Geektionnerd : Impression 3D de disque
Source : Impression 3D : une Américaine conçoit son propre disque vinyle (Numerama)
Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)
Source : Impression 3D : une Américaine conçoit son propre disque vinyle (Numerama)
Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)
Il pleut des nouveaux projets actuellement chez Framasoft !
Framazic, c’est l’impressionnant résultat du stage universitaire que notre plus jeune recrue Martin Gubri a réalisé chez nous l’été dernier. Et le mieux c’est encore de lui céder la parole pour vous le présenter.
PS : Il pleut des nouveaux projets mais un peu moins de dons, alors si votre CB a envie de prendre un peu l’air…
Framazic ? Qu’est-ce que tu me chantes là ?
Eh oui encore un nouveau projet Framasoft ! Il s’agit cette fois de mettre l’accent sur la culture dite libre. L’élargissement des perspectives de la Framagalaxie s’était déjà amorcé depuis un moment : Framabook, avec sa collection de livres libres incluant de plus en plus d’essais, de BD, et même un roman ; FramaDVD qui embarque quelques textes, images, vidéos et musiques libres ; le Framablog, bien sûr, dont les sujets vont même au-delà de la culture et du logiciel libres ; Framakey avec notamment sa récente version Wikipedia ; et maintenant donc Framazic !
C’est en fait un portail dédié à la promotion de la musique libre : explication du concept et du fonctionnement des licences libres, des enjeux artistiques et culturels liés à la musique libre, ainsi que des problèmes que pose actuellement le système actuel du marché de la musique non-libre. Le discours est à la fois destiné aux personnes qui aiment la musique (ou pas !), aux musiciens, et aux diffuseurs. Ce qu’on observe c’est que chacun a son niveau peut y trouver un intérêt, qu’il s’agisse de créer, écouter ou partager de la musique sous licence libre.
Framazic c’est donc, si vous préférez, une porte d’entrée vers la musique libre. Vous y trouverez aussi une liste de plateformes et de sites hébergeant de la musique sous licence libre et de libre diffusion, et une sélection de quelques bons morceaux[1], sous licence Creative Commons Zéro, By, By-sa, ou encore Art libre. Chaque album sélectionné est disponible en téléchargement sur le site.
J’espère que mon travail pourra faire connaître et ouvrira des perspectives sur cette formidable opportunité qui nous est aujourd’hui offerte.
Qu’est-ce que tu ne nous chanteras pas avec Framazic ?
Précisons tout d’abord que Framazic n’est pas une nouvelle plateforme de musique libre.
Il n’est en aucun cas question de faire concurrence ou de l’ombre à des associations comme Dogmazic qui font très bien leur travail et depuis longtemps. Nous hébergeons uniquement quelques morceaux et quelques albums pour donner un premier goût de ce que peut être la musique sous licence libre. Il existe déjà de multiples sites qui hébergent de la musique libre. Mais rares sont ceux qui prennent le temps de tenter d’expliquer clairement ce qu’est une licence libre, une licence de libre diffusion, son fonctionnement, ses enjeux, etc. L’exception est peut-être la documentation de Dogmazic qui est riche quoiqu’assez austère.
À qui est-ce destiné ?
Comme je l’ai indiqué sur le site, ces explications s’adressent à trois publics :
Mais est-ce bien « PUR » ?
Pour faire une belle réponse de Normand : ptêt’ ben qu’oui, ptêt’ ben qu’non 🙂
Oui, parce que la musique libre est légale. La licence libre permet de renverser le sens du droit d’auteur. On passe du restrictif (le fameux « touts droits réservés ») au permissif (« certains droits réservés »). Mais ce changement est légal : l’auteur possède des droits qu’il utilise comme il le souhaite.
Non, parce que nous pensons que la musique non-libre est dans un contexte bien morose, et que Hadopi n’est pas la bonne solution. Pour faire court, on va dire qu’il y a deux principaux problèmes : le système actuel ultra-verrouillé qui répartit bien trop inégalement les revenus issus de la musique, et la soumission des musiciens qui arrivent à percer au bon vouloir des majors.
Les entreprises et organismes faisant partie de « l’industrie culturelle » appliquent un ancien modèle économique qui a marché, mais qui est maintenant totalement dépassé avec le numérique. Plutôt que de combattre le partage de contenu sur Internet, les majors feraient mieux de repenser leur fonctionnement, leurs offres, leur problématique. Par exemple, se focaliser sur la crise du CD n’a pas de sens : est-ce que l’on va pleurer sur la disparition de la cassette ? Le CD est un support qui appartient au passé, il est normal qu’il disparaisse, alors le prendre comme un indicateur du « mal » que peut causer le téléchargement illégal est juste une énorme blague. De plus, l’intérêt des maisons de disque n’est pas le même que celui des artistes. Crier sur tous les toits que la mort du CD signifie la disparition des artistes (et des bébés phoques) est juste faux. Les principaux perdants dans l’histoire ce sont les majors qui prennent des marges énormes sur les ventes physiques et immatérielles, pas les artistes. Les musiciens ne perçoivent qu’une petite part des bénéfices engendrés via ce canal, ce qui fait que le pourcentage dans leurs revenus des ventes des CD et des fichiers numériques reste faible par rapport aux sommes apportées par les concerts, les diffusions (redistribuées par la Sacem notamment), les produits dérivées, etc.
Trollons : la clause NC c’est du libre ?
J’ai voulu apporter une position claire sur le sujet, en distinguant les licences libres des licences de libre diffusion. Dès que l’on a affaire à une clause NC (pas d’usage commercial) ou ND (pas de modification), la licence ne peut pas être qualifiée de libre, au sens où nous l’entendons nous, c’est-à-dire celui du logiciel libre. Nous avons repris la classification de Wikipédia. D’une part, pour être clair, il faut poser des catégories bien définies. Et d’autre part, je pense honnêtement que dès que l’on utilise une de ces clauses, on restreint la diffusion, ce qui ne permet pas d’assurer la pérennité, la stabilité juridique, et les possibilités de « remix » de la culture. Un exemple concret : la rédaction assez floue de la clause NC dans les Creative Commons 3.0 qui autorise certaines dérives, comme le récent accord Creative Commons-Sacem, et sur lequel je reviendrai dans la question suivante.
Les clauses BY et SA permettent déjà selon moi de bien protéger son œuvre. Par exemple, un publicitaire ne voudra ni s’encombrer de mettre son spot sous licence libre, ni « perdre » quelques caractères pour citer l’artiste, là où la seconde vaut cher. Il préférera signer un contrat et payer le musicien pour lever les clauses qui l’indisposent. Ça n’engage que moi, mais je pense que de manière générale dans la musique, la clause SA permet à peu de chose près d’interdire par défaut (c’est à dire sans l’autorisation du propriétaire des droits) les mêmes utilisations qu’une clause NC, mais avec tous les avantages de la licence vraiment libre. Quelqu’un qui voudra payer pour lever une clause NC, sera aussi prêt à payer pour lever une clause SA. Dire que les modifications doivent porter la même licence est beaucoup plus facile à appliquer, définir, et respecter, que de classifier des cas d’utilisations commerciales et non-commerciales. Ma position est donc claire là-dessus, je ne conseille pas la clause NC.
Pourquoi avoir créé Framazic ?
Il y a plusieurs raisons à cela. La première est que globalement la musique libre reste assez mal connue, même dans le monde du logiciel libre. Et plus généralement j’ai pu constater en parlant à des proches que le fonctionnement du droit d’auteur reste assez mal connu. Par exemple, nombre de personnes pensent que par défaut une création est libre, et qu’il faut faire un dépôt pour profiter de ses droits. Alors qu’en réalité, dès la création, même incomplète, d’une œuvre, elle est déjà protégée par le droit d’auteur. Une musique n’est donc par défaut pas libre. Et sans mention de licence, vous n’avez aucune autorisation sur les morceaux (à part les exceptions prévues par le droit d’auteur).
La deuxième raison, dont on a déjà commencé à parler, est que les plateformes de musique libre fournissent assez peu (ou de manière trop discrète) d’explications. Ou pire, introduisent sciemment ou non de la confusion pour ne pas dire plus. On pense bien sûr à Jamendo, qui, même si le site est joli, commence à se traîner une assez mauvaise réputation. Nous ne détaillerons pas les cas de respect tout relatif des licences et des artistes, mais concentrons-nous sur la terminologie employée. Alors qu’après quelques plaintes les termes avaient changé, Jamendo continue de parler de musique « libre de droits ». Autant dire que l’image çi-dessous fait mal aux yeux… Même si libre de droits n’est utilisé qu’une seule fois, c’est dans le titre et donc ce que l’on retient le plus. Quelques explications : la musique libre n’est pas libre de droits. Le libre de droits signifie qu’il n’y a plus de droits d’auteur, on parle donc du domaine public. Ce n’est pas le cas de la musique présente sur Jamendo : elle est encore sous le régime du droit d’auteur. On pourrait résumer ce que dit une licence par « certains droits réservés », autrement dit, la licence libre ne donne pas tous les droits ! Il ne faut donc surtout pas confondre musique libre et musique libre de droits, sinon on piétine le principe du Copyleft.
Ce qui nous amène à un troisième point : j’espère que Framazic à son petit niveau contribuera à défendre l’intégrité de la musique libre. Ne pas confondre libre et libre diffusion, libre et domaine public (même si la musique du domaine public fait aussi partie de la musique libre) sont des points importants à défendre.
Un autre risque actuel de la musique en libre diffusion sur lequel j’ai voulu prendre position, est l’accord passé entre la Sacem et Creative Commons. Vous trouverez plus de détails sur Framazic, mais pour faire court, cet accord pose deux problèmes majeurs. Le premier est que les sociétaires de la Sacem peuvent choisir une licence Creative Commons pour leurs œuvres (ce qui est à priori une bonne nouvelle, puisque signe d’ouverture de la part de la Sacem), mais elle doit forcément comporter la clause NC. Cette obligation est encore un signe de l’axe plus économique que qualitatif qu’elle a pris. Le deuxième, plus pervers, est que la Sacem réinterprète la notion de commercialité, et donc de non-commercialité. Ainsi un grand nombre d’utilisations précédemment considérées comme non-commerciales le deviendront pour les œuvres bénéficiant de cet accord. Nombre de petites structures sans trésorerie ne peuvent pas se permettre de payer les forfaits de la Sacem. Appliquera-t-elle réellement une vision aussi restreinte de la non-commercialité que ce qu’elle a annoncé dans sa FAQ ? Le mystère reste entier ! Mais ce flou juridique n’est pas de bon augure.
Enfin, Framazic est aussi destiné aux musiciens pour les encourager à utiliser (au moins sur une partie de leur répertoire) des licences libres. Ouvrir les permissions sur ses œuvres, c’est faire tomber les barrières et donc augmenter sa visibilité. Framazic propose aussi un accompagnement pratique, en guidant les musiciens qui veulent mettre leurs œuvres sous licences libres. J’espère que ce projet inspirera des musiciens et les encouragera à continuer de créer !
T’es quoi toi ?
Un inconnu qui fait de la trad’ pour Framalang et le Framablog depuis trois ans à mon rythme et plus ou moins souvent 🙂 Je fais partie depuis décembre dernier de l’association (et à 21 ans je suis le plus jeune de l’asso[2]), et ce rôle me tient à cœur. Je dois avouer que gérer, discuter et prévoir l’avenir de ces initiatives aussi diverses que fédèrent Framasoft est aussi passionnant que chronophage ! J’ai réalisé Framazic pendant l’été, durant mes deux mois de stage chez Framasoft, plus environ un mois supplémentaire pour finir. Je suis assez content de vous présenter aujourd’hui ce projet puisque ça représente pas mal d’énergie et d’heures de travail, et parce que c’est ma première contribution de taille au sein de Framasoft.
Quelles évolutions sont à prévoir pour Framazic ?
À l’origine Framazic devait n’être qu’une présentation rapide de la musique libre, et surtout une compilation de morceaux sous licence libre distribuées en CD, DVD, voire sur d’autres supports. J’ai fait évoluer le projet différemment. Je trouvais qu’on pouvait difficilement effleurer le sujet, sans détailler les explications, et faire un travail de fond. De plus, réduire la quantité d’informations aurait conduit à s’adresser à un public plus réduit. S’ouvrir par exemple aux diffuseurs est à la fois très intéressant pour la promotion de la musique libre, mais entraîne aussi plus de complexité et un certain niveau de responsabilité.
Bref, j’ai plus orienté le projet sur un travail de contenu assez détaillé, et sur la production de quelques ressources réutilisables (la transcription, traduction et VF d’une vidéo de présentation des Creative Commons, des représentations statistiques de l’extrême concentration qu’on observe sur le marché de la musique, etc.).
Cependant l’idée originelle de faire une sélection de musique plus étendue n’est pas abandonnée ! Nous devrions donc, dans un délai encore inconnu, proposer une sélection plus importante de musique et surtout la diffuser sous forme de supports physiques. Rien n’est figé, tout est envisageable concernant son évolution ! Donc si vous avez une idée géniale, partagez-la avec nous 🙂
Et si on veut participer ?
Je pense qu’il va en effet y avoir encore du travail. Quelques paragraphes ne sont pas encore rédigés et il doit rester, malgré les nombreuses relectures, des coquilles et fautes d’orthographe. Quels que soient le temps et l’énergie que vous voulez consacrer au projet, n’hésitez pas à nous faire des propositions et à nous remonter des erreurs grâce au formulaire de contact.
Pendant que nous sommes tout occupés à paramétrer notre smartphones ou à répondre par un « poke » à un « poke » de nos amis Facebook, l’industrie du copyright fait pression et participe à mettre en place des lois qui dessinent les contours d’un monde assez terrifiant pour nos libertés.
Et ce n’est pas, comme on l’affirme souvent, qu’elle ne capte rien à Internet. C’est au contraire parce qu’elle a trop bien compris les dangers qui la menacent.
Un billet cinglant de Rick Falkvinge, que nous aimons beaucoup traduire par ici, et qui vient d’ouvrir une section française de son blog grâce au dynamisme de Paul Neitse et de Jean-Marc Manach. D’ailleurs, zut alors, je m’aperçois au moment de la mise en ligne que ce dernier a déjà traduit l’article en question ! Bon, tant pis, ça fera deux versions, c’est aussi cela les licences libres 😉
How The Copyright Industry Drives A Big Brother Dystopia
Rick Falkvinge – 12 novembre 2012 – Blog personnel
(Traduction : Mnyo, ehsavoie, lgodard, @paul_playe, ordiclic, PostBlue)
Bien trop souvent, j’entends que l’industrie du copyright ne comprend pas Internet, ne comprend pas la génération du net, ne comprend pas à quel point la technologie a changé. Non seulement c’est faux, mais c’est dangereusement faux. Pour vaincre un adversaire, vous devez d’abord comprendre comment il pense plutôt que de le présenter comme le mal. L’industrie du copyright comprend exactement ce qu’est Internet, et qu’il doit être détruit pour que cette industrie garde un soupçon de pertinence.
Regardez les lois qui sont proposées en ce moment : écoutes téléphoniques généralisées. fichage des citoyens, exile par excommunication… Toutes ces lois poursuivent un dessein commun : elles ont pour but de recentraliser les autorisations pour publier idées, connaissances et culture, et punir avec une sévérité totalement disproportionnée quiconque se mettrait en travers du chemin des gardiens.
Être en position de gardien, ou avoir eu ce poste de gardien, apprend à quiconque ce qu’est le pouvoir, dans le pire sens du terme. Si vous pouvez décider quels seront la culture, le savoir et les idées dont pourront profiter les gens – si vous avez la position pour dire si oui ou non une idée sera publiée – alors cela va bien au-delà du pouvoir de la simple publication. Cela vous met en position de choisir. Cela vous met dans une position où vous décidez quel sera le cadre de référence pour tout le monde. Cela vous donne littéralement le pouvoir de décider ce que les gens diront, ressentiront et penseront.
La possibilité de partager idées, culture, et connaissance sans permission ou traçage est inscrite dans les fondements du net, comme c’était le cas pour le service postal lors de sa création. Quand nous envoyons une lettre par courrier, nous et nous seuls choisissons si nous nous identifions comme expéditeur sur l’enveloppe, dans le courrier pour le seul destinataire, ou pas du tout. De plus, personne n’ouvrira nos enveloppes scelées durant le voyage juste pour vérifier ce que nous envoyons.
L’internet reproduit cela. Il est parfaitement raisonnable que nos enfants y aient les même droits que ce qu’ont pu avoir leurs parents. Mais si nos enfants ont ces même droits, dans un milieu où ils communiquent, cela rend une partie de certaines industries obsolètes. C’est donc ce que l’industrie des ayant-droit essaie de détruire.
Ils font pression pour des lois qui introduisent l’identification et le traçage de nos logs de connexion. L’industrie du copyright a été l’un des plus forts soutien de la directive de rétention des données en Europe, qui impose l’enregistrement de nos communications, pas les contenus mais le journal et l’historique de nos sessions (qui avons-nous contacté ? quand ? pour quelle durée ? et ce pendant un temps significatif. Ce sont des données qu’il était absolument interdit de conserver auparavant pour des questions de vie privée. L’industrie du copyright s’est arrangée pour tourner cette interdiction en obligation.
Ils font pression pour introduire des lois impliquant la responsabilité (pénale) à tous les niveaux. Une famille de quatre personnes peut être traduite en justice par un cartel d’industries, dans un salle d’audience où la présomption d’innocence n’existe pas (en procédure au civil). Et ils militent pour que les transporteurs de courriers scellés soient responsables des messages qu’ils transportent. Cela va à l’encontre de siècles de pratique des services postaux en acceptant leurs desiderata extrajudiciaires, en dehors des salles d’audience où les gens ont encore des droits minimums à se défendre.
Ils font pression pour des lois qui introduisent les écoutes téléphoniques pour des populations entières et agissent en justice pour le droit de le faire avant que cela ne devienne la loi. Ils l’ont fait de toute façon sans le dire à personne.
Ils font pression pour des lois permettant d’envoyer des gens en exil (en leur supprimant l’accès au net), les empêchant d’exercer leur fonction dans la société, s’ils écrivent ce qu’il ne faut pas dans des lettres scellées.
Ils font pression pour des lois de censure active comme nous n’en avions plus connues depuis un siècle, utilisant la pédopornographie comme cheval de Troie (qui n’a aucun effet, bien au contraire, sur cette dernière).
Ils font pression pour des lois introduisant une traçabilité, même pour des délits mineurs, incluant spécifiquement le partage de la culture (qui ne devrait pas évidemment pas être un délit). Dans certains cas, lorsqu’il s’agit de violer la vie privée, ces lois donnent à l’industrie du copyright des droits plus forts qu’elle n’en donne aux forces de police.
Réunissons ces lois iniques et il va être enfin possible, enfin, de se de se débarrasser de notre liberté d’expression et de nos droits fondamentaux, tout ça pour soutenir une industrie non-nécessaire. Cela crée un Big Brother cauchemardesque, au delà de ce qu’auraient jamais pu imaginer les gens il y a à peine une décennie. Ma sempiternelle question est la suivante : pourquoi les gens préfèrent-ils s’accommoder de cela au lieu de fracasser la chaise la plus proche sur la tronche de ces bâtards ?
Par exemple, nous avons entendu dire que les FAI (Fournisseur d’Accès à Internet) des États-Unis d’Amérique vont commencer à se soumettre aux diktats de l’industrie du copyright dans le traitement de ses propres clients, jusqu’à les déposséder de leur citoyenneté et de leur droit à l’anonymat. Un jeu que l’on pourrait appeler : j’envoie mamie dans le box des accusés. Un cas d’école de mauvaises relations avec la clientèle dans les futurs manuels de marketing : faire en sorte que vos clients puissent être traduits en justice (et perdre) par des organisations industrielles dans un jeu truqué où ils ne sont mêmes pas présumés innocents. Sérieusement, à quoi pensent donc les FAI ?
Aujourd’hui, nous exerçons nos droits fondamentaux – le droit à la vie privée, le droit à l’expression, le droit à la correspondance, le droit de s’associer, le droit de se réunir, le droit à une presse indépendante, et bien d’autres droits – par le biais de l’Internet. Par conséquent, un accès anonyme et non censuré à Internet est devenu un droit aussi fondamental que les droits que nous exerçons à travers lui.
Si cela veut dire qu’une industrie stupide qui fait de fines galettes de plastique ne peut plus faire d’argent, peu me chaut qu’ils fassent faillite ou vendent de la mayonnaise à la place.
C’est leur problème.
Crédit photo : Thomas Leuthard (Creative Commons By)
« J’ai encaissé deux fois plus d’argent en une seule journée que ce que je touche d’habitude en un mois ! »
Andy Othling est musicien. Il est guitariste de tournée pour Future of Forestry et il a enregistré des albums personnels sous le nom Lowercase Noises.
Sa musique est cool et planante 🙂
Mais ce qui est encore plus cool c’est la très originale et probante expérience qu’il vient de mener sur Internet.
Sous le régime du copyright classique, ses albums sont présents sur le site de vente de musique en ligne Bandcamp (en passant cette plateforme est sans DRM et propose la format FLAC et Ogg Vorbis).
Présents et tous payants, sauf pendant 24h…
C’est le récit de cette folle journée qu’il vous raconte ci-dessous.
Attention, les conclusions pourront fortement heurter la sensibilité de certains hadopistes !
What happens when your music is free for a day?
Andy Othling – 23 octobre 2012 – Blog personnel
(Traduction : Cyrille L., ehsavoie, Martin, Gatitac, Yann, ZeHiro, geecko, Naar, Sparty, Gaëtan, e-Jim, Tchevengour)
Il existe un débat houleux pour savoir si donner gratuitement sa musique est une bonne pratique ou non. Certains disent que cela dévalorise votre musique et vous empêche d’être pris au sérieux. D’autres pensent que c’est nécessaire pour attirer l’attention du public sur celle-ci.
Ce billet n’est pas là pour vous faire adhérer à l’une ou l’autre de ces thèses, mais plutôt pour vous présenter les résultats d’une expérience que j’ai menée il y a quelques semaines. J’ai voulu voir ce qu’il se passerait si je mettais toute ma musique à prix libre (avec un minimum de 0 $) sur ma page Bandcamp pendant 24 heures.
Voici comment j’ai travaillé : j’ai programmé l’envoi d’un e-mail à ma liste de diffusion le 4 octobre à 1 heure du matin annonçant à tout le monde que toute ma musique était disponible à prix libre, à partir de 0 $, et leur indiquant de faire passer le message à toutes leurs connaissances.
J’ai aussi programmé des mises à jour de mes statuts Facebook et Twitter pour la même heure, en demandant aux gens de diffuser l’information les prochaines 24 heures. Ensuite, j’ai programmé des tweets toutes les 2 à 4 heures et des mises à jour du statut Facebook toutes les 4 à 6 heures durant les 24 heures de l’opération, afin de leur rappeler l’offre spéciale.
C’était attendu, l’un des résultats est que beaucoup plus de personnes ont eu accès à ma musique. Ils ont tapé 0 $ et ont téléchargé tout ce qu’ils voulaient gratuitement. Mais d’autres choses intéressantes se sont produites.
Puisqu’un grand nombre de personnes ont téléchargé ma musique (gratuitement ou non), mes albums furent propulsés en haut de beaucoup de listes du site. L’image ci-dessous montre les albums d’ambiance les plus vendus de ce jour si spécial :
Comme vous pouvez le voir, mes six albums sont directement en haut de cette section. Génial ! (Y voir aussi Karl Verdake me réjouis !)
Parce que ma musique a atteint les sommets de certaines listes de Bandcamp, elle est devenue plus visible à ceux qui parcouraient ces listes ce jour-là. Ci-dessous, quelques captures d’écran des pages de statistiques de Bandcamp du jour J :
Plus de 100 personnes sont allées écouter ma musique depuis la page d’accueil de Bandcamp et 50 autres l’ont fait grâce aux listes mentionnées plus haut. Ce sont des personnes qui ne connaissaient pas même l’existence de ma musique.
Je n’ai eu aucune honte a demander aux gens de diffuser autour d’eux que mes morceaux restaient gratuits pendant ces 24 heures. Grâce à cela, quelqu’un a spontanément relayé l’info sur Reddit. Comme vous pouvez le voir ci-dessous, cela m’a apporté encore plus de nouveaux auditeurs :
Une fois de plus, 202 nouveaux auditeurs rien qu’en demandant aux gens d’en parler autour d’eux !
Maintenant, vous vous demandez probablement qu’est-ce que ça a donné en terme de rentabilité. J’avais prévu une chute des revenus, car c’est généralement ce à quoi on s’attend quand on commence à distribuer les choses sans contrepartie. Mais ce qui est en fait arrivé, c’est que, sur les ventes, j’ai encaissé deux fois plus en une seule journée que ce que je touche d’habitude EN UN MOIS. Oui, parfaitement, vous lisez bien. Une journée a davantage rapporté que deux mois en temps normal !
Je ne suis pas vraiment capable d’expliquer cela, mais je pense que ça s’est joué pour beaucoup sur la générosité réciproque. Les gens ont vraiment semblé apprécier que je fasse ce geste et ont répondu en donnant plus qu’ils ne le faisaient auparavant. J’ai ainsi été stupéfait par ceux qui ont décidé de donner davantage pour un album que le prix qu’il leur aurait coûté la veille.
Plus d’argent, c’est génial, mais à mon avis ce n’est pas le plus grand succès de cette expérience.
Vous pouvez constater qu’en une journée, j’ai ajouté plus de 450 noms à mon carnet d’adresses. Ce sont 450 nouveaux contacts dont je pourrais bénéficier à l’avenir, et 450 personnes de plus qui peuvent à leur tour relayer l’info si jamais je venais à répéter ce genre d’opération. C’est bien plus important à mes yeux que l’argent.
Donc, que s’est-t-il passé là?
D’après moi, c’est du gagnant-gagnant. Il n’y a vraiment eu aucun coût pour moi à réaliser cette expérience, les gains se sont avérés énormes et mes auditeurs n’ont pas été abusés. Pour ne rien vous cacher mon taux de téléchargements payants a baissé de 22% à 8%, mais étant donné tout ce qui est arrivé, cela ne me gêne pas le moins du monde.
Alors, que cela signifie-t-il pour vous en tant qu’artiste ? C’est un peu plus dur à dire, étant donné que cela dépend de ce que vous avez mis en place et que la situation de chacun est différente. Mais, cela montre au moins l’importance de l’expérimentation. N’hésitez pas à essayer des choses pour voir à quoi vos fans vont réagir. Vous devez apprendre d’eux comme ils ont appris de vous.
Question : Et vous, avez-vous déjà proposé votre musique gratuitement ou bien à prix libre ? Cela a-t-il fonctionné ?
Crédit photo : Knate Myers
« Il est temps de déboulonner le mythe qui voudrait que le droit d’auteur soit nécessaire pour gagner de l’argent, ou même qu’il en rapporte », tel est le titre frappant d’un récent article de Rick Falkvinge (désormais habitué du Framablog).
Puisque ce mythe ne résiste pas aux faits, il est grand temps désormais pour ces messieurs du copyright d’adopter un discours honnête, sérieux et mature si on veut réellement avancer…
Remarque : Nous avons conservé le terme anglo-saxon « copyright », que l’on traduit souvent en français par « droit d’auteur », car l’acception et le périmètre du mot ne sont pas tout à fait similaires ici.
It’s Time To Debunk The Myth That Copyright Is Needed To Make Money – Or That It Even Makes Money
Rick Falkvinge – 7 octobre 2012 – TorrentFreak.com
(Traduction : fcharton, Gatitac, janfi, Pymouss, bituur esztreym, Jeff_, Mnyo, ti_tux, goofy_seamonkey)
Un des mythes les plus tenaces au sujet du monopole du copyright est qu’il est nécessaire afin de rapporter de l’argent. Il s’avère que cette affirmation est fausse dans un grand nombre de cas observés, mais le pluriel « d’anecdote » n’est jamais « statistiques ». Dès lors, penchons-nous sur des preuves statistiques solides pour l’élaboration de notre réflexion politique à ce sujet.
Puisque le monopole du copyright est principalement une activité économique, on constate un gouffre parmi le public, entre ceux qui soutiennent son abolition uniquement dans un cadre non commercial, et ceux qui soutiennent son abolition complète.
Il y a parmi la population une forte majorité qui se prononce en faveur d’une réduction de ce monopole, afin de favoriser les échanges non marchands entre proches, amis et inconnus. Et si on observe la plus jeune moitié de la population, cette majorité passe de forte à écrasante. Est-il besoin de préciser que cette jeune moitié de la population (qui s’étend jusqu’aux adultes d’une quarantaine d’année) ne changera pas ses habitudes ou ses valeurs sur le sujet, n’en déplaise aux doux rêves avancés par l’industrie du copyright actuellement en exercice. D’ici vingt ou trente ans du reste, ce sont eux qui tireront les ficelles de la politique, et les dinosaures actuels morts et enterrés.
Quand on aborde les questions commerciales de ce monopole, on découvre en revanche un certain nombre de mythes florissants qui ont tendance à freiner l’adhésion du public à une abolition complète du copyright jugée improbable et irréaliste. Voyons quels sont ces mythes, et confrontons-les à la réalité.
Mythe : Si nous abolissons le monopole du copyright, les artistes ne pourront plus gagner de l’argent.
Réalité : C’est un mythe tenace et bizarre, étant donné qu’il y eut des périodes historiques où les artistes n’étaient pas rémunérés. Le système actuel revient à « signer un contrat ou rester pauvre ». Or 99% des artistes ne signent pas de contrats avec l’industrie du disque, et parmi ceux qui le font 99,5% n’ont jamais vu la couleur de leurs droits d’auteur. Il s’agit donc de se dégager d’un système qui laisse délibérément 99,995% des artistes sans aucune forme de revenu pour la pratique de leur art.
Ceci étant donc dit, il est absurde de prétendre que toute évolution vers un système dégraissé de ses intermédiaires « ôterait la possibilité aux artistes de gagner de l’argent », d’autant que ces intermédiaires, devenus aujourd’hui obsolètes, s’octroient en moyenne 93% des revenus des 0,005% des artistes qui gagnent encore de l’argent. Éliminons-les et tout (ou partie) de ces 93% reviendra aux artistes.
Mythe : Le monopole du copyright est une source essentielle de revenus pour les artistes aujourd’hui.
Réalité : De tout l’argent dépensé dans la culture, à peine 2% (oui, deux pour cent !) arrive jusqu’à l’artiste à cause des mécaniques complexes de redistribution du monopoly du copyright. Cela a été étudié en profondeur par le suédois Ulf Pettersson en 2006 (lien vers l’article, lien direct vers l’étude, les deux sont en suédois), qui conclut que la majeure partie des artistes gagnent leur vie autrement (travail intérimaire, prêts étudiants…).
Mythe : L’industrie du copyright est vitale pour l’économie dans son ensemble.
Réalité : « L’industrie du copyright » est délibérément évaluée par des moyens complètement trompeurs qui confinent au ridicule. Dans les consignes de l’OMPI concernant ce qui doit être compris dans « l’industrie du copyright », nous trouvons de tout, de la création de pâte à papier, à la vente d’électroménager, en passant par la fabrication de chaussures (OMPI 2003, d’après l’article de Pettersson cité plus haut). Si vous mettez pratiquement tous les pans de l’économie dans un ensemble X, et que vous affirmez ensuite que cet ensemble X est vital pour l’économie, alors vous pourriez sembler avoir raison. Il suffit de ne pas vous faire prendre quand on s’intéresse de près à la manière avec laquelle vous avez sélectionné ce gros X fourre-tout, et qu’il n’y a aucun lien avec ce dont vous parlez réellement. Les industries tirant profit du monopole du copyright ne représentent qu’un dixième de celles qui en sont désavantagées. Vous voulez créer des emplois ? Détruisez le monopole !
Mythe : Avec le partage gratuit, personne ne va dépenser d’argent pour le divertissement.
Réalité : Les dépenses des foyers pour la culture ont augmenté, année après année, depuis l’apparition du partage de fichiers à grande échelle avec Napster en 1999 (d’autres rapports disent que cela stagne mais aucun ne parle de chute). Il est cependant vrai que les ventes d’enregistrements sur support physique s’effondrent. Ce qui est une excellente nouvelle pour les musiciens, qui n’ont plus besoin de dépendre des intermédiaires qui récupèrent 93% des parts, et qui ont vu au contraire leurs propres revenus augmenter de 114% dans le même laps de temps.
Mythe : Sans la motivation d’un éventuel gain d’argent, personne n’ira plus faire carrière dans l’art et créer.
Réalité : Les gens créent malgré le monopole du copyright, pas grâce à lui. YouTube absorbe 72 heures de vidéos téléversées chaque minute. On peut soutenir que la plupart ne seront sans doute pas visionnées, mais il y a certainement des perles là dedans. La discussion est absurde en fait à partir de la simple observation qu’il y a évidente surabondance d’artistes par rapport à ce que le marché peut contenir : on peut facilement trouver un comptable professionnel qui prend une guitare électrique pendant la pause pour se relaxer un peu, mais montrez-moi ne serait-ce qu’un seul guitariste professionnel qui se détend avec un peu de comptabilité pendant son temps libre.
GNU/Linux et Wikipédia sont deux excellents contrepoints qui font voler en éclat ce mythe étrange. Le système d’exploitation dominant et l’encyclopédie dominante ont été créés par des bénévoles non rémunérés (et quand je dis que GNU/Linux est « dominant », je mets aussi dedans le dérivé Android, juste pour mémoire).
Nous créons depuis que nous avons appris à mettre de la peinture rouge sur des parois de grottes, pas à cause de la possibilité de gagner de l’argent, mais à cause de ce que nous sommes et de ce qui nous fondent. Du reste, les gens qui cherchent de l’argent ne s’engagent pas d’emblée dans les arts. Ils vont en faculté de droit ou de médecine. C’est pourquoi les parents ont l’air si désespéré quand leur rejeton leur dit qu’il a décidé de devenir poète pour gagner sa vie.
Le mythe selon lequel le monopole du copyright serait nécessaire pour que n’importe quelle sorte d’art rapporte de l’argent, ou tout simplement pour que cet art existe, est un mythe obscène perpétué par ceux qui ont quelque chose à gagner en écrémant les 90% de l’argent des artistes, les privant du même coup de l’accès a un public par un racket à l’ancienne.
Pouvons-nous, s’il vous plaît, passer à autre chose maintenant ?
Crédit photo : Stephen Downes (Creative Commons By-Nc)
Source : Budget Hadopi 2013 : 8 millions d’euros, en baisse de 28 % (Numerama)
Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)
Tu ne partageras point, même ce qui est à toi ! Pas un jour sans une nouvelle affaire #CopyrightMadness du « gang de la GAF » ! (Google, Apple, Facebook)
Cody Jackson, alors en service en Irak, rédige un livre sur le langage de programmation Python. Et pour remercier la communauté de tout ce qu’elle lui a apporté, il décide de le placer sous licence libre Creative Comons By-Sa (exactement comme notre projet Framabook en somme). Il vend la version papier, invite au don, met un peu de pub Google sur le site du projet et propose en libre téléchargement les versions numériques du livre.
Sauf que parmi les liens donnés de ses versions numériques, il a le malheur de proposer du P2P, en l’occurrence du torrent qui pointe directement vers The Pirate Bay ou encore Demonoid.
Quoi ? « Torrent » ! « Pirate Bay » ! C’en est trop pour le robot Mediabot, véritable police automatique du copyright Google. Nous sommes évidemment en présence manifeste de ressources illégales ! Et Google de désactiver illico sans autre forme de procès la pub sur le site de notre auteur. Et ne croyez surtout pas qu’il suffit de retirer les liens incriminés pour que Google remette tout en place. Non, non, le mal est fait.
Et pourtant de mal fait il n’y en eut jamais. Bien au contraire, on voulait juste partager et enrichir le bien commun…
Bien sûr, Google est sous la pression constante des ayants droit de l’industrie culturelle et du Grand Hollywood (qui scrute au quotidien ce qui se passe sur YouTube notamment). Mais avec cet absurde faux positif, Google, son service clientèle déshumanisée et son copyright de fer nous affirment avant tout ceci : puisqu’on ne les envisage même pas, puisqu’on condamne le contenant quel que soit son contenu, il n’y a pas de place actuellement pour les ressources libres sur Internet. Ou, plus généralement, et pour reprendre une expression à la mode, il n’y a pas de véritable place aujourd’hui pour les échanges non marchands.
Edit du 28 septembre : Il y a une suite (favorable) à cette histoire (mais une morale à en tirer ?) que nous vous proposons dans la foulée.
Remarque : Il s’agit d’une nouvelle traduction et vous allez constater un nombre inhabituel de traducteurs dans le crédit ci-dessous. Nous sommes en phase de test pour améliorer Framapad et effectivement, hier soir, c’était spectaculaire, avec, au point culminant de la fête, près de 40 collaborateurs « colorés » travaillant en simultané dans la joie, la bonne humeur et le souci collectif d’un travail de qualité. C’est pourquoi, une fois n’est pas coutume, notre image d’illustration n’a rien à voir avec le font du sujet si ce n’est que dans la forme on l’a obtenu ainsi (cf ce tweet plus précis de @framaka). Ils méritaient bien ce petit hommage (quant à l’évolution du projet Framapad, nous venons d’ouvrir une liste de discussion pour là encore avancer ensemble).
Google’s Copyright Crackdown Punishes Author For Torrenting His Own Book
Mike Masnick – 27 septembre 2012 – TechDirt.com
(Traduction : volent, metoo, Smonff, greygjhart, doc_lucy, L’gugus, Toerdas, Wan, Yan G., Evpok, goofy, Rouage, Aymerick, slb, peupleLa, 0gust1, Husi10, Mike, Hellow, Dominique, fredchat, fwix_, e-Gor, TheDarkDweller, minimoy, 5h3d0, lamessen)
Au fil des ans, nous avons souligné à de nombreuses reprises le talon d’Achille de Google : son épouvantable service client.
Essayer de communiquer avec Google s’apparente plus souvent à affronter un bloc de marbre inébranlable plutôt que faire face à un réel être humain. Plus récemment, nous nous sommes inquiétés de l’agressivité excessive de Google pour faire « appliquer » le copyright, dans l’espoir de tenir Hollywood (et ses soutiens au gouvernement) à distance. Combinez ces deux problèmes et vous obtenez une incroyable histoire… comme advenue à notre lecteur Cody Jackson.
Il y a quelques années, alors qu’il était en service actif en Irak, Jackson a écrit un livre sur Python (le langage de programmation) intitulé Start Programming with Python (NdT : Débutez la programmation avec Python). Il a décidé de distribuer le livre gratuitement, en guise de remerciements à la communauté du libre qui, d’après ses dires explicites, lui a énormément apporté. Il a toujours fait en sorte que le livre soit disponible en libre accès et donné les liens vers différentes sources à partir desquelles l’obtenir. Dans le même temps, il a proposé aux personnes de le soutenir via des dons. Et pour se faire un peu d’argent, il a également souscrit au service de publicités Google AdSense qu’il a placé sur son site.
La semaine dernière, il a été contacté par un bot (NdT Googlebot : robot d’exploration de Google), l’informant que AdSense avait été automatiquement désactivé. Pourquoi ? Parce que, affirme-t-on, il distribuait illégalement des contenus protégés par des droits d’auteur. Le courriel, que j’ai pu voir, mentionne que son compte a été désactivé pour la raison suivante :
Précisions au sujet de cette violation
CONTENUS SOUS COPYRIGHT : Comme il est stipulé dans nos conditions d’utilisation, les utilisateurs d’AdSense ne sont pas autorisés à placer des publicités Google sur des sites impliqués dans la distribution de contenus sous copyright. Ceci inclut l’hébergement de fichiers sous copyright sur votre site, ainsi que le fait de fournir des liens ou de rediriger le trafic vers des sites qui proposent des contenus protégés. Plus d’informations sur ces conditions d’utilisation sont à disposition sur la page de notre centre d’aide.
Honnêtement les conditions d’utilisation de Google n’ont ici aucun sens. Fondamentalement TOUT site Web « propose du contenu sous copyright ». Si l’on se réfère à ce que Google a envoyé à Jackson, personne ne pourrait plus faire aucun lien vers d’autres sites s’il souhaite utiliser Google AdSense. Google a une armée de très bons juristes spécialisés dans le copyright, mais ils ont du laisser filer ce point. Je suis sûr que Google voulait plutôt parler de « contenu non autorisé » ou « qui porte atteinte au copyright », mais ce n’est pas ce qui est écrit (NdT : Ou alors ils y sont obligés pour se protéger de tout).
Dans les deux cas, cela semble être ridicule et faire preuve d’un excès de zèle que de suggérer que tout lien vers un site qui, croit-on, véhicule, parmi d’autres, du contenu illicite, doit être considéré comme une violation des conditions de service, même si en l’occurrence le lien en question redirige vers du contenu tout à fait légitime. Le courriel donne un lien vers une « page exemple » justificative. Cette page est celle où Jackson annonce qu’il délivre un torrent de la seconde édition de son livre, et renvoie les gens vers The Pirate Bay et Demonoid pour le récupérer. Rappelez-vous, c’est son propre livre, qu’il a publié lui-même et qu’il distribue librement et gratuitement… intentionnellement !
On pourrait faire valoir que les conditions d’utilisation de Google sont ici volontairement trop générales et elles le sont assurément. Déclarer que vous ne pouvez pas créer de lien vers du contenu légal que vous avez vous-même publié sur The Pirate Bay et dont vous êtes le légitime propriétaire pourrait avoir un effet dissuasif négatif pour ceux qui choisiraient de mettre leurs propres œuvres sur des sites similaires.
Jackson a essayé de joindre Google pour obtenir de plus amples informations. Il leur a expliqué la situation et leur a indiqué qu’il en était l’auteur et l’éditeur et que l’œuvre était publiée sous la licence libre Creative Commons Paternité – Partage dans les mêmes Conditions (CC By-Sa), rendant ainsi toutes les copies se trouvant sur The Pirate Bay parfaitement légales et autorisées. Google lui a rétorqué qu’ils examineraient son argumentaire… avant de lui renvoyer le message suivant :
Merci de nous avoir fourni des informations complémentaires concernant votre site. Cependant, après avoir examiné de près le site python-ebook.blogspot.com et avoir pris votre réaction en considération, nous sommes dans l’incapacité de remettre en fonction notre service publicitaire sur votre site à l’heure actuelle, puisque votre site semble toujours violer nos conditions d’utilisation.
Si vous voulez que nous étudiions à nouveau la participation de votre site au programme Ad Sense, merci de consulter les conditions d’utilisation de notre programme et d’apporter les modifications nécessaires à vos pages web. Pour plus d’informations sur vos conditions d’utilisation, merci de visiter cette page.
Confus après lecture et sans sentiment d’avoir violé quoi que ce soit, il a cependant docile supprimé les liens vers les fichiers torrents en question, quand bien même pour lui il était tout à fait sensé de les conserver. Comme il me l’a dit dans son courriel : « BitTorrent a été l’un des premiers vecteurs de diffusion de mon livre, puisque c’est là que mes lecteurs spécialisés sont susceptibles de traîner. Il m’a semblé que déposer un fichier torrent sur le site de torrents le plus populaire coulait de source. »
Aussi a-t-il à nouveau répondu au Googlebot, après donc avoir cette fois supprimé les liens… Et il a reçu à nouveau le même message exactement ! Il avait bien supprimé les liens mais pas la mention explicite des noms « The Pirate Bay » et « Demonoid ». Cela a suffit, semble-t-il, pour que l’équipe de Google AdSense continue de prétendre qu’il viole leurs termes incompréhensibles. Ils refusent de s’en expliquer. Ils n’ont pas l’air de vouloir vraiment comprendre ce que dit Cody Jackson. Ils bloquent, c’est tout.
Ce qui vaut la peine d’être retenu, c’est que l’on entend constamment les gens qui détestent Google se plaindre de ce que ce dernier refuse en quelque sorte d’enlever ses publicités des « sites pirates ». Cet exemple suggère précisément le contraire : Google est d’une agressivité excessive dans sa manière de bloquer, sous toutes leurs formes, les publicités qui s’affichent a proximité de sites qu’il a jugé lui seul problématiques, même si le contenu est garanti 100% légal et autorisé. Ajoutez à cela l’horrible relation client robotisée de Google, et vous avez une situation malheureuse où un auteur est puni pour avoir fait quelque chose de parfaitement légal et ne semble pas pouvoir trouver chez Google une seule personne réelle, faite de chair et d’os, qui prenne réellement le temps de comprendre ce qu’il se passe.
Voilà pourquoi nous sommes si inquiets quand Google intensifie son « automatisation » sous la pression de Hollywood. Les dommages collatéraux ne sont que trop réels.
Mise à jour du 28 septembre ci-dessous : Un épilogue heureux mais une leçon à retenir…
Mike Masnick – 28 septembre 2012 – TechDirt.com
(Traduction : Lamessen, Pascal, L’gugus, Metal-Mighty, Ag3m, ti_tux)
Grace au relais du site Techdirt, mon problème a été entendu par les robots de Google et mon compte Adsense a été réactivé.
En effet, cinq heures après la publication de l’article sur Techdirt, je recevais un e-mail de Google m’informant qu’ils avaient réétudié mon cas, et décidé finalement que je n’avais pas enfreint leur politique sur le copyright. Je pouvais donc faire apparaître à nouveau les publicités Google sur mon blog.
Je vais pouvoir, comme avant, mettre des liens directs vers mon fichier torrent, mais plus vers «The Pirate Bay» ou d’autres sites de torrents. Car ne veux pas me retrouver confronté à ce problème à nouveau (bien qu’il sot assez tentant voir ce qu’il arriverait si je le faisais).
Le bon côté de cette histoire, c’est que cela a attiré l’attention du public sur les problèmes de réglementation du copyright en général et des politiques d’entreprise en particulier. Lorsqu’une personne ne peut pas publier ses propres créations sur Internet parce qu’une autre a peur qu’il y ait infraction au droit d’auteur, il y a un véritable problème.
Certains commentaires sur Techdirt affirment que j’aurai dû prévoir cela en proposant des liens vers The Pirate Bay et Demonoid qui sont considérés comme des « bastions du piratage ». Et pourtant, avoir fait appel à eux pour aider les gens à trouver mon livre (sous licence libre) montre qu’on peut aussi les utiliser de manière tout à fait légale. Que certaines personnes y déposent illégalement des contenus protégés ne fait pas de ces sites le mal absolu. Ce sont simplement des outils et ils sont neutres en soi, un peu comme un couteau, qu’on peut utiliser à bon ou mauvais escient.
Source : Hadopi : un premier condamné, par naïveté (Numerama)
Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)