels de Linux qui achètent un ordinateur avec Microsoft Windows et qui installent par dessus leur distribution préférée, car l’ordinateur pourrait être verrouillé par le vendeur pour n’exécuter que le système d’exploitation avec lequel il a été vendu.

Un écran de choix pour les systèmes d’exploitation

Pour ces raisons, j’affirme qu’il est nécessaire de continuer ce que la Commission européenne a commencé, et d’exiger de la part des vendeurs le respect de notre droit de consommateur à choisir le système d’exploitation qui nous convient.

Je ne suis pas informaticien, et par conséquent pas plus un expert dans le fonctionnement des ordinateurs et des systèmes d’exploitation, mais je suis certain que la plupart d’entre nous savent lancer une distribution à partir d’un Live CD. Préparer un CD ou une clé USB «?bootable » est une tâche triviale grâce aux programmes tels que UNetbootin6. L’installation d’images peut varier grandement en taille, d’une centaine de Mo pour les installations réseau qui téléchargent des composants additionnels sur Internet, à 600 Mo pour les images CD complètes, et à plusieurs Go pour des images DVD complètes. Nous savons aussi très bien utiliser des gestionnaires de démarrage comme GNU Grub pour utiliser des PC avec plusieurs systèmes d’exploitation, ce qui est particulièrement utile quand nous sommes contraints d’utiliser un système d’exploitation spécifique (ou une de ses versions) en raison de problèmes de compatibilité d’une application.

Alors, pourquoi ne pas rassembler tous ces ingrédients et créer un « Écran de choix pour les systèmes d’exploitation » ? Imaginons pour une fois que nous entrons dans un magasin, que nous nous promenons dans les rayons pour voir les différents modèles de PC et que nous choisissons la machine que nous recherchions. Le vendeur nous félicite pour notre choix et propose de nous aider à installer le système d’exploitation : « C’est facile et cela ne prendra pas plus de 15 minutes ». Nos allumons le PC ensemble, et l’écran de choix s’affiche, ce qui pourrait ressembler à la maquette de l’illustration 1. En deux clics, et éventuellement l’achat du logiciel par carte bancaire sur Internet ou sur la même facture que le matériel avec le code d’activation, l’installation automatique s’exécute et se termine en quelques minutes. Nous remettons ensuite tout dans la boîte et nous retournons joyeusement chez nous. Les consommateurs les plus courageux remercient gentiment le vendeur et choisissent d’installer le système d’exploitation dans le confort de leur domicile.

Maquette de l'écran de choix pour les OS

Illustration 1 : Maquette de l’écran de choix des systèmes d’exploitation. Toutes les marques apparaissant sur cette image appartiennent à leurs propriétaires respectifs.

L’environnement « live » minimal, pourrait nous permettre de sélectionner le système d’exploitation dans la liste, de la même manière qu’un CD d’installation Debian nous propose l’option de choisir notre environnement de bureau. Les images d’installation pourraient être facilement stockées sur le disque dur : l’espace nécessaire à un ensemble de systèmes d’exploitation n’excéderait pas quelques Go, car des installation par le réseau suffiraient.Cet espace est en adéquation avec celui qu’utilisent la plupart des vendeurs pour les partitions de restauration que nous trouvons sur la majorité des PC. Les magasins pourraient aussi avoir un dépôt local pour des fichiers supplémentaires nécessaires destinés à terminer l’installation et accélérer le processus.

L’écran de choix pourrait être supprimé après installation ou conservé pour plus tard, au cas où le consommateur déciderait d’essayer un nouveau système d’exploitation. Les achats de logiciels ou les contrats d’assistance pourraient être affichés à l’écran et réglés au moyen de transactions électroniques.

Réponse et impact du consommateur sur le marché

Bien sûr, ce que j’ai imaginé ne peut se réaliser en une nuit, et aurait un impact important sur les relations entre les consommateurs et les revendeurs et fabricants. Plus de deux décennies avec un seul système d’exploitation ont entraîné une formidable inertie des consommateurs. Ceci amplifierait certainement « l’embarras du choix » qu’un tel écran apporterait, c’est-à-dire le dilemme d’avoir trop d’options à la fois. C’est un problème que les utilisateurs de logiciels libres connaissent bien, avoir à choisir parmi des centaines de distributions GNU/Linux, une dizaine d’environnements de bureau et tant de programmes d’alternatifs disponibles pour chaque tâche.

Il est tout à fait probable que le déploiement initial embêterait un peu les consommateurs qui ont été habitués à avoir leur nouveau PC prêt à utiliser après l’achat, sans étape intermédiaire. Il est probable qu’au début, seuls quelques-uns essaieraient quelque chose de différent, mais ils serviront de base à la constitution d’une masse critique. En fait, ces consommateurs qui seront contents de leur découverte de systèmes d’exploitation alternatifs inviteront beaucoup d’autres à franchir le pas de manière plus avisée.

Le déploiement initial embêtera sûrement les consommateurs

L’introduction de l’écran de choix pour les systèmes d’exploitation serait une autre étape majeure vers la protection des droits des consommateurs : pour la première fois les consommateurs sauraient exactement ce qu’ils paient pour le paquet de logiciels installés sur leur ordinateur. Avoir la possibilité de comparer les systèmes d’exploitation qui nécessitent un droit d’utilisation considérable à d’autres systèmes moins chers ou gratuits permettra aux consommateurs de se rendre vraiment compte de ce pour quoi ils paient, et plus important, de ce pour quoi ils veulent payer. C’est un point essentiel par rapport à l’écran de choix des navigateurs, où les logiciels proposés sont pour la plupart gratuits.

Les vendeurs de matériel et de logiciels devront investir dans l’information de leurs clients sur les avantages et les problèmes qui pourraient apparaître en choisissant un système d’exploitation plutôt qu’un autre. Les vendeurs devront être informés des différences entre les systèmes d’exploitation et, en écoutant les besoins de leurs clients, les conseilleront en restreignant les choix à une ou deux options, tout en rappelant qu’il est possible de revenir sur ce choix plus tard.

La redistribution des clients parmi les acteurs du marché conduira à plus d’investissements dans la recherche et le développement de nouvelles technologies, car cet environnement concurrentiel plus sain permettra une vraie concurrence basée sur les mérites. De plus, la présence de plusieurs acteurs sur le marché accélérera l’interopérabilité, car la compatibilité d’une application avec plusieurs systèmes d’exploitation deviendra un facteur important à considérer pour être capable d’atteindre un grand nombre de clients. Beaucoup d’emplois pourraient être créés par une telle vitalité du marché car l’interopérabilité et les standards pourraient potentiellement réduire les coûts de développement.

Il y aura bien sûr un coût initial à prendre en compte associé à la correction des problèmes de compatibilité existants et des accords sur des standards communs pour les développements futurs. Une partie considérable de ce problème est cependant déjà résolue grâce à la tendance actuelle des services Web et de l’informatique dans les nuages.

Conclusions

Les avantages de l’introduction d’un écran de choix des systèmes d’exploitation surpassent largement ses inconvénients

En dépit du fait que nous avons commencé à voir quelques ordinateurs non Windows dans les rayons, nous sommes encore loin d’un marché ouvert et non faussé. La mise en œuvre d’un équivalent de browserchoice.eu pour les systèmes d’exploitation pourrait être un moyen de stimulation de la concurrence sur les mérites et l’accélération de l’adoption des standards. Cela pourrait avoir pour conséquence la création de nouveaux emplois qui, en ces temps de stagnation économique, seraient très appréciée. Cette solution aura un coût, mais je suis certain que ses avantages, avec un accent particulier sur le respect des droits des consommateurs et sur l’incitation à l’avancée technologique, surpassent largement les inconvénients.

Remerciements

Je suis reconnaissant à Sherpya pour la discussion au sujet des outils libres de création de distributions « live ».

Références

  1. Juridiction de proximité de Puteaux. Jugement du 23 Juillet 2007, Gutzwillere vs. Acer Computer France. 23 juillet 2007.
  2. Microsoft Corporation. Microsoft Software License Terms – Windows 7 Ultimate N.
  3. J’ai obtenu ce chiffre de 2,8% en additionnant les parts de marché pour « Linux » et « Autres » dans les données de StatCounter4
  4. StatCounter. Les 5 premiers systèmes d’exploitation en Italie en juillet 2011.
  5. Thom Holwerda. OSNews. Windows 8 Requires Secure Boot, May Hinder Other Software. Sept. 21, 2011.
  6. Page Web de UNetBootin



Geektionnerd : Dépêches Melba 5

Au menu du jour : des virus, de la vente liée et des multinationales…

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Sources :

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Vies parallèles : une BD pour semer la liberté chez les enfants

BD Gleducar - CC byDeux familles voisines entrent dans un magasin d’informatique pour s’acheter un ordinateur. Le choix des uns diffère radicalement de celui des autres. Mais heureusement, ça se termine bien à la fin et la grande soeur de conclure : « Regardez les enfants, utiliser des logiciels libres donne envie aux gens d’aider les autres et de collaborer ! ».

Il existe une réelle dynamique en Amérique latine autour du logiciel libre.

Ayant compris son intérêt éducatif, plusieurs intiatives ont vu le jour. En Argentine, l’ONG Gleducar, composée d’enseignants, d’étudiants et d’activistes du logiciel libre, s’est fixée pour mission, depuis sa création en 2002, de favoriser le libre dans le monde de l’éducation.

Pour atteindre cet objectif, l’association développe de nombreux projets :

  • le don aux écoles et aux bibliothèques d’ordinateurs recyclés livrés avec des logiciels libres
  • la réalisation d’un film documentaire sur l’éducation (finalisation prévue en 2011)
  • la promotion de l’utilisation pédagogique de logiciels et de ressources libres
  • la formation à l’utilisation du logiciel libre JClic
  • la diffusion de la culture libre à travers une série de publications pour les enfants et les adolescents

Dans le cadre de ce dernier pojet, nommé Sembrando libertad (« Semer la liberté »), la réalisation d’un livre à destination des 5 à 12 ans est en cours de finalisation. Pour illustrer, l’utilité et l’intérêt des logiciels et de la culture libre, une bande dessinée, qui fera partie de cet ouvrage, a été réalisée (avec Inkscape). Comme elle nous paraissait particulièrement intéressante[1] et qu’elle est sous licence libre[2] le groupe de travail Framalang l’a traduite.

À mettre entre toutes les mains, notamment celles des plus jeunes !

BD Gleducar - CC by

Notes

[1] Par exemple pour accompagner le FramaDVD École ou encore le projet de Framakey École

[2] Creative Commons By




Dell doit cesser de proposer à reculons son offre GNU/Linux Ubuntu

Dell - UbuntuIl y a plus de trois ans déjà le célèbre constructeur d’ordinateurs Dell avait ouvert le site IdeaStorm qui invitait les internautes à soumettre des idées à la société.

Et quelle est la demande qui arriva loin devant ?

Je vous le donne en mille : pouvoir également acheter des machines avec GNU/Linux pré-installé dedans.

Dell, qui se veut à l’écoute de ses clients, a bien été obligé de s’exécuter et s’est donc mis à vendre en ligne des ordinateurs avec la distribution Ubuntu dedans.

Nous nous en étions fait l’écho dans ses deux articles : De la difficulté du Linux inside chez Dell et ailleurs par Mark Shuttleworth d’Ubuntu et Dell + GNU/Linux Ubuntu : Un mariage assumé et médiatisé qui m’émeut.

Le problème c’est que Dell n’a jamais véritablement assumé ce choix en enfouissant l’offre dans les tréfonds de son site et ne la proposant que sur un nombre restreints et peu puissants de modèles. C’est ce que vient nous rappeler ce blogueur américain ci-dessous qui demande à Dell de cesser l’hypocrisie.

Espérons que la prochaine imminente sortie de la version 10.4 Lucid Lynx LTS d’Ubuntu sera l’occasion d’être entendu. Parce que si l’on se restreint à la rubrique actuelle Ubuntu du site francophone de Dell, c’est vrai que c’est plus que décevant.

On est d’abord accueilli par un bandeau au slogan étrange : « Ubuntu, restez le meilleur ! ». Je n’avais déjà pas envie d’être le meilleur en utilisant des logiciels libres alors je ne vois pourquoi je voudrais le rester ! (en fait, je crois surtout qu’il s’agit d’une horrible traduction de « Ubuntu, keeps getting better! »)

Et puis tout de suite cette première phrase très anxiogène : « Ubuntu est-il fait pour vous ? ». S’ensuit alors une explication assez peu convaincante ma foi avec ce lien Windows ou Ubuntu ? où il est conseillé noir sur blanc de « choisir Windows si vous êtes novice dans le domaine informatique ».

Vous me direz que Dell ne fait sans doute que répondre à la perplexité de ses clients (qui pourraient effectivement se tromper). Vous me direz peut-être également qu’il ne faut pas faire la fine bouche et que personne n’oblige Dell à s’intéresser à GNU/Linux sachant que d’autres constructeurs continuent de l’ignorer royalement. Vous me direz enfin qu’il existe certainement des accord commerciaux confidentiels entre Dell et Microsoft qui nous échappent. Certes mais je reste tout de même d’accord avec notre blogueur : soit on décide de proposer enfin une réelle offre GNU/Linux, soit on laisse tomber.

Parce qu’en l’état actuel des choses, on en vient même à se demander si cette opération ne fait pas plus de tort que de bien à GNU/Linux, Ubuntu et Dell réunis.

Lettre ouverte à Dell concernant Ubuntu, ou « faites-le en grand ou bien lâchez l’affaire »

An open letter to Dell regarding Ubuntu, or “go big or go home”

Trent – 2 mars 2010 – The Linux Critic
(Traduction Framalang : Simon Descarpentries, Étienne et Mathieu Adoutte)

Cher Dell,

Jusqu’à présent vous n’avez offert qu’une poignée dérisoire d’options Ubuntu, et je confesse que je ne comprends pas bien pourquoi vous vous êtes donné cette peine.

À l’exception des deux ultra-portables qui vous proposez, je n’ai pas encore vu quoi que ce soit d’autre qui puisse indiquer que vous ayez l’intention de faire d’Ubuntu une véritable option pour vos clients.

Oh je sais… pendant un temps vous proposiez Ubuntu sur vos portables Inspirons 15n, et même sur vos XPS M1330 pendant un courte période, sur votre site web.

Mais ils étaient tous deux très limités en terme d’options de configuration matérielle (CPU, RAM). De même, le poste de travail que vous proposiez pendant un temps était un veau impotent comparé à ce qui est disponible ailleurs sur Dell.com

Et maintenant ? Eh bien maintenant il n’y a presque plus rien à commenter concernant Ubuntu sur Dell.com.

Pour citer ce que je vois sur votre page Ubuntu : « Une sélection de modèles peut désormais être livrée avec Ubuntu 9.10 ».

Par « Une sélection » vous entendez la liste suivante, basée sur ce qui est trouvable sur le site :

  • Nos deux ultra-portables cités précédemment ;
  • Le Vostro V13, un impuissant demi-portable qui, franchement, est une blague ;
  • Le Latitude 2100, qui est également un ultra-portable.

C’est tout ? Vraiment ?

« Mais il n’y a pas tant de demande que ça pour Ubuntu », vous entends-je presque répliquer.

Voyons cela. Vous enterrez ça sur votre site. Vous ne proposez que des épaves disponibles sous Ubuntu (comparé aux machines disponibles sous Windows).

Pas étonnant que vos ventes de machines sous Ubuntu soient faibles. En fait, je serais même surpris que vous vendiez quoi que ce soit vu comment vous vous y prenez.

Voici ce que je vous conseille. Cela risque de paraître un peu élitiste, mais j’ai acheté des ordinateurs récemment et ça m’a mis d’humeur taquine.

Comme je vois les choses, vous avez deux options :

1. Lâchez l’affaire

Sérieusement. Vous n’impressionnez personne avec ces offres Linux minables. Ceux qui s’intéressent suffisamment à Linux pour chercher (et trouver) les produits Ubuntu enterrés dans votre site se sentent insultés par ce qu’ils y trouvent, et vont simplement voir ailleurs, là où on ne leur proposera pas avec force langue de bois des ordures que la plupart des utilisateurs de Windows ne s’embêteraient pas à regarder de plus près (du point de vue du matériel).

2. Proposez Ubuntu sur des ordinateurs comparables à vos machines sous Windows 7

Faites-le en grand, ou bien lâchez l’affaire les gars. Votre micro-marketing pour une niche d’utilisateurs bernés niveau matériel est un échec, mais si vous joignez vraiment le geste à la parole, vous gagnerez les coeurs et les esprits, et vous éviterez la plupart des critiques venant de la communauté Open Source, pour ce que ça vaut.

De plus, en l’absence de la Taxe Windows, un ordinateur sous Ubuntu devrait permettre aux acheteurs de constater qu’un ordinateur, à matériel égal, vendu sans Windows, coûte quelque centaines d’euro MOINS cher, ce qui signifie qu’ils seront plus enclin à acheter des accessoires parmi ceux sur lesquels vous insistez lourdement, sur votre site.

Sérieusement, ce qu’il y a jusqu’ici sur votre site est tout simplement insultant. Abandonnez Ubuntu complètement ou bien passez aux choses sérieuses.

Désolés les gars, mais quelqu’un se devait de vous le dire. Vous ne vous rendez pas service, ici.

En vous remerciant,

Trent




Geektionnerd : Ballot Screen

« Toute la vie est une affaire de choix. Cela commence par : la tétine ou le téton ? Et cela s’achève par : Le chêne ou le sapin ? » Pierre Desproges

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Vente liée : Un reportage exemplaire de France 3 Bretagne

Lu sur le site de l’AFUL : Éric Magnien, qui a gagné deux fois en justice contre le constructeur ASUS (lire le commentaire détaillé de la décision de justice par Me Frédéric Cuif), s’exprime dans le journal télévisé 19-20 de France 3 Bretagne le 21 décembre 2009 : Un Morbihannais en lutte contre Windows, par Géraldine Lassalle.

—> La vidéo au format webm

Transcript

Voix off : C’est un combat semblable à celui de David contre Goliath. Dans le rôle de David, Éric Magnien, régiseur de théâtre lorientais, dans le rôle de Goliath, le fabricant d’ordinateur Asus. Tout commence en mai 2008 quand Eric décide de s’acheter un ordinateur.

Éric Magnien : Je voulais acheter un ordinateur, mais je ne voulais pas des logiciels qui étaient installés avec, parce que j’utilisais déjà avec un autre ordinateur des logiciels libres, donc sous Linux.

Voix off : Pourtant Éric n’a pas le choix. il doit acheter l’ordinateur avec avec le système d’exploitation de Microsoft déjà installé. Il décide alors de demander au constructeur le remboursement des logiciels Windows dont il n’a pas besoin.

Éric Magnien : Il me demandait à ce que je renvois l’ordinateur à mes frais, à leur service après-vente à Paris, pour effacer totalement le disque dur et enlever l’étiquette de Windows. Donc c’était totalement inacceptable, pour un remboursement de 40 euros alors que dans le commerce ces mêmes logiciels coutaient 205 euros.

Voix off : S’engage alors une bataille juridique qui va durer plus d’un an. Avec l’aide de l’Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres (AFUL), Éric rassemble tous les elements demontrant l’abus dont il est victime. Face à lui une armée d’avocats experts, un combat inégal mais Éric sait qu’il est légitime. En août 2009 la justice condamne le constructeur.

Éric Magnien : C’est une procédure longue, difficile mais nécessaire, et qui vaut le coup parce que c’est notre droit. On a le droit d’obtenir réparation de ce genre de choses, on a le droit d’obtenir le remboursement de ces licences. Et donc c’est aussi pour une certaine idée du droit, de la justice, que j’ai été jusqu’au bout de la démarche.

Voix off : La décision de justice rendu par le tribunal de Lorient pourrait bien décider d’autres consommateurs à faire valoir leurs droits. Le 2 décembre dernier, la société Acer a été condamnée pour la cinquième fois pour des faits similaires.




Ce que nous dit Windows Vista de l’Éducation nationale

Cave Canem - CC by-saRetournons le titre de mon billet du jour en mode interrogatif. Qu’est-ce que nous dit l’Éducation nationale de Windows Vista ?

Rien. Elle ne nous a strictement rien dit, et c’est bien là le problème.

Aujourd’hui, l’arrivée de Windows 7 vient refermer le chapitre du système d’exploitation précédent de Microsoft. On aurait cependant tort de ne pas tenter de tirer le bilan de cet épisode, en particulier au sein de l’Éducation nationale française. Parce qu’il se pourrait bien que cet (assourdissant) silence soit révélateur…

Petit retour en arrière. Windows Vista a vu officiellement le jour en janvier 2007. Et très vite, comme nous le rappelle Wikipédia, « de nombreuses critiques ont fusé concernant la faible compatibilité matérielle, le matériel minimum nécessaire, les mauvaises performances et le peu d’innovations depuis Windows XP ».

Un an plus tard paraissait en Angleterre un rapport, riche et détaillé, de la très sérieuse et officielle agence Becta, sur l’opportunité ou non d’utiliser Windows Vista et MS Office 2007 dans les écoles du pays[1].

Les arguments et conclusions de ce rapport étaient sans équivoque.

Pour rappel en voici quelques extraits (dont je vous laisse juge de leur actualité un an et demi plus tard) :

« Les nouvelles fonctionnalités de Microsoft Vista présentent certes un intérêt, mais ne justifient pas une implantation immédiate dans le domaine de l’éducation : les coûts seraient élevés et les avantages loin d’être évidents. »

« Alors qu’on estime à 66% le nombre de machines du parc informatique scolaire pouvant fonctionner avec Vista (d’après la définition de Microsoft), nous estimons quant à nous à 22% le nombre de machines répondant aux critères pour faire fonctionner Vista de manière correcte. »

« Le coût total du déploiement de Vista dans les écoles anglaises et galloises se situe autour de 175 millions de livres sterling (environ 230 millions d’euros). Si cette estimation n’inclut pas les cartes graphiques supplémentaires nécessaires au fonctionnement de l’interface Aero (ce qui augmenterait nettement le montant minimum) elle tient compte des mises à niveau matérielles nécessaires, du coût des licences, des tests ainsi que du coût de la configuration et du déploiement. Environ un tiers de cette somme est imputable au prix des licences Microsoft. »

« Les machines sous Vista pourraient ne fonctionner qu’avec une autre version d’une application voir même seulement avec des produits différents. Cela peut être source de confusion si le personnel ou les élèves doivent travailler avec les deux systèmes d’exploitation. Il pourrait aussi être nécessaire de dupliquer le travail pour certaines leçons ou pour certains projets pour les adapter à Windows Vista et Windows XP. »

« Nous suggérons que les nouvelles machines achetées avec Windows Vista pré-installé soient remises sous Windows XP en attendant que tout le réseau puisse être mis à jour. »

« une standardisation de fait (par l’utilisation généralisée de produits d’un même fournisseur) peut être néfaste pour la concurrence et le choix, ce qui revient à augmenter les coûts. De plus en plus, les gouvernements, les entreprises et le système d’éducation refusent de voir leurs informations contrôlées par un fournisseur unique. Il en résulte un mouvement qui tend à délaisser les formats de fichiers propriétaires pour s’intéresser aux nouveaux formats de fichiers, plus ouverts, sous le contrôle d’un organisme de normalisation efficace. »

« Si l’on n’intervient pas, ces évolutions vont créer, pour les utilisateurs béotiens, une vision de l’intéropérabilité des documents qui sera complexe et partisane, ce qui serait un échec de l’objectif initial d’aller vers des standards ouverts. Microsoft a une position dominante sur le segment des systèmes d’exploitation pour PC et cette position risque d’être renforcée par son approche actuelle des standards de documents ouverts. »

« Contrairement à d’autres secteurs ou la demande pour des solutions en logiciels libres est visible et croissante, les estimations dans le secteur éducatif montrent une demande faible, Becta est vu comme un facteur clé dans l’instauration de cette demande. »

« Au cours des douze prochains mois Becta prendra un certain nombre de mesures pour encourager un choix plus efficace dans le cadre d’un usage éducatif. Ce travail inclura la publication d’un programme de travail dont le but sera de :
– fournir plus d’informations sur le site de Becta sur ce qu’est un logiciel libre et quels sont ses avantages pour l’éducation en Grande-Bretagne
– compléter la base de recherche actuelle qui recense les usages des logiciels libres dans le secteur éducatif et identifier des déploiements modèles de logiciels libres. Cela engloberait également l’esquisse d’un tableau national des usages des logiciels libres dans les écoles et les universités
– travailler avec la communauté du logiciel libre pour établir un catalogue en ligne des logiciels libres appropriés pour l’usage dans les écoles de Grande-Bretagne. Parmi les informations disponibles on retrouvera les moyens d’obtenir une assistance dédiée à ces logiciels et comment contribuer à leur développement futur. Ce catalogue sera publié sous une licence Creative Commons afin que les fournisseurs puissent le modifier pour leur propre usage
– donner des indications aux sociétés de services en logiciels libres pour qu’elles puissent efficacement participer dans de nouvelles structures compétitives et pour qu’elles puissent proposer des logiciels libres via la structure de fournisseurs existante de Becta »

Si nous pouvons vous proposer ces citations directement en français c’est parce que nous avions décidé de traduire ce rapport dans son intégralité, annoncé en juin 2008 sur le Framablog sous la forme d’une question (dont on a malheureusement aujourd’hui la réponse) : Le débat sur Windows Vista et MS Office 2007 à l’école aura-t-il lieu ?

Et pourquoi avions-nous fait cet effort ? Parce que, Anne, ma sœur Anne, nous ne voyions justement rien de similaire venir en France.

Il y a peut-être eu des mémos internes, quelques craintes exprimées ça et là localement sur des sites académiques, et bien sûr de la perplexité chez certains profs d’en bas. Mais, à ma connaissance, aucune étude digne de ce nom, aucune recommandation ou mise en garde publiée publiquement sur les sites nationaux de l’Education nationale, à commencer par Educnet, le site portail des TICE.

Le ministère de la Défense peut qualifier, avec la diplomatie qui le caractérise (mais tout le monde aura compris), Windows Vista de système qui « manque de maturité » et préconiser l’usage des distributions GNU/Linux Mandriva et Ubuntu, la contagion interministérielle n’aura pas lieu du côté de la rue de Grenelle.

Qu’un Café Pédagogique, soutenu par Microsoft, demeure muet si ce n’est pour annoncer benoîtement la sortie de Vista et de ses mises à jour, c’est dommageable mais compréhensible (et c’est même certainement compris dans le prix du soutien), mais il en va tout autrement pour le ministère.

N’en allait-il pas de sa responsabilité de prévenir tous ses établissements scolaires et toutes les collectivités territoriales pourvoyeuses de nouveaux matériels (susceptibles de subir le phénomène de la vente liée), qu’il était au moins urgent d’attendre ? Attente qu’il aurait pu mettre à profit pour évaluer les alternatives libres et prendre enfin les décisions qui s’imposent (comme par exemple ce qui se fait dans le Canton de Genève).

Au lieu de cela un silence radio pour le moins étonnant. Et trois années de perdues pour le déploiement massif, assumé et coordonné du logiciel libre à l’école ! Avec en prime prolifération de Vista et passage à la caisse.

Étudiants, enseignants, parents d’élèves, contribuables, et plus généralement tous ceux désormais nombreux que le sujet intéresse, sont légitimement en droit de se demander pourquoi, afin que cette politique de l’autruche ne se reproduise plus.

Notes

[1] Crédit photo : Cave Canem (Creative Commons By-Sa)