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Une invitation lancée aux enseignants pour s’inspirer de ce document en vue d’une présentation en classe.
Textes, images, multimédia… C’est bien gentil de critiquer les agissements de Microsoft qui tente de nous faire passer sa propre définition de la « propriété intellectuelle » à l’école mais c’est encore mieux d’être constructif en proposant des alternatives plus conformes à notre propre vision des choses.
Imaginons en effet que vous soyez un professeur souhaitant évoquer cette histoire de « propriété intellectuelle » à l’ère du numérique avec vos élèves. Pour la France cette éventualité est d’autant plus susceptible de se produire qu’elle figure dans le référentiel du B2i pour le domaine Adopter une attitude responsable (par exemple avec la compétence C.2.3 Lorsque j’utilise ou transmets des documents, je vérifie que j’en ai le droit).
Vous avez alors le choix de l’approche.
Vous pouvez par exemple vous appuyer sur le document (powerpoint) Droit et éducation – La propriété intellectuelle de l’association Projetice. Il n’est pas inintéressant en soi, avec par exemple son rappel de la nécessité d’élaborer ensemble une charte TICE dans chaque établissement scolaire. Mais, parcourez-le, et vous vous trouverez peut-être comme moi confronté à la désagréable impression d’évoluer dans le monde austère et intimidant des tu n’as pas le droit de faire ceci, tu n’as pas le droit de faire cela, sauf à demander constamment, au cas pas cas, de fastidieuses et parfois hypothétiques autorisations. Règles qui stipulent q’il n’y pas d‘exception pédagogique. Règles contraignantes qui s’appliquent de fait aussi à mes propres créations. Ici c’est d’abord la fermeture par défaut qui prévaut, et commes les autres mondes ne sont pas mentionnés il semble que ce soit le seul monde possible.
Mais, sans nier l’existence du monde précédent qui a toute sa raison d’être, vous pouvez cependant débuter votre intervention en adoptant une autre approche comme celle proposée par le diaporama ci-dessous au sujet des salutaires licences Creative Commons. Une approche qui ne vous condamne pas à égréner la longue liste de ce que l’on ne peut pas faire mais qui au contraire, affirme d’entrée son ouverture en favorisant le partage des créations numériques, qu’elles soient vôtres ou celles d’autrui. Les demandes d’autorisation n’ont pas disparu mais elles sont ponctuelles et ne sont là que pour ajouter de la liberté à une situation de départ qui garantie au minimum la libre circulation de l’oeuvre. Nous ne sommes plus dans le il est impossible de faire… sauf… mais dans le il est possible de faire… sous telles conditions. Et mine de rien lorsque l’on travaille dans un contexte scolaire c’est une belle bouffée d’oxygène[1].
Ce diaporama est dans le domaine public. Il a été réalisé par Alex Roberts, Rebecca Rojer et Jon Phillips en vue de l’intégrer à un autre beau projet éducatif, à savoir l’OLPC. Vous trouverez toutes les images sources sur cette page du site Creative Commons. Libres à vous de les modifier et d’en adapter les légendes comme bon vous semblera. Nous vous en proposons ci-dessous une version francisée par nos soins[2]. C’est un work in progress non finalisé qui ne demande qu’à se bonifier avec vos propres suggestions de traduction dans les commentaires[3].
Diapo 1
Creative Commons presents : Sharing Creative Works
Creative Commons présente : partager les créations
Diapo 2
Computers are powerful tools for creation. You can use a computer to write stories, draw pictures, take photographs, record music, and capture video.
Les ordinateurs sont de formidables outils pour la création. Vous pouvez utiliser un ordinateur pour écrire des histoires, faire du dessin, prendre des photos, enregistrer de la musique et des vidéos.
Diapo 3
When you draw a picture, only one copy exists. You can keep that copy, or give it to a friend, or maybe even sell it.
Quand vous faites un dessin, il n’existe qu’en un seul exemplaire. Vous pouvez conserver cet exemplaire, le donner à un ami, ou peut-être même le vendre.
Diapo 4
But when you draw a picture on your computer, it is possible to create a perfect copy of that picture. You can keep your picture and give a copy to your friend and even sell a copy, if you like.
Mais quand vous faites un dessin sur votre ordinateur, il est possible de créer une copie à l’identique de ce dessin. Vous pouvez conserver un exemplaire pour vous et en donner un à un ami et même en vendre un, si vous en avez envie.
Diapo 5
Once someone has one copy of your picture, they have the ability to make more exact copies and then share them. They also have the ability to make changes to your picture, and share that. But what if you don’t want them to ?
Une fois que quelqu’un a un exemplaire de votre dessin, cette personne a les moyens d’en faire d’autres copies à l’identique et ensuite de les partager. Cette personne a aussi la possibilité d’apporter des modifications à votre dessin et de les partager. Mais que se passe-t-il si vous n’êtes pas d’accord avec ça ?
Diapo 6
This is where the law comes in. Although anyone with a computer has the ability to share or change your creation, because of copyright law, they are not allowed to do so without your permission. (*)
(*) Though, depending on where you live, there may be specific exceptions to this rule. In the United States, this is called “Fair Use.”
C’est là que la loi entre en jeu. Même si n’importe qu’elle personne disposant d’un ordinateur a techniquement la possibilité de partager ou de modifier votre création, du fait des lois sur les droits d’auteurs, elle n’a pas le droit de le faire sans votre permission, en dehors des exceptions et limitations prévues par la loi applicable dans le pays où vous vivez.
Diapo 7
The law automatically grants you full “copyright” over any creative work you make, including the stories you write, the pictures you draw, the music you record, the photos you take, and the video you capture. This means that unless you say otherwise, nobody may share your work or make changes to it.
La loi vous accorde automatiquement un droit d’auteur exclusif sur toute œuvre de votre création, comme par exemple les histoires que vous pouvez écrire, la musique que vous pouvez enregistrer, les photos que vous pouvez prendre, et les vidéos que vous pouvez filmer. Ce qui signifie que sans avis contraire de votre part, personne ne peut diffuser votre travail ou y apporter des changements.
Diapo 8
But what if you want to legally and clearly allow anyone in the world to share and experience your work ?
Mais que se passe-t-il si vous souhaitez légalement et sans ambigüité autoriser toute personne dans le monde à partager et découvrir votre travail ?
Diapo 9
What if you want others to build upon your work or create something new from your original ?
Que se passe-t-il si vous souhaitez que d’autres puissent se baser sur votre travail pour créer quelque chose de nouveau à partir de l’original ?
Diapo 10
While you could tell each and every person that they may use your original, there is a vastly simpler way. If you would like to allow for your work to be shared around the world, consider using a Creative Commons License.
Vous pourriez dire à chaque personne individuellement qu’elle peut utiliser votre travail original, mais il y a beaucoup plus simple. Si vous voulez permettre le partage de votre travail à travers le monde, vous devriez songer à utiliser une Licence Creative Commons.
Diapo 11
Creative Commons is an organization which provides a collection of free content licenses that you may apply to your work.
Creative Commons est une organisation qui met à votre disposition un ensemble de licences que vous pouvez appliquer à votre travail.
Diapo 12
A content license is a document that states the freedoms and limitations that you apply to your work– an explanation of what someone can and cannot do with what you make.
Une licence sur le contenu est un document qui exprime les libertés et les limitations qui s’appliquent à votre travail – une liste de ce qu’une personne peut ou ne peut pas faire avec votre travail.
Diapo 13
Creative Commons Licenses have been translated into many languages and jurisdictions (legal systems) all over the world. They are designed to work internationally, so that even someone across the globe can understand the permissions you have granted them.
Les licences Creative Commons ont été traduites dans de nombreuses langues et juridictions de part le monde. Elles sont conçues pour être applicables internationalement, de telle façon que même une personne à l’autre bout du monde peut comprendre les droits que vous lui avez concédés.
Diapo 14
Creative Commons offers 6 different licenses so that you can share your work exactly how you want to.
Creative Commons vous propose six licences différentes qui vous permettent de partager votre travail de la façon qui vous convient le mieux.
Diapo 15
All Creative Commons licenses require attribution. This means that others may share your work so long as they credit you. There are some other things to consider when you choose to share your work with the world.
Toutes les licences Creative Commons utilisent la notion de paternité. Ce qui signifie que d’autres peuvent partager votre travail tant qu’il vous en attribuent la paternité. Mais il y a d’autres aspects à prendre en compte quand vous faites le choix de partager votre travail avec le monde.
Diapo 16
Do you want to allow other people to sell or make money off of your creation without having to ask ? Prohibiting people from using your work commercially may limit how widely it is spread.
Souhaitez-vous autoriser d’autres personnes à vendre ou à faire de l’argent avec votre création sans avoir à demander l’autorisation ? Interdire l’utilisation commerciale de votre travail peut réduire son champ de diffusion.
Diapo 17
This also means that no one can make any money from your work without your permission. You can work out individual arrangements for commercial use so that you can get paid when others profit from your creation.
Cela signifie aussi que personne ne peut tirer de profit financier de votre travail sans votre autorisation. Vous pouvez passer des accords individuels pour usage commercial de façon à être rétribué quand d’autres tirent profit de votre création.
Diapo 18
Do you want to allow others to make changes (derivatives) to your work without having to ask ? Prohibiting derivatives might prevent others from making something really cool out of your original.
Souhaitez-vous autoriser d’autres personnes à modifier votre travail (œuvre dérivée) sans avoir à demander l’autorisation ? Interdire les œuvres dérivées peut empêcher d’autre personnes de créer une nouvelle œuvre vraiment intéressante à partir de votre original.
Diapo 19
But, this also means they may not use your work in a way you disagree with.
Mais cela signifie aussi que personne ne peut utiliser votre travail à des fins qui ne vous conviendraient pas.
Diapo 20
If you allow others to make changes to your work, you also need to think about whether or not you will require them to use the same license as you (“Share Alike”). A ShareAlike condition ensures that the terms you chose for your original creation are preserved, but also may limit how much the derivative work can be shared (and in turn, how likely it is for someone to use your original work in a derivative)
Si vous autorisez d’autres personnes à faire des modifications de votre travail, vous devez aussi réfléchir si oui ou non vous souhaitez leur demander d’utiliser la même licence que vous (conditions initiales à l’identique). La clause conditions initiales à l’identique garantie que les choix que vous avez fait pour la création originale seront préservés, mais elle peut aussi limiter la diffusion des œuvres dérivées (et par là-même les possibilités que quelqu’un soit tenté d’utiliser votre original pour une œuvre dérivée)
Diapo 21
On the other hand, Share-Alike ensures that your work is always used under the terms you want, even after many generations of copies and derivatives.
D’un autre coté, les conditions initiales à l’identique garantissent que votre œuvre sera toujours utilisée sous les mêmes conditions, même après plusieurs générations de copies et de dérivés.
Diapo 22
It’s up to you to choose what you will create, and how you will share it with the world !
C’est à vous de décider ce que vous allez créer et comment vous allez le partager avec le monde !
Edit du 25 mars : Illustrant parfaitement le remix culturel permis par les licences Creative Commons, voici une version animée du diaporama réalisée par Alexandre Lebailly à partir de notre traduction.
—> La vidéo au format webm
Shiboom
Pour la diapo 20, il faudrait peut-etre laisser le ShareAlike (c’est le _nom_ de la licence) sinon la traduction est correcte… enfin je crois :}
tib71
Je suis prof d’anglais, et j’avais abordé tout ceci il y a deux ans avec une classe. J’avais alors utilisé les films qu’on trouve sur le site des CC, et le film d’animation Mayer & Bettle (http://www.framasoft.net/article411…)
Il y a du travail à faire auprès des élèves, et insister effectivement sur le "on a le droit de…. sous certaines conditions"
Rémi
bertrand
Très bonne présentation. Je trouve cependant dommage d’utiliser ce verbiage de "propriété intelectuelle".
Sans être connaisseur du domaine, il me semble que les oeuvres de l’esprit sont régies par le droit d’auteur. Le terme me semble nettement plus compréhensible.
Il me semble aussi nécessaire lorsque l’on parle de création d’oeuvre de l’esprit, de mettre en évidence tout l’apport de la société dans laquelle on vit comme source de notre créativité.
Je ne crois guère à l’auteur génial dans sa tour d’ivoire !
La meilleure preuve est la simultanéité de découvertes similaire dans le domaine scientifique ou des techniques. On pense quelque chose parce que l’environnement culturel, technique, scientifique… est mur pour l’idée.
Toute oeuvre est donc collective. C’est en tous les cas une bonne justification à la montée dans le domaine public à l’expiration des droits de l’auteur.
Cordialement
Charlie
Je ne suis pas un professeur qui souhaite évoquer cette histoire de « propriété intellectuelle » à l’ère du numérique avec mes élèves, car c’est un terme mensonger, créé de toutes pièces par le WIPO .
En revanche, à l’occasion de, je leur apprends à distinguer le droit d’auteur, le droit des brevets, le droit des marques, toutes choses fort différentes nées dans des contextes historiques spécifiques et dotées de logiques internes, englobées dans "propriété intellectuelle".
L’item du B2i "Lorsque j’utilise ou transmets des documents, je vérifie que j’en ai le droit" est imprécis. Il peut tout aussi bien concerner le droit à l’image que le droit d’auteur ou l’apologie au crime et à la haine raciale. Surout, et c’est un autre débat, il est venu remplacer l’item : " Je connais l’existence des lois relatives aux utilisations d’informations nominatives, et je sais qu’il faut respecter les limites relatives à ces utilisations." . Avec cet item, le professeur d’éducation civique pouvait se référer explicitement à la CNIL et à la shoah.
Pour terminer sur une note plus optimiste, d’espoir et de chaleur humaine, je te remercie pour la traduction de ce document sur la Creative Commons.
En effet, j’anime un club de "musiques libres" dans le cadre du foyer. Les élèves ont un casque sur la tête et doivent sélectionner les musiques qui leur plaisent, les chroniquer et les télécharger.
De temps en temps, ils présentent au groupe leur sélection pour une discussion esthétique. Si une même musique libre est plébiscitée (ce qui est rare) ou bien notée par plusieurs adolescents, je formule alors l’hypothèse que se dégage peut être une tendance musicale.
L’objectif est d’avoir un distributeur de musiques libres que les élèves pourront charger sur leur MP3…
Je vais donc passer ce diaporama aux élèves dès lundi, en ayant une pensée pour toi.
Merci
Charlie
geistis3
Deux remarques :
-les licences CC ne sont pas les seules à offrir des libertés d’usage. Toute création (texte, musique, photo ou encore vidéo) placée sous licence art libre, sous une autre licence "libre" ou mise dans le domaine public a sa place dans un contexte enseignement/respect de la législation (propriété intellectuelle – droit d’auteur). Oui la CC by-sa est excellente car libre, mais attention au phénomène réducteur, à l’évidence unique : libre = CC.
-le b2i existe aussi en primaire (avec la même exigence de respect de la propriété intellectuelle !!!). Le niveau d’abstraction nécessaire pour comprendre les concepts juridiques : inaccessible pour des enfants de 10/11 ans.
Donc pas question de parler de licences. La sensibilisation passe par :
1-le respect du travail de l’autre (= les céations visibles sur internet), le cas général associé à l’interdiction de copier
2-l’utilisation d’url spécifiques (wikipédia, artlibre.org,…) l’exception associée à la permission de copier.
Simplificateur certes mais compréhensible.
Charlie Nestel
Bien sûr qu’existent d’autres licences, pour les documents, les images, les musiques, etc.
Cela étant dit, des licences comme la LAL (Licence Art libre) est difficilement utilisable pour la production de documents en milieu scolaire.
Un exemple : la publication de photographies d’un spectacle théâtral, de chant choral, etc. La LAL autorise la modification. Autoriser la modification de l’image d’un enfant (dont les parents auraient autorisé la publication) doit s’accompagner d’un certain nombre de précautions comme la non-autorisation de modifier. Dans cet exemple, la Creative Commons permet le droit de copie mais en respectant l’intégrité de l’oeuvre.
Cela étant dit, du strict point de vue de la philosophie du logiciel libre (c’est-à-dire de la philosophie GNU), certaines licences de type Creative commons ne sont pas libres en ce qu’elles restreignent la redistribution pour un usage commercial. Tout un chacun peut comprendre que nous avons besoin des éditeurs pour la publication d’ouvrages techniques, le plus souvent issus de traduction.
Lorsque Richard Stallman a lancé la licence GNU FDL (licence de libre documentation) c’était dans la double intention de libérer la documentation technique pour les logiciels libres et libérer les ouvrages dédiés à l’instruction.
Mais contrairement à la licence des logiciels libres, la GNU FDL ne prévoit en aucune manière le droit automatique de modification.
La philosophie GNU distingue les oeuvres fonctionnelles dont relèvent les logiciels, des oeuvres d’opinion, des contrats, etc, qui se verraient altérés si on les modifiait.
Wikipédia qui est sous licence GNU FDL autorise la modification par choix, ce qui peut se comprendre pour les oeuvres interactives. Mais ce droit de mofication n’est qu’une variante de la GNU FDL qui peut très bien comporter des sections non modifiables, etc.
De ce fait, la GNU FDL contrairement aux licences de type verbatim, Creative Commons, est plus complexe à utiliser dans le cadre d’une production numérique avec les élèves.
Pour la publication d’ouvrages réalisés par des enseignants, elle est davantage efficiente et élaborée.
Amicalement Charlie
Qui©he
Ça c’est du post !
Impressionnée
Chris
Reste à espérer qu’un tel projet puisse avoir une réelle impacte sur ces futurs "consommateurs" de logiciels, et que l’idée que le modèle propriétaire est dépassé à notre époque puisse faire également son chemin. Belle initiative en tout cas!
ComputerHotline
Pour rappel, il existe ces groupes d’images sous CC en vue d’être utilisées à l’école :
http://www.flickr.com/groups/475803…
http://www.ipernity.com/group/41767
Joron
Comme ce diapo a une vocation pédagogique, je crois aussi que le vocabulaire pourraît être simplifié… Il n’en serait que plus clair.