Et pourquoi pas aussi l’Open Money ?

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Temps de lecture 16 min

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Jessica Shannon - CC by-saCela demande analyse et précision au cas par cas mais on ne peut que constater que «  l’état d’esprit du logiciel libre  » est en train de s’infiltrer un peu partout actuellement. Et si le très sérieux journal britannique The Guardian posait récemment la question de la construction d’un monde Open Source il doit bien y avoir une raison.

Dans la sphère anglophone cela se traduit en effet par la multiplication des expressions précédées de l’adjectif «  Open  ». Les idées véhiculées ne sont pas forcément neuves ni originales mais elle retrouvent force et vigueur à l’heure du numérique, en s’inspirant toutes plus ou moins directement de la matrice Open Source.

Ce qui donne, et j’en oublie certainement, Open Hardware, Open Format, Open Data, Open ID, ou encore Open Politics, Open Gouvernance, et puis également Open Content, Open Knowledge, Open Research, Open Education (dont le très prometteur dérivé Open Educational Resources), sans oublier, cela va de soi, le champ culturel avec par exemple ses Open Music et Open Movie.

Et si la lecture de cette longue liste vous a donné soif, nous vous suggérons Open Cola ou, avec modération, Open Beer ;-)

Tout comme Wikipédia dont sont issus l’ensemble des liens précédents, ces jeunes expressions ne sont pas figées. Elles sont en construction et susceptibles de fortement évoluer avec le temps. Mais mises en commun cela donne du sens et témoigne indéniablement que quelque chose d’intéressant est en train de se produire.

L’Histoire nous dira ce qui émergera exactement de cette effervescence. Certains voudraient déjà remplacer un modèle par un autre. Nous n’en sommes pas encore là mais il y a peut-être déjà un acquis  : celui d’introduire une perturbation dans de nombreux systèmes dont nous ne nous étions pas toujours rendus compte qu’ils s’étaient avec le temps souvent refermés sur eux-même en laissant à l’économie et à l’argent une trop large place.

L’argent[1], justement, tiens, parlons-en  ! Dans ce contexte-là pourquoi ne pas en profiter pour le mettre lui aussi sur la sellette  ? Ne peut-on pas quelque part le considérer en l’état comme propriétaire  ? Quelques hurluberlus ont donc osé s’attaquer de front au tabou pour créer une nouvelle expression à ajouter au corpus  : «  l’Open Money  ».

C’est la traduction d’un vieux document que nous vous proposons ci-dessous pour alimenter le débat. Vous jugerez peut-être ce manifeste naïf, utopique et irréalisable, mais GNU/Linux, Wikipédia ou Creative Commons n’étaient-ils pas eux aussi des projets impossibles  ?

Ce n’est qu’un simple exemple mais ne vous arrive-t-il pas de rêver à des alternatives à PayPal, carte de crédit et grosse ponction au passage, lorsque vous souhaitez faire un simple don à un logiciel libre sur Internet  ? Pourquoi est-ce si compliqué, alors même que l’argent se dématérialise  ? Et dois-je vous faire l’affront d’évoquer la crise globale que nous subissons aujourd’hui avec fatalisme, venue d’on ne sait où si ce n’est d’un monde financier devenu légèrement dément  ?

Une folie en vaut bien une autre. Alors pourquoi ne pas tenter ensemble de lentement mais sûrement organiser différemment les échanges, la richesse, l’argent, les banques… en privilégiant cette fois-ci l’humain et le bien commun  ?

Vous trouverez en fin d’article, une première liste de liens connexes autour du sujet (que nous vous invitons à compléter dans les commentaires). Nous vous proposons également en pièce-jointe la page du dossier «  Sortie de crise  : l’enjeu vital de la création de la monnaie  » du journal Vendredi, qui a eu la bonne idée de reprendre ce billet dans son édition du 10 avril 2009.

Le manifeste de la monnaie libre

Open money manifesto

Michael Linton – 2001 – OpenMoney.info
(Traduction Framalang  : Claude, Don Rico et Poupoul2)

Les problèmes dûs à l’argent proviennent entièrement du traitement de la monnaie conventionnelle  : elle est créée par des banques centrales en quantité limitée. Il y a trois choses que nous savons sur cet argent. Nous savons ce qu’il fait  : il va et il vient. Nous savons ce qu’il est  : rare et difficile à obtenir. Et nous savons d’où il vient  : il vient d’eux, pas de nous.

Ces trois caractéristiques, communes à toutes les monnaies nationales, font que l’on doit constamment lutter pour partager un bout du truc qui fait tourner le monde. Cet argent peut aller n’importe où, ce qu’il fait inévitablement, laissant la communauté démunie de son moyen d’échange.

C’est tout simplement dans la nature de la monnaie conventionnelle de créer, par ses allées et venues, les conditions de compétition et de rareté à l’intérieur des communautés ou entre elles.

Ainsi devons-nous courir après l’argent pour survivre, obligés de combattre pour lui, souvent durement. Tentés d’avoir le plus pour le moins, nous cherchons les meilleures affaires en tant qu’individus, entreprises, associations caritatives, gouvernements ou nations.

Telle société, telle génération  : il semble que nous soyons déterminés à tout avoir, quelques soient les conséquences de nos excès et négligences sur les autres, maintenant et dans le futur.

Nous dépendons de cet argent, en n’ayant guère de choix et malgré ses défauts évidents. Certains ont peu ou rien, ne pouvant trouver le nécessaire pour vivre dans ce monde. D’autres en ont une quantité énorme sans, pour autant, que cela soit bénéfique pour eux et pour le monde.

Et tout cela, à propos de quoi  ? Un argent rare qui court dans toutes les directions mais venant d’eux. Leur argent arrive avec de nombreux problèmes.

  • Le problème de la bonne quantité de monnaie en circulation  ? Personne ne parait savoir comment garder un équilibre entre trop et pas assez.
  • Le problème de la distribution  : où est-il  ? qui le possède et qui n’en a pas  ? Est il là où nécessaire  ? Certainement pas.
  • Le problème du coût : coût de la création et de la sécurité, des opérations et de la comptabilité, le coût des intérêts, le coût des tribunaux.

Mais avant tout, et impossible à chiffrer, notre conduite monétaire dirigée a des effets absolument dévastateurs sur notre société et l’environnement mondial.

C’est la mauvaise nouvelle que vous deviez probablement déjà connaître. Maintenant, voici la bonne nouvelle : tous ces problèmes peuvent être résolus avec une monnaie mieux conçue.

L’argent n’est qu’une information, une façon de mesurer ce que nous échangeons, il n’a pas de valeur en lui même. Et nous pouvons en fabriquer nous-même en complément de la monnaie conventionnelle. Ce n’est qu’une question de conception.

Il n’y a aucune raison valable, pour une communauté, de rester sans argent . Être à cours d’argent quand il y a du travail à faire, revient à ne pas avoir assez de centimètres pour construire une maison. Nous avons le matériel, les outils, l’espace, le temps, la technique et l’envie de construire… mais nous n’avons pas de centimètres aujourd’hui  ? Pourquoi être à cours de centimètres  ? pourquoi être à court de monnaie  ?

Les monnaies libres sont virtuelles et personnelles. Chaque communauté, réseau ou entreprise peut créer son propre argent libre. libre comme dans liberté d’expression, radical libre, librement disponible mais pas gratuit comme dans déjeuner gratuit ou tour gratuit. Vous ne l’avez pas pour rien. (NdT  : Le classique problème de traduction en anglais de l’adjectif free)

La monnaie libre doit être méritée pour être respectée. Quand vous l’émettez, vous êtes obligé de l’honorer. Votre monnaie est votre parole  : une question de réputation dans votre communauté.

La monnaie libre est une monnaie plate (NdT  : ou neutre pour flat). Elle ne confère aucun pouvoir à l’un sur l’autre, on ne fait qu’un avec l’autre. Pas de problème d’exploitation, quand vous possédez votre propre monnaie, vous ne pouvez pas être acheté ou vendu facilement. Vous pouvez choisir ce que vous voulez faire pour gagner votre argent. Il n’y a pas de monopole, tous les systèmes co-existent dans le même espace. Plus plate que plate, la monnaie libre est super plate.

La monnaie libre est virtuelle et infinie. Les objets physiques existent dans l’espace et le temps (ce qui les rend limités), en nombre, en masse, en lieu et place. Les objets virtuels n’existent pas et n’ont pas a respecter de telles limites.

Tout est possible dans l’espace de la monnaie virtuelle, sous toutes les formes. Il n’est question que de mettre au point un système de notation pour ceux qui consentiraient à l’utiliser  : l’argent n’est qu’un accord social.

Bien entendu, un système ne marchera en tant que monnaie que s’il est bien conçu. Un système de notation que personne ne veut utiliser n’est pas une monnaie valable. Aussi, bien qu’aucune limite aux monnaies ne puisse être pensée, toutes ne vont pas fonctionner.

C’est nous qui créerons la nouvelle monnaie qui fonctionnera, en quantité suffisante pour satisfaire nos besoins, et dans un contexte ouvert afin que chacun puisse contribuer et être reconnu. La monnaie libre circulera dans les réseaux et communautés qu’elle sert, complètement légale et virtuellement libre, par conception.

Nous pensons que les problèmes venant de la monnaie conventionnelle peuvent être résolus avec un système de monnaie libre.

  • Où la monnaie conventionnelle est rare et chère, la nouvelle monnaie existe en quantité suffisante et est libre.
  • Où la monnaie conventionnelle est créée par des banques centrales, la nouvelle monnaie vient de nous, comme des promesses de rachat  : notre monnaie est notre parole.
  • Où la monnaie conventionnelle se propage avec inconstance, dans et hors de nos communautés, créant des dépendances nuisibles à l’économie, la société et la nature, la nouvelle monnaie complémentaire circule en permanence, encourageant le commerce et les échanges.

Donc, réglons le problème de l’argent et, pour les autres dangers menaçant notre monde, voyons ce qu’il adviendra.

Imaginons simplement…

  • Imaginons avoir l’argent nécessaire pour subvenir à tous nos besoins.
  • Imaginons une société et une économie fonctionnant sans les problèmes monétaires courants de pauvreté, d’exploitation, de sans-abris, de chômage, de peur et d’angoisse.
  • Imaginons un monde où chacun pourrait travailler et payer, travailler et jouer.
  • Imaginons un air sain, une eau et une nourriture saine pour tout le monde.
  • Imaginons une société humaine vivant en équilibre avec l’environnement.

Trop beau pour être vrai  ? Ou peut être pas  ? Peut-être cela mérite-t-il d’être vérifié  ?

Ce sont nos convictions à propos de monnaie libre, nos idées de développement d’un système de monnaie libre, et notre intention d’agir maintenant pour mettre en œuvre nos convictions…nous vous invitons à adhérer.

Cette déclaration ne s’adresse pas à tel individu ou tel organisme. Les déclarations n’appartiennent pas à une personne ou une entité et ne sont en rien prévues pour servir les intérêts particuliers d’un individu ou d’une organisation.

Le but du manifeste de la monnaie libre s’auto-détermine  : il est inhérent à son contenu.

  • Il n’est pas négocié, personne ne vote pour lui.
  • Il n’est ni une question d’opinion ni une proposition politique.
  • Sa validité est basée sur le sens interne créé et le sens externe généré…

Les concepts de monnaie libre n’appartiennent à personne.

Le manifeste est une série ouverte d’idées  : les concepts sont là pour être étendus, développés, affinés. Nous vous invitons à adhérer.

Le manifeste est un document actif.

  • C’est un constat de preuves vérifiables  : il y a des problèmes avec l’argent.
  • C’est une question de conception  : les problèmes lié à l’argent peuvent être réglés facilement.
  • C’est une déclaration d’intention  : Nous sommes en train de les régler.

Amagill - CC by

Quelques liens connexes

A l’heure de la crise, le mouvement open-money propose une approche au moins aussi stimulante de l’économie que l’open-source l’est pour le monde du logiciel. L’open money, c’est la libération des moyens de paiement. Nos monnaies actuelles sont en effet en un sens des systèmes propriétaires  : l’euro et le dollar sont gérés par des banques centrales qui décident de leur mode d’émission tout en se faisant rémunérer pour leur mise à disposition aux banques commerciales. Ces dernières redistribuent ces liquidités (avec effet de levier grâce aux mécanismes de l’argent scriptural et des taux de réserves obligatoires) aux agents économiques. Deux agents économiques voulant commercer avec de l’euro ou du dollar doivent donc nécessairement faire appel à un système commercial extérieur sur lequel ils n’ont aucun contrôle.

(…) Le système monétaire classique est donc bel et bien verrouillé comme l’est, dans un autre genre, un logiciel propriétaire. Partant de ce constat, l’open money reprend l’héritage des LETS (Local Exchange Trading Systems, en français SEL pour Systèmes d’échanges locaux) pour proposer des circuits monétaires alternatifs libres  : il s’agit d’implanter au sein d’une communauté donnée une ou plusieurs monnaies que les membres gèrent directement. Les échanges entre membres ne sont dès lors plus soumis à des conditions extérieures à la communauté telle que la quantité et la qualité de la monnaie en circulation.

Vous avez déjà joué au Monopoly, n’est-ce pas, avec des joueurs et une banque  ? Si la banque ne donne pas d’argent, le jeu s’arrête, même si vous possédez des maisons. On peut entrer en pauvreté, non par manque de richesse, mais par manque d’outil de transaction, de monnaie. Dans le monde d’aujourd’hui, 90 % des personnes, des entreprises et même des États sont en manque de moyens d’échange, non qu’ils soient pauvres dans l’absolu (ils ont du temps, des compétences, souvent des matières premières), mais par absence de monnaie. Pourquoi  ? Parce que, comme dans le Monopoly, leur seule monnaie dépend d’une source extérieure, qui va en injecter ou pas. Il n’y a pas autonomie monétaire des écosystèmes.

Souvent réduit à son aspect médiatique, le cinquième pouvoir est en fait une force de décentralisation  : médiatique, énergétique, alimentaire… et aussi monétaire comme l’explique Jean-François dans cette vidéo enregistrée en annonce de la conférence qui se déroule sur le sujet à Mexico.

Le passage des monnaies uniques, c’est-à-dire de l’économie propriétaire et centralisée, à l’économie diverse et ouverte pourrait valoir un prix Nobel. Mais comme les autres transitions en cours, elle n’est pas l’œuvre d’une personne mais d’une multitude d’acteurs. Comme les nouveaux médias, les nouvelles monnaies existent déjà. Dans les jeux vidéo, partout sur les services d’échange en ligne, dans nos vies lorsque nous rendons services à un ami qui nous rend plus tard service…

La réappropriation de nos existences passe aussi par la réappropriation des monnaies d’échange. C’est possible à l’âge numérique. Avec ces nouvelles monnaies, la notion de croissance vole en éclat. Nous passons de l’autre côté.

Tous nos échanges ne se fondent pas sur l’argent ni sur la valeur monétaire de ce que nous échangeons, expliquent les auteurs du forum. En échange d’une photo qu’on offre à la communauté Flickr, nous n’attendons pas nécessairement de l’argent en retour, mais plutôt un sentiment d’appartenance à une communauté, une visibilité, le plaisir de faire plaisir à ceux avec qui on l’a partage… Ce type d’échanges non monétaires n’a rien de nouveau, mais la question est de savoir si nos outils numériques peuvent favoriser leur renouveau  ?

(…) A une époque où nous allons vers une monnaie virtuelle, le coût marginal d’introduire de nouvelles monnaies se rapproche de zéro, explique le consultant et éditorialiste David Birch, organisateur du Digital Money Forum britannique, d’où la probabilité qu’elles se démultiplient. Dans un scénario post-monétaire, quels autres types de biens et de services pourrions-nous échanger  ? Comment persuader les gens de rejoindre votre économie alternative  ? Comment expliquer ses bénéfices aux autres  ?

Dans son livre «  The Future of Money  », Lietaer fait remarquer – comme l’a fait hier le gouvernement britannique – que dans des situations comme celle que nous connaissons actuellement tout s’arrête brusquement à cause de la pénurie de liquidités. Mais il explique également qu’il n’y a aucune raison pour que cet argent doive prendre la forme de la livre sterling ou qu’il soit émis par les banques. L’argent ne consiste qu’à «  un accord au sein de la communauté d’utiliser quelque chose comme moyen d’échange  ». Ce moyen d’échange pourrait être n’importe quoi, du moment que tous ceux qui l’utilisent ont la certitude que tous les autres en reconnaîtront la valeur. Durant la Grande Dépression, des entreprises aux Etats-Unis ont émis des queues de lapins, des coquillages et des disques de bois comme monnaie, de même que toutes sortes de bons de papier et de jetons de bois.

Une monnaie libre consiste en un ensemble de règles et processus qui définissent l’émission, l’évolution, la circulation et la consommation d’une monnaie ouverte, suffisante, décentralisée, peer-to-peer et démocratique. Elle appartient au domaine public tout comme les logiciels ou les productions intellectuelles du logiciel libre. Elle est conçue, développée, testée, documentée et mise en circulation de manière collaborative, chacune de ses parties pouvant être transformée et améliorée par quiconque. Les monnaies libres sont désignées sous le terme d’Open Money en anglais, suivant les travaux de Michael Linton et Ernie Yacub à l’origine de cette vision.

Notes

[1] Crédit photos  : Jessica Shannon (Creative Commons By-Sa) – AMagill (Creative Commons By)

23 Responses

  1. Philippe Mongeau

    Je ne suis pas sure de tout comprendre. Un des arguments est que l’argent est rare et chère.
    N’est-ce pas le but de l’argent d’être chère, ou plutôt d’avoir une certaine valeur. Et si elle à une valeur c’est justement parce qu’elle est rare. Comment la veleur de l’open money sera-t-elle déterminé si elle peu être créé à souhait?

  2. mtirel

    Merci pour ce billet. Il faut préciser qu’il ne s’agit pas mais pas du tout d’un poisson d’avril !!
    En complément des sources que vous proposez et pour approfondir ce sujet je conseille la lecture de "monnaies régionales" de Bernard Lietaer et les documents sur son site http://www.lietaer.com/

  3. percomoca

    je suis pas un expert mais je peux modestement donner quelques pistes de réflexion à creuser:

    il y aura fatalement un moment ou quelqu’un voudra échanger de l’open monnaie contre de la monnaie réelle. Vous ne pourrez pas composer sans une interface avec la monnaie réelle, or je ne crois pas qu’elle soit permise par la loi. Le problème a déjà existé à de nombreuses reprises par ex. autour de 68 dans certaines communautés.

    Un rappel sur les effets de la mise en concurrence de 2 monnaies serait également utile: cf. Or vs Argent => la plus valorisé étant systématiquement thésorisée, ça génère une boucle de rétroaction positive assez merdique d’un point de vue des valeurs respectives des deux monnaies etc. Ok le prob existe entre monnaies nationales mais a priori on utilise qu’une monnaie par pays ? (d’ou la question de la monnaie électronique transfrontalière à se poser sérieusement…

    Pour les théories de la monnaie, du travail "juste" et de toutes ces choises il y a eu de nombreux ouvrages d’économie politique, par ex. le petit livre "misère de la philosophie" de Karl Marx écrit par l’auteur en Français dans le texte, une réponse très critique au thèse du très naïf "Monsieur Proudhon".

  4. Jean-Baptiste Bourgoin

    Est-il nécessaire de rappeler que l’une des raisons principale de la crise économique vient de l’indexation de la valeur de la monnaie sur le seul dollar qui est une monnaie virtuelle ? D’où la possibilité pour les EU d’être à la fois le pays le plus endetté du monde, et le plus puissant.

    À supposer qu’un tel projet soit réalisable, il me semble que les conséquences seront au moins catastrophiques. Ne serait-ce que sur le plan de la production qui exploserai et aggraverai les problèmes économiques, écologiques et sociaux que nous connaissons.

  5. Phyrezo

    @Philippe

    Tu pose le doigt sur la question crucial : le paradigme de rareté de la monnaie.

    J’ai interrogé Guido Hülsmann sur sa vision des monnaies complémentaires, et sa réponse était que cela utopiste car la monnaie comme bien d’échange se devait d’être rare.

    C’est ce que JF Noubel appelle le paradigme Victorien.

    La question est de savoir si l’on considère la monnaie comme un système d’information pour mesurer les échanges ou plutot comme un bien d’échange.

    Si c’est un bien alors il se doit d’être rare, sa rareté déterminera sa valeur. par contre l’information peut être produite à volonté, ce qui aura de la valeur c’est ce qu’elle mesure.

    Si une monnaie me permet d’acceder certains services, par exemple une heure de cours de français, la valeur est contenue dans le cours reçue et non dans l’information qui mesure ce services. Mon compte sera débité du montant correspondant — la monnaie n’existait pas à l’origine, car le cours n’ayant pas été donné il n’y avait pas de valeur. A mon tour je devrais rendre un service de cette valeur à la communauté pour que mon compte s’équilibre.

    C’est le système de crédit mutuel.

    Avec le système d’argent dette, l’argent est rare, et correspond à un espoir de revenus futurs. Comme il n’est pas equitablement distribué, et avec un mécanisme de condensation, il se retrouve très concentré dans certain endroits comme par exemple à Wall-Street, ou certains trader sans rendre aucun service à la communauté, peuvent bénéficier de revenus énormes de cette monnaie juste en le plaçant, parce qu’à l’origine ils y ont accès.

    De l’autre côté (dans le Sahel comme image, mais cela peut être à la porte de Wall-Street dans le Bronx), l’argent est inexistant et aucuns échanges économique ne peut avoir lieu, quant bien même de nombreuses capacités de services, mais aussi de biens existent (l’un pourrait préparer les repas, l’autre donner de cours de Jujitsu, mais ce n’est pas possible car il n’y a pas de monnaie).

    L’idée de monnaie abondante, n’est pas de dire que l’on va faire tourner la planche à billet et en distribuer à tout le monde, comme Bernake le fait aux US, mais de dire, que partout ou l’on peut avoir besoin de monnaie il y en a toujours suffisamment pour mesurer la valeur des échanges.

    Le fait que la monnaie soit trop rare, permet qu’elle soit chère, et donc à ceux qui y ont accès (pas qui possède) d’en gagner.

  6. Phyrezo

    @percomoca

    Effectivement la loi impose l’usage de l’euro en interdisant le change ‘officiel’ avec une autre monnaie ‘non-officielle’ et surtout en interdisant de libeller un crédit dans une autre monnaies (en France on ne peut même pas libellé un crédit en Franc Suisse sans parler de l’or)

    La boucle de rétroaction ‘merdique’ des monnaies concurrentes est assez intéressante. Merci. Je pense cependant, mais je ne developperai pas, que cela devrait à terme s’équilibrer… L’idée est ici évidemment d’avoir une multitudes de monnaies en semi-concurrences, car elle ne permette pas forcemment d’acceder aux mêmes choses.

    D’ailleurs, en cours de physique on m’a dit que je ne pouvais comparer ou additionner des kilogramme de carottes et des kilometres. Moi je sais : 200km = 50€ par le train, 1 kg = 2€ de carottes donc 200km=25kg

  7. Marie Martin-Pécheux

    C’est très réjouissant de voir que l’on se pose enfin des questions sur la monnaie !
    Car c’est en y regardant de plus près que l’on s’aperçoit combien elle est pathologique et combien nous pourrions bien vivre si elle était plus saine !
    Je vous invite à voir la notion de monnaie sur le site http://www.bioeconomie.net.
    dans la théorie bioéconomie développée, la société humaine est comparable à un corps humains, l’argent est comparable au sang, les services publics aux grandes fonctions vitales, etc.( La comparaison n’est pas gratuite : elle est argumentée.) Dans cette perspective, le problème de la monnaie est qu’elle est devenue "n’importe quoi" : manquant ici, trop "grosse" là, irriguant pas assez tel ou tel territoire du corps social humain, devenu un objet, au lieu d’être un outil…
    Il "suffit" en réalité de respecter quelques lois économiques biovitales ( ce qui favorisent la Vie, au lieu de la détruire).
    Vous verrez que l’on peut parfaitement avoir une monnaie, saine, en quantité et en qualité suffisante pour subvenir au besoin de tous et pour aller vers un mode de fonctionnement social, économique et politique respectueux de la Terre, de ses habitants et du climat.
    Cordialement
    Marie Martin-Pécheux
    " Bioéconomie et Solidarisme, d’un monde "libéral" à un monde libéré, pour une économie au service de la Vie. Editions Interkeltia

  8. Phyrezo

    @Marie Martin Pécheux

    Votre approche de l’économie à l’air particulièrement intéressante.

    Cependant j’ai un problème techinique à afficher le nouvau site (il me demande mot de passe et password…

    L’ancien fait un peu viellot quand meme 😉 mais je m’en contenterai.

    merci pour cette contribution.

  9. idoric

    Poisson d’avril bien sûr !

    > «La monnaie libre doit être méritée pour être respectée. Quand vous l’émettez, vous êtes obligé de l’honorer. Votre monnaie est votre parole : une question de réputation dans votre communauté.»

    Autrement dit, émettre sa propre monnaie revient à contracter un prêt, ce que le système monétaire actuel fait déjà, et avec les résultats qu’on sait…

  10. momoney

    Un poisson aussi gros, ce serait une baleine d’Avril et l’écrivain se serait bien donné du mal… Quoi que ca peut faire beaucoup de visites !
    Avant l’Open Money il faudrait voir : L’open Ground, l’Open House, l’Open electricity, l’Open Food, l’Open Network et l’Open Water.
    Après ces besoins fondamentaux l’argent n’est plus que du luxe peu essenciel.

  11. Phyrezo

    @idoric

    Si c’est un poisson, alors protégons le, car il va sauver la planète !

    La partie ‘OpenMoney’, se limite à la technique, c’est une solution qui permet facilement de gérer une monnaie. Par contre la pratique de monnaie complémentaire, communautaire, régionale, existe déjà depuis longtemps et a connu quelques beaux succès comme le WIR en Suisse et qui est en plein essort aujourd’hui (en particulier au Japon, qui a 10 ans d’avance par rapport à nous sur la crise monétaire) et qui permet de favoriser les échanges et de valoriser toute une partie de notre potentiel qui est occultée par le monopole monétaire.

    @momoney

    Oui c’est une baleine, car les conséquences de la propagation des monnaies complémentaires va être fulgurante et définitivement nous faire entrer dans une nouvelles civilisation, l’âge de l’information. C’est difficile à percevoir, tant nous sommes conditionné par le système.

    Les monnaies complémentaires se basent entre autres sur le crédit mutuel. A la grande différence de l’argent dette, qui s’endette sur une production future, ici c’est un individu qui s’endette vis-à-vis de la communauté pour une production présente.

  12. deadalnix

    Marie Martin-Pécheux > Malheureusement, mon adhésion a l’ACAF (voir blog de maitre eolas) m’empêche d’adhérer. Si l’analogie peut-être un moyen de vulgarisation dans un premier temps, elle ne doit surtout rien être de plus.

    Sinon effectivement, je penses qu’on peut se poser des questions sur le sujet.

    idoric > Tu fais erreur. Le problème n’est pas le prêt. Le problème vient de la création de valeur par la spéculation. D’un point de vu théorique, on peut voir cela comme un prêt a soit-même travers le temps.

    Prenons l’exemple des subprimes, qui ont déclenché la crise actuelle (et qui n’en sont en aucun cas la cause profonde).

    Des prêts ont été fait a des personnes pour qu’elles puissent acheter une maison. la sécurisation de ce prêt est basée sur le fait que la maison vaut de plus ne plus cher, et que le banquier pourra se renflouer sur celle-ci si le client en vient a ne pas pouvoir rembourser.

    Or un maison ne travaille pas, donc ne produit pas de richesses. Sa valeur augmente simplement du fait que plus de personnes désirent acheter des maisons. Pour maintenir cet état de fait, on est contrait d’offrir des prêts de plus en plus risqués, sans quoi la valeur de la maison chute (et alors tout s’écroule).

    Le fond du problème réside dans le fait qu’a aucun moment, il y a création de valeur. c’est l’effet soufflet au fromage.

  13. Philippe Mongeau

    @Phyrezo
    Merci de m’avoir répondu.
    Donc, si je comprend bien, l’Open Money, c’est comme une sorte de troc à crédit?

  14. Erman Cal

    Comme dirait l’autre : chiche !!!

    La question que je me pose c’est au niveau des banques (le nerf de la guerre et l’endroit le plus vérolé de la planète actuellement). Je pense que les choses bougeront réellement le jour où l’on pourra toucher notre salaire directement depuis une banque issue de la philosophie de cette belle idée qu’est l’open money.

  15. modagoose

    Il est nécessaire que cette monnaie ne soit pas assujettie au marché. Par conséquent, c’est une monnaie locale qui sert comme moyen d’échange. Ca existe déja et c’est cité en toute fin de l’article avant les citations, c’est le modèle des SEL :
    http://monnaies.locales.free.fr/ind

    Sans vouloir troller, il y a dans l’intro de cet article une méprise entre logiciel libre et Open source. Ce n’est pas tout à fait la même chose, si je puis me permettre^^

    Cordialement.

  16. nougah

    C’est la première fois que j’entends parler de l’Open Money et je n’ai donc pas encore beaucoup lu sur le sujet. Cependant, cela me donne une idée plus concrète que voici.

    L’intérêt de l’article est justement dans le fait qu’il ne pose qu’une base. Considérons l’Open Money comme une forme de "Crédits Services" à la sauce 2.0. Nous avons donc besoin d’une plateforme qui dans ce cas serait un site internet (qui permet une décentralisation virtuelle). Ce site serait un réseau social où il serait possible de publier son "travail" accompli (cf. l’article où il explique le pourquoi on ne peut pas construire si on a pas d’argent)
    et avec des fonctions avançées de rankings (de votes) et de sytèmes de références, tout cela bien sûr avec un code opensource qui garantirait la transparence du système, quelques fonctions bancaires de bases (réduire au minimum l’endettement).

    Plus concrètement, l’idée principale est que ce n’est pas le marché qui décide de la valeur d’un bien, mais bien la communauté qui évalue la valeur d’une action. Je publie un article que des membres ont trouvé intéressant, ils peuvent me "donner" de la "monnaie virtuelle" qu’ils ont par exemple gagnée en hébergeant un voyageur dans leur demeure. Grâce à un système à la Facebook connect, on pourrait s’identifier sur des sites qui partagent cette philosophie d’alternatives (ici l’exemple est celui de l’excellent couchsurfing.com) et "donner" de la "monnaie", c’est à dire "acheter", en gros le but est de transformer le don en quelque chose qui persiste pour créer un système de change.

    La plateforme serait assez perfectionnée pour mesurer l’activité (autrement la productivité) du membre, ses possibilités, etc… Une intéraction dans la vie réelle et exemple concret excluant le don est par exemple la suivante: à la place de vendre mes anciens écouteurs sur ebay, je les vends sur la plateforme (qui aurait donc un systeme d’enchères). L’idée est de créer dans un premier temps un moyen commun de crédits à tous les projets qui sont "open" et compatibles: je cite par exemple le développement de logiciels opensource (don), framablog (don), couchsurfing (échange mutuel), l’open music etc…

    Comme les gens sont frileux, l’idée est justement la suivante: utiliser les crédits en premier lieu pour l’intellectuel et le participatif (comme actuellement mais avec une standardisation qui permettrait l’échange), ensuite pour les objets de post consommation (j’appelle ainsi les objets vendus sur ebay), puis pour les plus courageux de consommation et un jour lointain rêvons le pour la production (qui ne saura plus de la production capitaliste à propremer parler, mais c’est un autre débat). L’idée d’y aller petit-à-petit n’est pas anodine: elle a pour but d’instaurer la CONFIANCE dans le système (qui est transparent ce qui aide), et c’est d’ailleurs cette même confiance qui est nécessaire pour le fonctionnement de n’importe quelle monnaie.

    Il n’est pas nécessaire d’imprimer cette monnaie: le virtuel permet de la rendre exisante sans qu’elle existe dans les mains. L’internet étant présent jusque dans nos téléphones, il sera donc possible d’effectuer des "transactions" avec des inconnus, qui bien qu’ils seront inconnus auront la même confiance dans le même système.

    Son financement est possible et autogéré à l’aide d’une taxe unique détaillée que tous les membres paient (en crédits biensûr mais parallelement une aide en eurodollars est possible tant que la confiance n’est pas instaurée). Sa gouvernance est par exemple celle des développeurs sous la pression d’un brainstorm participatif (voir l’ubuntu brainstorm pour ceux qui ne connaissent pas).

    Je pense que ce que l’auteur voulait dire dans la création de monnaie infinie est justement cela: dans le système que je viens d’ébaucher, on pourrait soit partir de rien soit d’une petite somme, cela n’a pas tellement d’importance: l’idée est justement que si l’on a quelque chose, un travail, quel qu’il soit, il puisse être "rémunéré". Nous sommes à une époque charnière où tout un chacun peut produire des contenus intellectuels (musique, articles, vidéos, logiciels, etc.), si l’on créé maintenant un système parallèle à la monnaie réelle qui peut gagner PETIT A PETIT comme expliqué la confiance des membres, cela ne me paraît pas si utopiste.

    Bien à vous et désolé pour le côté brouillon, c’est tout frais sorti du cerveau.

  17. Phyrezo

    @Philippe Mongeau – Oui, on peut le voir comme ça : du troc à crédit… Juste pour préciser les choses :
    – l’open money est la possibilité pour chacun de créer un système monétaire
    – le crédit mutuel est un système monétaire possible, dans lequel les échanges se font à crédit d’un individu à la communauté; il n’y a donc pas de masse monétaire
    – enfin tout ceci n’est pas du troc, parce qu’il y a une mesure des échanges et la possibilité de différer dans le temps la vente et l’achat. En gros ce n’est pas du troc car il y a une monnaie.

    Je vous signale que suite à l’engouement sur cet article et sur celui-ci : http://www.contre-feux.com/economie

    le réseau MTM – Mouvement pour la Transition Monétaire (http://transitionmonetaire.ning.com) à vu le jour pour rassembler tous ceux :

    – conscient du dysfonctionnement du système monétaire actuel et souhaitant agir
    – indépendamment des alterantives porposées (l’open money en étant une parmis d’autres)

    @nougah j’aime bien ta façon de voir les choses, tu mets le doigt sur deux points fondementals de l’open money:

    – la possibilté de valoriser tout un pan de l’économie et des richesse qui ne le sont pas par les monnaies conventionnelle et
    – le tout étant basé sur une relation de confiance (comme la monnaie conventionnelle d’ailleur…)

  18. idoric

    Il semblerait donc que finalement ça ne soit pas un poisson d’avril… j’ai donc relu l’article, lu ceux indiqués en lien.

    J’ai commencé à me dire que si on en croit la loi du marché : plus il y a de monnaie et moins elle vaut, donc plus il en faut pour acheter un bien donné ; inversement, moins il y a de monnaie, et moins il en faut pour acheter le même bien à situation économique équivalente. Bref, peut importerait qui émet les billets et en quelle quantité ! (du moins si on croit à la main invisible du marché)

    Mais après je me suis fait le raisonnement selon lequel ce ne serait valable que si le produit de la planche à billet était réparti «entre tout le monde», ce qui ne doit pas être le cas puisque je ne l’ai jamais vécu 😉 Et là je réalise qu’en fait je ne sais pas clairement qui est la planche à billets, qui les récupèrent, et l’accord entre ces deux parties.

    Bref, si quelqu’un a des liens particulièrement pédagogiques sur la question monétaire, et qui partiraient véritablement des bases, je suis preneur. Et peut-être qu’après je pourrais déterminer si l’«open money» est une vaste blague ou un truc très sérieux. Merci d’avance de prendre en considération la demande d’un plus si jeune qui arrive encore à remettre de temps en temps en question sa propre personne ou le monde qui l’entoure.

  19. RedGuff

    Bonjour. Il me semble utile de proposer un mode d’emploi.
    Un site centralisateur, (sur le modèle de Sourceforge ?), reconnu et officiel, gère les comptes.
    Chaque utilisateur peut voir qui a payé pour quoi et pour qui, pour limiter les fraudes, (photos ou vidéo à l’appui, par exemple par insertion de dailymotion ou de youtube ?).

  20. Pépé Ciseaux

    Samedi dernier, l’émission « Rue des entrepreneurs » sur France Inter avait pour thème « La nouvelle couleur de l’argent » et évoquait justement les monnaies alternatives. 50 minutes à apporter au débat et disponibles à la ré-écoute et en podcast ici : http://sites.radiofrance.fr/francei