Le logiciel libre est l’arme secrète de Google contre Microsoft

Google Search : Linux

« Quelle est la plus grande menace pour Microsoft : Google ou le logiciel libre ? Les deux mon capitaine, qui plus est lorsqu’ils travaillent main dans la main. » C’est peu ou prou ainsi que débute cette nouvelle traduction[1] issue, une fois n’est pas coutume, du RedmondMag.com (dont on peut saluer la liberté de ton).

Parce que si il est vrai que le logiciel libre fait de plus en plus vaciller le géant c’est peut-être son alliance avec Google qui portera le coup de grâce…

On comprendra au passage pourquoi Google ne serait pas Google sans le logiciel libre et pourquoi le logiciel libre est actuellement tant est si bien soutenu par Google qu’il lui est difficile de le critiquer objectivement.

Screenshot - RedmondMag.Com

L’arme secrète de Google

Google’s Secret Weapon

Glyn Moody – Janvier 2008 – RedmondMag.com

Tout en minimisant sa compétition directe avec Microsoft, le géant de la recherche continue à travailler en silence sur des projets open source pour mettre des bâtons dans les roues de son grand rival.

Quelle est la plus grande menace pour la domination de Microsoft : la firme Google ou l’open source ? La réponse est : les deux, particulièrement lorsqu’ils travaillent main dans la main.

"L’open source est l’outil suprême du capitalisme logiciel" affirme Matt Asay, vice président du développement commercial chez Alfresco Software Inc., une société spécialisée dans la gestion de contenu d’entreprises 1 open source. "Il permet aux fournisseurs de s’adapter finement à leurs clients et à leurs prospects tout en ruinant les efforts de leurs concurrents qui veulent faire payer les licences de leurs propres produits. C’est la tactique qu’a employée Google avec succès et qui a chamboulé le marché des logiciels au tournant du siècle."

Le géant de la recherche prend toujours soin d’apaiser la spéculation faite sur la menace pesante d’une guerre des titans. Lorsque Google a ajouté une application de présentation à sa suite bureautique en ligne, par exemple, le PDG Eric Schmidt a déclaré catégoriquement que ce n’était pas un concurrent de Microsoft Office.

D’autres, comme Raven Zachary, directeur de la recherche open source chez The 451 Group[2], expriment un avis différent. "Il est vital pour Google d’ébranler la domination de Microsoft Office pour promouvoir son offre de suite bureautique en ligne" dit-il. "C’est de la concurrence, point."

Google peut essayer de minimiser cette compétition autant qu’ils veulent en public, en coulisse ils savent très bien que Microsoft a dépensé 6 milliards de dollars pour faire l’acquisition de la société de publicité numérique aQuantive Inc. pour lancer une offensive musclée contre Google sur son propre terrain. Le passé montre que Microsoft ne s’arrête pas tant qu’il ne domine pas le secteur dans lequel il se lance, on peut donc difficilement dire qu’une cohabitation pacifique soit envisageable.

Face à ce problème complexe, la fourmilière de doctorants de chez Google a trouvé la solution parfaite : avoir un outil pour combattre Microsoft sans vraiment en avoir l’air. L’open source se trouve au coeur de leur stratégie.

Ouvert pour affaire

La plupart des gens savent que les vastes cheptels de serveurs de Google, on parle de centaine de milliers de machines, tournent sur des versions personnalisées de GNU/Linux. Moins nombreux sont ceux qui savent également qu’ils font un usage intensif de la principale base de données open source : MySQL.

(Google est) l’exemple d’une entreprise qui n’aurait concrètement pas pu exister telle qu’on la connait avant le développement de Linux ou de l’open source" d’après Jim Zemlin, directeur exécutif de la Linux Foundation, l’organisme qui rétribue Linus Torvalds pour son travail sur le noyau Linux. "S’ils avaient dû s’appuyer sur Microsoft ou Sun non seulement cela aurait été trop cher, mais surtout ils n’auraient pas pu réaliser les modifications nécessaires à la création de leurs services."

Ce dernier point est confirmé par le manager des programmes open source chez Google, Chris DiBona, qui a rejoint la compagnie en août 2004 pour superviser et coordonner les activités open source : "Ce qu’il y a de bien avec l’open source c’est que c’est un peu comme s’il était à vous. Dites vous bien que Google fournit un effort de développement de logiciel énorme, si nous devions nous plier aux restrictions que le code propriétaire nous impose nous ne serions pas capable de développer à ce rythme soutenu."

Google contribue à l’écosystème open source en employant certains de ses meilleurs codeurs.

"Nous les employons parce que les avoir dans nos équipes permet à nos projets d’avancer, ce qui est bon pour nous" ajoute DiBona, "et l’utilisation que nous faisons des projets trace parfois la voie qu’ils peuvent emprunter." Parmi les recrues on trouve de gros poissons comme Andrew Morton, numéro 2 dans le monde Linux, Greg Stein, l’un des directeurs de l’Apache Software Foundation et Jeremy Allison, l’un des leaders du projet Samba qui fournit les services de fichiers et d’impression open source aux clients SMB/CIFS dont Windows fait parti.

Un autre vétéran de l’open source ayant rejoint le vivier de Google est Ben Goodger, ingénieur en chef de Firefox. Les liens entre Google et ce concurrent de plus en plus sérieux d’Internet Explorer sont bien plus profond cependant. Google est le principal moteur de recherche de Firefox, à la fois dans le champ de recherche dédié et sur la page d’accueil par défaut au premier lancement de Firefox.

En octobre 2007 on a appris que l’organisation derrière Firefox, c’est-à-dire la Mozilla Foundation, a empoché 66 millions de dollars en 2006 grâce à ces partenariats avec les moteurs de recherche, ce qui représente une augmentation de 50 millions de dollars par rapport à l’année précédente. Cela signifie que Google, qui est de loin celui qui paie le plus pour ces requêtes, finance concrètement le développement de Firefox et de Thunderbird, le concurrent de Microsoft Outlook développé par Mozilla, et de ce fait affaiblit doucement l’hégémonie de Microsoft sur le marché des navigateurs et des clients de messagerie.

Google a aussi commencé à organiser des rencontres de haut-niveau où des personnes clés du logiciel libre travaillant sur un projet peuvent se réunir et se rencontrer en face à face, ce qui reste quelque chose qui ne se produit que rarement autrement. Par exemple en novembre 2006 des programmeurs importants travaillant sur la distribution Ubuntu (celle qu’installe Dell Inc. sur ces PC grand public tournant sous GNU/Linux) se sont réunis sur le campus de Google, le Collaboration Summit de la Linux Foundation s’y est tenu en juin 2007 et en septembre 2007 les développeurs responsables de Python se sont rencontrés pour travailler sur la version 3 du langage. Python est l’un des trois langages de programmation utilisé intensivement par Google (les deux autres étant Java et C++) et son créateur, Guido van Rossum, travaille également pour Google.

Un amour de vacances

Mais ce ne sont pas que les superstars de l’open source qui bénéficient de l’attention et des bien-faits de Google. En 2005, le géant de la recherche a démarré son programme "Summer of Code" grâce auquel des étudiants en informatique reçoivent un financement de Google pour travailler sur un projet open source pendant leurs vacances d’été. Ce programme donne un coup de pouce à ces projets et augmente leur viabilité en injectant du sang neuf.

Comme le dit Sebastian Kügler du projet d’environnement de bureau KDE (en cours de portage sur Windows) : "C’est la vraie idée derrière Summer of Code : inoculer aux étudiants le virus du logiciel libre, leur donner la chance de grandir dans une communauté comme la nôtre."

Comme l’explique DiBona il y a un autre avantage plus subtil. Grâce au Summer of Code, "Google connait désormais tous les gens travaillant sur les projets dont Google dépend" dit-il. "Ca nous est vraiment utile. Lorsque nous sortons une nouvelle API nous savons qu’il y aura des projets dans le monde open source soit pour l’utiliser soit pour en être client. On peut simplement les appeler et dire "Salut les gars, c’est Google, on est votre ami" et les laisser jeter un coup d’oeil.

Google soutient également les logiciels libres en mettant à disposition son code sous des licences open source (généralement la licence Apache comme c’est le cas par exemple pour la nouvelle plateforme mobile Android). Leur plus grosse contribution jusqu’à maintenant est peut-être Google Gears. "Gears est une extension open source pour votre navigateur qui permet aux développeurs de créer des applications Web qui peuvent fonctionner hors-ligne" explique DiBona. "On aurait pu se contenter de sortir l’extension pour nos applications, mais grâce à l’open source d’autres personnes peuvent l’employer sans crainte, ils savent que personne n’abandonnera cette technologie parce qu’ils la possèdent aussi."

La sortie de Gears dans un format open source encourage une adoption plus large dans la communauté des logiciels libres et au-delà. Si Gears trouve son public et que les utilisateurs ont la possibilité d’utiliser des applications Web hors ligne grâce à leur navigateur, alors le système d’exploitation sous-jacent devient moins important et la main mise de Microsoft sur l’environnement de bureau est affaiblie.

Se battre sur deux fronts

Le résultat de toutes ces initiatives discrètes et distinctes entreprisent par Google pour soutenir l’open source est que Microsoft ne se retrouve pas devant un seul concurrent sérieux mais devant deux qui fonctionnent en collaboration étroite.

"Je pense que cela met le pression sur Microsoft, ils s’y attendaient certes, mais pas aussi rapidement et pas aussi violemment" dit Eric Raymond, auteur d’une analyse des logiciels libres qui fait école "La Cathédrale et le Bazar".

"Ils se disaient sûrement qu’ils avaient le temps pour se préparer avant que Linux n’amène son environnement à maturité, un processus qui ne pouvait qu’être long et douloureux." dit-il. "Et bien ils n’ont pas eu ce luxe, leur main-mise est maintenant attaquée de deux côtés et Google restera une menace suffisamment sérieuse même si l’environnement Linux devait se planter."

De plus, les choses risquent de se corser encore plus à mesure que d’autres entreprises réalisent qu’une manière d’affaiblir Microsoft est de renforcer l’open source. C’est l’un des principaux axes de la stratégie d’IBM depuis presque une décennie, depuis qu’ils ont abandonné leur propre serveur Web et adopté le logiciel libre Apache en 1998.

Depuis ils ont adapté GNU/Linux pour tout leur hardware et fait don de plus de 40 millions de dollars de leur code pour lancer le projet Eclispe pour concurrencer Visual Studio de Microsoft. Plus récemment, l’autre grand rival de Microsoft sur la toile, Yahoo! Inc. s’est joint au club des défenseurs de l’open source en ouvrant les API de ses services, en lançant les Open Hack Days aux Etats-Unis, au Royaume Uni et en Inde et en rachetant Zimbra Inc. qui développe des outils open source de messagerie et de collaboration pour la somme annoncée de 350 millions de dollars.

A l’instar de Google, Yahoo a également engagé certains de ses programmeurs open source les plus importants, comme l’expert de MySQL Jeremy Zawodny et Doug Cutting, l’un des chefs de file dans le domaine des technologies des moteurs de recherche. Cutting travaillera à plein temps sur son système open source Hadoop qu’il décrit sur son blog comme étant "un système de fichiers inspiré de celui de Google et un système de calcul distribué inspiré de celui de MapReduce, là encore de Google."

Tout comme Google a réussi son coup en redirigeant la puissance de l’open source contre Microsoft, Yahoo espère réussir la même chose avec Hadoop. Et évidemment la salve tirée par Yahoo offre en bonus la possibilité de prendre Google pour cible.

Notes

[1] Traduction Olivier et GaeliX pour une relecture Daria from Framalang.

[2] NdT: The 451 Group est un laboratoire d’analyse indépendant spécialisé dans les technologies de l’industrie, en particulier ce qui concerne l’innovation informatique.




L’iPhone n’est pas encore sous GPLv3, étonnant non ?

Il fallait être particulièremenr rétif aux nouvelles technologies, genre mon père, pour ne pas avoir été au courant vendredi dernier de la sortie simultanée de l’iPhone (hou, hou, hou) et de la version 3 de la licence GNU GPL (clap, clap, clap).

L’occasion de traduire[1] à la volée[2] le corps de l’intéressant communiqué de la FSF qui concatène judicieusement les deux événements[3].

iPhone - DRM - DefectiveByDesign.org

L’iPhone enferme les utilisateurs, la GPLv3 les libère.

iPhone restricts users, GPLv3 frees them

BOSTON, Massachusetts, USA-Jeudi 28 Juin 2007

Vendredi, 29 juin, tout le monde aux Etats-Unis n’attendra pas dans les files d’attente pour acheter un iPhone à 500$. En fait, des centaines de milliers d’aficionados du numérique autour du globe ne seront pas du tout dans les files, car le 29 juin marque la sortie de la version 3 de la GNU General Public License (GPL). La version 2 de la GPL gouverne la plus grande part des logiciels libres qui est en train de remodeler radicalement l’industrie et de menacer le modèle technologique propriétaire représenté par l’iPhone.

L’auteur de la GPL est le Professeur Richard M. Stallman, président et fondateur de la Fondation pour le Logiciel Libre (Free Software Foundation ou FSF), et créateur du projet GNU. Avec sa première révision de la licence en seize ans, la version 3 de la GPL s’attaque aux plus récentes tentatives pour ôter la liberté du logiciel libre – et notablement, la version 3 attaque la "Tivoization" – et ceci pourrait être un problème pour Apple et son iPhone.

Maintenant, de la Chine à l’Inde, du Venezuela au Brésil, des Tivos aux téléphones cellulaires : le logiciel libre est partout, et il est en train de bâtir lentement un mouvement mondial d’utilisateurs demandant à avoir le contrôle sur leurs ordinateurs et les équipements électroniques qu’ils possèdent.

Tivoization et l’iPhone ?

La "Tivoization" est un terme forgé par la FSF pour décrire des équipements qui sont construits avec du logiciel libre, mais qui utilisent des mesures techniques qui empêchent l’utilisateur de faire des modifications au logiciel – une liberté fondamentale des utilisateurs du logiciel libre – et une attaque sur le logiciel libre que la GPLv3 pourra arrêter.

L’iPhone laisse les gens perplexes : contient-il du logiciel sous licence GPL ? Quel impact la GPLv3 aura sur les perspectives à long terme pour des équipements comme l’iPhone qui sont construits pour frustrer leurs propriétaires ?

Peter Brown, directeur exécutif de la FSF a dit, "Demain, Steve Jobs et Apple sortent un produit criblé de logiciel propriétaire et de restrictions numériques : criblé / invalide, parce qu’un équipement qui n’est pas sous le contrôle de son propriétaire, fonctionne contre les intérêts de son propriétaire. Nous savons qu’ Apple a bâti son système d’exploitation, OS X, et son navigateur internet Safari, en utilisant des travaux couverts par la GPL – il serait intéressant de voir dans quelle mesure l’iPhone utilise du logiciel sous GPL.

La version 3 de la GNU GPL sera publiée à 12:00 pm (EDT) – six heures avant la sortie de l’iPhone – mettant un terme à dix-huit mois de discussions et de commentaires publics, en révision de la plus populaire des licences du logiciel libre.

Notes

[1] Pour la traduction Framalang (alias ici Vincent et Daria) a encore frappé.

[2] Traduction non officielle.

[3] L’illustration est issue du site DefectiveByDesign.org.




Microsoft ou les vertus de la monoculture

Zach Klein - CC byPensez-vous par exemple que la pléthore de distributions GNU/Linux soit une qualité de l’OS et le témoignage de la vivacité de sa communauté ou bien au contraire qu’on aboutit à une situation confuse où trop de choix tue le choix ?

Sur cette thématique assez classique de la pertinence de la pluralité du choix, voici la traduction d’un article (un peu technique mais fort intéressant) d’un développeur américain James Turner sur le site d’O’Reilly.

Extrait :

Alors, quels sont les avantages d’une monoculture et pourquoi Microsoft gagne-t-il si souvent quand les gens doivent choisir une plateforme ? C’est en grande partie à cause de ce que la communauté open source voit comme une force mais que ceux qui essaient de faire leur boulot dans le monde réel voient comme une faiblesse. Nous célébrons la diversité de choix disponibles pour résoudre un problème et nous appelons cela la liberté. Les directeurs informatiques et les patrons de la branche informatique (IT managers et CIOs en anglais) y voient du chaos, de la confusion et des doutes.

Pour ceux qui comme nous sont attachés à la liberté, avoir le choix est bien entendu une valeur fondamentale. Mais il peut en aller autrement dans le monde pragmatique de l’informatique professionnelle où c’est souvent l’efficacité qui est privilégié. Et alors dans ce contexte Microsoft conserve de sérieux atouts avec ses offres monoculturelles sécures et rassurantes[1].

Les vertus de la monoculture

The Virtues of Monoculture

James Turner – 24 avril 2007 – Opinion
(Traduction Framalang : Don Rico et Yostral)

Je ne dis certainement rien de nouveau ici, mais j’ai pensé que je pourrai partager quelques réflexions sur les raisons qui poussent les gens à suivre la voie Microsoft. J’ai récemment fait quelque chose dans mon travail de tous les jours auquel je pensais depuis longtemps, mais pour lequel je n’ai jamais vraiment pris la peine d’aller jusqu’au bout, je me suis inscrit pour participer à un projet Microsoft-centrique et pour apprendre le .NET.

J’avais fait des tentatives avortées par le passé pour apprendre à coder dans l’Univers Microsoft. J’avais fait un essai à la sale époque des COM, mais le nombre de numéros qu’on me demandait d’exécuter me demandait trop d’effort par rapport à ce que j’étais alors prêt à consentir. Depuis j’ai gardé ce mauvais goût au fond de la bouche et j’ai refusé d’ajouter une seul compétence Microsoft à mon répertoire, même si cela représentait parfois un vide dans mon curriculum vitæ.

J’ai souvent travaillé dans des environnements où il y avait ce Monsieur Microsoft, l’évangéliste qui vous répète sans cesse à quel point ça aurait été plus facile en .NET. Je les ai classés dans la catégorie adorateurs de Gates buveurs de Tang*. Mais, à la fin de la journée, je me suis dit que si je devais les critiquer je devais vraiment comprendre leur monde. Connais ton ennemi et tout ça.

J’ai passé la semaine dernière à apprendre dans l’ordre C#, .NET et VSTO (c’est Visual Studio Toolkit for Office, si les abréviations de Microsoft ne sont pas votre tasse de thé). J’ai utilisé le livre Learning C# de chez O’Reilly et j’ai fait quelque chose qui m’arrive rarement : je m’y suis mis de manière très méthodique (du moins pour la première moitié).

Et devinez quoi? Microsoft possède dans ses mains une suite de développement plutôt bonne. Pour être honnête, C# est vraiment ce que je ferai si je pouvais complètement ré-écrire Java sans me soucier de la compatibilité descendante. Il y a quelques fonctionnalités vraiment sympas, comme les mots-clés virtual, override, et new qui vous permettent de spécifier ce qu’il se passe lorsque vous transtypez une classe dans sa classe de base et que vous appelez une méthode qui est définie dans les deux.

Visual Studio est un outil habile qui vous permet vraiment de créer des applications (et avec VSTO des ajouts pour Office) en deux temps trois mouvements. ADO.NET n’est pas pire que JDBC et s’intègre de manière transparente dans Visual Studio. J’ai été capable, arrivé à la fin de la semaine, de développer des applications autonomes et des ajouts pour Office qui étaient capable de dialoguer avec les bases de données en n’ayant écrit que peu de code. D’après ce que j’en ai vu, ASP.NET réalise la même chose pour les applications web MVC (NdT : Model View Controller).

Alors, quels sont les avantages d’une monoculture et pourquoi Microsoft gagne-t-il si souvent quand les gens doivent choisir une plateforme ? C’est en grande partie à cause de ce que la communauté open source voit comme une force mais que ceux qui essaient de faire leur boulot dans le monde réel voient comme une faiblesse. Nous célébrons la diversité de choix disponibles pour résoudre un problème et nous appelons cela la liberté. Les directeurs informatiques et les patrons de la branche informatique (IT managers et CIOs en anglais) y voient du chaos, de la confusion et des doutes.

Est-ce que je devrais utiliser iBatis ou Hibernate? XFire ou AXIS? Perl, PHP ou Ruby? Debian, Fedora, Ubuntu ou Suse? Si vous prenez la mauvaise décision vous pouvez perdre énormément de temps, comme nous l’avons découvert sur un projet récent où nous avons gâché une semaine à essayer de faire marcher AXIS2 pour un projet de service web pour finalement nous rendre compte que XFire était ce qu’il nous fallait.

Pour Monsieur Microsoft cette confusion n’existe pas. Vous utilisez ADO.NET, ASP.NET, C# et Windows. Ils fonctionnent tous, ils sont tous bien documentés du point de vue des besoins des développeurs, sans un seul regarde le code source désobligeant. A chaque fois que je pensais que j’allais être bloqué il y avait une douzaine d’articles expliquant comment faire exactement ce que je voulais faire, avec un exemple de code qui était à jour avec les versions du logiciel que j’utilisais et qui répondait vraiment au problème que je cherchais à résoudre.

Microsoft apporte le confort de ne pas avoir à choisir. Avoir le choix n’est pas toujours bon et la communauté open source offre parfois bien trop de manières différentes de plumer un canard, des choix qui sont pris plus par fierté, ego ou entêtement que par une authentique nécessité d’avoir deux alternatives différentes. Je ne montrerai personne du doigt, tout le monde connaît des exemples.

En fait, à moins que vous ne pensiez que je me sois tourné vers le Côté Obscur, le GROS problème avec une monoculture, c’est que vous vendez plus ou moins votre âme pour la stabilité d’un ensemble de choix défriché pour vous. En empruntant le chemin .NET, en gros, vous vous y perdez à tout jamais, et ce malgré Mono. Vous travaillerez toujours sur une plateforme Windows. Vous avez le joli anneau en or, mais Sauron tire les ficelles et vous fait danser. Pour beaucoup d’entreprises, celles qui n’ont pas besoin de se soucier du déploiement dans un environnement hétérogène, c’est un pacte qu’elles sont plus que prêtes à conclure.

Voici ce que je retiens de toute cette réflexion : en quelque sorte, nous devons commencer à faire le tri. La massue de 350kg pour faire entrer certaines idées dans les têtes devrait être mise à disposition pour marteler les têtes de ceux qui fourchent (NdT : qui créent un fork une déviation indépendante d’un projet) pour la seule et unique raison qu’ils ne sont pas en accord avec la licence, ou de ceux qui prennent les décisions. Quand on entend parler de deux (ou plus) projets qui répondent à la même problématique, on devrait se demander « Pourquoi ne mettent-ils pas en commun leurs efforts pour fournir une très bonne solution? » plutôt que de célébrer la diversité uniquement pour l’amour de la diversité.

A-ton vraiment besoin de Ruby on Rails ET de Groovy on Grails? Quand ils ont annoncé le poisson d’avril de Python on Planes j’ai mis quelques secondes pour réaliser que c’était un canular, parce que c’est exactement le genre d’effort faire quelque chose pour l’amour de le faire qui fractionne la communauté des logiciels open source. Il n’y a aucun moyen d’empêcher les gens de commencer des projets en double, et nous ne le voudrions pas, mais bon sang, doit-on l’encourager activement ?

On passe beaucoup de temps à se plaindre des moyens démoniaques qu’emploie Microsoft pour s’imposer partout. En faisant cela, nous nous lavons automatiquement de toute responsabilité que nous pourrions nous-même porter pour leur succès ou nos échecs. Le fait est qu’il existe d’excellentes raisons pratiques qui poussent les gens dans les bras de la boîte à outil de Redmond et nous devons accepter ceci comme un fait et en tirer des leçons plutôt que d’agiter nos poings en blamant l’obscurantisme. Car nous avons trouvé notre ennemi et c’est nous, pas Microsoft, du moins pas tout le temps…

Notes

[1] Crédit photo : Zach Klein (Creative Commons By)




Microsoft est mort (et le logiciel libre ne se sent pas très bien ?)

March of the Baby Turtles - Clearly Ambiguous - CC-BY

Encore une traduction (merci Olivier). Celle d’un récent article de Paul Graham au titre choc : Microsoft is dead.

Il nous a semblé intéressant d’abord parce que Paul Graham n’est pas n’importe qui dans le monde de l’informatique. Mais ensuite parce que son point de vue d’américain plongé dans les startups à la sauce web 2.0 tranche singulièrement avec celui d’un européen plongé dans le logiciel libre, comme… moi par exemple ! (sauf à s’appeler Loïc Le Meur ou Tariq Krim mais là n’est pas la question).

Graham propose quatre grandes causes à la mort du géant : Google, Ajax et le Javascript, le haut-débit et Apple. Et d’expliquer en gros que comme les applications de bureau vont toutes finir par migrer sur le web alors on n’aura plus trop besoin de se soucier de son ordinateur du moment qu’il nous fait accéder avec confort à internet. L’exemple emblématique et annonciateur serait alors de consulter ses messages sur Gmail depuis son joli laptop Apple en wi-fi grande vitesse (ce que de nombreux geeks font déjà, j’en ai vu, j’ai les noms !).

Ce qui est notable ici c’est que non seulement le logiciel libre n’est pas cité (ou alors vraiment à la marge), alors que nous sommes (étions ?) nombreux à penser depuis longtemps qu’il est l’un des premiers pour ne pas dire le premier facteur de la chute annoncée du colosse, mais qu’en plus les arguments avancés par Graham font que cela peut également changer la donne pour le logiciel libre lui-même.

En effet force est de constater qu’il est très peu présent dans ce monde encore balbutiant mais en pleine effervescence des applications de bureau taggés web 2.0 accessibles depuis internet. Mais alors, en admettant que la thèse de Graham soit valide, le logiciel libre serait-il lui aussi menacé par cette évolution ? Parce que si il est vrai que l’on arrive à faire des OpenOffice.org en lieu et place de MS Office (et des… GNU/Linux en lieu et place de Windows !), créer un "Gmail libre" me semble hors de portée de la communauté. Poussons le raisonnement jusqu’au bout pour toucher les rives de la science-fiction, entouré de technologies web 2.0 propriétaires finira-t-il par ne rester qu’un Firefox comme logiciel libre phare de nos usages ?

Nous n’en sommes pas encore là. Et à affirmer effectivement que Microsoft soit déjà mort, le macstartupien Paul Graham n’est peut-être pas l’inspecteur idéal pour en désigner seul les coupables[1].

Microsoft is dead - Screenshot

Microsoft is dead

Paul Graham – Avril 2007

Il y a quelques jours j’ai soudainement pris conscience que Microsoft était mort. Je parlais avec un jeune créateur d’une startup de la différence entre Google et Yahoo. Je disais que Yahoo a été empêtré dès sa naissance dans sa peur de Microsoft. C’est la raison pour laquelle ils se sont définis comme une compagnie de média et non une compagnie de technologie. Alors j’ai regardé son expression et j’ai vu qu’il n’avait pas compris. C’est comme si je lui avais dit à quel point les filles aimaient Barry Manilow[2] au milieu des années 80. Barry qui ?

Microsoft ? Il n’a rien dit, mais je pouvais lire que ça lui paraissait invraisemblable que quelqu’un soit encore effrayé par eux.

Microsoft projette son ombre sur le monde du logiciel depuis près de 20 ans, depuis la fin des années 80. Je me souviens qu’avant eux c’était IBM. En pratique j’ai ignoré cette ombre. Je n’ai jamais utilisé de logiciels Microsoft, donc cela ne me touchait qu’indirectement, par exemple dans les spams que je recevais. Et parce que je n’y faisais pas attention je n’ai pas remarqué que cette ombre avait disparue.

Mais elle est partie maintenant, je peux le sentir. Plus personne n’a peur de Microsoft désormais. Ils font toujours beaucoup d’argent, tout comme IBM d’ailleurs. Mais ils ne sont pas dangereux.

Quand est ce que Microsoft est mort et de quoi ? Je sais qu’ils semblaient dangereux jusqu’en 2001 parce que j’avais écrit un article alors sur le fait qu’ils étaient moins dangereux qu’il n’y semblait. Je dirais qu’ils sont mort en 2005. Je sais que lorsque nous avons lancé Y Combinator[3] nous ne nous sommes pas inquiétés de la concurrence de Microsoft quand nous avons fondé les startups. En fait, nous ne les avons même pas invités aux journées de présentation que nous avons organisées pour présenter les startups aux investisseurs. Nous avons invité Yahoo et Google et d’autres entreprises d’internet, mais nous n’avons jamais pris la peine d’inviter Microsoft, pas plus qu’ils n’ont pris la peine de nous envoyer un email. Ils font partie d’un monde différent.

Qu’est ce qui les a tués ? Quatre choses je pense, qui se sont produites en même temps au milieu des années 2000.

La raison la plus évidente est Google. Il ne peut y avoir qu’un seul géant et c’est clairement eux. Google est de loin l’entreprise la plus dangereuse, à la fois dans le bon et le mauvais sens du terme. Microsoft peut au mieux boiter pour essayer de les suivre.

Quand est-ce que Google a pris la tête? Certains diront que c’était en août 2004 lors de leur IPO[4] mais ils ne menaient pas encore la danse à cette époque. Je dirais qu’ils ont pris les commandes en 2005. Gmail leur a donné un avantage décisif. Gmail montrait qu’ils pouvaient faire plus que de la recherche.

Gmail montrait aussi l’étendue des possibilités de ce que vous pouviez réaliser avec un logiciel web si vous tiriez partie de ce qui sera plus tard appelé "Ajax". Et c’est là la deuxième cause de la mort de Microsoft : tout un chacun peut voir que l’informatique de bureau touche à sa fin. Il semble maintenant inévitable que les applications trouveront leur place sur le web, pas les emails uniquement, mais tout, jusqu’à Photoshop. Même Microsoft s’en rend compte maintenant.

Ironiquement, Microsoft sans le vouloir a aidé à la création d’Ajax. Le x de Ajax vient d’objet XMLHttpRequest, qui permet au navigateur de communiquer avec le serveur en fond de tâche tout en affichant une page. (Au départ la seule manière de communiquer avec le serveur était de lui demander une nouvelle page.) Le XMLHttpRequest a été créé par Microsoft à la fin des années 90 parce qu’ils en avaient besoin pour Outlook. Ce qu’ils n’ont pas réalisé alors est que ça s’avérerait utile à beaucoup de gens, en fait tous ceux qui voudraient faire tourner des applications web comme des applications de bureau.

L’autre élément crucial de Ajax est le Javascript, le langage de programmation qui tourne dans le navigateur. Microsoft a vu le danger que représentait le Javascript et a essayé de le maintenir caduque aussi longtemps qu’ils le pouvaient[5]. Mais finalement le monde de l’open source l’a emporté en créant des librairies Javascript qui ont poussé sur les défauts d’Explorer comme un arbre sur du fil barbelé.

La troisième cause de la mort de Microsoft a été l’accès à Internet à haut-débit. N’importe qui le désirant peut avoir une connexion rapide à Internet et plus le tuyau est large moins vous avez besoin du bureau.

Le dernier clou refermant le cercueil a été planté, parmis toutes les raisons, par Apple. Grâce à OSX Apple est revenu d’entre les morts, fait très rare dans le monde de la technologie[6]. Leur victoire est si complète que je suis aujourd’hui surpris quand je tombe sur un PC fonctionnant sous Windows. Presque toutes les personnes que nous finançons chez Y Combinator utilise des portables Apple. Le phénomène était le même dans le public d’une école de startup. Tous les ordinateurs des gens tournent sous Mac ou Linux maintenant. Windows est pour les grand-mères, comme c’était le cas pour les Mac dans les années 90. Non seulement le bureau ne compte plus mais en plus les gens se fichent des ordinateurs avec des logiciels Microsoft.

Je suis heureux que Microsoft soit mort. Ils étaient comme Neron ou Commode[7], diaboliques comme seul l’héritage du pouvoir peut vous le faire devenir. Parce que souvenez vous, le monopole de Microsoft n’a pas commencé avec Microsoft. Ils en ont hérité d’IBM. Le marché du logiciel a été contrôlé par un monopole du milieu des années 50 jusqu’à 2005. Ce qui représente pratiquement toute son existence. L’une des raisons de l’euphorie qui entour le "Web 2.0" est le sentiment, conscient ou pas, que cette ère de monopole pourrait toucher à sa fin.

Evidemment, en tant que hacker, je ne peux m’empêcher de penser à des solutions pour réparer les choses cassées. Y’aurait-il un moyen pour que Microsoft fasse un come-back ? En principe, oui. Pour comprendre comment, pensez à deux choses : (a) La somme d’argent dont Microsoft dispose et (b) Larry et Sergey[8] faisant le tour des moteurs de recherche pour vendre leur idée pour Google pour un million de dollars et se faisant rejeter par tout le monde.

La chose la plus surprenante est que les hackers ingénieux, dangereusement ingénieux, peuvent être achetés pour pas grand chose à l’échelle des entreprises riches comme Microsoft. S’il voulait redevenir un compétiteur, voilà ce qu’il devrait faire :

  1. Racheter toutes les bonnes startups du "Web 2.0". Ils pourraient presque les acheter toutes pour moins qu’ils n’ont dépensé pour Facebook[9].
  2. Les rassembler dans un immeuble dans la Silicon Valley protégé par une enceinte de plomb pour les prémunir de tout contact avec Redmond.

Je me sens à l’aise en proposant cela, parce qu’ils ne le feront jamais. Le plus grand point faible de Microsoft est qu’ils ne réalisent toujours pas à quel point ils craignent. Ils pensent toujours qu’ils peuvent écrire des logiciels en interne. Et ils le peuvent encore, selon les lois du monde de l’informatique de bureau. Mais ce monde a pris fin il y a quelques années.

Je connais déjà les réactions que recevra cet article. La moitié des lecteurs diront que Microsoft est toujours une entreprise qui dégage des bénéfices énormes et que je devrais faire plus attention quand je tire mes conclusions en me basant sur ce que quelques personnes pensent dans notre petite bulle isolée du "Web 2.0". L’autre moitié, les plus jeunes, se plaindront que cette nouvelle date.

Notes

[1] L’illustration est une photographie de Clearly Ambiguous intitulée March of the Baby Turtles issue de Flickr et sous licence Creative Commons BY.

[2] NdT : Barry Manilow est un compositeur, acteur, producteur et scénariste américain né le 17 juin 1943.

[3] NdT : Y Combinator est une société créée par Paul Graham permettant de fournir un premier financement aux startups.

[4] NdT : IPO pour Initial Public Offering.

[5] Vous n’avez pas besoin de faire un gros effort pour rendre un logiciel incompatible. Tout ce que vous avez à faire est de ne pas fournir trop d’efforts pour corriger les bugs, que vous produisez en quantité généreuse si vous êtes une grande entreprise. La situation est semblable à l’écriture de fausses théories littéraires. La plupart ne tentent pas de les rendre obscures, ils ne font simplement pas l’effort d’être clair. Ça ne serait pas payant.

[6] En partie parce que Steve Jobs s’est fait sortir par John Sculley d’une manière rarement vue au sein du monde de la technologie. Si les dirigeants d’Apple n’avaient pas commis cette bourde ils n’auraient pas eu à rebondir.

[7] NdT : Commode, autre empereur romain considéré comme cruel et arbitraire.

[8] NdT : Larry Page et Sergey Brin sont les fondateurs de Google.

[9] NdT : Facebook est un site web de networking destiné à rassembler les lycéens et les étudiants.




DRM : Du lard ou du cochon Mister Steve Jobs ?

iPod - Parody

La récente posture anti-DRM[1] de Steve Jobs a agité toute la blogosphère.

Il faut dire qu’il y a de quoi être méfiant quand on sait qu’il en est le principal bénéficiaire ![2]

Dont acte nous dit ici le site Defective by Design (littéralement « Défectueux à dessein », initiative anti-DRM de la Free Software Foundation) dans une lettre ouverte au patron d’Apple qu’elle nous invite à signer avant le 1er avril.

Une traduction de notre groupe de travail Framalang (specials thanx to Olivier and GaeliX).

Lettre ouverte à Steve Jobs

Cher Steve Jobs,

Nous voudrions vous remercier pour votre déclaration publique à propos des Digital Restrictions Management (DRM), et votre engagement pour l’abandon des DRM dans iTunes si les quatre majors de l’industrie du disque – EMI, Warner, Universal et Sony, vous laissent le faire.

Comme vous le savez, la campagne anti-DRM de la Free Software Foundation, DefectiveByDesign.org, a spécialement pris pour cible Apple depuis son lancement en Mai 2006. En tant qu’activistes contre les DRM nous avons apporté notre soutien aux manifestations importantes devant les magasins Apple aux États-Unis et au Royaume-Uni, car étant le plus important pourvoyeur de musique cadenassée, Apple possède une grande part de responsabilité dans la situation dans laquelle se trouve les consommateurs actuellement.

Mais Apple subit la pression, non seulement des activistes anti-DRM et du boycott des DRM par les consommateurs, mais aussi des défenseurs des droits des consommateurs en Europe qui ont déclaré les DRM d’iTunes (FairPlay) illégaux. En Norvège les régulateurs ont donné jusqu’au 1er octobre 2007 à iTunes pour s’ouvrir à défaut de quoi le service devra fermer sous peine d’amendes journalières. Des démarches similaires sont entreprises par les régulateurs dans toute l’Europe.

Pour beaucoup d’observateurs l’engagement pris dans votre blog ressemble à une manière de faire baisser le pression exercée par ces régulateurs sur Apple et coupe l’herbe sous le pied de l’industrie qui demande la possibilité pour d’autres distributeurs d’utiliser FairPlay.

Cela fait trois semaines maintenant que vous avez publié votre engagement pour arrêter les DRM et il y a eu beaucoup de réponses de la part de commentateurs qui ont mis en avant les actions que vous pouvez entreprendre pour appuyer vos dires. Le fait que vous n’ayez pris aucune mesure nous amène à nous demander : quelle est l’authenticité de votre engagement ?

Nous avons identifié trois manières pour vous d’afficher votre sincérité à propos des DRM. Prendre des mesures sur l’un de ces fronts serait une manière forte de montrer que vous êtes sérieux.

1) Abandonnez les DRM sur iTunes pour les artistes indépendants

De nombreux artistes et labels indépendants distribuent leur musique au travers d’iTunes et beaucoup souhaitent le faire sans DRM, mais vous ne les laissez pas. Vous pouvez montrer votre bonne foi immédiatement en abandonnant les DRM pour ces artistes et labels.

Cela montrera clairement quels artistes sont vraiment attachés à l’un des quatre grands labels, permettant à vos clients d’éviter ces labels et le fardeau des DRM. Les artistes indépendants, qui respectent le désir de leurs fans d’être libre des restrictions imposées par les DRM, recevront plus de soutien.

Vous pouvez montrer l’exemple moral en étant la première "major" à abandonner les DRM, en libérant les artistes indépendants. Vous avez le pouvoir de faire cela.

2) Abandonnez les DRM sur iTunes pour les films et les vidéos de Disney

Dans l’article sur votre blog vous dites, "L’ alternative est d’abolir les DRM complètement. Imaginez un monde où tous les magasins en ligne vendraient de la musique libre de DRM, encodée dans un format sous license libre" C’est une image forte, une image que nous et le mouvement du logiciel libre partageons avec vous. Mais pourquoi votre vision se limite-t-elle au monde de la musique sans DRM. Vous ne faites pas allusion une seule fois aux films ou vidéos.

Nous comprenons qu’Apple est occupé à signer des contrats avec les studios de cinéma et les réseaux de télévision pour autoriser Apple à vendre des vidéos et des films aux utilisateurs d’iPod. Ces vidéos sont vendues avec des DRM. Les arguments que vous avancez dans votre blog s’appliquent aussi bien aux films qu’à la musique.

En 2006 vous avez vendu Pixar à Disney et êtes ainsi devenu l’actionnaire le plus important de Disney et avez rejoint le conseil d’administration. Disney a été le premier à donner son accord pour la distribution de ses films au travers d’iTunes. Disney est l’un des principaux distributeurs de film mais pas l’une des principales maisons d’édition.

Vous pouvez donner l’exemple dans le domaine de la vidéo et des films. Disney peut être la première "major" à abandonner les DRM. Vous avez le pouvoir de réaliser ceci.

3) Prenez un engagement public contre les DRM et les lois avalisant les DRM en finançant une campagne contre les interdictions du Digital Millenium Copyrith Act (DMCA[3]).

Dans votre blog vous dites que nous pourrions "… abolir complètement les DRM" et qu’Apple "s’y joindrai en un clin d’oeil". Ces mots sont très proches d’un appel à l’élimination des DRM. Nous vous encourageons à faire une telle déclaration explicitement.

C’est une action importante à cause des menaces législatives auxquelles nous faisons face. Le Senateur Feinstein (Démocrate, Californie), dans sa session au congrès a à nouveau présenté sa loi "Platform Equality and Remedies for Right Holders in Music Act (PERFORM Act) (loi sur l’égalité des plateformes et remèdes pour les ayant droits dans le monde de la musique). Cette loi imposerait à tous les diffuseurs sur Internet qui proposent des MP3 en streaming (ou d’autres formats libres de DRM) d’y ajouter un DRM. Ceci inclurait les stations de radio actuellement disponibles par iTunes, qui dépendent des MP3 en streaming.

L’impact des DRM et du DMCA aura des effets effrayants sur notre liberté d’expression. Dans un monde où les émissions de radio, les émissions de télévision, les informations et la couverture du monde politique seraient chargées de DRM, puisque les télévisions numériques, les radios numériques et la diffusion par Internet seraient mandatées pour utiliser des DRM, nous perdrions notre droit de faire des commentaires en utilisant les documents d’origine. La liberté d’expression par la parodie et les citations aura disparu.

En tant que personne ayant imposé les DRM à des millions de personnes et ayant dégagé des millions de dollars de bénéfices par ce moyen, il est temps pour vous de vous élever contre les DRM, qui sont immoraux et qui menacent nos libertés.

Vous pouvez donner l’exemple en demandant l’élimination des DRM en finançant une campagne pour rejeter les interdictions du DMCA sur les appareils qui contournent les DRM. Vous avez le pouvoir concret de réaliser cela.

Même si nous accueillons favorablement votre engagement d’abandonner les DRM, il n’a pas été suivi d’action pour le moment. Certains changements dont vous parlez nécessiteront la coopération d’autres acteurs de l’industrie des médias, mais les trois points que nous avons mis en avant n’en font pas partie. Vous avez les mains libres pour autoriser les artistes indépendants à vendre leur musique sur iTunes sans DRM, pour retirer les DRM des films et vidéos de Disney et pour financer une campagne pour rejeter les interdictions du DMCA sur les appareils qui contournent les DRM. Nous, les signataires, faisons appel à vous pour prendre des mesures maintenant.

Sincèrement votre,

DefectiveByDesign.org - No DRM

Si vous adhérez au contenu de cette lettre n’oubliez pas de la signer avant son envoi le 1er avril à ce gros poisson qu’est Steve Jobs.

Notes

[1] DRM pour Digital Rights Management (Mesures Techniques de Protection, MTP, ou encore Gestion Numérique des Droits, GDN, en français).

[2] On pourra aussi lire la réaction du site francophone StopDRM! aux propos de Steve Jobs.

[3] DCMA dont le pendant en loi française est la DADVSI.




Montrez-nous le code !

Puisque M. Steve Ballmer persiste à diffuser le FUD l’idée que Linux exploite la propriété intellectuelle de Microsoft, le site Show Us The Code vient de voir le jour avec ce simple objectif : demander à Microsoft de nous montrer le code en question, histoire que nous soyons fixés sur la véracité du propos.

Une traduction de GaeliX (pour Framalang).[1]

running a trace - losiek - CC-BY - flickr

Lettre ouverte à Steven Ballmer

Les propos que vous avez tenus, encore et encore, sur le fait que Linux viole la propriété intellectuelle de Windows, ont beaucoup retenu l’attention de la communauté Linux. Et ce n’est pas seulement ça, puisqu’il est rapporté que Microsoft a convaincu des entreprises de payer pour une licence Linux que vous ne pouvez fournir.

Par conséquent, ce site va servir de réponse à cette accusation, et servir de support à une requête. Une requête toute simple, puisque vous, Microsoft, assurez être sûrs de votre bon droit. Montrez-nous le Code.

Si les développeurs Linux sont mis au courant de l’existence de ce code, alors ce code peut être oublié et Linux peut re-écrire les parties impactées de son noyau ou de son système d’exploitation. C’est une requête assez simple et d’une banale courtoisie. Pourquoi faire autant de vagues avec des menaces de procès, menaces qui coûteront au tribunal autant à Microsoft qu’aux défendeurs ? Cela manque de logique, surtout quand on sait que de nombreux développeurs de par le monde se feraient un plaisir d’aider Microsoft à résoudre ce problème. Ne devez-vous pas, vis-à-vis de vos actionnaires, travailler avec d’autres pour leur garantir que leur propriété intellectuelle n’est pas violée ?

En outre, nous avons l’impression que vous souhaitez travailler avec la communauté Open-Source. C’est à cela que sert le Port 25[2], n’est-ce pas ? C’est de cela qu’il s’agit dans l’accord avec Novell, n’est-ce pas ? C’est votre chance. Si vous avez raison, vous allez faire taire des milliers et des milliers de défenseurs de l’Open-Source et inciter vos concurrents à retourner ciel et terre pour ne pas toucher à votre propriété intellectuelle.

Les membres de la communauté Linux ne veulent pas de votre code. Nous ne recherchons pas les procès. Nous ne voulons pas de code non-libre. Et plus, pour votre consternation, nous ne voulons pas de code spécifique à Microsoft.

C’est cela que nous demandons. Nous demandons l’appui de la communauté Linux. Nous en appelons à Richard Stallman, Linus Torvalds, Larry Page, Sergey Brin, Dr. Eric Schmidt, Mark Shuttleworth, Kevin Carmony, and Matthew Szulik, ainsi qu’à tous les développeurs de chaque distribution Linux et à toutes les entreprises qui se sentent menacées par vos procès inexistants :

Faire le maximum de publicité pour demander à Microsoft de montrer le code Linux qui viole sa propreté intellectuelle avant le 1er Mai 2007.

Combien de sociétés, combien d’organismes, combien de membres de la communauté, vont dénoncer votre bluff, Steven ?

Nous ne sommes pas les premiers (1, 2) à vous demander cela, mais nous voulons passer au cran supérieur. Si vous ou Microsoft ne pouvez pas répondre avant la date mentionnée, d’aucuns comprendront que vos menaces et allégations étaient sans fondement et diffamatoires. Et toute personne attentive aux marchés financiers devra en faire de même.

Bonne chasse au code. Le moteur de recherche de brevet Google peut peut-être vous dépanner.

Notes

[1] L’illustration est un détail d’une photographie de losiek intitulée running a trace issue de Flickr et sous licence Creative Commons BY.

[2] NDT : le port utilisé pour l’envoi des mails.




Windows Vista : jamais deux sans trois !

Windows Vista EULA

Il semblerait que le contrat de licence (EULA) du prochain système d’exploitation de Microsoft Windows Vista n’autorise qu’une seule réinstallation de l’OS sur un autre ordinateur. Autrement dit votre OS ne durera que le temps que dureront votre premier puis votre second ordinateur (j’imagine que pour ce faire ils ont mis un big DRM inside !).

Et puis on se retrouve avec des interdictions levées au compte-goutte en fonction des versions de l’OS. Regardez un peu ce que cela donne pour la version de base (Home Basic), c’est impressionnant !

* Can’t copy ISO to your hard drive
* Can’t install to a network server
* You may share files, printers, etc with a maximum of 5 network devices
* You MAY NOT use Remote Desktop, only Remote Assistance
* You MAY NOT use in Virtual PC | Virtual Server |VMWare

On peut faire confiance à Microsoft pour sortir l’artillerie lourde niveau marketing lors de l’inauguration officielle de Vista, mais avec Linux qui se démocratise chaque jour un peu plus (on y travaille) et les évolutions du web (cf Google Office & co), est-ce être naïf que de penser que l’édifice va finir par lentement mais sûrement se fissurer pour un jour définitivement céder ?

PS pour les courageux, les anglophones, et les juristes : voici le contrat de licence en pfd.




Comment partager facilement sur internet un document OpenOffice.org avec Google

Google Spreadsheets Screenshot

Google sort aujourd’hui Google Docs qui vient accompagner le préexistant Google Spreadsheets (avec plein d’Ajax et Javascript inside). Docs propose un service de traitement de texte en ligne (issu du rachat récent de Writely) et Spreadsheets est un tableur en ligne. J’ai essayé, ça marche plutôt bien, en fait c’est d’ores et déjà pas mal impressionnant !

On voit se dessiner doucement mais sûrement derrière tout cela le fameux projet Google Office, qui alimente déjà beaucoup le buzz actuelle de la blogosphère, et qui pourrait effectivement à terme concurrencer les suites bureautiques classiques de notre desktop (qu’elles soient libres ou propriétaires).

Mais avant que de parler de concurrence, j’y vois pour le moment une certaine complémentarité. Par exemple si vous souhaitez partager sur le net un document OpenOffice.org voici très simplement comment vous y prendre à ce "petit" détail près qu’il vous faut un compte Google (autrement dit un compte Gmail) pour vous mais aussi vos collaborateurs (enfin m’a-t-il semblé).

Je pars donc du postulat que vous avez un compte Gmail et que vous avez un fichier OpenOffice.org texte (format .odt) ou tableur (format .ods) à partager. Vous vous connectez sur Google Docs & Spreadsheets, vous importez votre document ("normalement" tout se passe bien et vous vous retrouvez avec votre fichier directement lisible et éditable dans votre navigateur). Puis vous choisissez qui pourra lire et/ou écrire sur votre document (en entrant leur adresses Gmail dans les cases appropriées et en les invitant). Vous pouvez également si vous le souhaitez ouvrir à la lecture le document sur tout internet (et dans ce cas Google vous donne l’url public du document). Vous pouvez aussi, et c’est potentiellement très intéressant pour du travail partagé, chatter en direct avec les collaborateurs au moment même où vous éditez collectivement le document (comme avec Gtalk). A la fin tout le monde est content et vous pouvez importer le document sur votre ordinateur toujours au format OpenOffice.org (mais aussi PDF par exemple si ça vous chante).

Bon ben voilà, c’est pas encore ça qui va réduire la taille exponentielle que prend la pieuvre Google sur internet mais c’est franchement bien pratique (c’est en fait carrément du groupware qui est ici proposé sans le dire) et c’est aussi franchement bien vu de la part de Google d’avoir dès le départ envisagé ses services avec, outre les formats fermés de la suite MS Office, ceux ouverts d’OpenOffice.org, à savoir ceux issus de l’OpenDocument.