Apprendre le Web avec Mozilla Webmaker (4)

Si vous avez raté le début : Mozilla Webmaker est un ensemble d’outils ludo-éducatifs qui permettent à chacun de comprendre et de modeler le Web. Dans la boîte Webmaker nous avons trouvé des lunettes à rayons X, un dé à coudre magique et un kit de VJ. Mais tout cela c’est pour ceux qui veulent apprendre. Voici pour terminer notre série de présentations les outils pour aider ceux qui veulent enseigner.

Des outils pour enseigner

Un référentiel de compétences

Il existe dans l’Éducation nationale une série de compétences « informatique et internet » mesurées par les B2i ® (oui, c’est une marque déposée) et C2i selon les différents niveaux (école primaire, collège, lycée, enseignement supérieur)

L’analyse des grilles de compétences à acquérir est ici hors de propos, mais pour l’essentiel ces évaluations portent sur la capacité à utiliser le Web comme outil : lire, écrire, maîtriser l’information, communiquer… une part bien modeste est consacrée à la création de pages web ou à la création de contenu.

Mozilla propose un autre référentiel de compétences, il est également discutable certes, mais il met clairement l’accent sur ce qui manque dans celui de l’éducation nationale : il ne s’agit pas seulement de consommer le Web avec habileté et lucidité, mais d’une invitation à faire le Web, à participer à une ressource commune partagée. 

Cette ressource qui a été baptisé la carte de la littératie web (le choix de cette traduction suggère le parallèle avec l’accès aux savoirs fondamentaux traditionnels). Après la rubrique « Explorer » on trouve « Créer » et « Partager », chaque rubrique est détaillée en compétences diverses. Mais voyez plutôt vous-même, parcourez les détails de la carte de la littératie. C’est une version en constante évolution (oui vous pouvez contribuer à partir de ce wiki).

C’est loin d’être la seule “liste” proposée par Webmaker, mentionnons par exemple ces chemins interactifs entre les étapes d’une acquisition (pas de version française pour l’instant). cliquez sur un élément et vous verrez ceux qui s’inscrivent logiquement dans sa continuité, en amont (que dois-je savoir faire avant) ou en aval (qui puis-je faire ensuite).

Des kits pédagogiques

Tout aussi nombreux sont les « tutoriels », les fiches pratiques qui peuvent servir de guide à l’animateur d’une séance. Voici par exemple, traduites par les bénévoles de Mozfr et modifiables à votre gré, les fiches pratiques pour une série d’activités autour de la sécurité en ligne. Cliquez sur les liens sous les captures d’écran pour aller sur les pages.

kitSecurite1.pngLe sommaire

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La préparation, la discussion initiale entre les participants

kitSecurite3.png

Dans cette étape, les participants sont amenés à remixer une vidéo sur le thème de la vie privée menacée.

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Puis les outils Webmaker sont pris en main pour que les participants découvrent les bonnes pratiques en matière de sûreté

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…et par étapes progressives on en vient à expliquer le mécanisme des cookies et comment surveiller la surveillance en installant Lightbeam.

Une grande quantité de tutoriels et d’idées déjà mises en œuvre concrètement sont disponibles dans la partie events de Webmaker, mais tout cela est en anglais pour l’instant.

Pourquoi des ateliers, des coding goûters et autres initiatives ludo-pédagogiques,

Tous ces outils, ce matériel et ses dispositifs n’ont qu’un intérêt moyen s’ils ne sont pas mis en pratique, et Mozilla tient à ce que des rencontres dans la vraie vie se produisent, que des gens qui veulent apprendre et enseigner le Web se retrouvent pour avancer ensemble, et pas seulement sous forme de cours à distance désincarnés.

Naturellement, Mozilla ne prétend pas avoir inventé l’idée des ateliers d’initiation au code, des expériences sympathiques et pertinentes ont lieu déjà depuis quelques années (ici par exemple). Ce que Mozilla propose en plus c’est une force de proposition à l’échelle mondiale : les ateliers Webmaker ont lieu en ce moment dans toutes les communautés mozilliennes, ce qui démultiplie les échanges de pratiques possibles.  Vous pouvez bien sûr tracer votre chemin, votre usage et construire de zéro votre démarche ludo-pédagogique, mais vous pouvez aussi reprendre et remixer des expériences éprouvées

C’est encore timide et pas si fréquent, mais en France aussi, c’est déjà commencé, on utilise par exemple des outils Webmaker dans la très active Maison du Libre à Brest.

mozilla-webmaker-front2.jpg

À vous de jouer !

Il vous reste maintenant à…

  • vous emparer librement des outils proposés ;
  • contribuer à leur amélioration, le code est évidemment open source ;
  • contribuer à leur traduction, en vous inscrivant sur la liste de Mozfr ;
  • contribuer à leur diffusion en organisant même à petite échelle des ateliers Webmaker. Si vous avez besoin d’un conseil, de l’aide d’un mozillien, voire de bénéficier d’un espace communautaire à Mozilla Paris, contactez-nous.

— et faites-nous part de vos actions et expériences avec Webmaker, nous leur donnerons un écho ici !




Apprendre le Web avec Mozilla webmaker (3)

Si vous avez raté le début : Mozilla Webmaker est un ensemble d’outils ludo-éducatifs qui permettent à chacun de comprendre et de modeler le Web. Après les lunettes à rayons X pour voir sous les jupes de la page Web et le dé à coudre magique, voici Popcorn Maker pour faire sautiller frénétiquement images et sons.

Popcorn Maker pour jouer avec la vidéo, se l’approprier.

La réalisation d’une page web enrichie, ou plutôt augmentée, demande des logiciels spécifiques, pose des problèmes de codecs et de compatibilité entre navigateurs et souvent le recours à des formats pénibles tels que le Flash. Avec Popcorn Maker, qui fonctionne grâce à popcorn.js et au HTML5, tout se passe dans le seul navigateur : rien à installer, l’utilisateur n’a plus qu’à combiner. Bien sûr, avec Popcorn maker vous n’atteindrez pas le niveau professionnel d’un web-documentaire. Voyez par exemple ces 4 documentaires « enrichis » avec popcorn.js et diffusés sur le site d’Arte.

Popcorn Maker est plutôt un outil d’initiation ludique, une manière simple et surtout amusante de remixer des vidéos, des sons et des images pour en faire de chouettes montages que vous pouvez ensuite insérer sur d’autres sites. Et bien entendu, comme tout ce que vous pouvez réaliser avec Webmaker, vos remix seront disponibles pour que d’autres s’en emparent et réalisent à leur tour leur création(1) multimédia.

Récupérez une vidéo qui vous plaît sur le Web. Glissez-y du contenu web, puis ajoutez vos commentaires et vos liens, directement depuis votre navigateur. Les vidéos fabriquées avec Popcorn Maker sont dynamiques, on peut y ajouter des liens, des bulles de texte, des images et des pistes sonores…

Vous pouvez par exemple :

  • créer un gif animé avec du son et jouer les VJ comme un grand ;
  • augmenter un documentaire avec des liens dynamiques vers un article Wikipédia, une carte… ;
  • Réaliser un profil vidéo pour vous présenter en intégrant votre CV ;
  • Bricoler un diaporama animé ou un petit dessin animé ;
  • et beaucoup d’autres choses à votre gré !

Voici le panneau des événements disponibles

popcornEvenements.png

…et ci-dessous un exemple simple d’intégration d’une bulle dans la vidéo. Les différents objets du multimédia figurent dans la série des « calques » qui sont de maniement aisé dans le panneau de contrôle en bas.

popcorn_timeline.png

— Vous voulez faire bien mieux ? Essayez Popcorn Maker, c’est par ici  https://popcorn.webmaker.org/

(1) Question pour les cerbères du ©opyright : à partir de quel degré de remix peut-on dire qu’est née une nouvelle œuvre (la réponse : 42°)

À suivre ! -> la semaine prochaine : des outils pour les appreneurs aussi !




Logiciels et matériels libres font le bonheur de l’éducation

Avec du logiciel et du matériel libres, on est aujourd’hui en mesure de proposer des cours tout à fait passionnants, ouverts, modulables et sans entrave à la création.

Le témoignage d’un prof qu’on aurait bien aimé avoir lorsqu’on était jeune.

Maltman23 - CC by-sa

Un programme universitaire qui enseigne l’interaction homme-machine avec du logiciel et du matériel libres

University course teaches computer-human interaction with open hardware and OSS

Jonathan Muckell – 28 mars 2014 – OpenSource.com
(Traduction : Omegax, Mounoux, lamessen, Piup, aKa, lumi, Kcchouette, ton, Gatitac)

La plupart des gens considèrent que leurs interactions avec les systèmes informatiques se passent via un clavier, une souris ou un écran tactile. Cependant, les humains ont évolué pour interagir avec leur environnement et leurs congénères de manière bien plus complexe. Réduire l’écart entre les systèmes informatiques du monde numérique et le réel est en train d’être étudié et testé dans le cours de Physical Computing (NdT : Difficile à traduire, informatique physique/démonstrative) de l’université d’État de New-York (SUNY) à Albany.

En tant que professeurs de ce cours, nous profitons en ce moment d’une grande variété de projets de logiciels et matériels libres pour en apprendre plus sur les principaux concepts fondamentaux grâce à des expériences pratiques et la mise en place d’outils libres. Côté logiciel, nous utilisons un environnement de développement intégré (Arduino Sketch) et nous développons des modélisations pour les imprimantes 3D en utilisant OpenSCAD. Pour la partie matériel libre du cours, nous utilisons des Arduino et la PrintrBot Simple.

Le cours de Physical computing associe l’utilisation du matériel et du logiciel pour détecter et contrôler les interactions entre les utilisateurs et l’environnement. Elle peut repérer et répondre à des actions, par exemple en détectant la localisation des véhicules à une intersection et en ajustant le réglage des feux. Le domaine de l’informatique physique est relativement vaste, englobant des spécialités telles que la robotique, les microcontrôleurs, l’impression 3D et les vêtements intelligents.

D’après mon expérience, les étudiants aiment avoir la possibilité de combiner la pensée créative et sa mise en œuvre pratique. Il naît un sentiment d’émerveillement et d’accomplissement quand ils sont capables de faire quelque chose qui se passe dans le monde physique. L’une des premières activités du cours est simplement d’écrire du code et de créer un circuit pour faire clignoter une ampoule LED. Je ne me lasse jamais de voir leur joie quand ils y arrivent la première fois. L’un des objectifs principaux est de maintenir cet état d’émerveillement et d’excitation. Quand le cours progresse, nous avons les « Jeux olympiques des robots » où les étudiants se font rivalisent avec leurs robots construits sur mesure dans différentes catégories. Plus tard, nous plongeons dans l’impression 3D, où ils créent des objets personnalisés.

Chaque fois que nous abordons un nouveau domaine, je vois cette étincelle, cette excitation sur le visage de mes étudiants. Je veux que la passion et un véritable intérêt pour le matériel se développent. Je veux qu’ils expérimentent en rentrant dans leurs dortoirs. Si je réussis, les étudiants ne devraient pas avoir la sensation de travailler comme dans une école traditionnelle. Durant le processus et spécialement pour leur projet de fin d’étude, j’insiste sur l’inovation et la pensée créatrice. Quelle est la valeur de ce qu’ils génèrent à travers les conceptions qu’ils proposent ? Je veux que les étudiants pensent de façon créative et non pas qu’ils suivent un processus établi ou des tâches séquentielles prédéfinies.

J’utilise souvent le circuit imprimé Arduino pour enseigner car c’est un moyen fantastique pour apprendre. Non seulement il est très utile pour introduire des sujets tels que la programmation embarquée et l’électronique, mais c’est aussi une plateforme phénoménale pour le prototypage rapide et l’innovation. Des étudiants ont accompli des projets de fin d’étude vraiment innovants. Deux de mes étudiants ont utilisé une commande WiiMote de Nintendo pour jouer à pierre-feuille-ciseaux contre l’ordinateur. Si vous jouez suffisamment longtemps, l’ordinateur mémorise vos précédents mouvements et prédit ce que vous allez choisir avant vous. Des étudiants ont controlé une voiture à partir d’un smartphone et un autre groupe a programmé l’envoi automatique d’informations de détecteurs sur Twitter. Au début du semestre, les cours sont basés sur les concepts fondamentaux, avec du temps dédié aux travaux pratiques en équipes réduites. La dernière partie du semestre est basée sur des projets intégrés et créatifs.

Ce semestre, nous avons introduit l’impression 3D comme sujet principal du programme scolaire. C’est l’occasion pour les étudiants de construire des objets physiques, ainsi que de combiner capteurs, pièces mécaniques et processeurs pour donner vie aux objets. D’un point de vue éducatif, le Printrbot Simple est vraiment l’idéal. Nous avons commandé l’imprimante en kit et avons demandé aux élèves d’effectuer l’assemblage. Ce procédé a non seulement fourni une occasion pour les étudiants d’apprendre les mécanismes de fonctionnement d’une imprimante 3D, mais leur a aussi donné un sentiment d’appropriation par l’utilisation et l’entretien des imprimantes au fil du temps. Les imprimantes 3D ont des problèmes similaires à ceux des imprimantes 2D — elles se bloquent, elles ont des problèmes mécaniques et d’entretien. Toutefois, le Printrbot Simple est conçu de façon à faire participer les élèves. Et ils ont acquis les compétences nécessaires pour corriger et résoudre les problèmes quand ils surviennent.

Le Libre en classe

La plupart des élèves ont une certaine expérience du Libre et de l’open source. Le Département Informatique de l’Université d’Albany repose sur ??l’utilisation d’outils libres. En particulier, de nombreux étudiants utilisent GitHub, qui est exploité dès les premiers cours. Le département donne aussi des cours spéciaux qui sont purement focalisés sur le logiciels libre. L’élément nouveau pour les étudiants est la notion de matériel libre.

La majorité des gens ont tendance à penser que le Libre ne concerne que le développement logiciel. Le matériel libre est un concept novateur et passionnant pour les étudiants.

Le matériel et les logiciels libres ont permis à notre cours de Physical Computing d’éviter les problèmes de licences, et donc de pouvoir évoluer librement. Cela nous a aussi apporté de la flexibilité : nous se sommes pas enfermés sur une seule plateforme ou un outil unique. Le Libre autorise les modifications sans être bloqué par les modalités de contrat de licence du vendeur.

Crédit photo : Maltman23 (Creative Commons By-Sa)




Le Royaume-Uni traite les journalistes comme des terroristes, croyez-moi, je le sais

« Sarah Harrison est une journaliste britannique et chercheur en droit qui travaille avec l’équipe de défense juridique de WikiLeaks. Elle a aidé le lanceur d’alerte Edward Snowden à obtenir l’asile, suite à ses révélations, en 2013, sur plusieurs programmes de surveillance de masse américains et britannique. »

Voici ce qu’on peut lire sur sa fiche Wikipédia et qui justifie aux yeux du gouvernement de son pays qu’on la considère plus comme une terroriste que comme une journaliste[1].

Un témoignage accablant.

Sarah Harrison

Le Royaume-Uni traite les journalistes comme des terroristes – croyez-moi, je le sais

Britain is treating journalists as terrorists – believe me, I know

Sarah Harrison – 14 mars 2014 – The Guardian
(Traduction : loicwood, MrTino, Kcchouette, Romane, r0u, lumi, aKa + anonymes)

Mes liens avec WikiLeaks et Edward Snowden signifient que je suis considérée comme une menace et que je ne peux pas revenir au Royaume-Uni. Nous avons besoin d’une feuille de route pour la liberté d’expression.

La liberté d’expression et la liberté de la presse sont attaquées au Royaume-Uni. Je ne peux pas revenir en Angleterre, mon pays, à cause de mon travail journalistique avec Wikileaks et le lanceur d’alerte de la NSA, Edward Snowden. Il y a des choses que je pense même ne pas pouvoir écrire. Par exemple, si je déclarais que j’espère que mon travail à WikiLeaks puisse changer les comportements du gouvernement, ce travail journalistique serait considéré comme un crime selon le « UK Terrorism Act » (NdT : Loi contre le terrorisme au Royaume-Uni) datant de 2000.

Cette loi définit le terrorisme comme « tout acte ou menace d’action ayant pour but d’influencer le gouvernement ou une organisation gouvernementale internationale » ou « conçue dans le but de faire prospérer une cause politique, religieuse, raciale ou idéologique » ou « conçue pour interférer ou perturber un système électronique ». Par ailleurs, la loi indique que « gouvernement » signifie le gouvernement de n’importe quel pays­ – y compris les États-Unis. Le Royaume-Uni a utilisé cette loi afin d’ouvrir une enquête pour terrorisme contre Snowden et les journalistes qui ont coopéré avec lui, et ont utilisé ce prétexte pour entrer dans les bureaux du Guardian et demander la destruction de leurs disques durs relatifs à Snowden. Ce pays est en train de devenir un pays qui ne différencie plus les terroristes des journalistes.

Le jugement récent de l’affaire Miranda le démontre. David Miranda assistait le journaliste Glenn Greenwald et transitait par l’aéroport d’Heathrow l’été dernier, en possession des documents du journaliste, quand il fut arrêtéen vertu de l’article 7 de la loi contre le terrorisme. L’article 7 permet aux autorités d’arrêter une personne dans tous les ports, aéroports et gares du Royaume-Uni, de la détenir jusqu’à neuf heures, et n’accorde aucun droit à garder le silence. Cette loi vous oblige à répondre aux questions et à fournir tous les documents que vous possédez, et c’est ainsi que Miranda a été forcé de remettre ses documents relatifs à l’affaire Snowden. Par la suite, Miranda a intenté un procès contre le gouvernement britannique sur la légalité de sa détention, afin de démontrer que cette loi bafouait son droit de faire son travail de journaliste librement. La cour a outrageusement utilisé une question de transparence politique pour ignorer la liberté d’expression telle que définie par la Convention européenne des droits de l’homme.

Si le Royaume-Uni se met à enquêter sur nous, les journalistes, pour terrorisme en prenant et en détruisant nos documents, en nous forçant à donner nos mots de passe et à répondre aux questions – comment être sûrs de pouvoir protéger nos sources ? Mais comme il y a désormais un précédent, aucun journaliste ne peut être certain que s’il sort, entre ou transite par le Royaume-Uni, cela ne peut lui arriver. Mes avocats m’ont conseillé de ne pas rentrer chez moi.

L’avocate américaine de Snowden, Jesselyn Radack, fut questionnée à propos de Julian Assange et de son client lors de son récent passage au Royaume-Uni. Je suis fortement liée à ces deux hommes : je travaille pour l’un, et j’ai aidé et protégé l’autre pendant quatre mois. En outre, si l’article 7 est utilisé pour m’arrêter dès que je débarque au pays, je ne pourrais pas répondre à de telles questions ou renoncer à quoi que ce soit, car ce serait un risque pour le travail journalistique de WikiLeaks, pour nos collaborateurs et nos sources. Comme je n’ai pas le droit au silence d’après cet article, je commettrais un crime aux yeux du gouvernement. Une condamnation pour « terrorisme » aurait de sévères conséquences pour ma liberté de circulation à travers les frontières internationales.

L’article 7 ne concerne pas vraiment la capture de terroristes, de part la façon même dont il a été rédigé. Le jugement de l’affaire Miranda établit qu’il a dans ce cas « constitué une interférence indirecte avec la liberté de la presse » et est certes « en mesure, selon le contexte, d’être déployé pour interférer avec la liberté journalistique ». Les forces de l’ordre peuvent détenir quelqu’un non pas parce qu’elles le suspectent d’être impliqué dans des activités terroristes, mais pour voir « si quelqu’un semble » – même indirectement – « faciliter » le terrorisme, tel qu’il est bizarrement défini par cette loi.

Le juge Ouseley, qui a également présidé l’affaire d’extradition d’Assange, a déclaré dans son jugement qu’un officier peut agir sur la base « d’un simple pressentiment ou d’une intuition ». Il est donc maintenant décrété par nos tribunaux qu’il est acceptable d’interférer sur la liberté de la presse, sur la base d’une intuition – tout cela au nom de la « sécurité nationale ». Aujourd’hui, au lieu d’« assurer la stabilité d’une nation pour son peuple », la sécurité nationale utilise ces lois pour justifier leurs propres infractions, que ce soit pour envahir un autre pays ou espionner leurs propres citoyens. Cette loi – c’est maintenant clair comme du cristal – est consciencieusement et stratégiquement mise en oeuvre pour menacer les journalistes. Elle est devenu un moyen pour sécuriser l’opacité derrière laquelle notre gouvernement peut construire un tout nouveau Big Brother du 21ème siècle.

Cette érosion des droits humains fondamentaux présente de dangereux risques de dérive. Si le gouvernement peut se permettre de nous espionner – pas seulement en collusion avec, mais aux ordres, des États-Unis – alors quels contrôles et contrepoids nous sont laissés ? Peu de nos représentants font quoi que ce soit à l’encontre de cette restriction abusive pour les libertés de la presse. La députée des verts Caroline Lucas a déposé une « Early Day Motion » (NdT : pratique parlementaire britannique consistant à déposer une motion à la Chambre des Communes afin de sensibiliser les députés sur un sujet particulier) le 29 janvier, mais seuls 18 députés l’ont signée jusqu’à présent.

Depuis mon refuge à Berlin, toute cette affaire à des relents d’adoption du passé allemand, plutôt que son futur. Je me suis demandé dans quelle mesure l’histoire britannique aurait été plus pauvre si le gouvernement de l’époque avait eu un tel instrument abusif à sa disposition. Que serait-il arrivé à toutes ces campagnes publiques menées afin d’« influencer le gouvernement » ? Je peux voir les suffragettes qui se battaient pour leur droit de vote être menacées d’inaction, les marcheurs de Jarrow être qualifiés de terroristes et Dickens être enfermé à la prison de Newgate.

Dans leur volonté de piétiner nos traditions, les autorités britanniques et les agences d’État sont saisies par un extrémisme qui est très dangereux pour la vie publique anglaise tout comme la (réelle ou imaginaire) lutte contre le terrorisme. Comme le souligne Ouseley, le journalisme au Royaume-Uni ne possède pas de « statut constitutionnel ». Mais il n’y a aucun doute que ce pays a besoin d’une feuille de route pour la liberté d’expression pour les années à venir. La population anglaise doit se battre pour montrer au gouvernement que nous préserverons nos droits et nos libertés, quelles que soient les mesures coercitives et les menaces qu’il nous lance.

Notes

[1] On notera que même Paris Match en a parlé : Elle a aidé Snowden, Sarah Harrison contrainte à l’exil.




Apprendre le Web avec Mozilla Webmaker (2)

Si vous avez raté le début : Mozilla Webmaker est un ensemble d’outils ludo-éducatifs qui permettent à chacun de comprendre et de modeler le Web. la semaine dernière nous vous avons présenté les lunettes à rayons X pour voir sous les jupes de la page Web. Cette semaine, un deuxième outil de Webmaker appelé Thimble, le dé à coudre magique.

Thimble, le HTML comme si vous y étiez

Code ou wysiwyg ? — les deux !

Il existe une longue histoire des éditeurs HTML open source qui permettent de travailler directement avec la visualisation finale (wysiwyg, acronyme de what you see is what you get, signifie littéralement : « ce que vous voyez est ce que vous obtiendrez »). Depuis le déjà ancien Amaya jusqu’au plus récent KompoZer conçu naguère par Fabien Cazenave qui forkait Nvu, on a cherché à mettre à la portée de tous la création de pages web en laissant dans les coulisses le code HTML. Encore était-il généralement accessible d’un clic dans un onglet par exemple. On pouvait donc créer et maintenir sa page web sans trop se soucier des balises, des attributs et autres CSS.

Cependant la généralisation des blogs dans les années 2000 a poussé à la mise à disposition de systèmes de publication qui ont simplifié la publication « grand public ». N’importe qui aujourd’hui peut publier avec une instance installée de Dotclear ou WordPress sans se préoccuper du HTML.

Cette facilité a un revers, c’est l’ignorance qui nous éloigne du Web tel qu’il est et donc tend à nous en occulter la plasticité. Fallait-il pour renouer avec la créativité du Web en revenir à la sècheresse d’un éditeur de texte comme les vrais développeurs le pratiquent ?

Thimble, le dé à coudre de Webmaker, permet de ne pas choisir. Il vous propose à la fois de travailler dans le code et de voir ce qu’il produit, tout en contrôlant sa validité.

Un éditeur interactif

  1. Il me présente en temps réel et en vis-à-vis le rendu de la page HTML que je suis en train de saisir, le délai de rafraîchissement est d’une fraction de seconde :
  2. thimble_page_goofy.png

  3. Il me signale instantanément par la couleur rouge et un avertissement écrit en toutes lettres que je commets une erreur de syntaxe. Un petit pointeur mobile vient même m’indiquer l’endroit précis que je devrais modifier : thimble_correction_balise.png
  4. Il peut aussi m’apprendre davantage : en cliquant sur un élément HTML je dispose d’une définition et d’un lien « plus… » qui conduit à un article plus détaillé du Mozilla Developer Network, le site de documentation pour développeurs. J’ai ainsi la possibilité de passer de la découverte à un niveau plus avancé.
  5. thimble_apprendre.png

Un éditeur infiniment ouvert

  1. À peine ma page ébauchée, je peux la publier, elle sera hébergée sur un serveur de Webmaker
  2. thimble_lien_pageperso.png

  3. Je pourrai dès lors la modifier moi-même aussi souvent que je le souhaite, mais de plus n’importe qui pourra en faire une version (d’aucuns diront un fork) en cliquant sur le bouton « Remixer »
  4. thimble_remix.png

Offrez sa page web à un proche !

Vous connaissez certainement quelqu’un, enfant, adolescent ou… bien plus âgé, qui va trouver amusant et intéressant de se fabriquer une ou des dizaines de pages. Alors hop, indiquez-lui l’adresse https://thimble.webmaker.org/. Mais pour se mettre en appétit, pourquoi ne pas commencer par remixer des pages existantes, écrire sa légende d’un lolcat, personnaliser texte et image d’une carte postale, et bien d’autres projets. Au fait, certains projets comme cette BD à faire soi-même sont littéralement des tutoriels de leur propre conception, mais sont pour l’instant en anglais. Rien ne vous empêche de les remixer pour les traduire et en faire un nouvel outil francophone.

À suivre ! -> la semaine prochaine : Popcorn, pour exploser vos vidéos sur le Web.




Libre comme le loup, et comme ces élèves de 1ère Bac Pro qui sollicitent votre soutien

« Plutôt que je crée, je vends, nous avons choisi je crée et je partage… »

Regroupés au sein de la mini entreprise « TimberWolf Créativ’ », des élèves en 1ère Bac Pro du lycée professionnel Camille Schneider de Molsheim nous proposent un projet tout à fait intéressant autour de la création d’un livre numérique sur le loup en Alsace.

Il s’intitule « Libre comme le loup » (cf cette vidéo). Comme vous pourrez le constater en lisant l’entretien ci-dessous, il n’y a pas que le loup qui est libre ici. Et quand on demande aux élèves ce qu’ils ont déjà retenu de leur expérience à ce stade du projet, le HTML5+CSS3, les logiciels libres et les licences libres font partie des réponses.

Un projet à soutenir, d’autant qu’ils sont en campagne de financement sur Ulule pour couvrir les frais.

Remarque : Framasoft est impliqué dans le projet en accompagnant les élèves dans la création de leur ePub sur des outils et des formats libres. Nous les avons également invités à l’événement Vosges Opération Libre à Gérardmer en mai prochain, que vous pouvez d’ores et déjà noter sur vos tablettes si vous êtes de la région.

Libre comme le loup - Ulule

Interview des élèves porteurs du projet

Bonjour, pouvez-vous présentez succinctement en indiquant quelle fonction vous occupez au sein du projet ?


Je m’appelle Elisabeth, j’ai 16 ans, je suis en 1er Bac Pro Gestion-Administration au LP Camille Schneider de Molsheim et PDG de la mini-entreprise TimberWolf Créativ’. Et voici les responsables des différents services qui sont tous avec moi au lycée :

  • Auriane, DG
  • Arzu, Responsable Technique.
  • Sylvie, Responsable Artistique.
  • Pauline, Responsable Administrative.
  • Mélanie, Responsable Financière.
  • Mélissa, Responsable Marketing au sein de TimberWolf Créativ’

Alors le projet « Libre comme le loup », c’est quoi exactement ?

1620569_1418157165090157_2018577556_n.jpgC’est mettre en place un E-pub sur les légendes alsaciennes en rapport avec le loup afin de faciliter son retour dans nos contrées. Pour faire parler du loup dans nos contrées alsaciennes, nous avons pour projet de réaliser un E-Pub libre écrit sous licence Creative Commons by-SA.

Dans notre E-Pub vous trouverez des légendes alsaciennes oubliées et inconnues sur le loup ainsi que des musiques composées spécialement par notre partenaire La Poupée du Loup, nos dessins et nos énigmes. Une magnifique image de couverture réalisée par l’artiste Jean Linnhoff.

Quelle est la situation actuelle du loup en Alsace ?

Après avoir été éradiqué au début du XXe siècle, il revient chez nous tout doucement. On l’a aperçu à Still et au col du Donon très récemment. Les réactions sont diverses entre les pros-loup et les anti-loup.

Qu’est-ce qu’une « mini entreprise » ? Est-ce ouvert à tous les lycéens ?


C’est une entreprise comme une autre, sauf qu’elle est sous couvert de l’Education nationale, via Entreprendre Pour Apprendre. D’une durée d’un an elle est dirigée par des élèves. Ce type de formation est ouvert à tous mais ne fonctionne vraiment qu’avec une classe solidaire, motivée et qui n’a pas peur de faire des heures sup !

Pourquoi uniquement un ePub et pas également une impression papier ? Est-ce parce que l’ePub propose une autre expérience au lecteur avec de l’interactivité, de la musique, etc. ? Parce que le papier, c’est trop cher ?


Notre E-pub est basé sur un livre papier déjà existant, lui-même créé par la mini-entreprise de l’an passé. L’E-pub apporte une dimension interactive, musicale et visuelle et touche un autre public. Ici le coût n’entre pas en compte, c’est plutôt un choix en rapport avec l’air du temps, l’enseignement des nouvelles technologies en classe de Gestion Administration.

Votre projet s’inscrit sous le signe de la liberté. D’abord pour le loup mais également dans le choix des technologies utilisées (HTML5, CSS3…) et des licences adoptées (CC By-SA). En quoi le « choix du Libre » est-il ici important pour vous ?


La liberté est le maître mot de notre projet : un loup libre, une culture libre pour que chacun puisse apporter sa pierre à l’édifice. Nous souhaitions développer un autre aspect économique, plutôt que je crée, je vends, nous avons choisi je crée et je partage !

La musique, du groupe La Poupée du Loup, est aussi sous licence libre CC By-SA. Ont-ils été faciles à convaincre ?


Nous n’avons eu aucun besoin de les convaincre, ils étaient partants dès le départ et se sont beaucoup investis dans notre E-pub mais également dans l’événementiel au Molodoï.

Vous organisez un week-end à Strasbourg et vous participez à Vosges Opération Libre à Gérardmer. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Nous organisons un concert avec La Poupée du Loup, Dirty Deep, Les Poches Vides, le samedi 19 avril à partir de 21h avec une entrée à 5€ et un débat le dimanche 20 avril à partir de 14h avec entrée libre sur le thème du retour du loup en Alsace et l’artiste Jean Linnhoff pour un graff.

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Mais nous n’en restons pas là. Nous serons également présents à Vosges Opération Libre avec notre partenaire Framasoft, qui se déroulera le 17 et 18 mai à Gérardmer, pour présenter notre travail. Effectivement ce dernier nous a invité à participer à cet événement pour nous permettre de mettre en avant notre projet et en même temps pouvoir mieux connaître et naviguer dans « le Libre ». Jusqu’à ce jour, nous avions uniquement travaillé avec des logiciels bureautiques sous licence propriétaire et ce projet nous a permis de découvrir une autre facette informatique.

En quoi ce projet s’inscrit bien dans le programme pédagogique de votre classe de 1ère BAC Pro Gestion Administration ?


1026061_1427180937521113_272946299_o.jpgNous quittons le virtuel et le théorique pour entrer dans la réalité avec des actions concrètes. Nous devons tout maîtriser aussi bien l’outil informatique avec HTML5 et CSS3, qui ne font pas partis de notre programme mais que nous avons dû apprendre à maîtriser en toute autonomie. Il a aussi toute la partie économique et de gestion d’une entreprise, à savoir : le management, le marketing, la comptabilité, les tâches administratives et, petit plus, le côté artistique avec Sylvie qui a fait tous les dessins.

Qu’est-ce que vous avez déjà appris à ce stade du projet ?


Le HTML + CSS3, les logiciels libres, les droits d’auteurs… En plus des spécificités de chaque service, nous avons appris que pour être performant, il faut travailler ensemble.


Vous proposez une campagne de financement participatif sur la plateforme Ulule. Quels sont vos besoins ? Et que se passera-t-il si la somme n’est pas atteinte ?


Nous avons besoin de 2 500 € pour financer :

  • Notre week-end loup au Molodoï de Strasbourg
    • Cachet des artistes
    • Défraiement
    • Communication sur l’événement (flyer, affiche, carte postale…)
    • La location du Molodoï
    • La gestion du week-end
    • Les repas pour les intervenants
  • La conception de l’E-Pub qui sera téléchargeable gratuitement mais également vendu sous forme de clé USB :
    • L’achat du support soit la clé USB de 4 Go sur laquelle figurera notre E-Pub + les 3 musiques de la Poupée du Loup + des logiciels Libres de Droit
  • L’enregistrement en studio des musiques (3 jours)
  • Les produits dérivés (Tee-Shirts, Casquettes)
  • Frais de déplacement et d’hébergement :
    • Week-end Vosges Opération Libre, à Gérardmer
    • Déplacements sur Strasbourg (24 élèves)

Et si en fin d’année nous avons réussi à avoir un solde positif, nous reverserons une part de nos bénéfices à une association de défense du loup. Si nous ne les atteignons pas,… nous ne voulons pas y penser… gloups !

Un dernier mot ? Un message à faire passer ?


Soyez libre comme le loup ! Et… aidez-nous 😉

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Apprendre le Web avec Mozilla webmaker (1)

Vite fait, vite lu : ce qui fait la force du Web ouvert, c’est que n’importe qui peut en être un maillon et le construire. Mozilla Webmaker est un ensemble d’outils ludo-éducatifs qui permettent à chacun de comprendre et de modeler le Web.

Le Web permet à chacun d’entre nous d’essayer de nouvelles idées et de les offrir au monde entier, sans avoir à demander la permission à une quelconque autorité. Le rythme rapide de l’innovation nous montre de quoi l’humanité est capable quand de puissants outils sont offerts également à tous.

Mitchell Baker, présidente de la Mozilla Foundation

Chacun doit avoir la possibilité de façonner Internet et son utilisation d’Internet.

principe N°5 du Manifeste de Mozilla

Tout à fait en phase avec ces principes nobles mais certes un peu nébuleux, Mozilla a pris depuis plusieurs années des initiatives concrètes pour amener le plus grand nombre de ses utilisateurs à une meilleure connaissance de ce qu’est le Web. Voici des outils pour apprendre et enseigner.

Utilisez-les, bidouillez-les, inventez-en d’autres !

Pourquoi éduquer au Web

Une génération sans autre proposition que la consommation ?

Il y a presque 30 ans le plan informatique pour tous, malgré tous les défauts et limites matérielles qui devaient conduire à son abandon, a eu le mérite de mettre une génération d’enfants devant des ordinateurs sur lesquels ils s’initiaient à la programmation : dès l’école primaire on apprenait à piloter une « tortue » en logo, puis au collège on s’initiait aux rudiments du BASIC.

On peut penser raisonnablement qu’un petit nombre des enfants d’alors y ont pris goût et sont devenus depuis des acteurs de l’industrie numérique. Et que dire des gamins pour lesquels les portes du Centre international de l’informatique étaient ouvertes dès 1981 ?

Aujourd’hui, quelle occasion ont les enfants et adolescents de mettre les doigts dans le code, de concevoir un contenu pour le Web, d’être autonomes dans leurs usages d’Internet ? Ce n’est maintenant pas avant la classe de terminale scientifique qu’il s’agit d’apprendre à programmer, encore est-ce très clairement lié aux activités mathématiques et scientifiques.

Rien ne leur est proposé pour créer sur le Web, rien ne leur est proposé d’autre que de consommer des contenus dès l’âge tendre. Comment pourraient-ils devenir de utilisateurs conscients et compétents du Web ?

…et tous les autres utilisateurs ?

Aujourd’hui les jeunes ne sont pas les seuls à être privés d’éducation au Web. Que dire de tous ceux qui en maîtrisent à peine l’usage minimum ? De tous les milieux et de tous les âges, y compris dans les métiers dits intellectuels qu’on pourrait croire mieux informés, nombreux sont ceux autour de nous qui confondent un navigateur et un moteur de recherche, qui pensent être protégés de tout par un antivirus et qui ignorent jusqu’à l’existence d’un truc qu’on appelle les logiciels libres.

L’enjeu ?

— C’est la plasticité d’un Web libre et ouvert et sa maîtrise par des utilisateurs conscients. C’est la possibilité pour chacun de comprendre ce qui se passe dans les coulisses d’un site ou d’un service en ligne, d’être conscient des risques de la surveillance généralisée et de la marchandisation de nos profils. C’est la possibilité pour chacun d’être un acteur du Web et d’en tirer le meilleur parti sur tous les plans.

Oui d’accord, j’arrête avec les idéaux, voyons un peu ce que propose Mozilla.

Des outils ludiques pour apprendre

Les lunettes déshabillantes du HTML

Quand j’étais gosse (c’était au millénaire précédent), on pouvait voir dans les magazines des publicités pour un gadget qui ne manquait pas de nous faire fantasmer : des lunettes à rayons X, qui étaient supposées dévoiler des silhouettes sous les vêtements. Je n’ai jamais su si ces promesses alléchantes avaient un quelconque fondement. En revanche, la supervision de Superman, qui ne me faisait guère fantasmer, semble s’être réalisée avec les X-Ray Goggles de Webmaker. Il s’agit ni plus ni moins que de révéler le code source et donc d’apprendre le nom des éléments, attributs et autres balises HTML en se promenant sur la page web, une fois activées les « lunettes ».

Il s’agit d’un script qu’on dépose sur la barre d’outils comme un simple bookmarklet (tiens, pourquoi avait-on perdu de vue les bien pratiques bookmarklets ?). Pour l’utilisateur c’est simplissime et presque amusant. Pour moi le vieux pervers c’est comme si je pouvais regarder sous les jupes… de la page. Mais voici quelques captures d’écran qui vaudront mieux qu’une trop longue description :

Première étape : faire glisser le bookmarklet sur la barre d’outils de son choix

Sur une page qu’on aime bien (celle de connard.pro par exemple) il suffit de survoler et les éléments ou attributs HTML se mettent en couleurs et sont identifiés.

TOUT est désormais modifiable sur la page : textes, images, balises… ici j’augmente l’interligne et j’ajoute des italiques.

…et le plus chouette (mot qui voulait dire trop cool autrefois) c’est que je peux publier le résultat remixé par mes soins et communiquer fièrement l’adresse aux victimes du bidouillage.

Allez vous aussi vous amuser avec les lunettes à rayons X, c’est ici https://goggles.webmaker.org/fr et c’est en français grâce aux contributeurs de MozFr (oui c’est imprononçable, et alors ?)

— Au fait, si vous voulez passer à l’étape supérieure, vu que vous êtes « pro » et que vous regardez tout cela avec un sourire condescendant, essayez donc l’inspecteur (Ctrl+Maj+C) parmi les nombreux outils de développement web inclus dans Firefox (what else ?)

À suivre ! -> la semaine prochaine : Thimble, l’éditeur HTML interactif qui poutre.




Ce que cache la gratuité des photos embarquées de Getty Images (et des autres)

Le Parisien nous annonce que YouTube a connu une panne mondiale hier soir 13 mars 2014, entraînant avec lui la pléthore de sites qui proposent ses vidéos à mêmes leurs pages web via le lecteur embarqué. On remarquera que pour mieux nous informer l’article en question intègre deux tweets (paresse de journaliste ?).

Vidéos YouTube, encarts Twitter, musiques Soundcloud, boutons Facebook… nos pages web deviennent de plus en plus souvent un savant mélange entre notre propre contenu et celui des autres, apporté sur un plateau par des multinationales à forte dominante américaine.

C’est pratique et gratuit. Il y a un juste à faire un copier/coller avec un bout de code pour que, ô magie, le contenu des autres apparaisse instantanément sur votre page, l’enrichissant ainsi à moindre frais.

Mais il y a un risque et un prix à payer. Le risque c’est que comme rien n’est éternel, le jour où YouTube, Facebook, Twitter… disparaîtront (si, si, ça leur arrivera à eux aussi), on se retrouvera avec des pages pleines de zones vides qui n’auront plus de sens. Avant de disparaître, ces sociétés en difficulté auront pris le soin de modifier le contenu même de toutes ces (frêles) embarcations avec, qui sait, toujours plus de publicité. Elles en ont parfaitement le droit, c’est un accord tacite que vous signez avec elles lorsque vous recopiez leur code. Google peut ainsi très bien du jour au lendemain ne faire afficher qu’une seule et unique vidéo dans tous les milliards lecteurs YouTube embarqués avec, disons, une pub pour Coca-Cola : impact marketing garanti !

Quant au prix à payer il est lourd à l’ère de l’informatique post Snowden, c’est celui de votre vie privée car, comme on le verra plus bas, ces intégrations collectent de nombreuses informations vous concernant.

Ici donc c’est au tour de l’énorme banque Getty Images de vous proposer d’embarquer ses photos. Et vous avez le choix parmi… 35 millions d’images ! D’un côté cela rend service et sensibilise au respect du crédit, de la licence et du lien vers le document d’origine. De l’autre ça participe à la fameuse citation « si c’est gratuit, c’est que c’est vous le produit »…

À comparer avec ce qu’a fait la British Library, l’équivalent britannique de la BnF, en décembre dernier : verser 1 million d’images du domaine public en haute résolution sur Flickr. Un autre monde, un monde à défendre, promouvoir et encourager.

 

 

Getty Images autorise l’incorporation gratuite, mais quel en est le prix pour la vie privée ?

Getty Images Allows Free Embedding, but at What Cost to Privacy?

[MàJ du 8 mars 2016] Par recommandé reçu au siège de Framasoft le 07 mars 2016, la société GETTY IMAGE, par l’intermédiaire de son conseil juridique, met Framasoft en demeure de supprimer la majeure partie des éléments du billet de blog présent sur cette page. Sont en particulier concernés les propos issus de la traduction de l’article de Parker Higgins de l’Electronic Frontier Foundation, intitulé « Getty Images Allows Free Embedding, but at What Cost to Privacy ? ». Le billet ayant été publié en mars 2014 (il y a deux ans !), le délai légal du délit de presse n’ayant pu être retenu, c’est sur le thème du dénigrement que s’attache le cabinet de conseil de GETTY IMAGE.

Nous aurions pu à notre tour nous tourner vers notre propre conseil, qui n’aurait pas manqué, par exemple, de relever les injonctions non conformes au droit présentes dans cette lettre, ou la grande faiblesse des arguments (intimidants en apparence).

Aller au bout d’une procédure se concluant très certainement en queue de poisson ? Cela aurait été de notre part une perte d’énergie, de temps et d’argent ; nous estimons que les généreux dons des contributeurs n’ont pas à servir à de vaines procédures portant sur l’image de telle ou telle société, gagne-pain laborieux de quelques conseils juridiques à défaut d’avoir de vraies causes à défendre.

Nous préférons donc censurer ce billet et laisser nos lecteurs juges de la teneur du courrier en question que nous reproduisons ici. Évidemment, les propos que nous supprimons sur cette page ne sortiront pas pour autant d’Internet, n’est-ce pas ?

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