Framasoft 2022 : une tambouille mijotée grâce à vous, grâce à vos dons

Le saviez-vous ? 98 % du budget de Framasoft repose sur des dons (dont 86 % sont des dons de particuliers). C’est donc bien grâce à vous et à votre soutien (merci !) que toutes nos actions sont réalisables. Nous avons ainsi voulu vous faire un résumé de la tambouille concoctée sur cette année 2022. Retour sur 12 mois d’éducation populaire aux enjeux du numérique et des communs culturels, que l’on a voulu riches en saveurs pour le bonheur de vos (et nos !) papilles.

« Collectivisons Internet / Convivialisons Internet 🦆🦆 »Les actions de notre nouvelle feuille de route étant financées par vos dons (défiscalisables à 66 %), vous pouvez en trouver un résumé complet sur le site Soutenir Framasoft.

➡️ Lire la série d’articles de cette campagne (oct. – déc. 2022)

Illustration CC BY David Revoy

Mais qui est derrière les fourneaux ?

Derrière ce petit festin, il y a qui ? Un petit groupe de 38 personnes : 28 bénévoles et 10 salarié⋅es, convaincu⋅es qu’un monde où le numérique nous permet de gagner en liberté est possible ! On vous raconte ici ce qu’on a fait, réfléchi et avancé dans les cuisines. Et les fours sont encore tout chauds !

Partager nos valeurs, nos intentions et nos actions haut et fort

Après 3 ans de travail, d’ateliers guidés par Marie-Cécile Godwin et de peaufinage par l’association, nous avons publié notre manifeste en novembre. Ce travail de longue haleine nous a fait longuement réfléchir et nous a permis de mettre en évidence très simplement la dimension politique de notre projet associatif : nous voulons changer le monde actuel pour un monde meilleur, où les Communs sont favorisés, où la justice sociale est une valeur fondamentale et où nos libertés sont préservées.

La deuxième partie de cet important travail a été de faire en sorte que nos intentions du manifeste se comprennent dès l’arrivée sur framasoft.org. Nous avons ainsi refondu entièrement notre site internet principal pour rendre notre projet associatif clair, fluide et facilement compréhensible.

Illustration CC BY David Revoy

Collectivisons Internet / Convivialisons Internet : notre nouvelle feuille de route 2023-2025

Après 5 ans de cap sur Contributopia, nous avions besoin de réaffiner notre compas et revoir notre direction : vers où voulons-nous poursuivre notre exploration pour les prochaines années ? C’est ainsi qu’a été créée la nouvelle feuille de route Collectivisons Internet / Convivialisons Internet (nom de code : COIN / COIN) : nous souhaitons nous adresser plus directement aux collectifs et associations engagées pour un monde meilleur (sans pour autant mettre de côté les milliers de personnes qui utilisent nos outils !).

4 projets ont ainsi été dévoilés et seront progressivement améliorés aux fils des mois grâce aux retours des bénéficiaires, dans l’idée de créer plus de liens entre les outils et les humain⋅es :

  • Frama.space : proposer du cloud libéré aux petits collectifs militants
  • Peer.tube : mettre en valeur le PeerTube pour lequel nous œuvrons
  • Emancip’Asso : favoriser l’émancipation numérique du monde associatif
  • ECHO Network : comprendre les besoins de l’éducation populaire dans différents pays d’Europe.

Nous avons détaillé les actions de cette feuille de route et pourquoi nous les entreprenons sur le Framablog.

Banquet simple, dans une jardin partagé, où des animaux mascottes du libre sont servis par des canards
Illustration CC BY David Revoy

Se revoir et vous revoir : ça requinque !

Cette année 2022 aura aussi été marquée par la reprise plus intense des moments partagés, en chair et en os (avec de bonnes aérations !) : AG, Framacamp, événements, salons, conférences, festivals, projections de cinéma, tables rondes… Parce que bien que l’on aime faire tout ça, vous voir et nous voir, ça nous motive, ça nous booste et ça nous encourage à continuer à tester de nouveaux projets ambitieux, farfelus et drôles (Vous vous souvenez de Proutify ? L’extension vient d’être mise à jour par un de nos bénévoles)… c’est si important de prendre plaisir à faire tout cela !

Dessin d'un Canard qui sourie en très gros plan, de manière comique, tandis que derrière lui des canards font la fête dans une kermesse champêtre
Illustration CC BY David Revoy

 

Sans vous, tout ce que nous faisons ne serait pas réalisable : 98 % des ressources de l’association sont des dons. Vous trouvez que nos réflexions vont dans la bonne direction ? Si vous en avez les moyens, si vous en avez l’envie, nous vous remercions grandement d’avance de votre soutien.

 

Je soutiens les actions de Framasoft

 

 

En entrée : buffet d’éduc pop’

Pour nous, l’éducation populaire, c’est la base d’un monde meilleur : chacun et chacune peut partager ses connaissances et y accéder, en toute simplicité. On vous présente ici les différentes actions d’éduc pop’ menées cette année.

Partage de connaissances et de points de vue

Pour commencer, Framasoft est intervenue, en présentiel ou à distance, dans divers espaces, pour parler d’émancipation numérique, de numérique alternatif, ou encore de comment se libérer en ligne. C’est plus de 70 interventions que nos membres ont réalisées, pour différentes structures, associations, ou collectifs, dans différentes régions de France. Vous trouverez quelques unes de ces interventions à visionner sur notre chaîne Framatube.

Ensuite, Framasoft garde la plume active sur le Framablog. Plus de 100 articles ont été publiés cette année, entre présentations de nos différentes actions, traductions de Framalang, revue de presse hebdomadaire, claviers invités, interviews de divers projets émancipateurs, articles audio… Le Framablog est un espace où nous nous exprimons sans limite.

Nous sommes aussi intervenues une vingtaine de fois dans les médias lorsque nous avons été sollicité⋅es pour partager nos points de vues sur le numérique : interview vidéos, podcasts, articles… Vous trouverez les différents liens accessibles sur cette page.

Illustration CC BY David Revoy

Des Livres en Communs : la maison d’édition qui chamboule les codes

Notre maison d’édition Des Livres en Communs (anciennement Framabook), chamboule les codes de l’édition en proposant une bourse aux autrices et auteurs en amont de l’écriture, ainsi qu’une publication de l’ouvrage sous licence libre, uniquement en version numérique.

Suite au premier appel à publication lancé en janvier : « Vers un monde plus contributif, plus solidaire, plus éthique et plus libre : comment s’outiller et s’organiser ensemble ? », le projet « L’amour en Commun », de Margaux Lallemant et Timothé Allanche a été sélectionné. L’objectif de cette publication est de questionner comment le commun de l’amour, en tant que moyen d’organisation et moteur d’engagement, permet de construire une alternative à la société capitaliste.

L’ouvrage est actuellement en création, entre travail de terrain et immersions, tout en étant accompagné par notre comité d’édition.

Des Livres en Communs a également participé à la coédition et aux relectures du « Guide du connard professionnel », travail mené avec PtiloukEditions.

Illustration CC BY David Revoy

UPLOAD : une université libre qui se garnit

L’Université Populaire Libre, Ouverte, Autonome, et Décentralisée (UPLOAD) est un grand projet d’éducation populaire initié et coordonné par Framasoft (pour le moment), dans une logique décentralisée et en réseau. L’objectif est de contribuer (à notre échelle) à rendre la société plus juste et notre monde plus vivable, en misant sur la formation des citoyen⋅nes par les citoyen⋅nes.

Ce projet est en grande partie formé par les LibreCours, cours en ligne permettant d’accéder à différents savoirs et connaissances. Stéph nous a proposé une conférence pour présenter le sujet lors des Journées du Logiciel Libre.

Les Librecours de cette année auront été rythmés par la thématique « Low-technicisation et numérique » : une première session entre avril et juin et une seconde entre novembre et janvier 2023. Vous trouvez aussi que la croissance exponentielle du numérique est problématique ? Chercher à réduire l’empreinte technique d’un outil vous intéresse ? Vous pouvez retrouver les vidéos des cours par ici.

Illustration CC BY David Revoy

Peer.tube : une vitrine pour PeerTube qui nous ressemble

Avec Peer.tube, nous souhaitons créer une vitrine de PeerTube, avec du contenu de qualité préalablement sélectionné. C’est notre réponse à une question que l’on peut souvent nous poser : « Mais où est-ce que je trouve du contenu intéressant sur PeerTube ? ». Le site Peer.tube est déjà accessible avec une première sélection de chaînes et vidéos, mais le projet ne va réellement avancer que l’année prochaine.

Sepia, læ poulple mascotte de PeerTube, est au bord de la mer. Iel nous invite sur un ponton menant à une plein de voiliers. Un film est projeté sur chacune des voiles de ces voiliers.
Illustration CC BY David Revoy

 

Notre buffet d’éducation populaire a titillé votre curiosité ? Vous trouvez que nos contributions vont dans le bon sens ? Alors nous vous re-glissons par ici que tout ça nous a été possible grâce à vous et à vos dons – merci !

 

Je soutiens les actions d’éduc pop’ de Framasoft

 

En plat : poêlée d’émancipation numérique

Permettre aux citoyens et citoyennes de s’émanciper par le numérique et de libérer leurs pratiques, c’est le cœur de nos actions. Mais, de quoi est composée cette bonne poêlée ? D’ingrédients libérés, de qualité, et d’une bonne pincée d’amour. On vous détaille tout ça.

Des services en ligne pour se passer des géants du numérique

Nos services en ligne sont souvent la raison pour laquelle on nous connaît : vous êtes plus de 9 personnes sur 10 à nous l’avoir confié lors de notre enquête « Ce que vous pensez de Framasoft » lancée fin mai. Et à vrai dire, nous n’avons pas été très étonné⋅es. Pour vous donner quelques chiffres, nous comptons plus de 50 millions de visites sur l’ensemble de nos sites depuis le début d’année, plus de 350 sondages sont créés chaque jour sur Framadate, près de 15 000 formulaires sont créés chaque mois sur Framaforms, près de 110 000 pads d’écriture collaborative sont actifs sur Framapad. Nous, on trouve toujours ça incroyable !

Entre 2014 et 2019, notre petite association a mis à disposition des internautes une quarantaine de services en ligne libres et de confiance (oui, 40 !). Pour de nombreuses raisons, c’était trop, et nous avons fermé progressivement, entre 2019 et 2022, une partie de ces services, tout en proposant des alternatives. Cette période de fermetures est maintenant terminée : nos 16 services en ligne sont disponibles pour toute personne souhaitant utiliser des outils qui respectent nos libertés. Nous avons ainsi décidé de mettre à jour et refondre le site degooglisons-internet.org pour en faire une porte d’entrée facilement accessible, la mettre à notre image et surtout pour rassurer nos utilisateurs et utilisatrices.

Maintenir ces services à jour, gérer les machines qui les font tourner ou encore répondre à vos questions sur le support, c’est un travail du quotidien, et on essaye d’y mettre nos meilleures énergies !

Illustration « Quittons la planète GAFAM NATU BATX », CC BY David Revoy
Illustration CC BY David Revoy

 

PeerTube : libérer ses vidéos et ses chaînes est de plus en plus facile

PeerTube, c’est le logiciel que nous développons (enfin, un de nos salarié⋅es, oui, un seul !) pour proposer une alternative aux plateformes vidéos. Et 2022 aura été une année bien riche en évolutions, où on compte maintenant plus de 1000 plateformes PeerTube actives.

Cap sur la V5 !

Pour commencer, la version 4.1 est sortie en février, apportant des améliorations de l’interface, de nouvelles fonctionnalités sur mobile, le système de plugins amélioré, de nouveaux filtres pour faire des recherches ou encore de nouvelles possibilités de personnalisation des instances pour les admins.

En juin, nous sortions la version 4.2, qui a amené une grande nouveauté : le Studio, ou la possibilité de modifier des vidéos directement depuis l’interface web. Cette version aura aussi apporté des statistiques de visionnage plus détaillées, la possibilité de régler la latence lors d’une diffusion ou encore l’édition directe de sous-titres (merci Lutangar !)

En septembre, c’est la version 4.3 qui a été publiée, permettant l’import automatique des vidéos d’une chaîne distante (Un grand merci à Florent, l’un des administrateurs de l’instance PeerTube Skeptikón) et de nouvelles améliorations de l’interface et de l’intégration des vidéos en direct (un travail en collaboration avec une designeuse de la Coopérative des Internets).

Et on peut déjà vous dire que la nouvelle version majeure, la v5, sera publiée dans quelques jours avec (attention : exclu !) de l’authentification à double facteur ou encore la possibilité d’envoyer les fichiers lives dans le cloud pour les admins…

Edit du 13 décembre : la V5 est sortie ! Retrouvez toutes les infos sur cet article.

Récolte de vos idées pour enrichir le logiciel

Vous créez du contenu sur PeerTube ? Vous aimez regarder des vidéos sur PeerTube ? En juillet, nous avons lancé l’outil ideas.joinpeertube.org (en anglais) pour récolter vos besoins sur le logiciel et ainsi nous permettre d’identifier les nouvelles fonctionnalités à développer pour rendre PeerTube plus agréable à utiliser.

N’hésitez pas à y faire un tour, pour voter pour une des fonctionnalités déjà proposées ou en proposer une nouvelle. Un grand merci à toutes celles et ceux qui ont pris le temps de partager leur avis !

joinpeertube.org : un accès facilité à PeerTube

joinpeertube.org, c’est LE site qui présente PeerTube, LA porte d’entrée pour s’informer sur cette alternative aux plateformes vidéo centralisatrices et nous, on souhaite la laisser grande ouverte !

La version précédente de joinpeertube.org était surtout axée sur les caractéristiques techniques de PeerTube, et donc adressée à des profils techniques. Hors, maintenant qu’il existe plus de 1 000 plateformes PeerTube, valoriser le logiciel auprès d’un public plus vaste et potentiellement moins à l’aise avec le numérique nous a paru une nouvelle orientation nécessaire.

Après un audit du site via des tests utilisateurs réalisés par La Coopérative des Internets, l’agence web nous a proposé des pistes d’amélioration pour permettre une meilleure compréhension de PeerTube. Vous trouverez tout le détail de cette version sur cet article du Framablog : et on espère que cette refonte vous sera utile et facilitera l’utilisation de PeerTube !

Illustration CC BY David Revoy

Mobilizon : on vous facilite les recherches

Mobilizon, c’est le logiciel que Framasoft développe (enfin, un de nos salarié⋅es et même pas à temps plein !) pour proposer une alternative aux événements et groupes Facebook.

Mobilizon Search Index, un moteur de recherche dans le fédiverse

Comme nous l’avons fait auparavant avec Sepia Search (notre moteur de recherche pour découvrir les contenus publiés sur PeerTube), nous souhaitons proposer une porte d’entrée vers Mobilizon pour montrer son potentiel émancipateur.

Mobilizon Search Index référence les événements et groupes de serveurs que nous avons approuvés sur instances.joinmobilizon.org (aujourd’hui un peu plus de 80 instances, et on espère que la liste s’allongera !). Le moteur de recherche permet ensuite d’explorer les événements et groupes de tous ces serveurs, et de différentes manières : barre de recherche (bon là c’est plutôt classique), par catégories (intéressant, non ?) ou même en se géolocalisant pour trouver des événements à proximité (c’est fou ça !).

Le code source est libre : toute personne (avec un certain bagage informatique tout de même…!) peut installer un Mobilizon Search Index, et l’adapter selon ses besoins.

Alors, ça vous donne envie de tester ?

Une v3 axée sur la recherche

Nous avons publié la 3ème version majeure de Mobilizon en novembre. Le logiciel a atteint la maturité que nous souhaitions lui donner, et ça, c’est très motivant !

Dans les nouveautés : de nombreux éléments du logiciel ont été modifiés pour ne pas accumuler de dette technique, le design de la page d’accueil a évolué dans le design, et la page de résultats de recherche a aussi été revue (coucou Mobilizon Search Index !). Augmenter les possibilités de découvrir des événements et des groupes pour rendre davantage visible la diversité des contenus publiés sur Mobilizon, c’était aussi l’objectif de cette v3.

Cette v3 a pu évoluer grâce aux différentes contributions (merci à la communauté !), a été financée en partie par une bourse de NLNet (merci à eux !), et bien sûr par vous, et vos dons (encore un grand merci).

gros plan sur Rose, la fennec mascotte de Mobilizon, qui tient une loupe à la main. En fond, une carte représentant un village où des chemins mènent à un poitn commun. Au dessus d'elle, le symbole d'un lieu estampillé "v3"
Illustration CC BY David Revoy

Frama.space : émanciper les petites assos et collectifs militants

Frama.space, c’est un nouveau service que nous proposons aux petites associations et collectifs militants, pour leur permettre d’accorder leurs valeurs internes fortes (de justice sociale et d’émancipation) avec des outils numériques allant dans le même sens (outils libres et non monopolistiques). Nous souhaitons ainsi autonomiser les associations et collectifs militants en ouvrant des espaces numériques de partage, de travail et d’organisation (jusqu’à 50 comptes par collectif, basés sur le logiciel libre Nextcloud avec : suite bureautique, 40 Go de stockage, synchronisation d’agendas et de contacts, outils de visio, etc.).

Annoncées le 15 octobre lors de la sortie de notre feuille de route Collectivisons / Convivialisons Internet, les pré-inscriptions sont ouvertes depuis le 18 novembre. Actuellement, les candidatures sont révisées (par des vrai⋅es humain⋅es !) pour ouvrir 250 premiers espaces d’ici la fin d’année. Notre objectif final (un poil ambitieux, oui !) étant de mettre à disposition 10 000 espaces Frama.space d’ici fin 2025.

Vous voulez en lire plus sur la visée politique du projet ? Nous vous invitons à lire cet article ou à visionner cette conférence, apportant tous les détails importants.

Une licorne déguisée en cosmonaute (avec une passoire sur la tête) marche sur les nuages et souffle des bulles. Dans ces bulles, on retrouve des cubes symbolisant le travail en commun (dossiers, boite à outils, livres, machine à écrire, boulier, etc.).
Illustration CC BY David Revoy

 

Nos actions pour permettre aux citoyens et citoyennes de s’émanciper par le numérique vous semblent intéressantes ? Vous pensez que nous allons dans la bonne direction ? Tout cela a été possible aussi grâce à vous et grâce à vos dons. Merci !

 

Je soutiens les actions d’émancipation numérique de Framasoft

 

En dessert : farandole d’un monde meilleur (à partager !)

Parce qu’un bon repas est toujours meilleurs quand on le partage. Et parce que c’est en partageant nos savoirs-faire et savoirs-être que l’on avance plus loin. Nous agissons avec d’autres structures, qui, telles des îles indépendantes, baignent dans des eaux communes d’un même archipel (vous aussi vous imaginez des îles flottantes avec une bonne crème anglaise ?) : nous gardons notre indépendance tout en partageant des valeurs de justice sociale. Agir ensemble est évident !

Du côté des chatons

Le collectif CHATONS, c’est un peu comme un réseau d’AMAP du service en ligne. Là où Google, Facebook ou Microsoft représenteraient l’industrie agro-alimentaire, les membres de CHATONS seraient des paysans informatiques proposant des services en ligne bio sans OGM, sans pesticide, sans marketing agressif, bref : sans une « course au pouvoir d’achat ».

Cette fin d’année, après déjà 14 portées de chatons, nous comptons 97 membres au collectif, soit 97 hébergeurs alternatifs travaillant dans la même direction : résister à la gafamisation d’Internet et proposer des alternatives respectueuses de nos vies privées.

Le collectif a été présent sur différents événements durant l’année (Journées du Logiciel Libre, contrib’atelier sur l’accessibilité numérique, Geek Faeries, Freedom Not Fear, Fête de l’Huma, Capitole du Libre), pour présenter ses actions. Le deuxième camp CHATONS a eu lieu cet été, un temps fort pour se retrouver et relancer de belles dynamiques collectives. Différents groupes de travail ont vu le jour, notamment le groupe « Une asso pour le collectif CHATONS » visant une autonomisation du collectif dans le but que nous (Framasoft) laissions peu à peu la coordination du collectif au collectif lui-même.

Illustration CC BY David Revoy

Emancip’Asso : favoriser l’émancipation numérique du monde associatif

Le but d’Emancip’Asso, c’est d’aider les associations à trouver de l’accompagnement pour faire évoluer leurs pratiques numériques vers des pratiques plus éthiques. Conçu en partenariat avec Animafac, 2022 aura été une année de… paperasse (eh oui, c’est souvent ça le début de projets ambitieux !).

Nous avons passé un moment à constituer un comité de pilotage (20 membres) varié, hétérogène et , représentatif de la diversité du monde associatif. Ensuite, le projet se voulant indépendant financièrement, les 6 premiers mois de l’année ont été consacrés à de la recherche de financements, qui a porté ses fruits (hourra !). Nous comptons actuellement quatre financeurs (et on espère que la liste continuera à grandir !) : la Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l’Homme, la Fondation Crédit Coopératif, la Fondation Un monde par Tous et l’Association Libérons nos ordis.

Les premiers financements nous ont permis de travailler sur la première étape du projet : une formation à destination des hébergeurs éthiques pour les aider à accompagner des associations dans leur transition numérique. Recherche d’intervenant⋅es, préparation du programme et de la logistique : la formation (c’est complet !) aura lieu à Paris, du 16 au 20 janvier 2023 (le programme en détails est par ici).

Enfin, en cette fin d’année, nous avons postulé à différents programmes étudiants pour constituer deux groupes de travail : un premier sur l’identité graphique d’Émancip’Asso (c’est en cours !), et un second sur la réalisation du site internet emancipasso.org (à venir).

Vous pouvez retrouver Angie et Anne-Laure présentant le projet en vidéo par ici.

un chaton patissier qui présente un nuage-gateau fait sur commande, tansdi qu'en arrière plan d'autres chatons cuisinent un autre nuage gâteau au millieu de leur village arbre-à-chats
Illustration CC BY David Revoy

ECHO Network : comprendre les besoins numériques de l’éduc pop, ici et ailleurs

2022 aura aussi été l’année de l’élaboration du projet européen « Ethical, Commons, Humans, Open-Source Network » (Réseau autour de l’Éthique, les Communs, les Humaines et l’Open-source) (ECHO Network, c’est un peu plus facile à mémoriser…). Mené par le mouvement d’éducation populaire des CEMÉA France, le projet rassemble 7 structures de 5 pays d’Europe (France, Belgique, Croatie, Allemagne, Italie). Leur point commun ? L’accompagnement, chacune à son niveau, des publics dans leur autonomie et leur émancipation.

L’objectif du projet est d’échanger sur les difficultés, les opportunités et les façons d’accompagner vers une transition numérique des publics que nos associations servent. Et la toile de fond : comment accompagner cette émancipation dans (voire par) un monde numérique centralisé chez les géants du web ?

La première rencontre de l’échange aura lieu à Paris du 14 au 17 janvier 2023. Ce séminaire d’ouverture va nous permettre de déblayer la thématique générale : accompagner la transition numérique des associations formant des citoyens et citoyennes. En savoir plus par ici.

Dessin de cinq iles en cercle, chacune avec des constructions d'une culture différente. Elles communiquent ensemble en s'envoyant des ondes, des échos.
Illustration CC BY David Revoy

Et ce n’est pas tout !

Transmission de connaissances

Avec Hubikoop (hub territorial de la région Nouvelle Aquitaine pour un numérique inclusif) nous avons débuté en septembre l’animation du parcours « Accompagnement à la découverte de services numériques éthiques » : 8 ateliers pour les acteurs et actrices de la médiation numérique en Nouvelle Aquitaine. Ce partenariat commence à faire émerger de nouvelles idées, que l’on vous racontera l’année prochaine !

Dans le cadre du projet PENSA avec l’Aix-Marseille Université, nous sommes intervenu⋅es en juin pour une formation de formateurs et formatrices sur la thématique « Logiciels et services libres pour l’émancipation numérique des citoyennes ». L’objectif final est de permettre aux enseignant⋅es de développer leurs compétences pour une utilisation critique du numérique en éducation.

Nous avons aussi mené diverses actions en lien avec l’AFPA et plus spécifiquement les personnes en charge de la formation des Responsables d’Espace de Médiation Numérique, pour transmettre davantage de connaissances sur le numérique éthique.

Framasoft est aussi entrée au sociétariat de la MedNum. Nos ambitions derrière ça ? Sensibiliser les acteurs de la médiation numérique aux outils libres, former les médiateurs numériques aux alternatives éthiques et outiller la coopérative elle-même d’outils libres.

Vous nous retrouverez enfin dans le livret « Le temps des conquêtes, les nouveaux horizons de l’ESS » publié par ESS France.

Des prises de positions importantes

L.A. Coalition (dont Framasoft est membre) s’est positionnée en avril sur le contrat d’engagement républicain : le collectif dénonce une source potentielle de litiges et de sanctions abusives de la part de l’administration ou des collectivités publiques au détriment des associations et fondations.

Les premières dérives du contrat d’engagement républicain ont rapidement vu le jour. Nous avons signé la tribune « La désobéissance civile relève de la liberté d’expression et du répertoire d’actions légitimes des associations », publiée dans l’Humanité en septembre : les libertés associatives sont essentielles et actuellement en danger.

Nous avons aussi signé la tribune « Pour que les communs numériques deviennent un pilier de la souveraineté numérique européenne » de Wikimédia France en juin. Les communs culturels font partie intégrante de l’objet social de Framasoft, les défendre est primordial !

Soutiens par convictions

Suite à l’annonce de sa situation financière très difficile cet été, nous avons soutenu le média NextINpact (veille numérique très qualitative) en achetant des abonnements « suspendus » que nous avons tirés au sort.

Nous avons aussi soutenu affordance.info (contenus qualitatifs sur le numérique et réflexions pertinentes de société) en migrant son blog d’un outil non libre (Typepad) à un outil libre (WordPress), le tout hébergé par nos soins.

Nous avons proposé un proxy Signal (messagerie libre) suite à un appel de la structure informant du blocage de son application par le régime iranien face aux révoltes actuelles.

Illustration CC BY David Revoy

 

Notre dessert partagé vous a plu ? Vous pensez que ces actions réalisées avec d’autres îles de notre archipel sont à encourager ? Sachez qu’elles aussi sont uniquement réalisables grâce à vous et à vos dons. Encore un grand merci !

 

Je soutiens les actions d’archipélisation de Framasoft

 

Framasoft, aujourd’hui, c’est plus de 50 000 € de dépenses par mois. Nous avons clos l’exercice comptable 2021 avec un déficit de 60 000 € (que des dons – plus généreux lors des confiprouts de 2020 – nous ont, heureusement, permis d’absorber).

À l’heure où nous publions ces lignes, nous estimons qu’il nous manque 133 000 € pour boucler notre budget annuel et nous lancer sereinement dans nos actions en 2023.
Si vous le pouvez (eh oui, en ce moment c’est particulièrement compliqué), et si vous le voulez, merci de soutenir les actions de notre association.

 

Je soutiens les actions de Framasoft

 

 




Les Connards Pro™, le système qui enferme les cons–

–sommateurs. Qui enferme les consommateurs. Ce dernier épisode inédit des Connards Professionnels™ vous explique les forces du capitalisme de surveillance, mais aussi ses faiblesses, et comment les consommateurs pourraient s’en émanciper (ce qui fait très très peur à nos chers Connards™).

L’ultime épisode inédit des Connards Pros™ sur le framablog !

Toute bonne chose a une fin, nous publions donc aujourd’hui le dernier des 4 épisodes inédits de ce travail… de connards, il faut bien le dire !

Le Guide du Connard Professionnel est un livre-BD scénarisé par Pouhiou et dessiné par Gee, placé dans le domaine public volontaire. Nos comparses viennent d’ailleurs de le publier en un joli livre, qui se télécharge librement mais s’achète aussi dans sa version papier si vous voulez soutenir les auteurs.

Ce livre libre est co-édité avec notre maison d’édition Des Livres en Communs.

couverture du guide du connard professionnel, le livre
Cliquez sur l’image pour télécharger et/ou acheter le livre.

 

Pour réussir à votre tour dans la profession de consultant en connardise, vous pouvez :

Réservez votre place pour la conf théâtralisée (8 déc. à Paris)

L’épisode que vous allez voir aujourd’hui est une adaptation de la conférence théâtralisée où les Connards Professionnels vulgarisent le Capitalisme de Surveillance et l’économie de l’attention.


Appuyez sur play pour voir l’extrait de la conférence correspondant à cet épisode

 

Depuis cette captation, Gee et Pouhiou ont intégralement retravaillé le texte de cette conférence théâtralisée, afin de le rendre moins dense, plus entraînant, bref : plus facile à aborder pour des personnes qui ne se passionnent pas forcément pour le numérique éthique !

Si les comparses comptent faire tourner cette conférence théâtralisée, nous n’avons pour l’instant que deux dates de programmées pour cette version Deluxe, Remasterisée, avec 13,37 % de connardise en plus garantie. Cela se passera sur Paris :

Nous espérons qu’il y aura des captations vidéos mais surtout d’autres représentations de cette conférence théâtralisée.

En attendant, voici le dernier épisode du guide, intitulé :

22. Conclusion : le SWOT de la connardise

Si vous regardez bien le capitalisme de surveillance, vous devez vous dire que ce système que j’ai peaufiné depuis des années est parfait.

Et vous avez raison, merci.

Pourtant, ce n’est pas parce qu’il est parfait qu’il est éternel. Pour qu’un système soit durable et résilient, il n’est pas inutile de revenir aux outils transmis en première année d’école du commerce, et de lui appliquer un bon vieux SWOT des familles.

Analysons donc ensemble les forces et faiblesses intrinsèques au capitalisme de surveillance (Strenghts and Weaknesses) ainsi que les opportunités et les menaces extérieures (Opportunities and Threats) dont nous devons nous préoccuper.

Une des grandes forces de ce système, c’est qu’il est très systémique : c’est-à-dire que tout se tient.

Ainsi, le pognon permet d’acheter de nouvelles technologies, pour capter plus de comportements, pour augmenter son influence culturelle et politique ce qui in fine rapporte plus de pognon.

C’est le cercle vertueux du capitalisme : tant qu’il y a des cons à essorer, y’a du liquide à se faire.

Or avec la surveillance par le numérique, l’essorage atteint des vitesses record. Parce que bon, mon papy, du temps béni de la Stasi, il gagnait déjà sa vie honnêtement en fichant ses congénères. Mais papy (respect et dividendes à lui ✊🤌) il fichait à la main, à l’ancienne : il faisait dans l’artisanal.

Si on compare son travail avec le fichage réalisé par la NSA aujourd’hui, on se rend compte que les services secrets des champions de la liberté sont beaucoup plus efficaces que ceux de la RDA.

L’autre force de ce système, c’est qu’il a désormais l’allure d’une évidence, d’une fatalité, d’une des lois naturelles qui régissent notre monde.

Car si l’informatique est partout et que ce que l’on code fait force de loi, alors pour contrôler le monde, il suffit de contrôler les petits cons qui codent.

Du coup, dès qu’on a un peu de pognon, on peut les acheter, les gamins. Et si vous ne voulez pas qu’ils se posent trop de questions sur les conséquences de ce qu’ils sont en train de coder, j’ai un secret : la méthode Agile.

Une des faiblesses qui existent dans notre beau système, ce sont ces va-nu-pieds en sandales bio qui prônent « l’hygiène numérique ».

Quand on leur donne le choix de la liberté entre Google Chrome, Apple Safari ou Microsoft Edge… ces salopiauds répondent « Firefox, parce que c’est pas fait pour le pognon ».

Quand on fait en sorte que leur téléphone Android ne soit plus qu’un gros capteur Google avec option agenda, ces malotrus répondent « non, j’ai un téléphone dégooglisé grâce à Murena ».

Heureusement qu’ils ne sont que quelques poignées d’hurluberlus, car ne nous cachons rien : c’est dégoûtant, l’hygiène numérique.

Une autre faiblesse que l’on doit éradiquer au plus vite : les bloqueurs de pub. Car la pub, c’est la base, c’est notre gagne-pain ! Sans la pub, tout le beau système de connard que j’ai construit s’effondre.

Or j’ai fait des efforts contre les bloqueurs de pubs. D’abord j’ai fait de la pédagogie pour bien faire rentrer dans le crâne des cons que bloquer la pub, c’est méchant. Que ça enlève le pain de la bouche des gratte-papier, qu’il faut que monde accepte de se javelliser le cerveau, sinon c’est tirer une balle dans le ventre creux des pauvres journaleux…

Puis j’ai carrément connardisé Adblock Plus. Pour bien expliquer aux cons : vous voulez bloquer la pub, prenez notre bloqueur de connards, c’est celui qui est le plus marketé, et promis : il ne laissera passer que la gentille pub.

Mais non : il se trouve toujours des hygiénistes dégoûtants pour dire aux cons d’installer Ublock Origin.

Heureusement, il reste de belles opportunités dans ce système de connard. Ainsi, la position de monopole permet de réécrire ce que doit être le numérique dans la tête des cons.

Ainsi, si vous dites « je veux une plateforme de diffusion de vidéos » à un informaticien, il pensera à PeerTube : un outil efficace pour faire un site où on peut créer des comptes, y mettre ses vidéos et les partager avec le reste du monde, sans avoir besoin d’une ferme de serveurs.

Mais si vous dites la même chose à un consommateur, il pensera monétisation, publicité, recommandations, suite du programme, émissions régulières… Bref, il pensera à une chaîne de télé, parce que c’est comme ça que fonctionnent les monopoles du domaine, à savoir YouTube et Twitch.

Une autre opportunité, c’est d’exploiter encore plus le petit personnel politique. Non parce qu’ils y prennent goût, à mes gros jeux de données. Ils ont bien compris que cela augmente la taille de leur petit pouvoir.

Car le pouvoir, c’est un peu comme le pognon : plus on en a, plus on en veut.

De fait le petit personnel politique, ça fait quelques piges qu’ils nous pondent deux lois sécuritaires par an. À vouloir copier mon beau modèle, ils finissent par le légitimer, et nous ouvrir la fenêtre des possibles.

Cependant, le Capitalisme de Surveillance est sous le coup de plusieurs menaces qui pourraient égratigner mon beau système : il s’agit donc de ne pas les ignorer.

En gros, ces menaces, ce sont tous les paltoquets, saligauds et autres pignoufs d’hygiénistes du logiciel libre, de l’anti-pub ou l’anti-surveillance… mais quand ils se multiplient entre eux.

Non parce que moi les libristes, tant qu’ils sont 15 dans leur slip en raphia, à se battre entre eux pour savoir si « Vim ou Debian », « Ubuntu ou chocolatine »… ça ne m’affole pas le pacemaker.

D’ailleurs, j’ai même essayé de récupérer leur mouvement d’un coup de rebranding. J’ai viré tous leurs bons sentiments politiques de « ouiiiii il faut que l’humain maîtrise l’informatique, il faut partager le savoir sous forme de communs », j’ai gardé la méthode de production, et j’ai collé un nom angliche qui pète bien : l’open source.

Alors ça a bien réussi, mon coup : l’open source est partout, le logiciel libre n’a plus une thune et est exsangue… Malgré ces efforts, tu as toujours des faquins de bisounours du code qui essaient de sortir du droit chemin des plateformes géantes.

Et voilà qu’ils te codent des PeerTube, des Mastodon, des Mobilizon, des NextCloud… des logiciels décentralisés que n’importe quel excité du clavier peut installer sur un serveur pour créer un cloud autonome, auto-géré, et synchronisé avec le reste de leur univers fédéré.

Non mais si ça prend leurs bêtises, les cons vont fuir les belles plateformes centralisatrices des géants du web pour aller héberger leurs vies numériques chez plein de petits hébergeurs à qui ils font confiance.

Une autre menace potentielle au capitalisme de surveillance, ce sont les associations qui s’organisent pour montrer les conséquences et les rouages de mon beau système.

Et que je peux pas vendre mes drones de surveillance à la police sans que La Quadrature du Net ne s’en mêle, et que je peux pas signer un contrat juteux entre Microsoft et l’Éducation Nationale sans que l’April ne gueule…

Or le capitalisme de surveillance est pudique : si l’on montre ses dessous, il devient timoré et peut presque (j’en frémis…) s’enfuir.

Alors certes, ces menaces sont réelles, mais pour qu’elles commencent à me faire peur, il faudrait que les cons se renseignent, se prennent en main, et rejoignent par milliers les zigotos qui font des associations d’utopistes : bref, faute de lutte collective à lui opposer, mon système de connard a de beaux jours devant lui.

C’est pourquoi, cher apprenti connard (et, ne nous interdisons aucune modernité : « chère apprentie connasse ») mon dernier mot sera pour toi : la balle est dans ton camp. Moi, c’est bon, j’ai construit mon bunker pour trinquer au frais lorsque le monde va cramer. Je te confie donc mon beau système.

C’est à toi désormais de prendre la relève. Ta mission, c’est de te sortir les doigts du fion, et de connardiser le digital pour que perdure le capitalisme de surveillance.

(Et que je touche mes dividendes.)

#OnCompteSurVous

#JeSuisCharlesHyppolite

Liens utiles




To understand and get started with PeerTube, check out the new Joinpeertube.org

2022 is definitely the year of our websites’ redesign: after the evolution of our services homepages, degooglisons-internet.org website and recently framasoft.org, it is now time for joinpeertube.org to get a makeover.

« Collectivise Internet / Convivialise Internet 🦆🦆 » Our new 3-year roadmap is funded by your donations.

You will find a short presentation of this roadmap on our Support Framasoft website.

➡️ Read all blogposts of this campaign (oct. – déc. 2022, mostly in French)

This website was launched on 28 February 2018 and redesigned once at the end of 2019. Its aim is to help those who have heard of PeerTube discover more about it and understand what it is. Indeed, it is not always easy for Internet users used to the web giants centralised video platforms to understand PeerTube specifics. The 2019 version of this website made possible to understand what PeerTube is for people with a good digital literacy. But we felt that was not always the case for a larger majority of Internet users.

In order to confirm this impression, we worked with the web agency La Coopérative des Internets, which conducted an audit of the website via user tests and suggested ways of improving it. The JoinPeerTube you are accessing today is the result of this collaborative work.

Let see what changed…

Less information, easier to understand

User testing revealed the homepage was too long and contained too much information, and that some informations were too technical. To give you an example, the tagline « free software to take back control of your videos » was not well understood. By using it, we assumed that people arriving on the website were familiar with the fact that software can provide online service (Software as a service mode). This is obviously not true for a large number of Internet users.

We have therefore simplified the wording: you will no longer find a mention of « software », PeerTube is now a tool that allows the creation of a video platform (and not an « instance », a term that only those in the know understood).

We have also simplified the texts so that they contain fewer explanations. This has greatly reduced the length of the homepage! And for those who would like to know more, we have added a section at the bottom of each page inviting you to consult the F.A.Q. (frequently asked questions). Very thorough and easy to use, the F.A.Q. is now directly accessible from the menu.

old and new JoinPeerTube homepages
On the left, the old JoinPeerTube homepage, on the right the new one.

A new menu to differentiate use cases

On this updated JoinPeerTube, new pages have been created, others have been deleted or modified. The aim of this restructuring is to provide more support for users in their specific use cases (e.g. not offering information about publishing content to someone who just wants to watch videos).

Old and new JoinPeerTube Menu
On the left, the old JoinPeerTube menu, on the right the new one.

 

The new homepage is now called What is PeerTube? because we have limited the information on it to the essentials. Useful for everyone, this page presents, in a few lines (and hopefully!), what PeerTube is. The section What do we find on PeerTube? encourages you to discover our own selection of quality content. By offering two different selections (one recommending PeerTube platforms, the other videos hosted on different platforms), we hope to provide a better understanding of the tool.

screenshot of the new section presenting our content selections (platforms and videos)
The new section presenting our content selections (platforms and videos)

The new Browse Content page allows you to search through the 600,000 videos and 1,000 platforms in the PeerTube network.This integrated search engine uses SepiaSearch, the search engine we have been maintaining since September 2020. The results are now displayed according to their type (among videos, channels and playlists), which is really convenient.

The Publish videos page is intended for video makers. After explaining in a few lines the interest of distributing your videos via PeerTube when you are a content creator, we present the two ways to join PeerTube:

  • by creating an account on an existing PeerTube platform
  • by creating your own PeerTube platform

screenshot section I'm getting started on PeerTube

The first proposal takes you to the Find a PeerTube Platform page which displays a list of platforms based on several criteria: profile type (the videomaker profile only offers platforms open to registration), topic(s), sensitive videos mode and language.

The second proposal takes you to the PeerTube technical documentation site where those with technical skills will find everything they need to start hosting their own PeerTube platform.

The PeerTube news page is still accessible from the menu. If you want to know about the features of the latest versions, and suscribe to the PeerTube newsletter, it is just one click away!

Expanding Contribution

As you know, PeerTube is a free-libre tool to which you can contribute in many ways. The PeerTube community is already very active, whether it be suggesting new features or improvements, submitting bug reports, creating plugins and themes, translating interfaces, improving documentation, creating tutorials, or responding to those who have difficulty using the tool.

By clicking on the Contribute orange button in the menu, you can discover three easy ways to contribute to the project.

screenshot page Contribute on JoinPeerTube

First way: suggest an idea or improvement on Let’s Improve PeerTube!, launched last July. We want to know what content creators, video-lovers and non-tech-savvy people miss from PeerTube or what changes/new experiences they would like to have. If you are not necessarily inspired, you can always vote for one of the 90+ ideas already posted. We’d like to take this opportunity to thank all the people who made these proposals and all those who voted.

Second way: participate in the funding of PeerTube. As you probably already know, PeerTube is a project financed by Framasoft, so funded by donations from our (mostly French and French-speaking) supporters. Framasoft is in charge of the financial management and the development of the project, among other things. The growing success of PeerTube means that we have to do more and more work to maintain and respond to the people who use it. Do you think we are going in the right direction? Then, if you have the desire and the means, we invite you to make a donation.

Third way: participate in PeerTube development. Whether you have programming skills or not, there will always be something to contribute. We have listed on a dedicated page how you can help. Don’t hesitate!

Making PeerTube easier to use

JoinPeerTube first versions highlighted how PeerTube is a great technical tool and allowed us to promote it to people with technical skills. Now that there are over 1000 PeerTube platforms, our new focus is to reach a wider, less digitally savvy audience to make it easy for them to understand what PeerTube is all about. We hope that this new version of the site will be useful and make PeerTube easier to use.

For those of you who are wondering where we are with PeerTube development, we remind you that a version 4.3 was released last September. You should also know that an RC (Release Candidate) version of V5 is now available. If all goes well, we will release the new major version of PeerTube within two or three weeks (time to fix the bugs that the RC will bring up). We will announce all the new features here very soon…

Framasoft donation bar on 2022 11 29th, at 54808€ over 200000

At the time of publishing, we are still missing 145 100 € to finance our yearly budget and make everything we want to do in 2023 happen. If you can (especially in these hard times) and if you want to, thanks for supporting our non-profit and our actions.

 🦆 Support Framasoft

Helpful links




Pour comprendre et commencer avec PeerTube, découvrez le nouveau Joinpeertube.org

L’année 2022 est décidément celle des refontes de nos sites web : après l’évolution des pages d’accueil de nos services, de notre site degooglisons-internet.org et dernièrement de framasoft.org, c’est au site joinpeertube.org de se refaire une beauté.

« Collectivisons Internet / Convivialisons Internet 🦆🦆 »

Les actions de notre nouvelle feuille de route étant financées par vos dons (défiscalisables à 66 %), vous pouvez en trouver un résumé complet sur le site Soutenir Framasoft.

➡️ Lire la série d’articles de cette campagne (oct. – déc. 2022)

Ce site, lancé le 28 février 2018 et déjà refondu une première fois fin 2019, a pour objectif de faire découvrir et comprendre ce qu’est PeerTube à toute personne qui en aurait entendu parler. Il n’est en effet pas toujours simple pour les internautes habitué⋅es aux plateformes de vidéo centralisées des géants du web de comprendre les spécificités de PeerTube. Si la version 2019 de ce site permettait à des personnes ayant un bon niveau de culture numérique de comprendre ce qu’est PeerTube, ce n’était pas toujours le cas pour une majorité d’internautes.

Afin de confirmer cette impression, nous avons travaillé avec l’agence web La Coopérative des Internets qui a réalisé un audit du site via des tests utilisateur⋅ices et nous a suggéré des pistes d’amélioration. Le JoinPeerTube auquel vous accédez aujourd’hui est le résultat de ce travail en collaboration.

On vous explique ce qui a changé.

Des informations moins nombreuses et plus faciles à comprendre

Les tests utilisateur⋅ices ont mis en évidence que la page d’accueil était trop longue et qu’on y trouvait trop d’informations, dont certaines étaient trop techniques. Pour vous donner un exemple, la phrase d’accroche « un logiciel libre pour reprendre le contrôle de vos vidéos » n’était pas bien comprise. En l’utilisant, nous supposions que les personnes arrivant sur le site étaient familières avec le fait qu’un logiciel peut fournir un service en ligne (mode Software as a service). Ce qui n’est évidemment pas le cas d’un nombre important d’internautes.

Nous avons donc simplifié le vocabulaire utilisé : vous ne trouverez plus mention de « logiciel », PeerTube est désormais un outil qui permet la création d’une plateforme vidéo (et pas d’une « instance », terme que seul⋅es les connaisseurs comprenaient).

Nous avons aussi simplifié les textes pour qu’ils contiennent moins d’explications. La longueur de la page d’accueil s’en voit grandement réduite ! Et pour celles et ceux qui souhaiteraient en savoir plus, nous avons ajouté en bas de chaque page une section incitant à consulter la F.A.Q. (foire aux questions). Celle-ci est très complète et facile d’utilisation et est désormais directement accessible depuis le menu.

 

screenshot de l'ancienne et de la nouvelle page de JoinPeerTube
A gauche, l’ancienne page d’accueil de JoinPeerTube, à droite la nouvelle.

Un nouveau menu pour différencier les usages

Sur ce nouveau JoinPeerTube, de nouvelles pages sont apparues, d’autres ont été supprimées ou modifiées. L’objectif de cette restructuration est d’accompagner davantage les internautes dans leurs usages spécifiques (par exemple, ne pas proposer des informations sur la publication de contenus à une personne qui veut simplement regarder des vidéos).

Screenshot de l'ancien et du nouveau menu de JoinPeerTube
A gauche, l’ancien menu de JoinPeerTube, à droite le nouveau.

 

La nouvelle page d’accueil s’intitule désormais C’est quoi PeerTube ? car nous avons limité à l’essentiel les informations y apparaissant. Utile à tout le monde, cette page permet, en quelques lignes, de comprendre ce qu’est PeerTube (enfin on l’espère !). La section Qu’est-ce qu’on trouve sur PeerTube ? permet de découvrir des contenus de qualité sélectionnés par nos soins. En proposant deux sélections différentes (l’une vous recommande des plateformes PeerTube, l’autre des vidéos hébergées sur différentes plateformes), nous espérons permettre une meilleure compréhension de l’outil.

screenshot de la nouvelel section présentant nos sélections
La nouvelle section présentant nos sélections de contenus (plateformes et vidéos)

 

La nouvelle page Parcourir les contenus propose de chercher parmi les 600 000 vidéos et 1 000 plateformes du réseau PeerTube. Ce moteur de recherche intégré utilise SepiaSearch, le moteur de recherche que nous proposons depuis septembre 2020. Les résultats y sont désormais affichés en fonction de leur type (parmi vidéos, chaînes et listes de lecture), ce qui est vraiment pratique.

La page Publier des vidéos s’adresse aux vidéastes. Après avoir expliqué en quelques lignes l’intérêt de diffuser ses vidéos via PeerTube lorsqu’on est vidéaste, on y explicite les deux manières de rejoindre PeerTube :

  • en créant un compte sur une plateforme PeerTube
  • en créant sa propre plateforme PeerTube.

screenshot de la section "Je me lance sur PeerTube"

La première méthode vous dirige sur la page Trouver une plateforme PeerTube qui vous affiche une liste de plateformes en fonction de plusieurs critères : type de profil (le profil vidéaste ne propose que des plateformes ouvertes à l’inscription), thématique(s), mode de traitement des vidéos sensibles et langue.

La seconde méthode vous dirige vers le site de documentation technique de PeerTube (principalement en anglais) où les personnes ayant des compétences techniques trouveront tous les éléments pour se lancer dans l’hébergement de leur propre plateforme PeerTube.

La page dédiée aux actualités de PeerTube est, elle, toujours accessible dans le menu. Si vous souhaitez connaître les fonctionnalités offertes par les dernières versions, c’est là qu’il faut cliquer !

Développer la contribution

On le rappelle, PeerTube est un outil libre auquel vous pouvez contribuer de nombreuses manières. La communauté de contribution autour de PeerTube est déjà bien active, que ce soit pour suggérer de nouvelles fonctionnalités ou améliorations, nous transmettre des rapports de bugs, créer des plugins et des thèmes, traduire les interfaces, améliorer la documentation, réaliser des tutoriels d’utilisation ou répondre à celles et ceux qui rencontrent des difficultés à l’utilisation de l’outil.

En cliquant sur le beau bouton orange Contribuer situé dans le menu, on vous propose de découvrir trois manières de contribuer facilement au projet :

screenshot de la section "Contribuer à PeerTube"

Première proposition : suggérer une fonctionnalité ou une amélioration de l’outil sur le site Let’s improve PeerTube! (en anglais), lancé en juillet dernier. Nous avons besoin de savoir ce qui manque aux créateurs de contenu, aux amateurs de vidéo et aux personnes non-tech. Selon vous, quelles fonctionnalités pourrions-nous développer pour rendre l’usage de PeerTube encore plus simple et agréable ? Si vous n’êtes pas forcément inspiré⋅es, vous pouvez toujours voter pour l’une des 90 propositions déjà postées. On en profite pour remercier toutes les personnes à l’origine de ces propositions et toutes celles qui sont allées voter.

Deuxième proposition : participer au financement de PeerTube. Vous le savez sûrement déjà, PeerTube est un projet financé par Framasoft, donc par les dons des personnes qui nous soutiennent. Framasoft assure, entre autres, la gestion budgétaire et le développement du projet. Le succès croissant de PeerTube implique un travail toujours plus important de maintenance et de réponses aux personnes qui l’utilisent. Vous pensez que nous allons dans le bon sens ? Alors, si vous en avez l’envie et les moyens, nous vous invitons à faire un don.

Troisième proposition : participer au développement de PeerTube. Que vous ayez des compétences en programmation ou non, il y aura toujours de quoi faire pour contribuer. Nous avons listé sur une page dédiée (en anglais) comment vous pouvez nous aider. N’hésitez pas !

Faciliter l’utilisation de PeerTube

Les premières versions de JoinPeerTube mettaient en évidence en quoi PeerTube est un chouette outil technique et nous a permis de le valoriser auprès des personnes ayant des profils techniques. Maintenant qu’il existe plus de 1000 plateformes PeerTube, notre nouveau cap est de toucher un public plus vaste, moins à l’aise avec le numérique, afin de lui permettre de comprendre aisément ce qu’est PeerTube. On espère donc que cette nouvelle version du site vous sera utile et facilitera l’utilisation de PeerTube.

Pour celles et ceux d’entre vous qui se demanderaient où on en est du côté du développement de PeerTube, on vous rappelle qu’une version 4.3 est sortie en septembre dernier. Sachez aussi qu’une version RC (Release Candidate) de la V5 est désormais disponible. Si tout va bien, nous publierons la nouvelle version majeure de PeerTube d’ici deux ou trois semaines (le temps de corriger les bugs que la RC va faire remonter). Nous vous annoncerons par ici toutes ses nouveautés très prochainement…

Barre de dons de Framasoft au 29 novembre 2022 à 54 808 € sur 200000€.

À l’heure où nous publions ces lignes, nous estimons qu’il nous manque 145 100 € pour boucler notre budget annuel et nous lancer sereinement dans nos actions en 2023.

Si vous le pouvez (eh oui, en ce moment c’est particulièrement compliqué), et si vous le voulez, merci de soutenir les actions de notre association.

 🦆 Soutenir Framasoft

Ressources à consulter




Les Connards Pro™, exploiter les données des cons–

–sommateurs. Les données des consommateurs. Ce nouvel épisode inédit des Connards Professionnels™ vous explique à quoi cela sert de capter un maximum de données, comment manipuler les masses, et ainsi comment gagner au grand jeu du capitalisme de surveillance.

Le retour des Connards Pros™ avec des épisodes inédits !

Afin de fêter leur retour, le Framablog souhaite publier, chaque semaine pendant un mois, un des épisodes inédits de ce travail… de connards, il faut bien le dire !

Le Guide du Connard Professionnel est un livre-BD scénarisé par Pouhiou et dessiné par Gee, placé dans le domaine public volontaire. Nos comparses viennent d’ailleurs de le publier en un joli livre, qui se télécharge librement mais s’achète aussi dans sa version papier si vous voulez soutenir les auteurs.

couverture du guide du connard professionnel, le livre
Cliquez sur l’image pour télécharger et/ou acheter le livre.

 

Pour réussir à votre tour dans la profession de consultant en connardise, vous pouvez :

Réservez votre place pour la conf théâtralisée (6 & 8 déc. à Paris)

L’épisode que vous allez voir aujourd’hui est une adaptation de la conférence théâtralisée où les Connards Profesionnels vulgarisent le Capitalisme de Surveillance et l’économie de l’attention.

Appuyez sur play pour voir l’extrait de la conférence correspondant à cet épisode

 

Depuis cette captation, Gee et Pouhiou ont intégralement retravaillé le texte de cette conférence théâtralisée, afin de le rendre moins dense, plus entraînant, bref : plus facile à aborder pour des personnes qui ne se passionnent pas forcément pour le numérique éthique !

Si les comparses comptent faire tourner cette conférence théâtralisée, nous n’avons pour l’instant que deux dates de programmées pour cette version Deluxe, Remasterisée, avec 13,37 % de connardise en plus garantie. Cela se passera sur Paris :

Nous ignorons s’il y aura des captations vidéos, donc nous vous conseillons vivement de réserver en signalant votre présence sur les événements Mobilizon ci-dessus (ou de les contacter, par email : leur pseudo chez connard point pro, pour voir à quelles conditions les faire venir près de chez vous !)

En attendant, voici un nouvel épisode du guide, intitulé :

21. Que faire de l’attention des cons ?

La pensée de connard systémique a ceci de beau qu’elle permet d’exprimer sa connardise à tous les niveaux.

Qu’il s’agisse de manipuler le langage en faisant passer des comportements sociaux pour des « données personnelles », de manipuler les consommateurs pour qu’ils nous offrent leurs interactions sur un plateau et se mettent à haïr le respect de leur consentement… Tout cela demande un soin du détail que seul un maître connard peut offrir.

Si vous réussissez cette première étape, bravo, vous êtes devenu Éleveur-Entrepreneur, responsable d’une belle usine qui gère 15 bestiaux au mètre carré. Et les cons dans tout ça…? Ben c’est le bétail !

En bon éleveur, vous l’avez gavé de votre foin attentionnel, produit localement par d’autres bestiaux (les créateurs de contenus), et enrichi à la pub. C’est ainsi que vous le trayez régulièrement pour avoir de bon gros jeux de données comportements tout frais.

Cependant, chacun son métier : vous êtes fermier, pas boucher ni fromager. Donc ces comportements tout frais, vous allez les confier au Marché. Ça tombe sous le sens.

Dans le milieu, ceux qui transforment les datas, ce sont les courtiers de données. Et si vous les regardez attentivement, ils ont tous une tête à s’appeler Adam. Ne me demandez pas pourquoi : c’est la loi du Marché.

Avoir de beaux jeux de données croisés entre plusieurs sources, c’est donc avoir des informations très précises sur les cons, leurs futurs votes, leurs futurs crédits, leurs futures baises, leurs futurs achats…

Alors qu’est-ce qu’on leur fourgue à tous ces consommateurs qu’on connaît si bien, comme si on les avait espionnés ? C’est quoi la base, le pain quotidien de tout connard digital ? C’est quoi le gras qui huile les rouages de notre système et arrondit nos ventres insatiables, hein…? C’est… la publicité.

La publicité, tout le monde y goûte, tout le monde en dépend. On a aiguisé les esprits, on a filé des arguments à gauche comme à droite, bref : la publicité, c’est inattaquable.

Alors la publicité c’est bien, mais ce n’est qu’une base à partir de laquelle on va commencer à élever le niveau de la connardise.

Ainsi, si on veut sortir des techniques de gagne petits de la data, ce qui marche bien en ce moment c’est d’aller vendre du consommateur aux banques et aux assurances.

Il faut dire que vu le pognon qu’elles brassent, ces entreprises n’aiment pas beaucoup le risque. Donc quand nous on se pointe devant elles avec des comportements tout frais, tout croisés, tout prédictibles… Pour elles c’est les moissons, Noël et la chandeleur en même temps… bref : c’est la fête du blé.

Quand votre niveau de pognon engrangé commence à faire honneur à votre niveau de connardise, et qu’au passage vous vous êtes faits quelques amis dans la finance… c’est le moment de passer aux choses sérieuses.

Par exemple en commençant à vous faire ami-ami avec les états en leur vendant vos services. Alors ils appellent ça « partenariat public-privé », mais pour nous c’est juste un moyen de leur vendre à prix d’or de quoi mieux espionner leurs cons à eux (ils appellent ça des contribuables, mais en bons connards nous ne jugeons pas : chacun ses perversions).

L’objectif, ici, c’est d’arriver à augmenter votre degré de connardise, améliorer votre influence et vos connaissances dans les services de l’État, pour finir par aller prendre le pognon chez ceux qui le captent le mieux : les politiques.

On l’a vu avec Cambridge Analytica, influencer des élections, telles que le Brexit ou l’accession de Trump au trône, c’est simple comme une pub Facebook. Encore faut-il trouver des laquais pour rémunérer pour notre connardise.

Or, les hommes et femmes politiques, c’est en quelque sorte notre petit personnel à nous. Un qui l’a bien compris, c’est le milliardaire Steve Bannon (respect et dividendes à lui ✊🤌), qui a commandité à Cambridge Analytica des expériences scientifiques pour trouver comment manipuler en masse les étatsuniens, puis qui a appliqué les résultats avec ses sites de propagande tels que BreitBartNews.

De moindres connards s’arrêteraient là, satisfaits d’avoir influencé des états, et la conscience politique de nations entières. Mais ce serait louper le coche, le point d’orgue, l’apogée d’une carrière de connard professionnel : la capacité d’influencer une culture toute entière.

Les champions sur la question, c’est Google. À l’époque où « blogosphère » était un mot moderne, ils ont inventé le score des blogs, le « blog rank », qui te permet de grimper dans les recherches Google. Pour faire grimper ton blog rank, il fallait faire grimper toutes les statistiques… mises en avant par Google.

Bref, il fallait souscrire à la course au clic. C’est ainsi que tout le monde s’est mis à écrire de la même manière, le fameux « web rédactionnel », qui fait que vous pouvez pas lire deux paragraphes tranquille sans qu’un truc vous saute aux yeux.

Le blog rank, et plus tard les affichages des visites avec Google Analytics, c’est au cœur de la méthode de Google. Donner des outils statistiques aux personnes qui créent et publient du contenu, et leur afficher bien en gros les courbes des statistiques qui intéressent Google et ses annonceurs.

Il n’en faudra pas plus à un homo numéricus normalement constitué : il n’aura plus d’autre envie que de voir les chiffres grossir.

C’est ce qu’il s’est passé avec le phénomène des YouTubers. Grâce à ses manipulations statistiques, Google a transformé une bande de joyeux drilles qui se croyaient revenus au temps des radios libres, en de jolies marionnettes, bien soumises au sacro-saint algorithme.

Liens utiles




Les Connards Pro™, capter les données des cons–

–sommateurs. Les données des consommateurs. Cet épisode inédit des Connards Professionnels™ vous invite à découvrir le monde merveilleux du capitalisme de surveillance, où l’on donne ce qui nous est le plus personnel : notre attention.

Le retour des Connards Pros™ avec des épisodes inédits !

Afin de fêter leur retour, le Framablog souhaite publier, chaque semaine pendant un mois, un des épisodes inédits de ce travail… de connards, il faut bien le dire !

Le Guide du Connard Professionnel est un livre-BD scénarisé par Pouhiou et dessiné par Gee, placé dans le domaine public volontaire. Nos comparses viennent d’ailleurs de le publier en un joli livre, qui se télécharge librement mais s’achète aussi dans sa version papier si vous voulez soutenir les auteurs.

couverture du guide du connard professionnel, le livre
Cliquez sur l’image pour télécharger et/ou acheter le livre.

 

Pour réussir à votre tour dans la profession de consultant en connardise, vous pouvez :

En attendant, voici un nouvel épisode du guide, intitulé :

20. Capter l’attention des cons

Ce que l’on apprend lorsqu’on expérimente sur les humains, c’est que ce n’est qu’une première étape. C’est un marchepied, en quelque sorte, qui vous le mettra à l’étrier d’une aventure à laquelle tout Connard dans l’âme se doit d’aspirer : manipuler une culture, une civilisation entière.

Pour ce faire, il vous faudra œuvrer à façonner un système si complexe, si ingénieux, si empreint de tout votre art que tout apprenti connard ne pourra que vous considérer comme un Maître.

Le chef-d’œuvre qui m’a pris tout mon temps, durant ces quelques années de hiatus, a été nommé par des spécialistes le : « Capitalisme de surveillance ».

Il va de soi qu’un système aussi raffiné se doit d’être exhaustif et intègre. Il est ici nullement question de créer une mécanique dont moi et les miens serions exempts. Cela indiquerait aux rouages de ce système qu’ils pourraient s’en extraire, rendant tout le système caduc dès le départ.

Or, si l’on pense en bon connard, un bon système est un système où l’on se soustrait à toutes les contraintes, souffrances et autre pénibilités… en les faisant ruisseler sur autrui. Dans un système de type capitaliste, l’astuce consiste à être riche, pour se nicher au sommet de la pyramide, quitte à chier sur les épaules de ceux d’en dessous.

Ainsi, seuls les pauvres seront affectés par la pénibilité du système. Or, ne nous le cachons pas, ils l’ont bien mérité : ils (ou, pour user de leur argot vernaculaire : « iels ») sont pauvres.

Tout comme il est inutile de deviner qui de la poule ou de l’œuf… Ne perdons pas de temps à savoir qui était là en premier : la pauvreté ou la bêtise. Le fait est qu’il s’agit d’un cycle naturel où l’un entraîne l’autre.

C’est en profitant de ce cercle vertueux que j’ai pu imposer à la populace mes termes, mon vocabulaire. C’est ainsi grâce à ma connardise que l’on parle communément de « données personnelles ».

C’est intéressant d’appeler nos comportements des données. Cela fait penser à quelque chose que l’on donne. Comme si le commun des consommateurs avaient le pouvoir. Le choix. La responsabilité de leurs données.

En tant que connards professionnels, il ne faut jamais laisser nos cibles penser avec leurs propres mots : cela pourrait leur donner des idées. Ainsi, n’oublions pas que dans « données personnelles », j’ai ajouté le mot personnelles.

Voilà que le consommateur moyen va se dire que ses comportements sont ses données à lui, presque sa propriété. D’un simple mot, j’isole cette personne, je le condamne à être un individu, séparé des autres individus, ne pouvant plus s’allier à eux pour remettre collectivement en cause mon beau système.

Or, si l’on regarde d’un pur point de vue technique, le web a été fait par et pour des animaux sociaux, et n’existe que pour faire du lien. Aucun de vos comportements ne concerne que vous, ils racontent votre rapport aux autres, aux choses, au monde.

De votre date de naissance (qui indique ce que faisaient, ce jour-là, les corps qui vous ont fait naître), à votre géolocalisation (qui indique qui vous allez voir, avec qui, et souvent pourquoi), vos comportements sont quasi exclusivement sociaux.

De ces comportements sociaux, on peut très vite déduire un portrait assez fin de chaque personne dans sa relation aux autres. Dans le jargon, on appelle cela un « graphe social ».

Vous avez certainement, sur votre smartphone, des applications qui ont accès à votre carnet de contact (elles vous remercient, d’ailleurs). Ce qui signifie que si vous tournez autour d’un nouveau crush, cette application saura quand vous rentrez son 06 dans vos contacts.

Si, par ailleurs, j’ai accès à un autre fichier qui note la géolocalisation de téléphones identifiés par leur numéro, je peux donc savoir qui tourne autour de qui, quand est-ce que les téléphones passent la nuit ensemble et donc à quel moment leur faire afficher des publicités pour des sous-vêtements affriolants, des préservatifs ou des pilules du lendemain.

C’est bien là l’avantage des comportements sociaux : on peut noter ce que l’on veut sur qui l’on veut, car même les personnes qui n’ont pas de smartphone ou de comptes sur les plateformes ont des amis qui en ont.

Notez bien cependant qu’il est important de respecter la loi comme un connard. Ainsi, puisqu’en France il est interdit de ficher les opinions politiques ou orientations sexuelles, je m’interdis scrupuleusement de ficher quiconque comme « votant à droite » ou comme « pédé comme un sac à dos ». Par contre, j’ai beaucoup de monde dans les cases « souhaite la réduction de ces charges qui nous étouffent » et « intéressé par la culture gaie ».

Ne désespérons pas : la route est longue mais la loi change, et même un pas après l’autre : on avance. Récemment, le fichage des opinions politiques et orientations sexuelles a été autorisé à la police française. C’est là un signe d’espoir qui nous permet de rêver.

Il faut dire que, à l’instar de la délation et de la collaboration, le fichage est une tradition culturelle forte. Pour le web, cela a commencé avec les cookies. Le principe de base était simple : des nerds et des gratte-papier faisaient des sites web qui attiraient l’attention de gens, qui consommaient les contenus.

Les premiers connards du web s’en sont rendu compte, et sont allé à la source. Tiens petit nerd qui se dit webmestre, tu veux des belles statistiques pour savoir ce qui est lu ? Voici Bastards Analytics, tu le mets sur ton site web et ça ajoute juste un petit cookie. Et toi, gratte-papier, tu veux des jolies polices d’écriture pour ton blog ? Alors utilise mes Bastards fonts, y’aura juste un cookie, mais ce sera tellement joli.

Et puis… puis ça a explosé. Les cookies de mes copains installaient mes cookies, les pisteurs se partageaient des données entre eux… Ah, ça ! Quand on a pas connu on ne se rend pas compte, mais aux débuts du web marchand, y’en avait partout, c’était beau, c’était… hyper communautaire, en fait.

Et c’est là qu’est arrivée la tuile. LE truc que nos lobbyistes n’ont pas pu dérailler.

RGPD.

Il fallait demander aux consommateurs leur consentement, comme s’ils savaient ce qui est bon pour eux ! Alors oui, bien sûr, au début c’était la tuile, mais cela fut en fait un bon défi de connard. Comment faire en sorte que les consommateurs détestent le consentement au moins autant que nous ?

On peut vous dire que pour arriver à un tel résultat, y’a des années d’expérience et (oui, osons le mot) du talent.

Appuyez sur play pour voir l’extrait de la conférence correspondant à cet épisode

 

Liens utiles




Frama.space : du cloud pour renforcer le pouvoir d’agir des associations

Framasoft souhaite mettre à disposition, d’ici 3 ans,  jusqu’à 10 000 espaces « cloud » collaboratifs, gratuitement, à destination des associations et collectifs militants. 40 Go et de nombreuses fonctionnalités à se partager entre 50 comptes sur un espace de type https://monasso.frama.space. Voici pourquoi nous nous lançons ce défi technique, humain, et politique.

« Collectivisons Internet / Convivialisons Internet 🦆🦆 »Les actions de notre nouvelle feuille de route étant financées par vos dons (défiscalisables à 66 %), vous pouvez en trouver un résumé complet sur le site Soutenir Framasoft.

➡️ Lire la série d’articles de cette campagne (oct. – déc. 2022)

Basé sur la solution collaborative libre Nextcloud, votre espace Frama.space vous permettra de gérer (sur votre ordinateur ou smartphone) :

  • des fichiers de tous types et de les partager
  • des agendas, publics ou privés
  • des contacts
  • des photos (partageables sous forme d’albums)
  • des projets (méthode Kanban)
  • de la documentation (en mode wiki)
  • des visioconférences (jusqu’à une dizaine de personnes)
  • l’édition en ligne ou à plusieurs, de documents bureautiques (textes, feuilles de calculs, présentations, etc.)

Tout ça gratuitement.

Gif de Barack Obama faisant un mic drop

Mais derrière cet objectif technique déjà ambitieux (et coûteux : soutenez-nous !), un autre, politique, l’est plus encore : nous voulons accroître les capacités de collaboration numérique libre de ces structures, afin de renforcer leur pouvoir d’agir.

 

Soutenir ce projet

 

Image d'accueil du service Frama.space, avec une choupi-licorne (choupicorne ?) soufflant des bulles de liberté et de collaboration.
Page d’accueil du service Frama.space. Illustration CC by-sa David Revoy

 

Pourquoi Frama.space ?

Pour comprendre la volonté de Framasoft d’investir autant d’énergie dans un projet aussi ambitieux, il va nous falloir prendre un peu de hauteur et de recul historique sur la question associative.

D’abord, nous affirmons sans ambage que nous constatons, ces dernières années, une volonté politique de l’État de… dépolitiser le champ associatif.

Les gouvernements et les institutions n’apprécient que moyennement de voir des militant·es associatifs leur réclamer des comptes, les bousculer pour lever le voile et élever la voix sur les indignités et injustices. Qu’il s’agisse d’environnement, de logement, de santé publique, etc., les associations sont, depuis la loi de 1901, l’un des fers de lance des luttes sociales.

Afin de leur ôter cette épine du pied, nous assistons depuis des années à une forme de « ringardisation » du statut associatif par les grandes institutions publiques. Pour cela, elles n’ont pas hésité à supprimer les emplois aidés, à réduire le montant des subventions ou à les orienter sur du financement « d’investissement » en finançant des appels à projets spécifiques, plutôt que du financement de « fonctionnement » (participant par exemple aux salaires ou aux frais associatifs, et donc plus pérenne). Le discours ambiant et médiatique décrédibilise peu à peu le rôle et les actions des associations, actrices du contrat social.

À cela s’ajoute un mouvement de « marchandisation » des associations. Elles sont d’une part de plus en plus mises en concurrence, notamment par la communication qui devient un élément central — parfois au détriment des actions associatives — pour pouvoir être plus visibles et compenser la perte de subventions par des crowdfundings, collectes, et campagnes. Framasoft n’y échappe d’ailleurs pas.

D’autre part, le courant de l’entrepreneuriat social engage les associations à copier les modèles de l’entreprise privée jugée plus efficace, plus moderne, plus innovante…

Enfin, de belles saloperies et machineries comme les « contrats à impacts » transforment les associations en blanchisseuses sociales des entreprises du CAC40.

Schéma du Contrat à Impact Social
Vous avez bien compris ce schéma (officiel) du « Contrat à Impact Social » : ce sont des entreprises (pardon « des investisseurs privés » ) qui décident quelles sont les associations (pardon « acteurs sociaux » ) à soutenir, et vont financer leur action (pardon « besoin social » ). Mais cette action sera remboursée par l’État (pardon « puissance publique » ), donc avec nos impôts, à l’entreprise en cas de « succès » 😱 . Vous voyez venir les problèmes que cela pose ? Parce que nous, oui ! Ce fonctionnement dit tellement de choses sur notre société et sa façon de percevoir les associations qu’il mériterait un article à part entière.

 

Mème Drake : "Signer un Contrat à Impact Social" non. "Faire vivre le contrat social" : oui.

 

Mais en plus d’assécher les capacités d’action des associations, il y a maintenant la volonté de les faire « marcher au pas », par exemple en les contraignants à signer des textes tels que le « Contrat d’Engagement Républicain » , aux contours flous et sujet à interprétation, dans lequel les associations doivent s’engager formellement à respecter les lois et les symboles de la République sous peine de se voir refuser toute subvention publique. Cela place de facto toute structure qui, par exemple, refuserait de chanter la Marseillaise, dans une situation où elle pourrait perdre des financements publics.

Pour résumer, on peut dire qu’il y a une volonté à ne garder que les « bonnes » associations : celles qui se tiennent sages et ne viennent pas questionner les pouvoirs en place. Une espèce de paternalisme, si ce n’est de caporalisation, de la part de l’État envers le mouvement associatif. Pas de souci pour les collectivités à soutenir un club de bridge, ou une association sportive d’aïkido. Mais pour les associations d’aide aux migrants, ou pour une association de défense de l’environnement, l’État semble avoir acté que toute structure qui ne va pas dans le sens de sa politique est nécessairement contre lui, et devient potentiellement ennemie.

Dépolitisation, caporalisation, ringardisation, marchandisation sont autant d’attaques contre les libertés associatives, et donc contre leur capacité à faire évoluer le contrat social et la société toute entière.

mème du choix entre deux boutons. Bouton 1 "se vendre aux entreprises", bouton 2 : "se prosterner devant l'État" En dessous, les associations ne savant pas sur quel bouton appuyer.

Or, nous pensons que dans un monde où les crises se multiplient, et sont amenées à se multiplier encore, l’importance des actions de la société civile, et notamment des associations, permettent d’envisager des réponses réellement innovantes et résilientes, adaptées aux terrains, proches des citoyen⋅nes, impliquées, et éloignées des propositions tièdes et centralisées portées par les gouvernements (ex. : numéros verts, Grenelle de MachinTruc, …) ou le système capitaliste (ex : greenwashing, start-ups « à impact », tech « for good »…).

Framasoft est une association, fière de son statut, et souhaite soutenir — autant que possible et dans la mesure de ses moyens — les associations les plus fragiles, mais dont la société a radicalement besoin.

Mais… quel rapport avec le numérique ?

Aujourd’hui, les pratiques collaboratives numériques peuvent permettre aux associations d’être plus réactives et efficaces, en actionnant des réseaux et des personnes plus rapidement, en facilitant l’implication de bénévoles ou de partenaires, en permettant de mieux répartir les pouvoirs et la responsabilité, en encourageant la transparence, etc.

Cependant, ces collectifs et associations sont parfois à la peine avec les outils numériques, qui permettent parfois (ce n’est pas systématique) d’accroître leur pouvoir d’agir. Notamment, elles disposent rarement de parcours de formation adaptés à leurs besoins ou leurs moyens et elles doivent composer avec des niveaux de compétences numériques très différents dans leurs structures.

Par ailleurs, même lorsqu’elles ont des connaissances et des facilités avec le numérique, elles sont poussées à utiliser des outils toxiques (ex : Google Workspace, Microsoft 365, Zoom, etc) dont elles n’ont pas réellement la maîtrise, et qui, surtout, sont rarement en cohérence avec leurs objectifs et leurs valeurs.

Formulé autrement : les associations sont souvent consommatrices d’un numérique pensé par des acteurs qui veulent créer un monde dont les associations ne veulent pas. La réciproque est aussi vraie : le monde rêvé par ces acteurs du numérique ne veut pas d’associations puissantes, politiques, proposant d’autres façons de vivre ensemble.

En effet ces entreprises (notamment les GAFAM) ont une vision du monde très libérale où l’argent compte plus que la générosité. Où le succès compte plus que la solidarité. Où un profit immédiat vaut plus qu’un impact à long terme sur la planète.

Leurs outils comportent donc, dans leur code même, une partie de cette vision du monde. Et les utiliser revient non seulement à renforcer le pouvoir de ces entreprises et à leur donner raison, mais empêche aussi le développement de pratiques adaptées à des structures dont l’objet n’est pas la croissance ou le profit.

Les associations sont passées en « mode survie »

Les associations sont coincées entre ces entreprises qui les utilisent pour blanchir leurs pratiques, et l’État qui a rompu la confiance avec elles en jouant du bâton et de la carotte. Elles sont passées en mode « survie ».

Nous pensons qu’il s’agit réel danger pour une société bien portante et une démocratie vivante. Mais c’est peut-être, aussi, une occasion d’agir.

Alors : on fait quoi ?

On prend un risque.

On tire la langue au diable. On lui montre qu’on existe, qu’on est là, et qu’on est prêt à en découdre, comme à se lever et se casser. Qu’il ne nous impressionne pas. Qu’on est libres.

Pour Framasoft, à notre modeste hauteur, cela se traduit par un acte qu’on pense politique, une « recette » en quatre étapes : 1) rendre visibles les alternatives ; 2) faciliter leur découverte et leur usage ; 3) aider à faire émerger des communautés ; 4) participer avec humilité à leur donner du pouvoir, de la confiance, et soyons dingues – un peu d’espoir.

C’est ce que pratique Framasoft depuis 20 ans (Framalibre, Framakey, Framabook, etc), et sans doute plus encore ces 10 dernières années avec notre campagne « Dégooglisons Internet ».

Et c’est ce que nous comptons faire dans les prochaines années avec notre feuille de route « Collectivisons Internet / Convivialisons Internet » (COIN COIN pour les intimes), qui s’adresse particulièrement aux associations et collectifs militants.

Banquet simple, dans une jardin partagé, où des animaux mascottes du libre sont servis par des canards
Collectivisons, convivialisons – Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

 

Dans ce cadre, si on applique la recette ci-dessus à une offre d’espace « cloud associatifs » cela pourrait se traduire comme suit.

1) Rendre visible Nextcloud

Le service Frama.space repose sur la suite collaborative libre Nextcloud. Il existe plusieurs logiciels libres pour faire du « cloud », mais aucun ne nous semble aussi riche en fonctionnalités et en promesses que celui-ci.

Partage de fichiers, agendas, gestion de tâches et de projets, documentations collectives, visio-conférences, … Nextcloud, même s’il est perfectible, permet de répondre immédiatement à un grand nombre de besoins.

Cependant, si vous prenez au hasard 100 personnes dans la rue, il est peu probable que plus de 5 (et encore, on est sympas) vous disent avoir déjà entendu parler de ce logiciel. D’ailleurs, si vous faites partie des 95%, rassurez-vous, la suite est justement faite pour vous 🙂

1️⃣ Donc, notre première mission sera de faire connaître et d’accroître la notoriété de Nextcloud aux personnes francophones. Par des conférences de sensibilisation, des webinaires, des ateliers, la production de vidéos et tutoriels ou… en offrant la possibilité d’utiliser gracieusement Nextcloud via le service Frama.space.

Graphique (en allemand) présentant les parts de marché des suites collaboratives en ligne en 2022. Microsoft 365 représente 48,1%, Google Apps 46,4%, "Autres" 4,2%. Sources : Statista, Enlyft
Bon, c’est de l’allemand certes, mais le graphique est plutôt parlant : sur les marchés des suites collaboratives en ligne en 2022, Microsoft 365 représente 48,1%, Google Apps 46,4%, « Autres » 4,2%. Nextcloud ne représentant lui même qu’un petit pourcentage de ces 4,2%. Duopole, vous avez dit ?

 

2) Faciliter l’accès à Nextcloud

Il existe déjà des centaines d’hébergeurs proposant une offre Nextcloud. De Gandi à OVH ou Hetzner (pour les « gros » hébergeurs), d’IndieHosters à Zaclys, en passant par Paquerette (pour les membres du collectif CHATONS).

Mais, dès qu’il s’agit d’avoir accès à un espace collaboratif dédié (pour une entreprise, une association, une collectivité), il faut être prêt à payer. Et c’est bien normal : libre ne veut pas dire gratuit, et ces hébergeurs ont des coûts (humains, matériels et financiers) qu’ils doivent bien répercuter.

Cependant, le problème financier reste entier pour les petites associations ou les collectifs militants que nous évoquions en début d’article. Certaines ont un budget inférieur à 1 000€ par an pour leurs actions, et ne peuvent tout simplement pas consacrer 10% ou 20% de ce budget à un outil numérique. Donc : elles utilisent massivement Microsoft 365 ou Google Workspace (souvent en version limitée gratuite, ou à prix cassé).

À Framasoft, nous sommes convaincu⋅es qu’il faut faire comprendre le prix des choses, mais nous sommes aussi convaincu⋅es que le prix ne doit pas être la barrière qui empêche les gens de s’émanciper. Nous avons donc mis en place sur Frama.space une infrastructure technique capable d’accueillir gratuitement des milliers d’espaces Nextcloud (type https://mon-asso.frama.space), à destination des structures qui n’ont pas ou peu de moyens.

Une licorne déguisée en cosmonaute (avec une passoire sur la tête) marche sur les nuages et souffle des bulles. Dans ces bulles, on retrouve des cubes symbolisant le travail en commun (dossiers, boite à outils, livres, machine à écrire, boulier, etc.).
Frama.space – Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Un autre frein identifié au passage au libre, est la relative difficulté technique à mettre en place et à maintenir une solution logicielle. Avec Frama.space, la gestion technique de votre espace est déléguée à Framasoft. Nous nous chargeons de fournir une instance à jour, correctement sécurisée, directement utilisable, et à la maintenir dans le temps.

Ces espaces Frama.space comportent la plupart des outils nécessaires pour collaborer entre membres, y compris une suite bureautique collaborative en ligne (par défaut Collabora Online), mais le référent du Frama.space pourra lui préférer OnlyOffice).

Pour préserver le modèle économique des entreprises ou CHATONS déjà en place, nous limiterons cette offre à des structures ayant des besoins mesurés (50 comptes max, 40Go d’espace tous utilisateurs confondus) et des moyens modestes (c’est-à-dire n’étant pas prêtes à franchir le cap de payer chez un autre hébergeur).

2️⃣ C’est pourquoi notre seconde mission est de mettre gratuitement à disposition, sur les trois ans à venir, jusqu’à 10 000 espaces Nextcloud, pour des petites structures associatives ou militantes.

Capture écran montrant le fonctionnement de Collabora Online au sein de Nextcloud
Les espaces Frama.space sont livrés avec Collabora Online par défaut (OnlyOffice en alternative), ce qui permet une collaboration à plusieurs au sein d’un même document bureautique (texte, tableur, présentation, etc)

3) Aider à faire émerger une communauté Nextcloud francophone

Nextcloud est un logiciel complet, mais parfois complexe (« Comment synchroniser mon agenda sur mon smartphone ? », « Comment faire pour partager mon budget prévisionnel en ligne ? » « Comment rédiger collaborativement le compte-rendu de notre Assemblée Générale ? »).

Il existe de nombreuses documentations en ligne. Mais encore faut-il les trouver, et pouvoir se les approprier. Par ailleurs, certaines personnes sont à l’aise avec les documentations écrites, d’autres avec les courtes vidéos explicatives, d’autres encore préfèrent être accompagnées par des formations.

Or, aujourd’hui, alors que Nextcloud compte plus de 40 millions d’utilisateur⋅ices dans le monde, il n’existe pas réellement de communauté francophone autour de ce logiciel. Il existe certes des espaces plutôt réservés aux personnes administrant techniquement le logiciel, mais reconnaissons qu’il ne s’agit pas vraiment de lieux d’entraide destinés aux personnes découvrant le logiciel.

Par ailleurs, chaque hébergeur et utilisateur a tendance à exploiter ses espaces Nextcloud « dans son coin ». Nous voudrions d’une part qu’ils puissent se connaître, partager leurs expériences (leurs difficultés comme leurs succès). Mais nous souhaitons aussi pouvoir réfléchir collectivement aux apports que cette communauté souhaiterait apporter au logiciel. Par exemple, pouvoir importer une liste d’utilisateurs sans passer par la ligne de commande, améliorer l’onboarding, c’est-à-dire l’accueil des nouveaux utilisateurs, etc. Discuter ensemble de nos besoins communs nous permettra d’améliorer ensemble Nextcloud pour qu’il corresponde mieux à nos attentes et nos pratiques.

3️⃣ C’est pourquoi notre troisième mission consistera à faire émerger une communauté Nextcloud francophone, notamment par le biais d’un forum d’entraide.

Capture écran du forum d'entraide de Frama.space
https://forum.frama.space : le forum d’entraide Frama.space, et plus largement autour des usages de Nextcloud

4) Utiliser Nextcloud comme outil d’empuissantement

Vous l’aurez compris, notre objectif est ici avant tout politique : fournir des planches, des marteaux et des clous à des associations, afin qu’elles puissent construire et développer leurs projets, leurs envies, sans être liées à des entreprises dont la vision du monde est aux antipodes de la leur.

Le fait que Frama.space ne s’adresse qu’à des petites associations ou collectifs permet aussi d’envisager d’autres possibilités intéressantes.

Par exemple, cela nous permet d’envisager de mettre les associations en contact entre elles beaucoup plus facilement, puisqu’elles utiliseront le même outil (petite parenthèse technique : Nextcloud est un outil fédéré, c’est à dire qu’il est simple de « connecter » entre eux différents espaces associatifs pour partager par exemple des dossiers privés pour une action ou des communiqués de presse en communs).

Cela nous permet aussi de faire circuler de l’information relative aux questions associatives très facilement (par exemple en informant sur un nouveau texte de loi, sur une mobilisation spécifique, etc.).

Par ailleurs, en interrogeant régulièrement les utilisatrices et utilisateurs par le biais de courtes enquêtes, Framasoft pourra développer, ou faire développer, de nouvelles fonctionnalités à Frama.space. Par exemple, en intégrant une application de gestion de membres et cotisations, ou une application de comptabilité basique. Notre volonté est de faire en sorte que l’outil corresponde au mieux aux besoins réels et exprimés des personnes qui utilisent Frama.space.

Enfin, nous souhaitons permettre à chacune et chacun d’améliorer sa capacité à collaborer et à coopérer. Nous savons qu’il faudra, pour cela, faire évoluer certaines pratiques. Par exemple, il existe de nombreux outils de prises de notes collaboratives (de Google Docs à Framapad, en passant par… Nextcloud), mais combien d’associations expérimentent au quotidien une situation de réunion à distance ? Une transparence radicale de l’information ? Une gestion de projet en ligne ?

Nous pensons que Frama.space peut être une formidable porte d’entrée pour réfléchir (avec d’autres ?) à ces changements de pratiques, sans pour autant laisser sur le carreau celles et ceux qui ont du mal avec les outils numériques.

L’objectif étant ici de faire en sorte que Frama.space ne soit pas qu’un simple outil numérique de plus, mais plutôt le support à l’expérimentation de pratiques numériques nouvelles, qui pourront se refléter dans des changements au sein de l’organisation (par exemple en finir avec Le-président-tout-puissant, ou La-secrétaire-qu’on-cantonne-aux-compte-rendus).

4️⃣ Notre quatrième mission (le boss de fin de jeu) sera donc d’accompagner les bénéficiaires de Frama.space vers un accroissement de leurs compétences coopératives, afin d’amplifier leur pouvoir d’agir.

Vidéo (© Nextcloud GmbH) de présentation de Nextcloud Hub, représentative des outils que vous pourrez retrouver dans Frama.space (hors Nextcloud mail).

Agrandir la taille du gâteau

Une autre façon de comprendre Frama.space, c’est que Framasoft ne souhaite pas prendre une part du gâteau du « marché de Nextcloud » : nous ne vendons rien, et nous souhaitons au contraire que l’écosystème autour de Nextcloud se développe et se renforce, y compris pour les structures commerciales.

Nous essayons plutôt d’agrandir la taille du gâteau, pour que chaque entreprise ou chaton puisse en avoir une part raisonnable.

Nous pensons en effet qu’en augmentant significativement la base d’utilisateur⋅ices de Nextcloud à l’aide de Frama.space, qu’en travaillant les aspects entraide et accompagnement, et qu’en favorisant les développements et améliorations du logiciel, cela crédibilisera cette solution libre par rapport à celles de Microsoft ou de Google.

Comment ça va se passer ?

Bien. Enfin… on l’espère !

Tout d’abord, si vous êtes un ou une responsable d’une association correspondant aux critères de sélection, vous pouvez d’ores et déjà candidater. Nous prévoyons d’ouvrir quelques centaines d’espaces d’ici fin décembre 2022, puis nous ferons une pause de 3 mois environ dans les inscriptions afin de stabiliser les choses, récolter les premiers retours, et apporter les corrections et améliorations les plus demandées.

Si la candidature de votre association correspond aux critères mais n’est pas validée, pas de souci : nous rouvrirons les inscriptions régulièrement à partir du second trimestre 2023 afin d’atteindre 10 000 espaces actifs fin 2025. Inscrivez-vous à la Newsletter Framaspace pour avoir les dates des périodes d’inscription.

Si vous êtes une entreprise, une école, une mairie, une « grosse » association, alors nous sommes sincèrement désolé·es, mais nous ne pouvons vous accueillir sur Frama.space. Cependant, comme nous vous le disions, de nombreuses autres alternatives à Frama.space existent ! Voir notamment cette réponse dans notre Foire Aux Questions qui pourra vous orienter.

Une fois votre candidature validée (le processus étant manuel, cela peut prendre jusqu’à 30 jours !), vous recevrez un lien vous permettant de vous identifier sur votre espace (de type https://mon-asso.frama.space) et commencer à utiliser votre espace Frama.space. Vos membres pourront s’y inscrire (par lien d’invitation) ou vous pourrez directement créer leurs comptes.

Par dessus les nuages un groupe de licornes volent et ont des activités que l'on peut avoir dans le cloud (lire, compter, clamer, faire de la musique, peindre, planter des graines, partager des fichiers, chercher, réparer, etc.)
Frama.space accueil – Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Mais…

À ce stade, nous ne pouvons que vous féliciter de nous avoir lu jusqu’ici. 🙂 Cependant, nous imaginons qu’il vous reste pas mal de questionnements.

« Quelles sont les applications utilisables ? », « Comment protégez-vous mes données et mes utilisateurs ? », « Comment personnaliser mon espace ? », « Frama.space, c’est centraliser des données, mais je croyais que Framasoft voulait décentraliser Internet ?! »

Nous avons tenté de répondre à ces questions (et bien d’autres) dans notre Foire Aux Questions. N’hésitez pas à aller y jeter un œil. Si vous n’y trouvez pas votre réponse, posez nous vos questions en commentaire de cet article, nous tâcherons d’y répondre de notre mieux.

Découvrir Frama.space

Nous avons besoin de vous

Nous pensons qu’un service réalisé par une association pour des associations a du sens.

Frama.space est, techniquement, le projet le plus ambitieux mené par Framasoft à ce jour.

C’est aussi le plus coûteux. C’est aussi une des raisons qui explique que, contrairement aux services « Dégooglisons Internet » type Framapad ou Framadate, nous ne pouvons pas l’ouvrir sans limite ni discrimination.

Offrir jusqu’à 10 000 espaces, pouvant accueillir jusqu’à 500 000 personnes, c’est clairement une prise de risque financière pour Framasoft.

Surtout quand nous voulons les offrir, justement, à un public désargenté. Ajoutez à cela des crises sociales, énergétiques, économiques qui ont déjà mis plus que le pied dans la porte, et vous comprendrez que ce projet se fera très probablement à perte pour Framasoft. Nous rappelons que 98% des ressources de l’association provient de vos dons.

Barre de dons de Framasoft au 15 novembre 2022 à 33821 € sur 200000€.

À l’heure où nous publions ces lignes, nous estimons qu’il nous manque 166 200 € pour boucler notre budget annuel et nous lancer sereinement dans nos actions en 2023.

Nous avons donc besoin de votre soutien pour réussir le pari Frama.space, mais nous pensons sincèrement qu’un service réalisé par une association pour des associations a du sens.

Si vous le pensez aussi, que vous bénéficiez d’un Frama.space ou pas, nous avons donc besoin de votre soutien, dès maintenant, afin de nous « aider à aider » ces milliers de structures non seulement à quitter les GAFAM et à mettre leurs outils en cohérence avec leurs valeurs, mais aussi et surtout à mieux agir, à mieux coopérer, à mieux créer du lien. À mieux faire société, ensemble.

🦆 Découvrir Frama.space 🦆 Soutenir ce projet

(Médias : lire notre communiqué de presse)




De la friture sur le Fediverse ?

Nous vous avons proposé déjà trois articles qui font écho à l’actualité récente autour de Mastodon en voici un 4e, celui d’Aral Balkan, traduit pour vous par Framalang. Le héraut du SmallWeb insiste avec humour sur un point en effet crucial : la taille géante de certaines instances, due à la conception technique même du Fédiverse, risque d’être problématique…

Donc, après :

Voici Is the fediverse about to get Fryed ?

Traduction Framalang :  Claire, Fabrice, goofy, Henri-Paul, jums

Le Fédiverse va-t-il stephenfrire ?

(Ou « Pourquoi chaque pouet est aussi potentiellement une attaque par déni de service »)

par Aral Balkan

bandeau du compte mastodon de Fry, avec sa tête (homme âgé barbu souriant) en médaillon. le compte annonce (au moment de sa capture 5 pouets, 0 abonnements 27 000 abonnés"
Stephen Fry est une célébrité outre-Manche  : écrivain, humoriste, acteur et vedette de la TV (sa page Wikipédia)

 

Stephen est un gros poisson dans une petite mare (oui, j’en ai d’autres en réserve).

Attention : le Fédivers est sur le point de frire. Stephen Fry(re) bien sûr.

À la suite du récent rachat de Twitter par un milliardaire proto-fasciste immature, des gens ont fui1 vers le Fédiverse2. Parmi eux, certains avaient, au moins sur Twitter, des millions de followers, comme Greta Thunberg et, plus récemment, Stephen Fry3

— Eh bien, c’est sûrement une bonne chose, non ? Tout le monde va parler du Fédiverse, de la décentralisation, et peut-être même de ce Small Web dont tu parles tout le temps, Aral, non ?

Eh bien, oui et non… Trop de bonnes choses tue les bonnes choses. Et, dans le Fédiverse actuel, les bonnes choses seraient les « comptes populaires ». En fait, cela pourrait bien être fatal (pour les instances Mastodon). Je vais essayer de détailler dans cet article ce que je veux dire en prenant mon propre compte comme exemple.

Comment tuer un Mastodon(te)

(indice : en étant bavard quand vous êtes populaire)

Inutile de le préciser, je ne suis pas une célébrité.
Et pourtant, dans le Fédiverse, je me retrouve dans une situation un peu unique dans laquelle :

1. J’ai ma propre instance Mastodon, juste pour moi4.
2. Je suis suivi par pas mal de personnes. Plus de 22 000, pour être précis5.
3. Je suis beaucoup de personnes, et j’aime vraiment avoir des conversations avec elles (je pense que c’est ce que les jeunes branchés appellent « l’engagement »).

Malheureusement, la combinaison de ces trois facteurs a créé la tempête parfaite6, ce qui veut dire que désormais, chaque fois que je poste quelque chose qui suscite beaucoup d’engagement, je finis par conduire une attaque par déni de service contre moi-même.

Mastodon : déni de service en tant que service ?

Hier, c’était mon anniversaire.
Et, bien sûr, j’ai posté sur ce sujet depuis mon instance Mastodon.

tête d'Aral qui fait l'andouille sur un pouet de mastodon et demande en anglais : "qui a deux pouces et 46 ans aujourd'hui ?"

J’ai eu pas mal de réponses. Et, pour être poli, j’ai commencé à répondre à tout le monde avec des messages de remerciements. Oh non, mon pauvre naïf ! Qu’est-ce que tu n’avais pas fait ?

Je vais laisser mon ami Hugo Gameiro, qui gère masto.host et héberge mon instance, expliquer ce qui s’est passé ensuite7 :

Vous avez beaucoup d’engagement et cela sollicite beaucoup Sidekiq8.

Prenez, par exemple, votre message d’anniversaire. En plus de demander à des milliers de serveurs de traiter votre demande de réalisation (on appelle ça des « jobs ») pour propager votre message (pour 23 000 abonnés, disons 3 000 serveurs), votre serveur au moment de la création de votre message va créer 3 000 jobs Sidekiq. Et comme votre Sidekiq n’a que 12 threads, traiter 3 000 jobs va prendre du temps puisqu’il ne peut en traiter que 12 à la fois.
Ensuite, pour chaque réponse à ce message, 3 000 jobs sont à nouveau créés, afin que vos abonnés puissent voir votre réponse sans avoir à changer de serveur ou aller sur votre profil. Et puis, si vous répondez à votre réponse, 3 000 jobs supplémentaires sont créés, etc.
Si vous répondez aux 100 réponses que vous avez reçues en 10 minutes (en supposant que l’estimation de mon nombre de serveurs est correcte), vous créez 300 000 jobs Sidekiq. C’est pour cela que ça bouchonne.

Mais qu’est-ce que tout cela veut bien dire, si on omet le jargon technique ?
Eh bien, que je parlais trop en étant trop connu de tous.

tableau de bord de sidekiq avec plusieurs graphiques et des chiffres qui montrent un pic de fréquentation que le logiciel a du mal à traiter
Voilà à quoi ressemble un embouteillage sur Mastodon.

Alors, quelle est la solution ?
Eh bien, il n’y a qu’une chose à faire quand vous vous retrouvez dans ce pétrin : agrandir votre instance Mastodon9. Le problème ? Ça commence à coûter cher.
Avant la dernière migration de Twitter10, je payais environ 280 €/an (un peu plus de 20 €/mois) pour mon instance Mastodon grâce à un partenariat que j’avais avec Hugo depuis le début. Cette semaine, je l’ai agrandie avec un plan à 50 €/mois. Et ce n’est toujours pas assez, comme le montre mon message d’anniversaire, donc Hugo a gentiment suggéré de me proposer un plan sur mesure.
Le problème n’est pas résolu pour autant, il est juste repoussé (sauf si cet article énerve tout le monde, bien sûr).
Heureusement, comme j’ai ma propre instance, la seule personne pénalisée par cette dépense supplémentaire, c’est moi. Mais que se serait-il passé si j’étais sur une instance publique gérée par quelqu’un d’autre ?

Tu déconnes, Elon ?

tweet iroique d'Aral en anglais ; Silicon Vallée : on va rendre les gens dépendants en leur filan des sucreries gratuites pour qu'ils ne se rendent pas compte qu'on les trait comme des vaches à lait / Elon Musk : faisons-les payer 8 dollars par moi pour les sucreries

Si Elon Musk voulait détruire mastodon.social, l’instance phare de Mastodon, il lui suffirait de s’y inscrire11.
Heureusement, Elon n’est pas assez intelligent pour ça.

Je plaisante, bien sûr… Eugen bannirait très probablement son compte dès qu’il le verrait. Mais ça illustre un problème : Elon est facile à bannir. Stephen Fry l’est beaucoup moins. C’est un véritable trésor national pour nous tous. On ne le bannit pas comme ça.
Et pourtant, Stephen peut lui aussi (bien qu’involontairement) coûter très cher aux gens qui gèrent des instances Mastodon, simplement en rejoignant l’une d’elles12..
La solution, pour Stephen tout du moins, est simple : il devrait gérer sa propre instance personnelle.
Ou demander à quelqu’un de le faire à sa place, comme je le fais13.
Gérer sa propre instance apporterait aussi à Stephen un autre bénéfice : il serait automatiquement vérifié. Après tout, si vous parlez à, mettons, @stephen@social.stephenfry.com, vous pouvez être certain que c’est bien lui parce que vous savez qu’il gère son propre domaine.

Des instances personnelles à la rescousse



Mon discours au Parlement européen sur les problèmes avec la Big Tech et les approches différentes que proposent Mastodon, le Fédiverse, et le Small Web.

— Attends, je suis largué… Tu ne viens pas de dire que les instances personnelles étaient une partie du problème ?
— Oui et non : elles le sont et elles ne devraient pas l’être.

Si ActivityPub (le protocole) et Mastodon (un serveur qui adhère à ce protocole) avaient été conçus pour promouvoir la décentralisation, alors avoir plus d’instances sur le réseau ne serait pas un problème. En fait, ça serait même le signe d’un réseau décentralisé sain.
Cependant, ActivityPub et Mastodon ont été conçus de la même manière que la Big Tech / Big Web : pour encourager des services qui hébergent le plus d’utilisateurs14 possible.
Cette architecture est à la fois complexe (ce qui la rend difficile et coûteuse à héberger) et très efficace pour la Big Tech (où les choses sont centralisées et passent à l’échelle verticalement, et où le but est d’avoir / de contrôler / d’exploiter autant d’utilisateurs que possible).
Dans la Big Tech, le coût initial pour passer à l’échelle est subventionné par de nombreuses sociétés de capital-risque (des personnes riches investissant dans de nouveaux business d’extraction et d’exploitation – ce que la Silicon Valley appelle des startups – dans le but de devenir encore plus riches), et ça mène à ces silos géants15 que sont aujourd’hui les Google, Facebook et Twitter.
Toutefois, à la différence de la Big Tech, le but avoué du Fédiverse est de décentraliser les choses, pas de les centraliser. Du coup, comment pourrions-nous atteindre l’opposé des buts de la Big Tech en adoptant leurs architectures de base ?
Lorsque vous adoptez le design de quelque chose, vous héritez aussi des critères de réussite qui ont mené à ce design. Si ces critères de réussite ne correspondent pas à vos objectifs, vous avez un sacré problème.
Pour le dire plus simplement :
N’adoptez pas les critères de réussite de la Big Tech, sinon vous deviendrez la Big Tech.

Ce n’est pas la taille qui compte

Aujourd’hui, il y a une équivalence entre la taille de mastodon.social (l’instance gérée par Eugen) et le succès de Mastodon (le logiciel créé par Eugen). C’est très dangereux. Plus mastodon.social grossit, plus il va ressembler à Twitter.
Je peux presque vous entendre crier : « Mais Aral, c’est fédéré ! Au moins, il n’y a pas de verrous sur mastodon.social ! ».
Et c’est vrai.
Vous savez ce qui est également fédéré ? L’e-mail.
Avez-vous déjà entendu parler de cette petite et vieille instance appelée Gmail ? (Ou peut-être les termes « adopte, étend, étouffe » ?)
Savez-vous ce qui arrive à votre e-mail si Google déclare (à tort ou à raison) que vous êtes un spam ? Personne ne voit votre e-mail.
Vous savez ce qui se passe si mastodon.social bloque votre instance ? Des centaines de milliers de gens (bientôt des millions ?) ne pourront plus décider d’afficher ou non vos messages.
Que se passe-t-il quand votre instance bloque mastodon.social ? Absolument rien.
C’est un réel déséquilibre des puissances.

La décentralisation commence par soi-même

Mastodon est non-lucratif, et je n’ai pas de raison de croire qu’Eugen n’ait pas les meilleures intentions du monde. Et pourtant, la décentralisation commence par se décentraliser soi-même.
C’est dans l’intérêt du Fédiverse que mastodon.social donne le bon exemple en limitant sa taille volontairement.
En fait, ça devrait même être intégré au logiciel. Les instances Mastodon devraient être empêchées de croître au-delà d’une certaine taille. Les instances qui sont déjà trop grosses devraient avoir des moyens d’encourager les gens à migrer vers des plus petites.
En tant que communauté, nous devrions aborder les grandes instances comme des tumeurs : comment pouvons-nous les détruire pour qu’elles ne soient plus un danger pour l’organisme ?
En poussant ce raisonnement, on arrive au concept du Small Web, un internet où nous possédons et maîtrisons notre propre lieu (ou nos propres lieux).

Cliquez sur l’image pour voir une vidéo (sur aperi.tube, une instance PeerTube) : Aral expliquant ce qu’est pour lui le Small Web


Small is beautiful! (Petit c’est mieux) (octobre 2022) : Qu’est-ce que le Small Web et pourquoi en avons-nous besoin ?

 

Cui-cui ?

Je ne dis pas que les protocoles et applications actuels du Fédiverse peuvent, vont, ou même devraient évoluer vers le Small Web16. Pour l’instant, le Fédiverse est un palliatif inestimable qui fournit un lieu plus sûr que les fosses septiques centralisées de la Silicon Valley.

Le temps que durera le palliatif dépendra de notre capacité à résister à la centralisation. Les designs des serveurs et des protocoles qui incitent au passage à l’échelle vertical ne rendront pas forcément cette tâche plus facile. Et pourtant, il y a des moyens de pression sociaux que nous pouvons utiliser pour contrer leurs effets.

La dernière chose qu’on souhaite, c’est qu’une poignée de Zuckerbergs au petit pied gouvernent le Fédiverse. Ou pire encore, que vous deveniez vous-même un de ces mini-Zuckerbergs.

J’aime le fait que le Fédiverse existe. Et j’ai le plus grand respect pour les efforts gargantuesques qui lui sont dédiés. Mais je suis aussi très préoccupé par les décisions prises en termes d’architecture qui incitent à la centralisation, et non à la décentralisation. Je nous implore de reconnaître cela, pour limiter les risques du mieux que nous le pouvons, pour nous efforcer d’apprendre de nos erreurs, et pour faire encore mieux demain.
Gens d’ActivityPub et de Mastodon :
Considérez-moi comme votre canari dans une mine de charbon
« Cui-cui ! Cui-cui ! Cui-cui ! »

 

*Si vous souhaitez soutenir la Small Technology Foundation, qui est sans but lucratif : https://small-tech.org/fund-us