Chapitre V — Où Pouhiou use le plancher, démarre le diesel et se souvient qu’écrire c’est pour rire
Ça devait arriver. Comme tout héros de bon road-movie, Pouhiou repasse sur ses traces et dévoile les dessous des nuits parisiennes du Libre : on y chante du Brel et du Brassens (sans le déclarer à la Sacem !) devant une chouette machine à libérer les livres de leur support matériel.
Mais le plus important c’est tout de même que Pouhiou envisage de renoncer à sa thèse de narratologie, tétanisé tout à coup par la pratique de l’écriture de deux gamins doués : eh oui c’est aussi ça le nanowrimo, redécouvrir qu’écrire est un jeu !
J’irai écrire chez vous épisode 5 : re-Paris
Ben oui : retour à la capitale, à mi-chemin de l’aventure. Pas par jacobinisme, mais parce que Paris est au centre des routes. Et qu’on y découvre de merveilleuses personnes.
Chez Adrienne
J’avais rencontré Adrienne sur Toulouse. Sur une conférence « culture libre » à la médiathèque. Lors de mon premier Capitole du Libre l’année dernière. D’ailleurs, cet évènement libriste toulousain aura lieu les 23 et 24 novembre prochains, j’y serai et j’en serai… si vous voulez qu’on s’y retrouve…
Sous un premier abord courtois et modéré, on sent vite que cette illustre wikipédienne a un caractère passionné et un humour pétillant. Néanmoins, si on s’était croisés et appréciés, on n’avait pas vraiment eu le temps de beaucoup échanger. Du coup, quand elle a proposé de m’héberger dans ce romanesque tour de France, je me suis dit que l’occasion était trop belle de découvrir et la personne et son univers.
Des discussions généreuses
Mes aïeux, quelle découverte ! Des soirées de papotages jusqu’à trois heures du matin, où tous les sujets se rencontrent, se répondent. Je ne connais pas, ou mal, le milieu libriste. Adrienne, avec ses nombreuses activités au sein de Wikimédia France, a rencontré tout ce joli monde et m’en a fait visiter une partie, telle une guide bienveillante. On a parlé histoire, littérature, anecdotes familiales, société, éducation, mentalités… J’ai découvert le projet Afripédia qui vise avec pertinence et respect à entrainer le continent africain (et ses cultures) dans cette aventure du savoir encyclopédique partagé… Quand on voit les résultats humains de projets nés du numérique, on ne peut plus dire que « le net, c’est pas de l’IRL, de la vraie vie ». Un peu à l’image de ces partages qui jalonnent mon voyage d’écriture : vrais, intenses, des moments où on est juste contents d’être humains.
Les petits monstres d’Adrienne
Des personnes au caractère vif, épanoui. Deux êtres mus par une vraie soif de découvrir l’autre en échangeant avec lui. C’est très agréable de voir des enfants qui n’essaient pas jouer à faire l’enfant, ou alors avec un second degré bien dosé. Le deuxième soir, j’ai eu droit à un joli cadeau : ils m’ont lu leurs histoires. Le récit fantastique qu’ils écrivent. Ils maîtrisent si bien les codes harrypotteriens (jeune héros découvre son pouvoir / va dans une école / découvre un univers magique et ses castes) qu’ils en jouent avec une aisance folle. Magie élémentaliste, portes dimensionnelles, architecture, moyens de transports, uniformes : tout est pensé, tout fait sens dans une belle unité.
Être le témoin d’un jeu : un privilège.
Jusque dans le style et la narration, leur travail est admirable. L’histoire est écrite avec un vrai sens de la mise en scène. Le premier chapitre débute sur un dialogue pour nous immerger, puis des explications parsèment les descriptions quand le héros découvre/nous fait découvrir le monde imaginaire… Une découverte faite de dialogues et anecdotes qui rendent l’exploration vivante et amusante. Le lendemain, juste avant mon départ, ils ont une remarque — à priori anodine — qui me parle terriblement. Je leur dis l’admiration que je porte à leur compréhension/maitrise des codes et à l’inventivité qu’ils y insufflent. Là ils me répondent de manière très naturelle : « mais tu sais, c’est un jeu… » #Blam. Oui, je sais que c’est un jeu. J’ai juste mis 15 ans à me le rappeler. Je peux pérorer, du haut de mes grandes théories de « je n’écris pas, je digère », ou de « je joue avec mes amis imaginaires et ainsi j’écris mes romans »… Eux ils savent déjà, et n’ont eu aucun besoin de rationaliser tout cela dans des addenda (lis ceux de #MonOrchide et tu comprendras).
J’ai aussi écrit chez Adrienne
Non parce que mine de rien, on a bouclé le chapitre III. Un chapitre où j’ai pas mal joué avec des savoirs acquis lors de mes études, souvent en les démontant. Du coup, premier jour du chapitre 4, je n’ai écrit qu’une pauvre page (genre 600 mots). Il y a un schéma qui commence à poindre : débuter un chapitre est long. Une journée de tâtonnements, de recherches, à user un plancher qui n’est pas le mien en faisant les cent pas… Ben oui : je n’ai pas préparé mon roman à l’avance pour mieux le laisser me surprendre. Sauf que cette fois-ci le temps est resserré. Qu’importe, il me faut le prendre pour laisser éclore ces débuts de chapitre. Un démarrage difficile, diesel, suivi de journées d’écritures prolixes, appliquées et prenantes. J’explose de rire quand je me vois tout triste d’écrire la tristesse d’un personnage. Je tergiverse et trépigne lorsque je ne veux pas écrire une scène qui sera horrible dans sa violence minimaliste et déshumanisée…
Les soirées parisiennes
Bon, vu que ça ne sortira pas des internetz, je peux l’avouer : on s’est rendus au Quadrapéro. Les apéros ouverts tenus mensuellement par la Quadrature du Net. Si je veux faire sérieux, je peux dire que cette soirée est l’occasion de faire un point informel et informatif sur tous les sujets liberticides du moment.
Je peux ajouter que découvrir le BookScanner monté par Benjamin Sonntag est un émerveillement, dont on a envie de voir plein de petits émules tourner constamment à plein régime.
Je peux aussi dire que découvrir Benjamin, parler avec Sylvain, retrouver Lionel ou observer Jérémie en monsieur Loyal… Bref que voir tous ces gens est une joie, un réconfort pour les petits combats qui nous tiennent à cœur et demandent nos énergies. Mais ce serait éclipser que les pizzas coulent à flots (parfois aidées de quelque liqueur) et qu’on peut finir par entendre quelques paroles de Brel et Brassens s’élever dans les voix…
Et, au lendemain de la fête, on part vers Limoges…
À la fois fatigué et empli.
À dans trois jours,
— Pouhiou.