Soutenir les Creative Commons – Lettre de Mohamed Nanabhay (Al Jazeera)

Oso - CC by-ncL’actuelle campagne de soutien des Creative Commons (CC) bat son plein. Elle vise à récolter un demi-million de dollars avant le 31 décembre. Inutile de vous dire que nous vous encourageons vivement à participer, si vous pensez, comme nous, que ces licences font partie de ce qui est arrivé de mieux à l’Internet au cours de la présente décennie.

À cette occasion, il a été demandé à des personnalités utilisant les CC de témoigner en rédigeant une Commoner Letter. C’est la première de ces lettres que nous avons traduit ici, faisant directement écho à un billet de janvier dernier où nous évoquions l’inauguration par Al Jazeera d’un dépôt d’archives vidéos sous licence Creative Commons[1].

Rendez-vous l’an prochain pour la lettre de TF1 ?

Commoner Letter #1 : Mohamed Nanabhay de la chaîne Al Jazeera

Commoner Letter #1: Mohamed Nanabhay of Al Jazeera

7 octobre 2009 – Blog Creative Commons
(Traduction Framalang : Olivier Rosseler et Yostral)

Introduction de Allison Domicone (Creative Commons)

J’ai le plaisir de vous annoncer le lancement de notre série Commoner Letter annuelle, une série de lettres rédigées par des membres importants de la communauté des CC pour appuyer notre campagne de soutien pour les CC. Mais cette campagne ne vise pas qu’à lever des fonds, nous voulons que cela soit bien clair. Nous cherchons avant tout à faire connaître plus largement les CC et à militer pour le partage en ligne et la culture collaborative.

Je suis donc fier de vous annoncer la parution de la première Commoner Letter, de Mohamed Nanabhay, directeur du développement en ligne pour Al Jazeera English. Mohamed et Al Jazeera ont offert une visibilité à l’international aux CC grâce au travail incroyable qu’ils ont founi cette année. Comme vous le savez peut-être déjà, Al Jazeera a lancé plus tôt dans l’année un dépôt Creative Commons qui héberge des rushes vidéo que tout le monde peut partager, réutiliser et remixer. Avoir un tel allié chez Al Jazeera est un honneur et j’espère que vous apprécierez le témoignage personnel que nous livre Mohamed sur son attachement aux Creative Commons.

Lettre de Mohamed Nanabhay (Al Jazeera)

Cher Creative Commoner,

L’année a été riche pour Al Jazeera et sa relation avec les Creative Commons. En janvier nous avons inauguré le premier dépôt mondial de vidéos professionnelles placées sous licence Creative Commons 3.0 Attribution (CC BY). Nous avions alors libéré une sélection de séquences filmées par Al Jazeera, des rushes sur la guerre à Gaza, permettant ainsi à tout le monde de les télécharger, de les partager, de le re-mixer, de les sous-titrer et finalement de les rediffuser, que l’on soit un particulier ou une chaîne de télévision, à la seule condition que nous soyons crédités pour la vidéo.

Embrasser la culture libre, c’est avant tout accepter que l’on renonce au contrôle en échange de quelque chose de plus grand : son appropriation par la communauté créative. Vous ne savez donc jamais vraiment où tout cela va vous mener. À l’origine, quand nous avons inauguré notre dépôt, nous pensions mettre là à disposition des ressources pertinentes pour quelqu’un désirant produire du contenu sur la guerre et qu’elles seraient principalement utilisées par d’autres chaînes d’informations et des réalisateurs de documentaires.

Le résultat fut à la fois surprenant et enthousiasmant. À peine nos vidéos furent-elles en ligne que déjà des contributeurs de Wikipédia en extrayaient des images pour compléter les articles sur le guerre de Gaza. Et rapidement, enseignants, créateurs de films, développeurs de jeux vidéos, organisations humanitaires et producteurs de clips musicaux s’inspirèrent de nos images. Cet accueil chaleureux de la communauté de la culture libre nous conforta dans notre choix.

Joichi Ito, président de Creative Commons dit au lancement : « Les séquences d’informations filmées sont l’un des pilliers du journalisme moderne. Rendre ainsi disponibles sous licence Creative Commons ces images, pour des usages amateurs et commerciaux, est une contribution fantastique au dialogue mondial autour d’évènements importants. Al Jazeera montre l’exemple et sera, nous l’espérons, imitée par beaucoup d’autres. »

Lancer un projet ne suffit pourtant pas à générer une communauté, un engagement à long terme et des valeurs communes sont nécessaires. Notre association avec Creative Commons remonte à 2007, lorsque Lawrence Lessig, fondateur des Creative Commons, a donné son discours d’introduction lors du 3ème Al Jazeera Forum à Doha, au Qatar. Dans ce discours il nous mettait au défi de libérer nos contenus afin de renforcer la liberté d’expression. Ce défi, nous l’avons relevé, en plus de notre dépôt Creative Commons, nous rendons également disponible nombre de nos reportages sur notre chaîne dédiée sur Youtube.

Après le lancement de notre dépôt, nous avons co-animé un atelier avec Creative Commons ayant pour titre « Créer des projets médias dans des réseaux ouverts », dont l’animation était assurée par le directeur de Creative Commons, Joichi Ito. Cet atelier fut diffusé en direct dans tout le Moyen-Orient dans le cadre de notre 4ème Al Jazeera Forum, qui s’est tenu en mars 2009. Cet évènement mondial a rassemblé près de deux cents journalistes, analystes, universitaires et intellectuels.

Grâce aux licences Creative Commons nous touchons un public plus large, mais la portée de notre projet est mieux résumé par ce commentaire de Lawrence Lessig : « Al Jazeera nous donne une leçon importante de promotion et de défense de la liberté d’expression. En offrant une ressource libre et gratuite au monde, le réseau encourage l’extension du débat et sa plus grande compréhension. »

La collaboration avec Creative Commons a été très enrichissante. Nous sommes reconnaissants envers Lawrence Lessig, Joi Ito et toute l’équipe qui œuvrent à la diffusion de la liberté d’expression pour leur aide, leurs conseils et leur soutien.

La collaboration involontaire qui s’est développée après que nous ayons ouvert notre dépôt de vidéos, ainsi que le bon accueil que ce dernier a reçu dans le monde entier, n’auraient pas été possible sans l’aide des licences Creative Commons. Nous apportons notre soutien à leur campagne car nous avons été témoin, et nous le sommes toujours, des bienfaits de l’enrichissement et du renforcement des communs numériques. J’espère que vous aussi, selon vos possibilités, vous apporterez votre soutien aux CC en renforçant ainsi les biens communs. Je vous conseille vivement de vous lancer et d’utiliser vous aussi les licences Creative Commons.

Sincèrement,

Mohamed Nanabhay
Directeur du développement en ligne, Al Jazeera English

Notes

[1] Crédit photo : Oso (Creative Commons By-Nc)




Qui peut fait pire que Slate.fr ? Personne !

Le titre de mon billet témoigne d’une irritation non feinte à la lecture d’un récent article paru sur le site Slate.fr : Qui fait mieux que Microsoft Office ? Personne. Si les concurrents de la suite bureautique ne percent pas, c’est parce qu’ils sont gratuits.

La thèse est donc ici toute entière résumée dans le titre.

Un premier extrait pour se mettre tout de suite dans le bain (inutile d’insister une nouvelle fois sur la différence entre logiciel libre et open source, cela ne serait pas entendu) :

Tous ces programmes, comme la plupart des logiciels gratuits, sont « open-source », c’est-à-dire que leur code-source est accessible librement, offrant ainsi la possibilité aux développeurs du monde entier de le modifier et créer eux-mêmes de nouvelles versions – bien que parmi ces logiciels libres, les plus importants sont régulièrement vérifiés, mis à jour et améliorés par des dizaines de développeurs qui travaillent dessus depuis des années.

Le mouvement open-source remonte au milieu des années 80, lorsqu’un programmeur et chercheur du nom de Richard Stallman a suggéré aux développeurs de partager leur code-source, affirmant que le modèle propriétaire « closed-source » les faisait perdre leur temps sur des problèmes déjà résolus par d’autres. Selon Stallman, donner libre accès au code-source d’un programme faciliterait grandement le développement de l’industrie logicielle.

Stallman serait ravi de l’apprendre !

La question de la vente liée et celle des formats sont évidemment totalement occultées. Quant à la liberté ainsi offerte aux utilisateurs, c’est bien simple elle n’existe pas (tout comme GNU/Linux d’ailleurs).

Qu’OpenOffice.org soit davantage dans la copie que dans l’innovation peut être un vrai débat, mais ainsi présenté et exposé ce débat n’aura pas lieu.

Deuxième extrait :

De façon ironique, si l’on observe le marché des suites bureautiques, le mouvement du logiciel libre a plutôt aidé à étendre le quasi monopole de Microsoft. Richard Stallman avait raison de penser qu’une large communauté de programmeurs travaillant à développer le logiciel open-source pouvait faire avancer la technologie de manière plus efficace, mais il n’avait pas anticipé qu’un jour, les logiciels gratuits resteraient, tout comme les logiciels payants, bloqués au niveau «pas mal».

Que la presse, traditionnelle ou en ligne, ait décrété « la guerre au gratuit », je puis l’admettre et le comprendre. Mais un tel manque de professionnalisme, beaucoup moins.

PS : Et si le caractère gratuit d’OpenOffice.org vous pose problème, vous n’avez qu’à le payer !




FramActuelle

Femme Actuelle - Logiciel Libre - Octobre 2009Le logiciel libre avance. Preuve supplémentaire, il a droit aujourd’hui à une pleine page dans le numéro 1 304 du magazine… Femme Actuelle !

L’article n’échappe à la mise en avant de la gratuité (quitte à se planter en beauté sur le choix du logiciel propriétaire Picasa de Google), mais l’essentiel est là, alors ne boudons pas notre plaisir de le trouver en si galante compagnie.

Même Framasoft est cité avec ses « mille cinq cent logiciels libres classés par thème à télécharger », incrusté à même la photo de la demoiselle au laptop (cliquer sur l’image ci-contre pour agrandir).

L’angle d’attaque est également à souligner puisqu’il évoque en creux l’épineux problème de la vente liée :

Certains des logiciels, préinstallés sur votre ordi, le sont en version de démonstration pour une durée déterminée. Ensuite il faut passer à la version payante et les télécharger. La solution : opter pour des logiciels libres, souvent plus performants et la plupart du temps disponibles gracieusement ! En voici cinq.

Outre donc l’erreur de casting Picasa, on trouve Firefox, OpenOffice.org, VLC media player et Thunderbird. Ce qui est assurément un bon choix, surtout si l’on s’adresse à des utilisatrices sous Windows ou Mac.

Je parle sous couvert des spécialistes es commentaires, mais il me semble que les descriptions des logiciels sont plutôt fidèles et pertinentes. Exemple avec OpenOffice.org :

La suite bureautique Offce de Microsoft, parfois installée en démo sur votre ordi neuf, coûte plusieurs centaines d’euros. Or le suite Open Office est, elle, entièrement gratuite. Composée des mêmes outils (traitement de texte, tableur…) elle est compatible avec Word, Excel, Powerpoint, etc. L’interface et les fonctions sont quasi-identiques à celle de Microsoft Office. De plus, OpenOffice dispose de certaines possibilités orginales et utiles, comme l’export au format PDF. Riche en fonctionnalités, cet ensemble d’applications est de plus en plus adopté par les administrations, les établissements scolaires, voire les entreprises.

Enfin il y a un encart où Tristan Nitot (qui, remarque jalouse, n’en rate décidemment pas une) nous explique le logiciel libre à l’aide des recettes de cuisine (qui, remarque sexiste, est un bon choix d’analogie ici)

Et à la question : le logiciel libre est-il toujours gratuit ? Il répond : la copie est permise et même encouragée. Excellente conclusion non hadopiquement correcte 😉




Le journal La Croix consacre un dossier au logiciel libre

Intéressante évocation du logiciel libre dans le journal La Croix du jour. D’abord parce qu’on y parle de libre dans un grand quotidien, mais aussi par le contenu des articles (pluriels, et qui forment donc un véritable dossier).

Il y a tout d’abord l’article Les logiciels libres, histoire d’un succès qui introduit le dossier.

Depuis leur apparition il y a vingt-cinq ans, les logiciels libres n’ont cessé de se développer, convainquant un large public, professionnels comme amateurs, entreprises comme administrations, de l’efficacité de leur modèle de développement.

On y parle de vente liée, de Stallman et des méthodes de travail du libre. Une large place est faite au témoignage d’Alexandre Zapolsky (président de la FniLL et de Linagora), pour qui le libre sait s’adapter aux difficultés des temps actuels.

Reste que « le libre profite de la crise », selon Alexandre Zapolsky. Jusque-là, les grands organismes ne voulaient pas prendre de risques en abandonnant le « propriétaire » au motif que, selon Loïc Rivière, « la possibilité de l’accès au code peut tenter des personnes mal intentionnées ». « Mais cette frilosité s’estompe avec les restrictions budgétaires », reprend Alexandre Zapolsky. L’argument économique n’est cependant pas la seule cause de la progression du secteur : « Nos clients veulent leur indépendance à l’égard des grands éditeurs et fournisseurs », ajoute le président de la FniLL.

J’ai noté une double citation, de l’Afdel et de NKM, qui pourrait faire l’objet d’un petit débat.

Des solutions qui coûtent souvent beaucoup moins cher que celles qui font appel à des logiciels propriétaires. « C’est moins cher à court terme, mais à long terme, les services achetés à une société du libre peuvent coûter plus cher que l’acquisition d’un logiciel propriétaire », rétorque Loïc Rivière, délégué général de l’Association française des éditeurs de logiciels (Afdel), qui veille à ce que l’État reste neutre en face du choix de solutions entre « libre » et « propriétaire ».

(…) « Ce que beaucoup redoutent, ce n’est pas forcément le libre, mais c’est la migration vers un environnement différent, analyse Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État au développement de l’économie numérique. Pour les collectivités, l’État finance beaucoup de formations aux logiciels libres en direction des élus. Mais on ne peut pas les forcer à faire le choix entre libre et propriétaire. »

L’Angleterre semble avoir fait un choix différent. Il ne s’agit pas de forcer mais d’inciter fortement pour les raisons que l’on sait (par exemple en parcourant les cinq cents articles du Framablog !).

Un deuxième article s’intitule Peaufiner les logiciels est un modèle de science participative.

Il s’agit donc de comprendre un peu mieux comment fonctionne le logiciel libre et de faire plus ample connaissance avec tous ces gens qui gravitent autour non, sans un certain enthousiasme.

Parmi eux, il y a un administrateur de Rue89, l’incontournable April et… notre ami Pierre-Yves (alias Pyg quand il est rédacteur du Framablog). Ce dernier me fait savoir dans l’oreillette que retenir ce qui suit sur près d’une heure d’entretien téléphonique avec la journaliste, c’est un peu… frustrant ! (d’autant qu’il lui arrive d’être barbu et de manger des pizzas à 3 heures du mat’).

« Nous ne sommes pas des utopistes barbus qui mangent de la pizza à 3 heures du matin. » Pierre-Yves Gosset, délégué général de l’association Framasoft, s’élève contre les clichés qui frappent les développeurs de logiciels libres. « Les gens pensent toujours que c’est un sujet technique seulement maîtrisé par les informaticiens », déplore-t-il.

Lancé par des spécialistes en informatique, le mouvement du « libre » rassemble aujourd’hui des profils très divers, techniciens comme profanes. Framasoft structure un réseau de sites Internet et met à la disposition du public des ressources sur les logiciels libres.

Avec une volonté participative : ce sont les utilisateurs de logiciels eux-mêmes qui rédigent leur présentation, enrichissent l’annuaire, traduisent des textes pour les mettre à la portée de tous. « Nous encourageons les utilisateurs à s’entraider et à publier de l’information, c’est une sorte de “Wikipedia du libre” », précise Pierre-Yves Gosset.

(…) À distance, un échange se crée entre développeurs professionnels, traducteurs bénévoles, utilisateurs vigilants. Leur passion commune permet d’améliorer sans cesse les logiciels existants, ou d’en créer de nouveaux. « Le public est très varié, confirme Pierre-Yves Gosset. Il y a des médecins, des plombiers, des couturières. Chacun peut devenir producteur et créateur. »

Quand je pense qu’il ne m’a jamais présenté la couturière ! Bref passons…

Par contraste, « l’enfermement du savoir » est le principal reproche adressé aux logiciels propriétaires. « Le logiciel est l’expression technique d’une idée, affirme Pierre-Yves Gosset. C’est un enjeu éthique : est-ce que le marché peut s’approprier quelque chose qui relève du bien commun ? »

(…) Les acteurs du libre refusent néanmoins qu’on leur prête des intentions idéologiques. Bill Gates, le richissime fondateur de Microsoft, les surnomme « les communistes d’un nouveau genre ». Ils admettent en revanche défendre une vision « citoyenne ». Pierre-Yves Gosset résume les valeurs du « libre » par une devise bien connue : « Liberté, égalité, fraternité. »

Fallait bien la placer quelque part la devise 😉

Un troisième article se demande si Le logiciel libre paraît-il utopique ? dans une sorte de dialogue entre NKM et François Elie (cf la récente interview).

L’avis de NKM sur le sujet laisse à penser qu’elle a bien compris le logiciel libre et ses enjeux. De quoi être malgré tout un peu optimiste pour la période gouvernementale post-Hadopi ?

« Le logiciel libre est d’abord une philosophie, avant d’être un standard ou un modèle économique. Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est une religion, bien que l’on parle des commandements du logiciel libre !

(…) Le modèle de financement du libre est cependant plus fragile que celui du logiciel dit propriétaire. Les éditeurs de logiciels disposent de la rente annuelle de licences. Dans le libre, il faut sans cesse inventer et améliorer des produits pour pouvoir survivre. L’avantage du libre est son caractère innovant.

(…) Le libre est un peu l’anti-trust d’un secteur facilement monopolistique. Du coup, la philosophie du libre s’étend et un équilibre dynamique s’installe entre “libre” et “propriétaire” avec des mouvements de vague tantôt dans un sens tantôt dans l’autre. Je ne crois donc pas que cette évolution aboutisse à la disparition du propriétaire. »

C’est pourtant ce que prophétise peu ou prou François Elie dans son livre Économie du logiciel libre.

Il n’y a pas de fatalité à ce que ce logiciel soit propriétaire. Toute l’informatique est en train de basculer vers un autre modèle. Même Microsoft songe à basculer vers le libre. »

Il y a également un petit Lexique sur les logiciels libres expliquant le logiciel libre, l’open source, le logiciel propriétaire, et la licence GPL.

D’habitude lorsque le Framablog pointe un article de presse autour du logiciel libre, il y a toujours de « gentils pinailleurs » prêts à dégainer dans les commentaires pour en souligner les inexactitudes (sachant qu’il n’est pas toujours simple de vulgariser le logiciel libre, sachant aussi que ces précisions apportent de l’information aux lecteurs du blog).

En ira-t-il de même ici ? Vous le saurez en parcourant… les commentaires 😉




Le campus, c’est la ville !

À lire le récent article (un brin optimiste) du Monde, Le Japon à l’heure du savoir partagé, on se dit que si le logiciel libre était une université il pourrait être celle de Shibuya, du nom d’un quartier très mode de Tokyo.

Extraits :

A l’Université de Shibuya, en revanche, les cours sont gratuits. Cet « établissement » né en septembre 2006 dissimule un concept nouveau dans l’Archipel. « C’est un moyen d’apprendre ancré dans la communauté et l’environnement local », explique son président, Yasuaki Sakyo, 29 ans. Il ne s’agit plus de transmettre un savoir, mais « de le partager ». L’université formée sous le statut d’organisation à but non lucratif n’a pas de locaux : « Le campus, c’est la ville. »

Accessible sans concours d’entrée, elle n’accorde pas de diplôme mais elle « met en relation ». Elle contacte des personnes qui vivent ou travaillent à Shibuya, quartier vibrionnant de Tokyo où se côtoient différents univers, de la mode au design, voire l’édition. Elle les invite à partager leur passion ou leur savoir. Puis elle trouve un café, un gymnase, une école, un magasin, un parc… et annonce le cours sur son site.

(…) « Nous ne faisons pas de publicité », explique Yasuaki Sakyo. L’information est juste reprise par les médias locaux, telle la radio J-wave. Elle circule entre amis ou sur les sites communautaires.

(…) Ainsi Yuuka Nishida, une vingtaine d’années, employée du site Internet Seesaa, fréquente l’université depuis septembre 2007. « J’ai commencé par un cours sur la politique. Je viens tous les deux ou trois mois. » Elle se dit séduite par la possibilité de se faire des amis. « Le staff a le même âge que moi. L’atmosphère est sympa. J’en parle à mes proches. »

Akane Ishikawa, elle, apprécie la gratuité et l’ouverture à tous. Dans une mégapole anonyme comme Tokyo, l’université de Shibuya offre un lieu de rencontres et d’épanouissement culturel tout en permettant à des jeunes de s’impliquer dans une activité bénévole.

Que ceci ne nous fasse pas oublier que nous avons nos universités populaires, réseaux d’échanges réciproques de savoirs, et autres café-philos, mais voici un témoignage de plus de la volonté d’interagir autrement, avec en toile de fond les nouvelles technologies comme facteur et facilitateur de communication et de mise en relation.




3 000 jours de retard pour Hadopi

Inocuo - CC byIl y a une semaine, Sylvain Zimmer, l’un des fondateurs de la plate-forme de musique « libre, légale et illimitée » Jamendo, faisait paraître un intéressant article témoignage dans la presse (en l’occurrence Le Monde), que nous avons choisi de reproduire ici avec son autorisation (oui, je sais, c’est sous licence Creative Commons, donc il n’y a pas besoin d’autorisation, mais rien n’empêche l’élégance et la courtoisie).

3 000 jours de retard, ça nous ramène directement à l’époque de l’apogée de Napster, où il n’était quand même pas si compliqué de comprendre que nous étions à l’aube de grands bouleversements[1] dans le monde musical…

3 000 jours de retard pour HADOPI

Sylvain Zimmer – 12 avril 2009 – Jamendo
Paru initialement dans le supplément TV du Monde
Licence Creative Commons By-Sa

Pour comprendre pour quel Internet a été pensée la loi Hadopi, il faut revenir seulement 3 000 jours en arrière. Un disque dur de 15 Go coûtait 100 euros. Les réseaux peer-to-peer n’étaient pas encore cryptés, on pouvait rêver de les contrôler un jour. Je n’avais que 16 ans à l’époque, mais je me souviens encore du peu de gens dans la rue qui portaient des écouteurs. Forcément, l’iPod n’existait pas. Wikipédia, Facebook et YouTube non plus. Trois des sept sites les plus fréquentés aujourd’hui, tous gratuits.

Que s’est-il passé entre-temps qui a manifestement échappé aux douze députés ayant voté pour la loi Hadopi ? L’innovation. Des géants sont nés dans les garages de quelques auto-entrepreneurs et ont révolutionné l’accès à la culture en la rendant gratuite pour tous. On peut les accuser d’avoir fait chuter les ventes de CD, mais déjà à 16 ans je savais que je n’en achèterai aucun de ma vie. Cela ne m’a pas empêché de dépenser plus de 8 000 euros, depuis, en places de concert. Le marché de la musique se transforme, mais globalement ne cesse de grossir. Nous passons d’une économie de stock où le mélomane était limité par son budget CD à une économie de flux où la valeur ne se situe plus dans la musique elle-même (car elle est numérique, donc illimitée, donc gratuite), mais dans ce qu’elle représente : la relation entre un artiste et ses fans.

En 2008, la meilleure vente de musique en ligne sur Amazon a été un album de Nine Inch Nails, un groupe qui distribue pourtant sa musique gratuitement et légalement par ailleurs. Qu’ont donc acheté ces gens ? Certainement pas la musique elle-même. Comme les millions d’autres qui l’ont écoutée gratuitement, ils sont devenus fans, l’ont « streamée », partagée sur Facebook ou ailleurs, l’ont recommandée à leurs amis qui, à leur tour, ont acheté places de concert, coffrets collectors et autres produits ou services dérivés.

Tous les jours, des milliers d’artistes comprennent ce qu’ils ont à gagner dans la diffusion gratuite. La fidélité accrue de leurs fans crée de la valeur. Soyons cyniques : peut-être que la loi Hadopi servira à accélérer cette transformation de l’économie culturelle, cette éducation des artistes au monde numérique. Quand arriveront les premières lettres recommandées, les premières coupures d’Internet, quel cadeau pour le gratuit et légal ! Quelle remise en question pour l’artiste constatant que ses fans, punis, n’ont plus accès à Wikipédia !

Plus concrètement, comme les lois LCEN et DADVSI qui l’ont précédée, on se souviendra (ou pas) d’Hadopi comme d’une loi inapplicable dès son premier jour, imaginée pour une économie et des technologies déjà dépassées. Un gaspillage de temps et d’argent que le gouvernement aurait certainement mieux fait de consacrer à des lois plus pertinentes en faveur de l’environnement ou des auto-entrepreneurs. Car ce sont eux qui aujourd’hui innovent et préparent ce que sera Internet dans 3 000 jours. Quand l’industrie musicale existera toujours, mais ne vendra plus de disques. Quand télécharger un film prendra moins d’une seconde. Quand 200 ans de musique tiendront dans la poche. Quand une nouvelle génération d’artistes n’aura ni e-mail ni ADSL, mais un compte Facebook et une connexion Internet sans fil permanente. C’est pour ce siècle-là, pas pour le précédent, que nous devons penser la culture.

Notes

[1] Crédit photo : Inocuo (Creative Commons By)




Combien d’écoles Jean-Macé en France ?

Tinou Bao - CC byLe titre de ce billet fait naturellement écho à Combien de lycées Sud Médoc en France ? où nous feignions d’interroger la situation française alors qu’il ne s’agissait que de mettre en valeur une remarquable initiative locale, fort justement relayée par la presse.

Il en va de même ici, non plus dans le secondaire mais dans le primaire, à l’école Jean-Macé d’Hazebrouck[1].

Cette école ne disposait pas de salle informatique. Lacune aujourd’hui comblée avec une quinzaine de postes qui, depuis décembre, tournent sous le système d’exploitation GNU/Linux.

C’est déjà remarquable en soi mais ce qui l’est peut-être tout autant voire plus, c’est d’avoir fait constater par l’autorité de tutelle, à savoir ici l’Inspection académique, que « l’absence Microsoft » ne pénalise nullement les usages pédagogiques et l’obtention du B2i, bien au contraire.

Un événement rapporté comme il se doit par les journaux locaux (voir ci-dessous), et le moins que l’on puisse dire c’est que cela fait plaisir à lire.

Source de l’information sur le site de l’école

Du matériel informatique neuf et innovant à l’école Jean-Macé

Image scannée de l'article de la Voix du Nord6 avril 2009 – La Voix du Nord

Mardi après-midi, deux conseillers en technologies de l’information et de la communication (TICE) sont venus s’enquérir du bon fonctionnement de la salle informatique de l’école Jean-Macé. Un site précurseur en la matière.

La municipalité a décidé de restaurer le parc informatique des écoles de la commune. Première à bénéficier de cette politique, l’école Jean-Macé fait figure de site pilote. En effet, son nouveau matériel, quinze unités centrales, fonctionne avec un système d’exploitation libre.

Des utilisateurs conquis

« L’intérêt de notre visite, c’est de vérifier que tout se déroule correctement et que l’utilisation d’un système d’exploitation libre est pertinente pour la délivrance du B2I, Brevet informatique et Internet, aux enfants de CM 2 », explique Thierry Heuguebart, conseiller en TICE pour le secteur d’Hazebrouck, venu, mardi, accompagné de Luc Simon, son homologue pour l’inspection académique du Nord.

Le moins que l’on puisse dire est que tous les utilisateurs sont conquis. Enseignants et élèves n’ont eu aucun mal à s’adapter au nouveau logiciel qui permet de sortir de la logique Windows.

Le directeur de l’établissement, Stéphane Olivier, ne cache pas lui non plus sa satisfaction devant l’investissement municipal. « Désormais, chaque élève dispose du même équipement. Avant, tout était dépareillé. Nous n’avons plus de bug et, grâce au serveur, nous sommes tous en ligne », s’enthousiasme-t-il.

Les écoliers expérimentent le logiciel libre

Image scannée de l'article de l'Indicateur des FlandresA. R.-M. – 9 avril 2009 – L’Indicateur des Flandres

Avec quinze ordinateurs neufs, élèves et enseignants de l’école Jean-Macé ont de quoi se réjouir. La municipalité d’Hazebrouck a décidé, sous la responsabilité de l’adjoint aux Affaires scolaires, Michel Labitte, de renouveler chaque année le parc informatique d’une école.

Cette politique volontariste en terme d’informatique ne s’arrête pas là puisque depuis le mois de décembre, les écoliers travaillent sous Linux, un système d’exploitation libre et donc gratuit, dans le cadre d’une expérimentation autorisée par l’Éducation nationale. Ce test a des répercussions économiques : la municipalité de devra plus payer le système Microsoft, ni acheter ses logiciels.

Ce qui intéressent davantage élus, enseignants et représentants de l’Inspection académique, qui étaient en visite mardi 31 mars à l’école Jean-Macé, c’est l’aspect d’ouverture d’esprit. Professeurs comme élèves découvrent qu’il existe d’autres systèmes d’exploitation que celui lancé par l’américain Bill Gates, Microsoft, devenu incontournable puisqu’il est vendu avec chaque ordinateur neuf. Cela pourrait bien changer car la commission européenne s’inquiète de ce monopole.

Dans les faits, les enfants ne se rendent pas compte de la différence. Ils viennent dans cette salle informatique pour acquérir des connaissances en français ou encore en mathématiques, avec une certaine autonomie, tout en s’initiant aux nouvelles technologies dans le cadre du B2i. Quant aux professeurs, ils ont tous reçu une formation dispensée par Thierry Heuguebart, conseiller pédagogique TIC (technologies de l’information et de la communication) dans la circonscription d’Hazebrouck.

Le directeur, Stéphane Olivier, confirme : « Le changement de logiciel s’est fait sans problème ». L’expérience semble donc concluante. La municipalité devrait poursuivre dans cette voie, tout comme l’Éducation nationale. Autre avantage non négligeable de l’expérience : le responsable informatique de la mairie, Grégory Houte, n’est plus dérangé fréquemment à cause de problèmes techniques. Quand un ordinateur ne répond plus, le serveur le réinitialise et l’enfant peut reprendre son travail.

Notes

[1] Crédit photo : Tinou Bao (Creative Commons By)




Combien de lycées Sud Médoc en France ?

Mr. Theklan - CC by-saLe lycée Sud Médoc de Bordeaux propose à ses élèves un atelier Cinéma, un atelier Théâtre et un atelier… « Informatique et Logiciels Libres » !

Il ne s’agit pas d’un atelier informatique où figureraient, entre autres, les logiciels libres, c’est directement dans le titre et révèle l’importance qu’on souhaite leur accorder.

La présentation en est fort intéressante et a valeur d’exemple aussi bien au niveau du contenu que dans la volonté de nouer des partenariats dynamiques et pertinents avec le monde extérieur.

Il s’agit en effet de découvrir et promouvoir les plate-formes d’exploitation et les logciels libres, de s’initier à la programmation sous Linux et à la DAO grâce à des outils comme GIMP, Inkscape et Blender. Parmi les partenaires, on trouve l’ENSEIRB de Talence dont les étudiants viennent le samedi matin pour enseigner aux élèves du club la programmation en C et C++, la Cyber-base de Saint-Médard en Jalles pour la DAO, ainsi que la célèbre association ABUL (les créateurs des RMLL !) et Médias-Cité (les créateurs d’Expo Libre !).

Par ailleurs des événements sont organisés. Les élèves du club s’en vont ainsi dans les classes présenter les logiciels libres auprès de leurs camarades de Seconde. Et, avec l’aimable autorisation de Monsieur le proviseur, des conférences associées à des install-parties sont mises en place.

Enfin voici ce qu’il est explicitement précisé :

Les élèves du club fonctionnent sur le mode du tutorat et selon les principes des logiciels libres : « Si tu ne sais pas demandes, si tu sais tu partages ». La mutualisation des savoirs est à l’origine des logiciels libres et c’est une règle de conduite dans ce club.

Si un élève[1] inscrit à cet atelier passe pas ici, qu’il n’hésite surtout pas à apporter son témoignage !

Tous les acteurs impliqués dans le projet méritent à n’en pas douter d’avoir connu aujourd’hui les honneurs d’un encart dans la Grande Presse, en l’occurrence le journal Sud Ouest, que nous nous sommes permis de reproduire ci-dessous.

On notera que le conférence du jour place les logiciels libres au niveau des enjeux de société. Si ça n’est pas encore une bonne idée ça…

On n’est pas là pour distribuer des bons points mais nous tirons notre chapeau à cette emblématique initiative locale. Bravo, merci, et comme ne dirait pas Chrisitine Albanel, nous vous souhaitons de faire des eMules 😉

Edit : On pourra lire aussi l’article parallèle Combien d’écoles Jean-Macé en France ?

Le lycée Sud-Médoc fait la part belle aux logiciels libres

URL d’origine du document

18 avril 2009 – SudOuest.com

INFORMATIQUE. L’intérêt des élèves pour l’univers de Linux et de la programmation, encouragé par l’établissement, ne se dément pas

Le lycée Sud-Médoc a organisé dernièrement sa demi-journée annuelle sur les logiciels libres. Ces logiciels sont gratuites. L’expression « logiciel libre » fait référence à la liberté pour les utilisateurs d’exécuter, de copier, de distribuer, d’étudier, de modifier et d’améliorer le logiciel.

La manifestation s’organisait autour d’une conférence de Jean Perrochaud, sur le thème : « Les logiciels libres : quels enjeux de société ? », au nom de l’Association bordelaise des utilisateurs de logiciels libres.

Partenariat avec l’Enseirb

En parallèle, des animations étaient organisées : présentation de film d’animation par Joël Houdin de Cyberbase, install-party (installation de systèmes d’exploitation Linux sur les ordinateurs) et lan-party (jeux en réseaux, toujours des jeux libres et gratuits) proposés par les élèves de l’Atelier logiciels libres et programmation du lycée Sud-Médoc et deux « anciens » actuellement dans l’enseignement supérieur.

Médias-cité avait prêté un matériel important. Il y eut un moment fort avec la signature confirmant officiellement le partenariat avec l’Enseirb de Talence par son directeur et par M. Bellicchi, proviseur du lycée Sud-Médoc.

En effet, les étudiants viennent pour la 5e année consécutive le samedi matin au lycée pour un tutorat en programmation au profit de des élèves de l’Atelier. Ces derniers ont toujours été soutenus dans cette activité par le proviseur de l’établissement, qui obtient en retour des résultats très encourageants et une réelle gratitude de la part des élèves.

Notes

[1] Crédit photo : Mr Theklan (Creative Commons By-Sa)