« Avant tout, ne pas nuire », rappelle Laurent Chemla
Votée dans l’urgence et portée par une personnalité politique au moins controversée, la loi Avia qui s’appliquera dès le mois de juillet vise à réprimer la « cyberhaine ». Un grand nombre de voix se sont pourtant élevées pour émettre des mises en garde, comme dans cette alerte « la loi Avia est évidemment une atteinte gravissime à la liberté d’expression » et même dans des tribunes du Figaro ici et là.
Nous avons choisi de reprendre ici celle de Laurent Chemla (c’est qui ce gars-là ?) qui fustige la précipitation brouillonne et souhaite l’application à la vie politique d’un fort ancien principe en médecine. Elle est parue d’abord sur son blog Médiapart et il nous autorise à la reproduire.
À noter : cet article bénéficie désormais d’une version audio.
Merci à Sualtam, auteur de lectureaudio.fr pour cette contribution active.
Primum non nocere — par Laurent Chemla
Si la médecine a retenu (entre autres) d’Hippocrate son fameux « primum non nocere » (« Avant tout, ne pas nuire »), on peut regretter que le politique n’ait pas, lui aussi, appris ce principe de prudence abstentionniste, et que trop souvent il use du mantra inverse : « Il faut faire quelque chose ».
Non. Il ne faut jamais « faire quelque chose ».
Déjà parce que, dans la très grande majorité des cas, « faire quelque chose » c’est faire n’importe quoi.
Ensuite parce que, souvent, ne rien faire est moins nocif que d’inventer des solutions qui semblent faciles et rapides mais qui risquent surtout d’aggraver les choses.
Et enfin parce que, presque toujours, on se retrouve à justifier l’injustifiable une fois qu’on a mal agi. Au motif évidemment qu’il fallait bien « faire quelque chose ».
Loi « contre la haine » ?
Prenons l’exemple de la loi Avia « contre la haine en ligne ».
Celle-ci part d’un constat: la haine se diffuse – en ligne comme partout, et (c’est le grand principe de cette loi, que Mme Avia a clairement exposé ) « ce qui est interdit dans l’espace réel doit l’être également dans l’espace virtuel ».
Passons rapidement sur le fait que – dans la rue – la haine est partout sans que rien ou presque ne s’y oppose. Entre usagers de la route, entre piétons, entre voisins, entre manifestants et contre-manifestants, entre police et manifestants, la haine est devenue dans nos sociétés occidentales presque un mode de vie, au point qu’on s’étonne et se méfie du moindre geste bienveillant non sollicité. Et la rue… la rue est le théâtre quotidien du harcèlement des femmes et des exclus, des insultes, des remarques sexistes, homophobes, racistes et violentes, des agressions, des crachats et de la peur. La rue aussi c’est la pauvreté mise en spectacle, le mépris de l’étranger et de ceux que la société laisse sur, justement, le trottoir.
Oser affirmer, devant la représentation nationale, que la haine est interdite dans » l’espace réel » c’est – évidemment – se foutre d’un monde auquel on n’appartient plus parce qu’on s’en est protégé par des vitres teintées, des chauffeurs et des gardes du corps.
Qu’on me comprenne bien : ceci n’est pas une raison pour ignorer la haine en ligne. Mais quand l’argument de Mme Avia, pour justifier son texte, repose sur un tel mensonge préalable, on a le droit de s’en inquiéter même si ce n’est pas en soi un motif d’inaction. J’y reviendrai.
Passons, donc.
Et que ça saute !
Cette loi repose sur une idée simple. Simpliste, même : il suffirait de rendre les intermédiaires techniques responsables des contenus publiés par des tiers, de les contraindre à retirer tout ce qui leur est signalé comme étant « manifestement illicite » sous peine d’amendes démesurées, pour que nous soyons tous protégés des méchants, car c’est très urgent.
Et hop !
Alors déjà, pardon de le dire, mais ce débat-là est si vieux qu’il a le droit de vote depuis déjà 6 ans. C’est dire l’urgence de légiférer et de voter un tel texte alors que le pays n’est même pas encore sorti d’un confinement imposé par une crise d’une ampleur encore jamais vue. C’EST URGENT ON T’A DIT les morts, les masques, les tests et le vaccin, on verra plus tard.
Ce débat date du tout début de l’Internet grand-public, autour de 1996. Il a réuni des comités, des commissions, il a connu des lois, des rejets du Conseil Constitutionnel, d’autres lois, des jurisprudences, des textes, des réglements et une directive européenne. Des centaines, des milliers d’experts, de juristes, d’associations, de citoyens et de lobbies se sont penchés dessus (et s’y penchent encore puisque l’Europe a prévu d’y revenir durant la présente législature), pour essayer d’imaginer des équilibres qui respectent à la fois le droit à la liberté d’expression et la juste volonté d’empêcher les délits.
Des livres y sont entièrement consacrés.
Depuis 24 ans.
C’est dire L’URGENCE du truc, alors qu’on a remis aux calendes un sujet aussi fondamental que nos retraites parce que, voilà, c’est pas trop le moment hein.
C’était TELLEMENT urgent qu’on n’a même pas respecté la procédure européenne obligatoire pour ce type de législation, c’est trop grave : on se moque des députés sur Twitter, tu te rends compte, il faut légiférer VITE !
Bref.
Têtes d’oeuf
Clément Viktorovitch résume très bien les termes du problème dans cette courte vidéo : quand on délègue à des entreprises privées le droit de juger de ce qui est légal ou illégal, on s’expose à une censure de très grande ampleur – parce que c’est plus simple et moins cher de censurer que de se poser des questions, surtout quand on risque des amendes de très grande ampleur, et que le profit est le seul guide des entreprises privées. Tout simplement.
Rendre la justice est une fonction régalienne. Les fonctions régaliennes sont des tâches que l’État ne doit pas, ou ne peut pas, déléguer à des sociétés privées. La loi Avia fait le contraire. Voilà mon résumé à moi.
Je le dis, je le répète, je le blogue et je le conférence depuis plus de 20 ans, ici et partout : si le droit à la liberté d’expression est inscrit dans notre constitution depuis le 18e siècle, ce droit n’était que très théorique jusqu’à l’arrivée d’Internet. C’est par et grâce à Internet que la parole publique est devenue accessible à tous.
Il n’est donc pas très étonnant que ce droit-là soit un des moins bien protégés par nos textes de loi, il n’est donc pas très étonnant que la liberté d’expression du grand public remette en cause les usages et les habitudes des puissants… et il n’est donc pas très étonnant que ces mêmes puissants fassent tout ce qu’ils peuvent pour remettre à sa place ce grand public qui ose s’arroger le droit de les critiquer à la face du monde.
Il est donc d’autant plus important d’y faire très attention et de ne pas légiférer n’importe comment et dans l’URGENCE parce que l’ego de quelque députée a été un peu froissé par des remarques en ligne sur ses tendances mordantes, fussent-elles problématiques. Je vous engage à revoir, encore une fois, dans la courte vidéo ci-dessus mentionnée en quels termes Mme Avia a présenté son texte en première lecture ( « MES trolls, MES haters, MES têtes d’œuf anonymes ») pour bien comprendre ses raisons – très personnelles et donc très éloignées du bien public – d’agir.
Hélas, le respect des grands principes républicains n’est visiblement pas l’URGENCE.
Latin de garage
En médecine, donc, le « triangle hippocratique » (médecin, malade et maladie) se base sur la confiance. La confiance qu’on accorde à celui entre les mains duquel on remet sa vie pour qu’il n’agisse que pour notre bien, ou – au minimum – pour qu’il n’aggrave pas notre situation. Primum non nocere.
En politique, ce même principe devrait s’appliquer. Mais force est de constater qu’en politique aujourd’hui, le principe est plutôt « primum actum » (« d’abord agir », dans mon latin de garage) avant même d’avoir bien pesé le pour et le contre. Au risque de tuer le malade, et dans le cas qui me fait réagir ici au risque de réduire à néant un de nos droits fondamentaux.
Pour autant, « ne rien faire » contre la haine en ligne n’est pas le contraire de « faire n’importe quoi pourvu que ça fasse taire mes opposants au risque de détruire des équilibres difficilement atteints ». L’accès à la liberté d’expression pour tous est un phénomène récent, et il est normal de réfléchir à ses dérives. Et il est normal que ces dérives se produisent tant que la société n’a pas intégré profondément les règles qu’impose l’usage d’une liberté. Ce n’est pas, pour faire un parallèle rapide, parce que la liberté de se déplacer est un droit fondamental qu’on a pas besoin d’un code de la route. Mais ce n’est pas parce qu’on a besoin d’un code de la route qu’on doit donner le droit aux sociétés d’autoroute d’interdire le passage à qui bon leur semble.
Intégrer les règles sociales d’un outil aussi profondément disruptif qu’Internet ne se fait pas en un jour, ni même en une génération. Ça prend du temps, ça nécessite des efforts, y compris financiers. On peut, on doit s’opposer à la haine. En ligne comme partout. En donnant des moyens à l’éducation pour former de futurs citoyens. En donnant à la justice des moyens d’agir plus rapidement et plus efficacement.
Pour qu’à force d’exemples et de formations, chacun apprenne à mieux se comporter, à mieux peser la responsabilité qu’il doit s’imposer lorsqu’il use de la parole publique, à mieux connaître ses droits et ses devoirs. En ligne comme partout. C’est long, c’est cher, ça ne se fait pas dans l’urgence et ce n’est pas aussi facile que de faire voter une loi stupide par une majorité sans partage.
Mais dans une société démocratique et respectueuse de ses grands principes, c’est comme ça que ça devrait se faire.
Et pas autrement.
Framaconfinement semaine 7 – Framapathique, Framaradeau et Framacamp
C’est à nouveau moi Angie qui reprends le clavier pour vous raconter notre septième semaine de confinement. J’ai de la chance, c’est encore une semaine de 4 jours. Bon, passer après pyg, c’est toujours un peu challengeant (oh le gros mot) parce que c’est sûr que je prends moins de hauteur que lui… encore plus quand il fait un pas de côté ! C’est à se prendre les pieds dans le tapis et moi je tiens à mes deux jambes car bientôt je vais pouvoir renfourcher mon fidèle destrier pour aller respirer le bon air de la campagne ! Mais je vais quand même tenter de vous raconter nos aventures framasoftiennes pour la semaine du 27 avril au 3 mai.
La tentation est grande de mettre sa propre pensée en berne en se disant qu’elle ne vaut plus rien par rapport à ce qui se passe dans le monde. Et une telle attitude est plus que dangereuse.
C’est Jean Morisset, un poète géographe québécois octogénaire qui a écrit cela il y a quelques semaines à l’écrivaine Nancy Huston. C’est à la lecture de cet article de Nancy Huston dans Le Devoir, que je me suis rendu compte en cette septième semaine de confinement que mes réflexions sur ce qui était en train de nous arriver avaient cessé. Que je n’avais plus envie de me questionner, que je n’en pouvais plus de lire et d’entendre les avis des uns et des autres sur comment la situation allait évoluer ou de comment le monde allait changer…
Évidemment que, comme Nancy Huston, je ressens un malaise face à l’écart violent entre l’état du monde et mon quotidien plutôt agréable de confinée. Mais contrairement à certains de mes collègues (coucou la #TeamChauve), après six semaines, je n’arrive plus à penser. Je suis passée en mode « apathique », cet état d’indifférence généralisée qui se manifeste par l’absence d’émotions, de sensations et de désirs, un manque de motivation et d’initiative ainsi que par la perte d’intérêt vis-à-vis d’autrui. Je suis consciente d’avoir mis en place un mécanisme de défense pour me détacher de la situation exceptionnelle que nous vivons toutes et tous. Après avoir été en colère, avoir dû soutenir moralement plusieurs personnes en détresse autour de moi, je ne suis plus en mesure d’éprouver quoi que ce soit. Je me mets en pause. Et donc, ma pensée est en berne…
Ce qui a eu pour incidence que j’ai bien galéré sur l’écriture de l’article Framaconfinement S5… J’ai reporté autant que j’ai pu sa rédaction, trouvant des tas d’autres activités plus nécessaires à faire. Alors que clairement, la rédaction de cet article était bien plus prioritaire que toutes ces petites tâches. Bref, j’ai pas mal procrastiné ! Pour rappel, la procrastination se définit comme la tendance à remettre systématiquement au lendemain. Plusieurs études ont mis en évidence que la procrastination était liée au manque de confiance en soi. Rien d’étonnant : les personnes ayant le moins confiance en elles auraient tendance à se montrer défaitistes, et donc à remettre leurs tâches à plus tard par peur de les rater.
Et en ce qui me concerne, c’est bien de cela qu’il s’agit ! Quand je me lance dans la rédaction d’un article, j’ai toujours des tas de questions : comment avoir l’air de dire des choses pas trop stupides ? Comment ne pas dénaturer ce qu’on fait les collègues ? Comment rendre ce compte-rendu agréable à la lecture ? Et puis, même si on s’est toujours dit qu’on ne se mettait pas la pression 🍺, eh bien c’est plus facile à dire qu’à faire !
Alors, j’ai essayé différents moyens pour me concentrer : faire une petite séance de méditation avant de me relancer dans la rédaction pour ne pas penser à autre chose, me fixer des créneaux dédiés en coupant tous nos outils de communication afin de ne pas me faire polluer par les différentes notifications et même m’autoriser une petite sieste pour décompresser avant de me lancer. Au final, ce qui a le mieux marché, c’est de me fixer une deadline de rendu et de la faire connaître à mes collègues. Je me suis ainsi retrouvée dans la situation de ne plus avoir le choix de reporter cette activité et j’ai donc été obligée de travailler vite et bien pour respecter ce délai. Le stress que génère chez moi cet ultimatum est très positif et me pousse à avoir une meilleure concentration. Enfin, cette méthode a un autre avantage : cela me force à ne plus être aussi perfectionniste, exigeante envers moi-même. Car dans l’urgence (relative, hein !), je suis alors capable de faire la part des choses et de faire du mieux que je peux, même si je ne trouve pas le résultat parfait.
Au final, j’ai donc fini par y arriver, mais ça n’a pas été une partie de plaisir. Et en même temps, j’ai accepté cette même semaine de prendre en charge la rédaction de notre journal de confinement pour les semaines 7 et 8. Ça peut paraître bizarre de s’imposer une tâche qu’il nous est difficile de réaliser, mais j’aime bien les challenges. Et d’ailleurs, la rédaction de l’article que vous lisez actuellement a été beaucoup plus aisée. Peut-être parce que j’ai eu énormément de retours positifs sur l’article Framaconfinement S5 et que ça m’a permis d’avoir davantage confiance en moi, en ma capacité à dire des choses pas trop débiles. Et c’est aussi sûrement parce que je me suis immédiatement fixé une deadline pour sa rédaction.
Et pourtant, tout continue !
Ce n’est pas parce que moi je suis en mode apathique qui galère sur la rédaction d’un article que mes collègues s’arrêtent pour autant. Bien au contraire…
Luc râle au sein de notre Framateam car certain⋅es d’entre nous postent des images en direct au lieu d’utiliser le service Framapic ou que nous n’utilisons pas la fonctionnalité des fils de discussion. Et quand c’est le brol, Luc, il n’aime pas ça ! Et puis toutes ces images, c’est que ça prend de la place sur le serveur ! Alors, on essaie de systématiquement utiliser Framapic et de bien répondre aux publications pour maintenir de jolis fils de discussion. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire ! Ce qui est certain, c’est que rappeler ces bonnes pratiques est essentiel pour que l’outil soit efficace, car quand au sein d’un même canal, plus de 5 discussions ont lieu en parallèle, il est impossible de tout suivre si cette rigueur n’est pas respectée.
Nos stagiaires sont toujours à fond eux aussi ! Arthur continue à produire les sous-titres de la vidéo The Age of Surveillance Capitalism, une interview de Shoshana Zuboff, et a découvert cette semaine que le logiciel Omega T qu’il utilise pour ses traductions est bien plus simple à utiliser qu’il ne le pensait ! Il s’est senti un peu bête sur le moment. Mais comme il apprécie l’autodérision, il en a fait un joli article de journal !
Lise a préparé le texte d’un communiqué de presse présentant l’initiative entraide.chatons.org avant de l’envoyer à différents médias. Elle a aussi créé une nouvelle fiche sur le wiki pour présenter le logiciel Shaarli, que nous utilisons pour vous fournir le service MyFrama. Cet outil de conservation et de partage de liens est vraiment hyper pratique quand on veut se créer des dossiers documentaires ou bien tout simplement conserver un contenu pour y revenir plus tard.
Théo a travaillé cette semaine à la mise en place d’un système permettant aux internautes de contacter directement l’administrateur⋅ice d’un formulaire Framaforms. C’est une fonctionnalité qui va nous être très utile car nous recevons via notre formulaire de contact de plus en plus de messages de personnes qui souhaitent contacter le créateur⋅ice d’un formulaire. N’étant pas nous même créateur⋅ice de ces formulaires, nous sommes dans l’incapacité de pouvoir donner cette information aux personnes qui nous sollicitent. Cependant, mettre en place cette nouvelle fonctionnalité nous a demandé de bien y réfléchir en amont. En effet, nous n’avons pas souhaité que ce mail de contact soit visible directement sur le formulaire car les robots spammeurs s’en seraient donnés à cœur joie ! Il nous fallait donc mettre en place un formulaire de contact directement dans Framaforms. Et puis, nous ne voulions pas non plus obliger les créateur⋅ices à être contacté⋅es. Théo est donc parti sur plusieurs pistes avant de trouver celle qui permettait de prendre en compte tous ces aspects. Cette fonctionnalité n’est pas encore implémentée dans Framaforms, mais Théo m’indique que c’est imminent !
Pouhiou, en plus d’animer nos comptes sur les médias sociaux au quotidien, a passé une partie de la semaine à préparer la lettre d’informations Framasoft dans laquelle il récapitule tout ce que nous avons fait ces derniers mois. Je l’admire car regarder dans le rétroviseur pour identifier tout ce que nous avons fait depuis janvier, c’est un boulot de dingue !
Tcit continue à travailler au développement de Mobilizon. J’ai pas tout bien suivi mais il continue à développer les fonctionnalités pour les groupes et fait des tests. J’imagine que ça veut dire qu’il voit si les fonctionnalités qu’il a développées fonctionnent correctement. Notre designeuse associée au projet Mobilizon, Marie-Cécile Godwin Paccard a lancé sur les médias sociaux un formulaire permettant de demander des précisions aux futur⋅es utilisateur⋅ices de Mobilizon sur le vocabulaire utilisé sur les pages événements.
Chocobozzz est lui aussi le nez dans le développement de nouvelles fonctionnalités pour PeerTube. Apparemment, il s’agirait de pouvoir ajouter des plugins d’authentification. Je ne suis pas certaine d’avoir bien compris de quoi il s’agissait, et puis comme ce n’est pas fini, mieux vaut que vous patientiez avant d’en savoir plus.
Du côté du support, spf ne chôme pas car les sollicitations sont toujours aussi nombreuses. D’ailleurs parfois, il s’énerve un peu de recevoir des messages de certain⋅es de nos utilisateur⋅ices qui ne prennent même pas la peine d’appliquer les règles de base de la politesse. On a beau être conscient que très souvent lorsque vous nous contactez, c’est que vous rencontrez un problème, mais commencer un mail par un « bonjour », c’est tout de même pas la mer à boire ! Heureusement qu’on reçoit des tickets qui nous donnent l’opportunité de nous marrer un peu ! Par exemple, on s’est amusé de recevoir une demande d’aide comprenant un fichier .odt dans lequel étaient copiées des captures d’écran… Je vous le dis, on s’amuse comme on peut du côté du support !
Pyg continue à jongler entre les interviews, les réunions avec certains partenaires et les interventions à distance, tout en rédigeant l’article Framaconfinement de la semaine 6. Et comme il a toujours des tas de choses à nous dire, eh bien ça prend du temps (mais pour vous ça ne vous prendra que 30 minutes à lire !). Il a aussi trouvé le temps de publier le Memorandum Covid-19 pour du libre et de l’open en conscience : enseignements et impulsions futures le mercredi 29 avril.
On se réadapte pour les mois à venir
Pyg a annoncé cette semaine à l’association l’annulation de notre Framacamp annuel, du moins sous sa forme habituelle. Le Framacamp, c’est le second rendez-vous annuel des membres de l’association (l’autre étant notre AG). Pendant une dizaine de jours, les membres qui le peuvent se retrouvent physiquement dans un lieu agréable pour faire le point sur les projets en cours, discuter des grandes orientations de l’association et avancer sur certains projets.
Étant arrivée chez Framasoft en février 2019, je n’ai vécu qu’un seul Framacamp, celui de juin 2019, mais ça a été pour moi une expérience incroyable. Déjà, parce que c’est un boulot de fou de tout organiser. Et ça on le doit à AnMarie qui gère avec brio tous les aspects logistiques (réservation d’un gîte, déplacements, alimentation). Et comme nos membres ne sont pas tous hyper-organisé⋅es, entre celleux qui veulent changer de jour d’arrivée ou de départ, celleux qui ne peuvent finalement pas venir et celleux qui ont des régimes alimentaires spéciaux, c’est un sacré exercice d’agilité (en mode à l’arrache donc !). Ensuite, parce que se revoir, discuter, échanger, réflexionner, boire des coups pendant plusieurs jours d’affilée, c’est un super moyen de consolider le groupe. Je n’avais jamais vécu ce type d’expérience (je n’arrive déjà pas à partir en vacances avec plus de 2 personnes sans que ça soit angoissant pour moi !) et même si j’ai trouvé que c’était sacrément épuisant, j’étais hyper enthousiaste à l’idée de recommencer ! Parce que ce Framacamp a complètement du sens pour moi et que finalement, être entourée de personnes bienveillantes et brillantes, qui savent exposer leurs pensées et les confronter à celles des autres sans animosité, m’a permis de revoir mon point de vue sur le collectif et de croire encore plus à la nécessité de faire ensemble.
Pour revenir au sujet, pyg a donc proposé à l’association une nouvelle forme pour le Framacamp prévu en juin prochain. Les raisons :
cet événement réunit des personnes de toute la France et nous ne savons pas si nous pourrons nous déplacer aisément ;
les membres représentent une mixité d’âge forte (vingtaine d’années à soixantaine d’années) et certains sont identifiés comme ayant des facteurs de risque ;
les mesures de distanciation physique ne paraissent pas applicables dans un tel événement (dortoir, douches partagées, salon commun, besoin de proximité pour échanger, nourriture préparée en commun) ;
il est probable qu’une partie des membres sera dans des situations difficilement prévisibles (ceux qui auront perdu des congés, celles qui n’auront pas d’autre choix que de bosser, celles qui veulent limiter leurs déplacements, ceux qui veulent rester auprès de leur famille, etc.).
Il est donc proposé que ce Framacamp prenne une nouvelle forme : 3 journées de temps cadrés et non-cadrés en ligne. L’événement serait évidemment sur la base du volontariat (participe qui veut et qui peut, quand iel peut). Pour cela, nous utiliserons le logiciel Big Blue Button, un outil de visioconférence adapté à la formation en ligne. Testé lors du Confin’atelier du 25 avril dernier (compte-rendu), Big Blue Button semble être l’outil le plus approprié pour ce temps de travail collectif puisqu’on pourra y créer plusieurs salons de discussion. Au sein de ces salons, il est possible de partager des présentations (avec ou sans tableau blanc), de discuter via un tchat, et même de créer des documents en mode collaboratif puisqu’y est disponible l’outil Etherpad.
Le détail des différentes sessions est encore en cours de préparation au sein de l’association, mais on sait déjà qu’une de ces sessions sera dédiée à la restitution des travaux menés par l’équipe du laboratoire CEPN UMR de l’Université Paris XIII dans le cadre du projet TAPAS (There Are Platforms as AlternativeS). Ce projet de recherche vise à approfondir et affiner la distinction entre « plateformes collaboratives » et « entreprises plateformes » et apprécier sa portée sur le plan des évolutions du travail, de l’emploi et in fine de la protection sociale dans le champ du numérique. Dans ce cadre, Framasoft a été sujet d’étude en 2019 et une partie des enseignants-chercheurs associés sont même venus assister au Framacamp de l’année dernière afin de comprendre nos modes de gouvernance en interne et en lien avec nos communautés. L’association est donc très enthousiaste à l’idée de découvrir ce qu’iels auront compris de nous !
Toujours dans l’idée de s’adapter, Pouhiou a passé une grande partie de la semaine à travailler à la rédaction d’un article dont l’objectif est de vous expliquer que nous revoyons notre feuille de route 2020. Car comme pyg vous l’a déjà expliqué dans Framaconfinement S6, il ne nous semble pas décent de nous lancer dans un crowdfunding selon les mêmes modalités que nos précédentes campagnes pour financer la V3 de PeerTube. Et nous allons avoir du retard pour la sortie de la V1 de Mobilizon. Mais je ne doute pas de ses capacités de nous expliquer tout cela de la manière la plus claire possible. EDIT : l’article a été publié le 6 mai : https://framablog.org/2020/05/06/ce-que-framasoft-va-faire-en-2020-post-confinement/.
Nos membres bénévoles sont formidables
Une très bonne interview de Framatophe a été publiée dans Politis cette semaine. Il y revient sur le concept de capitalisme de surveillance qui prend encore plus de sens en cette période.
Enfin, Fred et Numahell ont passé une bonne partie de leur week-end à réaliser une vidéo de présentation de l’association pour la Fête des Possibles qui aura lieu du 12 au 27 septembre prochain. Portée par Le Collectif pour une Transition Citoyenne, la Fête des Possibles recense de nombreux évènements (plus de 1100 en 2019) qui souhaitent rendre visibles toutes les initiatives citoyennes qui construisent une société plus juste, plus écolo et plus humaine et qui permettent à chacun⋅e d’agir immédiatement. Toutes les formes sont plébiscitées : des ateliers d’expérimentation, des circuits de découverte, des portes ouvertes, des rassemblements publics, etc. au-delà de temps d’échanges ou de transmissions de savoirs. Cette Fête des Possibles sera celle des interdépendances, des interconnexions, des coopérations, des solidarités et bien plus encore !
Toutes les associations partenaires de cet évènement ont été sollicitées pour produire et partager une courte vidéo dans le cadre du lancement de la première campagne de communication et de mobilisation des réseaux des possibles sortie le 4 mai ! Cette vidéo d’environ 1min30 doit raconter comment elles agissent déjà pour le monde de demain, afin d’inciter leur public à témoigner ou s’engager lui aussi. Fred et Numahell se sont emparé⋅es de cette mission et se sont lancé⋅e⋅s dans le grand bain de la réalisation vidéo. Armé⋅e⋅s d’un pad, iels ont rédigé les éléments de langage nécessaire et une trame pour le contenu. Pas simple de résumer l’action de Framasoft en quelques minutes ! C’est Fred qui s’est essayé au jeu d’acteur seul face à sa caméra et là aussi chapeau car c’est un exercice pas du tout évident ! Numahell en a profité pour découvrir 2 logiciels libres de montage vidéo : Openshot et pitivi. Et selon Fred, c’était rigolo de faire une framaconférence en 4 minutes.
Et comme toujours la #TeamMèmes est au taquet : cet article ne serait rien sans leurs chouettes contributions ! Merci !
Khrys’coronalungo du lundi 11 mai 2020
Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.
Contrairement à la France qui préfère brandir la menace du gendarme, les pays du Nord accompagnent le déconfinement en entretenant avec leur population une relation basée sur la confiance plutôt que la méfiance.
En Équateur, un glissement de terrain a provoqué la rupture de plusieurs oléoducs, qui ont déversé 15.000 barils de pétrole brut et de carburant dans la nature.
Aux rayons des critiques adressées à leurs dirigeants, les Français sont systématiquement deux fois plus sévères que leurs voisins européens. Entre impéritie de l’exécutif et manque de clarté, 75% d’entre eux estiment que le gouvernement ne leur a «pas dit la vérité», 74% pensent qu’il n’a «pas pris les bonnes décisions au bon moment», et trois-quarts regrettent encore qu’il «n’ait pas fait ce qu’il fallait pour aider les hôpitaux et les soignants».
Au moment où des plaintes contre des membres du gouvernement se multiplient, entre autres pour faire la lumière sur la gestion des masques, une majorité de Français jugent que leurs dirigeants «n’ont pas pris la mesure de la gravité de la situation», quand les Européens sont seulement 37% à le penser.
«pour ce gouvernement, ce n’est jamais le bon moment pour l’urgence sociale». «Il n’y a pas une ligne sur le social» […] «l’urgence est aussi sociale. L’exécutif y est imperméable au point de ne même pas prévoir la distribution massive et gratuite de masques.»
Intimidations, plaintes, procès… Enquêter sur le secteur agroalimentaire n’est pas sans risque. Un collectif appelle à soutenir la journaliste Inès Léraud, victime de ces pratiques, afin de préserver une liberté d’informer menacée.
Beaucoup de gens pensent que le COVID-19 tue 1% des patients, et que les autres s’en tirent avec quelques symptômes de la grippe. Mais l’histoire est plus compliquée. De nombreuses personnes se retrouveront avec des problèmes chroniques de rein et de cœur. Même leur système neuronal se trouvera perturbé. Il y aura des centaines de milliers de personnes dans le monde, peut-être plus, qui auront besoin de traitements tels que des dialyses rénales pour le restant de leur vie.
Les indépendantes du secteur de la couture sont appelées à la rescousse, sans moyens financiers et en assumant l’entière responsabilité de la qualité de leurs produits.
Alors que le gouvernement s’obstine à ne vouloir, ni réquisitionner les stocks déjà disponibles, ni imposer la gratuité des masques, la polémique enfle sur ces « stocks cachés » par les géants de la grande distribution. Si les Leclerc, Auchan, Carrefour et cie, et le gouvernement, jouent sur les mots, mentent et tentent de noyer le poisson, la vérité éclatera tôt ou tard.
Depuis le lundi 4 mai 2020, il est possible d’acheter des masques homologués dans les grandes surfaces, les bureaux de tabac et les pharmacies. Pendant de temps, au CHU de Nantes, circulent des masques dans les unités Covid, aux Urgences et dans d’autres services de soins, fabriqués en 2007 et périmés en 2011
« Nous sommes en pénurie de surblouses en papier car il faut en changer très régulièrement et il en faudrait une quantité astronomique à l’échelle du CHU. Le stock est arrivé à épuisement. On a reçu à la place des sacs-poubelles, ce n’est pas une blague… Les manches tiennent avec des élastiques de bureau et il doit faire quelque chose comme 50 ° dessous. » […] « Beaucoup de gens nous demandent comment nous aider. C’est assez simple. Cela fait longtemps que l’on dit que l’hôpital a un problème. Quand on se met en grève, on ne peut pas aller dans la rue comme d’autres peuvent paralyser la France et obtenir ce qu’ils veulent.[…] Donc, la prochaine fois que nous lancerons des alertes parce qu’il n’y a pas assez de lits ou pas assez de personnels, il faudra que les gens descendent dans la rue pour nous. »
la psychiatrie publique reste le parent pauvre de notre système de santé. «Nous n’avons rien obtenu. Zéro de chez zéro», […].«près de 80 % des soignants étaient absents, la plupart parce qu’ils étaient infectés. On n’avait pas de masques. Rien. On a même monté des ateliers pour fabriquer des tenues de protection avec des sacs-poubelles.» «C’était le dénuement total. À nous de nous débrouiller. »
L’absence de dépistage aux débuts de la crise du SARS-CoV-2 a laissé les spécialistes médusés : « Ce à quoi nous avons assisté en France est contraire à tout ce que nous avons appris sur les maladies infectieuses. Que ce soit le choléra, le paludisme ou la tuberculose, le premier réflexe, c’est de dépister, d’identifier les malades avec des tests qui permettent la recherche des sujets contacts » […] « On ne peut pas reprocher au gouvernement les choix économiques des trente dernières années.[…] En revanche, ce qui est extrêmement choquant, c’est qu’au lieu de reconnaître les pénuries de matériels, le gouvernement et ses administrations ont choisi un habillage médical. Notamment quand Édouard Philippe a énoncé le 24 mars une doctrine incitant à ne tester que les personnes ayant des symptômes, alors qu’on passe à côté de tous les cas asymptomatiques. »
En Allemagne, un moratoire des loyers pour une période de trois mois est instauré pour les locataires en difficulté, avec un délai de paiement s’étendant jusqu’à septembre 2022. À Lisbonne, ainsi qu’à Barcelone, les maires ont gelé le paiement des loyers dans leur parc HLM jusqu’en juin. Le paiement des prêts immobiliers est suspendu dans toute l’Espagne, les locataires suisses peuvent suspendre sans sanction leur loyer pendant trois mois, les gouvernements canadiens et anglais versent une aide aux locataires… En France, où les loyers n’ont jamais été aussi chers et sont parmi les plus élevés d’Europe, le gouvernement n’agit pas[…] Il prend le risque inconsidéré de provoquer des procédures d’expulsion massives et d’ajouter à l’angoisse générée par l’épidémie celle des locataires en difficulté économique.
Elle était de ceux qu’on voit moins. De ceux qu’on entend moins. Mais qui dans l’ombre prêtent main-forte aux soignants en 1ère ligne dans la lutte contre l’épidémie.
selon plusieurs sources de la cellule investigation de Radio France, la grande majorité des entreprises de Roissy n’étaient récemment pas en conformité avec le code du travail.[..] il semble qu’il ait fallu, selon plusieurs syndicalistes, la mort d’un agent de filtrage chargé des palpations aux portiques des suites de la Covid-19, début avril, pour que ses collègues soient équipés de masques le 7 avril.
Quand on sait qu’il faut au moins deux masques de ce type par jour pour une journée de travail, en faisant l’addition on se rend vite compte du budget que cela peut représenter pour les familles les plus modestes. Certains n’ont pas les moyens. Vu les disparités de distribution gratuite d’une collectivité à l’autre, cette obligation devient injuste
Lui ayant fait remarquer que nous organisions une distribution de nourriture dans des temps difficiles, et pas une manifestation, il nous répondit que notre action était de nature « revendicatoire » (sic). La présence de quelques banderoles similaires à celles qui pendent aux fenêtres en solidarité aux personnels des hôpitaux suffit-il à qualifier notre crime ? Sanctionner les gens pour des activités politiques relèverait-il officiellement des missions de la police ?
« Un bicot, ça ne nage pas », avait déclaré l’un des policiers qui avait été filmé après avoir repêché Samir, 28 ans, dans la Seine, avant une suspicion de violences volontaires. Deux agents ont déjà été suspendus.
Ce qui me frappe en particulier dans cette épisode, c’est que le gouvernement, qui venait précisément de se montrer totalement incapable de gérer l’épidémie, a demandé et reçu carte blanche du Parlement pour intervenir seul par voie d’ordonnance dans des matières aussi cruciales que le droit du travail ou la procédure pénale. Il est en résulté, depuis le 23 mars, 31 ordonnances ! dont certaines sont modifiées, au fil de l’eau, au fin fond des cabinets ministériels, au bon vouloir de la haute administration. Alors bien sûr, on sait ce que vaut le débat parlementaire, on sait que la procédure accélérée est devenue la règle, que les textes débattus émanent tous de l’exécutif, mais lorsque tous les acteurs du système sont d’accord pour se dispenser carrément du Parlement, il y a tout de même un cap qui est franchi.
Depuis 3 ans, Macron installe méthodiquement un régime policier et ultra-libéral. Par ses paroles, par ses actes, par ses soutiens, il s’inscrit résolument dans une filiation et un référentiel d’extrême droite.Macron n’était pas un « barrage » au fascisme : il en est le propagateur.
si l’inquiétude des maires est compréhensible, elle est juridiquement infondée. Et la prétention des parlementaires LREM de vouloir les protéger simplement une imposture. Destinée à permettre un coup d’éponge salvateur pour les incapables, les désinvoltes, les menteurs, les cyniques et les amateurs à qui Emmanuel Macron a confié la gestion de la pandémie. […] La proposition concoctée et présentée à la dernière minute lors du débat à l’assemblée sera votée dans les bruits de l’orchestre comme un amendement à la loi de prolongation de l’état d’urgence. Et les amis d’Emmanuel Macron blanchis seront ainsi tranquilles. Et la fête sera complète car tranquille, ils le seront pour l’avenir mais également pour le passé.
en l’état actuel, le texte voté […] revient à amoindrir le principe de responsabilité en généralisant l’idée que, durant l’état de siège sanitaire, on peut être responsable mais pas coupable. De ce fait, il ouvre la voie au soupçon de l’amnistie
Dans une fiche d’accompagnement pédagogique à la reprise scolaire, publiée sur Eduscol, le Ministère de l’Éducation Nationale, invite ses personnels à déconstruire les discours « radicaux » des élèves sur la gestion de la crise du Covid. Plus précisément ceux utilisés pour « démontrer l’incapacité des Etats à protéger leurs populations »
La ville des Alpes-Maritimes a mis en place un système de vidéosurveillance en prévision d’une obligation du port de masque. Une décision qui ne fait pas l’unanimité.
Nous saurons que le monde a changé quand ceux qui nous ont mis dans ce pétrin en supprimant les stocks de masques seront devant un tribunal – et je ne parle pas d’une simple commission parlementaire. On nous demande de croire que les gens qui ont péché sous les régimes précédents et qui sont toujours là ont fait leur examen de conscience. C’est trop facile ! Il faut en finir avec l’impunité. On doit faire des exemples, avec des peines de prison et des sanctions financières. La société française a besoin de morale, et il n’y a pas de morale sans punition. Mais ce n’est pas seulement une question de principe. Il existe maintenant un vrai risque d’explosion sociale, parce que les Français savent que leurs dirigeants sont incapables de les protéger. Si l’on accepte encore et toujours un pouvoir qui raconte n’importe quoi grâce à sa maîtrise des moyens de communication et qui s’entête à ne pas régler les problèmes économiques, l’étape suivante ne sera pas une lutte des classes civilisée, mais la guerre civile.
nous nous sommes posé les questions de ce flicage des examens, ou plus exactement on nous les a posées sur le mode “souhaitez-vous mettre en place ce machin”, ce à quoi nous avons unanimement et prestement répondu : “plutôt crever” (mais nous l’avons dit poliment car nous avons reçu une bonne éducation). […] Mais bordel connard t’en es vraiment à flipper parce qu’ils pourraient utiliser tes … cours ??? Et c’est ça qui t’angoisses et ça qui t’inquiètes ?? Genre si t’étais restaurateur tu serais du genre à interdire à tes clients de bouffer les plats que tu cuisines au moment où ils vont passer à table ? Non ? Bon. Ben alors ressers-toi une assiette de purée, et arrête de faire chier.
La Quadrature du Net et la Ligue des Droits de l’Homme viennent de déposer un recours en urgence contre le déploiement de drones par la préfecture de police de Paris. Depuis le début du confinement et un peu partout en France, la police prétend se faire assister de drones pour lutter contre les infractions. Pourtant, puisqu’ils sont déployés en l’absence de tout cadre légal spécifique et adapté, ce sont eux qui violent la loi et nos libertés.
Zoom n’est pas la seule application de visioconférence à se montrer cavalière avec les données personnelles de ses utilisateurs. Un rapport de l’organisation américaine Consumer Reports révèle que Skype, Webex, Hangout, ou encore Teams ont toutes des politiques de confidentialité très permissives, qui autorisent notamment l’utilisation de ces vidéos pour entraîner des systèmes de reconnaissance faciale.
Le 1er mai a été mon dernier jour en tant que vice-président et ingénieur distingué chez Amazon Web Services[…] J’ai démissionné, consterné qu’Amazon licencie des lanceurs d’alerte qui faisaient du bruit à propos d’employés d’entrepôts effrayés par Covid-19 […] Amazon traite les humains dans les entrepôts comme des unités interchangeables de type « pick-and-pack ». Mais ce n’est pas seulement Amazon, c’est le capitalisme du 21ème siècle.
Rapatrions l’expérience de pensée dans un réel possible et reformulons le problème d’une autre manière : à la lumière des hypothèses qu’on peut former sur la situation présente. Si la pandémie présente, ses causes et ses suites, ne laissent maintenant plus d’autre choix que d’être anticapitaliste, entre s’affaler et s’avancer laquelle des deux voies choisissons-nous ?
Un jour, nous redeviendrons adultes. Capables de comprendre et d’imposer d’autres choix, y compris économiques et sociaux. Pour le moment, nous prenons des coups sans pouvoir les rendre ; nous parlons dans le vide et nous le savons. D’où ce climat poisseux, cette colère inemployée. Un baril de poudre au milieu d’une pièce, et qui attend son allumette. Après l’enfance, l’âge ingrat…
Combien de temps nous faudra-t-il pour retrouver le goût d’embrasser les copines et les copains, sans crainte d’exposer les autres et de se mettre en danger soi-même ? Car non seulement les distances barrières et autres formes de distanciation sociale resteront règlementées par l’Etat, mais elles resteront gravées consciemment ou inconsciemment dans nos comportements quotidiens. Dès lors le biopouvoir aura réalisé sa trajectoire et sa perfide stratégie : pas besoin de fouet, de chaînes ni d’espace concentrationnaire, du moment que tout-un-chacun se fait le maton de soi-même et de son entourage.
L’épreuve du confinement révèle l’incurie du développement urbain tous azimuts depuis un demi-siècle. Avec le changement climatique, les villes actuelles doivent être repensées et entrer dans « l’âge post-béton ».
Je ne parle même pas des préoccupations relatives à la vie privée, mais en termes d’efficacité. Est-ce que quelqu’un pense que cela va être utile en quoi que ce soit ? […] C’est juste quelque chose que les gouvernements veulent faire juste pour le plaisir de le faire. Pour moi, ce ne sont que des techniciens qui font des trucs de techniciens parce qu’ils ne savent pas quoi faire d’autre.
La solidarité était à l’œuvre dans le quartier populaire de Château Rouge vendredi 8 mai et une distribution gratuite de masques avait lieu. Mais c’était sans compter la venue de la police qui a fait fermer boutique et a interdit la distribution. Motif : non respect des distances sanitaires…
Comment ce pays si riche, la France, sixième économie du monde, a-t-il pu désosser ses hôpitaux jusqu’à devoir, pour éviter l’engorgement des services de réanimation, se résigner à se voir acculé à cette seule solution, utile certes, mais moyenâgeuse, le confinement ?
Comme c’était avant (vimeo.com – en anglais – court métrage de 8mn datant de 2013…)
Dans un futur proche, les professeurs ne donnent cours que devant une salle vide et une simple webcam, retransmettant la leçon sur internet. Un professeur d’histoire va voir son quotidien bousculé quand une élève franchit la porte de sa salle…
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.
Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).
Framaconfinement semaine 6 – Faire un pas de côté
L’association Framasoft tient à partager, même de manière irrégulière et foutraque, le résumé de ce qu’il se passe lorsqu’on héberge des outils d’échange et de collaboration en ligne en pleine période de confinement.
Ce journal, nous l’écrivons pour lever un coin de voile sur Framasoft, mais aussi pour nous, parce que ça nous fait du bien. Ne vous attendez donc pas à ce que tous les éléments de contextes vous soient systématiquement donnés, on livrera les choses comme elles viennent, plus cathartiquement que pédagogiquement.
À noter : cet article bénéficie désormais d’une version audio.
Merci à Sualtam, auteur de lectureaudio.fr pour cette contribution active.
La semaine des réunions
Cette semaine du 20 au 24 avril aura été celle de la reprise des réunions, des rendez-vous, des interviews. Il faut dire que pendant un mois, j’avais quasiment tout refusé par défaut et par principe, pour me concentrer exclusivement sur notre fonctionnement interne et nos missions « vitales ».
Mais cette semaine, tout s’est enchaîné. Vite. Très vite.
Préparer mon intervention aux Ludoviales (compte rendu), décliner celles des Colères du Présent (c’est Framatophe qui répondra présent), préparer une audition avec une députée France Insoumise, répondre à des interviews pour la radio des CEMEA, Le Monde, Politis, AEFE, etc. et partager mes retours sur un mémorandum (publié le 29 avril).
A cela s’ajoute les réunions « internes » : notre réunion d’équipe hebdomadaire, une réunion Mobilizon, une réunion PeerTube. Sans compter les membres de l’asso qui ont organisé une « framapapote » (une espèce d’apéro-Framasoft), et celles et ceux qui auront participé activement au premier « confin’atelier » (le compte rendu vient de paraître !).
J’aurais aussi eu plusieurs échanges avec l’équipe « Services Numériques Partagés » qui produit l’offre https://apps.education.fr, une suite de services pour l’Éducation Nationale basée exclusivement sur du logiciel libre.
Nous avons d’ailleurs été beaucoup sollicité⋅es pour donner notre avis sur cette initiative. Pour le redire encore une fois ici : nous accueillons la publication de ces services avec un très grand plaisir. Nous pensons que des services libres et décentralisés sont la meilleure solution pour la résilience de l’infrastructure numérique de l’Éducation Nationale. Nous suivions le projet depuis plusieurs mois, les services devaient être annoncés plutôt fin 2020, d’où le fait qu’ils soient aujourd’hui annoncés comme « temporaires » car non encore dans leur forme définitive. Sachant que leur planning a été bousculé, et les équipes mises sous pression, nous ne pouvons que féliciter chaleureusement toutes les personnes qui ont rendu l’émergence de ces services possible. Cependant, nous ne crions pas victoire pour autant. Le Covid aura fait tomber des murs, à la fois en faveur du logiciel libre, mais aussi en faveur des Google Classrooms, Zoom, et autres Discord. C’est certes un pas en avant très positif, mais après 15 ans de « 2 pas en avant, 3 pas en arrière » du MEN concernant le logiciel libre, il ne faudra pas nous en vouloir d’attendre encore 2 ou 3 ans avant de modifier notre position officielle.
Il y aura donc eu beaucoup de demandes à gérer. Et chaque rendez-vous exigeant en amont jusqu’à une dizaine d’échanges (mails, téléphone, etc.), j’ai eu le sentiment frustrant de passer ma semaine à « répondre » plutôt qu’à « faire ».
Le Framablog verra aussi publié cette semaine là un article touchant et emprunt de retenue de Cyrille Largillier, membre de Framasoft et directeur d’école, sur son vécu des premières semaines de pandémie.
Comme chaque semaine, notre équipe technique aura multiplié les serrages de boulons sur nos serveurs et les changements de disques en urgence. Elle a notamment réparé la machine MyPads2 et mis à jour MyPads dans sa dernière version, ou mis en place une page permettant d’éviter la saturation du disque du service Framadrop (qui permet le partage de fichiers volumineux) en nous appuyant sur les CHATONS volontaires.
Chocobozzz a repris le développement de PeerTube, et tcit celui de Mobilizon.
Mais une des plus belles actions (selon moi !) de la semaine est le passage en production des nombreuses corrections que Théo a apporté à Framaforms. En plus, je lui ai « un peu » mis la pression en lui demandant de mettre en ligne de façon anticipée des corrections qui devaient servir en urgence pour la tribune publiée sur Le Monde par (notamment) Antonio Casilli. Finalement, Antonio n’aura pas eu besoin de ce formulaire, mais je suis fier que Théo (qui est en stage, rappelons-le) se soit senti légitime et capable de valider des modifications qui pouvaient impacter plusieurs centaines de milliers de personnes. Car Framaforms c’est notre service le plus visité (100 000 visites rien que la journée du 4 mai), après Framadate, et devant Framapad. Plus de 170 000 formulaires et 4 millions de réponses ont été hébergés depuis la mise en place du service. Autant vous dire qu’on n’a pas envie d’oublier un point virgule quelque part qui rendrait le service indisponible.
StopCovid
Dans mon précédent billet, j’annonçais (sans me faire prophète, c’était juste une probabilité statistique de 100%) que le gouvernement allait vouloir s’adosser à la technologie pour à la fois regagner des points de confiance, mais surtout mettre en place des dispositifs de contrôle du peuple.
Les semaines passées, sur cette thématique, c’est donc l’application StopCovid qui aura donné le tempo médiatique côté numérique.
« Technologies de crise, mais avec la démocratie » , traduction de l’argumentaire de l’association AlgorithmWatch (pour mieux comprendre les risques sur les libertés fondamentales et les garde-fous nécessaires) ;
Le positionnement de Framasoft est assez clair : ce type d’application est un leurre. Un mirage. Comme en magie, c’est une illusion. Et cette illusion permet de glisser dans la tête de #lesgens quatre idées très dangereuses :
1. Elle nous prépare à accepter une application de surveillance de nos comportements, qui nous suivrait partout « pour notre bien et celui des autres », sans que cela n’impacte nos libertés fondamentales. C’est faux. Grâce au (fabuleux) travail de Khrys, nous présentons chaque semaine une « revue hebdomadaire » listant des articles, vidéos, etc. traitant notamment de ce sujet. Nous en sommes au n°103 de cette revue, je pense donc qu’il n’est pas nécessaire de revenir là-dessus ;
« Nan, mais à Singapour, ils ont une app, et ça va hein. » Non, cette vidéo n’est pas un fake. (Source)
3. Elle dédouane les agents de l’État de leur responsabilité, en faisant reporter sur des comportements individuels ce qui doit relever d’une action collective, et notamment celle des pouvoirs publics. « Si ça sauve 100 vies, ou même 1 seule, ça sera déjà ça et donc il faut donner toutes les chances à cette appli. », nous explique en substance Cédric O. sur… Medium (Oui, une plateforme cofinancée par Google. Ne cherchez pas à comprendre, c’est pas comme si cette personne n’était pas secrétaire d’État au numérique. Il n’avait sans doute pas de site web à sa disposition… #OhWait). Ha ben oui mais non, si votre but c’est de sauver 100 vies, ou même une seule, alors ce n’est pas le moment de déshabiller Paul (les brigades sanitaires, dont des décennies d’études ont prouvées l’efficacité, et pour lesquelles le Conseil Scientifique recommande 30 000 personnes, mais qui seront sous-payées) pour habiller Jacques (j’attends impatiemment l’annonce du coût total de développement d’un StopCovid, dont l’efficacité, elle, n’est pas prouvée). En attendant, ni vu ni connu, l’État vous aura embrouillé, et quand viendra le temps de juger les responsables, ils pourront se cacher derrière l’argument « Mais on a fait StopCovid, c’est pas de notre faute si #lesgens ne l’ont pas tous installé ! ». Ha ben si, si vous êtes élus et que de très nombreux experts et la société civile vous préviennent que votre mesure n’aura pas d’impact mais que vous choisissez d’investir du pognon pour la mettre malgré tout en place, alors c’est vous qui êtes responsable, pas #lesgens.
4. Un autre souci à faire peser cette injonction à installer une application est plus insidieux. Il pousse l’idée d’une « désunion nationale », avec d’un côté les « bons citoyens » qui auront installé l’application, et de l’autre côté les « mauvais citoyens » qui mettraient en jeu la vie de leurs proches comme d’inconnus, en refusant à participer au fameux « effort de guerre ». On en revient donc à l’argument pourtant mille fois entendu (et mille fois prouvé faux) du « Si vous voulez plus de sécurité, il faut accepter des pertes de libertés ».
Comme le dit fort bien Antonio Casilli dans le journal du CNRS (journal qu’on ne peut pas soupçonner de manque de sérieux scientifique), « Il n’existe pas d’application capable de remplacer une politique de santé publique ». Les prochains mois seront donc très rock’n roll avec des intiatives très agressives (du type caméras thermiques, dont l’aspect bordeline et même reconnu par… Muriel Pénicaud).
Bref, déployer ce type de technologie, c’est une triple défaite :
défaite des libertés fondamentales (aucune appli n’est infaillible, et celle-ci préparera le terrain cognitif pour celles à venir) ;
défaite de la science, qui placerait ses espoirs dans une technologie non-testée, développée dans l’urgence, plutôt que dans des protocoles humains dont on sait qu’ils fonctionnent, car testés et évalués depuis des dizaines (centaines presque !) d’années ! (ils sont juste beaucoup plus chers, oui, et alors ?! ) ;
défaite de la démocratie, qui en acceptant cette appli, accepte de minimiser les fautes avérées de l’État en lui reconnaissant un pouvoir de contrôle et de coordination sur la pandémie, masquant de fait l’incurie de l’État à prioriser l’intérêt général dans la gestion de cette épidémie.
Quelque part, et de manière anecdotique (ou pas), c’est aussi une défaite sémantique et linguistique : nous pouvons aussi nous interroger sur les signifiants et les signifiés des divergences entre « StopCovid » (France), « Immuni » (Italie) ou « TraceTogether » (Singapour) et ce que ces termes « vendent » aux utilisateur⋅ices.
Au final, que StopCovid voie le jour ou pas, le gouvernement aura de toutes façons gagné : si l’application est finalisée, ça sera le jackpot et la voie ouverte à de futures applications StopZad, StopGiletJaunes, StopDélinquance, etc. ; si le projet d’application n’est pas finalisé (à quel coût ? Car aux dernières nouvelles, Dassault Systèmes ou CapGemini ne sont pas des philanthropes) ou abandonné politiquement, le débat médiatique sur StopCovid aura ouvert la fenêtre d’Overton sur l’acceptabilité d’une telle solution (« Bon, pour StopCovid, on était pas prêts, mais pour StopTerrorisme, là, promis, avec les premiers de cordée de la StartupNation on est au taquet »). Alors évidemment, une défaite aura plus d’impacts (immédiats) que l’autre (qui reste potentielle), mais du coup, nous, Framasoft, on va s’arrêter là. On a fait le job : en dehors de la face visible que sont la publication des articles, on a relayé, conseillé, produit des argumentaires, fournit des outils aux militant⋅e⋅s, relu et amendé des tribunes, etc. Il est donc temps pour Framasoft de passer à autre chose car nous ne sommes pas une association de plaidoyer. Nous avons (très) modestement contribué à éclairer ce débat, à chacun et chacune, individuellement et collectivement de s’informer et de prendre non seulement position, mais aussi une responsabilité dans les actions possibles à venir.
Voilà, je n’ai plus qu’à attendre en commentaire les rageux qui vont me dire que puisque je suis par principe opposé à ce type d’application, je suis donc un dangereux arriéré criminel qui va causer la mort d’innocents, en plus de celle de l’économie. Qu’ils viennent me chercher.
Faire un pas de côté
Un des articles qui m’aura le plus marqué ces dernières semaines, peut-être parce qu’il ne s’agit ni d’une analyse froide, ni d’une réaction à chaud nous servant la soupe d’un « monde d’après », est sans doute l’interview de l’éco-socialiste Corinne Morel-Darleux dans Bastamag (j’invite celles et ceux qui le peuvent à faire un don à ce média. Ce que j’ai fais, d’ailleurs). Pour celles et ceux qui souhaiteraient découvrir quelques éléments de pensée de Corinne Morel-Darleux, je vous propose de lire en préambule cette longue mais passionnante interview du média d’opinion indépendant « Le Vent Se Lève ». Vraiment, prenez le temps de lire ces deux articles afin d’éclairer les concepts que je vais aborder par la suite.
Je ne vais pas reprendre ici ce qu’elle dit : d’une part l’article est public (et c’est une raison de plus, et pas une raison de moins, pour leur faire un don), d’autre part j’avais déjà « invoqué » Corinne Morel-Darleux dans un précédent article sur l’archipélisation de Framasoft. Elle y reprend des idées et concepts qui lui sont chers comme l’archipélisation ou la dignité du présent.
Ce qui me semble ici intéressant, c’est que ces idées prennent une dimension particulière quand on les met en perspective de la situation pandémique actuelle. Ils permettent, en quelque sorte de faire un « pas de côté ».
Après avoir « pris la mesure », et « pris de la hauteur », c’est donc à cet exercice du « pas de côté » que je voudrais essayer de me prêter ici, concernant Framasoft.
Je suis payé (entre autres par vos dons, merci !) pour prendre des décisions pour Framasoft. Le plus collectivement possible, et parfois seul et dans l’urgence afin d’éviter tel ou tel écueil. Ces dernières semaines, nous avions « le nez dans le guidon », et Framasoft a donc pris un paquet de décisions, et engagé pas mal d’actions (cf. nos articles Framaconfinement). En gros, comme tout le monde, nous nous sommes pris la tempête, et on a essayé de réagir au mieux. En nous protégeant nous-mêmes d’abord, parce qu’il n’est pas possible de prendre soin des autres dans la durée sans prendre soin de soi.
Ensuite en faisant ce que l’on fait de mieux : « faire ». Sans se poser des milliards de questions, on a agi là où on le pouvait. « Agir là où on se sent fort » est une façon de reprendre le contrôle quand on se sent perdu. Une façon de reprendre courage. De se sentir utile.
Mais faire un pas de côté, c’est quoi ?
C’est essayer de nouvelles choses, casser des préjugés internes, essayer d’avoir un regard extérieur, sortir de sa zone de confort en quelque sorte.
Me concernant, cela m’a poussé à accélérer une décision prise il y a longtemps : passer à une co-direction à trois têtes. J’avais annoncé cette volonté, qui me trottait dans la tête depuis deux ans, lors de notre assemblée générale de février. Mes collègues Angie et Pouhiou étaient d’accord pour une phase d’expérimentation en tant que co-directeur⋅ices. Mais la pandémie m’ayant pas mal occupé, j’avais dû laisser la mise en pratique de côté. Nous allons pouvoir en rediscuter, et cela promet d’être passionnant à mettre en œuvre.
Plus proche de vous, concernant Framasoft, faire ce « pas de côté » a consisté à réinterroger notre agenda de campagne. Framasoft ne vivant que des dons, sans campagne de dons, nous n’aurons à terme plus de moyens.
Enfin, ça, c’est la théorie. Construite sur l’expérience de ces dernières années. Mais n’est-ce pas un cliché ? Ne nous sommes-nous pas enfermé⋅es dans cette espèce d’injonction à « réussir » nos campagnes ? Si on pousse encore plus loin, « A quoi nous sert cet argent ? » (certes, à payer mon loyer, ainsi que les salaires de mes 8 autres collègues, mais est-ce le seul, ou le meilleur moyen de l’utiliser ?). Et, pour aller plus loin que plus loin « A quoi sert réellement Framasoft ? ». Ce n’est pas ici notre utilité que je questionne avec légèreté, je constate que nous sommes utiles (vos messages, vos dons, et les ~700 000 utilisateur⋅ices mensuels le prouvent), mais bien le sens de cette utilité : est-ce que l’on renforce des pratiques délétères ? Ne participe-t-on pas à enfermer nos utilisateur⋅ices dans des pratiques finalement peu émancipatrices (visioconférences, travail collaboratif, etc.) ?
Que resterait-il de Framasoft si nous venions à disparaître demain ? Quels héritages aurons-nous laissé de plus de 15 ans de militantisme ?
Pour répondre à ces questions, voilà maintenant deux ans que nous nous questionnons régulièrement en interne sur notre propre « compostabilité » : que resterait-il de Framasoft si nous venions à disparaître demain ? Quels héritages aurons-nous laissé de plus de 15 ans de militantisme ?
Je trouve la question intéressante, car elle nous force à regarder derrière nous, et non à chercher à voir ce qui se dessine devant. Car ce qui est devant nous est aujourd’hui dans le brouillard, rempli d’incertitudes sur les impacts économiques, sociaux, politiques qui vont découler des suites de cette pandémie.
Elle nous oblige aussi à penser notre présent, et nos actions, en fonction de cette notion d’héritage, de trace, de « don fait à l’avenir ».
Les éléments de réponses à cette question de la compostabilité de Framasoft me semblent plutôt encourageants : nous avons produit des milliers de ressources (fiches logicielles, documentations, articles, livres, vidéos, interviews, conférences, Mooc, etc.), nous avons développé des solutions logicielles, nous avons affirmé des points de vue et généré du débat et de l’intelligence collective. Nous avons démontré qu’il était possible, pour une association comptant moins de membres qu’un club de pétanque local, et pour un coût inférieur au coût moyen de 80 mètres d’autoroute, de produire, mettre à disposition, maintenir, améliorer des dizaines de services alternatifs à ceux des plus grosses capitalisations mondiales. Ce qui a, je pense, inspiré et donné confiance aux structures du collectif que nous avons impulsé et structuré et qui nous survivra probablement. Tout cela de façon libre, réutilisable, copiable, documentée. Mais aussi en essayant, autant que possible, de rester dignes (« principe selon lequel une personne ne doit jamais être traitée comme un objet ou comme un moyen, mais comme une entité intrinsèque »).
L’avenir jugera. Mais pour l’instant, nous sommes dans une situation plutôt privilégiée : grâce à vos dons, et grâce à notre volonté de ne pas « croître pour croître » et de limiter notre croissance, même en situation de succès – qui n’est pas sans rappeler le « refus de parvenir » qu’évoque Corinne Morel-Darleux en citant le navigateur Bernard Moitessier – Framasoft se porte bien. En tout cas, nous sommes dans une situation bien moins inquiétante, et surtout moins anxiogène, que des milliers d’associations survivant grâce aux subventions publiques ou à quelques financements privés. Les associations culturelles, de solidarités, d’urgence sociale sont touchées de plein fouet. Pourtant, si l’on regarde les choses froidement, ces associations sont par bien des aspects plus utiles que Framasoft.
Puisque nous ressentons ce sentiment d’accomplissement vis-à-vis du travail déjà effectué, et puisque nous avons les moyens de ne pas nous inquiéter du futur immédiat, se pose alors la question de ce que nous pouvons faire aujourd’hui. C’est ici que je fais le lien avec la notion de « dignité du présent » évoquée par Corinne Morel-Darleux. Quels gestes pourrions nous avoir qui seraient réellement en accord avec ce que nous sommes ?
Nous lancer dans la campagne de crowdfunding PeerTube v3, comme cela était prévu pour mai/juin 2020, ne me parait pas un acte décent en ce moment. Organiser une communication médiatique subordonnant la réalisation de développements logiciels à l’obtention de paliers de dons, à l’heure où l’hôpital public est en souffrance, où les français⋅es reçoivent l’injonction contradictoire de retourner travailler individuellement mais de collectivement rester chez eux, à l’heure où personne (y compris les gouvernements) ne sait de quoi l’avenir sera fait, m’apparaît clairement comme impudique et inconvenant.
Pourtant, je pense – cette fois très immodestement – que le monde à besoin d’un PeerTube v3. Cette nouvelle version, comme annoncé précédemment, intègrerait les premières briques permettant une diffusion vidéo en direct à des centaines ou milliers de personnes. Le tout de façon libre, décentralisée, et fédérée. Comme beaucoup, je pense qu’il n’est pas possible de se passer d’un système tant qu’on utilise les outils de ce système. Il me parait ainsi impossible de tourner la page du capitalisme tant qu’on utilisera massivement YouTube ou Twitch, par exemple. Cela ne se fera pas en un jour, ou même en un an. Mais même si cette bataille paraît perdue d’avance, elle vaut à mon sens la peine d’être menée.
Il en va de même pour Mobilizon (notre alternative aux événements, pages et groupes Facebook) : il me paraît impossible de construire des mobilisations contre le réchauffement climatique en utilisant Facebook. Oh, Facebook peut être *utile*, oui, notamment en offrant une audience captive potentielle de plus de deux milliards de personnes. Mais le modèle économique de Facebook étant basé sur la publicité et donc la consommation, la plateforme de Mark Zuckerberg ne permettra jamais que l’on s’attaque aux fondements du système qui le fait vivre et lui permet de croître encore et encore.
Développer et faire advenir PeerTube v3 et Mobilizon v1 me paraît donc essentiel. Non pas parce que ce serait fun, ou pour rajouter une alternative de plus au foisonnement d’outils existants. Et surtout pas pour « renverser » YouTube ou Facebook. Nous ne voulons pas que nos outils prennent la place de ceux préexistants : nous souhaitons décoloniser l’imaginaire d’une impossibilité de faire face à des entreprises un million de fois plus puissantes que nous. Car il est possible de faire face. Et si nous échouons, il vaudra alors sans doute mieux « couler en beauté que flotter sans grâce ».
Comment assurer le développement de Mobilizon, qui a des chances de devenir un outil stratégique de mobilisation citoyenne, sans s’assurer d’un modèle économique pérenne ?
Cela m’a beaucoup travaillé ces dernières semaines : comment réussir à proposer un PeerTube v3, dont je pense sincèrement qu’il serait utile pour permettre une libre transmission des savoirs sans pour autant conditionner son développement à un processus de crowdfunding inconvenant dans la situation actuelle ? Comment réussir à assurer dans les années à venir le développement de Mobilizon, qui a de fortes chances de devenir un outil stratégique de mobilisation hors des plateformes régulées par les géants du numérique, sans s’assurer d’un modèle économique pérenne ?
À l’heure où vous lirez ces lignes, nous venons de publier un article et notre newsletter précisant que nous allons donc faire ce PeerTube v3 et ce Mobilizon v1. Les dates ont un peu bougé, parce qu’on a été pas mal occupés ces dernières semaines et qu’on refuse de se cramer pour respecter des calendriers ou des injonctions de consommateurs. Par contre, côté modèle économique, ça va être YOLO-style ! On va bien avoir une page de soutien à PeerTube v3, mais on fera les choses, qu’on ait l’argent ou pas. Idem pour Mobilizon.
C’est assez contre-intuitif, en tout cas pour moi qui ai quand même une responsabilité vis-à-vis de l’emploi de mes collègues, ainsi que plus globalement vis-à-vis du bon fonctionnement de l’association. Mais assurer le bon fonctionnement de l’association, ce n’est pas forcément assurer sa pérennité. C’est s’assurer que nous faisons au mieux. Que nous plaçons nos valeurs et notre engagement au-dessus de contraintes, qu’elles soient financières ou sanitaires.
Deuxième exemple : se soutenir les un⋅es les autres
Cette forme d’action directe, on la retrouve aussi dans le fonctionnement interne de l’asso. Comme affiché sur notre page d’accueil, Framasoft est avant tout une bande d’ami⋅es. Or les situations financières de cette bande d’ami⋅es sont très variables. Cela va, pour la faire courte, du RSA au rentier. Et nous sommes parfaitement conscient⋅es qu’une partie de ces ami⋅es pourrait souffrir de la situation économique des mois à venir. Cela ne nous paraît pas acceptable. Et l’indignation nous paraît certes importante, mais insuffisante.
Comme Angie l’a évoqué dans un précédent billet, nous mettons actuellement en place notre propre « filet de sécurité/solidarité » entre membres, et donc ami⋅es, où les plus à l’aise financièrement pourront soutenir celles et ceux qui rencontrent des difficultés. Les détails importent ici assez peu, car ils ne concernent pas les lecteur⋅ices de ce blog, et même pas Framasoft en tant qu’organisation (il s’agit d’une solidarité directement entre personnes). Le principe est cependant loin d’être nouveau : « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». cet exemple d’auto-organisation privée, directe, communautaire, solidaire, s’est multiplié à l’infini ou presque non seulement en France, mais sur les territoires confinés, au niveau mondial.
Troisième exemple : s’auto-organiser
Ainsi, sur ma commune (rurale) de confinement, le premier hypermarché est à 35mn de voiture (et le premier « drive » encore plus loin). Certains habitants de la commune n’ayant ni la possibilité, ni les moyens de faire ce trajet, un petit marché de producteurs locaux s’est mis en place dès la seconde semaine de confinement (avec l’accord de la mairie et des règles sanitaires strictes et contrôlées). Rien d’extraordinaire à cela, car ce type d’initiative utile si ce n’est indispensable s’est multiplié sur l’ensemble du territoire.
J’ai cependant été plus marqué par le fait que le producteur de fromages, habitant lui aussi la commune, ait utilisé Framaforms pour ses commandes (sans me connaître ni connaître Framasoft auparavant). Ma fierté était cependant un peu gênée par le fait qu’en tant qu’auteur du logiciel, je sais qu’il n’est pas vraiment adapté à ce type d’usage. Mais bon, ça l’a dépanné un temps, alors tant mieux. Puis, les 4 ou 5 producteurs de ce marché on ne peut plus local ont basculé vers un autre logiciel, libre lui aussi ! https://www.cagette.net/ est en effet une solution parfaitement adaptée à ce genre de problématique. Les producteurs saisissent leurs produits, les clients passent commande (soit en ligne, sans commission, mais avec frais bancaires ; soit en réglant directement en liquide lorsque vous venez retirer votre commande).
Ici, pas de startup, pas d’État, pas de banque, pas intermédiaire si ce n’est un logiciel libre développé avec passion par les salarié⋅es d’une SCOP bordelaise qui n’ont aucunement besoin d’exploiter vos données personnelles ou de vous imposer un quelconque modèle.
L’à venir
Ce type de fonctionnement autonome, autogéré, auto-organisé, résilient – un mot que je ne souhaite pas voir être approprié par la Startup Nation – préexistait avant le confinement. Mais la défaillance voire l’absence d’État en a rendu l’expérience concrète nécessaire.
Il doit selon moi nous donner confiance en nous, nous apporter l’assurance que nous devons agir avec dignité, fierté, et ne pas attendre pour passer à l’action. Nous sommes capables et légitimes. Ici et maintenant. Que ce soit pour organiser un marché local, pour mettre en place des solidarités communautaires, ou pour développer des logiciels que nous pensons essentiels.
Comme le disait le philosophe Henri Bergson : « L’avenir n’est pas ce qui va arriver, mais ce que nous allons faire. »
Lettre d’information n°24 — Printemps 2020
Bonjour à toutes et à tous.
Avant toute chose, nous souhaitons vous envoyer toute la chaleur humaine et le réconfort que nous pouvons transmettre par cet email. Nous le répétons depuis des années : ce n’est pas le logiciel qui est libre, c’est vous. L’humain prime sur la machine. Le soin porté aux outils numériques n’a de sens que pour mieux prendre soin des humain·es, de leurs actions et de leur monde.
Alors si vous ne devez lire qu’une seule ligne de ce long email résumant les 4 derniers mois vécus par notre association, c’est celle-ci : nous espérons que vous recevrez tout le soin dont vous avez besoin, que vous prodiguerez tout le soin que vous pourrez, et nous faisons de notre mieux pour que ce soin soit partagé.
Framalibre, l’annuaire collaboratif des ressources libres (et le tout premier projet fondateur de Framasoft !) vient de dépasser les 1000 notices. C’est peut-être un détail pour vous, mais nous ça nous fait tout chaud à nos petits cœurs de libristes de voir que de plus en plus de personnes contribuent à y recenser non seulement des logiciels libres, mais aussi des œuvres et artistes de la culture libre, des entreprises, des associations, du matériel Libre. N’hésitez pas à y ajouter LA ressource que vous aimez partager autour de vous !
Le 26 février dernier, nous avons – enfin ! – ouvert officiellement le MOOC CHATONS, avec la publication intégrale de la première séquence intitulée « Internet : pourquoi et comment reprendre le contrôle ? » Co-conçu avec la Ligue de l’Enseignement, ce cours en ligne ouvert à toustes a pour but d’informer sur l’histoire et le fonctionnement d’Internet, les enjeux de centralisation de nos données par les géants du web et les pistes d’action pour s’émanciper de tout cela.
Dans la lignée du MOOC CHATONS, le 25 mars, nous avons ouvert un librecours pour acquérir les clés de la culture libre, et en particulier celles des licences libres. Que vous soyez créateur, prescriptrice, spectateur, étudiante, ou tout ça à la fois, ce cours permet de savoir comment exploiter un contenu culturel en ligne et diffuser les siens.
À contexte exceptionnel, mesures exceptionnelles, il a été décidé d’ouvrir deux sessions de ce librecours afin de permettre à celles et ceux qui ont davantage de temps durant le confinement de pouvoir le terminer plus rapidement.
Comme beaucoup de personnes, les membres de Framasoft ont vécu ce bouleversement à de multiples niveaux : personnel, bien sûr, mais aussi collectif (l’association, les collectifs où nous œuvrons), professionnel (la ruée sur les services) et social (les décisions et débats des politiques). Nous avons documenté ce que l’on vivait, par besoin comme par réflexe.
Avec un gouvernement ayant élevé le solutionnisme technologique au rang de slogan publicitaire national (la fameuse « Start-up Nation »), c’était prévisible… Voilà que, de jour en jour, « l’application StopCovid » (dont personne n’a rendu public la moindre ligne de code au moment où nous écrivons cette lettre d’information) est présenté comme une solution essentielle et importante et…
C’est un sentiment étrange, pour nous technophiles et geeks enthousiastes, de nous voir en train de rassembler tout un dossier pour démontrer que « non : la technologie n’est pas la solution, cherchez ailleurs ». Que ce soit par les traductions Framalang, les plumes invitées ou les envolées claviétales de nos membres : tout le monde a contribué !
Déclic et Affaires Privées : nos #MustRead du (dé-)confinement
Si vous voulez soutenir vos libraires lors du déconfinement tout en vous tenant informé·es sur les abus des GAFAM, les enjeux du capitalisme de surveillance et les alternatives souhaitables, voici deux livres que nous avons beaucoup appréciés et qui ont pu vous échapper durant ce confinement.
Déclic, de Maxime Guedj & Anne-Sophie Jacques (ed. Les Arènes), est un livre court, abordable par les non-spécialistes, qui permet de comprendre ce qui se passe derrière nos écrans et particulièrement avec les GAFAM, mais aussi d’exposer les alternatives respectueuses des données et des humain·es et de lister des ressources pratiques.
Affaires Privées, de Christophe Masutti (C&F éditions), est un essai de celui qu’entre nous nous appelons Framatophe, puisqu’il est membre et administrateur de Framasoft. Grâce à un immense travail de recherche dans notre histoire contemporaine, Christophe remonte aux sources du capitalisme de surveillance pour replacer cette notion dans près de 60 ans d’évolutions culturelles, politiques et technologiques…. Il en expose ainsi les mécanismes historiques pour mieux déterminer comment s’émanciper de ce système.
Le confinement a plongé de très nombreuses personnes dans la pratique du télétravail sans même qu’elles n’y soient préparées. Pyg, le directeur et délégué général de notre association, est salarié de Framasoft depuis plus de 10 ans, et a passé un bon nombre de ces années en télétravail, ainsi que d’autres années à encadrer une équipe comprenant beaucoup de télétravailleurs et télétravailleuses.
Il a donc partagé son expérience, enrichie ensuite par le reste de l’association, en un Mémo pour le télétravail (libre). Plus qu’une liste de logiciels et services libres à utiliser pour faciliter vos collaborations à distances, vous y trouverez aussi de nombreux conseils et astuces essentielles pour ne pas passer les trois quarts d’une réunion dématérialisée à régler les problèmes de micros de chacun·e.
Nous venons tout juste de publier sur le Framablog une mise à jour de ce plan d’action 2020 qui tient compte de toute l’énergie passée à réagir à ce grand bouleversement dans nos vies, nos communautés (et nos serveurs !).
10 bonnes raisons de fermer certains services Framasoft
Début mars, nous avons dévoilé concrètement pourquoi et comment nous comptions « déframasoftiser internet ». La première annonce de la fermeture de certains de nos services avait été reçue de nombreuses façons, et avait créé quelques angoisses : vous vous doutez bien que ce n’est pas le but !
Si nous ne voulons pas être une « association de services web » ad vitam æternam, c’est parce que nous voyons avant tout Framasoft comme une association d’éducation populaire aux enjeux du numérique. Ainsi, il était hors de question de fermer ou de restreindre l’accès à certains services sans accompagner les personnes qui les utilisent dans leur émancipation numérique. Nous espérons que cela se voit dans la mise en œuvre de ces fermetures qui commenceront cet été et s’étaleront jusqu’en 2022 !
alt.framasoft.org : la page qui regroupe les liens vers des alternatives ;
Voir les alternatives à Framanews et Framastory, premiers services à fermer (cet été).
Nos admin-sys ont du talent
Framadrive (stockage et synchronisation de fichiers) et Framagenda (agenda en ligne) ont connu, en ce début d’année, quelques soucis de performances, avec ralentissements, des coupures de service, etc.
Ces problèmes ont donné du fil à retordre à notre équipe de techniciens tous terrains, qui après avoir mené l’enquête (et être tombés sur quelques fausses pistes) ont fini par résoudre tout cela… et en ont profité pour mettre à jour les services concernés.
Déferlante sur les services de collaboration à distance
Avec le confinement, la vague des personnes découvrant et s’affairant sur les services en ligne que nous proposons fut vécue comme un ras de marée ! Ainsi Framapad, notre outil d’écriture collaborative, Framatalk (pour la visioconférence), Framateam (notre outil de tchat de groupe) et Framadrop (pour partager des fichiers lourds) ont littéralement été pris d’assaut !
Nous avons dû mettre en place, en urgence, de nombreuses mesures pour faire face à cette montée en charge :
migration de certains services sur des machines plus puissantes (voir sur un ensemble de machines, pour la visioconférence) ;
ventilation de la création des nouveaux Framapad ou Framatalk vers des hébergeurs amis et solidaires ;
ouverture de nouvelles instances pour ne plus surcharger les outils existants (tels que MyPads2 ou covid19.Framadrop) ;
chasse aux bugs et contributions pour optimiser les logiciels qui font tourner ces services ;
mises à jour et optimisations des hébergements dès que possible…
Nous avons vraiment fait de notre mieux, en collaboration avec la communauté, pour contribuer à notre humble mesure à ce que le confinement se vive un peu moins mal.
Toujours dans cette urgence, il nous a fallu prendre des décisions pas faciles mais nécessaires. Ainsi, dans un premier temps, nous avons demandé aux personnes relevant des ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et la recherche de ne pas utiliser nos services pour assurer leur « continuité pédagogique ».
Nous avons bien vu que les outils mis à la disposition de ces personnels ne fonctionnant pas, une petite partie d’entre eux se tournaient vers les services que nous proposons. Sauf qu’une petite association n’a pas les moyens d’accueillir, même dans une infime proportion, les besoins numériques des 800 000 profs et 12 millions d’élèves en France.
Par ailleurs, nous recevions des témoignages d’autres personnes utilisant nos services. Des familles et ami·es tentant de supporter l’isolement, des associations de défense de personnes précarisées (ou luttant contre les violences domestiques) qui avaient plus que jamais besoin de pouvoir agir, voire des hôpitaux qui cherchaient à faire des visioconférences entre patient·es et proches.
Bref : autant de personnes qui n’avaient pas, derrière elles, les moyens d’un ministère (voire de deux) pour soutenir leurs besoins numériques. Il nous était nécessaire de trancher, même si ce choix était un crève-cœur pour nous. Une fois que toutes les mesures techniques que nous avons prises ont été efficaces, nous avons été ravi·es de pouvoir lever cette restriction.
Un choix beaucoup plus simple, cette fois-ci, a été de signaler que l’aide à l’utilisation des services que nous proposons se fera, désormais, sur notre forum d’entraide.
En effet, il n’était pas possible à notre unique salarié assurant le support des services Framasoft d’accueillir toutes les questions des nombreuses personnes qui ont découvert les « framachins » à l’occasion de ce confinement.
En même temps, nombreuses et nombreux ont été les libristes voulant nous apporter de l’aide : qu’à cela ne tienne, nous avons mis en place un espace d’entraide pour accompagner, entre gens de bonne volonté, les personnes qui utilisent ces services libres.
Bien entendu, notre support par email reste toujours disponible pour accompagner les questions qui impliquent de dévoiler des informations personnelles ou confidentielles, en remplissant le formulaire de cette page.
Les contribateliers, ce sont des rencontres pour contribuer au libre ouvertes à toustes, même (et surtout !) aux personnes qui ne peuvent pas coder. Proposées à l’origine par des membres de Framasoft, cette initiative (que nous soutenons de tout notre cœur) nous a bien vite dépassé pour prendre une bien belle autonomie !
Depuis la fin 2019, de nouvelles villes se sont mises à organiser leurs Contribateliers (Nantes, Rennes, Grenoble, Tours) tandis que les premières villes à avoir testé la formule sont passées à un rendez-vous mensuel (Paris, Toulouse, Lyon…)
Avant que nous nous confinions, depuis le début de l’année, vous avez probablement pu nous croiser dans les événements suivants :
Au 100 ans de la création de la Société des Nations, le 10 janvier à Genève, où pyg représentait Framasoft à cet événement organisé par l’association Internation (en partenariat avec l’IRI et Ars Industrialis) ;
Aux #WADay de Paris, le 30 janvier, où Angie a participé à la table-ronde Numérique et Responsabilité des associations ;
Au Festival des Libertés numériques, du 4 au 6 février, où Angie a donné une conférence sur les Carnets de voyage de Contributopia et a animé deux ateliers ;
Au Contribatelier de Lyon du 14 février, où Gavy nous a représenté·es et a assuré une co-animation ;
Au Mini-village Alternatiba sur le Numérique Libre et les Savoirs Communs du 16 février, où Maiwann et Pouhiou ont tenu un stand et participé à des ateliers ;
Au Contribatelier de Tours (à Chambray-lès-Tours plus exactement) du 17 février, où Goofy a co-animé et présenté les échanges ;
À la journée Démocratie Numérique Populaire de Paris du 7 mars, où Stph et pyg ont assuré une conférence ;
Au salon Primevère du 7 mars à Lyon, cette fois-ci, où Lise a donné une conférence « Dégafamisons avec Framasoft » ;
Au Contribatelier de Lyon du 11 mars, où Gavy nous a à nouveau assuré une co-animation ;
Au Café des sciences de Chambéry du 12 mars où Fla nous a représenté·es dans une table-ronde ;
Au festival Transfo du 14 mars à Grenoble où Fla a participé à une table-ronde sur les logiciels libres et la low-tech.
Le Collectif d’Hébergeurs Alternatifs CHATONS
Dès les début de l’année, ce collectif qui propose, partout en France et même au delà, un maillage d’hébergement de services libres, sans profilage publicitaire et dans le respect de vos données… Bref, dès le début de l’année, les CHATONS se sont activés à mieux se présenter au monde et à mieux s’organiser au sein du collectif.
Cela s’est traduit par une mise à jour de la Charte du collectif (qui explicite les engagements précis pour assurer que les services web proposés respectent des valeurs de liberté, transparence, de neutralité technique et de solidarité), la mise en place d’une nouvelle organisation des réunions virtuelles mensuelles (un calendrier annuel et une animation portée par les structures) et la préparation de la participation aux JDLL.
Alors que les contribateliers se multipliaient, une pandémie a confiné la France chez elle. Qu’à cela ne tienne, la joyeuse bande des orgas de Contribateliers ont décidé d’expérimenter un contribatelier à distance, chacun·e chez soi, mais ensemble dans la contribution.
Le samedi 25 avril, plus de 80 personnes se sont retrouvées en visio-conférence (grâce à l’outil BigBlueButton) sur les 10 pôles de contribution, de la cartographie au design en passant par de la curation de contenus libres, pour apporter leur pierre au libre. L’événement a suscité tellement d’enthousiasme aurpès des participant·es qu’il risque fort d’être reproduit… même après le déconfinement !
Après s’être proposé pour nous aider à endiguer le flot des personnes confinées en recherche de services libres pour collaborer à distance (encore merci les ami·es !), les CHATONS ont décidé de s’organiser pour aller plus loin. En effet, beaucoup de services proposés par ces hébergeurs ne demandent aucune inscription, et sont accessibles librement : il suffit d’aller sur la bonne page !
« Et si on s’inspirait de ce qui a été fait sur Framapad et Framatalk pour présenter tous ces services et renvoyer les utilisateurs vers l’hébergeur qui peut les accueillir ? » se sont-ils demandé… C’est ainsi qu’est née la page entraide.chatons.org qui vous présente 9 services (du pad d’écriture collaborative à la visioconférence en passant par le raccourcisseur d’URL…) en accès libre, dans le respect des données, et répartis parmi les hébergeurs du collectif pour assurer plus de résilience !
Le 12 février, nous avons publié la nouvelle version de PeerTube, le logiciel que nous développons afin de multiplier et fédérer les alternatives à YouTube. Cette version 2.1 apporte son lot de nouvelles fonctionnalités.
Les améliorations concernent aussi bien l’interface, l’enrichissement de la documentation (avec une nouvelle API pour les spécialistes qui aiment ça ;) ), mais aussi un gros travail sur les commentaires et les capacités de modération, et enfin un nouveau mode de confidentialité pour les vidéos.
Nous développons Mobilizon pour multiplier (et fédérer) les alternatives aux événements, pages et groupes Facebook. Le logiciel est en pleine gestation, et si nous hébergeons un site de démo afin que chacun·e puisse le tester, il n’est pas encore utilisable en conditions réelles (car Mobilizon n’est pas fini).
En effet, en ce début d’année, nous avancions à grands pas sur les pages et les groupes, afin d’implémenter les fonctionnalités annoncées lors de la collecte du printemps 2019. Avant l’arrivée de cette pandémie et le confinement généralisé, nous avions, alors, bel espoir de tenir les délais et de pouvoir ouvrir sa première version publique et aboutie en juin 2020.
À l’heure où nous envoyons cette lettre d’information, nous venons juste de publier un article Framablog pour expliquer ce que nous pensons pouvoir faire en 2020, après avoir vécu l’ensemble de ces bouleversements. Cet article met à jour notre déclaration d’intentions pour 2020 publiée en novembre 2019, alors que nous n’imaginions pas vivre une pandémie mondiale.
Tout le travail que nous avons fourni ces dernières semaines n’a pu se faire qu’en mettant en pause le reste de nos activités. Par exemple le développeur de Mobilizon, comme celui de PeerTube, ont consacré leur temps de travail à assurer la montée en charge de nos services décrite plus haut.
Ainsi, nous ne ferons pas de crowdfunding pour financer la v3 de PeerTube, mais allons annoncer sa feuille de route et accompagner chaque étape de son développement d’une collecte perlée sur plusieurs mois, sans insistance sur la récolte des dons. L’objectif est de publier une version 3 de PeerTube en novembre 2020.
De même, nous allons retarder la sortie de la version 1 de Mobilizon à octobre prochain. Cela nous permettra de compenser le temps passé aux actions pour faciliter le confinement, mais aussi de prendre le temps de tester l’ensemble des fonctionnalités fédérées que proposent ce logiciel.
Enfin, nous ne pensons pas avoir l’énergie nécessaire pour réaliser notre « projet Framacloud » en 2020. Nous le gardons donc dans les cartons, et verrons bien ce qu’il en adviendra dans le futur.
Nous tenons à vous remercier, car si nous avons eu la liberté de tout arrêter et de tout retarder pour mieux répondre aux besoins urgents, c’est grâce aux dons qui financent notre association et nous donnent l’indépendance de faire de tels choix.
Donc merci à toutes les personnes qui nous soutiennent, que ce soit en parlant de nos outils, en partageant nos bafouilles ou en faisant un don, car ces gestes sont importants pour nous aider à appliquer nos valeurs dans des actions concrètes.
Si Framasoft défend des valeurs d’éducation populaire, de Libertés, d’émancipation, de convivialité… c’est parce que nous croyons que, dans le numérique comme dans le monde physique, l’humain est bien plus important que la machine.
Dans l’idéal, c’est mieux si nous tous et nous toutes, nous prenons soin de nos outils (numériques et autres), de nos actions, de nos communs, de nos communautés. Mais dans la réalité, c’est avant tout les personnes que nous sommes et qui nous entourent, qu’il faut chouchouter.
Nous espérons que vous pouvez prendre soin de vous et des vôtres comme nous essayons de le faire au sein de Framasoft et de l’archipel de contributions où baigne notre îlot d’expérimentations.
L’Inde ordonne à tous les employés des secteurs public et privé d’utiliser une application de traçage des contacts soutenue par le gouvernement et de maintenir une distance sociale dans les bureaux alors qu’elle commence à assouplir certaines de ses mesures de confinement dans les districts moins touchés par le coronavirus.
Le gouvernement allemand a opéré un virage à 180 degrés sur le traçage numérique en annonçant opter pour une approche “décentralisée” pour le suivi des personnes en contact avec des patients atteints du coronavirus, ce qui le rapproche de la solution préconisée par Apple et Google.
Christian Drosten, le virologue allemand à l’origine de la politique de tests de masse en Allemagne, s’inquiète d’une deuxième vague de Covid19 plus violente que la première.
Bien que cela n’ait pas été affirmé clairement, l’État ne veut pas que les gens partent en vacances. Du moins c’est sa position pour le moment, car comme l’a dit le ministre au sujet des plages, l’interdiction peut être levée dès que les choses s’améliorent.
La secrétaire d’Etat Agnès Pannier-Runacher a indiqué ce lundi qu’elle était réticente à fixer un prix maximum pour les masques en tissu, de peur de … “freiner l’innovation”
Korian, numéro un européen des maisons de retraite privées, annonce jeudi porter plainte contre le quotidien Libération, jugeant diffamatoire un article “mettant en cause sa gestion de la crise épidémique Covid-19”, paru il y a quelques jours.
En France, on n’a pas de pétrole, mais on a pléthore de patrons-voyous, et la grande distribution excelle en la matière : Alexandre Bompard (Carrefour), Édouard Leclerc, Gérard Mulliez (Auchan), Jean-Charles Naouri (Casino)… il n’y en a pas un pour rattraper l’autre, et surtout pas en ce moment.
L’initiative du gouvernement, recensant des sites de vérification d’information de plusieurs grands médias, provoque malaise et critiques, de la profession et des oppositions.
En distinguant tel ou tel article sur son site, le gouvernement donne l’impression, dans un mélange des genres délétère, de labelliser la production de certains médias. Selon cette même logique, les autres ne seraient pas dignes d’un imprimatur que l’État n’a pourtant aucune légitimité à délivrer dans un pays où la liberté de la presse est une liberté fondamentale.
En vérité, la question de la surveillance numérique et celle du déconfinement sont entièrement décorrélées : cantonner le numérique à des fins de surveillance est un choix politique. Pour moi, le succès du déconfinement est d’abord une question d’investissements dans des dépenses de santé publique, permettant de réaliser des tests massifs, de doter tout le monde de masques et d’optimiser la gestion de lits d’hôpitaux. Dans l’idéal, on pourrait ainsi imaginer un numérique au service du référencement de ces éléments, par exemple une application officielle qui permettrait de savoir combien de tests sont disponibles et où les effectuer autour de moi. ll a été décidé d’aller dans un sens différent qui fait passer le pistage des êtres humains avant le dépistage de la maladie. […] l faut casser ce modèle dystopique auquel le discours ambiant semble nous avoir destinés. Cette surveillance numérique est présentée comme inéluctable, alors qu’elle peut s’avérer inefficace, discriminatoire et atteindre la vie privée des citoyens si on ne permet pas aux citoyens de protéger leur vie privée et la confidentialité de leurs informations médicales. En réalité, il ne s’agit pas de lutter contre une maladie difficile à détecter en renonçant à nos libertés, mais en nous efforçant de la détecter ! La question centrale est celle des tests, des masques et du nombre de lits d’hôpitaux, et il n’existe pas d’application « magique » capable de remplacer une solide politique de santé publique.
Pourquoi se focaliser sur une application qu’il faudra discuter à l’Assemblée nationale et qui risque de ne jamais voir le jour, alors que nous devrions déjà nous concentrer sur la constitution et l’outillage numérique d’une véritable armée d’enquêteurs en épidémiologie ?
L’application StopCovid ne sera pas prête pour le 11 mai. Le ministre de la Santé Olivier Véran prépare déjà la France à ce qu’elle ne voit jamais le jour.
Spécial Coronavirus – données (plus ou moins) scientifiques
Il s’agit d’une inflammation systémique des vaisseaux sanguins pouvant toucher le coeur, le cerveau, les poumons, les reins ou encore le tube digestif. Elle entraîne de graves micro-perturbations de la circulation sanguine qui peuvent endommager le coeur ou provoquer des embolies pulmonaires, voire obstruer des vaisseaux sanguins dans le cerveau ou le système gastro-intestinal
Dans une étude prépubliée (non revue par des pairs) mercredi 29 avril, des chercheurs alertent sur le fait que les enfants pourraient finalement être aussi contagieux que les adultes. Sans apporter évidemment de certitude absolue, les scientifiques expliquent avoir découvert que la charge virale ne diffère pas avec l’âge.
Une étude de l’université de Harvard montre que les patient·es atteint·es du Covid-19 vivant dans un environnement pollué ont plus de risques de mourir du virus.
Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé
Il y a quelque chose de fascinant à voir ces hommes se comporter comme si Internet n’existait pas, ou comme si parmi les atteintes neurologiques liées au coronavirus, on décomptait une épidémie de démences subites.
Aujourd’hui, la consternation s’allie au dégoût. Toute guerre a ses profiteurs. C’est malheureusement une loi intangible de nos conflits. Comment s’expliquer que nos soignants n’aient pas pu être dotés de masques quand on annonce à grand renfort de communication tapageuse des chiffres sidérants de masques vendus au public par certains circuits de distribution. Où étaient ces masques quand nos médecins, nos infirmiers, nos pharmaciens, nos chirurgiens-dentistes, nos masseurs-kinésithérapeutes, nos pédicures-podologues, nos sages-femmes mais aussi tous nos personnels en prise directe avec la maladie tremblaient et tombaient chaque matin ?
Pourquoi se retrouve-t-on dans la situation d’accepter de faire nous-mêmes, dans l’urgence, ce que d’autres auraient dû faire pour nous dans la prévoyance ? D’autres que nous finançons par nos impôts, par exemple. D’autres qui pourraient l’être par une politique fiscale plus juste et redistributive, autre exemple.
Beaucoup de choses me désespèrent. Exemple récent : la carte avec les départements en rouge ou en vert. Le gouvernement a parlé de trois critères. Finalement, il y en a un qui a sauté. Et sur le premier (la circulation du virus), les données nous manquent forcément puisqu’on n’a pas fait assez de tests. Seul le critère sur la situation des services de réanimation est fiable. Par ailleurs, l’étude de l’Institut Pasteur nous dit que 4 millions de personnes ont été infectées. Mais en réalité, on ne sait pas. On n’a pas fait assez de tests. Cette modélisation n’est pas fiable. Dans cette crise, on a manqué de science. On n’a pas fait assez de statistiques.
Mardi 28 avril, j’ai reçu mes premiers masques FFP2 depuis le début de la pandémie. Six masques. Six masques offerts par le gouvernement. Jusqu’ici je n’avais reçu que des chirurgicaux, sporadiquement. Jusqu’ici j’ai pu me protéger uniquement parce que j’avais constitué un petit stock, périmé depuis longtemps. […] Ce scandale se déroule sous vos yeux, ici et maintenant. Ce n’est pas le Rainbow Warrior, ce n’est pas l’affaire Karachi. Tout ceci ne se passe pas dans un pays lointain, il y a une quinzaine d’années, mais ici et maintenant. Ceux qui vous soignent sont mis en danger, tombent malades, meurent, du fait d’une succession de décisions politiques aux conséquences meurtrières. Vous n’en êtes pas responsables, mais vous en êtes témoins.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on peut craindre que l’équipe de bras cassés qui nous gouverne ne fasse une espèce de grand chelem des erreurs : confiner trop tard (fait), mal confiner (fait), déconfiner sans être prêts (c’est bien parti). […] D’abord, pourquoi a-t-il fallu confiner ? Le confinement général est une méthode bourrine, extrême que l’on est contraint d’utiliser lorsqu’on ne peut plus appliquer une méthode à la fois plus logique, plus élégante et moins destructrice : le confinement ciblé des malades. […] Lorsque la bureaucratie Macron se réveille enfin, à partir du 12 mars, pour commencer à prendre avec un retard massif les mesures qui s’imposaient, l’épidémie était en fait déjà très avancée par endroits, menaçant de submerger les capacités du système de santé. Quand Macron aurait-il dû confiner ? Le 5 mars, il déclare que l’épidémie est « inexorable » : il doit en tirer aussitôt les conséquences et réagir au plus vite. Le lendemain, on était à 9 morts et 600 cas recensés : c’est à peu près à ce stade que Wuhan avait été confiné. Macron aurait dû confiner le 10 mars au plus tard ; car l’Italie, qui annonçait la couleur avec 9 jours d’avance, avait confiné la veille. […] Les 6 à 10 jours de retard (pour être gentil, car on pouvait boucler “préventivement” dès le 1er mars) dans les mesures de fermetures et de confinement ont coûté extrêmement cher en vies humaines. Le prix de la nullité du pouvoir : la mort en masse.
Spécial travailleur·euses par temps de coronavirus
Les projets des 1er et 2d degré mentionnaient la distribution des masques au personnel le 11 mai. La date a été retirée, ce qui n’est pas fait pour rassurer les enseignants, même s’il ne s’agit que d’un masque « grand public » au pouvoir protecteur limité. La référence aux masques a été aussi retirée de la fiche thématique personnels qui récapitule les consignes générales. Par contre il est ajouté que le port de gants « doit être évité ». Les masques devaient être portés obligatoirement durant les cours. Cela disparait, sauf en maternelle où ils sont toujours exigés. Ils apparaissent par contre dans la cour de récréation et lors de l’entrée en classe, seuls moments où les enseignants doivent les porter.
Le nouveau «nouveau monde» n’échappe pas aux indicateurs ! Dans la situation présente, est-ce le nombre de tests réalisés ? Le nombre de masques distribués ? Non : les statistiques des verbalisations infligées pour violation supposée des normesde confinement. Les chiffres – près d’un million à ce jour – sont admirables et constituent un légitime motif de fierté pour le ministre de l’Intérieur, tout heureux de les annoncer régulièrement. Il faut dire qu’ils sont plus réjouissants que ceux du professeur Salomon : l’Etat agit ! La police veille ! […] Ce pouvoir ne tient que par son alignement inconditionnel avec ce qu’il y a de pire dans la police, mais ce qu’il y a de pire, ce n’est pas la police elle-même, républicaine et respectable dans son immense majorité. Ce qu’il y a de pire, c’est un pouvoir faible qui lui a confié son sort, qui est prêt à tout couvrir, pour ne pas la mécontenter.
Sarah, étudiante de 22 ans, a terminé sa plaquette de pilules. Alors ce matin de début avril, elle prend son ordonnance, coche sur son attestation la case « Déplacement pour effectuer des achats de première nécessité » et sort de son appartement, à l’Esplanade, en direction de la pharmacie la plus proche. Elle est contrôlée par trois policiers à vélo : « Le chef m’a demandé mon ordonnance. Je la lui ai donnée. Il m’a demandé de quel médicament il s’agissait. Quand je le lui ai dit il m’a répondu : “Ce n’est pas un achat de première nécessité. Vous n’avez le droit d’aller chercher en pharmacie que des médicaments pour vous soigner. Je vous verbalise.” La voix de la jeune femme en tremble encore : « De la part de trois hommes, c’était encore pire. J’étais révoltée, je n’ai pas osé répondre. On voit tellement de vidéos où les gens qui protestent sont menottés, brutalisés… Et puis je craignais qu’ils m’empêchent d’aller à la pharmacie. »
Le 1er mai, le confinement est monté d’un cran dans le 18e arrondissement de Paris, où les forces de l’ordre ont fait taire la musique dans un appartement.« S’il y a de la musique, ça va faire des attroupements ».« Oui, mais les gens respectent la loi, ils ne sont pas dehors, ils sont chez eux, confinés, à leur balcon, pour écouter. Ce n’est pas verbalisable, d’écouter de la musique ? »« Si, c’est verbalisable. »
Une enquête, du chef de violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique, a été ouverte après l’interpellation dans la nuit du 8 au 9 avril à Châteauneuf-sur-Loire, près d’Orléans, d’un adolescent de 13 ans pour non respect du confinement, qui lui a occasionné d’avoir une côte cassée. «Il a fait le mur pour aller jouer à la Playstation chez un copain. Quand il a vu les gendarmes, il a eu peur de se faire punir et de se prendre une amende, il a mis sa capuche et s’est mis à courir», a expliqué son père. Selon son fils «les gendarmes l’ont plaqué au sol, menotté et lui ont donné des coups de poing et des coups de genou»
Les secteurs utiles dans la lutte contre le Covid 19 avaient déjà toute latitude pour augmenter le temps de travail. L’ordonnance n’est utile que pour les secteurs qui ne sont pas utiles à cette lutte. L’Etat d’urgence sanitaire prévoit de nombreuses mesures inutiles dans la lutte contre le virus. Les mesures relatives aux temps de travail font mieux : elle ne contiennent que des mesures inutiles dans la lutte contre le virus. C’est une curiosité. […] Très clairement, dans de nombreux cas, la santé a été pensée comme secondaire par le Gouvernement, la priorité étant la poursuite de l’activité économique. Il s’agit de positions qui sont relativement proches de celles des dirigeants les plus caricaturaux de la planète, comme Trump ou même Bolsonaro. Nous ne sommes pas aussi éloignés que cela de ces malades mentaux que nous avons tendance parfois à croire exotiques. […] L’avenir dépendra, comme d’habitude, du rapport de force. Celui-ci a souvent été perdu par le passé. Cela ne veut pas dire qu’il le sera encore à l’avenir. Il est certain que le Gouvernement craint la force des mobilisations qui pourraient suivre le confinement. Il nous appartient de lui montrer que ses craintes sont sous-estimées.
L’état d’urgence n’est pas le confinement, loin de là. Il ne durera pas ce que le confinement durera, loin de là. L’état d’urgence sanitaire n’implique pas qu’une modification de nos quotidiens pour la protection de notre santé collective. Il implique aussi l’instauration d’un État autoritaire pour la sauvegarde de l’ordre social en perspective de l’offensive capitaliste annoncée. […] Réduire les enjeux de l’EUS aux modalités du confinement évacue toute critique conséquente de la gestion de la crise. Car cette loi concerne bien plus que la santé. Elle met en place un régime politique qui n’est malheureusement pas inédit. Lorsque les pouvoirs sont concentrés dans les mains de l’exécutif et qu’il peut en user de manière discrétionnaire cela porte un nom, même si cela heurte les mythes du pays des droits de l’homme et de l’Europe de la démocratie. […] Dans la rue, c’est la police qui décide de manière arbitraire si nos déplacements sont légitimes ou non, sans qu’aucun texte ne précise les conditions de l’infraction au non-respect du confinement et sans que les tribunaux de police puissent statuer en cas de contestation : désormais toute personne dans la rue est délinquante sauf preuve du contraire, ou plutôt sauf acquiescement aléatoire des flics. Un blanc-seing leur est donné pour les contrôles abusifs et les violences, surtout dans les quartiers populaires où les brutalités habituelles de la police se sont intensifiées. En outre, la répétition de verbalisations est devenue un délit, ce qui est parfaitement contraire aux règles du droit. […] L’instauration d’un nouveau régime est un choix politique, non une fatalité virologique déterminée par la catastrophe sanitaire. La culpabilisation et la répression à l’encontre des classes populaires ne suffisent pas à masquer les dénis du gouvernement, ses mensonges, sa gestion mortifère, l’absurdité de ses consignes contradictoires, non plus la mesquinerie de ses politiques budgétaires, la férocité de ses réformes, sa logique de privatisation à tout va. Il est des mesures prises qui ne peuvent en aucun cas se justifier par la prévention sanitaire mais qui servent sans aucun doute une stratégie de domestication de la population. […] En quelques jours, les droits de la défense ont été anéantis à toutes les étapes du parcours judiciaire, de l’arrestation jusqu’à la sortie de prison.
le gouvernement est effectivement en marche, mais vers l’anti-constitutionnalité. Nommez cette conséquence illégalité ou illégitimité, comme vous voulez. Le gouvernement de la France se promène hors la loi, régnant par la police et il s’approche du coup d’État.
Tant que l’État d’urgence sanitaire s’appliquera (jusqu’à la fin du mois de juillet vient-on d’apprendre), la France n’est plus une démocratie, même si elle n’est pas tout à fait une dictature. En son temps, François Mitterrand avait dénoncé le « coup d’État permanent » qu’étaient les institutions de la Ve République. Le coronavirus a permis d’aller jusqu’au bout de cette logique institutionnelle.
On vit en démocrature, il faut quand même le réaliser ! Aucune des décisions prises sur cette pandémie n’a respecté la moindre ébauche de débat démocratique. On subit les choix d’un Prince aux yeux crevés. Le seul levier qu’ils actionnent est la peur : sa gestion triviale, son emprise évidente, son aérodynamisme pour pénétrer les corps et les têtes d’une population choquée. Au lieu de faire de la médecine — c’est-à-dire de tester, d’isoler et de traiter — les macronards ont fait dans le moyenâgeux, la petite terreur quotidienne et le flicage.
Nous sommes des soignant.e.s et professionnel.le.s de la santé d’horizons divers. Bouleversé.e.s et en colère, nous décidons de nous lever et de crier haut et fort « Bas les masques ! »Nous disons stop aux mensonges, à l’hypocrisie et au cynisme du gouvernement !
quand le masque se déploie à l’échelle d’une société contrainte dans ses mouvements et policée par l’arbitraire d’états d’urgences persistants, alors le masque est la première pièce de l’uniforme. D’une mise au pas. D’une mise au pli. […] Nous avons davantage besoin d’armes que d’ordres. Lorsque nous les aurons, portons nos masques comme des panoplies, jamais comme des uniformes.
Le mot d’ordre du confinement général est parfaitement inédit, non seulement en ce qu’il constitue une consigne sanitaire jamais expérimentée et qui ne tient ni du soin ni de la quarantaine, mais surtout en ce qu’il vise, dans un même mouvement, à alarmer et protéger ; il est à la fois la gifle et les jupes de maman. Ramener chacun à son havre de sécurité, logement, famille, et surtout s’opposer à toute activité exploratoire même parfaitement solitaire, à toute sortie. Le confinement ne se nourrit ni de la solidarité avec les concitoyens, que l’on préserverait ainsi de la contamination, ni de la solidarité avec les soignants, à qui on éviterait l’épuisement, mais de mille petites ou immenses vexations qui activent l’attachement ; propagande inédite en son ampleur qui termine tout discours par “restez chez vous, prenez soin de vous”, privation des libertés de circulation et de réunion, même pour des obsèques, suspension de certaines protections offertes notamment par le droit pénal (obligation de soumettre une cause au débat et de motiver la décision) et le droit du travail (droit au repos), formulaires divers, contrôles de police arbitraires, amendes, dénonciations, arrêtés municipaux, etc., mille vexations qui viennent sonner l’alarme afin de priver le sujet de toute velléité exploratoire et de le renvoyer si possible à un havre de sécurité.
Avec l’épidémie et le confinement, nous sommes non seulement privés de monde au sens culturel et politique, mais aussi de monde sensible […] La seule chose qu’on nous laisse, […] c’est l’écran d’ordinateur. On s’y engouffre d’autant mieux que les outils numériques ont cette capacité de donner l’illusion qu’ils maintiennent ou recréent le monde autour de nous – l’illusion d’être ensemble, alors que nous sommes isolés.
Moi, je ne suis ni virologue ni médecin, mais je m’en tiens à citer des sources officielles fiables. […] Je cite les mots du Docteur Blangiardo : “Au mois de mars 2019, les décès de maladies respiratoires s’élèvent à 15 189 et l’année précédente à 16 220. Incidemment, on constate un total plus élevé que le nombre correspondant de décès par Covid (12 352) déclarés au mois de mars 2020”. Mais si cela est vrai et nous n’avons pas de raison d’en douter, sans vouloir minimiser l’importance de l’épidémie, il faut pourtant se demander si celle-ci peut justifier des mesures de limitation de la liberté qui n’avaient jamais été prises dans l’histoire de notre pays, pas même durant les deux guerres mondiales. Naît le doute légitime qu’en répandant la panique et en isolant les gens dans leurs maisons, l’on a voulu se décharger sur la population des gravissimes responsabilités des gouvernements qui avaient d’abord démantelé le service sanitaire national et ensuite, en Lombardie, commis une série d’erreurs non moins graves dans la façon d’affronter l’épidémie.
le problème est que nous continuons à utiliser le travail comme outil d’accès aux ressources nécessaires pour vivre tandis que nous en avons de moins en moins besoin, une fois les grandes infrastructures mises en place. […] Le désengagement progressif mais assez rapide entre travail et revenu de subsistance adéquat n’est pas alors une mesure radicale mais un simple ajustement aux conditions actuelles.
« Pourquoi les vies que l’on tente de sauver aujourd’hui nous paraissent-elles plus importantes que celles que l’on ne sauve pas d’habitude ? » la faim et la pauvreté tuent 25000 personnes chaque jour dans le monde. Et il faudrait moins d’un milliard d’euros par jour pour que ce ne soit plus le cas. Un milliard par jour – à trouver dans le monde entier – alors que pour lutter contre le coronavirus, la France seule n’hésite pas à perdre le double.
« Quelle vie sauvons-nous, exactement, en ce moment ? » On enferme avec bienveillance, on retire de la vie pour protéger – protéger de l’autre, car l’Autre est dangereux. L’Autre, en marchant sur les trottoirs avec ses courses, l’Autre assis dans le tram pour aller à l’école ou travailler, l’Autre, membre de sa famille, qui ne vit pas sous le même toit mais qu’on aime : cet Autre peut contaminer, donc tuer le vieux.
Récemment interrogé quant aux suites à donner à la crise présente, Macron répond qu’elle « n’enlève rien de ce qu’on a fait avant » et qu’« on rebâtira sur cette base-là ». « Nous allons prendre un grand tournant mais sur cette base de la ligne droite ». La politique comme géométrie non-euclidienne, même Gilles Le Gendre, toujours inquiet de se montrer trop intelligent et trop subtil, pourrait avoir du mal
Vous êtes la génération qui subit la déflagration majeure : élevés, nourris, bichonnés dans la confiance en un progrès global via la société de consommation, vous voici, à peine adultes, aux premières loges pour assister au premier bug mondial d’un système qui, en douce, avait déjà fragilisé notre tissu vital. Vous le savez, tout indique que de tels bugs, il y en aura d’autres.
Excédés et fatigués, ils ont préféré quitter la police nationale et se reconvertir pour ne pas sombrer dans le désespoir. Aujourd’hui, ils dressent un portrait sans concession de leur ancien métier. Racisme, violences, carriérisme, pression du chiffre, heures sup, abus… Nicolas et Yann racontent.
Le 2 mars, le Japon ferme ses écoles. Le 6 avril, il les rouvre partiellement. Une semaine plus tard, il les ferme de nouveau, confronté à une seconde vague de contamination.
La technologie se cache dans la visière, qui affiche un écran qui transmet les données de chaleur des individus à proximité, mais est aussi capable de reconnaissance faciale ou de numéro de plaques d’immatriculation. La compagnie chinoise à l’origine de ces casques hi-tech aurait vendu 1000 exemplaires aux services de sécurité de la métropole émiratie.
En pleine pandémie, les rassemblements devant les bâtiments publics, devant les banques, pour obtenir l’aide sociale, font tâche. La confiance dans le pouvoir politique et l’administration pourrait avoir été entamée. La stratégie sociale du gouvernement est remise en cause. « Elle n’est pas assez courageuse, dit Romdhane Ben Amor. Il faut s’en prendre aux entreprises qui ne paient pas leurs impôts, il faut travailler sur la dette de l’État. D’où le gouvernement a-t-il tiré ces fonds ? A-t-il pris ces sommes sur le budget alloué au développement ? Ce sont les régions de l’intérieur et les couches sociales les plus défavorisées qui vont encore en payer le prix. »
Une idée d’incitation pourrait être de laisser la possibilité de télécharger l’application ou de porter le bracelet sur une base volontaire. […] Mais prévoir que pour ceux qui choisissent de ne pas le télécharger, des restrictions de mobilité subsistent. Il reste à préciser ce que l’on entend exactement par restrictions à la liberté de circulation.
Je voudrais partager avec qui en a envie une question à laquelle, depuis maintenant plus d’un mois, je ne cesse de réfléchir. Comment a-t-il pu advenir qu’un pays tout entier, sans s’en rendre compte, se soit écroulé éthiquement et politiquement, confronté à une maladie ?
Le président du Conseil a également confirmé que le gouvernement travaillait sur un plan de déconfinement des Italiens et de réouverture des activités industrielles à court terme, à partir du 4 mai.
En Espagne, le gouvernement a décidé de suspendre les expulsions et de réduire certains loyers. Estimant ces mesures insuffisantes, des associations ont décidé de lancer un appel à la grève des loyers. Elles réclament la réquisition des milliers de logements vides pour les sans abris et la restitution d’une partie des 65 milliards d’euros d’argent public qui ont sauvé les banques de la faillite après la crise financière
L’épidémie de coronavirus n’a pas fait oublier l’anniversaire de la révolution qui marque, chaque 25 avril depuis 1974, la fin de la dictature fasciste au Portugal.
Le dépistage massif est une piste incontournable dans la lutte contre le Covid-19, mais la clé réside peut-être dans la génétique. Le fait que la population islandaise soit extrêmement homogène et bien étudiée est un atout pour ce pays.
La visite par Emmanuel Macron de serres de tomates à Cléder (29) a mis en avant « le modèle agricole le plus déconnecté du monde vivant », selon la Fédération nationale d’agriculture biologique, qui dénonce « l’absence totale de vision écologique de l’Élysée ».
Malmenée par la crise sanitaire du Covid-19, l’industrie agroalimentaire a obtenu davantage de souplesse dans les obligations d’étiquetage de ses produits. Elle peut désormais changer la composition de ceux-ci sans en informer les consommateurs.
La communication au plus haut sommet de l’Etat pédalait déjà dans la choucroute depuis le début de la plus grande crise sanitaire et économique mondiale de ces dernières décennies, comme l’a montré la cacophonie autour des masques, mais, décidément, les choses ne semblent pas aller en s’améliorant.
À ce stade de la pandémie, il n’y a pas suffisamment de preuves de l’efficacité de l’immunité par anticorps pour garantir la validité d’un « passeport d’immunité ».
Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé
Il s’agit de masques grand public, non destinés aux professionnels. Cet assouplissement des règles de vente était réclamé depuis plusieurs semaines par les syndicats professionnels.
Une enquête de l’Institut Pasteur révèle que seulement 5,7 % de la population aurait été en contact avec le virus et pourrait être immunisée. On est loin des 70% requis pour espérer l’«immunité collective» alors que le déconfinement est lancé à partir du 11/05 et qu’aucune mesure préventive à la hauteur n’a été annoncée, que ce soit au niveau des tests de dépistage ou des masques
Une enquête lancée par l’ONS a montré que 25% des écoles n’ont pas suffisamment de points d’eau pour permettre le lavage des mains. […] En outre, le renouvellement de l’air est souvent mal assuré dans les salles de classe. […] les mesures de CO2 en milieu occupé indiquent des taux de confinement «très élevés» pour 48% des écoles élémentaires et «extrêmes» […] dans 7% des cas.
Selon les données de l’OCDE publiées en 2017, le salaire des infirmiers des hôpitaux publics serait par exemple particulièrement bas, en moyenne 5 % en deçà du salaire moyen national, classant la France parmi les 5 derniers pays sur les 29 pays développés considérés.
Et j’entends bien quand j’appelle mes patients se succéder au téléphone les émotions : l’étonnement, la reconnaissance, la gratitude.[…] Il faut vous dire que les médecins n’appellent pas leurs patients, ou ne sont pas censés le faire. Pour l’Assurance-Maladie, c’est du démarchage, une pratique interdite et réprimandée. […] l’Ancien Monde interdisait cette pratique, soupçonnant les médecins de «faire du chiffre». […] Étrangement, lorsque le coronavirus est arrivé, […], qui a formé la première ligne de front contre le Covid-19 ? Échangeant en temps réel des données sur l’explosion des cas, mettant en place des procédures basiques, cherchant à se protéger pour tenir le choc, mettant en place la téléconsultation, montant des centres Covid ? […] Cette piétaille prétendument égoïste, vénale, frileuse et incapable de s’organiser sans benchmarking.
Si le XXe siècle a débuté en 1914, le XXIe débute avec cette crise sanitaire. A plus forte raison avec le collapse du changement climatique. Une nouvelle hégémonie culturelle émerge : l’entraide plutôt que la concurrence libre et non faussée. La relocalisation plutôt que le déménagement permanent du monde. Le retour de l’Etat et des services publics sont impatiemment attendus.
Le débat sur l’apport du numérique à la résolution de la crise sanitaire actuelle est bien mal engagé. Une énergie considérable est consacrée à développer et affiner le controversé projet d’application de traçage StopCovid, dont la faisabilité et l’utilité restent pourtant sujettes à caution. Pendant qu’on en développe plusieurs versions, qu’on engage un bras de fer avec Google et Apple et qu’on mobilise les parlementaires à discuter et voter sur une application qui risque de ne jamais voir le jour, rien n’est dit de la préparation de l’équipement numérique de la «force sanitaire», cette «armée» d’enquêteurs de terrain qu’il va falloir déployer à partir du déconfinement pour remonter et casser les chaînes de transmission.
Malgré le Plan de traitement des foyers de travailleurs migrants (PTFTM), il reste environ 150 foyers à rénover. Certains comptent des chambres de 7,5 mètres carré, comme à Romainville où le foyer Paul de Kock compte 301 chambres de cette dimension. Des chambres donc parfois plus étroites que des cellules carcérales. Des pièces exigües où le confinement est intenable.
Les deux hommes ont expliqué qu’ils effectuaient “un confinement touristique, une sorte de Tour de France du confinement”. Apparemment, ils étaient allés à la dune du Pilat (Gironde), puis à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques) et enfin à Gavarnie. Ils profitaient du confinement comme de vacances.
Si la situation n’était pas si grave, elle serait presque risible. Il était temps que le Président, et avec lui Jean-Michel Blanquer, le reconnaissent ; ce gouvernement n’ayant cessé d’affaiblir l’école publique dans les quartiers populaires et défavorisés depuis qu’il est au pouvoir.
Avec “35 décès et 5.500 cas de Covid-19″, recensés par la profession, le premier syndicat du transport routier, l’UFR-CFDT appelle les salariés à cesser le travail le 7 mai, date à laquelle Emmanuel Macron fêtera son troisième anniversaire à l’Elysée.
Ça s’est passé le 10 avril. Je suis sorti de chez moi à 23h15, pour aller faire un jogging. Je sais que c’est un peu tard mais avec le confinement, je suis décalé. Sur ma route, j’ai croisé des amis assis sur un banc. Alors que je venais de les saluer, une voiture de police est arrivée. Les gens qui étaient là ont fui en voyant la police. Moi, je suis resté parce que j’avais mon attestation et que j’allais faire mon footing. Je pensais que tout irait bien.
Nous sommes dans cette affaire confrontés à un cas grave de remise en cause de la liberté d’expression comme du droit à critiquer le pouvoir, y compris par la caricature. Et pour faire respecter cela, serions-nous face à la mise en place d’une police politique qui viendra jusque dans nos logements pour nous faire retirer nos panneaux des balcons ? Car depuis le début du confinement des milliers de personnes accrochent banderoles et pancartes à leurs fenêtres pour dire ce qu’elles pensent de la gestion de la crise sanitaire par le gouvernement. C’est l’un des rares moyens que nous avons pour exprimer nos revendications, le droit de manifestation ayant été suspendu dans le cadre du confinement.
Ici, le confinement ayant été justifié par la nécessité de préserver le droit à la vie, cette liberté fondamentale vient en quelque sorte « écraser » un nombre considérable d’autres libertés – celles de réunion, d’entreprendre, d’exercer son activité professionnelle, d’aller et de venir, de manifester… De plus, le Conseil d’Etat considère qu’il n’a pas à inspirer ou insuffler une politique publique à l’égard de l’exécutif, de sorte qu’il a accentué la règle du confinement « brut » (c’est à cause d’une décision du Conseil d’Etat du 22 mars 2020 que le Premier ministre a pris la décision de fermer les marchés alimentaires ouverts), tout en refusant de la mettre en balance avec les carences pourtant avérées de la lutte contre le covid-19 : il est inacceptable qu’après un mois de confinement, toute la population ne dispose pas de masques, de gants, de tests – sans même évoquer les mesures particulières qui auraient dû être prises à l’égard des médicaments et du personnel hospitalier. […] Le principal danger de l’état d’urgence sanitaire pour les libertés publiques est d’ordre philosophique : il serait de penser que la solution aux risques de toute nature (attentats, catastrophe sanitaire…) est de type quasi-répressif, ou en tout cas relève de la police administrative, alors qu’elle relève essentiellement du terrain politique. […] Il aurait sans doute été possible de mieux concilier la prévention de l’ordre public sanitaire et les libertés individuelles en n’adoptant pas une logique guerrière et, en parallèle d’un bref confinement, en réquisitionnant l’industrie française tout en donnant au service public hospitalier les moyens de fonctionner à hauteur des exigences du moment. Mais après tout, on a les dirigeants que l’on mérite.
Lorsque l’on prend un peu de recul, la contradiction confine à l’aporie : enfermer pour protéger la santé publique alors que les mesures de prophylaxie élémentaires pour empêcher la propagation du virus consistent dans la distanciation et imposent donc de vider les prisons. En réalité, cette ordonnance n’est pas un moyen pour l’Etat d’adapter la justice pénale à la lutte contre le virus. Elle est le moyen pour l’Etat de poursuivre la répression malgré la pandémie.
Une partie de la population est prête à se rebeller contre le profond “déni de comprendre” ce qui, depuis une trentaine d’années de politique néo-libérale obsédée par la réduction des dépenses publiques, conduit la société dans le mur. La situation, dramatique, de la filière des soins, dénoncée depuis si longtemps par l’ensemble des praticiens, est révélée au grand public par la gestion, calamiteuse, des équipements (masques, gel hydroalcoolique, tests, respirateurs, médicaments). La population veut des explications sur ce sujet si symptomatique des dégâts du dogme néolibéral, et de ces explications découle une prise de conscience plus globale.
« Via ce système nous suivons aujourd’hui 260 familles, mais nous avons 20 nouvelles demandes chaque jour ! […] Nous sommes de simples habitants, ou des bénévoles qui font habituellement de l’éducation populaire. Ce n’est pas notre rôle d’organiser la sécurité alimentaire de centaines de personnes ! Les pouvoirs publics sont incapables de se coordonner. Ils se reposent sur les collectifs de quartiers. Sans cette solidarité citoyenne, on aurait peut-être déjà assisté à des pillages, des émeutes. Et il n’est pas impossible qu’on se retrouve avec des enfants souffrant de malnutrition à la fin du confinement. »
C’est d’ailleurs ce que montre la façon dont Tenochtitlan, devenue Mexico après la prise du pouvoir par les Espagnols, a évolué : les nouveaux maîtres de la ville, qui était une splendide cité lacustre, décident de démolir tous les bâtiments et d’assécher les lacs. Notamment pour construire des routes, sur lesquelles faire rouler les chariots à roues… Une décision stupide, car la ville est une cuvette, arrosée par les montagnes environnantes et les pluies tropicales une partie de l’année. Conséquence : la cité est très régulièrement inondée, parfois même pendant plusieurs années. Et c’est un problème qui n’a toujours pas été résolu à ce jour, malgré la construction d’un grand canal d’évacuation au début du XXe siècle, qui est déjà obsolète, la ville s’affaissant un peu plus chaque année. Au fond, les Mexicains sont encore en train d’éponger les conneries des Espagnols. C’est une très bonne illustration d’un progrès qu’on te donne comme fabuleux alors qu’il est défaillant. […] les Mexicains d’aujourd’hui disent “la roue manquait aux Aztèques” alors qu’il y avait surtout une chose qui manquait : la sagesse aux Espagnols. Il faut faire attention à l’impératif d’efficacité, y compris chez ceux qui cherchent à penser autrement la société. […] Si tu refuses de nourrir la machine, alors quelque chose peut arriver. Je crois vraiment à l’arrêt. Arrêter de nourrir la bête qui nous dévore[…] Internet a été un parfait exemple en ce sens : on disait, on espérait, que ça allait tout changer, en bien […] le nouveau livre, la connaissance universelle, le dialogue sans frontières. Sauf que non : on s’est fait piéger par cette Gorgone au regard glaçant qui s’appelle progrès. C’est allé vers le pire, comme d’habitude.
Epidémie. Etymologiquement “sur” le peuple. Pandémie. Etymologiquement “tout” le peuple. Et – pardon pour le néologisme – peut-être aujourd’hui une sorte “d’ubiquidémie”. Etymologiquement “partout” le peuple. C’est à dire l’idée d’un peuple ou de l’humanité dans son entier, qui devrait ou pourrait être tracée, suivie partout à la fois, de son premier mètre à son dernier kilomètre.
Quand prendre un avion connecté à Internet n’interrompt plus le flux de votre travail, vous êtes en contrôle. Quand vous êtes sur une île déserte et que vous êtes toujours connecté, vous êtes en contrôle. Quand un bracelet connecté continue de relever vos signaux biométriques et votre position, vous êtes en contrôle. Vous maîtrisez tous les aléas de votre destin. Et êtes donc responsable, redevable, de chaque imprévu qui pourrait impacter votre productivité.
Si aujourd’hui, après une brève pénurie, on ne manque plus de gel, c’est parce que les formulations hydro-alcooliques sont libres de droits, parce qu’elles sont un bien commun, et que de ne nombreuses bonnes volontés se sont mises à les produire dès que la demande a augmenté. Pourquoi n’avons-nous pas de masques ? Tout simplement parce qu’avant la crise aucun de fiable, de testé, de suffisamment simple à produire n’avait été versé au compte des biens communs. Nous avons fait confiance à l’économie de marché, partant du principe qu’elle était la plus efficace, et nous avons eu la démonstration que cette assomption était fausse. Nous en sommes réduits à faire appel à des industriels qui spéculent, se font la guerre, se vendent aux plus offrants. Résultat : les masques arrivent au compte goûte. […] Pourquoi personne ne parle de tests Covid-19 brevetés ? Parce que Christian Drosten et son équipe ont libéré dès la mi-janvier le test qu’ils ont mis au point.
Ce film ne raconte pas une histoire. Il se veut une approche sensible et radicale des violences psychologiques et physiques infligées aux habitant·es des quartiers populaires par la police.
En 1968, au moment où ouvriers et étudiants français bouleversent l’ordre en place en France, Agnès Varda se tourne vers une autre révolte, celle du Black Panther Party aux États-Unis, à Oakland. Dans un documentaire radical et déterminé, elle évoque la répression policière en adoptant le ton révolutionnaire des militants qu’elle filme.
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.
Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).
Journal de confinement d’un directeur d’école
C’est au tour de Cyrille de prendre la plume pour nous raconter son confinement. Directeur d’une école, il a dû très vite s’adapter à la suite de l’annonce rapide de la fermeture des établissements. En tant que membre de Framasoft, il avait quelques atouts numériques dans sa manche.
Jeudi 12 mars : la surprise
Soyons honnête, je m’attendais au confinement, mais pas dès ce lundi. Ce matin, notre ministre annonçait qu’ « il n’y aura pas de fermeture généralisée des écoles en France comme on a pu le voir dans d’autres pays d’Europe ».
Pourtant, ce soir, le président prononce ces mots.
« Dès lundi et jusqu’à nouvel ordre, les crèches, les écoles, les collèges, les lycées et les universités seront fermés pour une raison simple : nos enfants et nos plus jeunes, selon les scientifiques toujours, sont celles et ceux qui propagent, semble-t-il, le plus rapidement le virus, même si, pour les enfants, ils n’ont parfois pas de symptômes et, heureusement, ne semblent pas aujourd’hui souffrir de formes aiguës de la maladie. C’est à la fois pour les protéger et pour réduire la dissémination du virus à travers notre territoire. »
Dès lors, le premier réflexe, utiliser la liste de diffusion SMS du PPMS (Plan Particulier de Mise en Sûreté) pour informer les collègues (atsems, enseignants, avs…) qui n’auraient pas l’information et de proposer un conseil des maîtres le lendemain midi pour se coordonner, s’organiser, s’entre-aider.
Repas terminé, enfants couchés, ma priorité est de régler le plus de détails possible pour être au maximum disponible demain, car le vendredi, comme le jeudi, j’ai les élèves.
Donc, création d’affichages, d’un mot pour les cahiers, sur le site de l’école, préparation du travail pour les CE2 et les CM2 pour la semaine suivante, vérification de la validité des différents comptes des enseignants sur le site de l’école…
Vendredi 13 mars : le marathon
Arrivée un peu plus tôt que d’habitude, j’accroche les affichages, duplique les mots, les devoirs de mes élèves. Discussion, échanges avec les collègues. Ouverture des portes, rassurer parents et enfants…
Explication du fonctionnement à mes élèves. Et puis on travaille, presque comme d’habitude.
Le midi, transmission de quelques consignes générales données aux collègues :
les élèves partent avec leurs affaires : manuels, ardoises…
demander d’utiliser autant que possible son adresse mail professionnelle.
communiquer des premières informations générales et notamment que le site de l’école sera la porte d’entrée pour le suivi du travail…
Puis, je reste disponible pour un libre service de conseil sur comment se connecter, publier sur le site (j’axe sur ajouter du texte, du texte, un PDF).
Dans la journée, il faut également essayer de savoir ce que vont devoir faire les différents personnels non enseignants : atsems, avs, services civiques durant la fermeture de l’école.
16h30 : Les élèves partent. C’est un sentiment un peu étrange, nous ne savons pas quand nous les reverrons. Des parents de ceux absents viennent chercher le travail.
18 heures : Après avoir récupéré mes enfants, je reçois un nouveau mail de l’inspection concernant l’accueil d’enfants de soignants dès lundi. Appel aux services scolaires de la mairie qui m’annoncent que la cantine a été pour le moment totalement annulée. On s’organise provisoirement : accueil dans chaque établissement, les familles devront apporter leur pique-nique et on fera le point le lundi.
Dans la soirée, changement de la page d’accueil du site pour orienter plus facilement les élèves et leurs parents vers la partie qui concerne leur classe.
Samedi 14 mars et dimanche 15 mars
Le samedi soir le Premier ministre annonce un confinement de toute la population à partir de mardi. Changement de programme : les réunions entre enseignants (conseils de cycles) avec les familles (équipes éducatives) qui devaient être maintenues, sont donc de facto annulées, en tout cas en présentiel.
Objectif global du week-end : informer, accompagner, outiller les enseignants en essayant de ne pas les noyer sous les informations.
Leur fournir un premier fichier extrait de Onde (le logiciel de l’éducation nationale pour gérer les inscriptions des élèves), leur demander de vérifier avec leurs fiches de renseignements. Au besoin, j’envoie un SMS avec le portable de l’école (content alors de l’avoir demandé pendant plusieurs années et que la mairie ait accepté) pour obtenir des adresses mails manquantes.
Dimanche, 12h, suite aux déclarations du directeur général de la santé, je fais le choix de demander aux enseignants de rester chez eux à partir du lundi, je serai présent à l’école le lundi matin pour accueillir les potentiels enfants de soignants. J’informe mon IEN (Inspectrice de l’Éducation Nationale) de cette décision.
Affichage devant l’école et sur le site pour informer les potentiels enfants de soignants de l’organisation retenue.
Envoi d’un message de soutien aux amis salariés de Framasoft, car je sais qu’avec l’annonce du confinement et du télétravail dans l’éducation nationale et pour une très grande majorité des travailleurs, ils vont en prendre plein la tronche.
Lundi 16 mars
Arrivée à l’école vide. Aucun enfant de soignants n’est présent sur notre école.
Avant de partir, je récupère du matériel : caméra Hue, casque micro, un tableau blanc, certains spécimens de manuels…
Milieu de matinée, appel de la mairie qui me demande mon avis pour l’accueil de ces enfants. Il n’y en avait qu’un seul sur une des écoles de la commune. Je lui propose alors de regrouper tous les futurs présents sur cette école.
12h : mail de l’IEN qui confirme que cette organisation est retenue. Mail aux enseignants pour savoir qui est volontaire en précisant bien que ceux qui ont des fragilités ou des personnes fragiles dans leur environnement proche ne sont pas concernés. Affichage devant l’école et sur le site du changement de dispositif.
Dans la journée, très fier de constater que l’équipe pédagogique s’est mobilisée en masse. Sur l’école : 6 enseignants pour le temps scolaire, 2 animatrices et 2 atsems pour les temps périscolaires sont volontaires
Mardi 17 mars
Avec ma collègue directrice d’une des autres écoles, nous accueillons l’enfant présente et organisons les services des bénévoles. Nous réussissons à ne mobiliser les enseignants qu’une à deux demi-journées par semaine.
Finalement, la mairie décide de remettre en route le service de restauration (chez nous les repas sont encore faits sur place sur une cuisine centrale). Dès le jeudi, nous changerons d’école pour être près de cette cuisine.
En parallèle, appui aux collègues de l’école pour les aider à publier leurs articles.
Réalisation d’un conseil de cycle virtuel pour confirmer les propositions de passage.
Mercredi 18 mars
Je continue l’accompagnement des collègues sur des problèmes qu’ils rencontrent sur la publication, le manque de coordonnées de certaines familles… En parallèle, je modère les messages des parents sur le site, leur réponds, fais le lien avec les enseignants concernés.
Jeudi 19 mars
Réception d’un mail de l’inspectrice « Lettre aux enseignants » à transmettre aux collègues. Un courrier plein d’humanité qui fait beaucoup de bien après ces premiers jours de classe à distance. On est loin de ce que peuvent faire remonter certains enseignants d’autres circonscriptions. La qualité de ce premier échelon hiérarchique est vraiment essentielle.
Vendredi 20 mars
Je propose aux élèves qui le peuvent de découvrir le fonctionnement d’un pad et ainsi tout simplement de prendre des nouvelles, échanger entre eux.
Première semaine écoulée. J’ai pu voir que les différents ENT, services… ont eu beaucoup de mal à encaisser cette charge. Et c’est bien normal. De notre côté, avec notre site internet indépendant, on s’en sort sans douleur au niveau technique. Toute cette première semaine, j’ai vérifié chaque publication des collègues afin de corriger certains petits détails et les aider.
Samedi 21 mars et dimanche 22 mars
Je continue à essayer d’outiller les collègues. Il faut leur faire des tutoriels qui utilisent précisément le site de l’école. Les tutos existants sur le net ne permettent pas à tous de s’y retrouver. Dès le vendredi, je m’y attèle et c’est une fournée de 8 tutos que je leur fournis.
C’est clairement perfectible, mais dans l’urgence, cela sera déjà une bonne aide.
Dans cette période où chacun est isolé chez soi, je propose aux atsems d’avoir un accès au site de l’école pour y publier ce qu’elles souhaitent afin de garder un lien avec les familles.
Semaine du 23 au 27 mars
Je poursuis les permanences pour les enfants de soignants. On tourne entre 4 et 12 élèves.
J’adapte le planning en fonction des nouvelles contraintes des personnes volontaires.
Le mardi, superbe surprise, nos atsems lancent sur le site de l’école un projet de bricolages avec des matériaux de récupération pour la « fête de la liberté ». Elles n’ont eu aucune formation spécifique, ne sont pas des « digital natives », elles ont juste suivi les mini-tutos.
Ce même jour, première réunion de directeurs avec l’inspectrice en visioconférence.
Au niveau de la direction, le gros dossier de cette semaine est l’envoi individualisé des propositions de passage et du premier volet du dossier de passage en 6e. Évidemment, dans Onde, rien n’est prévu pour faire un envoi par mail en un clic depuis leur site. Il faut télécharger les fiches individuelles générées par classe, les découper en fichier individuel et envoyer à chaque famille par mail. Ensuite, suivre le retour…
Pour la classe, préparation des deux journées à distance, puis en fin de semaine, mise en ligne de la correction. Il faut essayer de trouver le juste dosage pour la quantité de travail. Je propose un nouveau temps d’échange en utilisant un pad, mais ce coup-ci avec un petit objectif d’écriture.
Au passage, petit coup de main à une de personne de la circonscription pour créer des PDF modifiables avec LibreOffice.
Le week-end, je débute l’impression de visières de protection pour les enfants et les adultes du service d’accueil en reprenant le modèle proposé par la youtubeuse Heliox.
Semaine du 30 mars au 3 avril
Distribution des visières qui remportent un franc succès : prévues initialement pour les enfants et les adultes encadrant, les cuisinières et d’autres agents municipaux s’en emparent également.
Mardi, visioconférence avec les enseignants de l’école à la fois pour donner quelques informations, leur faire découvrir l’outil du CNED et avoir le plaisir de se donner des nouvelles.
Jeudi, appel des différentes familles de la classe et nouvelle réunion de directeurs avec l’inspectrice en visioconférence.
Comme la semaine précédente, préparation des jours de classe et de la correction.
Envoi du 2e volet du dossier 6e pour les élèves de CM2.
Préparation du planning de présence des enfants de soignants pendant les vacances scolaires. Même si c’est encadré par des agents municipaux, je continue l’organisation du service d’accueil afin que les familles n’aient pas une multiplicité d’interlocuteurs.
Préparation également du planning des enseignants volontaires pour les deux semaines qui suivent la rentrée, le ministre ayant annoncé un arrêt des cours au moins jusqu’au 4 mai.
Deux familles se sont manifestées, car leur matériel informatique est devenu défaillant. En concertation avec la mairie, l’école prête deux portables.
Du 4 au 19 avril : les vacances
La zone C, nous sommes en vacances. La pression retombe. Honnêtement, cela faisait un bon moment que je n’avais pas senti une telle fatigue liée au boulot. Un mot sur la page d’accueil de l’école pour indiquer qu’enfants comme enseignants sont en vacances. Pour une fois, je suis bien content d’être la première zone en vacances.
Afin que les élèves puissent garder un contact entre eux, je mets en place une sorte de mini-chat sur le site de l’école, avec accès réservé aux élèves de la classe. Ravi de voir qu’aucun débordement n’a lieu.
Toutefois, même si le rythme est plus tranquille, je me prépare au scénario du pire et commence à planifier toutes les notions essentielles à voir d’ici la fin de l’année. J’enregistre toutes les dictées jusqu’à la fin de l’année, prépare des mini-leçons pour les leçons des premières semaines. J’en profite pour les mettre sur le Peertube temporaire de l’académie qui vient juste d’ouvrir.
Mon objectif : ne quasiment plus avoir de préparation pour la classe à faire pour les 3 prochaines semaines afin de me concentrer sur la direction de l’école avec de grosses échéances à venir (admission des nouveaux élèves, constitution des classes, commandes…) qu’il faudra adapter selon les conditions sanitaires.
Week-end de Pâques, je sers de cobaye à 3 collègues qui se lancent dans le stage de soutien pendant la 2e semaine des vacances. Avec la plateforme de visioconférence du CNED, nous voyons quelles fonctionnalités sont pertinentes pour une utilisation avec un petit groupe d’élèves.
Lundi 13, alors que les potentielles « fuites » laissaient entendre à une reprise en septembre, le président annonce une poursuite du confinement et une réouverture progressive des établissements à partir du 11 mai. Plusieurs questions. Sans les conséquences économiques d’un confinement, aurait-il annoncé une reprise le 11 mai ? Qu’entend-il par « progressive » ? Ne serait-ce pas nous les directeurs qui allons une fois de plus endosser cette responsabilité (« L’ensemble des locaux scolaires est confié au directeur, responsable de la sécurité des personnes et des biens » Circulaire no91-124 du 06 juin 1991 modifiée par les circulaires nos 92-216 du 20 juillet 1992 et 94-190 du 29 juin 1994 art.4-1) ?
D’un point de vue personnel, la réunion familiale pour Pâques est quelque chose de très important pour mes parents. Nous leur avons donc fait vivre la chasse aux œufs et playmobil dans le jardin en visioconférence (merci Jitsi !).
Avant de reprendre, préparation d’une enveloppe pour chaque élève avec un roman, quelques photocopies, un courrier leur indiquant vers où on va pendant les prochaines semaines. Notre mairie procède encore aux envois postaux pour les écoles (j’ai déjà dit combien j’avais de la chance). Toutefois, la majorité des élèves habitant à moins d’un kilomètre de chez moi, j’ai fait une petite distribution dans les boites aux lettres le jeudi.
Avant de reprendre, nouveau prêt d’un ordinateur de l’école à une famille qui n’a pas d’enfant chez nous, que des collégiens. Mais bon, le collège leur ayant dit qu’il n’avait pas de possibilité de prêter du matériel avec la mairie nous nous sommes dit qu’on ne pouvait pas laisser un collégien sans PC pendant les 3 prochaines semaines. Surtout que c’est une mère infirmière, qui se bat tous les jours à l’hôpital voisin pour sauver des vies, cela aurait été indécent de ne pas les aider à notre manière.
Point d’étape
On ne peut pas vraiment parler de bilan, car on n’est pas au bout du confinement, voici donc un point d’étape avant de reprendre pour une session d’au moins 3 semaines de classe à distance.
Point de vue personnel
Le confinement et l’isolement ne sont pas, en soi, un problème pour moi. J’ai un caractère ours très développé et je crois avoir des projets pour les deux décennies à venir. Le risque d’ennui est donc très limité. En plus, j’ai la chance d’avoir un jardin qui est un véritable atout. Je me sens vraiment privilégié.
J’ai été content de voir que des ressources réalisées auparavant comme le site de littérature de jeunesse libre semblent utiles. D’ailleurs, cela a fait exploser mes statistiques de visites ! Euh, en réalité je n’en sais rien et je m’en moque, je ne sais même pas si j’ai des stats quelque part sur mon hébergement. J’ai toujours l’habitude de fonctionner de manière assez égoïste pour la création de tel ou tel projets. Je le fais si cela me fait plaisir, si j’en ai envie. Ces projets servent à d’autres, tant mieux, sinon, eh bien, je me serai amusé à les réaliser.
Au niveau familial, pendant la partie scolaire, je n’ai pas été très disponible les matins et heureusement c’est ma femme qui a géré toute la partie du suivi des devoirs des enfants.
Point de vue de la classe
Je crois qu’avec ma collègue avec qui je partage la classe, nous avons réussi à trouver un juste équilibre afin de permettre la fois aux élèves de poursuivre les apprentissages sans submerger les familles. Il a fallu à la fois proposer des activités ne nécessitant pas ou peu d’impressions et des travaux ne demandant pas une connexion Internet ou un ordinateur en permanence (entre les parents en télétravail, les frères et sœurs, le tout sur un seul appareil parfois).
Les différentes familles que j’ai eues au téléphone se retrouvent bien dans le fonctionnement que nous avons proposé avec ma collègue.
Point de vue des membres de l’équipe pédagogique
Je suis juste fier de ce qu’ils ont fait jusqu’ici au niveau du lien avec les enfants et les familles. Chacun avec ses moyens a essayé. Certains ont publié leurs premiers articles sur le site à cette occasion et ont publié tous les jours depuis. D’autres, un peu plus expérimentés ont testé la création de petites vidéos par exemple. Au niveau du numérique, je crois pouvoir dire qu’ils vont tous avoir progressé.
Fier aussi de leur investissement dans le service d’accueil des enfants de soignants.
Fier également de leur bienveillance réciproque, à chercher à prendre des nouvelles de chacun.
Au niveau médical, trois membres de l’équipe ont chopé le covid19, pour le moment sans gravité.
Point de vue de l’école
En 1 mois la communication électronique a explosé. Sur la messagerie de l’école : 700 mails envoyés et 995 mails reçus (dont 209 de parents d’élèves, 122 de l’inspection, 50 liés au service d’accueil des soignants, 20 de l’inspection académique, 30 des syndicats, 30 mairie, 284 mails de différents expéditeurs, 250 mails inutiles et donc supprimés)
Et je ne compte pas les messages envoyés depuis la messagerie professionnelle personnelle.
Le contexte local et des choix faits ces dernières années au sein de l’école ont permis une gestion pas trop douloureuse :
un lien avec la mairie sans faille. Nous travaillons ensemble, dans la même direction avec le même objectif pour les enfants de la commune.
une relation hiérarchique de confiance. J’ai la chance de pouvoir compter sur une équipe de circonscription qui a su être présente sans nous mettre de pression inutile.
des choix techniques respectueux des données des familles et des enfants. Depuis plus de 10 ans, nous avons notre propre site d’école, maintenant sous WordPress avec notre propre nom de domaine. Il est un véritable repère pour les enfants, familles et enseignants. Aucun problème de saturation du site. L’habitude d’utilisation du mail professionnel par les enseignants a aussi été un atout.
des choix d’organisation interne. Depuis des années nous travaillons avec des cahiers qui suivent les élèves sur plusieurs années, ce qui nous permet d’avoir des marges budgétaires pour disposer de séries de manuels et de livres de littérature de jeunesse. Ces supports papier ont été très utiles et complémentaires du site Internet.
On a beaucoup entendu ces derniers jours qu’une reprise se justifiait pour les enfants les plus fragiles. Mais ces enfants les plus fragiles, cela fait déjà des années que pas grand–chose n’est fait pour qu’ils s’en sortent. Leurs problématiques sont trop souvent extérieures à l’école. La suppression des RASED, le manque de places dans les services adaptés, les délais d’attente pour les prises en charge médicales, la surcharge des services sociaux… c’est tout cela qui empêche ces enfants en grande difficulté de s’en sortir. L’école ne peut malheureusement pas combler ces carences.
Point de vue du libre, du respect des données
Pendant « le grand confinement » de nombreuses offres gratuites, temporaires, d’accès à des ressources sont apparues. La grande majorité, j’ose le croire, avec une volonté de proposer une aide pendant cette période, d’autres, il ne faut pas se leurrer, avec l’espoir de récupérer des parts de marché tel un dealer offrant sa première dose à un futur toxico.
Les enseignants, ne leur jetons surtout pas la pierre, ont pour certains utilisé des applications, services clairement irrespectueux des données personnelles de leurs utilisateurs. Et les utilisateurs, ici, ce sont des enfants. Il faut dire qu’à différents niveaux hiérarchiques, même le plus haut, l’exemple n’est pas forcément le bon et qu’une certaine pression peut parfois être exercée pour que la classe continue comme normalement.
Au niveau éducatif, le monde du libre a su répondre. Même si dans un premier temps, à Framasoft, nous avons dû, à contrecœur, « refuser » les enseignants, nous avons finalement réussi à garantir un service fiable en augmentant notre puissance de feu (allégorie guerrière pour être dans la thématique étatique) et grâce au soutien du collectif CHATONS. Nos salariés sont vraiment extraordinaires !
La deuxième bonne nouvelle au niveau du libre est la mise en place de services à base de logiciel libre pour chaque académie : vidéo (peertube), écriture collaborative (etherpad), blogs, webconférence (jistsi), partage de documents (nextcloud), forums (discourse). Ce travail est le fruit d’un groupe à la DNE. Cette plateforme est pour le moment temporaire le temps du confinement. Espérons qu’elle perdure !
Et alors, on était prêt ?
C’est un mantra entendu à de multiples reprises : « nous sommes préparés en cas d’épidémie ». Alors je crois que personne ne peut affirmer honnêtement que oui. Peut-être que vu le contexte local, sur notre école nous l’étions un peu moins mal que d’autres. Il sera temps, un peu plus tard, de tirer le bilan des dysfonctionnements, des améliorations à apporter… en attendant, profitons de l’école en fleurs.