Sortie du documentaire Terms And Conditions May Apply

Terms And Conditions May Apply, est le titre d’un documentaire qui semble tout aussi intéressant que salutaire, a fortiori après l’affaire PRISM.

Lorsque l’on crée gratuitement un compte sur Google, YouTube, Facebook, Twitter, Amazon (dont la typographie compose le titre de l’image ci-dessous), on accepte également de souscrire à un contrat d’utilisation qui, s’il était lu et compris jusqu’au bout, devrait normalement nous faire rebrousser chemin.

Mais comme « personne ne lit ces contrats » et que « tout le monde se trouve sur ces réseaux sociaux », alors on participe nous aussi à nourrir ces monstres qui sucent en toute légalité nos données.

En attendant sa sortie le mois prochain, nous en avons traduit l’accueil sur le site officiel. Et peut-être même, qui sait, que nous participerons à son sous-titrage.

Terms And Conditions May Apply

Termes et conditions applicables

Terms And Conditions May Apply

(Traduction : Lamessen, sinma, calou, Asta)

En cliquant sur le bouton de la page précédente, vous avez accepté de regarder la bande-annonce suivante :

<a href="http://vimeo.com/92630460" title="Vidéo de Vimeo" iframe='‘ >

De plus, vous acceptez de voir le film à l’une de ces séances.

Vous avez également accepté les termes et conditions suivants :

1) Tout ce que vous faites ici nous appartient

  • Tout ce que vous publiez ou fournissez sur ce site sera considéré comme la propriété des auteurs de ce site pour toujours.
  • Si dans le futur, il nous devient possible de lire vos pensées, nous avons le droit, mais non l’obligation, de les prendre également.

2) Nous ne sommes responsables de rien

  • Nous ne sommes pas responsables de toute confusion qui pourrait résulter de ces termes, que nous reconnaissons avoir été écrits pour être aussi confus que possible.
  • Si vous êtes blessé d’une quelconque manière ou mourrez lors de l’usage de ce site, ou en regardant « Termes et conditions applicables », nous n’en sommes responsables sous aucun motif.
  • Si votre souffrance mène à notre souffrance, vous pouvez être tenu responsable des dommages.

3) Comment nous partageons vos informations

  • Nous ne partagerons vos informations qu’à l’intérieur de notre propre système, et avec nos filiales.
  • Nos filiales pourront partager vos informations avec des tierces personnes.
  • Ces tierces personnes pourront partager vos informations avec d’autres, et ainsi de suite.

4) Pour votre sécurité

  • Nous pouvons êtres amenés à partager votre adresse IP, votre localisation, l’heure de votre visite et d’autres informations que vous nous donnez en connaissance de cause ou non avec des entités gouvernementales.
  • Nous pouvons être contraints de ne pas vous informer et vous renoncez à tout besoin d’excuses.
  • En utilisant ces services, vos informations peuvent être stockées par des entités légales en Utah, ou d’autres installations. Nous ne sommes pas responsables de quoi que ce soit.

5) Délicieuses collations

  • Tout cookie que nous installerons sur votre navigateur pourra vous tracker et voir où vous allez sur le Web. La suppression de ces-dits cookies pourra provoquer la régénération de ceux-ci, puisque nous voulons vraiment savoir où vous avez été et ce que vous faites.
  • À partir de ce moment, ceux-ci seront appelés « cookies zombies ».

6) En échange de ces services

  • En échange de votre visite sur ce site, vous avez consenti à publier un message indiquant que vous avez visité ce site sur Facebook. Ne pas le faire peut entraîner des poursuites judiciaires.
  • En outre, et avec les même peines applicables, vous avez aussi accepté de regarder le film « Termes et conditions applicables », en tout ou partie des moyens suivants&nbsp;: théâtre, VOD, SVOD, DVD, avion, bateau de croisière, hôtel ou mur de bâtiment.

7) Résiliation

Si vous estimez ces conditions d’utilisation non raisonnables, ou pour savoir quels autres usages vous avez accepté en utilisant un téléphone portable, un site Web ou une application, cliquez ici maintenant.




Geektionnerd : DuckDuckGo

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Source :

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




La nouvelle ère numérique selon Assange : l’âge de la surveillance généralisée ?

Deux membres influents de Google (et donc d’Internet), Eric Schmidt et Jared Cohen, ont récemment publié le livre The New Digital Age (La Nouvelle ère numérique).

Nous vous en proposons ci-dessous la critique cinglante de Julian Assange qui n’hésite pas à affirmer que « l’avancée des technologies de l’information incarnée par Google porte en elle la mort de la vie privée de la plupart des gens et conduit le monde à l’autoritarisme ».

Lorsque Google s’associe ainsi avec le gouvernement américain, son fameux slogan a du plomb dans l’aile et la menace plane…

La banalité du slogan de Google « Ne soyez pas malveillant »

The Banality of ‘Don’t Be Evil’

Julian Assange – 1er juin 2013 – New York Times
(Traduction : Goofy, agui, P3ter, godu, yanc0, Guillaume, calou, Asta, misc, Gatitac, Martinien + anonymes)

« La Nouvelle ère numérique » présente un programme étonnamment clair et provocateur de l’impérialisme technocratique, signé de deux de ses principaux apprentis-sorciers, Eric Schmidt et Jared Cohen, qui élaborent les nouveaux éléments de langage destinés à asseoir la puissance états-unienne sur le monde pour le 21e siècle. Ce langage reflète l’union sans cesse plus étroite entre le Département d’État et la Silicon Valley, incarnée par M. Schmidt, le président exécutif de Google, et par M. Cohen, un ancien conseiller de Condoleezza Rice et de Hillary Clinton, qui est maintenant directeur de Googles Ideas. Les auteurs se sont rencontrés dans le Bagdad occupé de 2009, où ils ont décidé d’écrire ce livre. En flânant parmi les ruines, ils furent excités à l’idée que les technologies de consommation de masse étaient en train de transformer une société laminée par l’occupation militaire des États-Unis. Ils ont décidé que l’industrie des technologies pourrait être un puissant agent de la politique étrangère américaine.

Le livre fait l’apologie du rôle des technologies dans la refonte du monde des nations et des citoyens en un monde semblable à celui des superpuissances dominantes, de gré ou de force. La prose est laconique, l’argumentaire sans détour, la philosophie d’une banalité affligeante. Mais ce n’est pas un livre destiné à être lu. C’est une déclaration majeure destinée à nouer des alliances.

« La Nouvelle ère numérique » est, au-delà de toute autre considération, une tentative par Google de se positionner comme incarnant une vision géopolitique de l’Amérique — la seule et unique entreprise capable de répondre à la question « Où doit aller l’Amérique ? ». Il n’est pas surprenant qu’une sélection imposante des plus farouches bellicistes ait été amenée à donner sa bénédiction à la puissance séduisante du « soft power » occidental. Il faut, dans les remerciements, donner une place de choix à Henry Kissinger, qui, avec Tony Blair et l’ancien directeur de la CIA Michael Hayden, a fait à l’avance les éloges du livre.

Dans celui-ci, les auteurs enfilent avec aisance la cape du chevalier blanc. Un saupoudrage libéral de précieux auxiliaires de couleur politiquement corrects est mis en avant : des pêcheuses congolaises, des graphistes au Botswana, des activistes anti-corruption à San Salvador et des éleveurs de bétail masaïs analphabètes du Serengeti sont tous convoqués pour démontrer docilement les propriétés progressistes des téléphones Google connectés à la chaîne d’approvisionnement informationnelle de l’empire occidental.

Les auteurs présentent une vision savamment simplifiée du monde de demain : les gadgets des décennies à venir ressembleraient beaucoup à ceux dont nous disposons aujourd’hui : simplement, ils seraient plus cool. Le « progrès » est soutenu par l’extension inexorable de la technologie de consommation américaine à la surface du globe. Déjà, chaque jour, un million d’appareils mobiles supplémentaires gérés par Google sont activés. Google, et donc le gouvernement des États-Unis d’Amérique, s’interposera entre les communications de chaque être humain ne résidant pas en Chine (méchante Chine). À mesure que les produits deviennent plus séduisants, de jeunes professionnels urbains dorment, travaillent et font leurs courses avec plus de simplicité et de confort ; la démocratie est insidieusement subvertie par les technologies de surveillance, et le contrôle est revendu de manière enthousiaste sous le terme de « participation » ; ainsi l’actuel ordre mondial qui s’appuie sur la domination, l’intimidation et l’oppression systématiques perdure discrètement, inchangé ou à peine perturbé.

Les auteurs sont amers devant le triomphe égyptien de 2011. Ils jettent sur la jeunesse égyptienne un regard dédaigneux et clament que « le mélange entre activisme et arrogance chez les jeunes est universel ». Des populations disposant de moyens numériques impliquent des révolutions « plus faciles à lancer » mais « plus difficiles à achever ». À cause de l’absence de leaders forts, cela aboutira, ainsi l’explique M. Kissinger aux auteurs, à des gouvernements de coalition qui laisseront la place à l’autocratie. Selon les auteurs « il n’y aura plus de printemps » (mais la Chine serait dos au mur).

Les auteurs fantasment sur l’avenir de groupes révolutionnaires « bien équipés ». Une nouvelle « race de consultants » va « utiliser les données pour construire et peaufiner une personnalité politique. »

« Ses » discours et ses écrits seront nourris (ce futur est-il si différent du présent ?) « par des suites logicielles élaborées d’extraction d’informations et d’analyse de tendances » alors « qu’utiliser les fonctions de son cerveau », et autres « diagnostics sophistiqués » seront utilisés pour « évaluer les points faibles de son répertoire politique ».

Le livre reflète les tabous et obsessions institutionnels du Département d’État (NdT : l’équivalent du Ministère des Affaires étrangères). Il évite la critique sérieuse d’Israël et de l’Arabie Saoudite. Il fait comme si, de manière extraordinaire, le mouvement de reconquête de souveraineté en Amérique Latine, qui a libéré tant de pays des ploutocraties et dictatures soutenues par les États-Unis ces 30 dernières années, n’avait jamais existé. En mentionnant plutôt les « dirigeants vieillissants » de la région, le livre ne distingue pas l’Amérique Latine au-delà de Cuba. Et bien sûr, le livre s’inquiète de manière théâtrale des croque-mitaines favoris de Washington : la Corée du Nord et l’Iran.

Google, qui a commencé comme une expression de la culture indépendante de jeunes diplômés californiens — une culture du respect, humaine et ludique — en rencontrant le grand méchant monde, s’est embarqué avec les éléments de pouvoir traditionnels de Washington, du Département d’État à la NSA.

Bien que ne représentant qu’une fraction infinitésimale des morts violentes à l’échelle mondiale, le terrorisme est un des sujets favoris des cercles politiques des États-Unis. C’est un fétichisme qui doit aussi être satisfait, et donc « Le Futur du Terrorisme » a droit à un chapitre entier. Le futur du terrorisme, apprenons-nous, est le cyberterrorisme. S’ensuit une série de scénarios complaisants et alarmistes, incluant un scénario haletant de film catastrophe dans lequel des cyber-terroristes s’emparent des systèmes de contrôle aérien américains et envoient des avions percuter des bâtiments, coupent les réseaux électriques et lancent des armes nucléaires. Les auteurs mettent ensuite les activistes qui participent aux manifs virtuelles dans le même panier.

J’ai une opinion très différente à ce sujet. L’avancée des technologies de l’information incarnée par Google porte en elle la mort de la vie privée de la plupart des gens et conduit le monde à l’autoritarisme. C’est la thèse principale de mon livre, Cypherpunks (traduit en français sous le titre Menace sur nos libertés. Mais, tandis que MM. Schmidt et Cohen nous disent que la mort de la vie privée aidera les gouvernements des « autocraties répressives » à « cibler leurs citoyens », ils affirment aussi que les gouvernements des démocraties « ouvertes » la verront comme une bénédiction permettant de « mieux répondre aux problèmes des citoyens et des consommateurs ». En réalité, l’érosion de la vie privée en Occident et la centralisation du pouvoir qui lui est associée rendent les abus inévitables, rapprochant les « bonnes » sociétés des « mauvaises ».

La section du livre relative aux « autocraties répressives » décrit nombre de mesures de surveillance répressives qu’elle condamne : les lois dédiées à l’insertion de « portes dérobées » dans des logiciels afin de rendre possibles l’espionnage de citoyens, la surveillance de réseaux sociaux et la collecte d’informations relatives à des populations entières. Toutes ces pratiques sont d’ores et déjà largement répandues aux États-Unis. En fait, certaines de ces mesures, comme celle qui requiert que chaque profil de réseau social soit lié à un nom réel, ont été défendues en premier lieu par Google lui-même.

Tout est sous nos yeux, mais les auteurs ne peuvent le voir. Ils empruntent à William Dobson l’idée selon laquelle les médias, dans une autocratie, « permettent l’existence d’une presse d’opposition aussi longtemps que les opposants au régime comprennent quelles sont les limites implicites à ne pas franchir ». Mais ces tendances commencent à émerger aux États-Unis. Personne ne doute des effets terrifiants des enquêtes menées sur The Associated Press et James Rosen de Fox News. Reste que le rôle de Google dans la comparution de Rosen a été peu analysé. J’ai personnellement fait l’expérience de ces dérives.

Le ministère de la Justice a reconnu en mars dernier qu’il en était à sa 3ème année d’enquête criminelle sur Wikileaks. Le témoignage du tribunal fait remarquer que ses cibles incluent « les fondateurs, propriétaires ou gestionnaires de WikiLeaks ». Une source présumée, Bradley Manning, fait face à un procès de 12 semaines à partir de demain, avec 24 témoins à charge qui témoigneront à huis clos.

Ce livre est une œuvre de très mauvais augure dans laquelle aucun auteur ne dispose du langage pour appréhender, encore moins pour exprimer, le gigantesque mal centralisateur qu’ils sont en train de construire. « Ce que Lockheed Martin était au 20e siècle, les sociétés technologiques et de cybersécurité le seront au 21e siècle », nous disent-ils. Sans même comprendre comment, ils ont mis à jour et, sans accroc, mis en œuvre la prophétie de George Orwell. Si vous voulez une vision du futur, imaginez des lunettes Google, soutenues par Washington, attachées — à jamais — sur des visages humains disponibles. Les fanatiques du culte de la technologie de consommation de masse y trouveront peu de matière à inspiration, non qu’ils en aient besoin visiblement, mais c’est une lecture essentielle pour quiconque se retrouve pris dans la lutte pour le futur, ayant en tête un impératif simple : connaissez vos ennemis.

Crédit photo : Steve Rhodes (Creative Commons By-Nc-Nd)




Google abandonne les standards ouverts pour sa messagerie instantanée ?

Un coup on souffle le chaud, un coup on souffle le froid, Google est bipolaire vis-à-vis du logiciel libre, des formats ouverts et du respect de la vie privée.

C’est d’autant plus flagrant lorsque pour critiquer Google on s’en réfère à ses propres déclarations.

Et l’on se retrouve, sans crier gare, du jour au lendemain, avec une messagerie instantanée potentiellement amputée de ses qualités précédentes…

Osde8info - CC by-sa

Google abandonne les standards ouverts pour la messagerie instantanée

Google Abandons Open Standards for Instant Messaging

Parker Higgins – 22 mai 2013 – EFF.org
(Traduction : Penguin, TheCamel, audionuma, Asta, KoS)

Au milieu du tourbillon médiatique qui entoure sa conférence I/O annuelle, Google a lâché quelques informations malheureuses sur ses plans concernant sa messagerie instantanée. À plusieurs endroits sur le web, la société remplace son actuelle plateforme « Talk » par une nouvelle dénommée « Hangouts » qui réduit drastiquement le support du protocole ouvert de messagerie instantanée connu sous le nom de XMPP (ou Jabber de manière informelle) et supprime également l’option de désactivation de l’archivage de toutes les communications en messagerie instantanée. Ces changements représentent une bascule des protocoles ouverts vers des protocoles fermés ainsi qu’un recul flagrant pour de nombreux utilisateurs.

Une régression pour l’interopérabilité

Auparavant, le support complet de XMPP par Google signifiait que les utilisateurs pouvaient communiquer avec des interlocuteurs utilisant d’autres services de messagerie instantanée, voire hébergeant leur propre serveur de messagerie instantanée. Ce type de décentralisation est une bonne chose : il diminue la dépendance à un service particulier, ce qui en contrepartie permet aux différents services de se différencier sur des aspects importants comme la qualité, la fiabilité ou le respect de la vie privée.

Certains utilisateurs, par exemple, ne souhaitent peut-être pas fournir à Google des informations sur le contenu de leurs messages, quand et d’où ils se sont connectés, ou bien avec qui ils ont l’habitude de clavarder. Les informations concernant les personnes avec qui les utilisateurs communiquent peuvent être sensibles ; souvenez vous, ces données étaient au cœur du retour de bâton qui frappa Buzz, un ancien réseau social, lorsqu’il décida de les rendre publiques par défaut.

La possibilité de fédérer différents services permet aux utilisateurs de faire leur choix eux-même. Voici une explication issue de la propre documentation de Google concernant la plateforme « Talk », dans une partie intitulée « Communications ouvertes » :

Le choix du service vous permet de choisir votre fournisseur en vous basant sur des facteurs plus importants tels que les fonctionalités, la qualité de service et le prix, tout en conservant la capacité de communiquer avec qui vous voulez.

Malheureusement, ce n’est pas le cas de nombreux services IM (messagerie instantanée) et VOIP (voix sur IP) aujourd’hui. Si les personnes avec qui vous souhaitez communiquer sont toutes connectées à des services IM/VOIP différents, vous devez créer un compte chez chacun d’entre eux pour pouvoir communiquer.

Le nouveau protocole Hangouts soulève précisément les questions que Google souligne ci-dessus. Les utilisateurs n’ont d’autre choix que d’utiliser les serveurs de Google ou se déconnecter des gens qui les utilisent. Les utilisateurs de Google ne sont pas informés du changement : leurs copains qui utilisent jabber.org, member.fsf.org, ou n’importe quel autre service qui utilise XMPP n’apparaîtront tout simplement plus dans la liste des contacts en ligne.

Ces changements sont le résultat de l’abandon par Google d’un sous-ensemble particulier du standard XMPP, le server-to-server federation. Mais pour le moment, Google continue à utiliser la partie connexion client-serveur, ce qui signifie que dès lors que vous êtes connecté avec un compte Google, vous pouvez utiliser n’importe quelle application utilisant ce protocole.

C’est important pour plusieurs raisons. Une des plus importantes est qu’aucun client officiel Google ne propose le chiffrement des communications Off-the-Record (OTR), qui devient un composant critique pour la sécurité des communications en ligne. Si les deux participants dans un échange sur messagerie instantanée utilisent chacun un chiffrage OTR, ils disposent d’une liaison sécurisée d’un bout à l’autre, ce qui signifie que personne, y compris leur fournisseur de service, ne peut lire le contenu de leurs messages.

Des changements dans l’historique

Malheureusement, un autre changement de la part de Google pourrait forcer les utilisateurs à faire un choix difficile, à savoir utiliser ou non ces clients externes tels que Pidgin, Adium, Gibberbot ou Chatsecure pour discuter. Le dilemme vient en particulier de la manière dont Google a changé sa façon d’archiver les conversations et de les présenter à l’utilisateur.

Précédemment, les utilisateurs pouvaient désactiver l’« historique de conversation », ce qui empêchait la sauvegarde des messages instantanés sur leur compte Gmail. Avec les nouveaux paramètres, les utilisateurs qui ne veulent pas conserver une copie de leur conversation accessible via Gmail doivent désactiver l’« historique Hangout », et ce pour chaque contact[1]. Le problème est que les utilisateurs peuvent seulement désactiver l’historique Hangout avec un compte Google Hangout officiel.

Donc tant pis pour les utilisateurs soucieux de leur vie privée qui veulent utiliser le chiffrement Off-the-Record et qui désirent garder leurs messages loin de leur compte Gmail. Et s’ils veulent continuer à discuter avec leurs amis sur Google chat, ils ne peuvent même pas le faire autre part.

Depuis la semaine dernière, Google demande aux utilisateurs de remplacer l’application Android Talk par Hangouts et de passer à Hangout au sein de Gmail dans Chrome. Soyez vigilants avant d’effectuer la mise à jour, soyez vigilants du coût pour la liberté de ces « améliorations ».

Que devrait faire Google ?

Dans son explication publique officielle de son abandon du support de XMPP, Google a expliqué que c’était une décision difficile, rendue nécessaire par des contraintes techniques. Mais même si le nouveau protocole obéit à de nouvelles contraintes techniques, cela n’empêche pas la compagnie de le rendre public et interopérable. Libérer les spécifications de Google Hangouts serait un bon premier pas. Fournir des client et des serveurs open source en serait un second. Il est clair que certaines fonctionnalités vidéo de Hangouts ont été implémentées dans un but spécifique à Google. Mais ce n’est pas une excuse pour nous emmener vers un monde où les seuls choix concrets sont des logiciels et des protocoles de chat propriétaires.

Une autre initiative simple à mettre en œuvre au bénéfice des utilisateurs aurait été d’incorporer le support de Off-the-Record dans le client Hangout officiel. Si de telles possibilités de confidentialité étaient proposées aux utilisateurs, cela atténuerait le fait d’offrir des options de protection de la vie privée seulement dans le logiciel propriétaire de Google.

Dans le document Google « Communications ouvertes » cité ci-dessus, l’entreprise explique en quoi c’est un véritable engagement d’ouvrir les canaux de communication :

La mission de Google est de rendre l’information mondiale universellement accessible et utile. Google Talk, qui permet aux utilisateurs de communiquer instantanément avec leurs amis, leur famille et leurs collègues via des appels vocaux et des messages instantanés, reflète notre conviction que les communications devraient être accessibles et utiles.

Nous sommes frustrés et déçus de voir Google reculer face à cette mission.

Crédit photo : Osde8info (Creative Commons By-Sa)

Notes

[1] Pour être clair, même les réglages précédents étaient loin d’être parfaits du point de vue de la vie privée : désactiver l’historique de conversation permettait uniquement d’empêcher l’archivage des messages sur votre compte Gmail, mais n’empêchait pas les autres utilisateurs, ou Google lui-même, de garder une trace de la conversation.




La position de Google sur les brevets et l’open source (+ avis de Gibus)

Dans un récent billet traduit ci-dessous, Google nous annonce s’engager à ne pas attaquer en premier un acteur de l’open source avec ses brevets, seule la riposte est envisagée.

Nous avons demandé à Gérald Sédrati-Dinet (Gibus) de l’April, l’un de nos spécialistes sur le sujet, non seulement de relire la traduction mais également de nous donner son éclairant point de vue.

« Mon avis est que c’est un pas dans la bonne direction de la part d’une entreprise informatique influente. Mais cet engagement illustre à merveille l’inadaptabilité intrinsèque du système de brevets aux idées informatiques. À quoi servent ces “brevets logiciels” si leur détenteur s’engage à ne pas les utiliser ? Si Google était cohérent, il compléterait cet Engagement pratique par un engagement politique visant à ce qu’aucun “brevet logiciel” ne puisse s’appliquer aux activités des développeurs et utilisateur informatiques. Une telle exception a été récemment proposée par Richard Stallman, Google irait-il jusqu’à la soutenir ? »

OpenSourceWay - CC by-sa

Prendre position sur l’Open Source et les brevets

Taking a stand on open source and patents

Duane Valz – 28 mars 2013 – Google Blog Open Source
(Traduction : brouberol, Neros, Melchisedech, cherry, gibus + anonymes)

Chez Google, nous pensons que les systèmes ouverts sont meilleurs (NdT : article sous le lien traduit par le Framablog). Les logiciels open source ont été à l’origine de nombreuses innovations dans l’informatique en nuage, le web mobile et l’Internet en général. Et alors que les plateformes ouvertes on été de plus en plus confrontées à des attaques via des brevets, obligeant les entreprises à se défendre en acquérant encore plus de brevets, nous restons attachés à un Internet ouvert — un Internet qui protège l’innovation réelle et continue de fournir des produits et services de qualité.

Aujourd’hui, nous faisons un pas de plus vers ce but en annonçant l’Open Patent Non-Assertion Pledge (Engagement ouvert de non-application des Brevets) : nous nous engageons à ne poursuivre aucun utilisateur, distributeur ou dévelopeur de logiciel open source sur la base des brevets spécifiés, à moins d’avoir d’abord été attaqués.

Nous avons commencé par identifier dix brevets reliés à MapReduce, un modèle de calcul permettant de traiter d’importants jeux de données initialement développé par Google — dont les versions open source sont désormais largement utilisées. Nous avons l’intention d’étendre au fur et à mesure l’ensemble des brevets possédés par Google concernés par cet engagement à d’autres technologies.

Nous espérons que l’Engagement OPN servira de modèle à l’industrie, et nous encourageons les autres détenteurs de brevets à adopter un engagement ou une initiative similaire. Nous pensons que cela a plusieurs avantages :

  • La transparence. Les détenteurs de brevets déterminent précisément sur quels brevets et technologies associées ils souhaitent s’engager, garantissant aux développeurs comme au grand public une gestion transparente des droits des brevets.
  • Étendue. Les protections sous l’Engagement OPN ne sont pas confinées à un projet spécifique ou à une licence open source de droits d’auteur. (Google apporte beaucoup de code sous de telles licences, comme les licences Apache ou GNU GPL, mais les protections qu’elles confèrent contre les brevets sont limitées.) L’Engagement OPN, par contraste, s’applique à n’importe quel logiciel open source – passé, présent ou futur – qui pourrait s’appuyer sur des brevets faisant partie de l’Engagement.
  • Protection défensive. L’Engagement peut être résilié, mais seulement si une des parties a intenté une action en violation de brevet contre des produits ou des services de Google, ou s’il profite directement d’un tel litige.
  • Durabilité. L’Engagement demeure en vigueur pendant toute la durée de vie des brevets, même si nous les transférons.

Notre engagement s’appuie sur des efforts passés d’entreprises comme IBM et Red Hat et sur le travail de l’Open Invention Network (dont Google est membre). Cela complète également nos efforts en matière de licences coopératives, sur lesquelles nous travaillons avec des entreprises partageant nos idées, afin de développer des accords de brevets qui permettraient de réduire les poursuites judiciaires.

Au delà de ces initiatives pilotées par l’industrie, nous continuons à soutenir les réformes pouvant améliorer la qualité des brevets tout en réduisant le nombre excessif de litiges.

Nous espérons que l’Engagement OPN fournira un exemple pour les entreprises cherchant à mettre leurs propres brevets au service du logiciel open source, qui contribuent à d’incroyables innovations.

Par Duane Valz, conseil en brevets

Crédit photo : OpenSourceWay (Creative Commons By-Sa)




Geektionnerd : Ogooglebar

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Source :

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Pourquoi j’ai quitté Google

Il y a un an le développeur James Whittaker quittait Google et le faisait savoir dans un article cinglant qui en disait long sur l’évolution de l’entreprise, obnubilée par la publicité et la concurrence de Facebook.

Nous avons choisi de le traduire car les arguments nous semblent malheureusement tout aussi valables aujourd’hui.

Ah, oui, et où est-il allé ensuite ? Réponse ici : Why I joined Microsoft 😉

Google+

Pourquoi j’ai quitté Google

Why I left Google

James Whittaker – 13 mars 2012 – Blog personnel
(Traduction : ACA, VifArgent, KoS, Eijebong, Alpha, angezanetti, Penguin, audionuma, P3ter, KoS + anonymes)

Ok, je cède. Tout le monde veut savoir pourquoi je suis parti, et répondre individuellement n’est pas forcément évident, voici donc les détails de la version longue. Vous pouvez en lire un bout (je vais à l’essentiel au troisième paragraphe) ou la lire en entier. Mais avant, une remarque préalable : il n’y pas de drame, pas de grand discours, pas de critiques d’anciens collègues et rien de plus que ce que vous pouvez déjà présumer d’après ce qui se dit dans la presse ces jours-ci autour de Google et de son attitude envers la vie privée des utilisateurs et les développeurs. C’est simplement une analyse plus personnelle.

Quitter Google ne fut pas une décision facile. Durant mon séjour là bas je suis devenu passionné par l’entreprise. J’ai fait quatre présentations « Google Developper Day », deux « Google Test Automation Conferences » et j’étais un contributeur prolifique du blog Google test. Des recruteurs m’ont souvent demandé de les aider à embaucher leurs champions. Personne n’avait besoin de me demander deux fois de promouvoir Google et personne ne fut plus surpris que moi quand je fus incapable de continuer à le faire. En fait, les trois derniers mois que j’ai passé à travailler chez Google ont été une énorme déception durant lesquels j’ai essayé en vain de rallumer ma passion.

Le Google qui me passionnait était une société high tech qui poussait ses employés à innover. Le Google que j’ai quitté était une société publicitaire concentrée uniquement sur l’aspect financier.

Techniquement, je suppose que Google à toujours été une entreprise de publicité, mais pendant la majeure partie de ces trois dernières années, ça n’y ressemblait pas. Google était une entreprise de pub uniquement dans le sens où une bonne émission télévisée est une entreprise de pub : avoir un bon contenu attire les publicitaires.

Sous Eric Schmidt, les pubs étaient toujours à l’arrière plan. Google a été lancé comme une usine à innovations, incitant les employés à être entreprenants au travers les prix des fondateurs (NdT : prix accordés aux employés les plus méritants sous forme d’action Google, pour retenir les meilleurs employés à Google), les primes par les pairs et le fameux 20% du temps (NdT : Google permet(tait ?) à ses employés de consacrer 20% de leur temps de travail à des projets personnels). Nos revenus publicitaires nous ont donné de l’aisance pour réfléchir, innover et créer. Les plateformes comme App Engine, Google Labs et l’open source ont servi d’environnements de test pour nos inventions. Le fait que tout ça était payé par une machine à fric complètement bourrée de publicité a échappé à la plupart d’entre nous. Peut-être que les ingénieurs qui travaillent vraiment sur les pubs l’ont senti, mais le reste d’entre nous était convaincu que Google était une entreprise de technologie avant tout et par-dessus tout, une entreprise qui engageait des personnes intelligentes et qui faisait un gros pari sur leur capacité à innover.

De cette machine à innovation sont sortis des produits stratégiquement très importants comme Gmail et Chrome, des produits qui étaient le résultat de l’esprit d’entreprise au plus bas niveau de l’entreprise. Bien sûr, cette innovation emballée crée quelques ratés, et Google n’y a pas échappé, mais l’entreprise a toujours su perdre sans s’entêter et apprendre de ses échecs.

Dans un tel environnement, il n’est pas essentiel d’être au sein de l’exécutif pour réussir. Vous n’avez pas besoin d’être chanceux et d’atterrir sur un projet « sexy » pour construire une grande carrière. N’importe qui ayant des idées ou le niveau pour contribuer, pouvait s’impliquer. J’avais énormément d’opportunités pour quitter Google pendant cette période, mais il était difficile d’imaginer un meilleur endroit pour travailler.

Mais c’était le « bon temps » comme on dit, et ce temps-là n’est plus.

Il se trouve qu’il y a un point où la machine à innover Google a faibli, et ce point est crucial : concurrencer Facebook. Des efforts informels ont produit un duo antisocial avec Wave et Buzz. le réseau social Orkut n’a jamais marché en dehors du Brésil. Comme le dit le proverbe (« le lièvre trop confiant risque une courte sieste »), Google s’est réveillé de son rêve social en voyant son statut d’empereur de la pub menacé.

Google peut bien brandir des publicités à davantage de personnes, Facebook en sait beaucoup plus sur eux. Publicitaires et éditeurs chérissent ce genre d’informations personnelles, tant et si bien qu’ils mettent parfois plus en avant Facebook que leur propre marque. Démonstration n°1 : une entreprise avec la puissance et l’influence de Nike mettant sa propre marque après celle de Facebook ? Aucune entreprise n’a fait ça pour Google et Google en a pris ombrage.

Larry Page a pris lui-même le contrôle pour corriger cette erreur. Le social fut « nationalisé » au sein de l’entreprise, un plan appelé Google+. C’était un nom menaçant qui donnait le sentiment que Google ne suffisait pas. La recherche devait être sociale. Android devait être social. YouTube, jadis heureux de son indépendance, devait l’être… bon, vous avez compris. Encore pire, l’innovation aussi devait être sociale. Les idées qui ne réussissaient pas à mettre Google+ au centre de l’univers étaient une perte de temps.

Tout à coup, 20% signifiait incompétent. Google Labs a fermé. Les prix d’App Engine ont augmenté. Les APIs qui étaient gratuites depuis des années furent dépréciées ou devinrent payantes. Alors que les valeurs entrepreneuriales disparaissaient, un discours moqueur à l’égard de « l’ancien Google » et de ses tentatives ridicules de concurrencer Facebook est apparu pour justifier un « nouveau Google » qui promettrait de faire plus avec moins.

Les jours heureux où Google embauchait des gens intelligents et innovants pour inventer le futur étaient terminés. Le nouveau Google savait au-delà de tout doute à quoi devait ressembler le futur. Les employés n’avaient rien compris et l’intervention des dirigeants allait tout remettre en ordre.

Officiellement, Google a déclaré que « le partage sur le Web était en panne » et rien d’autre que la force cumulée de nos esprits autour de Google+ ne pouvait le réparer. Il y a de quoi admirer une entreprise qui a la volonté de sacrifier des idoles pour rallier ses talents afin de faire face à une menace à l’encontre de ses intérêts. Si Google avait eu raison, l’effort aurait été héroïque et beaucoup d’entre nous voulaient réellement être impliqués dans ce qui serait la solution. Je me suis laissé convaincre. J’ai travaillé sur Google+ comme responsable du développement et j’ai écrit un bout de code. Mais le monde n’a jamais changé ; le partage non plus, n’a pas changé. Dire que nous avons participé paradoxalement ) améliorer Facebook est discutable, mais tout ce dont je disposais n’était en fait que des tests comparatifs à la faveur de Facebook.

Il s’est avéré que le partage n’était pas en panne. Le partage fonctionnait bien et de manière efficace, Google n’en faisait simplement pas partie. Tout le monde autour de nous partageait et semblait plutôt content. Aucun exode des utilisateurs de Facebook ne s’est jamais produit. Je n’aurai même pas pu montrer Google+ une deuxième fois à ma fille, « la vie sociale n’est pas un produit » m’a-t-elle dit après que je lui ai fait une démonstration. « Un réseau social c’est des gens, et les gens sont sur Facebook ». Google était l’enfant-roi qui, après avoir découvert qu’il n’avait pas été invité à la fête, avait organisé la sienne de son côté.

Google+ et moi, ça n’aurait jamais pu marcher. En vérité, je n’ai jamais tellement été intéressé par la publicité. Je ne clique pas sur les pubs. Lorsque Gmail affiche des pubs basées sur les choses que je tape dans mes courriels, cela me fait flipper. Je ne veux pas que mes résultats de recherche contiennent les coups de cœur des abonnés de Google+ (ou de Facebook ou de Twitter). Lorsque je cherche « rue de la soif à Londres », je veux un meilleur résultat que la suggestion sponsorisée « Achetez une rue de la soif de Londres chez Carrefour ».

L’ancien Google a fait fortune avec les publicités parce qu’il proposait du bon contenu. C’était comme à la télévision : faites la meilleure émission et vous aurez le plus de revenus publicitaires des entreprises. Le nouveau Google semble surtout se concentrer sur les entreprises.

Peut être que Google a raison. Peut être que le futur c’est d’en apprendre le plus possible à propos de la vie privée des autres. Peut être que Google est le mieux placé pour savoir quand je devrais appeler ma mère et que ma vie serait meilleure si je fais les soldes chez H&M. Peut être que s’ils me harcèlent en constatant tout ce temps libre dans mon agenda je ferais plus de sport.

Peut être que s’ils affichent une publicité pour un avocat spécialiste du divorce à cause de l’e-mail que j’écris à propos de mon fils de 14 ans en train de rompre avec sa copine, j’aimerais assez cette publicité pour mettre fin à mon propre mariage. Ou peut-être que je réglerai tous ces trucs-là tout seul.

Le Google d’avant était un endroit génial pour travailler. Quid du nouveau ?

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Guerre sans merci dans le maquis des codecs vidéos

La guerre des formats vidéos sur le Web bat son plein, sans que nous puissions à priori faire grand-chose (c’est dans la cour des grands que cela se passe, avec un Google qui est ici du bon côté de la Force).

Et une fois de plus les brevets sont pointés du doigt…

Seth Anderson - CC by-sa

Codecs vidéo : les sales affaires derrière les belles images

Video codecs: The ugly business behind pretty pictures

Simon Phipps – 15 mars 2013 – InfoWorld.com
(Traduction : audionuma, goofy, KoS + anonymes)

Lorsque Google a annoncé la semaine dernière qu’il avait fait la paix avec le gestionnaire de brevets MPEG-LA à propos de son codec VP8, certains ont déclaré que l’entreprise avait cédé et rejoint le cirque des brevets logiciels. Il n’en est rien.

La vérité est bien plus complexe et pourrait annoncer de grands changements dans la lutte pour le contrôle de nos habitudes de visionnage et d’écoute en ligne. En conséquence, de puissants intérêts sont rapidement intervenus pour tenter de museler les canons du VP8 avant qu’ils ne tonnent.

Le contexte des codecs

Le secteur des codecs vidéo est complexe et truffé d’acronymes et de manœuvres politiques depuis des dizaines d’années. Même ceux qui sont les plus impliqués dans cette situation sont en désaccord, tant sur la réalité que sur l’histoire de cette situation. Voici un résumé :

Lorsque vous téléchargez ou visionnez une vidéo, vous pouvez la considérer comme du QuickTime, du Flash ou même de l’Ogg, mais ce ne sont que des mécanismes de distribution. La vidéo représente une énorme quantité de données, et vous la faire parvenir requiert de la compression de données. Le contenu d’une vidéo est encodé dans un format obtenu par un logiciel de compression de données, et est ensuite affiché sur votre écran après que ce contenu ai été décodé par un logiciel de décodage.

Le codec est le logiciel qui réalise ce processus. Les travaux théoriques sur les codecs sont exceptionnellement complexes, et il y a toujours un compromis entre la compression maximale, le temps nécessaire à compresser les données, et la qualité optimale. C’est ainsi qu’il existe une grande variété de codecs, et le savoir-faire concernant leur implémentation est un bien précieux.

Dès 1993, il devint évident qu’une standardisation des formats de données pris en charge par les codecs était nécessaire. Les institutions internationales de standardisation ISO et IEC constituèrent un groupe d’experts appelé le Motion Picture Expert Group (groupe des experts de l’image animée, MPEG) qui a depuis produit une série de standards destinés à divers usages.

Le secteur est truffé de techniques brevetées. La standardisation des codecs est basée sur le modèle du secteur des télécommunications, dans lequel il est commun de permettre à des techniques brevetées de devenir des standards pour ensuite en dériver des paiements de licences pour chaque implémentation. Pour faciliter la collecte des royalties, une société appelée MPEG-LA, LLC (qui, pour rajouter à la confusion, n’a aucun lien avec avec MPEG) a été constituée pour gérer un portefeuille de brevets au nom de la plupart des détenteurs de brevets qui contribuent aux standards MPEG.

Ce dispositif fonctionnait correctement dans l’ancien monde basé sur des points de passages obligés où les sociétés étaient les créateurs de logiciels. Mais la nouvelle société basée sur le réseau et les techniques qu’il utilise (tel que l’open source) ne fonctionne pas correctement dans un modèle où chaque nouvelle utilisation nécessite d’abord de demander la permission. Les éléments qui nécessitent une autorisation a priori — les points de passage obligés — sont des insultes à Internet. Ils sont considérés comme des nuisances, et les experts cherchent des solutions pour les éviter.

La naissance des codecs ouverts

Lorsqu’il fut clair que le Web ouvert avait besoin de codecs ouverts pour traiter des formats de médias ouverts, de brillants esprits commencèrent à travailler au contournement de ces problèmes. La sciences des codecs est bien documentée, mais l’utilisation de n’importe laquelle des techniques bien connues risquait d’enfreindre des brevets logiciels contrôlés par MPEG-LA. Il ne suffisait pas de simplement modifier un standard dérivé de MPEG pour contourner les brevets. Ces standards avaient créé un tel maquis de brevets que n’importe quel nouveau projet utilisant les mêmes calculs mathématiques était quasiment certain d’enfreindre un portefeuille de brevets quelque part.

La création de codecs ouverts réclamait une nouvelle réflexion. Heureusement, certains intérêts commerciaux travaillaient sur des idées de codecs alternatifs. Une entreprise nommée On2, notamment, avait créé une famille de codecs basée sur des idées hors du champ des brevets MPEG et avait déposé ses propres brevets pour éviter de se faire marcher sur les pieds. En 2001, elle publia une technologie de codecs appellée VP3 en open source, technologie protégée par ses propres brevets. Cette technologie constituait la base de ce qui devint Theora. On2 continua à travailler pour produire une série de codecs dédiés à des niches jusqu’à son acquisition par Google en 2010.

Le VP8 était le codec de On2 à la pointe de la technologie, offrant à la fois une excellente qualité d’image et une bonne compression des données. Peu après l’acquisition de On2 par Google, ce dernier rendit libre l’utilisation de VP8, créant un engagement d’ouverture pour tous les brevets lui étant liés, et déclara que le nouveau projet WebM offrirait un format totalement libre et ouvert pour la lecture de vidéos.

Évidemment, MPEG-LA a senti la menace et a rapidement décidé de contre-attaquer. Il a presque immédiatement annoncé la constitution d’un portefeuille de brevets pour vendre des licences sur des brevets qu’il était certain que WebM et VP8 violaient, et a invité les détenteurs habituels de brevets à lui communiquer toutes informations sur ces brevets.

Une lueur d’espoir

Et puis … plus rien. Il semble que les coups d’épée de MPEG-LA étaient plutôt des bruits de fourreau. L’accord avec MPEG-LA que Google a annoncé était formulé avec beaucoup de soins pour ne pas froisser les parties prenantes, mais il semble indiquer que MPEG-LA avait les mains vides :

Aujourd’hui, Google Inc. et MPEG-LA, LLC ont annoncé qu’ils ont conclu un compromis qui accorde à Google une licence sur les techniques, quelles qu’elles soient, qui pourraient être essentielles à VP8. De plus, MPEG-LA a accepté de mettre fin à ses efforts pour constituer un portefeuille de brevets autour de VP8.

Vous pouvez constater qu’il n’y pas grand-chose de valeur qui soit licencié dans ce cas, puisque Google est apparemment autorisé à :

…rétrocéder les licences à n’importe quel utilisateur de VP8, que l’implémentation de VP8 soit celle de Google ou d’une autre entité : cela signifie que les utilisateurs peuvent développer des implémentations de VP8 indépendantes et bénéficier de la protection accordée par la rétrocession de licence.

Le communiqué continue avec deux déclarations importantes. Premièrement, Google a le projet de soumettre VP8 à MPEG pour standardisation. Cela constituerait un profond changement d’orientation, qui pourrait orienter les futurs efforts hors du maquis des brevets et vers des territoires plus ouverts. Deuxièmement, Google a l’intention de proposer VP8 comme codec « obligatoire à implémenter » dans le groupe RTCWEB de l’IETF qui définit les protocoles permettant les communications en temps-réel dans les navigateurs Web : WebRTC.

Si tout cela réussissait, cela ouvrirait de grandes opportunités pour les logiciels open source et le web ouvert. Libérés de la course à la rente des détenteurs de brevets, les développeurs open source seraient enfin libres d’innover dans le domaine des applications audio et vidéo sans avoir en permanence à surveiller leurs arrières ou à demander la permission.

Naturellement, de puissants groupes d’intérêts continuent à essayer de ralentir, voire interrompre, cette révolution. À peine Google avait-il publié son communiqué à propos de VP8, de l’accord avec MPEG-LA et de son intention de standardiser, que deux messages furent postés sur la liste de discussion de l’IETF-RTCWEB. Le premier, envoyé par le collaborateur de Microsoft Skype Matthew Kaufmann, essayait de ralentir les progrès vers la standardisation et invoquait les règles et le débat pour tenir VP8 hors des prochaines discussions de standardisation. Le deuxième, envoyé par l’ancien spécialiste des brevets de Nokia Stephan Wenger, invoquait aussi les règles mais plus inquiétant, sous-entendait que MPEG-LA n’était pas seul à pouvoir jouer ce jeu là. Cette crainte prit bientôt corps dans un message du collaborateur de Nokia Markus Isomaki annoncant que Nokia — qui n’est pas membre de MPEG-LA — avait l’intention de démontrer que VP8 enfreint un de ses brevets.

C’est la vie de tous les jours dans le monde des codecs et c’est riche d’enseignements sur les dangers des brevets logiciels. Une fois acceptés et institutionnalisés comme processus normaux et légaux, ils contrôlent tout le reste. Bien que VP8 vienne d’un héritage technologique différent, ayant prudemment évité la masse des brevets déposés lors des premiers travaux sur le MPEG, et ayant ainsi été scrupuleusement ouvert par Google (il devait se corriger lors du processus, ce qu’il fit admirablement), le monde oppressant des brevets tente de le faire tomber dans ses griffes et de le contrôler, afin de le soumettre à la taxation sur l’innovation imposée par les vainqueurs de la première course technologique.

Nous ne pouvons pas faire grand-chose à part observer avec anxiété l’initiative de Google pour le Web ouvert. Dans cette histoire, il apparaît plus clairement que jamais que la réforme du système des brevets pour aboutir à une société plus juste et harmonisée se fera encore attendre.

Crédit photo : Seth Anderson (Creative Commons By-Sa)