Humains après tout

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S’il y a une expression dont le marketing nous rebat les oreilles, depuis pas mal de temps, c’est bien « intelligence artificielle ». S’il est important de rappeler avant tout qu’un ordinateur de 2019 ou de 1970 reste invariablement aussi con, il est aussi intéressant de suivre ce qui se passe en coulisses, quand on gratte le vernis marketing.

Humains après tout

S’il y a une expression dont le marketing nous rebat les oreilles, depuis pas mal de temps, c’est bien « intelligence artificielle ». S’il est important de rappeler avant tout qu’un ordinateur de 2019 ou de 1970 reste invariablement aussi con, il est aussi intéressant de suivre ce qui se passe en coulisse, quand on gratte le vernis marketing.

Humains après tout

Nous sommes à l’ère de l’intelligence artificielle ! Hourra ! Alléluia !

Deux anges volent dans le ciel. Le premier dit : « Atchik atchik atchik ?! » Le deuxième répond : « A.I. ! A.I. !  A.I. ! » Le smiley commente : « La vache, je sais pas ce qu'ils fument au service marketing, mais j'en veux. »

Bon, dans les faits, c’est moins glamour.

Déjà, « intelligence artificielle » est un terme marketing qui a tendance à vouloir dire tout et n’importe quoi. C’est ce qui fait que les spécialistes l’évitent, en général, préférant des termes plus précis comme apprentissage automatique.

Une scientifique montre des graphes au tableau en commentant : « Et donc, en injectant une dose d'aléatoire dans la génération des arbres de décision, on peut créer une forêt aléatoire – random forest, en anglais – moins sujette à la surinterprétation – ou overfitting – qui peut être entraînée avec une base d'apprentissage suffisamment représentative pour… » Gee dit : « Ouais, c'est vachement moins vendeur, dit comme ça… »

Mais surtout, on se rend compte que, au-delà des théories scientifiques – assez balaises et fort intéressantes au demeurant – et derrière le vernis de ce qui est effectivement vendu comme « intelligence artificielle », on aura souvent du mal à trouver toute trace d’intelligence ou d’artificialité.

Le petit robot de l'informatique demande : « Tu vas encore me traiter de con ? » Gee répond : « Pire : d'humain ! »

Parlons par exemple des Kiwibots, de petits robots-livreurs autonomes lancés sur le campus de Berkeley, en Californie, et qui apportent directement la (mal)bouffe aux étudiants et étudiantes.

Un petit robot-livreur arrive à côté d'un étudiant derrière son ordinateur, et demande : « Voulez-vous un peu de sauce cholestérol sur votre McDiabète ? » Le smiley commente : « Ils l'ont appelé “kiwi” pour que ce soit considéré comme un des 5 fruits et légumes par jour pour les étatsuniens… »

Autonome ?

Pas vraiment…

En réalité, ces robots sont tout simplement pilotés par des humains à distance, comme des drones.

Deux conducteurs de drône derrière leurs bureaux discutent. Le premier : « Tu fais quoi, John ? » L'autre : « Je livre du sucre trempé dans du gras à une concitoyenne.  Et toi, Jack ? » Le premier : « J'assassine une famille de Syriens.  On va prendre un café après ? » Le smiley commente, blasé : « Quel beau pays. »

Vous allez me dire : mais Gee, du coup, s’il faut un être humain derrière chaque robot, quel intérêt par rapport à un livreur en chair et en os ?

Gee répond, pas content : « L'intérêt ? Le livreur n'a pas besoin d'être dans le pays et peut donc être payé des clopinettes selon le code du travail de son pays.  Dans le cas de Kiwibot, les conducteurs sont colombiens, payés 2 dollars de l'heure.  Elle est pas belle, la vie ? » Deux américains dansent en buvant du champagne, entourés de billets qui tombent du ciel : « WE FUCK THE WOOORLD !  WE FUUCK THE CHIIILDREEEN !  WE FUCK THE WORLD, THE FOREST AND THE SEA, SO LET US DOIIINNG… »

Quand la soi-disant intelligence artificielle permet de consolider la bonne vieille saloperie capitaliste bien humaine…

Côté GAFAM, on n’est pas en reste, puisque par exemple, l’assistant connecté de Microsoft, Cortana, envoie certains enregistrements… à des équipes de prestataires chargés de les transcrire à la main et de les classifier pour améliorer le traitement automatique qui est fait par le logiciel.

Gee, faussement surpris : « Vous voulez dire que le micro que vous avez implanté chez vous volontairement est utilisé POUR VOUS ÉCOUTER ?!  Mon Dieu, mais qui aurait pu le voir venir ? » La Geekette, blasé : « Ça va, ça fait 3 BD que tu nous le fais, ton couplet sur les enceintes connectées qui espionnent les gens par design… » Gee : « Ouais bah tant qu'il y aura des gogos pour acheter ces daubes, je continuerai. »

Bien sûr, les prestataires en question sont aussi sous-payés, car la promesse de l’intelligence artificielle étant de faire des économies, il faut bien rentabiliser les coûts de R&D et de production quelque part…

Deux personnages dans un centre de contrôle discutent. Le premier, un homme : « Roh non, la meuf que j'écoute est encore en train de chialer chez son psy, elle me gonfle avec ses problèmes familiaux ! J'aurais mieux fait d'aller me faire exploiter chez McDo… » La seconde, une femme : « Moi, le mien, il a encore cherché un mot-clef porno que je connaissais pas…  et que je voulais pas connaître, pour être honnête.  Je suis morte à l'intérieur. »

Ce n’est pas beaucoup plus brillant du côté des autres GAFAM : l’intégralité des enceintes connectées sur le marché ont été épinglées pour avoir été utilisées afin d’écouter les utilisateurs à leur insu.

Oui oui, même Apple, qui se targue pourtant de respecter la vie privée de ses clients, a fait écouter jusqu’à 1000 enregistrements Siri par jour par des prestataires externes.

Une affiche « Apple, Spy Different™ » avec un cadre d'Apple qui commente : « Rooh, mais voyons, c'est pas de l'espionnage, c'est de l'iListening™ ! » La Geekette : « C'est quoi, la différence ? » Le cadre : « C'est plus cher. »

Face au scandale, chacun des GAFAM a déclaré arrêter « temporairement » les écoutes, grands princes…

Notez pourtant que des solutions existent pour arrêter « définitivement » les écoutes.

Un mec lambda s'exclame, tout content : « J'ai un brouilleur qui empêche mon assistant vocal de reconnaître ma voix quand je ne m'en sers pas. Seulement 99 euros sur Amazon ! » Gee, qui vient de défoncer une enceinte, répond en rigolant : « J'ai une hache. 19,90 euros chez Leroy Merlin.  Ça marche mieux. » Note : BD sous licence CC BY SA (grisebouille.net), dessinée le 1er septembre 2019 par Gee.

Sources :

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)

Suivre Gee:

Gribouilleur, scribouillard, docteur en informatique (généraliste conventionné secteur 42), anar, irréaliste & irresponsable, compagnon de route de Framasoft.

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8 Responses

  1. jotux

    Super sympa ! Merci 😉
    Plein de sarcasme, comme je l’aime 😀
    Ah le marketing…

  2. Martin

    Il y a une faute dans une bulle BD « Que vous implantEZ » au moment des GAFAMs

  3. Cleverbot

    Tu nous apprends rien là. Tu ne parle que d’un aspect de « l’apprentissage automatique ». En fait tu ne parles que de ça !

    Qu’en est-il de alphazero par exemple?

    • Chaddaï

      AlphaZero est aussi de l’apprentissage automatique, même s’il est plutôt balaise.
      Le principal avantage d’AlphaZero par rapport à un réseau neuronal qui apprend à reconnaître des oiseaux c’est que pour enrichir la base de connaissance et affiner l’apprentissage, il n’a pas besoin d’aide humaine parce qu’AlphaZero peut jouer contre lui-même (légèrement « muté ») et s’améliorer ainsi à grande vitesse (comme la source d’apprentissage est elle-même automatique, on peut juste mettre de plus en plus de ressource de calcul derrière les diverses instances d’AlphaZero pour qu’ils jouent plus de parties plus vite et ainsi s’améliorent rapidement).

      Bien sûr la limite c’est qu’on ne peut faire ça pour l’instant que pour des jeux aux règles strictement établies et fixées. Le frein au développement de la plupart des processus d’apprentissage automatique reste la qualité et la quantité de la base de connaissance et c’est bien pour cela que les GAFAM mettent l’accent sur le Big Data et essaie d’exploiter un maximum une main d’œuvre non salarié : leurs clients.

  4. bobo38

    MERCI ! Je me suis bien marré, ça fait du bien. Bravo pour arriver à traiter ces sujets avec autant d’humour