Voici près d’un an, une douzaine d’auteurices, réunis par la Coop des communs, ont donné naissance à « Les communs de proximité. Origines, caractérisation, perspectives ». Plusieurs d’entre eux ont accepté de répondre à quelques-unes de nos questions.
Bonjour, vous avez sorti, en mars dernier, un ouvrage collectif traitant des communs, nous avons eu envie d’en savoir plus. Mais avant cela, pouvez-vous vous présenter pour le Framablog ?
Justine Loizeau : Cet ouvrage est le résultat d’un travail collectif au sein du groupe « Services de Proximité » de La Coop des Communs. Cette dernière est une association fondée en 2016 dont le but est de confronter l’expérience acquise entre praticien
Le groupe « Services de Proximité » a rassemblé de 2020 à 2023 une trentaine de membres dont une quinzaine active sur le terrain. Seule une partie a pris la plume : 11 auteur ices. J’ai participé à la coordination de l’ouvrage avec Nicole Alix et Benjamin Coriat.

Votre livre fait la lumière sur diverses expériences de communs de proximité, par le biais de plusieurs articles. Pourriez-vous nous donner une définition de ce qu’est un commun, et ce que vous désignez par « Communs de proximité » ?
Justine : C’est Benjamin Coriat qui propose une définition dans son chapitre. En se référant à Ostrom, on peut définir les communs selon le triptyque : ressource – communauté – règles. Un commun correspond à une forme d’organisation sociale selon laquelle une communauté humaine gère une ressource selon des règles qu’elle a auto-produite. On parle aussi d’auto-gouvernance.
Selon Benjamin Coriat, les communs de proximité correspondent à un type particulier de commun qu’il définit ainsi : « toute entité ancrée sur un territoire (sa population, sa géophysique…), d’initiative citoyenne et régie par des règles élaborées en commun, dont la visée est le service de l’intérêt général et du bien commun au sens où les services proposés sont conçus pour contribuer à la reproduction conjointe des écosystèmes et des communautés qui constituent le territoire considéré. » Le trait constitutif de ce type de commun est de répondre avant tout à l’intérêt général, et non à l’intérêt collectif. Quelle différence ? L’intérêt collectif, c’est quand une organisation, ici un commun, répond à l’intérêt de ses membres (et uniquement de ses membres). Pour répondre à l’intérêt général, il faut au moins que les bénéficiaires du commun dépasse le cercle de ses membres.
Dans la définition que vous explicitez d’un commun de proximité, une précondition est que le service proposé le soit sur la base d’une initiative citoyenne « auto organisée ». Aucun service public ne pourrait donc prétendre à être un commun de proximité ?
Justine : Dans notre groupe, nous avons beaucoup réfléchi à la notion de service public. J’ai appris que tous les pays ne donnaient pas autant d’importance à cette notion que la France. Jean-Claude Boual montre par exemple dans son chapitre, qu’au niveau européen, on utilise plutôt l’expression de « service d’intérêt économique général » qui est teintée d’une certaine vision politique, notamment que ces services seront plus efficaces s’ils sont régis par le principe de concurrence. Cette vision va à l’encontre de monopoles d’État pour fournir les services d’électricité, d’eau, de transport.
Et si la notion de service public est très présente dans le débat public français, c’est finalement très difficile d’en formuler une définition simple. On a donc choisi d’admettre au début de notre ouvrage, la simplification de qualifier le service public comme ce qui renvoie à une activité d’intérêt général (enseignement, police, justice) gouverné par l’administration publique qui les norme. L’administration ne les opère pas forcément directement. En effet, le service public peut être délégué au secteur privé marchand (ex : gestion des déchets ou de l’eau). Mais dans ce second cas, elle donne des obligations au gestionnaire. De plus, le service public répond en théorie à des grands principes : continuité (par exemple, en cas de grève, il est possible de procéder à une réquisition), égalité des usagèr e s devant le service public et adaptabilité aux évolutions. Enfin, dans la tradition française, les services publics ont la particularité d’être conçus comme des services universels. On observe même une tendance à l’universalisation d’un usager type. L’attention est alors plus faible aux spécificités de chaque personne.
En bref, on voit que la particularité des services publics en France c’est d’être régis par le haut. Or les communs sont des dynamiques par le bas. On part des besoins et des capacités des personnes, mais aussi des spécificités des territoires. Donc, les services produits par ces initiatives correspondent à des choses que le service public ne fait pas ou ne fera jamais. Par exemple, dans son chapitre, Julie Lequin évoque un projet de maison de l’alimentation dans le Pays Foyen (33). C’est un projet tellement construit sur les besoins spécifiques du territoire, qu’il n’aurait jamais pu être entièrement conçu par une administration publique. Pour preuve, ce projet a des difficultés à entrer dans les « cases administratives » pour obtenir des financements !
En France les Communs sont parfois menacés par les pouvoirs publics, en partie de façon délibérée, par exemple pour transférer des communs existants vers le privé, et parfois sans l’avoir vraiment conscientisé, en raison de la frontière très forte entre service public et usagers, d’une méfiance envers les projets collectifs, ou d’une croyance en l’incompétence des citoyen⋅es. Comment arriver à faire coexister les deux selon vous ? Quels secteurs / services publics sont les plus ouverts aux Communs, et au contraire les plus fermés ?
Nicole Alix : les « services publics » et les « communs » sont deux concepts difficiles à appréhender, aussi leurs rapports sont forcément compliqués ! Dans les chapitres 6 et 7, on précise : il ne faut pas confondre avec « le service public » ni avec les services rendus par les pouvoirs publics car certains sont délégués au « privé » comme mentionné dans la question ; et le privé peut être lucratif -transports, énergie..- ou privé non lucratif -service public hospitalier, par exemple, auquel participent de nombreuses associations et, désormais le « service public de la petite enfance). Et il ne faut pas non plus confondre service public et service d’intérêt général !
Ce que nous pensons, c’est que les communs peuvent, en insufflant des modes de gouvernance définis et mis en œuvre par les personnes participantes, être un élément de dynamisation et d’imagination dans la gouvernance des services publics parce qu’ils partent d’initiatives de proximité et de besoins concrets des populations.
La forme associative est choisie par beaucoup de personnes concernées par un besoin pour s’organiser entre elles, afin de bien le définir, en contrôler en permanence et dans le temps les modalités de fabrication de la
réponse et de la façon dont cette réponse aux besoins est délivrée. Chaque mot compte dans cette phrase un peu longue, comme expliqué dans le chapitre sur les liens entre associations et communs.
Et n’oublions pas qu’il existe des « secteurs » dans lesquels il n’y a jamais de définition de « service public » (le numérique par exemple ?) et que, donc, les forces citoyennes organisées pour servir l’intérêt général sont d’autant plus précieuses !
Vous rappelez qu’il y a eu une volonté politique, dans les années 1980 de séparer le pouvoir économique et le pouvoir citoyen des associations. Pouvez-vous nous expliquer l’intérêt de posséder ces deux pouvoirs pour les associations ?
Nicole : Jusqu’aux années 80, personne n’avait conscience de la puissance économique que représentaient les associations, qui géraient par exemple des activités sociales, d’éducation populaire, sportive, culturelles.. C’est à l’occasion de l’arrivée de la gauche au pouvoir qu’on l’a identifiée et, du coup, la gauche a pensé qu’il fallait faire un tri entre les associations « gestionnaires » et celles qui ne feraient que de la défense de droits et différencier les modèles et les règles applicables. Mais tout le milieu associatif a protesté, au motif que différencier l’objectif politique de la méthode pour y parvenir aboutit à priver de moyens d’action ! Si je fais de l’éducation populaire, je fais de la gestion aussi bien que de la recherche d’émancipation ! Donc les associations ont eu dès les années 80, de bonnes raisons de négocier la possibilité de garder des activités économiques sous chapeau associatif (cf chapitre 6) : c’est la garantie d’un rôle de contre-pouvoir. Une organisation qui cumule un pouvoir citoyen (politique donc), ET un pouvoir économique (c’est-à-dire la possibilité de répondre aux besoins des personnes qu’elles veulent défendre, promouvoir) est éminemment subversif. L’histoire montre que, lorsque des mouvements sociaux acquièrent un pouvoir économique, ils deviennent dangereux, car ils peuvent contrebalancer les forces de marché ou l’ordre public administré. L’État est alors tenté de les priver de leurs ressources financières : par exemple, il a enlevé aux syndicats ouvriers la gestion des œuvres sociales que ceux-ci avaient créées au sein des entreprises au 19ème siècle et les a confiées à des comités d’entreprise sans personnalité juridique, présidés par le chef d’entreprise.

Vous évoquez les réactions de l’état face à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes ou encore à Sainte-Soline, comment pourrait-on redéfinir la notion de commun foncier du XXIe siècle ?
Nicole : C’est une bonne question sur laquelle La Coop des Communs continue ses travaux, notamment avec la Chaire Valcom. Les communs fonciers ancestraux représentent une forme de vitalisation des espaces ruraux qui peuvent servir au-delà de ce pour quoi ils ont été conçus dans l’histoire. Peut-être pour un prochain livre ?
Le livre présente l’expérience de commun alimentaire par les habitant
e s du Pays Foyen. Quels sont les éléments essentiels pour mettre en place une telle initiative ? Quels en sont les enjeux ?Julie Lequin : Il me semble qu’on ne devrait pas poser la question de cette façon, notamment parce qu’elle masque l’essentiel : la question du QUI met en place (et pour qui) – surtout que cela permet de conduire ensuite à la question du pourquoi.
Ainsi, le point de départ d’une telle initiative, c’est un/des besoins d’habitants. Besoins qui n’arrivent pas toujours à s’exprimer, et qu’il faut donc parfois accompagner dans leur émergence et leur expression – a minima sans les dévoyer, si possible sans (trop) les transformer – c’est-à-dire sans y plaquer ses propres intentions. Dans le cas du Pays Foyen, on retrouve certaines populations éloignées cognitivement, géographiquement ou culturellement des espaces où se discutent une partie des enjeux sociétaux, politiques, etc. Il y a donc un enjeu, dans de telles initiatives, d’avoir une attention particulière à aller chercher cette parole.
Et ensuite, le chemin doit se construire AVEC les personnes – à la mesure de comment elles peuvent, elles-mêmes, s’impliquer dans ce type d’initiative. Bien souvent, de façon hétérogène et cette diversité doit être accueillie de façon à proposer, en retour, différentes modalités de participation. Dans le coin du Pays Foyen, c’est aussi bien participer à cultiver la parcelle collective du jardin partagé, qu’organiser un ciné-débat sur l’alimentation, que d’être bénévole aux Restos du Cœur, que de donner un coup de main sur des ateliers de cuisine de rue, etc. « Faire avec » demande du temps, de l’attention et de l’entretien de la part de la communauté et cela reste un des enjeux majeurs du commun alimentaire.
Un article traite d’un exemple de Communs en Italie. En quoi le traitement des pouvoirs publics envers les Communs est différent d’avec la France ?
Nicole : Dans leur chapitre, Daniela Ciaffi, Emanuela Saporito et Ianira Vassallo expliquent que la Constitution Italienne consacre le principe de subsidiarité « horizontal » : « L’État, les Régions, les Villes Métropolitaines, les Provinces et les Municipalités favorisent l’initiative autonome des citoyens, particuliers et associations, pour la réalisation d’activités d’intérêt général, sur la base du principe de subsidiarité ». Le principe de subsidiarité est également présent dans la loi sociale allemande, sous une autre forme. Dans ces traditions, il renvoie à une forme d’aide qui encourage et autorise l’autonomie des échelons « de base » avec le secours de l’échelon « supérieur ». Dans les Traités européens la subsidiarité signifie au contraire que l’UE n’intervient que « si et dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres ». En tout état de cause, non seulement ce principe n’existe pas en droit français, mais la façon dont nous avons construit l’État français s’y oppose souvent. D’où l’opinion que notre Etan français serait jacobin et l’idée qui en découle que tous les « services au public » devraient être réalisés par des fonctionnaires dans un service public.

Dans le chapitre 8, vous soulignez le risque que le service public s’accapare les communs. N’est-il pas paradoxal de s’appuyer sur deux études de cas qui sont déjà des services publics (Freinet et les lycées auto-gérés) ?
Nicole : Le chapitre de Thomas Perroud éclaire justement la situation française spécifique où le service public défini comme un service rendu par des fonctionnaires de la fonction publique s’oppose aux initiatives de participation et de contribution comme on le souhaiterait dans les communs. On aurait aussi pu connaître une situation similaire dans l’action sociale, mais, à la différence du monde de l’éducation, dans ce secteur de l’action sociale l’énorme majorité (90 % dans le secteur du handicap) était organisée sous forme associative. Ces associations se sont fédérées pour négocier avec les pouvoirs publics, en tentant de garder leur autonomie d’action (cf fin du chapitre 6).
Sans divulgâcher tout le contenu du livre, pourriez-vous nous expliquer en quelques mots les points communs et les différences entre l’ESS et les communs de proximité ?
Nicole : Nous le disons dans la conclusion notamment : l’ESS a été le lieu de la formation d’une série remarquable d’innovations institutionnelles visant à brider le pouvoir du capital (et à accroître le pouvoir des personnes concernées sur les services et solidarités qui leur sont nécessaires ainsi que le pouvoir des salarié
e s sur leurs conditions de vie et de travail. Mais l’ESS est née avec l’industrialisation au 19ème siècle. Les communs se sont constitués dans l’histoire longue et se déploient désormais dans tout un autre âge, spécialement celui des limites écologiques atteintes et désormais franchies par cet industrialisme et l’extractivisme sur lequel il est bâti. L’ époque de l’Anthropocène oblige à un nouveau souci central, celui d’assumer le défi tout à la fois de l’accès à toutes et tous aux ressources essentielles à leur subsistance et de préserver l’intégrité des écosystèmes pour le présent mais aussi pour les générations futures. C’est ainsi que le commun comprend dans sa constitution même l’idée que lorsque les règles de « prélèvement » des ressources, conçues pour assurer la reproduction des communauté humaines, menacent la biodiversité ou l’écosystème, celles-ci doivent être modifiées pour assurer la préservation des écosystèmes menacés. Cette dernière idée n’est pas dans les gènes des formes institutionnelles de l’ESS. Dans la conclusion nous écrivons : « Ainsi et au total, il s’agit pour les communs d’une manière d’habiter le monde en rupture avec l’industrialisme et l’extractivisme qui en est le principe moteur. La question de l’écologie est au cœur des communs et en fonde le principe. Elle est ‘marginale’ ou sans objet pour l’ESS et ses entités qui peuvent décider – ou non – d’en faire un de ses objets. »Vous dites qu’il reste quelques efforts à faire par les fablabs pour devenir de réels Communs. Il existe de nombreux fablab y compris dans les milieux ruraux, certains plus institutionnalisés que d’autres. Pour nos lecteurices agissant au sein de fablabs, qu’est-ce qui peut faire qu’un fablab devienne un commun, au niveau local / réseau des fablabs ?
Matei Gheorghiu : En deux mots, il faut de l’ouverture et de la structure.
Pour développer, il est capital que les fablabs et espaces du faire (lieux où se regroupent des « makers » ou « faiseurs » pour se réaliser et réaliser leurs projets et partager des solutions et des outils) au niveau local trouvent leur place dans l’écosystème de proximité (ce n’est pas uniquement, ou pas principalement de leur ressort, on sait bien que la plupart manque déjà de moyens pour subsister). Les fablabs doivent certes être ouverts (ce n’est pas toujours le cas) mais leurs différents partenaires doivent également engager de réelles ressources en contrepartie de ce qu’un outil tel que le fablab (équipé de machines mais surtout de compétences et « branché » sur un réseau mondial) peut leur apporter : une ressourcerie low-tech capable de développer des solutions techniques de manière frugale et dans un temps très court, une plateforme de formation et de partage, connectée aussi bien à des structures similaires qu’à d’autres de nature très différente (un fablab rural peut être en contact direct avec un fablab universitaire ou métropolitain, avec tout ce que ça implique de bénéfices croisés), une capacité d’action fulgurante en cas de crise, comme l’a démontré la mobilisation des makers lors du Covid-19, etc.
Les makers doivent donc soutenir le développement du fablab local et son articulation harmonieuse aux structures de l’environnement, et les responsables de ces structures (publiques et privées) doivent accepter de conférer aux fablabs une certaine autonomie et d’intégrer à leurs logiques de fonctionnement ce que leur nature (ouverture, fonctionnement en pair à pair et en réseau, primauté de l’expérimentation …) impose, et pas seulement les cantonner à un rôle de gadget de communication.
Les fablabs et leurs partenaires doivent aussi continuer leur travail de structuration en réseau, sans lequel ces caractéristiques avantageuses sont incertaines et précaires (elles ne reposent que sur une coïncidence et non sur une organisation qui veille à leur maintien et à son caractère équitable). Pour ce faire, la première obligation est de participer à la vie du réseau (passer une heure par semaine sur le forum, c’est augmenter les chances qu’un besoin ou une question soient pris en charge en mode pair à pair ; participer à la vie démocratique du réseau, c’est s’assurer qu’il maintient son caractère de commun).
Le rôle du niveau Réseau et de ses animateurs est de soutenir le développement de la communauté, de favoriser le brassage des lieux et des personnes, d’accompagner l’enrichissement d’un capital informationnel commun, dans le respect des principes directeurs qui le constituent : inclusion (soin accordé à l’accueil d’autrui et à l’ensemble de ses « différences »), subsidiarité (préférence initiale pour l’action de proximité et remontée si besoin au niveau supérieur), articulation systématique à l’intérêt général (attention à prendre en considération l’ensemble avant la partie), internationalisme (ne pas préférer par exemple une solution 100 % française quand il est plus évident et efficace de travailler avec le fablab de l’autre côté de la frontière, ou quand la solution vient, par la voie des ondes, de l’autre bout de la terre, mais aussi et surtout œuvrer en se rappelant que les fablabs et leur réseau sont d’abord et avant tout un outil de paix et de solidarité).
Quelles seraient les clés pour que les communs de proximité prennent de l’ampleur dans les prochaines années ?
Justine : Dans notre conclusion, nous proposons plusieurs pistes, qu’il est possible de consulter. Je retiens personnellement une chose : il est incontournable que les personnes se réapproprient la légitimé à s’organiser. Les personnes sont les premières expertes de leurs besoins et de leur territoire. Mais c’est très difficile de se sentir capable quand on assène que seules certaines entreprises, ou certaines institutions peuvent avoir la compétence de prendre les choses en charge, et à leur manière.
Un énorme merci aux différents auteurices pour le temps passé à répondre à nos questions !
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