Tea Time with Framalang

Tony the Misfit - CC byEt si nous faisions plus amplement connaissance avec notre groupe de traduction Framalang ? Tel est l’objet de ce petit questionnaire aux réponses croisées. Remercions Siltaar, Poupoul2, Olivier, Xavier, Yonnel, Don Rico, Goofy, Claude, GaeliX, Burbumpa and last but not least Yostral, de s’y être pliés de plus ou moins bonne grâce.

Ni de vipère, ni de sorcière, et encore moins de bois, ils sont tout sauf mauvaise lang, qu’ils ont bien pendue une fois sortie de leurs poches et donnée au chat[1]. Ce qui donne un article débridé où rien n’a été occulté, pas même le sexe ou l’outrageuse exploitation dont ils font l’objet par le chef présumé de ce gang bang des postiches (surnommé par certains, j’ai les noms, le « dict’aKator »).

L’occasion de leur témoigner une nouvelle fois notre reconnaissance, de ne pas oublier que « my taylor is free », mais aussi et surtout de rappeler que la porte vous est wide open et que toute nouvelle énergie est plus que welcome.

Framalang Quiz

Bonjour à tous, pourriez-vous vous présenter en une phrase ?

Siltaar : Non, je ne peux pas. Il faut être journaliste ou producteur de cinéma pour croire qu’un Homme peut se résumer à moins que la somme de ses actes.

Poupoul2 : Je m’appelle Poupoul2 (enfin presque) et je me drogue aux logiciels et à la culture libres, à l’amour (celui de ma femme et de mes enfants), et un peu aussi à la crème au chocolat et à la blanquette de veau.

Olivier : Olivier, anciennement étudiant, pas tout à faire dans la vie active encore (mais pas inactif pour autant) on appelle ça un doctorant.

Xavier : Xavier, fraichement diplomé d’une école d’ingénieur du fin fond de notre chère région centre et actuellement développeur php5 pour les gens qui fabriquent les gros avions.

Yonnel : Et ta sœur, elle se présente en une phrase ?

Don Rico : Don Rico, parrain de la mafia des traducteurs, je traduis des romans policiers la journée, et à la nuit tombée, quand les cadavres reposent sagement au fond de la Seine, je traduis des articles pour Framalang et écris quelques trop rares billets pour le Framablog.

Goofy : Je suis un vieux crétin de 51 balais.

Claude : I am just a rigolo who likes the show.

GaeliX : François aka GaeliX (j’ai bien écrit aka pas aKa), consultant en Système d’Information Télécom, GNU/Linuxien depuis Yggdrasil avec des périodes forcées de ouindozeries…

Burbumpa : Burbumpa, 86 % d’H2O, quelques connexions neuronales, curiosité, éclectisme et procrastination…

Yostral : Bonjour. Oui je pourrais.

Quels sont vos logiciels libres préférés ?

Siltaar : Ah, ça c’est simple comme question 🙂 Une série de logiciel en mode console, parce qu’ils sont vraiment efficaces : urxvt, screen, irssi (vi, mutt, mocp…). Quelques grand classiques : VideoLAN Client (VLC), Firefox (Iceweasel), Thunderbird (Icedove). Puis une collection de logiciels GNOME : Gedit, Gthumb, Evince, Abiword, Gnumeric. Petit coup de coeur pour Gkrellm2 et Compiz (brut de décoffrage, sans rien autour, tout juste un AWN).

Poupoul2 : Je ne peux plus me passer de Quod libet. Comme je suis un dangereux pirate, je consomme du Transmission en permanence pour télécharger des tas de trucs subversifs comme des images iso de distributions GNU/Linux ou de la musique sous licence Creative Commons. Je suis un fan absolu d’Inkscape et Blender, qui me servent à créer des flyers pour réclamer l’autonomie du Bourkistan Inférieur et la libéralisation des échanges de nouilles aux épinards.

Olivier : Apt-get, on y pense pas forcément, mais ça a été une révélation. Puis Firefox avec ses plug-in et gedit aussi avec ses plug-in. Avec Terminal voilà les logiciels que j’utilises le plus.

Xavier : Mplayer. Etant cinéphile, c’est la référence. C’est un peu ma femme, très long à configurer mais après, c’est que du bonheur. 😀

Yonnel : Microsoft Word 97, Internet Explorer, Photoshop. Excusez-moi, je suis atteint du syndrome Bayrou. Nan, sérieux : un Firefox tuné avec Web Developer, EditCSS, ColorZilla, ScrapBook (entre autres), et Emacs, magnifique, merci à son psy de me tenir compagnie…

Don Rico : GNU/Linux, Ubuntu, Gnome et Xfce pour le système d’exploitation. Pour les programmes : Firefox, OOo,VLC, Miro, Listen. Pour le Web : Identica, WordPress et le protocole BitTorrent. Pour les formats : les formats ouverts ODF et Ogg. Pour terminer, les licences Creative Commons, et les licences libres dans leur ensemble, qui permettent d’adapter à la culture la philosophie du logiciel libre.

Goofy : FrontPage, Tetris, OpenTheDoor.plz (v.4)

Claude : Debian. Je me shoote à Debian tous les jours depuis que j’ai foutu une patate à deux macs qui s’appelaient Jéquatte et Jétrois.

GaeliX : Les plus utilisés… FF évidement, The Gimp, OOo (et encore plus depuis que j’ai appris par notre ministre qu’il y avait un firewall dedans), VLC, Pidgin, Python, Amarok et les « petits » dont je ne peux pas me passer Xpad, Notecase, Xmmp… Et quand je veux faire « light », Links2, mocp, Alpine, Finch, Raggle…

Burbumpa : J’ubuntuse + les classiques Firefox avc un gros tas de plugins, Thunderbird (id), VLC, CDex, OOo, Scribus, Gimp, Compiz.

Yostral : Ceux qui fonctionnent.

Qu’est-ce qui vous a poussé à participer à Framalang ?

Siltaar : La volonté de participer à l’essor des logiciels libres, et aussi un peu celle de soutenir la francophonie.

Poupoul2 : J’ai un principe dans la vie : Je fais ce que je veux. Et ce que je voulais à ce moment là, c’était jouer avec mes petits camarades de Framalang. Sinon, en vrai, c’est une autre manière de contribuer, pour moi qui, en matière de développement, ai 2 mains gauches remplies de pouces carrés achetées d’occasion à un poulpe. Accessoirement (et plus sérieusement), ça m’est très utile dans mon activité professionnelle, pour laquelle j’exerce à 99% en anglais.

Olivier : C’est une somme de petites choses en fait. L’appel à contribution pour traduire le framabook Changer pour OpenOffice.org m’a mis le pied à l’étrier. Ça correspond à peu près au moment où j’ai adopté Linux et je voulais participer à ma manière.

Xavier : Une conférence de notre ami (il nous connait pas mais on l’aime quand même) Eben Moglen qui a changé ma vie. Le patron cherchait quelqu’un qui fasse les sous titres et je me suis proposé.

Yonnel : aKa avait promis des bières gratuites.

Don Rico : Alexis et Pierre-Yves m’ont promis un T-shirt Framasoft. C’était il y a trois ans, et je le porte toujours pour dormir.

Goofy : On m’a obligé.

Claude : La fièvre du samedi libre.

GaeliX : Si mes souvenirs sont bons c’était le démarrage du framabook Changer pour OOo.

Burbumpa : Ouh, c’est loin .. probablement le projet Changer pour OOo, parce que c’est plus facile de convaincre quand on a un outil à disposition dans sa langue : vous je sais pas, mais je connais un nombre ahurissant d’unilingues francophones…

Yostral : aKa.

Qu’est-ce qui vous a poussé à y rester ?

Siltaar : L’ambiance de camaraderie décontractée que j’y ai rencontrée. L’impression de vraiment faire avancer les choses, d’employer efficacement les quelques moments de détente que j’y consacre.

Poupoul2 : Parce que j’ai toujours le même principe de vie : Je fais ce que je veux. Éventuellement aussi parce qu’ils ne m’ont pas encore mis dehors.

Olivier : Je marche par défis, la première question était « suis-je capable de traduire correctement ? » Ensuite je me suis pris au jeu et je m’amuse beaucoup à traduire. Les propositions d’articles plus techniques ou plus longs, de livres complets… ont gardé ma curiosité et mon envie intactes.

Xavier : Une seule raison, j’ai la flemme de me désinscrire de la mailing list 😀 En fait, c’est l’ambiance, la possibilité de lire des textes sur l’opensource d’autres pays, bien moins ignorants et étroits d’esprit que le notre.

Yonnel : L’espoir d’avoir un jour ces fameuses bières gratuites.

Don Rico : La gloire, le pouvoir et la bière gratuite.

Goofy : La crainte des poursuites judiciaires.

Claude : Les médicaments, mais principalement la fribiaire dont la source est libre.

GaeliX : C’est comme Facebook, la fonction « supprimer le compte » est tellement bien planquée qu’on préfère encore se faire spammer par le chef que de la chercher. Bon, depuis une petite année, pour des raisons perso, je ne suis plus très présent, mais avoir des nouvelles du front et voir que la pieuvre bouge toujours, ça donne envie de s’y remettre… Pour l’instant plus de motivation pour les travaux dans la durée (FAIF) que sur les articles. Et puis surement aussi le petit coté « secte » dans la « secte ».

Burbumpa : Ah, on peut se désinscrire ?

Yostral : Pas aKa.

Quels sont les avantages et les inconvénients à traduire ainsi « à plusieurs mains » ?

Siltaar : Le principal avantage, c’est de se donner le droit à l’erreur, les collègues reliront. Tout en essayant de ne pas faire son boulet sur des questions simples. Ensuite, on apprends des remarques et traductions des autres, c’est enrichissant. Enfin, quand un texte est trop long, ou une conférence trop longue à transcrire seul, on est vraiment réconforté de voir que d’autre sont prêt à donner un coup de main.

Poupoul2 : Tout dépend des mains de vos partenaires : Si elles sont douces, c’est un sacré avantage. Sinon, ça permet de confronter des idées, et l’échange d’idées est toujours très intéressant, quel que soit le sujet. Comme inconvénient, je ne vois pas trop : Nos mains se marchent peu sur les pieds.

Olivier : C’est rassurant de savoir que quelqu’un passera derrière pour rectifier le tir si tout n’est pas parfait. Ça permet d’avancer même sans être absolument satisfait du résultat et je pense qu’au final ça nous permet plus de rapidité sans sacrifier la qualité. D’un autre côté les textes doivent passer par plusieurs étapes de validation et sur certaines périodes un peu creuse ça peut être démotivant de voir le travail stagner par manque de temps des volontaires.

Yonnel : Avantages : on se rattrape nos boulettes respectives. Inconvénients : ils me retirent toujours mes merveilleuses formules, toujours très bien trouvées, à chaque fois des exemples qui devraient être enseignés dans toutes les écoles de traduction.

Don Rico : À plusieurs mains, on tape plus vite sur le clavier, c’est pour ça qu’on abat autant de boulot et qu’on déroule de la trad au kilomètre. L’inconvénient, c’est que ça revient cher en savon.

Goofy : Ça chatouille un peu, les autres mains, au début. Après on s’habitue.

Claude : Au départ le chatouillis dérange, surtout quand on touche les zones sensibles, mais vient ensuite un effet laxatif de pur bonheur d’humilité enrichissant.

GaeliX : Avantage & inconvénient : il y a toujours quelqu’un pour corriger la boulette oubliée. Sinon, une certaine émulation, le fait de savoir qu’un travail commencé finira toujours par aboutir. Et pour paraphraser Sam Williams : « If the experience of writing a book has taught me anything, a writer’s weaknesses become much less apparent with the generous assistance of a few hundred collaborators. »

Burbumpa : Partage du temps nécessaire, et puis plus on est de fous…

Yostral : Faire du multithread pour sourds et malentendants, c’est bandant, non ?

Framalang, le « Courrier International » du Libre ?

Siltaar : C’est un bel objectif, et je suis prêt à traduire des textes espagnols, bientôt chinois… Mais traduire ce n’est pas tout. L’implication des traducteurs est presque un loisir à côté du rôle que tient aKa qui, sans cesse, arpente le web à la recherche des perles à traduire, et des articles intéressants à publier dans le Framablog. Après, il n’est pas seul dans ce rôle, et tout le monde peut proposer un article, mais c’est très confortable de ne choisir que parmi que des articles intéressants, lequel on va traduire ce soir.

Poupoul2 : Je vais avoir du mal à répondre : Je ne lis pas Courrier International. Mais ça doit sûrement s’en rapprocher, puisque Courrier Intergalactique n’existe pas. Sinon, Framalang serait clairement dans cette dernière catégorie.

Olivier : À vrai dire le sujet des articles m’intéresse peu, c’est surtout la traduction en elle-même qui compte pour moi, apprendre des nouvelles choses, progresser. Je crois d’ailleurs que souvent l’introduction sur le blog est plus importante que l’article traduit et ça serait dommage de ne résumer le Framablog qu’à une tribune pour articles dans la langue de Shakespeare. On apporte surtout une autre lumière sur de sujets d’actualité en France.

Xavier : Ben oué… bon évidemment, on ne pioche que dans la réserve anglophone mais quelle réserve !!! J’espère que d’autres hispanophiles et germanophiles nous rejoindront pour élargir nos horizons.

Yonnel : J’ose espérer qu’on fera un peu mieux que ce ramassis de presse bas de gamme.

Don Rico : Oui, mais sans pub toutes les deux pages !

Goofy : « Frama, le libre qui embrasse avec la lang »

Claude : Oh oh ! Le Courrier International ! Je fuis la pubkipu.

Burbumpa : Ou Soft Mother Jones.

Yostral : Tant que ce n’est pas l’International du Libre.

Ne craignez-vous pas que le Framablog finisse par donner une couleur trop anglo-saxonne à la culture du logiciel libre ?

Siltaar : Si, et je me suis déjà exprimer dans le groupe à ce sujet. Nous avons pu débattre de manière satisfaisante, et il en est ressorti deux points : tout d’abord le Framablog équilibre au jour d’aujourd’hui la balance du mieux possible, et ensuite, la porte du Framablog est ouverte à d’autres contributeurs que les traducteurs, des « rabatteurs » de perles françaises sont les bienvenus !

Poupoul2 : Aucun risque : Par nature, le logiciel libre est déjà très teinté d’anglo-saxon, puisque mondialement développé avec des échanges facilités par la langue de Shakespeare. C’est très français comme question. Par contre, c’est vrai que si des compétences dans d’autres langues pouvaient nous rejoindre, ce serait sans doute intéressant (et ça me permettrait de dérouiller mon allemand). Et puis, vive les petites anglaises…

Olivier : On ne peut pas tout faire en même temps, et d’ailleurs ça n’est pas à nous de tout faire. Rien n’empêche non plus les lecteurs de faire des propositions d’articles ou de thèmes qui leurs paraissent adaptés… ou d’offrir leur aide 🙂

Yonnel : Je t’en pose, moi, des questions existentielles ?

Don Rico : Je m’en tape complètement. Si certains veulent lire des articles sur le pinard, le calendos et les cuisses de grenouille open-source, qu’ils s’y collent. (Pour de vrais arguments, veuillez vous reporter aux réponses des collègues.)

Goofy : …c’est sûr je crains un peu.

Claude : I don’t care of the franchouillardise. J’ai toujours préféré Tom Waits à Arthur H.

GaeliX : C’est un « risque », mais en même temps le monde anglo-saxon produit à tous les niveaux des analyses plus poussées dans ce domaine. On trouve trop peu de billets français aboutis et étayés. Peu être est-ce qu’à terme cela mettra un petit coup de gégène dans les parties sensibles des blogueurs/journalistes/décideurs français (pas dit francophones) et les sortira de notre chère « exception culturelle ».

Burbumpa : C’est un faux débat. Il se trouve probablement que pas mal des gens qui s’intéressent à la question sont capables d’écrire en anglais (même si ce n’est pas leur langue maternelle), qui reste (oui je déplore, mais la seule chose que je peux y faire est par exemple contribuer à Framalang !) une langue de communication fort répandue. C’est vrai qu’on pourrait fouiner dans les publications en d’autres langues, mais cékiki s’y colle et qui traduit après ?

Yostral : Aucune chance. La langue anglaise est sur le déclin. L’exception culturelle française vaincra ! (ou pas)

Comment doit-on traduire l’expression « Open Source » ?

Siltaar : Ouverte Source ? Logiciel à code source lisible, mais pas forcément modifiable parce que sinon on aurait précisé « Libre »… Je pense qu’il faut traduire les idées dans la tête des anglophones et qu’ils disent « Libre Software » quand il s’agit de logiciel libre, et Open Source pour le reste, quand ça s’applique. Comme ça on s’y retrouverait plus facilement et on parlerait moins de logiciel pas complètement libre mais proposant une ouverture sur leur code source.

Poupoul2 : Ouvrez vos Shakras ?

Olivier : …bizarrement je ne crois pas que la question se soit vraiment posée. C’est entré dans le langage « courant », non ?

Xavier : Libre, tout simplement. C’est un mot qui prend de plus en plus d’importance vu tout ce qu’il passe dans le monde. Je ne suis pas fan de l’associer avec un mot à consonance informatique, c’est trop réducteur pour ce que cela représente.

Yonnel : On ne traduit pas, non, jamais. L’Open Source, c’est le mal incarné, çapucépalibre.

Don Rico : J’ai écrit à maître Capello, qui m’a répondu : « Si l’on estime que le terme est passé dans le vocabulaire et qu’il est pertinent de garder le terme original, il conviendra d’écrire open-source, car c’est ainsi qu’on orthographie les mots composés importés de l’anglais, comme skate-board ou milk-shake. »

Goofy : How should « logiciel libre » be translated ? (j’ai bon, là ?)

Claude : « source d’ennui » ou encore « source de liquide »

GaeliX : Heu… Joker encore, pas envie de me faire lapider par un intégriste de passage pour une inexactitude sémantique.

Burbumpa : Ouvrez les vannes ?

Yostral : On ne doit pas la traduire, non, jamais.

Comment traduiriez-vous la célèbre citation de Linus Torlvalds : « Software is like sex: it’s better when it’s free! » ?

Siltaar : La programmation c’est comme le sexe, c’est meilleur sans limites.

Poupoul2 : Difficile question pour moi qui n’ai jamais essayé le non-free sex : Utilisez des logiciels libres pour décupler votre plaisir ? (Comment ça, c’est capillo-tracté ?)

Xavier : Utiliser un logiciel, c’est comme faire l’amour, c’est mieux quand une société internationale corporatiste capitaliste nous vous oblige pas à utiliser des préservatifs percés et à vous infliger les piqures à la douleur sans nom lorsque vous avez choper une saloperie. 😀

Yonnel : Je ne pourrais pas traduire : c’est beaucoup trop grossier et subversif, cela n’a pas sa place sur le Framablog. Enfin, pas sur le Framablogalbanel.

Don Rico : Quand on est un geek moche, les logiciels payants ou les putes, il faut choisir.

Goofy : Mmmh voyons voir… euh… « Les logiciels qui aiment le sexe sont libres d’être meilleurs » ?

Claude : Le Houaire Doux, c’est comme le vin: meilleur avec de la bouteille.

GaeliX : Linux est à Windows ce qu’une jolie fille est à une prostituée : la jolie fille, il faut la séduire pour obtenir ce que l’on désire, tandis que la prostituée , il suffit de la payer, et surtout bien se protéger.

Burbumpa : Libérons-nous des codes !

Yostral : Vive les pr0ns !

Certaine mauvaises langues qualifient aKa de « Benevolent Dictator For Life » du réseau Framasoft. Qu’en est-il exactement ?

Siltaar : Voir cet article.

Poupoul2 : C’est indiscutable. Si vous saviez ce qu’on endure. Et en plus, on en re-demande. Du masochisme sans doute.

Olivier : Dictateur je ne sais pas, bienveillant c’est sûr. Je ne sais pas pour les autres mais je m’en accommode très bien. Quand je vois toutes les casquettes qu’il cumule je lui donnerai plutôt le titre de « Benevolent Slave to our cause » 😉

Xavier : Ce n’est pas un dictateur, c’est un être absolument sensationnel et charmant. D’ailleurs, j’ai composé un poème à son honneur.

Ah! Qu’Alexis est un être exquis
Un homme que le soleil ne peut éclipser

Surtout ne nous abandonne pas
Etourdis par tant de candeur
Cassons les barrières qui nous entourent
Osons braver les sans foi ni loi
Un seul poème suffira t-il ?
Reste avec nous, ô notre chef
S‘il te plait, dis-nous que tu nous aimes

Yonnel : C’est bien pire que ça. Il nous force à aller sous Windows pour traduire. De la sorte, nous perdons tout sens critique, et devenons des esclaves prêts à tout pour les beaux yeux de sa moustache (!!!)

Don Rico : C’est qui, cet aKa dont tout le monde me parle ?

Goofy : Cki aKa ?

Claude : C’est malheureusement vrai : y’a qu’aKa qui fait.

GaeliX : C’est pas faux, mais comme le geek névrotique qui sommeille en chacun de nous aime ça, tout va pour le mieux dans le meilleurs des mondes. Et la superposition de plusieurs paires de gants de velours rend les choses plus faciles.

Burbumpa : Ça travaille d’habitude les dictateurs ? En tout cas, celui-là fait bien semblant.

Yostral : Exactement.

Une telle quantité de travail abattu, sans la moindre rémunération ! Ce n’est pas abusé tout de même ?

Siltaar : Si, carrément. Faites des dons au Framablog, comme ça aKa aura encore plus de temps pour nous dénicher des trucs à traduire, et il aura peut être même de quoi s’acheter un fouet pour qu’on suive le rythme !

Poupoul2 : Ah bon, ça n’est pas rémunéré ? Zut, j’aurais dû mieux lire les conditions d’entrée lorsque je me suis inscrit. C’est honteux. C’est de l’exploitation, de l’esclavage moderne.

Olivier : Si si, d’ailleurs on va bientôt se mettre en grève si nous n’obtenons pas d’augmentation ! Il y a une bonne ambiance, pas de pression (non non !) et c’est un loisir avant tout.

Xavier : aKa nous a promis 77 dvds vierges lorsqu’on ira au paradis donc pas de soucis de ce côté là.

Yonnel : Ça dépend. Est-ce que les bières promises comptent dans la rémunération ? Ça se place bien dans la colonne « rémunération en liquide », non ? Dans ce cas, et vu le caractère virtuel de ces bières, on peut les considérer comme des « stock-options du libre ».

Don Rico : Framalang est en fait une couverture pour écouler beaucoup de drogue lors des conventions du libre et des install-parties. Tous les membres de Framalang roulent en BM ou en Porsche, possèdent une villa sur la côte et des comptes en Suisse.

Goofy : Je ne sais pas les autres mais moi je suis bien payé.

Claude : Je croyais que Framasoft avait créé sa monnaie virtuelle : La framakro n’était donc qu’une rumeur ! Ô reur ! Ô des espoirs !

GaeliX : Tout à fait ! Même pas un petit sticker Framasoft à coller sur son netbook c’est honteux ! Organiser une journée d’action pour faire valoir nos droits ne serait pas superflue.

Burbumpa : Ne le dites pas à aKa, le FLFEBeC[2] a vu le jour, des actions sont prévues pour bientôt, notamment une rencontre en chair et en os.

Yostral : Si. Mais heureusement on a droit à notre bière annuelle aux ReuMeuLeuLeux.

Que diriez-vous à ceux qui passent devant Framalang, voient de la lumière mais hésitent à entrer ?

Siltaar : Venez donc par centaine nous rejoindre, pour agrandir le banc de corail sur lequel, comme autant de polypes, nous capturons les articles à traduire à notre rythme (au lieu de mouler sur Linuxfr…).

Poupoul2 : La lumière de Framalang, c’est comme le logiciel libre : Ca se partage avec tout le monde, sans déposséder qui que ce soit. Venez, on va partager notre lampe à bronzer. Et puis aussi, devenez un esclave moderne au service exclusif d’aKa et grâce à lui, ouvrez vous de nouveaux horizons sexuels (Ça résume un peu tout le reste)

Olivier : N’hésitez pas à franchir le pas, pour jeter un œil de l’intérieur, ça n’engage à rien et on a des travaux pour tous les goûts 🙂

Xavier : La porte est ouverte, il reste de la nourriture sur le buffet et en plus, cela n’engage à rien.

Yonnel : Viens vers la lumière, tu en seras récompensé ! Une communauté t’attend, qui ne veut que ton bien… N’aie pas peur, ça ne fait mal qu’un peu, au début ; tu sentiras ensuite une onde de bonheur traverser ton corps…

Don Rico : Qu’ils lisent ma réponse à la question précédente !

Goofy : Tous ceux qui ne rentrent pas sont de la Police Nationale.

Claude : Tu veux une bière ?

GaeliX : Viendez, viendez mais réflechissez bien ! « You can check out any time you like, but you can never leave » (Eagles, Hotel California)

Burbumpa : Je crois savoir que certains ont été appâtés grâce à la bière .. moi on m’a dit : « champagne ! ». Il y en a pour tous les goûts.

Yostral : Petits Schtroumpfs attention ! Fuyez cette maison !

Notes

[1] Crédit photo : Tony the Misfit (Creative Commons By)

[2] FLFEBeC = Front de Libération Framaloguien(ne)s des Exploités Bénévoles en Colère




Luc Viatour – Photographe

Luc Viatour - CC by-saJe ne me souviens plus pourquoi je suis tombé, il y a quelques jours de cela, sur le site du bruxellois Luc Viatour. Était-ce à cause de GIMP ? de la qualité de ces photographies ? des licences libres de ces mêmes images ? de son implication dans Wikipédia ?

Toujours est-il que j’ai eu envie d’entrer en contact avec lui pour lui proposer une courte interview par mail interposé. Et comme vous pouvez vous en rendre compte ci-dessous, il a fort gentiment accepté 😉

Entretien avec Luc Viatour

Bonjour, pourriez-vous vous présenter en quelques mots. On trouve la mention « photographe » sur votre site. En avez-vous fait votre métier ?

Je suis Belge, IT Manager pour une société d’édition. Plus spécialisé dans l’IT pré-presse et impression. Je suis aussi partiellement photographe[1] salarié pour cette entreprise.

Sur votre page utilisateur de Wikipédia, on peut lire « Passionné par les logiciels libres utilisateur de GNU/Linux avec la distribution Ubuntu ». Pourriez-vous nous en dire plus ?

Luc Viatour - CC by-saJ’ai découvert Linux en 1999 suite à des problèmes avec des serveurs Windows. Cela ma intéressé et j’ai rejoint un groupe d’utilisateurs de Linux Belge le BxLUG.

J’ai donc rapidement passé les serveurs du boulot sous Linux Debian. La suite en 2000/2001 je suis passé sous Debian pour mon ordinateur personnel. Rapidement les 3/4 des postes clients au boulot sont passé sous Linux. Nous somme maintenant à 90% sous Linux (Ubuntu pour les clients et Debian pour les serveurs). Je n’envisage même plus autre chose personnellement. Le plus dur pour moi ce fut le passage après plusieurs années de Photoshop à GIMP.

Est-ce que c’est cette passion pour les logiciels libres qui vous a incité à placer vos images sous licence libre ?

Oui l’idée du partage libre m’a séduit doucement…

Que pensez-vous de la pétition « Sauvons la photographie : Pour que la création visuelle continue d’exister et que les Auteurs Photographes puissent continuer à produire des photographies » ? Ne participe-t-elle du même mouvement de crainte et de repli qui caractérise actuellement l’industrie du disque et du cinéma ?

Luc Viatour - CC by-saUn photographe au début de la photographie était un artisan qui vendait un service. Il passait dans les rues faire des photos des passants et vendait son travail pas des droits d’auteur. Je suis pour des images libres qui servent à faire connaître son travail et une rémunération pour un service ou une commande.

Je pense que les droits d’auteurs deviennent invivables, je râle tous les jours de ne pas pouvoir faire des photo d’un bâtiment et les publier car l’architecte n’est pas mort depuis plus de 50 ans alors que c’est un lieu publique et que souvent le bâtiment en question est réalisé avec l’argent public ! Exemple connu en Belgique avec l’Atomium !

Par contre je suis pour le respect des licences choisies par l’auteur des photos, libres ou non ! Ce que de plus en plus de média ne respectent pas ! Les changements doivent venir des auteurs. Je comprend que certains photographes ne veulent pas publier sous licence libre, mais de là à légiférer pour interdire ou limiter les licences libres c’est je pense aller dans un mauvais sens.

Vous éditez vos images avec GIMP depuis 2005. Pourquoi l’avoir préféré à Photoshop ? par principe ? pour ses qualités intrinsèques ? Les deux ?

J’ai eu beaucoup de mal au début après cinq ans d’utilisation de Photoshop, mais voilà pour qui décide d’utiliser Linux, il n’y avait pas le choix et j’ai fait l’effort de changer mes habitudes. Maintenant lorsque je dois travailler sous Photoshop je suis perdu 😉 Comme quoi ce n’est qu’une question d’habitudes.

Plusieurs centaines de vos photographies se retrouvent sur Wikipédia. Pourriez-vous nous en dire plus. Qu’est-ce qui vous motive à participer à un tel projet ?

Luc Viatour - CC by-saJ’ai découvert le projet Wikipédia suite a une conférence au BxLUG. J’ai trouvé cela génial, mais comme je ne suis vraiment pas littéraire, je me voyais mal participer à la rédaction d’un article. Puis j’ai vu qu’il y avait des demande de documents visuels et là je me suis rendu compte que je pouvais aider le projet.

Petit à petit j’ai donc ajouté des photos qui traînaient dans des tiroirs, puis ma démarche a évolué, maintenant je fais parfois des photos volontairement pour Wikipédia. Je suis finalement très content d’avoir fait cela, j’ai énormément de retours sympathiques, bien plus que si elles étaient restées dans mes tiroirs 😉

Notes

[1] Crédit photos : Luc Viatour (GFDL – Creative Commons By-Sa)




Entretien avec Richard Stallman (crise, écologie, politiques européennes…)

D'Arcy Norman - CC byC’est un Richard Stallman qui a, comme d’habitude, laissé la langue de bois au vestiaire que nous retrouvons ici au cours d’un entretien rapporté par le magazine britannique eWeekEurope.

Le logiciel libre en toile de fond, il est notamment interrogé sur le Green computing (informatique écologique), les conséquences de la crise et les politiques toujours critiquables du Royaume-Uni et de l’Europe (surtout si l’on persiste à confondre « Open Source » et logiciel libre)[1].

Richard Stallman : Le logiciel libre est meilleur pour l’environnement

Richard Stallman: Free software costs the environment less

Andrew Donoghue – 18 mars 2009 – eWeek Europe
(Traduction Framalang : Olivier et Claude)

Le créateur de GNU affirme que les logiciels libres sont plus durables que les logiciels propriétaires et soutient que le Royaume-Uni et l’Europe ne voient pas le côté éthique des logiciels.

Le président de la Free Software Foundation, Richard Stallman, ne souffre pas les idiots. En fait il ne souffre pas grand chose, surtout quand c’est propriétaire.

Lors d’une conférence de presse qui s’est récemment déroulée à Budapest, à la suite d’un discours assez suivi sur les droits d’auteur, Stallman a prévenu ses hôtes hongrois de ne pas lui demander s’il désire quelque chose car cela ne ferait que l’ennuyer. On peut voir dans cette approche directe de l’arrogance ou simplement l’expression d’un esprit passionné, chacun son point de vue.

Stallman est un personnage passionné, pas de doute la dessus. Et pas seulement au sujet des logiciels libres – il rejette le terme Open Source qui d’après lui n’a rien à voir avec la liberté. Un rapide coup d’œil à son site Internet et vous verrez que l’homme à qui l’on doit le système d’exploitation GNU – qui a ouvert la route à Linux – est en mission contre tout ce qu’il trouve injuste ou qui restreint la liberté.

Stallman a bien en ligne de mire des problèmes divers comme le réchauffement climatique ou les cartes d’identité numériques, des problèmes qui attisent sa fougue au moins autant que son combat principal : les logiciels libres.

Au cours de la conférence de presse et de la session de Questions/Réponses faisant suite à son discours, Stallman a répondu aux questions de EWeek Europe UK, entre autres, pour donner son opinion sur l’informatique dite verte, l’impact de la crise et l’intérêt porté alors aux logiciels libres.

Qu’est-il arrivé à vos chaussures ?

Je les ai enlevées, j’ai rapidement chaud aux pieds.

La crise a-t-elle des conséquences sur l’intérêt porté aux logiciels libres ?

Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c’est que beaucoup de gens continuent à rejoindre la FSF, nous dénombrons plus de membres maintenant qu’il y a un an. Les gens doivent renouveler leur inscription chaque année, donc on reçoit suffisamment de renouvèlement pour que notre base de membre grandisse. Nous ne sommes donc pas affectés. Mais qui suis-je pour l’affirmer.

Certains disent que la crise pousse les entreprises à adopter les logiciels Open Source ou « gratis » ?

Ce n’est pas la même chose. Les logiciels sont les mêmes, mais ce ne sont pas les mêmes idées. Donc…

Mais si vos idées se répandent pas d’autres moyens… c’est positif, non ?

Je ne vais pas dire non à plus d’utilisateurs, mais évidemment, si leur motivation première est l’économie d’un peu d’argent ils oublient l’essentiel, nous devons donc leur montrer qu’il y a plus important. Il ne faut pas oublier aussi que des programmeurs au chômage ce sont des programmeurs qui ont du temps pour écrire des programmes libres. Je ne sais pas encore si ça nous fera plus de bien que de mal. On verra.

Que pensez-vous de l’annonce récente, faite par le gouvernement du Royaume-Uni, d’ouvrir les appels d’offre pour les projets informatiques gouvernementaux aux solutions Open Source ?

Jusqu’à présent ils n’étaient ouverts qu’aux logiciels propriétaires, c’est donc une bonne chose, mais ce n’est toujours pas la bonne politique. Nous savons que le gouvernement britannique n’a aucun respect pour les droits de l’homme. On dirait que Tony « Blair(eau) » et le nouveau Gordon « Clown » donnent l’impression d’être en campagne pour complètement abolir les droits de l’Homme traditionnels. C’est maintenant un crime d’être suspecté au Royaume-Uni, ils peuvent littéralement inculper quelqu’un au motif qu’il est suspect.

Pensez-vous qu’on puisse vraiment qualifier un logiciel de « vert » et si oui, peut-on dire que les logiciels libres sont plus « verts » que les logiciels propriétaires ?

On ne peut pas faire de lien direct entre écologie et logiciels. Mais c’est vrai que Microsoft, en particulier, use de son pouvoir pour forcer les gens à acheter plus de matériel et à mettre au rebut leur vieux matériel, c’est la raison pour laquelle le US Green Party s’est joint à la Free Software Foundation pour condamner WIndows Vista.

De plus, les logiciels libres donnent aux utilisateurs le contrôle. Les logiciels propriétaires assujettissent les utilisateurs au contrôle des développeurs. Si le développeur est une entreprise avide, elle utilisera ce contrôle pour obtenir ce qu’elle veut de la part des utilisateurs, y compris des choses nuisibles ou désagréables. Je pense donc que votre empreinte écologique sera moindre avec des logiciels libres, mais ce n’est qu’une conséquence indirecte.

Pensez-vous que l’Union Européenne en fasse assez pour encourager l’utilisation des logiciels libres ?

Non, en fait l’Union Européenne ne veut pas parler de ce qui touche à la liberté. Ils ont mis en place un groupe pour étudier l’utilisation de « l’Open Source » mais j’ai lu aujourd’hui que ce groupe est infiltré par des organisations financées par Microsoft qui le sabote complètement. Que pouvez-vous espérer quand ils tournent la question de manière à ignorer les problèmes éthiques ? Cela fait des années que Microsoft fait semblant de participer à « l’Open Source », mais c’est bien parce que ce terme n’a aucune connotation éthique, contrairement aux logiciels libres, qu’il est facile pour Microsoft de développer quelques programmes qui se veulent Open Source et de dire « Vous voyez, nous sommes un développeur Open Source », comme ça ils sont invités dans ces commissions et ils peuvent freiner des quatres fers.

Alors que devrait faire l’Union Européenne ?

L’Union Européenne devrait reconnaître que les ordinateurs méritent d’être libérés et elle devrait arrêter d’adopter des directives qui rendent les gens moins libres.

Imaginiez-vous dans les années 70 que Windows, un système d’exploitation propriétaire, serait utilisé par plus de 90 pour cent des ordinateurs ?

Qui sait, je ne pensais pas à ça alors.

Qu’en pensez-vous maintenant ?

Je suis vraiment triste de voir qu’autant de gens utilisent des logiciels propriétaires, cela signifie que les développeurs ont hypnotisé les utilisateurs. Microsoft dispose d’un pouvoir que personne ne devrait jamais avoir. Apple aussi a le pouvoir sur ses utilisateurs.

Microsoft utilise une porte dérobée qui lui permet de modifier les logiciels quand ça lui chante. L’utilisateur n’a aucun contrôle, aucun moyen de se défendre. Windows n’est pas armé pour se protéger du pire auteur de logiciels malveillants, c’est à dire Microsoft. Apple a fait la même chose dans Mac OSX. Et non, GNU/Linux n’a pas de telle porte dérobée en général.

Vous décidez de la version du logiciel que vous voulez installer. Les utilisateurs de logiciels libres ont le contrôle. Si un utilisateur trouve une porte dérobée dans un logiciel libre, quelqu’un en publiera une version épurée et tout le monde l’adoptera. Les utilisateurs de Windows n’ont pas cette possibilité car ils n’ont aucun contrôle.

Notes

[1] Crédit photo : D’Arcy Norman (Creative Commons By)




Wikipédia et éducation : un exemple de réconciliation 4/6

Cet article fait partie du dossier Wikipédia et éducation : un exemple de réconciliation.

C’est la traduction d’une interview du professeur et de trois de ses étudiantes parue dans la Gazette du Wikipédia anglais qui est ici présentée[1].

Copie d'écran - Wikipédia - Interview

Rencontre avec l’équipe du 2000ème Article de Qualité

Wikinews interviews team behind the 2,000th featured Wikipedia article

Brian McNeil – 14 avril 2008 – Wikipedia Signpost
(Traduction Framalang : Olivier)

Cette semaine, la version anglaise de Wikipédia célèbre son 2000ème Article de Qualité avec l’accession à ce grade de l’article El Señor Presidente. Les Articles de Qualité (AdQ) sont les exemples de ce que Wikipédia a de mieux à offrir en termes de qualité, de précision, de neutralité, d’exhaustivité et de style, et sont par conséquent considérés comme les meilleurs articles sur Wikipédia.

Le système d’évaluation de Wikipédia (proposition d’Articles de Qualité) qui juge les candidatures a élevé cinq articles au rang d’Article de Qualité en même temps : Walter de Coventre, Maximian, El Señor Presidente, Lord of the Universe et Red-billed Chough. Lorsque cinq articles se voient simultanément attribuer cette distinction comment déterminer lequel est le 2000ème autrement qu’arbitrairement ? À vrai dire chacun de ces articles pouvait légitimement revendiquer cet honneur.

Ce qui démarque El Señor Presidente des autres est qu’il est le premier exemple connu d’Article de Qualité directement issu d’un projet pédagogique, le wikiprojet Madness, Murder, and Mayhem (NdT : Meurtre, Folie et Chaos). Jon Beasley-Murray, professeur de littérature espagnole à l’Université de la Colombie Britannique, a en effet décidé de demander à ses élèves de participer à Wikipédia plutôt que de rendre des dissertations classiques. Il leur a ainsi attribué un ensemble d’articles à créer sur la littérature espagnole. Et de la qualité de l’article dépendait la note finale, un Bon Article apportant un A à ses auteurs tandis qu’un Article de Qualité leur assurait un A+. La classe a reçu l’aide de la FA-team, un nouveau Wikiproject dont le but est d’aider les nouveaux wikipédiens à obtenir le statut d’Article de Qualité. Parmi les douze articles sélectionnés, huit ont atteint le grade de Bon Article et trois au total sont devenus des Articles de Qualité (Mario Vargas Llosa et The General in His Labyrinth ont obtenu leur distinction dans la foulée de El Señor Presidente). Au début du projet la plupart de ces articles ne figuraient pas dans l’encyclopédie et certains ont donc été créés pour l’occasion comme ce fut le cas pour El Señor Presidente.

L’idée de Beasly-Murray était de se servir de Wikipédia comme d’un espace collaboratif où ses étudiants pourraient à la fois travailler leur matière et fournir, en quelque sorte un service public virtuel. Il a donc initié un projet Wikipédia, Murder Madness and Mayhem, dans le but de créer ou bonifier des articles sur les ouvrages de littérature d’Amérique Latine étudiés dans son cours. El Señor Presidente est l’œuvre de l’écrivain guatémaltèque lauréat du prix Nobel Miguel Ángel Asturias. C’est donc sans surprise qu’il est vu comme l’un des titres majeurs de la littérature sud-américaine.

Beasley-Murray a décrit cette expérience dans un essai. Il y raconte comment ce devoir a permis aux étudiants d’améliorer leurs aptitudes de recherche et comment ils se sont adaptés au cas particulier de l’écriture à destination d’un large public. Wikipédia, dit-il, n’encourage pas le type d’écriture persuasive généralement demandée en université, mais c’est un très bon exercice de recherche où il faut faire preuve d’esprit critique. On notera que ce WikiProject a causé quelques remous dans certains forums Internet dédiés à l’éducation, comme dans ce message intitulé : « Est-ce que Murder, Madness and Mayhem représente le futur des études supérieures ? ».

Ce n’est pas le premier projet universitaire faisant partie d’un cursus. C’est en revanche le premier à rencontrer un tel succès. Par le passé, des projets semblables ont connu des destinées diverses et variées, certains n’apportant que peu d’informations aux pages concernées, d’autres étant carrément chaotiques, sans réelle gouvernance, ne montrant aucun respect pour les règles de Wikipédia et n’ayant pas vraiment d’autres consignes que « étoffez pour avoir une bonne note ». Ce projet a réussi là où d’autres ont échoué pour deux principales raisons : le leadership du professeur, Jbmurray et les conseils de la FA-Team qui a aidé les étudiants et leur professeur à se faire aux us et coutumes du site et autres bizarreries typiquement wikipédiennes.

L’équipe de Wikinews a contacté le professeur Beasley-Murray pour qu’il nous raconte plus en détails cette histoire dans une interview. Vous trouverez ses réponses ci-dessous. Elles sont complétées par les interventions de trois de ses étudiants qui ont participé à la création et à l’élévation de El Señor Presidente au rang d’Article de Qualité. En plus du 2000ème Article de Qualité, le projet a pour l’instant aussi donné naissance à sept Bons Articles.

Murder, Madness and Mayhem

Wikinews : Professeur Beasley-Murray, merci de nous accorder un peu de votre précieux temps et merci d’avoir accepté de nous rencontrer. Pouvez-vous nous expliquer ce qui vous a conduit à initier ce projet ?

Dossier Wikipédia - Jon Beasley-Murray - CC byProf. Jon Beasley-Murray : En premier lieu, je voudrais dire que j’ai déjà écrit quelques réflexions à propos du projet sur Wikipédia même, c’est un essai que j’ai intitulé « Madness ».

Mais je peux vous en faire un résumé : j’ai fait quelques modifications sur Wikipédia il y a un an. J’ai commencé un peu par accident, après avoir découvert avec surprise qu’une partie de mes travaux universitaires se sont retrouvés sur le site. J’ai consacré un peu de temps à réorganiser et à étoffer des articles et des catégories liées à l’Amérique Latine, en particulier à la culture sud-américaine, qui est ma spécialité. J’ai découvert que la couverture de ce sujet sur Wikipédia était inégale, c’est le moins que l’on puisse dire. C’est en m’engageant là dedans que j’ai pris conscience que des étudiants pourraient apporter une participation constructive au site. Ils se servent déjà de Wikipédia, pourquoi ne pas trouver une manière de les faire participer ? C’est là que j’ai réalisé que c’est seulement en contribuant à cette encyclopédie qu’on peut vraiment la connaître, mieux distinguer ses forces et ses faiblesses, mais surtout comprendre ce qui fait qu’elle est comme elle est.

En fait j’ai toujours été attiré par l’usage de la technologie dans l’enseignement : listes de diffusion, sites Web, etc. Mais je n’ai jamais été un grand fan des « technologies de l’éducation » et ses prgrammes comme WebCT que les élèves ne rencontrent qu’en classe. En créant une sorte ghetto pédagogique, les technologies de l’éducation semblent passer complètement à côté des possibilités les plus intéressantes et les plus passionnantes qu’offre Internet : l’ouverture sur le vaste monde qui existe en dehors de la salle de classe et la re-définition des liens, parfois fragiles, entre les enseignants (censés être des experts et des puits de savoir) et les étudiants (trop souvent considérés comme les destinataires passifs de ce savoir).

Globalement, le projet sur Wikipédia avait plusieurs avantages :

  • faire mieux découvrir Wikipédia aux étudiants, un site important qu’ils emploient souvent (et trop souvent à mauvais escient);
  • améliorer Wikipédia en créant du contenu nouveau sur des sujets encore incomplets;
  • encourager les étudiants à créer quelque chose qui irradie au-delà du périmètre du cours, dans la sphère publique;
  • leur donner des objectifs tangibles qui seraient jugés autrement que par mon point de vue professoral;
  • changer leur approche de l’écriture en mettant en valeur l’importance de l’amélioration permanente;
  • leur apprendre la recherche et comment utiliser et évaluer une source.

Avez-vous consulté d’autres universitaires ou des étudiants avant de lancer ce projet ?

JMB : Non, pas vraiment en fait. Peut-être aurais-je dû ! Mais j’ai évoqué cette idée l’été dernier avec un ami qui travaille dans les technologies de l’éducation à l’Université de Colombie Britannique qui m’avait déjà aidé par le passé à intégrer des blogs dans mes cours. Cet ami, Brian Lamb, s’est montré comme à l’accoutumée enthousiaste pour ce genre d’expérimentation. Il s’est renseigné pour savoir si des bourses allouées à ce type d’initiatives existaient, mais apparemment ce n’était pas le cas. J’ai malgré tout décidé de poursuivre mon idée en solo.

Et en janvier, au moment où le projet allait débuter, je me suis inscrit sur Wikipédia : Projets Pédagogiques. De nombreux autres projets y étaient déjà référencés, certains déjà achevés, d’autres encore en cours. Je me suis alors dit que je n’étais pas vraiment seul finalement et que mon projet n’était pas si innovant. Je ne me suis rendu compte à quel point notre projet était différent et ambitieux que bien plus tard : notre but était de créer des Articles de Qualité, douze si possible, alors qu’aucun autre projet pédagogique n’y était parvenu !

Je suppose que la communauté Wikipédia vous soutenait. Des personnes extérieures à cette communauté vous ont-elles adressé des critiques négatives ?

JMB : Non, mais comme je vous l’ai dit, je n’en ai parlé à quasiment personne.

Mais je voudrais quand même préciser qu’il ne fallait par prendre le soutien de la communauté Wikipédia pour argent comptant. Pour d’autres projets pédagogiques, la première réaction des wikipédiens n’était pas si favorable. C’est en partie dû au fait que les étudiants sont encouragés à créer un nouvel article sur ce qu’ils veulent et ceux-ci se retrouvent rapidement menacés de suppression. C’est aussi parce qu’ils écrivent leurs dissertations hors ligne puis les envoient, et évidemment le plus souvent elles ne respectent pas les règles en vigueur sur Wikipédia (celles sur les Travaux inédits par exemple). Ces articles se retrouvent très vite décorés de commentaires et les pages de discussion qui y sont associées sont remplies d’avertissements et de reproches. Nous avons globalement réussi à éviter cela… principalement par chance ! Mais aussi que c’est parce que j’avais déjà passé pas mal de temps sur Wikipédia, et que j’étais familier de certaines coutumes du sites (mais pas toutes, loin s’en faut). Et puis surtout nous avions un but précis : les étudiants ne contribuaient pas à Wikipédia juste pour le plaisir de contribuer à Wikipédia.

Malgré cela, l’un de nos articles a été marqué pour « suppression rapide ». L’article s’est retrouvé affublé de ce bandeau moins d’une minute après que je l’ai créé devant tous les étudiants pendant un cours. Ce fut, devant toute la classe, un horrible moment de solitude, et j’ai eu furtivement le sentiment que tout allait très mal se passer. L’article marqué pour suppression immédiate était El Señor Presidente… qui est devenu, comme vous le savez, le 2000ème Article de Qualité sur Wikipédia.

Quelle importance dans la notation finale des étudiants avez-vous accordée au travail sur Wikipédia ?

JMB : À la base, le travail sur Wikipédia devait seulement représenter 30% de la note finale pour ce cours. Mais arrivé à la moitié du semestre j’ai commencé à m’inquiéter car le projet n’avait que peu avancé. J’ai donc proposé aux élèves de modifier la méthode d’évaluation en annulant les examens de fin de semestre. Par conséquent, les autres travaux qu’ils avaient réalisés (un partiel, leurs blogs et Wikipédia) devenaient tous plus importants. Après avoir évoqué cette proposition je leur ai laissé le temps de la réflexion. La décision a été prise par vote à bulletin secret avec la règle suivante : l’évaluation ne serait modifiée que si au moins deux tiers (66%) de la promotion étaient pour. Finalement, 85% de la classe a voté en faveur de l’augmentation du coefficient du projet Wikipédia pour qu’il représente 40% de leur note finale.

Étant moi-même (Brian McNeil) membre du comité de communication de la fondation Wikimedia, j’entends souvent les arguments des deux camps sur la pertinence et la fiabilité de Wikipédia. Les cas de figure peuvent être diamétralement opposés : depuis des étudiants se demandant pourquoi leur bibliothécaire ou leurs professeurs ont proscrit l’usage de Wikipédia pour un devoir, jusqu’au cas plus récent d’un enseignant chirurgien au Royaume-Uni demandant la permission de citer abondamment Wikipédia pour une publication sur la pertinence de l’encyclopédie et l’utilité qu’elle pourrait avoir pour les étudiants en médecine. J’ai une réponse toute prête pour expliquer comment vérifier les sources de Wikipédia : Wikipédia est un point de départ formidable pour vos recherches et si vous rejetez Wikipédia vous devriez aussi rejeter Britannica. Êtes-vous d’accord avec ça ?

JMB : Au cours de ce semestre je me suis forgé ma propre réponse à cette question. Si l’article Wikipédia est bon vous n’aurez même pas à le citer car il contient tous les liens nécessaires. S’il ne contient pas ces liens, ce n’est pas un bon article et il ne devrait donc surtout pas être cité.

Avant ce semestre je demandais expressément à mes étudiants de ne pas citer Wikipédia dans leurs devoirs, et je vais continuer dans cette voie. Je me méfie aussi quand ils citent des définitions du dictionnaire. Et même s’ils ne citent pas l’encyclopédie Britannica (je pense que Wikipédia a remplacé Britannica en fait), je ne serais pas non plus impressionné s’ils le faisaient.

Mais évidemment, comme vous le dites, Wikipédia peut être un excellent point de départ pour une recherche. Je l’utilise d’ailleurs souvent dans cette optique.

Feriez-vous à nouveau appel à un wiki si vous deviez recommencer une expérience collaborative ? On parle de quelque chose qu’on pourrait appeler « Eduwiki » pour la création de contenu pédagogique. Seriez-vous prêt à vous impliquer dans un tel projet ? Pensez-vous que le logiciel Mediawiki pourrait être utilisé dans d’autres domaines de l’éducation ? Ce type d’initiatives pourraient faire partie de plus vastes projets lancés par la fondation Wikimedia tels que Wikibooks ou Wikiversity. Choisiriez-vous ce type de fonctionnement ouvert au détriment d’un projet fermé au sein du monde universitaire où les compétences des contributeurs peuvent être vérifiées ?

JMB : Je ne sais pas vraiment. Comme vous avez déjà pu vous en apercevoir, j’ai fortement tendance à douter de tout ce qui comprend « édu » dans la dénomination. Je dis ça avec tout le respect que je dois à mes amis qui sont dans « EduTech », mais je devrais ajouter qu’ils sont souvent aussi suspicieux que je le suis, si ce n’est plus ! J’ai déjà travaillé deux fois avec des wikis dans des environnements plutôt fermés, ça n’a jamais été un succès. Je pense que c’est parce que nous n’avions pas atteint la masse critique. Ce qui fait que Wikipédia marche c’est la masse critique (même si, bien sûr, un faible pourcentage des lecteurs de Wikipédia deviennent contributeurs).

Dossier Wikipédia - Université de la Colombie Britannique - CC by-saIl faut dire aussi que peu de gens du monde universitaire comprennent l’esprit des wikis. Il leur (nous) est difficile de ne pas se (nous) montrer possessifs vis-à-vis de leur (notre) travail. Je crois que c’est de là que naissent les antagonismes et la frustration que ressentent les universitaires lorsqu’ils s’impliquent sur Wikipédia. C’est rarement « l’expertise » qui est en cause mais plutôt la propriété. Je reconnais que je ne suis pas très précis, mais par exemple un wiki avait été mis en place dans mon université, mais il était impossible de modifier le texte de quelqu’un d’autre. On aurait très bien pu alors afficher des pdf. C’était plus un exercice de monographie qu’un exercice d’écriture collaborative.

Et pour ce qui est des qualifications, sujet largement débattu sur Wikipédia, je pense que ce sont des sornettes. Je ne pense pas que les qualifications aient une si grande importance. Mes étudiants ne peuvent pas s’enorgueillir de beaucoup de titres, mais ils ont quand même produit un excellent résultat.

Comment qualifieriez-vous la réaction de vos étudiants à l’idée de faire ce devoir alors que tout le monde peut observer leur progression, y étaient-ils réceptifs ?

JMB : Dans les cours précédents j’ai souvent demandé à mes étudiants de tenir un blog, blog qui était évidemment visible de tous. Mais à vrai dire, peu de personnes se retrouvent pas hasard sur le blog d’un étudiant. Ce n’est pas vraiment le fait que les articles de Wikipédia soient publics qui importait mais plutôt le fait qu’ils allaient contribuer à l’un des dix sites les plus visités sur Internet. Alors je me suis décidé un jour à faire mes petites recherches pour savoir combien de personnes visitaient les pages sur lesquelles nous travaillions (j’ai accumulé ces résultats et je les ai plus tard mis à jour ici). Durant le cours suivant nous avons joué à deux petits jeux de devinette. Il fallait d’abord qu’ils devinent le pourcentage d’Articles de Qualité sur Wikipédia ; ils ont commencé avec 30% et ça leur a pris du temps avant de baisser leur estimation à 0,15%. Nous avons fait ce petit jeu juste après qu’El Señor Presidente eut atteint le statut d’Article de Qualité, ça leur a donné une idée de la performance qu’ils avaient réalisée je pense.

La deuxième devinette concernait le nombre de pages vues que généraient leurs articles chaque mois. Je ne sais plus quel nombre ils m’ont dit en premier, mais ce que je sais c’est qu’il était bien inférieur aux 50000 visites que l’article sur Gabriel García Márquez reçoit effectivement. Après avoir calculé que cet article devait recevoir plus de 600000 visites par an (je crois que c’est 750000 maintenant), l’équipe en charge de cette page a reçu un choc. Mais je pense aussi que réaliser l’importance de leur travail était excitant en même temps. Et je sais aussi que les étudiants qui verront bientôt leur article sur la page d’accueil du site anglais (le 5 mai) seront vraiment enchantés. Mais je crois que ce qui les intéresse le plus (eux et les autres étudiants) n’est pas le fait que le « public » ait accès à leur travail mais plutôt le fait de pouvoir dire à leurs amis et à leur famille de jeter un œil à leur travail.

Certains de vos étudiants ont-ils eu des problèmes d’adaptation qui les ont empêchés de travailler sur Wikipédia ?

JMB : Oui. Les réponses ont été assez variées. Certains étaient vraiment enthousiastes. Pour d’autres, il fallait laisser le temps à l’idée de faire son chemin. Quelques-uns ne se sont jamais vraiment sentis à l’aise avec le travail sur Wikipédia. Il m’est difficile de dire individuellement pourquoi. Certains ont été trop intimidés par la technologie, mais je pense surtout qu’ils n’y ont pas consacré assez de temps pour dépasser les premières barrières. De plus, comme c’était un travail de groupe, certains de ses effets pouvaient être angoissants par moments. C’est un aspect auquel je devrais réfléchir avant de tenter à nouveau une expérience similaire.

Pensez-vous que fonctionner ainsi, de manière aussi ouverte, a poussé les étudiants à travailler plus consciencieusement qu’ils ne l’auraient fait autrement ?

JMB : Oui, absolument, c’est certain ! Les étudiants, les plus actifs tout du moins, ont participé à l’élaboration d’articles comprenant entre 4000 et 8000 mots étayés par des recherches exhaustives, corrigés à maintes reprises, avec un souci du détail méticuleux. N’importe lequel des articles qu’ils ont rédigés est bien meilleur que n’importe quelle dissertation qu’ils auraient produite autrement. Évidemment, certains étudiants étaient plus actifs que d’autres. Ils ont donc appris plus et ont aussi été plus poussés que les autres. Mais les remarques et les questions incessantes des autres éditeurs de Wikipédia, en particulier des membres de la FA-Team, qui a réalisé l’essentiel du travail de révision, les ont forcés à toujours réfléchir à ce qu’ils disaient, à comment ils le disaient et à bien citer leurs sources.

Rétrospectivement, que feriez-vous différemment ?

JBM : Certains aspects du travail en groupe n’ont pas fonctionné de manière optimale. Nous avons également commencé assez lentement : il faudrait que je réfléchisse à comment y remédier. De plus, une fois que le projet sera achevé, la FA-Team et moi (et n’importe quel étudiant intéressé évidemment) prévoyons une réflexion « post-mortem » sur tous les aspects de la collaboration. On peut toujours améliorer les choses. J’ai aussi beaucoup appris grâce à ce projet et j’espère bien me servir de cette expérience la prochaine fois.

Vous en êtes à 6000 éditions, avez-vous attrapé le « virus wiki » ? Allez-vous continuer à participer ?

JMB : 7000 maintenant ! Il faudra bien que je lève le pied quand le projet sera terminé car il m’a pris énormément de temps. Mais je compte me remettre en selle à l’automne.

Maintenant que l’on peut dire que votre projet est une réussite, qu’auriez-vous à dire à d’autres universitaires pour les persuader de se lancer dans des expériences similaires ?

JMB : Je les y encouragerai c’est sûr, mais je ne voudrais pas passer pour un évangéliste de Wikipédia. Je peux tout à fait comprendre pourquoi des activités précédemment engagées avec l’encyclopédie ont pu se révéler décevantes, frustrantes ou pire encore. Mais je pense que, particulièrement si les universitaires prennent le temps de comprendre les aspects de la culture de Wikipédia, certaines activités peuvent se montrer très gratifiantes. Nous avons eu beaucoup de chance de croiser le chemin de la FA-Team, un groupe d’éditeurs expérimentés de Wikipédia qui venait juste de se former pour aider les autres à atteindre le statut d’Article de Qualité. Leur participation a été un vrai don du ciel. Mais je ne vois pas pourquoi d’autres ne pourraient pas bénéficier d’une assistance semblable (voire différente, sait-on jamais, et peut-être meilleure) dans d’autres circonstances.

Avant de continuer en faisant participer vos étudiants à la discussion, j’aimerais conclure en vous demandant votre avis sur l’intégration d’un tel exercice au programme. L’envisagez-vous ? Pensez-vous que d’autres institutions devraient étudier votre projet en vue de le reproduire ?

JMB : Je recommencerai cette expérience, ça ne fait aucune doute. Le seul côté négatif pour le professeur est que, s’il veut que le projet soit correctement mené, il doit y consacrer beaucoup de travail. Mais d’un autre côté, en terme de ressources, ce genre de projet n’en requiert quasiment pas. Mon université (et bien d’autres) paye des licences à plusieurs millions de dollars pour des logiciels pédagogiques comme WebCT. C’est de l’argent gaspillé, beaucoup d’argent gaspillé d’après moi, mais je reconnais que c’est un racket lucratif pour ceux qui vendent ces logiciels. Je pense aussi que l’université se désengage d’une part importante de sa mission : investir dans les Biens Communs. La tendance aujourd’hui, dans le monde universitaire, est à la privatisation et au cloisonnement (même si je dois dire qu’il existe encore quelques valeureuses exceptions, le travail sur l’accès libre de mon ancien collègue John Willinsky est à ce titre exemplaire). À mesure que les universités s’impliqueront dans Wikipédia, elles réaliseront qu’elles peuvent le faire sans nécessairement y perdre leurs exigences de qualité en matière de recherche et la rigueur universitaire qu’il est également de leur devoir de défendre, et que cela profite non seulement à leurs étudiants mais aussi au bien commun.

Bons Articles et Articles de Qualité

En plus de l’Article de Qualité, sept autres articles ont atteint le statut de Bons Articles. Était-ce une source de motivation pour tous ceux d’entre vous impliqués dans le projet ?

Dossier Wikipédia - Étudiants de Jon Beasley-Murray - CC byMonica Freudenreich : Je ne peux pas parler au nom de toute la classe, mais je crois que nous étions tous un peu hésitants. Nous n’avions jamais été confrontés dans notre cursus à un projet d’une telle envergure et nous ne savions pas vraiment ce qui allait en ressortir, c’est le moins que l’on puisse dire. Nous autres étudiants, nous avons l’habitude de toujours faire les choses à la dernière minute et pour ce projet ça n’était vraiment pas possible. Et donc, malgré un démarrage assez poussif dans l’ensemble, je pense que le statut que la plupart des articles du projet ont atteint est vraiment impressionnant et que cette réussite est une énorme motivation en elle-même.

Katy Konik : Je ne peux pas parler au nom de tous, mais je pense que de voir tous ces articles atteindre le statut de Bons Articles a prouvé que l’objectif était tout à fait atteignable. Je crois que le seul problème est qu’au sein de la classe chacun travaille à son rythme. Voir que d’autres ont déjà atteint le statut de Bon Article quand on n’y est pas encore peut mettre la pression.

Elyse Economides : Cela nous a servi d’encouragement, mais en même temps rendait la tâche un peu plus intimidante. C’était formidable de voir tant de groupes atteindre le statut de Bon Article au bout de quatre mois, mais cela nous rappelait également tous les efforts et le temps qui devaient y être consacrés. Heureusement, voir nos camarades obtenir le statut de Bon Article nous a convaincus que ce défi était à notre portée.

À quel moment avez-vous ressenti qu’il était possible d’atteindre les statuts de Bon Article ou d’Article de Qualité ? Depuis combien de temps travailliez-vous sur Wikipédia à ce moment là ?

MF : Je me suis créé un compte en janvier, comme beaucoup d’autres étudiants de notre classe, je ne savais même pas avant qu’on pouvait modifier Wikipédia. La page a été créée, je crois, le 15 janvier, avec l’aide du Dr Beasley-Murray. Comme je n’avais aucune idée de la manière de créer une page, après que le bandeau « suppression immédiate » ait été apposé sur l’article, je me suis dit que je devrais y apporter du contenu pour éviter qu’elle soit supprimée. Nous avions entrepris notre travail depuis 3 mois avant d’être promus sur la liste des articles candidats au grade de Bon Article puis à partir de là il nous a fallu 1 mois supplémentaire pour recevoir notre étoile d’or récompensant les Articles de Qualité. Mais je ne crois pas que ce soit le temps qui compte dans l’obtention d’un Bon Article ou d’un Article de Qualité, c’est plutôt la qualité du contenu et la volonté des autres wikipédiens de collaborer sur le projet. J’ai fait confiance aux utilisateurs plus expérimentés pour nous prévenir quand les statuts de Bon Article ou d’Article de Qualité étaient envisageables et pour nous donner une liste de choses qui restaient à faire pour atteindre ces étapes.

KK : Lorsque le projet nous a été présenté à la mi-janvier nous étions tous très motivés pour atteindre le grade d’Article de Qualité et je crois que je ne réalisais pas très bien la quantité de travail et de ré-écriture nécessaire pour atteindre ce but. À la mi-février nous avons consacré quelques jours à la lecture de toutes les sources en langue anglaise que nous pouvions trouver et nous balancions tout ce que nous trouvions sur la page. C’est à ce moment là que d’autres personnes ont véritbalement commencé à montrer de l’intérêt pour notre travail en proposant des suggestions et en faisant des tas de modifications elles-mêmes. Pour être honnête c’était un peu décourageant de voir à quel point les règles sur Wikipédia sont strictes et de se rendre compte de la quantité de travail de ré-écriture qui nous attendait. Même si ces critères pouvaient paraître de prime abord décourageants, ils nous donnaient une idée exacte de ce que nous devions faire et ils rendaient nos objectifs plus concrets et atteignables.

EE : Une fois que professeur Beasley-Murray nous a vraiment encouragés à commencer nos articles en nous donnant comme consigne de faire une modification, importante ou pas, à notre article, éditer un article sur Wikipédia était déjà moins intimidant même si l’entreprise nous semblait toujours pharamineuse. La base de l’article, le plan et les informations qui ont survécu aux révisions, ont été créés vers la fin février, c’est à ce moment-là que le statut de Bon Article est devenu un objectif tangible. C’est également à ce moment-là que les contributions extérieures à notre groupe se sont faites plus importantes, un apport positif qui s’est maintenu durant le reste de notre progression.

Si vous pouviez modifier les directives pour conseiller les gens qui désirent promouvoir un article au rang d’Article de Qualité, que changeriez-vous ?

KK : Je pense que les directives sont équilibrées et c’est ce qui fait que les Articles de Qualité sont des sources fiables. Je n’aurais en fait qu’une remarque à faire vis-à-vis des Conventions de Style qui sont carrément incompréhensibles pour les profanes comme moi. Si nous n’avions pas reçu le soutien d’éditeurs professionnels qui savaient ce qu’ils faisaient je ne sais pas si nous aurions pu surmonter cet obstacle.

EE : Même si je n’ai probablement pas une expérience des directives aussi importante que les autres membres de mon groupe, de ce que j’en ai vu, un certain niveau d’exigence technique et professionnel est requis, ce qui est nécessaire pour assurer la continuité et le sérieux des articles, mais cela peut se révéler compliqué à comprendre et à mettre en application pour les utilisateurs néophytes. Les directives sont une composante nécessaire de Wikipédia et Wikipédia fournit les explications nécessaires à leur compréhension. Je pense que pour bien se familiariser avec ces directives il faut s’entraîner et prendre exemple sur les autres articles.

Chacune de vos contributions était directement consultable sur Internet. Pensez-vous que ça vous ait encouragé à plus vous appliquer que pour une dissertation conventionnelle que le professeur est seul à lire ?

MF : Pas vraiment. Je pense surtout que ce sont les autres éditeurs de Wikipédia qui nous ont poussés à nous appliquer davantage. Ils nous stimulaient en permanence pour que nous trouvions de meilleurs sources à référencer. Lorsque vous visez un Bon Article ou un Article de Qualité ils mettent la barre extrêmement haut. Les blogs ou d’autres sites Internet comme Facebook rendent également toute contribution directement visible et pourtant leur contenu peut-être d’un niveau très médiocre, si l’on peut parler de niveau. Je pense donc que le fait que notre travail apparaissait sur Internet n’a rien à voir avec notre détermination à travailler dur sur ce projet. Le soutien que nous ont apporté les autres wikipédiens tout au long de l’aventure m’a permis de me motiver pour poursuivre le travail et aussi me fixer des objectifs de qualité élevés.

KK : Je ne pense pas que ça ait quelque chose à voir avec le fait que notre travail était directement visible en ligne. Je crois personnellement que ce sont surtout la possibilité de recevoir des commentaires et de re-travailler les pages qui nous ont poussé à toujours améliorer la qualité de nos contributions. C’est vraiment très différent d’une dissertation que vous ne pouvez rendre qu’une seule fois sans pouvoir la corriger en fonction des commentaires reçus. Par cet aspect du travail nous avons appris beaucoup plus grâce à Wikipédia que grâce à une dissertation, nous pouvions vraiment utiliser les commentaires des autres éditeurs.

EE : J’aurais presque tendance à dire que ça a eu l’effet inverse. Même si de nombreux utilisateurs de Wikipédia font très attention à leurs contributions, Wikipédia reste anonyme et les contributions de chacun ne sont pas nécessairement retraçables. Il faut dire aussi que Wikipédia change perpétuellement au gré des allées et venues des éditeurs, une information que l’on ajoute n’est jamais inamovible. Une dissertation est toujours liée à son auteur et contrairement à Wikipedia, son contenu est définitif.

Ressentez-vous un sentiment d’accomplissement plus grand en ayant apporté quelque chose aux « Communs numériques » plutôt que d’avoir rendu une dissertation ?

MF : Cela ne fait aucun doute. Un nombre incalculable de personnes vont lire cette page au cours de son existence. J’ai investi tellement d’énergie dans la rédaction et l’amélioration de cet article que je suis vraiment fière du résultat final. Quand je le relis, j’ai même du mal à croire que j’y ai contribué. Les dissertations que je rends finissent en général dans un classeur, qui restera bien rangé sous mon lit ou alors dans un coin de mon disque dur, pour ne jamais être ré-ouvertes. La page sur Wikipédia sera consultée et servira certainement à quelqu’un. Je dois dire que je suis plutôt sure que la bibliographie référence quasiment tout ce qui a été publié en anglais sur le sujet. Si quelqu’un cherche à approfondir El Señor Presidente tout est là et je trouve que c’est vraiment incroyable !

EE : Oui et non. Contribuer à la création d’un Article de Qualité est synonyme de répandre cette information à un nombre potentiellement illimité de personne, mais rédiger une dissertation est également un accomplissement à part entière, ça implique beaucoup de recherches et de rédaction. Sur Wikipédia un nombre largement plus important de personnes pourront consulter et apprécier le travail de quelqu’un, je le reconnais, mais c’est aussi moins personnel. Je trouve que les deux font naître un sentiment d’accomplissement, peut-être mêlé à un sentiment de soulagement aussi.

Avez-vous attrapé le « virus wiki » ? Allez-vous continuer à contribuer ?

MF : Je n’en suis pas certaine, je pense que Wikipédia est une formidable ressource et j’éprouve beaucoup d’admiration pour tous ceux qui œuvrent pour que Wikipédia soit une source complète et fiable, mais je ne sais pas encore si je vais continuer à y participer. J’aimerais pouvoir dire que oui, mais entre deux emplois et les cinq cours que je suis, il va falloir que j’arrête ou que je me limite avant la fin du semestre. Ensuite, cet été, je cumulerai trois emplois et deux cours, là non plus je ne sais pas combien de temps je pourrai accorder à Wikipédia. Mais je pense que quand je lirai des romans ou que je ferai des recherches pour des devoirs futurs, j’utiliserai les informations et les références recueillies pour étoffer les articles concernant les sujets étudiés.

KK : Je ne sais pas si je vais continuer à contribuer, il faut voir la quantité de travail et de recherche nécessaire pour produire du contenu de qualité. Si j’ai attrapé le « virus wiki » ça serait plutôt pour le respect que j’accorde maintenant aux autres Bons Articles ou Articles de Qualité. Même si je n’ai pas forcément le droit de les citer dans mes dissertations, j’aurai au moins appris que ce sont des sources excellentes et qu’ils peuvent me mener vers d’autres articles universitaires. Quand je ne connais rien dans un domaine c’est toujours vers Wikipédia que je me tourne et si je peux y trouver des liens vers d’autres sources alors je sais que je suis sur un bon article.

EE : Je pense que je vais continuer à participer, même si ça sera surtout par des modifications mineures comme des corrections orthographiques ou grammaticales, c’est là que je m’épanouis le plus. Je pense que toute modification sur Wikipédia, peu importe son importance, donne à l’utilisateur un sentiment de satisfaction.

Si le Professeur Beasley-Murray souhaitait recommencer ce projet dans les années à venir, quel conseil donneriez-vous aux étudiants qui prendraient votre relève et feraient leurs débuts sur Wikipédia  ?

MF : Je leur conseillerais de s’y prendre tôt et de commencer avec les recherches. En plus du projet sur Wikipédia nous avions à rendre des comptes rendus de lecture. Je conseillerais également une approche hebdomadaire du projet aux étudiants, je leur recommanderais de prendre au moins une heure par semaine pour éditer Wikipédia ou pour faire des recherches sur le sujet. Pour commencer, les bases de données de journaux en ligne sont très utiles, mais il faut reconnaître que de nombreux articles traitant des romans ne sont pas publiés en ligne et l’aide de votre assistant bibliothécaire vous sera très précieuse. J’ai eu recours à leurs compétences trois fois pour savoir comment obtenir les informations que je cherchais. Je leur conseillerais également de ne pas se laisser dépasser par l’ampleur de la tâche. Les wikipédiens imposent des critères de qualité très élevés, mais ils ne sont pas hors d’atteinte. Ayez confiance en vous, même en tant que non diplômé et même si l’anglais n’est pas votre spécialité vous pouvez apporter une contribution importante et voir vos efforts se matérialiser en quelque chose de concret.

EE : Je les encouragerais moi aussi à commencer leurs recherches tôt afin de réunir autant d’informations que possible sur le sujet. Les vétérans et utilisateurs expérimentés de Wikipédia semblent graviter autour des pages qui font preuve d’une activité importante. Je les encouragerais également à trouver leur rythme (ce que j’aurais du faire), à prendre exemple sur d’autres pages et à chercher conseil auprès des autres utilisateurs. Je les encouragerais à se réunir avec les autres membres du groupe assez tôt pour mettre sur pied un plan pour la recherche et l’écriture.

Qui d’après vous note le plus sévèrement ? Les autres professeurs à qui vous avez rendu des devoirs conventionnels ou l’équipe qui juge les contributions faites à Wikipédia en vue de leur attribuer les grades de Bon Article ou d’Article de Qualité ?

MF : La question ne se pose même pas ! L’inspection pour obtenir le grade de Bon Article a vraiment été intense et je dois avouer que j’étais plutôt intimidée au début. Ils ont dégagé toute une liste de points à re-travailler, après les avoir corrigés je me suis rendu compte que ces améliorations étaient à la fois nécessaires et importantes. Mais nous n’étions pas encore au bout de nos peines. En fait, avant même la fin de l’inspection un autre éditeur a passé l’article en revue, vérifiant chaque ligne pour nous présenter à la fin une liste d’améliorations encore plus longue. Une fois qu’elles furent intégrées l’article a encore été révisé de fond en comble. Par moment j’ai vraiment été découragée par la montagne de travail que cela représentait et je n’étais pas tout à fait sûre de pouvoir tout corriger. Mais grâce à leur soutien indéfectible et leur aide nous y sommes parvenus. Pour les devoirs que nous rendons habituellement, les professeurs ne font que peu de commentaires avant de nous rendre les copies. En presque quatre ans passés à l’université, un seul professeur nous a rendu nos devoirs en nous laissant la possibilité de les revoir et de re-travailler les passages problématiques. Et personnellement, je trouve cet exercice de ré-écriture, clarification et amélioration du texte extrêmement formatrice. Au cours des mois écoulés j’ai appris tellement à propos de l’écriture que je ne saurais même pas par où commencer… et ça se voit. J’ai toujours eu des notes autour de B+/A- tout au long de mes études universitaires et aux deux derniers devoirs que j’ai rendus j’ai eu des A ! Je pense que les notes parlent d’elles-mêmes.

KK : Wikipédia était carrément plus intense, mais je pense aussi que le processus était plus juste. La critique ne me gène pas tant qu’on a l’occasion de corriger les choses. C’est exactement ce que j’ai apprécié dans le déroulement de ce projet sur Wikipédia et je crois que c’est la raison pour laquelle ce fut une très bonne expérience pédagogique.

EE : Dans l’ensemble, Wikipédia semble être plus constant et cohérent dans son appréciation alors que les professeurs peuvent parfois noter de manière inattendue. Mais malgré tout, que ce soit avec Wikipédia ou avec mes professeurs, dans les deux cas, un travail de très bonne qualité est attendu et l’auteur est mis au défi de produire un tel travail.

D’autres wikipédiens ne faisant par partie de la classe ont-ils apporté des contributions importantes ? Et si oui, cela vous a-t-il aidé ?

MF : Si au commencement nous étions pratiquement seuls, à mesure que nous nous sentions plus à l’aise sur Wikipédia et que nous étoffions nos recherches sur le sujet, nous avons reçu plus d’aide de la part d’autres wikipédiens, des gens que nous ne connaissions vraiment pas et qui désiraient nous aider à atteindre notre objectif ambitieux : l’Article de Qualité. Cette aide nous a été très précieuse, je pense même que nous n’aurions pu atteindre notre but sans l’assistance et les conseils qu’ils nous ont prodigués tout au long du projet. Je ne les remercierai jamais assez de nous avoir ainsi guidés et remis dans le droit chemin quand nous rencontrions des obstacles.

EE : Oui, d’autres utilisateurs de Wikipédia ont largement contribué, même avant que notre groupe n’approche du statut de Bon Article. Cet esprit communautaire développé entre tous les utilisateurs est vraiment l’un des éléments de base de Wikipédia. Lorsqu’ils identifient un besoin, ils apportent rapidement leur aide et leur soutien.

Une question assez ouverte : voyez-vous une place pour l’utilisation de la technologie wiki dans d’autres matières que vous suivez, ou même dans le futur emploi que vous visez ?

MF : Wikipédia est à mes yeux une formidable ressource où l’on peut trouver des informations concises et bien organisées. Notre société allant toujours plus vite, l’encyclopédie ne fera que gagner en importance pour les personnes qui doivent rapidement vérifier des noms ou des lieux pour leur travail. J’utilise déjà Wikipédia pour vérifier rapidement certaines références ou pour m’informer sur quelqu’un ou quelque chose lorsque je ne suis pas familière avec le sujet.

KK : Je vois plein d’usages potentiels de la technologie wiki. Mon premier réflexe lorsque j’ai une question est souvent de me rendre sur Wikipédia. Même si je ne peux pas citer Wikipédia dans mes devoirs, j’ai appris que si l’article est bon j’y trouverai beaucoup d’informations pour mes travaux universitaires et si ce n’est pas le cas, Wikipédia n’en reste pas moins une excellente ressource où trouver des connaissances de base. Je pense que si plus d’articles pouvaient atteindre au moins le statut de Bon Article l’encyclopédie commencerait à être reconnue comme une source fiable.

EE : J’ai toujours apprécié Wikipédia en tant que ressource où trouver des informations de base pour beaucoup des matières que j’étudie. Et même si elle n’est pas reconnue comme une source purement académique je m’en sers pour me familiariser avec un sujet avant de m’engager dans des recherches plus approfondies. Je trouve également Wikipédia très utile pour les sujets non-académiques, c’est d’ailleurs là que réside sa beauté.

Le 2000ème

Quel a été votre sentiment quand El Señor Presidente a reçu le statut d’Article de Qualité ? Y-avez-vous porté un toast ou avez-vous fait la fête pour célébrer ?

MF : J’étais (et je le suis toujours) extrêmement excitée. Avant que le semestre ne commence en janvier je ne savais même pas que n’importe qui pouvait modifier Wikipédia, ne parlons même pas de créer une page pour la commencer à partir de rien. Je ne savais vraiment pas si nous arriverions à le mener jusqu’aux propositions d’Articles de Qualité mais nous avons bénéficié de tant de soutien pour la révision et les aspects techniques de Wikipédia touchant à la création d’un article que rien n’aurait été possible sans l’aide que nous ont apportée quelques wikipédiens. Malheureusement nous n’avons pas pu fêter ça, le travail d’étudiant semble sans fin, mais je vous avoue que je m’en vante sans vergogne devant ma famille ou mes amis.

KK : C’était vraiment formidable mais, pour être honnête, j’avais tellement pris l’habitude d’éditer Wikipédia pendant deux mois que j’étais presque triste que tout se termine. Créer un article sur Wikipédia est vraiment un travail de groupe et j’étais un peu triste que tout s’arrête après avoir collaboré si intensément avec un groupe extraordinaire.

EE : C’était presque un sentiment surnaturel. On a du mal à croire qu’un article créé en janvier mérite maintenant le statut d’Article de Qualité moins de quatre mois plus tard. Toute notre classe a célébré la fin des cours, j’imagine que nous fêtions un peu en même temps la fin de notre projet sur Wikipédia.

Avez-vous été déçues que plus d’articles n’atteignent pas le statut d’Article de Qualité ?

MF : Je n’ai pas participé à l’élaboration des autres articles, donc ça me touche moins. Peut-être devriez-vous poser cette question à Dr. Beasley-Murray qui a participé, lui, à chaque article.

Est-ce que ça a été plus dur que vous ne l’imaginiez d’atteindre ce statut ?

MF : En fait je ne sais pas vraiment ce que j’attendais. Au début projet j’ai lu d’autres articles traitant de livres qui avaient atteint le statut d’Articles de Qualité et ils étaient vraiment très bons, donc dès le début je savais que ça allait être difficile et j’étais prête à affronter les difficultés et à me lancer.

KK : Je ne dirais pas que c’était plus dur que je ne l’imaginais, mais ça nous a demandé plus de travail. Par chance nous avions avec nous un groupe d’utilisateurs et d’éditeurs de Wikipédia fantastique qui nous a aidés à comprendre dès le début ce qui nous attendait. Et pour être honnête, sans leur aide je pense que tout ce processus aurait été bien plus difficile, voire impossible. J’ai appris à travers cette expérience que si vous êtes prêt à y accorder le travail et le temps nécessaire ce n’est vraiment pas impossible.

EE : L’engagement requis, en temps et en efforts, est important, mais je pense que l’on doit s’y attendre pour un article reconnu. Notre chance a été d’être guidés à chaque étape par des éditeurs expérimentés, c’est grâce à eux que nous sommes arrivés si loin et si vite.

Que les auteurs ne soient pas crédités sur Wikipédia vous pose-t-il problème ?

MF : Absolument pas. Wikipédia est vraiment un effort de groupe et je pense que ça serait injuste de ne citer que quelques noms. J’ai peut-être été l’un des principaux éditeurs, travaillant sans relâche sur l’article, mais en même temps il n’aurait jamais atteint le statut d’Article de Qualité sans le soutien indéfectible d’autres collaborateurs dont l’aide a été extrêmement précieuse. Ce qui m’impressionne toujours, c’est la rigueur de leur relecture, leur capacité à se concentrer sur les passages perfectibles, tout ceci a rendu l’article final tout simplement remarquable.

KK : Cela ne me dérange vraiment pas personnellement car je l’ai fait dans le cadre d’un devoir scolaire. Donc comme je ne me suis occupé que d’un unique article le manque de crédit ne me gène pas, surtout que c’est vraiment un effort collectif. Ce qui me dérange plus est le manque de reconnaissance dont est victime Wikipédia dans le monde universitaire. Beaucoup de personnes ont travaillé d’arrache-pied sur cet article, et il en va de même pour les autres Articles de Qualité évidemment, pour lui assurer de solides bases universitaires et pourtant l’encyclopédie a toujours mauvaise réputation. Je crois que les Articles de Qualité méritent plus de reconnaissance de la part du monde universitaire car ce sont d’excellentes sources d’informations.

EE : Pas vraiment. Le but de Wikipédia est de partager et de diffuser l’information, pas de formuler de nouvelles idées ou d’avancer des hypothèses. En fait, les utilisateurs sont surtout des agrégateurs, ils rassemblent les informations et les organisent en une page cohérente. Même si certains utilisateurs contribuent plus que d’autres, tous les utilisateurs travaillent de concert vers un objectif commun, et cet objectif n’est pas la reconnaissance individuelle. De plus, Wikipédia a mis en place son propre système de reconnaissance et de récompenses pour rendre à César ce qui appartient à César.

« Publier ou mourir » semble être le mantra du monde académique. Pensez-vous que le milieu éducatif devrait adopter Wikipédia, ou tout du moins sa technologie sous-jacente, pour réduire les coûts de publication ?

MF : Étant donné que je ne suis pas encore diplômée je ne peux pas vraiment dire que j’ai été confrontée à cette pression du « publie ou crève » (NdT : publish or die). Je pense en revanche que ce devoir nous a été très profitable et j’y vois beaucoup de points positifs. D’habitude ce que nous autres étudiants écrivons n’est jamais publié, c’était donc une chance pour nous de publier quelque chose sur Wikipédia. Je pense aussi que nous avons acquis beaucoup de compétences importantes grâce à l’édition de Wikipédia parce que personne n’écrit jamais quelque chose pour ne plus jamais y revenir. Wikipédia encourage les révisions multiples, le travail de ré-écriture ou encore les recherches plus approfondies pour clarifier un point développé. Je pense que notre écriture s’est améliorée également et que nous avons pu amender nos points faibles. Je ne sais pas si j’ai vraiment répondu à la question, mais oui, je pense que le milieu éducatif devrait voir Wikipédia comme un outil pédagogique précieux pour les étudiants. Comme le nom des personnes n’est lié à aucun article ou que le vrai nom de la personne n’apparaît pas lorsqu’elle édite, je pense qu’il serait très difficile d’utiliser Wikipédia, sous sa forme actuelle, pour réduire les coûts élevés de publication.

EE : Wikipédia est très utile pour se renseigner (et même plus que simplement se renseigner dans certains cas) sur certains sujets universitaires et je pense que l’encyclopédie devrait être mieux reconnue. Il faudrait aussi que les étudiants, quel que soit leur niveau d’étude, puissent citer Wikipédia comme n’importe quelle autre source universitaire dans leurs devoirs ou leurs projets. Je peux tout à fait concevoir par contre qu’il est difficile de considérer Wikipédia comme une source universitaire rigoureuse puisqu’elle est ouverte aux modifications par des universitaires et des non-universitaires sans discrimination. Je crois que Wikipédia devrait continuer à être employée pour la recherche d’informations ou pour débuter une recherche et comme tremplin vers d’autres sources.

Après avoir travaillé sur un article pour qu’il atteigne le statut d’Article de Qualité, votre opinion sur Wikipédia a-t-il changé par rapport au début de ce projet ?

MF : Comme je l’ai déjà dit, j’ignorais même que quelqu’un pouvait éditer Wikipédia avant de commencer le projet, mon opinion sur Wikipédia a donc été profondément modifiée. Après avoir travaillé sur cette page si longtemps et après avoir obtenu le grade d’Article de Qualité ,j’ai nettement plus de respect maintenant pour les éditeurs qui œuvrent à améliorer l’information qu’on y trouve. Wikipédia est une ressource formidable et ça ne fait aucun doute pour moi que ça n’ira qu’en s’améliorant. Puisque, avant de commencer le projet, on nous demandait de ne jamais citer Wikipédia dans nos écrits universitaires, je m’étais dit qu’on ne pouvait pas faire confiance à son contenu. En même temps, l’un de mes professeurs cette année a inclus dans la bibliographie qu’il nous a transmise pour son cours certains articles de Wikipédia sur la théorie du Big-Bang et j’en ai été choquée. J’en ai tiré une leçon : Wikipédia peut être un outil de recherche extrêmement précieux, au moins en ce qui concerne les Bons Articles et les Articles de Qualité, le lecteur peut y trouver une liste complète et fiable de travaux universitaires. Je ne pourrais jamais exprimer tout mon respect pour ceux qui travaillent chaque jour sur les articles de Wikipédia à regrouper des sources et des informations, ils font vraiment quelque chose de remarquable. Que ça plaise ou non aux professeurs, Wikipédia est largement utilisée par les étudiants pour faire des vérifications rapides sur des faits, des personnes, des endroits, des évènements ou des travaux et je pense qu’avec l’aide d’éditeurs dévoués l’encyclopédie ne pourra que s’améliorer et en nous impressionnant toujours davantage.

EE : J’ai découvert l’attrait de Wikipédia, non seulement pour accéder à l’information, mais aussi pour la partager. J’ai aussi découvert tous les efforts qui sont faits « en coulisse » pour créer, entretenir et éditer les articles. Wikipédia m’avait toujours semblé être une ressource dominée par des personnes expertes dans leur domaine, ou en tout cas des passionnés. Travailler sur un article m’a cependant montré que vraiment n’importe qui peut apporter sa pierre à l’édifice « Wikipédia » et avoir un impact important.

Je voudrais tous vous remercier d’avoir pris un peu de votre temps pour aider à la création de cet article pour Wikinews… qui sait, finira-t-il peut-être aussi dans la liste des Articles de Qualité !

El Senor Presidente - Accueil Wikipédia - 5 mai 2008

Les autres articles du dossier

  • 1/6 – Introduction
    Un projet pédagogique « de qualité ».
  • 3/6 – Le projet vu par un éditeur de Wikipédia
    Le point de vue d’un éditeur de Wikipédia, membre de « l’équipe des Articles de Qualité », ayant accompagné et soutenu les étudiants pendant la durée de leurs travaux.
  • 4/6 – Le projet vu par les étudiant(e)s
    Interview du professeur Jon Beasley-Murray et de trois de ses étudiantes par la gazette anglophone de Wikipédia.
  • 6/6 – Liens connexes
    Une sélection de liens francophones autour de Wikipédia et l’éducation.

Notes

[1] Crédit photos : 1. Jon Beasley-Murray – 2. Ubccampus – 3. Monicaandkaty01




L’ex-chanteur des Tears for Fears explique son choix des Creative Commons

Curt Smith Official - CC byIl y a ceux qui se morfondent à constater la crise actuelle de l’industrie musicale et qui croient naïvement que la loi Hadopi[1] va résoudre leurs problèmes. Et puis il y a les autres, comme le chanteur Curt Smith, qui nous explique calmement et sereinement en quoi les licences Creative Commons sont un choix contemporain simple et pertinent, pour ne pas dire « naturel », quand on souhaite autoriser la diffusion de sa musique sous certaines condition (ici la non exploitation commerciale).

Curt Smith (à ne pas confondre avec Robert Smith) ne vous dira peut-être rien, mais certains vieux (comme moi) se souviennent de son groupe Tears for Fears dont les quelques chansons suivantes bercèrent la jeunesse new wave des années quatre-vingts : Mad Word, Change, Shout ou encore Sowing the seeds of love.

Depuis Curt Smith[2] poursuit une carrière solo et a donc placé son dernier album Halfway, pleased sous licence Creative Commons By-Nc-Sa. Il s’en explique dans cette interview vidéo donnée le mois de novembre dernier sur le site de Dave Harris RetroRewind. La clarté de ses propos associée au climat tendu que fait régner la « menace Hadopi » nous ont donné envie de faire acte de résistance et de subversion en traduisant et sous-titrant[3] ci-dessous le début de l’entretien.

—> La vidéo au format webm

Notes

[1] La loi Hadopi, rebaptisée « Création et Internet », devrait arriver à l’Assemblée nationale fin février. Nous vous suggérons deux sites pour suivre son hacktualité et mieux en décrypter ses tenants et aboutissants : La Quadrature du Net et Numerama.

[2] Crédit Photo : Curt Smith Official (Creative Commons By)

[3] Remerciements Framalang : Olivier pour la transcription, Don Rico pour la traduction, Xavier pour le sous-titrage et Yostral pour le montage final (sacré travail d’équipe !)




Tout, vous saurez tout sur Google et l’Open Source

Cubes at Google - CC-BY-NDProfitons de l’actualité récente de Google, qui a fermé plusieurs de ses services ou s’apprête à le faire (exemple parfait qu’il faut développer et encourager les services Web Open Source pour que, à l’instar des logiciels libres "classiques", leur pérennité soit assurée) pour évoquer la politique du géant incontournable de la recherche (mais aussi de la messagerie électronique, des documents en ligne, de la gestion de photos et j’en passe…) concernant l’Open Source. Chacun sait que Google, même s’il garde jalousement l’algorithme de son moteur de recherche, contribue largement au monde de l’Open Source (Google Summer of Code, GoogleCode, Android etc.). [1]

Cet article, entretien avec Chris DiBona, responsable de l’Open Source chez Google, n’est pas des plus récents, mais il est d’autant plus intéressant à relire aujourd’hui qu’entre-temps Google a sorti son navigateur Chrome (la question de la relation entre Google et Mozilla est abordée dans l’entretien) et s’apprête par exemple à libérer le code d’applications (parce qu’elles n’étaient pas rentables) telles que le réseau de microblogging Jaiku.

Entretien avec Chris DiBona de Google

Interview with Chris DiBona of Google

Sean Ammirati – 26 avril 2007 – ReadWriteWeb
Traduction Framalang : Penguin, Olivier, Don Rico

Il y a quelques semaines, j’ai eu l’occasion d’écouter Chris DiBona, le responsable du programme Open Source chez Google, qui a fait une intervention lors du TiE de Pittsburgh. Pendant la conférence, Chris a donné une présentation extrêmement perspicace de l’état du marché de l’Open Source. Après la conférence, Chris et moi avons échangé des e-mails et il a accepté une interview pour Read/WriteWeb.

Avant de rejoindre Google, Chris était rédacteur chez Slashdot. On peut également lire d’autres réflexions de sa part sur l’Open Source et la vie chez Google sur son blog personnel, et écouter son podcast avec Leo Laporte, sur FLOSS Weekly.

J’ai essayé d’aborder les trois thèmes principaux suivants dans les questions que j’ai posé à Chris :

  • Comment Google tire profit de l’Open Source
  • Comment Google contribue à l’Open Source
  • Questions générales concernant le marché du logiciel Open Source

J’ai décidé de publier l’interview dans son intégralité dans ce billet plutôt que de ne mettre en avant que certaines réponses sur des points particuliers. Ce choix est en partie dû au fait que je les trouvais toutes très intéressantes (même les questions auxquelles Chris ne pouvait/voulait pas répondre). Je conclus ce billet par quelques réflexions personnelles, mais j’aimerais surtout m’appuyer sur l’interactivité que nous offre le web – je vous invite à laisser vos réflexions et vos observations dans les commentaires ci-dessous.

Comment les produits Google tirent-ils profit de l’Open Source

Q : Quel est le processus de vérification avant d’inclure un composant Open Source dans un produit Google ?

R : Nous avons tout une variété d’outils que nous avons écrit pour nous assurer de la compatibilité avec les licences utilisées par les projets Open Source, et nous faisons une revue de code sur les programmes et les bibliothèques en entrée.

Q: Combien de projets Open Source sont utilisés par Google au sein de toutes les applications Google ?

R: Désolé, nous ne donnons pas de chiffres. Un paquet.

Q: Quels projets Open Source sont utilisés le plus activement ?

R: Il existe deux projets qui nous feraient défaut plus que tout autre. Le premier, c’est le noyau Linux, et le second, c’est MySQL. Chez Google, on se sert énormément des deux.

Comment Google contribue-t-il à l’Open Source

Q: Quel est le processus suivi par Google pour décider quels projets doivent être libérés ?

R: Le problème principal est d’avoir une équipe d’ingénieurs pour travailler sur le problème. Nous avons une grande variété d’ingénieurs qui donnent 20% de leur temps pour libérer des logiciels qu’ils souhaitent voir distribuer par l’entreprise. Il faut aussi procéder à quelques petites vérifications légales concernant les marques et les brevets.

Q: Quel est le projet du "Summer of code" de l’année dernière dont vous êtes le plus fier ?

R: En choisir un seul, c’est impossible ! J’étais surtout fier que nous ayons été capable de collaborer avec autant d’étudiants dans autant de pays. C’était un bel exploit de faire fonctionner un programme d’étude réellement mondial.

Q: Quelles sont les autres initiatives (hormis le Summer of code) pour soutenir des projets Open Source ?

R: Nous consacrons de grosses sommes d’argent et beaucoup de temps à des projets tels que le OSU Open Source Labs, les projets Apache, l’EFF, les creative commons et d’autres réussites plus modestes comme MusicBrainz. Nous employons également des tas de développeurs qui travaillent sur des projets extérieurs pendant leur temps de travail. Par exemple, nous employons Andrew Morton, le second dans la hiérarchie de Linux, Jeremy Allison, co-développeur de Samba, Guido Van Rossum de Python, et de nombreux autres.

Questions diverses sur le "Marché de l’Open Source"

Q: A votre avis, dans quel domaine du logiciel se créera-t-il le plus de projets Open Source, l’année prochaine ?

R: Je n’ai pas d’opinion à ce sujet. Je pense que tout ce qui concerne la VoIP va continuer à se développer et s’avérer très excitant.

Q: Pensez-vous qu’il existe des logiciels commerciaux qui soient spécialement vulnérables à un rival Open Source émergent ?

R: Je pense que le terme vulnérable n’est pas le bon. Voici comment je vois les choses : si une entité commerciale constate qu’elle ne peut plus vendre son logiciel parce qu’un projet open source viable a emergé pour les supplanter, elle doit décider si elle veut se lancer dans la vente de services autour d’offres open source, ou sortir de ce secteur d’activité précis. IBM a réalisé un boulot incroyable après avoir opté pour la première solution.

Q: Quel est le point de vue de Google sur les différentes licences Open Source ?

R: Nous pensons qu’il y en a trop, et c’est pour cela que nous n’en supportons qu’une partie dans notre système d’hébergement de projet sur code.google.com. Cette partie inclut les licences que nous considérons comme les plus importantes : les BSD, Apache, GPL et certaines autres. Cela reflète la façon dont nous les voyons en interne. J’aime à penser que nous avons un point de vue très nuancé sur la façon d’adapter ces licences en interne.

Q : D’après vous, quel pourcentage des projets GPL actuels vont, à votre avis, migrer vers la version 3 de la GPL ? Et quel effet cela aura-il ?

R: Tous les projets de la FSF vont migrer, ainsi que Samba. D’autres migreront plus tard si les drafts de la GPLv3 continue d’évoluer dans la même direction, aussi l’effet sera-t-il plutôt mineur. Cela dit, à chaque révision de licence, il y aura une période de confusion pendant laquelle les gens modifieront leur point de vue pour incorporer la nouvelle licence.

Q: Puisque la plupart des produits Google sont liés au navigateur, et étant donné que Firefox 3 sera un ‘fournisseur d’information’ et supportera les applications web hors-ligne, les relations de Google avec Mozilla semblent cruciales pour les années à venir. Comment Google se rapproche-t-il donc de Mozilla concernant ces développements ?

R: Je ne gère pas les relations avec Mozilla, je vais donc passer sur cette question. Nous sommes heureux qu’ils soient impliqués dans le ‘Summer of Code’, c’est certain!

Conclusion

Dans l’interview qu’à donnée Eric Schmidt à John Battele à l’expo Web 2.0 de la semaine dernière, Eric a évoqué les quatre ‘moteurs principaux’ sur lesquels s’appuie Google (cf. interview sur YouTube – la référence aux quatre moteurs principaux commence @ 7:28). La première consiste à "construire les super-ordinateurs les plus intéressants du monde, qui feront fonctionner de nouveaux services de données, d’applications, de recherche et bien d’autres". Note: les trois autres ‘moteurs’ sont les services pour l’utilisateur final, la publicité et l’adaptation à leur culture particulière.

Bien que Google n’ait pas libéré l’algorithme de son ‘page rank’ (NdT : classement des pages) ni d’autres morceaux de ses systèmes, il m’a paru intéressant d’étudier l’engagement de Google dans l’Open Source puisque cela concerne la construction de super-ordinateurs. Il est presque certain que la seule entreprise en mesure de recréer des application comme MySQL et Linux est Google. Quoiqu’il en soit, ils ont plutôt choisi d’adopter et de supporter les différentes communautés Open Source et de tirer profit de leurs outils existants.

De plus, je trouve les observations de Chris sur IBM "qui vend des services autour de l’offre Open Source" particulièrement pertinentes. Il s’agit là d’un prolongement intéressant de certains sujets discutés à l’expo Web 2.0 sur les modèles de commerce Open Source.

Enfin, j’aimerai remercier Chris d’avoir pris le temps de répondre à mes questions. Je sais qu’il est débordé, et j’espère que vous aurez trouvé l’interview aussi intéressante que moi.

Notes

[1] Crédit photo : revdancatt (Creative Commons BY-ND)




Maximum respect for the Ubuntu french team

Voici une petite interview de Christophe Sauthier, président de la french LoCo team à savoir l’association Ubuntu-fr, réalisée début décembre à Mountain View (oui, oui, chez Google) lors du récent Ubuntu Developer Summit, UDS chez les initiés.

Il a beaucoup impressionné l’assemblée, c’est-à-dire ses petits camarades ubunteros venus du monde entier pour l’occasion, avec ses 4000 visiteurs de la récente Ubuntu Party de Paris à la Villette (d’ailleurs il est désormais surnommé 4K, c’est vous dire). Il évoque également tous les avantages de devenir Masters of the Universe (MOTU) chez Ubuntu et son souci de faciliter la tâche et l’accueil des nouveaux contributeurs.

PS : C’est en anglais mais comme c’est un français qui parle anglais on comprend encore mieux que d’habitude 😉

—> La vidéo au format webm

Si jamais il vous venait l’envie d’en savoir plus sur Christophe Sauthier et son rôle au sein d’Ubuntu, vous trouverez ci-dessous un entretien paru dans la lettre hebdomadaire Ubuntu n°121 (7 au 13 décembre 2008) sous licence GNU FDL.

Entretien avec huats, leader de l’équipe d’Ubuntu-fr

Qui es-tu ? Où habites-tu ? Que fais-tu dans la vie ?

Je m’appelle Christophe Sauthier et mon pseudo IRC est huats. J’ai 31 ans, j’habite à Toulouse et je vis en couple. Je travaille pour une société de service (makina corpus) qui travaille exclusivement dans le monde de l’open-source. Je suis impliqué dans tout ce qui est formation, assistance, migration à Ubuntu, ainsi que sur certains dévelopements en PHP (Drupal) ou Python (Plone). Je suis impliqué directement dans Ubuntu en tant que président de la LoCo française. Mon autre rôle dans la communauté est de coordonner les tutorats des MOTU, dont le but est d’aider les nouveaux venus dans le monde du développement pour Ubuntu. J’essaye aussi d’être actif au niveau développement en aidant au packaging de quelques applications, essentiellement autour de l’environnement GNOME.

Comment es-tu entré dans le monde de Linux et d’Ubuntu ?

Il y a très très longtemps (quelque chose comme 1996), j’avais demandé son avis à quelqu’un au sujet d’un script Perl sur lequel je bossais (un CGI pour site web en l’occurence) et il m’avait dit : « Si tu veux coder un peu en Perl, fais-le sous Linux. Tu peux faire comme ça pour l’installer… » Ça a été mon premier contact avec Linux. À cette époque, j’utilisais surtout Suse et Debian. Et puis un beau jour, je tombe sur quelque chose basé sur Debian, mais qui n’avait pas encore de nom. C’est devenu Ubuntu. C’était en 2004, et depuis ce jour, Ubuntu est l’unique distribution que j’utilise.

Comment as-tu démarré avec la communauté française ?

Je faisais depuis un moment quelques traductions pour des logiciels (essentiellement dans GNOME) et je suis tombé un jour sur un billet du wiki de la LoCo française qui mentionnait des projets sur le point d’être lancés. L’un d’eux était l’organisation d’entretiens (puis leur traduction) avec quelques membres clés de la communauté. Ce projet a évolué plus tard en diverses choses comme BehindUbuntu.

Qu’est-ce qui t’a amené à prendre la tête de la LoCo française ?

Après cette première expérience dans la communauté française, j’ai décidé de rester dans les parages, fréquentant différents chats IRC francophones, ou passant de temps en temps sur les forums. C’est là que j’ai vu la campagne pour vendre des t-shirts pour la LoCo. Ma première pensée a été « j’en veux un ! », et ma deuxième « je suis sûr que je peux les aider à organiser ça »… après avoir commandé le mien, j’ai pris contact avec le gars qui s’occupait de ce projet, et il y avait tellement de boulot que mon coup de main a été le bienvenu… Il s’est trouvé que Yann (le gars que j’avais contacté) était le président de la communauté française, et après pas mal de discussions, il m’a dit qu’un coup de main serait bien utile aussi pour le développement du site web. Il m’a demandé de montrer que je pouvais aider en codant un module pour PunBB (le forum que nous utilisons). J’ai pris en charge de plus en plus de choses dans la LoCo, et quand le président a décidé de passer la main, on m’a demandé si je me sentais de relever le défi : monter une nouvelle équipe, avec une nouvelle organisation. C’est ainsi que je suis devenu le président d’Ubuntu-fr, et que j’ai essayé de changer l’organisation en me basant sur le concept de «travail d’équipe».

Quels sont les défis dans la gestion d’une grande LoCo? Comment votre LoCo fait-elle pour communiquer et couvrir un si grand territoire ?

Il y a de nombreux défis, mais c’est aussi un boulot passionnant. Le premier défi est, bien sûr, d’en faire le maximum tous les jours. Il y a beaucoup de sollicitations et nous ne pouvons satisfaire tout le monde, même si nous essayons. A la fin, certains peuvent croire que nous ne sommes concentrés que sur un domaine et que nous nous fichons des autres. En fait, nous manquons tout simplement de main-d’oeuvre et de temps, et pour le montrer, nous communiquons de plus en plus au travers d’un blog pour les rapports. Ce blog fait partie du Planet francophone et donc tout le monde peut y accéder. Mais nous ne voulons pas seulement nous limiter au blog, nous essayons d’être aussi transparents que possible sur les décisions prises. Environ une fois par mois, nous tenons une réunion publique sur IRC. Nous essayons de nous occuper de chaque aspect de notre communauté : nous parlons des actions passées (depuis la dernière réunion), des actions en cours, et de celles à court et moyen terme. Nous consacrons aussi du temps à répondre aux questions et tout le monde peut proposer un nouveau sujet de discussion. Je pense que cette transparence intéresse les gens, ainsi à la dernière réunion, environ 60 personnes étaient présentes.

Comment la LoCo française est-elle organisée? Est-elle centralisée ou décentralisée ?

C’est un mélange. Il y a bien sûr un groupe de personnes qui forme le noyau de la LoCo, mais avec la nouvelle organisation de l’équipe, ce groupe s’est quelque peu agrandi. Le but est que chaque personne ait une vue d’ensemble de tout ce qui se passe dans la LoCo, ou du moins qu’elle en sache autant que possible. De cette manière, si quelqu’un se désiste, il est plus facile de le remplacer. Autour du noyau, il y a un plus grand cercle d’individus qui sont plus particulièrement investis dans un ou deux domaines. Ce deuxième groupe peut être considéré comme plusieurs équipes vouées à un domaine en particulier. Donc, pour résumer : un noyau de moins de 10 personnes, qui mène des activités de groupe indépendantes les unes des autres. Chaque équipe a une grande liberté d’action, même si nous aimons être tenu au courant des décisions importantes.

Parfois, les communautés connaissent des périodes creuses, pendant lesquelles la motivation ou la participation peuvent retomber. Comment fait la communauté française pour remédier à cela ?

Je pense que nous avons également eu un tel épisode, mais son effet a été amoindri par les changements d’organisation que j’ai mentionné plus tôt. C’était perceptible lorsque les principaux protagonistes de la communauté ont ralenti un peu, mais il n’y a pas eu de gros ralentissement de nos activités. C’est le signe distinctif des communautés les plus importantes, qui peuvent s’autogérer sans dommage majeur… Tant que cela ne dure pas trop longtemps bien sûr… Depuis, la communauté est revenue sur les rails, et elle très active. Les séances que nous avons eu dans tout le pays pour Intrepid, ainsi que l’évènement de Paris avec plus de 4000 visiteurs dans le week-end en sont de bons exemples. Puisque nous ne voulons plus ralentir, nous avons lancé quelques petits projets qui devraient nous aider à aborder des sujets qui nous intéressent. Cela devrait nous aider à maintenir la croissance de notre communauté. Il y a quelques projets qui m’ont donné envie de m’investir dans la communauté, donc vous pouvez imaginer que j’y suis très attaché. Nous avons le sentiment que, de cette façon, nous pourrons compenser une décroissance, ou un ralentissement de la participation en ajoutant de nouveaux centres d’intérêts dans lesquels s’impliquer.

Quels sont les projets de la LoCo à court et long terme ?

Je dirais continuer le travail actuel que nous avons juste initié : compléter les diverses équipes (certaines sont encore un peu floues, ou commençent seulement à prendre forme). Par exemple, il n’y avait pas vraiment d’équipe de développement web, puisque nous nous contentions de réunir les ressources au besoin. Aujourd’hui, un groupe de personnes très talentueuses travaille sur divers aspects de l’utilisation à long terme, pas seulement à la demande. C’est nécessaire si nous voulons pouvoir continuer à innover. Donc pour le court terme, cela signifie trouver une nouvelle apparence pour l’ensemble des sites ubuntu-fr (site web, documentation, forum et planet), utiliser au mieux notre nouveau site web (drupal), et donner à nos éditeurs les droits pour plusieurs équipes (celles de kubuntu ou d’edubuntu). Nous espérons être capables de faire ceci dans les prochains mois. Pour le long terme, nous voulons vraiment continuer nos efforts de diffusion d’Ubuntu en France, ce qui demande l’organisation de sessions supplémentaires dans tout le pays (en continuant sur notre lancée après tous les évènements accompagnant la sortie d’Intrepid). Nous souhaitons aussi organiser des colloques réguliers, où les gens pourront se rencontrer physiquement plutôt qu’à travers IRC. Cela permettrait d’aider les novices à ressentir une appartenance à la communauté. Cela pourrait aussi se traduire par des ateliers de débuggage, des ateliers de documentation (comme un atelier de débuggage mais pour vérifier la documentation disponible), ou même quelques ateliers de traduction. Enfin, nous essaierons de définir une réelle politique pour la participation aux évènements pour permettre aux gens de rencontrer l’équipe personnellement pour poser des questions et obtenir des réponses.

Une des idées que vous avez évoquées avec le conseil de la communauté est le jumelage. Qu’est-ce que c’est? L’avez-vous déjà mis en pratique?

Le jumelage des LoCo peut prendre plusieurs significations. Celle qui me tient à coeur est l’aide qu’une communauté importante, comme la communauté française, peut apporter aux plus modestes. Cette aide pourrait être de l’expérience, ou l’organisation de campagnes à grande échelle, ou même des dons pour les aider à lancer leurs évènements. C’est quelques chose à laquelle notre équipe a du faire face à ses débuts, et sans l’implication financière de quelques membres, nous n’aurions jamais pu faire autant de choses. Comme la communauté française est plus puissante maintenant, cela pourrait être une bonne chose d’aider les autres équipes à se lancer. En fait, c’est plutôt proche des concepts clés qui menèrent à la création de Ubuntu-eu il y a quelques années. Ubuntu-eu est un effort commun pour partager l’hébergement de leur site web. Depuis, plusieurs communautés ont trouvé un hébergement à cet endroit, ce qui est clairement une aide fort utile pour les équipes les plus récentes. Pour revenir au processus de jumelage, nous avons commencé à travailler un peu sur le sujet, avec la communauté tunisienne, mais nous n’avons pas avancé beaucoup dans le processus par manque de temps. Je suis sûr que nous travaillerons bientôt à nouveau là-dessus.

L’équipe française Ubuntu a organisé une Ubuntu Party à laquelle ont participé 4000 personnes. Pouvez-vous la décrire ? Comment l’avez-vous préparé ? Combien de temps cela a-t-il pris?

Cet évènement, qui a eu lieu à Paris, était un mélange de tous les différents types d’atelier qu’on peut avoir : installation, nouvelle version, conférence… C’est pourquoi on peut simplement l’appeler un “atelier Ubuntu”. On prépare cet évènement tous les 6 mois, pendant le week-end, un mois à peu près après la sortie d’une nouvelle version. Pendant l’atelier, les gens viennent pour avoir une installation d’Intrepid ou parce qu’ils ont des problèmes avec leur installation. On a aussi présenté plus de 14h de conférences, et un atelier débuggage…une station de radio a même émis depuis l’Ubuntu Party pendant tout le week-end. L’équipe préparait cet évènement depuis la fin du précédent (c’est-à-dire début juin), donc on a assisté au résultat de 6 mois de travail par l’équipe toute entière. Certains travaillaient sur la communication (les médias et le public visé), d’autres sur les besoins matériels de l’évènement, et d’autres sur les conférences. Maintenant, on fait l’analyse de cet évènement, ce qui nous aidera à préparer le suivant en mai 2009.

Que fais-tu dans ton temps libre ?

À part mes activités LoCo, je fais aussi du développement pour Ubuntu. Même si je sais que cela est lié a notre communauté, je considére cela clairement comme une activité à part. Cependant, je fais aussi pas mal de sport : du basketball et de la randonnée dans les Pyrénées (les montagnes près de chez moi). À part cela, j’aime cuisiner pour mes amis. D’ailleurs, je pense qu’il y a clairement un point commun entre cuisiner pour les autres et participer à des activités liées aux logiciels libres…




Drupal : entretien avec Dries Buytaert

Gabor Hojtsy - CC by-saQuel est le point commun entre l’APRIL, Ubuntu-fr et Framasoft ? Une volonté commune de faire avancer le logiciel libre francophone, oui, certes, mais plus pragmatiquement ces trois vénérables institutions ont décidé, sans se concerter, de migrer cette année leur site vers Drupal. Enfin pour être précis, Framasoft n’y est pas encore mais on y travaille en coulisses.

Ce CMS, connu pour sa grande souplesse et modularité a en effet le vent en poupe actuellement[1]. Du coup nous avons eu envie d’en savoir plus en traduisant cette interview de son créateur, le belge Dries Buytaert.

Le créateur de Drupal imagine l’avenir de la publication Web en plug-and-play

Drupal’s Creator Envisions Web Publishing’s Plug-and-Play Future

Entretien conduit par Michael Calore – 19 juin 2008 – Webmonkey.com
(Traduction Framalang : Vincent, Olivier et Don Rico)

L’aventure de Dries Buytaert[2] commence à l’université quand il code un forum privé pour sa résidence étudiante. Neuf ans plus tard, ce modeste logiciel de forum est devenu Drupal, l’un des systèmes de gestion de contenu Open Source le plus populaire sur le Web, qui compte des milliers de contributeurs actifs. En mars 2008, Dries Buytaert se rapproche de l’entrepreneur Jay Batson, et ensemble ils fondent Acquia, entreprise commerciale qui propose un support technique aux inconditionnels de Drupal et la promotion, l’adoption ainsi que le développement de la plate-forme.

Webmonkey a rencontré Dries et Jay pour discuter de l’histoire de Drupal, des nouveautés à venir et du rôle que leur société va jouer dans l’avenir du projet.

Webmonkey : Dries, peux-tu nous raconter l’histoire de Drupal ? La naissance de l’idée et comment la plate-forme a pris corps ?

Dries Buytaert : C’est arrivé un peu par accident. En 1999, j’étais étudiant à l’Université d’Anvers en Belgique. Je faisais du développement Web en CGI et avec des « server-side includes » (programmation côté serveur), mais je voulais en savoir plus sur des technologies telles que PHP et MySQL. Au même moment, nous avons eu besoin d’un système de messagerie interne pour notre résidence étudiante. J’ai alors écrit un forum de discussion simple. Et une fois mon diplôme obtenu, j’ai décidé de mettre mon forum interne sur Internet.

Quand j’ai enregistré un nom de domaine pour ce projet, j’ai voulu inscrire le nom « Dorp », qui veut dire « petit village » en néerlandais. Mais à cause d’une faute de frappe je me suis retrouvé à enregistrer le nom de domaine Drop. Ça peut paraître étonnant, mais Drop.org était disponible, et comme c’est un mot anglais qui a plusieurs significations, j’ai décidé de le conserver.

Notre communauté d’utilisateurs originelle s’est éteinte assez rapidement, mais j’ai continué à y travailler en apportant de nouvelles fonctionnalités comme les flux RSS ou un système de notation du contenu par les utilisateurs. Les visites sur le site ont été de plus en plus nombreuses, et chacun apportait idées et des suggestions, comme par exemple modifier l’algorithme qui gère la modération des commentaires. À un moment, je recevais tellement de suggestions que j’ai décidé d’ouvrir le code source. C’était la version 1.0 de Drupal, qui est sortie début 2001.

Au moment de la sortie, j’étais assez sûr d’avoir un bon système. Je pensais qu’il tenait la comparaison avec les autres technologies Open Source telles que PHP-Nuke, et que c’était donc la bonne décision.

Webmonkey : L’un des aspects clés de la conception de Drupal est sa modularité. Les utilisateurs installent un noyau logiciel et ajoutent ensuite des fonctionnalités en installant des modules spécialisés. D’où vient cette idée d’architecture modulaire ?

Buytaert : Ça faisait partie de l’idée de départ. J’étais presque choqué que la plupart des autres systèmes ne proposent pas de conception modulaire – pour moi, avec mon background d’étudiant en informatique, ça me semblait très naturel. En ce temps-là, j’étais aussi impliqué dans le noyau Linux, à travailler sur les pilotes de réseau sans-fil. C’est à l’évidence aussi un système modulaire, j’y ai certainement puisé mon inspiration.

Jay Batson : Moi qui ai eu à faire à pas mal de systèmes de gestion de contenu avant de rencontrer Dries, je peux dire que la plupart des autres CMS ne viennent pas de personnes qui sont diplômés en informatique. Ils ont été élaborés par des web-designers ou des programmeurs qui étaient peut-être autodidactes et avaient bidouillé un système qui fonctionnait plus ou moins. Ils n’émanaient pas de personnes qui ont une réelle formation en informatique. C’est là une des grandes différences entre Drupal et les autres systèmes.

Webmonkey : La popularité de Drupal auprès de ceux qui cherchent à construire un site autour d’une sorte de réseau social n’est plus à démentir. Est-ce parce qu’il offre un contrôle précis de la gestion des utilisateurs, ou est-ce parce que Drupal est devenu populaire en même temps que les réseaux sociaux prenaient leur essor ?

Buytaert : À mon avis, la gestion des utilisateurs en est bel et bien la raison principale. Drupal est un système multi-utilisateurs depuis le début, mais la plupart des autres systèmes ne sont pas au niveau de Drupal pour ce qui est de la gestion des utilisateurs et des droits d’accès.

C’est un système très communautaire de par sa conception. Par exemple, le site d’origine Drop.org ressemblait beaucoup à Digg, où l’on pouvait soumettre des liens et voter pour chaque suggestion. Ce type d’interaction entre les utilisateurs a été une fonction clé de Drupal dès le départ. Au fil du temps, nous nous sommes éloignés de ces fonctionnalités. Le système de vote a été retiré du cœur du système, mais il existe toujours sous forme de module. À la place, nous évoluons vers une plate-forme capable d’en faire plus, aussi bien pour ce qui concerne la gestion de contenu Web traditionnelle que pour la partie « sociale ».

Batson : Ils ont aussi eu un coup de booster parce que Drupal 5 avait comme slogan « Plomberie pour la communauté ». Au moment où les sites communautaires gagnaient en importance, le système se vendait lui-même comme étant optimisé pour cette fonction.

À ce moment là également, beaucoup de monde est venu grossir les rangs de la communauté Drupal et contribuer au code. Ainsi, une part importante du code a été écrite autour de ces fonctionnalités communautaires. Je sais qu’à cette époque Dries consacrait l’essentiel de son temps à la gestion de ces contributions, afin de garder un noyau Drupal réduit tout en s’assurant que les fonctions clés étaient présentes et, en même temps, en insistant sur l’importance des modules.

Buytaert : J’ai toujours encouragé les autres à être créatifs dans leurs contributions au code de Drupal. Je pense qu’il est extrêmement important de ne brider personne. Ainsi, pour ceux qui veulent bâtir un réseau social ou un clone de Flickr, il est à mon sens essentiel que Drupal, en tant que plate-forme, les y aide. C’est ce que permet la conception modulaire.

Webmonkey : Parlez-nous d’Acquia, la société que vous avez fondée ensemble.

Batson : Notre but est de devenir pour Drupal ce que sont Red Hat et Canonical pour Linux. Si vous cherchez une version de ce logiciel Open Source avec support technique, vous venez nous voir et vous payez un abonnement. Pour le prix de l’abonnement, vous obtenez une distribution, un ensemble de services pour la maintenance et les mises à jour, plus un accès à notre centre de support technique. Si par exemple vous êtes responsable d’un site de média important dont toute la partie logicielle est construite autour de Drupal et que vous avez une question, vous aurez alors la possibilité de nous contacter directement par téléphone. Vous obtiendrez votre réponse en moins d’une heure, au lieu d’envoyer un courriel et de patienter une journée ou d’attendre sur IRC que la personne qualifiée se connecte. À l’opposé, notre service est également adapté aux petits sites qui ont besoin d’aide pour l’installation des modules ou pour gérer les mises à jour. C’est un modèle économique qui a déjà fait ses preuves dans l’Open Source.

L’autre rôle que peut jouer Acquia, c’est le support de la communauté des développeurs Drupal. Drupal a une merveilleuse croissance organique. En gros, la communauté double chaque année. C’est impressionnant, mais nous voudrions la voir croître d’un facteur dix.

Webmonkey : Combien de développeurs travaillent sur Drupal à l’heure actuelle ?

Buytaert : Pour Drupal 6, la dernière sortie importante en date, 900 personnes environ ont contribué au cœur. À titre de comparaison, c’est équivalent au nombre de personnes qui contribuent au noyau Linux. Il y a plus de 2000 modules additionnels et chaque module est maintenu par un ou plusieurs développeurs. Le site Drupal.org compte entre 250000 et 300000 utilisateurs enregistrés. Ils ne sont pas nécessairement développeurs, mais ces personnes participent à la communauté d’une façon ou d’une autre.

Webmonkey : Que nous réserve Drupal pour l’avenir ?

Buytaert : Nous travaillons en ce moment même sur Drupal 7. Nous aurons une meilleure couche d’abstraction pour les bases de données, un meilleur support pour les outils WYSIWYG, et des améliorations dans la facilité d’utilisation pour les administrateurs, ce qui rendra Drupal plus facile à configurer.

Nous développons une nouvelle fonctionnalité essentielle, appelée Kit de Construction du Contenu (CCK). Celle-ci vous permet de définir de nouveaux types de contenu en passant par une interface Web. Par exemple, si vous avez un site de vélo et que vous voulez que vos utilisateurs puissent partager leurs balades favorites, vous pouvez créer un nouveau contenu que vous appellerez "parcours". Ce contenu pourra inclure un point de départ, un point d’arrivée, un lien vers Google Maps, quelques photos de la route, du texte décrivant le parcours. Une fois que vous avez toutes ces données, vous pouvez choisir de visualiser ce parcours sur une carte Google, de l’afficher dans un tableau, ou d’en faire ce que bon vous semble. Plusieurs vues différentes peuvent être extraites de ce grand sac de données utilisateur, et tout ceci à partir d’une simple interface Web.

Avec Drupal, notre objectif à long terme, c’est de vraiment démocratiser la publication en ligne grâce aux contributions de la communauté, de rendre possible, pour tout un chacun, la création de sites Web puissants et intéressants, en quelques clics seulement. Drupal vous permet d’avoir un prototype opérationnel en quelques heures, sans avoir à écrire une seule ligne de code. C’est vraiment un outil très puissant.

Notes

[1] Qu’il me soit tout de même permis de remercier vivement la communauté Spip pour l’extraordinaire service rendu et de saluer comme il se doit la toute nouvelle version 2.0.

[2] Crédit photo : Gabor Hojtsy (Creative Commons By-Sa)