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Salut à toi ! (arf, pouvais pas ne pas la faire !)
Voici un projet qui utilise le protocole XMPP pour communiquer tous azimuts, et librement. Les deux sympathiques gaillards qui le portent sont convaincus qu’on n’utilise pas impunément les réseaux sociaux, voire que ce sont eux qui se servent de nous.
Ça tombe bien, c’est ce que nous expliquons aussi avec notre campagne Dégooglisons Internet !
Bon, présentez-vous, les gars. Vous êtes qui ?
Goffi : Salut ! Officiellement nous sommes une association loi 1901 créée en 2014. En pratique 2 amis qui se sont connus sur « le Caillou » (le petit nom qu’on donne à la Nouvelle Calédonie).
Adrien : On s’est connus à la fac de Nouméa, ensuite chacun est allé poursuivre ses études en informatique en France métropolitaine, mais pas dans la même ville. Ce qui ne nous a pas empêchés de rester en contact et puis depuis environ 2 ans, comme j’ai rejoint Goffi sur le projet, on se voit beaucoup plus souvent.
Le nom est issu de la chanson des Bérus ?
Goffi : Oui. Le nom a sa petite histoire : il s’agissait d’éviter un énième nom bateau anglophone, et « salut à toi » semblait bien adapté pour un outil de communication. Et puis la graphie en montagne russe (avec un T majuscule et l’accent) avait un côté amusant : SàT. Quand on a créé l’association en 2014, après avoir utilisé de manière informelle le nom pendant des années, on a demandé aux Bérus si ça ne leur posait pas de problème : non seulement ils ont répondu, mais en plus ils connaissaient déjà le projet (avec le nom ils étaient tombé dessus) ! Ça nous a fait bien plaisir.
Il sert à quoi, votre projet ?
Goffi : À communiquer. Tu peux appeler ça un « réseau social » si tu veux, même si on n’aime pas trop ce terme. Plus concrètement ça permet de faire tout un tas de choses comme bloguer (publiquement ou avec uniquement famille ou amis), partager des fichiers (via un serveur ou en pair à pair), chatter avec une seule personne ou en groupe, jouer, faire du travail collaboratif, etc. Avec plein de trucs sympathiques comme du chiffrement ou des « passerelles » pour lire et écrire sur d’autres réseaux (nous envisageons par exemple d’en faire une pour Diaspora et donc la Framasphère).
Nous avons en projet une version utilisant « Tor » (pour un meilleur anonymat), voire de la visioconférence sur le plus long terme.
C’est aussi une brique pour créer d’autres choses, d’autres réseaux ou outils (finalement on revient toujours aux mêmes choses : publier des messages, commenter, partager des fichiers, etc).
D’où vous est venue l’idée ?
Goffi : Au début (vers 2008/2009) l’idée était de faire un logiciel utilisant « XMPP » (un terme barbare pour désigner un « protocole » libre de communication, soit une sorte de langage que les logiciels peuvent utiliser pour communiquer entre eux) car aucun ne me plaisait tout à fait. Puis rapidement le projet a grossi et s’est politisé. Politisé dans le sens où les outils de communication sont aujourd’hui au centre de nos vies : c’est à travers eux qu’on contacte famille et amis éloignés, qu’on se tient au courant de l’évolution du monde, et même en partie qu’on se forge nos opinions et façons de penser. Un des buts du projet et de l’association est de prendre conscience de ça et d’y réfléchir.
Adrien : Dire que l’outil influence à ce point les personnes, ce n’est pas évident a saisir et je pense que beaucoup trouvent ça un peu farfelu. Mais il y a un bon exemple qui a été donné, justement par quelqu’un de Framasoft, lors de la table ronde sur les nouveaux médias aux Rencontres Mondiales du Logiciel Libre cette année. C’est Pouhiou qui disait qu’en tant que rédacteur de blog, il se devait de suivre les règles de Google s’il voulait que ses articles soient lus. On pense ce qu’on veut de la pertinence de ces règles, toujours est-il qu’il s’agit de critères qui ne sont pas forcément sensibles pour un rédacteur, qui va se retrouver freiné dans sa créativité.
C’est tout du libre ?
Goffi : Oui bien sûr ! On fait très attention à ça, c’est une partie importante de notre philosophie. Nous cherchons à être le plus éthique possible, et nous avons même écrit un « contrat social » qui explique clairement nos intentions. Cela se sent aussi dans notre choix d’une association 1901 pour nous organiser (en autogestion, pas de président/secrétaire/trésorier chez nous), notre refus ferme de la publicité ou encore notre présence régulière sur des événements où on peut rencontrer et discuter « en vrai » avec les gens. D’autre part, nous faisons certains choix comme celui de ne pas être sur les grands réseaux privés (tel que le gros truc bleu ou celui qui a inspiré Stromae).
Ben oui, mais du coup est-ce que vous arrivez à vous faire connaître ? Vous savez ce qu’on dit : il faut aller là où sont les gens. Nous, par exemple, on touitte beaucoup.
Adrien : C’est évidemment très difficile de se faire connaître, et parfois c’est un peu décourageant car on a l’impression de bosser dans le vide. Heureusement qu’il y a tout de même quelques personnes qui nous soutiennent, et on espère que la pâte va finir par prendre. Après moi je ne suis pas forcément pour aller toujours chercher les gens là où ils sont. Il y a une partie du chemin que chacun doit faire tout seul. On ne veut pas que les gens viennent utiliser notre outil seulement par effet de mode, on aimerait qu’ils comprennent vraiment pourquoi c’est important et quels sont les enjeux. Ça c’est notre coté politisé, et puis on veut aussi un maximum de transparence et de cohérence. On s’est mis d’accord dès le début qu’on n’utiliserait pas pour le projet les réseaux sociaux populaires que l’on critique.
Goffi : C’est beaucoup plus difficile en effet mais c’est un choix, il y a une question de cohérence avec notre discours : utiliser ces réseaux c’est les justifier, leur donner une raison d’être. On ne jette pas non plus la pierre sur ceux qui y sont (je comprends tout à fait qu’on veuille chercher les gens partout où c’est possible), mais si tout le monde est là bas, l’intérêt des outils libres et standards est amoindri.
Ce qui est triste par contre, c’est qu’on a l’impression de ne pas exister en dehors de ces réseaux (y compris chez les libristes), on manque de canaux alternatifs visibles. J’apprécie d’ailleurs beaucoup votre travail actuel pour fournir des alternatives justement (et celui des autres projets comme Diaspora, Movim, Gnu Social, etc.).
Vous avez lancé une campagne de financement participatif. Quand on a discuté je n’avais pas eu l’impression que c’était votre truc, les histoires de sous. Quel est l’objectif de celle-ci ? Pourquoi il vous en faut ?
Adrien : Ça fait un moment qu’on travaille sur ce projet comme quelqu’un travaillerait dans une boite. Avec beaucoup plus de liberté bien sûr, car on décide de ce que l’on fait, quand et comment. Mais c’est quand même beaucoup de boulot pour lequel on n’est pas payé. Notre but quand on a monté l’association l’année dernière, c’était de récolter suffisamment de fonds au travers des cotisations et dons à l’association pour pouvoir financer des salaires. C’est du financement participatif à l’état pur, ça existe depuis très longtemps et ce qu’on appelle aujourd’hui crowdfunding, c’est la même chose mais avec quelques codes en plus. Cet été, on a lancé une première campagne par nos propres moyens et sans a priori, directement sur notre site web, pour voir ce que ça donne. On a reçu suffisamment de contributions pour pouvoir payer les frais courants de l’association et même un petit plus (merci à tous les soutiens !), mais pas assez pour parler de salaire. On essaie donc maintenant la même chose mais remise au goût du jour.
L’objectif de cette campagne, c’est de financer le développement d’une interface pour les téléphones et tablettes Android. On a besoin pour ça de 3000 euros, même si en réalité il nous faudrait un peu plus, mais tant qu’on n’est pas mieux connus on peut difficilement demander davantage. En pratique, cet argent va servir pour payer un CDD, tout simplement.
Goffi : Pas grand chose à ajouter, on a longtemps hésité avant de faire ce type de campagne, on a finalement décidé de le faire à travers une plate-forme spécialisée dans l’ESS (Économie Sociale et Solidaire). C’est aussi un moyen de nous faire connaître et de gagner en crédibilité (si on réussit !)
Et on peut vous aider autrement ?
Adrien : Nos compagnes et certains amis nous ont beaucoup aidés, notamment pour préparer la vidéo de la campagne. On aime bien la regarder cette vidéo car elle nous donne vraiment l’impression d’appartenir a une communauté. Outre l’argent, c’est de ça qu’on a vraiment besoin, une communauté autour du logiciel. Il y a déjà quelques personnes qui nous filent des coups de main, mais vu l’envergure du projet, il en faut plus. Après chacun peut participer comme il le veut et comme il le peut : utilisateur, développeur, graphiste, testeur, rédacteur de documentation, traducteur, porteur du message… Et on aimerait bien voir plus de personnes qui essaient d’installer Libervia pour le faire tourner sur leur propre serveur. On n’a pas l’intention ni la capacité d’accueillir tout le monde sur https://libervia.org, qui n’est qu’un service de démonstration. Et puis, plus spécifiquement pendant la campagne, on a besoin d’articles qui parlent de nous pour nous faire connaître. Merci Framasoft :-)
Goffi : En ce moment : soutenir la campagne ! C’est essentiel pour notre crédibilité. Sinon, venir nous voir, en ligne ou en vrai, discuter. Parler de nous nous aide bien sûr, adhérer à l’association (ce qui peut se faire sans cotisation) montre un intérêt certain qui nous motive et nous donne plus de poids. On a beaucoup de mal à se faire connaître à l’étranger, un coup de pouce là dessus serait très utile. Et sinon on aime beaucoup les débats ! En organiser permet non seulement de rencontrer des gens, mais aussi de réfléchir ensemble.
Merci beaucoup à Framasoft, et encore bravo pour votre travail ! Nous apprécions beaucoup ce que vous faites, et c’est un plaisir de discuter avec vous quand on vous croise.
ariane
très intéressant! Belle initiative!
Thatoo
Promis, si je flaire un événement intéressant sur ces questions là en Iran, je vous envoie une invitation 🙂
Goffi
Nous venons de passer le premier palier sur http://www.arizuka.com/fr/projects/libervia, un grand merci à tous ceux qui nous ont soutenu jusqu’ici que ça soit financièrement ou en relayant la campagne (merci frama !). Encore 20 jours pour passer les 2 paliers suivants. Nous préparons aussi une version pour très bientôt, qui devrait faire parler d’elle 🙂
À bientôt !