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Collègues, amis, membres de la famille… il n’est pas toujours facile de faire partager son intérêt, voire même son éventuelle passion, pour le logiciel libre et sa culture à un public qui nous est proche mais qui ne s’intéresse pas à « l’informatique ».
Or, pour l’avoir faite suivre à de nombreuses reprises, j’ai constaté qu’une vidéo particulière possédait, si ce n’est des vertus miracles, tout du moins l’inédite capacité d’interpeller un large auditoire qui, rendu curieux, se retourne alors vers vous pour vous poser moult questions.
L’élan a changé de sens. Ce n’est plus vous qui venez faire votre petit topo à des gens qui ne vous ont souvent rien demandé. Ce sont eux qui, la puce à l’oreille après la projection, souhaitent spontanément que vous leur apportiez quelques précisions. Pédagogiquement parlant ce mouvement inversé a bien plus de chances de porter ses fruits.
Quelle est donc cette vidéo qui murmure le Libre (et non « l’open source ») à l’oreille du profane ? Il s’agit de la chronique d’Emmanuelle Talon sur « notre » biographie de Richard Stallman, proposée le 22 janvier 2010 dans le cadre de La Matinale de Canal+ (reproduite et transcrite ci-dessous).
Nous en avions déjà parlé sur le Framablog. Mais le nez dans le guidon de la sortie du livre, nous avions surtout fièrement souligné qu’un grand média évoquait le projet, sans prendre véritablement conscience des qualités intrinsèques de la vidéo. Avec le recul, on s’aperçoit en fait que le livre est ici secondaire. C’est un pretexte pour parler de Richard Stallman et par extension pour parler du Libre.
En quoi cette ressource apporte-elle de l’eau à notre moulin de la sensibilisation en captant favorablement le temps de cerveau disponible de celui qui l’a sous les yeux ?
Il y a d’abord le facteur « vu à la télé ». Internautes assidus que nous sommes, c’est quelque chose que nous avons appris à désacraliser. Mais pour bon nombre de nos compatriotes (dont les quelques 40 % encore non connectés) le passage par le petit écran continue de faire son petit effet.
Il y a la durée. L’attention est maintenue par cette chronique qui ne dépasse pas les cinq minutes.
C’est beaucoup plus subjectif – et me vaudra quelques virulents commentaires – mais je crois que l’attention est également maintenue par le facteur « dialogue entre deux femmes avenantes », les femmes appréciant que ce soit des femmes et les hommes qu’elles soient avenantes (sic).
Il y a la posture prise par la journaliste. D’ordinaire c’est l’objectivité et la neutralité qui priment. Or ici, au diable la mise à distance, débordée par son enthousiasme communicatif, elle semble prendre fait et cause pour le sujet traité.
Au delà de la forme, il y a aussi et surtout le fond, c’est-à-dire tout ce qui est évoqué dans ce très court laps de temps : définition du logiciel libre qui s’oppose au logiciel privateur, code source, contre-exemple Microsoft, alternatives OpenOffice.org et Firefox, libre ne veut pas dire gratuit, Hadopi… et même Sarkozy !
Mais, d’expérience, ce qui fait surtout mouche ce sont les formules originales permettant de sortir du cadre et d’élargir le débat. Elle sont vos précieuses alliées parce qu’elles intriguent et appellent à des compléments d’information :
- « Il ne s’agit pas vraiment d’informatique, il s’agit en fait de philosophie. Richard Stallman c’est vraiment un grand philosophe, c’est un vrai penseur. »
- « Pourquoi au fond il s’est lancé dans cette aventure ? Il s’est lancé dans cette aventure tout simplement pour améliorer le monde, pour encourager le partage et la fraternité. »
- « C’est une forme de nouveau socialisme, de socialisme logiciel. Et à l’heure où l’on pleure sur la fin des grandes ideologies, on peut se réjouir de voir qu’il y a encore des gens qui essayent de changer le monde. »
- « En fait la compétition, elle se fait vraiment dans nos têtes. »
- « Stallman c’est un peu le Luke Skywalker de l’informatique, il faut qu’on se libère des machines et c’est ce jour-là que le Libre pourra gagner. »
Cette vidéo n’est pas parfaite (et prend même quelques libertés avec le droit d’auteur). Mais ces propos étonnent et surprennent. Ils modifient chez l’autre non seulement la perception du logiciel libre mais également la perception de celui qui s’intéresse au logiciel libre (vous en l’occurrence). Ne dites pas à ma mère que je participe à changer le monde, elle croit que je fais bien sagement de l’informatique dans ma chambre !
À vous ensuite d’enchaîner avec brio et éloquence. Mais la stimulation est là, votre interlocuteur veut en savoir davantage et, ça tombe plutôt bien, vous êtes à ses côtés et tout disposé à satisfaire cette soudaine soif de connaissance.
Merci Emmanuelle !
—> La vidéo au format webm
Transcript
Maïtena Biraben : Le logiciel libre, c’est l’une des très grandes révolutions du siècle passé et aujourd’hui on en sait un peu plus sur le créateur du logiciel libre.
Emmanuelle Talon : Oui, Richard Stallman il a aujourd’hui 56 ans, il n’est pas très connu du grand public mais c’est un dieu vivant pour les informaticiens, parce que c’est un des pères du logiciel libre, le père du logiciel libre.
Alors pourquoi on en parle aujourd’hui ? Parce qu’il y a sa biographie qui vient de paraître en français aux éditions Eyrolles « Richard Stallman et la révolution du logiciel libre ». Alors au début des années 80…
Maïtena Biraben : C’est un bouquin de geek ?
Emmanuelle Talon : Non, justement pas. C’est ça qui est bien, parce que ça n’est pas un bouquin de geek, et même si on ne s’y connaît pas trop, on peut vraiment vraiment comprendre, j’insiste.
Et donc Stallman, au début des années 80 a créé la Fondation pour le Logiciel Libre. Il est à l’origine du projet GNU.
Et juste un petit rappel : qu’est-ce qu’un logiciel libre ? Quand même, voilà c’est important. C’est un logiciel que n’importe qui peut utiliser, copier ou même modifier, pour l’améliorer en quelque sorte, en accédant au code source.
Et le logiciel libre, ça s’oppose à ce que Stallman appelle les logiciels privateurs. Ce sont des logiciels qui nous privent de notre liberté. On ne peut pas modifier le code source, c’est pour cela que Windows est la propriété de Microsoft. Si Windows ne vous convient pas, vous ne pouvez pas l’améliorer. Tandis que l’on peut améliorer par exemple la suite bureautique OpenOffice ou le navigateur Firefox.
Maïtena Biraben : Si on y arrive !
Emmanuelle Talon : Si on arrive, bien sûr, mais vous avez cette liberté.
On l’impression que c’est un peu complexe mais en fait pas tellement parce que cette histoire de logiciel libre… Il ne s’agit pas vraiment d’informatique, il s’agit en fait de philosophie. Richard Stallman c’est vraiment un grand philosophe, c’est un vrai penseur. Et avec cette histoire de logiciel libre… Pourquoi au fond il s’est lancé dans cette aventure ? Il s’est lancé dans cette aventure tout simplement pour améliorer le monde, pour encourager le partage et la fraternité.
Donc c’est une forme de nouveau socialisme, de socialisme logiciel. Et à l’heure où l’on pleure sur la fin des grandes ideologies, on peut se réjouir de voir qu’il y a encore des gens qui essayent de changer le monde. Et aujourd’hui ces gens-là ce sont des informaticiens, et c’est Richard Stallman. C’est pour ça que c’est important de le connaître.
Maïtena Biraben : On a vu son playmobil…
Emmanuelle Talon : Oui on a vu son playmobil, mais en fait c’est un personnage assez amusant, qui a beauocup d’humour, qui a une bonne tête…
Maïtena Biraben : Est-ce que le logiciel libre a des chances de gagner face au logiciel non libre, donc commercialisé, que l’on ne peut plus toucher ?
Emmanuelle Talon : Alors, le logiciel libre il progresse beaucoup en France. Il y a quelques années la Gendarmerie nationale est passée… elle a adopté un logicie libre. Mais, si vous voulez, la compétition elle ne se fait pas vraiment sur cette question-là, sur cette question technique, parce qu’un logiciel libre, on peut considérer que ça vaut au niveau technique un logiciel privateur. En fait la compétition, elle se fait vraiment dans nos têtes.
Le Libre il pourra gagner le jour où, d’après Stallman, on aura, nous, envie de nous libérer et puis de ne pas être soumis à la machine. Parce qu’il explique que quand on utilise un logiciel comme Windows, on ne peut pas le modifier si on n’y va pas, et donc on est esclave de la machine. Stallman c’est un peu le Luke Skywalker de l’informatique, il faut qu’on se libère des machines et c’est ce jour-là que le Libre pourra gagner.
Maïtena Biraben : Est-ce que libre ça veut dire gratuit Emmanuelle ?
Emmanuelle Talon : Alors non, libre ne veut pas forcément dire gratuit. Il y a des logiciels libres qui ne sont pas gratuits, donc il faut faire attention à cette confusion. C’est vrai que quand on est juste un utilisateur, on peut estimer que la gratuité c’est le principal avantage, mais libre ne veut pas dire gratuit.
Maïtena Biraben : Si on ramène cette idée de logiciel libre à la France, la prochaine bataille c’est Hadopi.
Emmanuelle Talon : C’est Hadopi et Stallman est mobilisé sur cette question. Il estime que c’est une loi tyrannique. Il dit que Nicolas Sarkozy est un ennemi de la démocratie et des Droits de l’Homme. Et pour lui empêcher le téléchargement de musique pour sauver l’industrie du disque, c’est tout simplement comme empêcher les gens de faire la cuisine pour sauver les emplois dans la restauration !
Voilà, juste pour finir, le livre, vous pouvez l’acheter, il coûte 22 euros et c’est bien d’avoir un livre papier. Mais vous allez voir la cohérence de la démarche, en fait le livre est en téléchargement, gratuit, sur le site www.framasoft.net. Vous pouvez modifer le texte du livre, et si vous voulez le traduire, et bien vous pouvez tout à fait le traduire librement dans la langue que vous souhaitez, en ourdou par exemple, je pense que ça n’est pas encore fait.
PS : Pour l’anecdote lorsque avons signalé la vidéo à Richard Stallman, il nous a répondu texto : « C’est très bon (malgré des petites erreurs), mais c’est quoi un playmobil ? ».
ram
C’est beau ! T_T
(elle semblait un peu dans une bulle sur ce plateau mais c’est impressionnant d’avoir un monologue aussi juste sur un plateau télé O_O )
Merci Emmanuelle ! 😀
Gilles
Merci pour la retranscription 🙂
Quelqu’un a une image du playmobil de Stallman ?
samy
RMS en playmobil:
http://www.flickr.com/photos/dunech…
Elessar
Merci pour la transcription ! Je me souviens d’avoir vu cette vidéo, et la vitesse de lecture d’un texte est incroyablement élevée par rapport à l’écoute d’un dialogue en temps réel. Et puis la tentation de faire autre chose en même temps est supprimée, vu qu’on ne peut pas lire en faisant autre chose (ou presque, on peut lire en se grattant le nez mais ça ne va pas beaucoup plus loin).
Matthieu Weber
C’est un bonhomme LEGO sur la photo, pas un Playmobil.
Edouard
Il me semble que c’est un légo et non un playmobil !
Pierre
Bonjour,
a-t-on le droit, lors d’une manifestation en faveur du libre, type Install Party ou RMLL, de diffuser cette vidéo?
zenon
Il y a aussi Nom de code Linux, diffusé sur Arte il y a quelques années, et qui dans un format plus long présente remarquablement bien le mouvement Open Source. Il doit se trouver dans toutes les bonnes crémeries peer-to-peer
mydjey
@ zenon
Suffit de taper "Nom de code Linux" dans un moteur de recherche qui va bien et on peux le mater sur Dailymotion et consorts.
Sinon pour en revenir à la vidéo de La matinale, la justesse des propos de Emmanuelle est vraiment appréciable, super pour quelqu’un qui n’y connais à priori pas grand chose en logiciel libre. Si elle intervient à chaque fois avec autant de justesse vais rallumer mon post de tv moi. ^^
patrice b
ça a bien marché sur ma petite soeur en tout cas, je confirme 🙂
le fait qu’elle soit "de gauche" tendance écolo qui veut changer le monde a aidé à l’intéresser c’est sûr
Eric Dumoulin
Je ne suis vraiment pas convaincu par cette vidéo… J’essaye de faire adopter le LL dans le monde de l’entreprise, et je crois qu’on est loin des arguments qu’attendent les utilisateurs qui ont des attentes… d’utilisateurs
Si 30% des Internautes en France utilisent Firefox, ce n’est pas pour son côté "nouveau socialisme" ou pour lutter contre "la machine", mais parce qu’ils y trouvent des éléments qui ne figurent pas chez ses concurrents.
Le discours tenu par Emmanuelle Tallon est malheureusement celui qui rebute l’utilisateur lambda (professionnel ou non). L’adoption du libre est conditionnée aux apports directs des logiciels en terme de fonctionnalité. Les questions auxquelles on est confronté sur le terrain ne sont pas "est-ce que je peux modifier le code ?" mais "en quoi ton OOo est meilleur que mon Word ?".
Si je suis d’accord sur le fond du discours, je crois qu’il est complétement contre-productif sur la forme.
(Message posté depuis un Firefox sous Ubuntu…)
cricri
"Et pour lui empêcher le téléchargement de musique pour sauver l’industrie du disque, c’est tout simplement comme empêcher les gens de faire la cuisine pour sauver les emplois dans la restauration !"
Ceaucescu voulait interdir les cuisines dans les appartements aux profits de cuisines collectives :
http://laroumanie.free.fr/page/pers…
aKa
@Eric Dumoulin : C’est pour cela que j’ai précisé à moment donné : "Quelle est donc cette vidéo qui murmure le Libre (et non « l’open source ») à l’oreille du profane ?"
Ce qui est mis en avant ici est par la force des choses (le bouquin comme point de départ) une approche "stallmanienne" du logiciel libre, et non une approche "open source" ("en quoi ton OOo est meilleur que mon Word ?") au demeurant fort respectable et complémentaire.
Ce n’est évidemment pas à montrer à un DSI de grands comptes qui s’interroge sur l’opportunité d’une migration, mieux vaut alors une vidéo d’Alexandre Zapolsky de Linagora 😉
Par contre pour l’utilisateur lambda, mon témoignage perso c’est que découvrir tout d’un coup que le logiciel libre c’est peut-etre plus que du logiciel est un élément qui interpelle. Pouvant même aller, si adhésion il y a, jusqu’à accepter les petite désagréments du changement Word OOo.
untel
Aaahh! ça fait vraiment plaisir de voir sur une chaine grand public quelqu’un parler du logiciel libre avec justesse et enthousiasme!
Et en plus, elle est craquante comme tout avec ses grosses lunettes 🙂
djanus
Quelqu’un a contacté Emmanuelle Talon pour lui indiquer cette meme page?
cela devrait l’encourager à develloper ses rubriques sur le sujet à Canal+
Dami1
Yep, c’est aussi pour moi la meilleure vidéo en langue française pour intéresser au logiciel libre.
Vous en avez d’autres à signaler ? Des meilleures encore ?
vvillenave
@Eric Dumoulin : Quel mépris pour ce que vous nommez "l’utilisateur lambda"… Je veux bien croire que le "monde de l’entreprise" n’est concerné que de très loin par de petites choses telles que les libertés collectives et individuelles, mais ne faites pas l’erreur d’étendre cette résignation et cet aveuglement à l’ensemble des citoyens.
Nous sommes tous, au fond, des "utilisateurs lambda" !
deadalnix
Ce n’était pas déjà passé ici ?
Eric Dumoulin
@vvillenave
Désolé si j’ai pu vous choquer, mais il n’y avait aucun jugement de valeur dans le fait de parler d’utilisateur lambda, je me considère comme faisant partie du lot. Je ne remet pas en cause les valeurs du LL telles que présentées dans le reportage, mais mon expérience sur le terrain me montre que les arguments présentés dans la vidéo ne suffisent pas à convaincre bon nombre de (futurs) utilisateurs.
Je rencontre de nombreux créateurs d’entreprises, et dirigeants de TPE pour qui la valeur ajoutée du LL n’est pas dans le respect des libertés collectives et individuelles, mais dans le service rendu au quotidien par rapport aux "autres" logiciels. On peut le regretter, mais c’est une attitude très fréquente.
Sachant que l’utilisation en entreprise influence beaucoup les influences domestiques, il est également important de mettre l’accent sur les usages pour convaincre le plus grand nombre.
aKa
@deadalnix : Si mais pas avec le même titre et c’est indiqué quelque part dans le billet (trouvez Charlie).
Je te soupçonne d’avoir tellement de flux RSS que tu t’adonnes à la lecture diagonale 😉
Je recycle et fais du neuf avec du vieux. L’idée c’est que la première fois la vidéo était évoquée parce qu’elle parlait de la biographie de Stallman et là c’est parce que l’expérience (enfin mon expérience) montre qu’elle incite à parler du Libre.
Cyril Roiron
Bonjour,
Je trouve, sachant l’exercice difficile qu’est l’explication des logiciels libres, que Emmanuelle Talon s’en sort très bien, son explication n’est ni trop simpliste, ni trop complexe.
Bon travail 🙂
J
point de vue concept c’est bien un playmobil… , lego a copie le design petite figurine mobile de l’ancetre concurrent playmobil;
maintenant vu de la fabrication, ca pourrait etre un lego car les figurines actuels playmobil n’utilisent plus ? le systeme rotule aux poignets.
Matthieu
Dommage qu’on nous explique pas ce qu’est une licence. Ce serait plus clair.
Il n’y a pas d’un côté le libre et de l’autre le propriétaire. Il y’ a des dizaines de licences qui couvrent des domaines différents et des utilisations différentes.
Mais il ‘y a un gouffre entre licence et brevet.
Dommage que ça cafouille à ce niveau, d’autant qu’elle compare RMS et les LL à une certaine forme de socialisme du futur. (collectivisme aurait été mieux venu).
Ceci-dit, on va pas cracher dans la soupe !
Merci.
Libre...
Hello !
Très bien cette petite présentation du libre, à quand la même chose sur F2 et TF1 😉 , une petite décennie ?
gnuzer
@Eric Dumoulin
Effectivement, le français moyen se fout complètement de ces questions de liberté, tout ce qu’il souhaite c’est que ça marche, et si on veut lui faire adopter du logiciel libre il suffit de lui dire que c’est mieux.
Mais laissez-moi vous expliquer quelque chose : ceci n’est pas le but de Framasoft. Le but des libristes n’est pas que tout le monde soit linuxien, mais que tout le monde soit libre. Si on voulait promouvoir LES logiciels libres, on le ferait à grand coups de pubs, de slogans bien subliminaux et d’arguments du genre : "regardez tous ces bugs dans windows, regardez toutes ces failles de sécurité dans macOS". Seulement nous voulons promouvoir LE logiciel libre, ce qui n’est pas la même chose.
Une personne qui utilise GNU/Linux parce que ça marche mieux et qu’il n’y a pas de virus est selon moi moins libre qu’une personne qui utilise simplement OpenOffice en étant convaincu des bienfaits éthiques du libre.
Jmini
La question de savoir comment communiquer autour du logiciel libre est à mon avis LE plus grand problème du moment.
Beaucoup n’ont pas bien compris de quoi il s’agissait. Souvent logiciel libre et logiciel open source sont assimilés (de ce point de vu le livre est très bien d’ailleurs) et les deux communautés se battent entre elles. Et encore pire : les deux mouvements trainent de vieilles images d’Épinal (dans laquelle la journaliste de Canal+ n’est pour une fois pas tombée).
TechTocTv vient de tenter un plateau sur l’open source en entreprise :
http://techtoc.tv/event/464/softwar…
Selon moi c’est l’illustration parfaite du chemin qui reste à parcourir. J’ai d’ailleurs tenté de répondre aux plus grosses imprécisions dans leur blog :
http://www.techtoctv.com/Jmini–Jer…
Même pour l’open source (peut-être plus proche des attentes des entreprises), il y a encore beaucoup de travail de pédagogie à faire.
Pour en revenir à la vidéo de Canal+, ce qui est très intéressant c’est que c’est une nouvelle approche pour un nouveau public. Ça ne s’adresse pas au geek, et encore moins au partisan du logiciel libre. Mais ça donne à un autre public l’envie de s’intéresser au mouvement, et dans un premier temps d’acheter le livre.
pada
Je suis souvent confronté au problème d’informer et de convaincre de l’importance du logiciel libre, et ai eu souvent la réaction signalée ici (et que l’on devine dans les yeux si ce n’est la tête du présentateur): oui mais moi je m’en fous je ne saurais jamais programmer. J’ai donc essayé de trouver une présentation qui puisse les concerner. Je vous la soumets même si elle est un peu longue:
Un logiciel libre est un logiciel presque toujours gratuit qu’on utilise comme on veut, tant qu’on veut, sans aucune discrimination, en confiance, qu’on peut partager avec la garantie qu’il reste accessible et au sujet duquel on peut tout savoir si on le veut.
Un logiciel libre est écrit par ceux qui en ont besoin, et non pour en tirer des revenus. Ses auteurs considèrent que le meilleur moyen de mettre en commun leurs efforts est de donner l’accès libre pour tous à leurs logiciels. Ceci leur permet de ne pas ré-inventer la roue et de bénéficier de tous les apports possibles aussi petits soient-ils. Il ne suffit pas d’écrire un logiciel, il faut aussi le concevoir, le tester, le documenter, le distribuer, l’intégrer à d’autres logiciels, le faire évoluer, et pour tous ses utilisateurs apprendre à s’en servir. C’est tout cela qui peut être partagé grâce à l’accès libre au programme et qui fait que l’on parle d’une communauté qui rassemble l’ensemble des personnes et organisations concernées par un logiciel libre.
Le logiciel libre favorise et encourage le partage quand cela est avantageux pour tous, mais il n’interdit pas les échanges économiques. Il les oriente en faisant en sorte que la réalisation de ce qui est réutilisable ne soit payée qu’une fois et que les services de mise en œuvre particuliers soient normalement rémunérés. En ce sens le logiciel libre favorise l’emploi local en économisant les prix de licence et en encourageant la consommation de services. La gratuité des logiciels libre est une conséquence de l’accès au code source du programme et non un objectif.
Pour un programmeur l’accès au code source fait, qu’il peut l’étudier et qu’il peut collaborer à son évolution en le modifiant pour le corriger et le compléter pour un nouveau besoin pour lui, sa famille, ses amis, son employeur ou ses clients, ou en réutiliser tout ou partie dans un autre logiciel libre.
Pourquoi est-il très important de se préoccuper du logiciel et plus particulièrement du logiciel libre?
Nous sommes, après l’avènement des civilisations de l’écrit puis de l’imprimé, entrés dans une nouvelle civilisation: la civilisation numérique. Les ordinateurs, par leur miniaturisation et leur mise en réseau, ont changé radicalement les conditions de création, conservation et échange des documents de toute sorte, texte, image fixe ou animée, son et même le contrôle des machines.
La copie d’un document numérique se fait à un coût quasi-nul tout en préservant l’original et il n’y a pas de limite technique au nombre de copies. Internet est devenu un réseau planétaire qui assure un accès quasi immédiat à tout document identifié sur le réseau indépendamment du lieu physique.
Le logiciel est au cœur de cette société numérique car un ordinateur est une machine ignorante : on doit avec un programme lui dire quoi faire dans le fin détail. Un programme est une recette qui peut nécessiter des millions de lignes et qui implique une certaine expertise technique de ses auteurs.
Le logiciel est un bien immatériel, il est en effet non rival, en ce sens qu’il peut être reproduit à l’infini sans dégradation et à coût pratiquement nul. Les biens immatériels ne sont donc pas naturellement rares, mais abondants. Le logiciel implique un effet réseau, il est d’autant plus utile qu’il y a du monde qui s’en sert, et un effet d’inertie car on crée des habitudes et des liens d’usage autour d’un logiciel. Enfin un logiciel nécessite un investissement relativement faible en regard du monde matériel et peut être développé de manière modulaire et progressive par des individus ou de petites équipes.
Les économistes montrent que sont ainsi réunies les conditions pour l’émergence de monopoles qui ont pour conséquence de concentrer le pouvoir et la richesse avec les effets néfastes de tout monopole, comme de transformer un bien abondant en bien rare en en limitant l’accès afin d’en contrôler l’évolution et les prix à son seul avantage. On peut constater cette évolution monopolistique dans tous les domaines de l’immatériel, bien sûr le logiciel, mais aussi la presse, l’édition, les industries culturelles, et toutes les industries qui reposent essentiellement sur des brevets comme l’industrie pharmaceutique ou agro-alimentaire.
Mais les économistes montrent aussi que ces conditions permettent l’émergence du logiciel libre et plus généralement d’une culture libre, qu’elle soit scientifique, sociale ou artistique. Le logiciel libre, par sa position centrale dans une société numérique, est le laboratoire où se développe une nouvelle organisation d’une société plus juste et humaine qu’une société contrôlée par de grands monopoles qui ont pour règle de vie, sous le couvert de la libre entreprise, la loi du plus fort.
aKa
Merci pada pour ce témoignage qui ferait un billet blog à lui tout seul 😉
Personnellement j’arrive aussi à accrocher l’interlocuteur lorsque je démarre par le couple compétition / coopération.
Si la "nouvelle civilisation" dont tu parles pouvait être davantage celle de la coopération (aidée par le numérique) que celle du numérique, ce serait là vraiment un progrès.
formation informatique Libre
Pour une fois la notion de logiciel libre est très bien expliquée à la télévision.
Mais malheureusement ,les particuliers ne connaissent quasiment pas l’existence des logiciels libres…
Moi pour ma par quand j’effectue un dépannage ou que je donne une formation informatique,je préconise toujours de télécharger Open office au lieu de continuer à utiliser la version d’essai limitée à 60 jours d’Office.
Je préconise aussi d’utiliser Firefox au lieu d’Internet explorer car pour l’instant je n’ai jamais eu à dépanner un Firefox alors que je ne compte plus les IE vérolés…
Benoit
Libertyformadom
http://www.libertyformadom.fr
perles
Bonjour
Je vous remercie pour la transcription,
personnellement je trouve une difficulté a suivre la vidéo la transcription m a bien aidé
perles
Bonjour
Je vous remercie pour la transcription,
personnellement je trouve une difficulté a suivre la vidéo la transcription m a bien aidé
OPi
@Benoit
En plus de conseiller OpenOffice (ou LibreOffice, je préfère mais …) je préciserais toujours *Microsoft* Office, car parler d’Office seul laisse supposer que c’est le seul, le vrai.
Walane
Très intéressant ! Belle mise en lumière du logiciel libre ! Ça fait 3 ans déjà mais je l’avais jamais vu.
Je trouve par contre souvent trop dommage qu’ils évoquent seulement la liberté de modifier le code source.
Un utilisateur lambda s’en tape les couilles dans un presse-agrumes.
Pour moi voici les éléments les plus importants :
– Pouvoir vendre ou utiliser le logiciel pour une utilisation commerciale. Il ne s’agit pas de se faire du fric sur le dos du créateur mais tout simplement que le logiciel puisse être utilisé librement. Car comment vous faites pour utiliser un logiciel non libre sur votre site Web monnayé avec de la publicité ? Bah vous ne pouvez pas. Le libre c’est aussi ça, avoir des libertés pour se simplifier la vie et donner vie au logiciel pour qu’il soit exécuté partout, dans un environnement commercial ou non.
– L’aspect sécurité du logiciel libre : vu que les sources sont ouverts : c’est un gage de transparence évident et donc de sécurité vu que l’on sait ce qu’éxecute le logiciel.
– Partager, copier, distribuer à volonté le logiciel.
– Et en dernier participer et pouvoir modifier le code source du logiciel.
Voilà, mais c’est déjà super le discours sur l’émission TV. « C’est pas un livre de geek ? » 😀 Faut pas leur en vouloir c’est normal, à nous de prouver le contraire. S’ils savaient ^^ Y’a tellement de penseurs, de blogueurs, de féminstes etc dans cette communauté.
http://walane.net/on-the-web/lien/?…