Politique et Logiciel Libre : Europe Écologie loin devant tous les autres ?

Le 15 juin 2009 Daniel Cohn-Bendit publiait une tribune dans Le Monde au titre étonnant : Faisons passer la politique du système propriétaire à celui du logiciel libre.

Il récidive aujourd’hui dans Libération en profitant du clin d’œil historique que lui offre la date du 22 mars, pour lancer un nouvel appel au lendemain des élections régionales : Changer la politique pour changer de politique.

Extraits :

Le mouvement politique que nous devons construire ne peut s’apparenter à un parti traditionnel. Les enjeux du 21e siècle appellent à une métamorphose, à un réagencement de la forme même du politique. La démocratie exige une organisation qui respecte la pluralité et la singularité de ses composantes. Une biodiversité sociale et culturelle, directement animée par la vitalité de ses expériences et de ses idées. Nous avons besoin d’un mode d’organisation politique qui pense et mène la transformation sociale, en phase avec la société de la connaissance.

J’imagine une organisation pollinisatrice, qui butine les idées, les transporte et féconde d’autres parties du corps social avec ces idées. En pratique, la politique actuelle a exproprié les citoyens en les dépossédant de la Cité, au nom du rationalisme technocratique ou de l’émotion populiste. Il est nécessaire de « repolitiser » la société civile en même temps que de « civiliser » la société politique et faire passer la politique du système propriétaire à celui du logiciel libre.

(…) Ni parti-machine, ni parti-entreprise, je préférerais que nous inventions ensemble une « Coopérative politique » – c’est à dire une structure capable de produire du sens et de transmettre du sens politique et des décisions stratégiques. J’y vois le moyen de garantir à chacun la propriété commune du mouvement et la mutualisation de ses bénéfices politiques, le moyen de redonner du sens à l’engagement et à la réflexion politique.

(…) Encore une fois, l’important est moins d’où nous venons, mais où nous voulons aller, ensemble. C’est l’esprit même du rassemblement qui a fait notre force, cette volonté de construire un bien commun alternatif.

Ajoutez à cela le fait que parmi les signataires du Pacte du logiciel libre de l’April, près de la moitié sont d’Europe Écologie, dont on notera l’existence des groupes Culture et logiciels libres et Accès aux Savoirs / Propriété Intellectuelle, et vous obtenez selon moi un mouvement politique loin devant tous les autres en France actuellement pour ce qui concerne le logiciel libre et sa culture.

Tellement loin qu’à mon humble avis il « tue dans l’œuf » l’émergence d’un Parti Pirate national. Et pour appuyer mes dires, je vous propose reproduit ci-dessous un article fort intéressant issu justement du site d’Europe Écologie.

Et je le reproduis d’autant plus facilement que l’ensemble du site est sous licence libre Creative Commons By-Sa !

Je précise que je ne suis pas d’Europe Écologie (ni d’un autre parti d’ailleurs) et que je ne demande qu’à être contredit dans les commentaires 😉

De la propriété intellectuelle vers l’accès aux savoirs

URL d’origine du document

Gaelle Krikorian – 5 novembre 2009 – Europe Écologie

Quel est le point commun entre un réseau de malades du sida thaïlandais, des militants pour la réduction des émissions polluantes suédois, des mobilisations d’internautes en France, des manifestations de fermiers indiens, d’associations de mal-voyants américains, de producteurs de coton kenyans, ou l’appel d’un philosophe argentin poursuivit en justice. Tous sont parties prenantes d’au moins un des conflits qui ont émergé depuis une dizaine d’années et mettent en question le système actuel de protection de la propriété intellectuelle.

La question de l’accès aux médicaments génériques dans les pays en développement a sans doute été l’une des revendications les plus visibles tant auprès du grand public que dans les sphères politiques. Elle a donné lieu à une forte mobilisation internationale. Mais en dépit d’avancées symboliques dans le cadre de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), les malades des pays en développement restent globalement écartés de l’accès aux médicaments contre nombre de maladies, infectieuses (sida, hépatites, etc.) ou non-infectieuses (cancer, maladies cardio-vasculaire, etc.).

Parallèlement à ces inégalités d’accès, il est devenu de plus en plus évident que le bénéfice social escompté de l’application de la protection de la propriété intellectuelle –constituer une incitation et un moteur à la recherche médicale– était de moins en moins garanti. Dans le même temps, le cloisonnement de la connaissance par l’instauration de monopoles et la culture du secret, la restriction de ce qui appartient au domaine public ou relève d’un savoir commun, la limitation ou la disparition des exceptions qui permettent de faire prévaloir le droit des individus ou l’intérêt des sociétés, entravent la recherche et à l’innovation. Concrètement, les innovations réelles se font de plus en plus rares et de vastes domaines de recherche sont ignorés parce qu’ils n’ouvrent pas sur des opportunités financières jugées suffisantes. Ces échecs motivent débats et réflexions (par exemple au sein de l’OMS, de l’OMPI ou de différents Parlements) afin de permettre, grâce à divers mécanismes (la création de prix à l’innovation, de fonds internationaux, de traités internationaux pour la recherche, etc.), le financement d’une recherche adaptée aux besoins des différentes populations (du Nord et du Sud) sans compromettre l’accès de ses fruits au plus grand nombre.

En termes d’accès, ce qui vaut pour les médicaments s’applique à toutes sortes d’autres produits de la connaissance : logiciels, bases de données, musiques, films, livres (et notamment l’édition scolaire). L’accès à un libre flux d’idées ou d’informations est essentiel au développement de n’importe quel pays. Or, l’inégalité d’accès à l’éducation, aux connaissances et aux technologies est une réalité qui s’exacerbe avec l’accroissement des inégalités sociales dans le monde. Elle compromet la participation des populations à la production de savoirs nouveaux et donc exclut et entretient l’exclusion d’une partie importante de la population mondiale de la « société de l’information».

Dans le domaine du logiciel, la protection de la propriété intellectuelle qu’elle soit opérée par le biais d’outils juridiques ou de moyens techniques tend à interdire la reproduction, et par extension refreine la création en limitant les usages et les échanges. Alors que le logiciel n’entre en principe pas dans le champ du droit du brevet en Europe, l’Office européen accorde des brevets pour des logiciels. Ainsi, la même dynamique que dans la recherche médicale se met en place. Contrevenant aux principes de non exclusion et de non appropriation, qui caractérise les biens immatériels, les systèmes de protection en place favorisent les comportements opportunistes d’appropriation à des fins privées qui peuvent affecter la création, le développement et la diffusion d’un produit ou d’un service donné.

Ces réflexions émergent actuellement à propos de la lutte contre le changement climatique. À l’instar de la nécessité de développer des technologies moins polluantes ou non polluantes, le transfert de technologie est indispensable pour que les pays en développement puissent mettre en place des politiques industrielles, énergétiques et agricoles qui limitent la croissance de leurs émissions, puis la réduise. L’UNFCCC et le Protocole de Kyoto encouragent le transfert de technologie, comme avant eux les accords de l’OMC et de nombreux traités internationaux. Dans les faits pourtant, qu’il s’agisse de technologies non polluantes ou de technologies d’une toute autre nature, les transferts de technologies sont extrêmement limités entre pays industrialisés et pays en développement, et la propriété intellectuelle représente souvent un véritable obstacle. C’est pourquoi, dans le cadre des négociations pour le traité de Copenhague, les pays en développement revendiquent notamment l’application du droit à suspendre la propriété intellectuelle lorsque cela est nécessaire.

Le système actuel de propriété intellectuelle entraîne et entretient ainsi des discriminations fortes entre pays, entre classes d’individus, ou entre individus. Certaines populations, comme les aveugles et mal-voyants, sont en raison de handicaps particuliers plus exposées aux inégalités que crée le système de protection de la propriété intellectuelle. Dans le même temps, ces situations particulières soulèvent des problèmes ou dysfonctionnements qui concernent également d’autres catégories de populations.

Les discriminations produites par le système de propriété intellectuelle touchent d’autant plus de monde que le champs de ce qui est concerné par la propriété intellectuelle s’étend ––au vivant par exemple. En Inde, comme dans un certain nombre de pays en développement, des agriculteurs se sont mobilisés contre les droits privés sur les semences et le vivant en général et contre la biopiraterie qui permettent à une dizaine de firmes multinationales (comme Monsanto, Syngenta, Bayer and Dow Chemical) de devenir progressivement propriétaire de la biodiversité pourtant nécessaire à la sécurité alimentaire des populations des pays en développement.


Le terme de propriété intellectuelle a été créé et son utilisation s’est répandue à partir du milieu des années 1960. Il suggère une analogie avec la propriété physique qui a progressivement conduit le législateur à aborder brevets, marques et droits d’auteur comme s’il s’agissait d’objets physiques. Réussir à imposer ce terme a signé le succès de l’offensive stratégique menée par les détenteurs de droits – industries pharmaceutiques, industries du divertissement et de la culture. La construction même du terme est en soit une entreprise idéologique favorisant le renforcement des droits de certains ou de certains types de droits. Il s’agit tout à la fois d’élargir le champ de ce que l’on protège, en rognant de plus en plus sur le domaine public, d’allonger la durée des protections tout en inventant de nouvelles formes de monopoles (exclusivité des données, etc.).

Le mouvement lancé par les détenteurs de droits exclusifs depuis la fin des années 1970 n’a eu de cesse de complexifier un système qui se montre à la fois de plus en plus englobant et de plus en plus rigide. La stratégie menée conjointement par les pouvoirs publics et les détenteurs de droits est globalement, à l’image de la nouvelle loi Hadopi en France, de renforcer l’arsenal juridique tout en développant la répression des comportements. La répression du téléchargement est l’un des exemples les plus emblématiques de l’ampleur nouvelle qu’a pris cette tendance dans les pays riches. Ainsi en France un usager du peer-to-peer a récemment été condamné à 10 000 € d’amende. La répression s’exerce dans de nombreux pays sous de nombreuses formes : descentes policières contre les vendeurs de rues (présents de Manille à New York), confiscation d’ordinateur aux frontières, saisie de médicaments par les douanes, action en justice contre des professeurs trop zélés dans leur mission d’éducation et de démocratisation du savoir.

Ce système concourt à limiter l’accès à de nombreux produits dont des produits de santé vitaux. Il renforce les inégalités d’accès aux connaissances et aux savoirs, ce qui nuit au développement et à la cohésion sociale. Par les déséquilibres qu’il établit entre droits des détenteurs de brevets et droits des individus ou des sociétés, il est responsable du développement de pratiques anticoncurrentielles qui imposent des dépenses injustifiées aux individus comme aux sociétés. Alors qu’il est en théorie au service de la création, il renforce ou au minimum ignore les obstacles croissants que rencontrent les auteurs, artistes et inventeurs pour la création et l’innovation dérivée, tandis que les mécanismes supposés rémunérer les individus et communautés créatives, mais qui sont dans les faits inefficaces et injustes pour les créateurs comme pour les consommateurs, perdurent. En favorisant la concentration et le contrôle de la « propriété intellectuelle », il nuit au développement, à la diversité culturelle et au fonctionnement démocratique des institutions et des sociétés. Les mesures techniques destinées à forcer l’exécution des droits de propriété menacent les exceptions fondamentales sur les droits d’auteur qui bénéficient aux personnes atteintes de handicaps, aux bibliothèques, aux éducateurs, aux auteurs et consommateurs, tandis qu’elles mettent en danger la protection des données personnelles et les libertés. D’une façon générale, on peut s’interroger sur la légitimité de l’exclusivité lorsque celle-ci contrevient au droit à l’information, favorise le monopole privé sur le savoir et le patrimoine commun de l’humanité, niant ainsi l’utilité sociale du partage et le caractère relationnel de la création et limitant l’économie du savoir au bénéfice d’une partie limitée de la population mondiale.

De nouveaux modes de production et de nouveaux modèles industriels émergent avec les technologies digitales et l’Internet. Ceci affecte la création, la fabrication, la circulation et la valorisation des produits et services issus de la connaissance. Se pose la question de savoir comment ces évolutions s’opèrent, par quels principes elles sont guidées, si elles accroissent ou au contraire peuvent réduire les inégalités, quelle place elles font au non marchand, quels domaines elles lui confient, comment se redessinent les échanges au cœur même du système marchand. Pour l’heure, les nouvelles formes de production, de travail et de collaboration, plus propices à la création dans l’environnement digitale et avec l’Internet sont freinées par le modèle qui repose sur la protection toujours accrue des droits de propriété intellectuelle et d’une façon générale au modèle propriétaire qui est appliqué. Elles mettent en évidence le caractère absurde et obsolète du système en place, autant qu’elles se heurtent à son inflexibilité et ses tendances jusqu’au-boutistes.

Les conflits actuels sur la propriété intellectuelle et les mobilisations autour de « l’accès aux savoirs » qui ont émergé ces 10 dernières années attestent de l’intérêt d’une approche qui privilégie la notion de « l’accès » comme enjeu de revendications. Pratiquement, de nombreuses réflexions ont lieu sur le développement d’alternatives pratiques au modèle actuel qui soient à la fois moins excluant, plus juste et plus efficace – nouveaux modèles de financement, de répartition, de rémunération, de collaboration et de partage, etc. Ces mobilisations nous proposent, au travers du prisme de l’accès, de penser les problèmes différemment pour traduire les conflits sous des formes politiques mais aussi pour penser de solutions nouvelles.

La question de l’accès aux savoirs est une question centrale pour toute politique de transformation écologique et sociale. Elle est déterminante à l’émancipation des personnes. Elle est essentielle pour préserver la biodiversité et éviter les prédations commerciales. Elle est fondamentale à la richesse de l’innovation et aux transferts de technologies indispensables pour répondre aux crises et assurer le développement des sociétés.

Lectures connexes sur le Framablog




Mark Shuttleworth d’Ubuntu n’est pas motivé par la haine de Microsoft

Ubuntu - Nouveau LogoC’est non seulement une habitude mais l’une des nombreuses originalités de la célèbre distribution GNU/Linux : tous les six mois Ubuntu sort sa nouvelle version, qui, faisant de plus en plus d’adeptes, est logiquement de plus en plus attendue.

La prochaine version 10.04 LTS[1] se prénomme Lucid Lynx et est prévue pour le mois prochain. Elle promet beaucoup. Mais elle promet aussi d’être l’amie des trolls 😉

Il faut dire que lorsque l’on occupe la place enviée et reconnue qui est la sienne dans la communauté (notoriété grand public incluse), on s’expose inévitablement à des critiques. Mais il faut également reconnaître qu’un certain nombre d’annonces récentes ont pu parfois jeter le trouble, en particulier chez ceux qui sont moins attachés à l’open source qu’au logiciel libre.

De là à craindre que Canonical, la société créée par Mark Shuttleworth pour développer et soutenir Ubuntu, se transforme en une sorte de nouveau Microsoft, il n’y a qu’un pas que nous ne franchirons certainement pas.

Se contentant de lister quelque éléments selon lui sujets à caution, c’est un pas que n’a cependant pas hésité à franchir un dénommé Alan Lord sur son blog, dans un court et lapidaire billet intitulé explicitement Is Canonical Becoming The New Microsoft?[2].

Et cela n’a évidemment pas loupé, le billet a généré très rapidement une centaine de commentaires divers et variés, nécessairement orientés par ce titre choc.

Le journaliste Sam Varghese a alors jugé bon de contacter Mark Shuttleworth pour avoir son avis dans un article publié sur le site iTWire que vous proposons traduit ci-dessous[3].

PS : Notons que dans l’intervalle, Ubuntu a également révélé sa nouvelle charte graphique et son nouveau logo (ci-dessus). Personnellement j’aime bien, même si je note la disparition apparente du slogan « Linux for Human Beings », qui était peut-être maladroit mais avait le mérite d’évoquer Linux. La confusion entre les deux ou l’aspiration de l’un par l’autre risquent de se faire plus grande encore.

Mark Shuttleworth : « Ma motivation, ce n’est pas la haine de Microsoft. »

I’m not driven by Microsoft hatred: Shuttleworth

Sam Varghese – 15 février 2010 – iTWire
(Traduction Framalang : Don Rico et Simon Descarpentries)

Mark Shuttleworth, fondateur et directeur général de la société Canonical, déclare que s’il a créé sa distribution GNU/Linux Ubuntu, ce n’est en aucun cas par animosité envers Microsoft.

Il a répondu aux questions d’ITWire concernant un récent billet de blog dont l’auteur accusait Canonical de devenir le nouveau Microsoft.

« J’admire plusieurs des accomplissements de Microsoft. J’estime qu’il est tout aussi détestable de diaboliser les employés d’une entreprise que des gens pour leur couleur de peau, leur nationalité ou toute autre particularité » explique Shuttleworth.

« Microsoft se livre toutefois à d’inacceptables abus de position dominante, et je suis fier qu’Ubuntu offre au monde un réel choix entre la servitude continue et la liberté utile, sûre et authentique. »

« Cela dit, mon rôle n’est pas de punir Microsoft, ni de les haïr ; je suis là pour proposer une meilleure voie, si je le peux. Ce sera dur, mais nous le pouvons. Et, dans les cas où nous partageons une cause commune, je travaille volontiers avec Microsoft. Il est possible que ce soit difficile à concevoir pour ceux qui pensent que la vie est plus facile à appréhender si on a un ennemi pour justifier sa cause, mais à mon sens ce comportement conduit au sectarisme, nuit aux résultats et nous empêche de corriger les erreurs du passé. »

Dans son billet, l’auteur énumérait les raisons pour lesquelles Ubuntu devenait d’après lui le nouveau Microsoft : l’intégration de Mono par défaut, la création d’Ubuntu One (un outil propriétaire de stockage en ligne), le retrait de GIMP et d’autres logiciels de la distribution, le passage à Yahoo! comme moteur de recherche par défaut, une enquête visant à savoir quelles applications propriétaires devaient être incluses dans les dépôts d’Ubuntu, et enfin, la nomination de Matt Asay au poste de PDG.

Sans entrer dans les détails concernant chacun de ces points, Shuttleworth indique cependant que « toutes les questions abordées dans le billet que vous mentionnez ont été consciencieusement débattues sur des forums publics. Les gens de chez Canonical et les animateurs de la communauté Ubuntu y ont, je crois, présenté nos intentions sans faux-semblant. »

« Chacune de nos décisions affectant nos utilisateurs auront leurs détracteurs et leur partisans, » a-t-il ajouté, « mais c’est notre volonté de maintenir le cap face au changement qui confère à notre plateforme son dynamisme et sa pertinence, et nous ne nous soustrairons pas à cette responsabilité. »

Shuttleworth explique que son objectif personnel, ainsi que celui de tous ses collaborateurs chez Canonical, est d’apporter les avantages du logiciel libre au plus grand nombre. « C’est ce qui est au cœur de notre motivation, et à maintes reprises nous avons dû employer des chemins détournés pour rester cohérents avec ce principe. »

Il précise que la grande majorité du travail produit par Canonical est mis à la disposition de tous sous licence libre. « Y compris des éléments de nature éminemment stratégique, tel que Launchpad, qui est publié sous une licence compatible avec les réflexions les plus récentes concernant les services internet libres. Nos réalisations propriétaires n’impliquent jamais qu’il faille installer des outils fermés de Canonical dans Ubuntu, se limitent à des services réseau, permettent de promouvoir tout le reste, et restent totalement optionnelles pour les utilisateurs d’Ubuntu. C’est une pratique que l’on retrouve sur d’autres plateformes. »

En conclusion, Mark Shuttleworth affirme être très fier de ce qu’apporte Canonical à la communauté du logiciel libre. « Si nous rencontrons autant de succès que je le souhaite, alors le monde aura pour la première fois une plateforme de qualité professionnelle disponible gratuitement pour tous. Ce qui n’est pas le cas avec les acteurs dominants du marché Linux. Je me consacre corps et âme à ce but, et j’apprécie énormément de partager cette cause avec des milliers d’autres au sein de la communauté Ubuntu. »

« Travailler en partenariat avec Yahoo! n’a jamais, à ma connaissance, induit la moindre négociation avec Microsoft. Et nous n’accepterons pas les conditions de Microsoft en matière de licence de propriété intellectuelle, comme le fit Novell. En revanche, si nous pouvons collaborer de façon constructive avec Microsoft, Oracle ou IBM, lesquels incluent une grande quantité de code propriétaire dans leurs produits, il est certain que nous nous engagerons de façon ouverte et de bonne foi. Je suis convaincu que nous le ferons avec le soutien sans faille des responsables de la communauté Ubuntu. »

Notes

[1] Une version LTS (pour « Long Term Support ») garantit aux utilisateurs, constructeurs et assembleurs, une maintenance et un suivi sur plusieurs années.

[2] On notera qu’Alan Lord a fait depuis amende honorable.

[3] Edit : Alan Lord est intervenu dans les commentaires ci-dessous, en nous signalant notamment la mise au point suivante concernant l’article du journaliste : Sam Varghese Got It Wrong?.




Avec Thibaud, 9 ans, la relève est assurée !

D Sharon Pruitt - CC byLa semaine dernière, le message suivant est tombé dans notre boîte à mails :

« Bonjour, je suis un enfant de 9/10ans que s’intéresse à l’informatique (je programme php/html/js/… tous les langages Web). Je souhaite vous remercier pour cette suite de logiciels libres et portables Framakey, mais je n’ai pas d’argent (10€ en tout). Je ne souhaite pas poster ce message sur le forum car j’aurais le honte (je pense). Merci pour tout et bonne continuation. J’espère que vous deviendrez riches (c’est pas tout de suite…). Thibaud »

Effectivement c’est pas pour tout de suite ! Mais sache que ça n’est pas le but non plus 😉

Par contre, un tel message vaut bien tout l’or du monde ! Pas courant de programmer si jeune (et d’utiliser notre Framakey), alors en le remerciant à mon tour pour sa gentille missive, j’ai eu envie d’en savoir plus en lui posant quelques questions[1].

Voici ses réponses. Elles n’ont pas été retouchées, si ce n’est quelques petites fautes d’orthographe de-ci de-là.

Entretien avec Thibaud

Bonjour Thibaud, peux-tu te présenter rapidement ?

Je m’appelle Thibaud, j’ai 9 ans, presque 10. Je suis en CM1 et j’habite dans une maison à 2 étages à Blanquefort (Gironde).

Tu nous as écrit pour nous signaler que tu était passionné d’informatique. D’où te vient cette passion : de l’école ? de ta famille ?

Cela vient de moi, personne ne m’a aidé au début.

Tu développes en PHP, Javascript et HTML. Où as-tu appris ces langages ? Dans des livres ? Sur Internet ? A l’école ? Parce que d’autres personnes t’ont initié ?

Le Html, c’est mon père. Le Javascript, le PHP et le CSS, c’est moi (avec l’aide de Google).

Peux-tu nous décrire quelques uns des programmes que tu as créé ?

En fait j’ai plutôt créé des menus car le reste je le dois au site de scripts EditeurJavascript.com : HTML (10%), Javascript (65%), PHP (20%) et CSS (5%).

Aussi, je modifie les jeux pour les rendre compatibles avec tous les navigateurs (surtout ceux des consoles et téléphones portables).

Quels sont les sites internet que tu fréquentes et que tu préfères ?

Google.com, framakey.org, dsi.fr.nf (mon site à moi) et donc editeurjavascript.com.

Comment as-tu découvert la Framakey ?

J’ai rencontré la Framakey sur un forum en cherchant « logiciel pour clé USB ». J’était très content car je change souvent de maison (2/3 fois par semaine).

Comment l’utilises-tu (tu bootes sur Linux ou uniquement avec Windows) ? Sur plusieurs ordinateurs ?

Je l’utilise uniquement sur Windows car tout ma famille a Windows et mon portable (à moi) ne marche avec aucun Linux (ni avec Windows…), c’est dommage.

Utilises-tu l’ordinateur à l’école et si oui comment et pourquoi ? Cela t’intéresse ou bien tu t’ennuies un peu, à cause de tes connaissances au dessus de la moyenne ?

On utilise que Firefox et Open Office pour les exposés et les rédactions. Remarque : il n’y a pas autre chose… à part le système d’exploitation (Windows XP). À l’école ça ne m’ennuie pas car le maître me dit d’aider les autre qui en ont besoin (tout le monde :)).

Aider les autre ça fait passer le temps qui lui n’est pas long… une demi-heure par semaine. C’est vrai, je suis « largement » au dessus de la moyenne de la classe (la moyenne est basse, hi!hi!hi!)

Quelle est ta configuration matérielle et logicielle ?

J’ai tous les logiciels portables Framakey et ça me suffit. Ma mère me prête son ordinateur fixe maintenant qu’elle a un portable. Chez mon père, je programme pas trop car son ordi est sur Vista et il y a un mot de passe administrateur…

Tu as une connexion à Internet dans ta chambre ? Tes parents te laissent-ils surfer autant que tu veux sans regarder ce que tu visites ?

Dans mes deux maisons il y a une connexion wi-fi avec mots de passe, dans des endroits « libres » de la maison.

Oui mes parent me laissent mais JE NE TCHATE JAMAIS. Je joue aux jeux sur mon site pour mobile depuis ma Nintendo DS(i). Mes parent surveillent juste l’heure du coucher (max 21h30/22h).

Cela t’arrive de télécharger des choses « illégalement » ? (de la musique, des films, des jeux, des logiciels, etc.)

JAMAIS !!! (mais mon père…)

Sais-tu ce qu’est un logiciel libre ? Comprends-tu pourquoi un site comme Framasoft souhaite que l’on utilise plus de logiciels libres ?

Un logiciel libre est un logiciel public sur lequel tout le monde a tous les droits. La différence est que le logiciel non libre, tout le monde n’a pas tous les droits ! Oui je comprends : c’est pour qu’on puisse s’entraider sans avoir à demander a une quelconque personne et qu’on n’ait pas à payer 150€ pour taper du texte et dessiner sur l’ordinateur.

Quels conseils donnerais-tu à un camarade qui voudrait lui aussi se mettre à programmer ?

Prends Framakey et Linux !

Penses-tu qu’Internet puisse participer à rendre le monde meilleur et si oui pourquoi ?

Oui car on peut partager nos connaissances et nos avis.

Notes

[1] Crédit photo : D Sharon Pruitt (Creative Commons By)




Logiciel libre et économie de la contribution : le temps de la déprolétarisation

Le 6 mars dernier Philippe Aigrain et Jérémie Zimmermann étaient invités par Alain Giffard et Bernard Stiegler dans le cadre des rencontres du Théâtre de la Colline de l’association Ars Industrialis.

Le titre était alléchant : Logiciel libre et économie de la contribution : le temps de la déprolétarisation.

Et la présentation tout autant :

Nous y accueillerons Philippe Aigrain et Jeremie Zimmermann, avec lesquels nous débattrons des enjeux du logiciel libre du point de vue d’une économie de la contribution, dans un contexte industriel marqué par une extraordinaire croissance des technologies numériques, qui pénètrent désormais pratiquement tous les aspects de la vie quotidienne. Mais nous examinerons aussi cette question dans le souci de réfléchir aux possibilités et aux spécificités du modèle contributif dans d’autres secteurs que l’économie numérique elle-même.

Plus généralement, nous mettrons à l’épreuve l’hypothèse selon laquelle le mouvement culturel, social et professionnel du logiciel libre et des creative commons constituent un précédent historique avec lequel, pour la première fois dans l’histoire industrielle, une tendance qui conduisait à ce que les processus de prolétarisation, c’est à dire de pertes de savoirs, affectant progressivement tous les acteurs de la société industrielle (producteurs, consommateurs, concepteurs, mais aussi investisseurs devenus spéculateurs), semble se renverser en une tendance contraire, où la technologie industrielle est mise au service de la reconstitution de communautés de savoirs.

C’est comme extension de ce mouvement et des nouvelles caractéristiques organisationnelles sur lesquelles il repose que le modèle du logiciel libre, qui constitue la matrice de l’économie de la contribution, annoncerait le dépassement des modèles industriels productivistes et consuméristes.

Quelle frustration de ne pouvoir en être !

Mais merci à Christian Fauré d’avoir enregistré ce débat de haute volée (ce dernier précise : « la discussion qui a suivi a été vraiment exceptionnelle, par exemple lors de l’intervention d’Alain Pierrot, vous la retrouverez bientôt sur le site d’Ars Industrialis »).

Bernard Stiegler

—> La vidéo au format webm

Philippe Aigrain

—> La vidéo au format webm

Jérémie Zimmermann

—> La vidéo au format webm

Alain Giffard

—> La vidéo au format webm




Vous êtes libre ce soir pour un restaurant open source ?

Instructables RestaurantPour faire comprendre ce qu’est un logiciel libre et son si précieux code source, on utilise souvent l’analogie de la recette de cuisine.

« Imaginez que vous vous trouviez dans un restaurant et que vous mangiez un excellent repas. Peut-être aurez vous l’envie de le cuisiner le lendemain chez vous pour vos amis ? C’est impossible, car vous n’avez pas la recette du plat (le code source). Vous pouvez toujours le manger dans le restaurant, mais même si vous connaissez le goût, vous ne savez pas comment le reproduire.

En informatique, c’est la même chose avec un logiciel. La plupart des logiciels sont distribués sans leur recette, et il est interdit d’essayer de comprendre leur fonctionnement (on parle dans ce cas d’un logiciel propriétaire). Il est interdit de les partager avec vos amis, et il est interdit d’essayer de les modifier pour les adapter à vos besoins. Avec un logiciel libre et ses 4 libertés, vous avez en revanche le plat, la recette, le droit de redistribuer (ou de vendre) le plat, la recette, et même de la modifier. »

Chiche ! Et si on pouvait aller dans des restaurants et repartir avec la recette des plats que l’on a dégustés ? Et même les plans de tout le mobilier et du design ![1]

C’est l’expérience proof of concept qui a été menée récemment à Amsterdam. Nouvelle fructueuse tentative de déclinaison du Libre en dehors des frontières du logiciel…

Un petit creux ? Un restaurant open source, ça vous dit ?

Hungry? How About An Open Source Restaurant

Alan Shimel – 23 février 2010 – NetworkWorld.com
(Traduction Framalang : Poupoul2, Goofy et Tinou)

Il ne vous est jamais arrivé de déguster un bon plat dans un restaurant, et d’imaginer le refaire une fois chez vous ? Dans le premier restaurant open source du monde, c’est possible.

Imaginez vous en train de finir un plat épatant dans un restaurant, et de vous dire que vous feriez bien le même chez vous. À l’Instructables Restaurant (NdT : Contraction d’instruction, signifiant aussi bien mode d’emploi qu’enseignement, et de tables), c’est justement de que vous pouvez faire. En fait, vous pouvez non seulement obtenir le « code source » du plat que vous avez dégusté, mais également télécharger les plans du mobilier et des équipements.

L’Instructables Restaurant est le prolongement du site Instructionables.com :

Une plateforme de documentation en ligne sur laquelle des passionnés partagent ce qu’ils font et comment ils le font, apprennent des autres et collaborent les uns avec les autres. Les graines d’Instructables ont germé au Media Lab du MIT (NdT : Massachusetts Institute of Technology), alors que les futurs fondateurs de Squid Labs concevaient des espaces de partage de leurs projets tout en s’entraidant.

En cohérence avec la philosophie des Instructables, tout ce qui se trouve dans le restaurant est soit basé sur des recettes postées sur Instructables, soit sur des conceptions et créations réalisées sur place. Si un besoin n’était pas déjà satisfait sur Instructables, les gérants du restaurant le prendraient en charge et le publieraient alors sur Instructables.com.

Tout est placé sous licence Creative Commons. Je trouve que cela place la créativité à un tout nouveau niveau.

Si vous vous apprêtez à courir vers l’Instructables Restaurant, vous pourriez être déçus. Après avoir annoncé leur intention d’ouvrir un restaurant basé sur ce concept en 2008, le restaurant a finalement ouvert ses portes le 16 décembre, au Theatrum Anatomicum du Waag d’Amsterdam. Ce restaurant n’a cependant été qu’un événement éphémère, et pour ce que j’ai pu en voir, il n’existe plus à cet endroit. C’est là toute l’histoire des événements éphémères qui vont et viennent à toute vitesse.

Mais maintenant que la glace est brisée, il n’y a aucune raison pour que d’autres restaurants reprenant le concept d’open source ne voient le jour un peu partout. Alors, la prochaine fois que vous aimez vraiment un plat lorsque vous sortez dîner, il se pourrait que vous puissiez repartir avec la recette (mais aussi tout ce qu’il faut pour reproduire l’assiette elle-même).

Notes

[1] Par contre, autant vous prévenir tout de suite, pour repartir avec la serveuse ou le serveur, c’est plus compliqué. Ça obéit à d’autres codes, bien moins compréhensibles que ceux d’un logiciel libre.




Toute recherche scientifique digne de ce nom doit ouvrir son code informatique

TenSafeFrogs - CC byVoici un récent article du Guardian qui tourne paradoxalement autour du logiciel libre et des formats ouverts mais sans véritablement les nommer.

Nous avons cependant jugé qu’il avait son intérêt dans la mesure où la science et la recherche ont désormais de plus en plus recourt à l’informatique pour traiter des données et en tirer analyses et conclusions[1].

Or comment voulez-vous que l’on puisse valider les résultats si les applications utilisées sont propriétaires ou si les chercheurs eux-mêmes ne mettent pas le code de leur programme à disposition ?

L’article s’appuie sur la récente affaire dite du « Climategate » qui a fait grand bruit outre-Manche (et étrangement peu de cas chez nos grands médias français).

Quand recherche sérieuse rime avec libération du code informatique

If you’re going to do good science, release the computer code too

Darrel Ince – 5 février 2010 – The Guardian
(Traduction Framalang : Kovalsky et Olivier)

Les programmes informatiques prennent chaque jour plus de place dans le travail scientifique. Mais partie prenante dans les conditions de l’expérience vous devez pouvoir les vérifier comme en atteste la bataille qui se joue autour des données sur le changement climatique.

On retiendra de l’affaire concernant la révélation publique des e-mails et des documents de l’Unité de Recherche Climatique de l’Université d’East Anglia qu’ils mettent en lumière le rôle du code informatique dans la recherche climatique. Il y a notamment une série de « README » produite par un programmeur de l’UEA connu sous le nom de « Harry ». Ces notes sont celles de quelqu’un qui lutte avec du code ancien non-documenté, et des données manquantes. Et pourtant, on parle bien d’un élément de l’une des trois bases de données climatiques principales dont se sont servis les chercheurs du monde entier pour en tirer analyses et conclusions.

Beaucoup de scientifiques du climat ont refusé de publier leur programme informatique. À mes yeux, ça n’est ni scientifique, ni responsable, parce que les logiciels scientifiques sont réputés pour leur manque de fiabilité.

L’Histoire nous a appris à ne pas faire une confiance aveugle aux logiciels scientifiques. Par exemple le Professeur Les Hatton, un expert international en tests logiciels, résident de l’Université du Kent et de Kingston, a mené une analyse approfondie de plusieurs millions de lignes de code scientifique. Il a montré que les logiciels présentaient un nombre exceptionnellement élevé d’erreurs détectables.

Par exemple, les erreurs de communication entre les modules de logiciels qui envoient les données d’une partie d’un programme à une autre se produisent à une fréquence de 1 pour 7 communications en moyenne dans le langage de programmation Fortran, et de 1 pour 37 communications dans le langage C. C’est d’autant plus inquiétant qu’une seule et unique erreur est susceptible d’invalider un programme informatique. Plus grave encore, il a découvert que la précision des résultats chute de six chiffres significatifs à un chiffre significatif après traitement par certains programmes.

Les travaux d’Hatton et d’autres chercheurs indiquent que les logiciels scientifiques sont souvent de mauvaise qualité. Il est stupéfiant de constater que cette recherche a été menée sur des logiciels scientifiques commerciaux, produits par des ingénieurs logiciels soumis à un régime de tests, d’assurance qualité et à une discipline de contrôle des modifications plus connue sous le nom de gestion de configuration.

À l’opposé, les logiciels scientifiques développés dans nos universités et nos instituts de recherches sont souvent produits, sans assurance qualité, par des scientifiques qui n’ont pas de formation en ingénierie logicielle et donc, sans aucun doute, l’occurence des erreurs sera encore plus élevée. Les fichiers « Harry ReadMe » de l’Unité de Recherche Climatique sont une preuve flagrante de ces conditions de travail. Ils résument les frustrations d’un programmeur dans sa tentative de conformer ses séries de données à une spécification.

Le code informatique est au coeur d’un problème scientifique. La science se définit par sa potentielle remise en cause : si vous érigez une théorie et que quelqu’un prouve qu’elle est fausse, alors elle s’écroule et on peut la remplacer. C’est comme cela que fonctione la science : avec transparence, en publiant chaque détail d’une expérience, toutes les équations mathématiques ou les données d’une simulation. Ce-faisant vous acceptez et même encouragez la remise en question.

Cela ne semble pas être arrivé dans la recherche climatique. De nombreux chercheurs ont refusé de publier leur programme informatique, même ceux qui sont encore utilisés et qui ne sont pas sujet à des accords commerciaux. Le Professeur Mann, par exemple, refusa tout d’abord de fournir le code, employé pour construire en 1999 le graphique en cross de hockey, qui a démontré que l’impact de l’homme sur le réchauffement climatique est un artefact unique de la dernière décennie (il l’a finalement publié en 2005).

La situation n’est pas aussi désastreuse pour tous les travaux académiques. Certaines revues, économiques et économétriques par exemple, imposent que l’auteur soumette ses données et ses programmes au journal avant publication. Un cas fondamental en mathématiques a également fait parler de lui : la preuve « par ordinateur » de la conjoncture des quatre couleurs par Appel et Haken. Cette démonstration a partagé la communauté scientifique puisque pour la première fois le problème de la validation du théorème s’est trouvé déplacé vers le problème de la validation de l’algorithme d’exploration et de sa réalisation sous forme de programme. Bien que critiquée pour son manque d’élégance, la preuve n’en était pas moins correcte et le programme informatique, publié et donc vérifiable.

Des organismes et des individus, ralliés à l’idée du quatrième paradigme, attachent beaucoup d’importance au problème de l’informatique scientifique à grande échelle et à la publication des données. C’était l’idée de Jim Gray, un chercheur expérimenté de Microsoft, qui a identifié le problème bien avant le Climategate. Actuellement, la recherche consacrée aux mécanismes qui pourraient faire du Web un dépôt pour les publications scientifiques est très active, elle englobe également les logiciels et la formidable quantité de données qu’ils consomment et génèrent. Un certain nombre de chercheurs mettent au point des systèmes qui montrent le progrès d’une idée scientifique, des premières ébauches d’idées jusqu’à la publication papier[2]. Les problèmes rencontrées avec la recherche climatique apporteront un élan à ce travail pour qu’il soit accéléré.

Donc, si vous publiez des articles de recherche qui s’appuient sur des programmes informatiques, si vous prétendez faire de la science mais que vous refusez de publier les programmes en votre possession, je ne peux vous considérer comme un scientifique. J’en irais même jusqu’à dire qu’à mes yeux les publications basées sur ces programmes seront nulles et non avenues.

Je trouve incroyable qu’une faute de frappe puisse être à l’origine d’une erreur dans un programme, un programme qui pourrait à son tour être à l’origine de décisions portant sur des milliards d’euros, et le pire, c’est que la fréquence de ces erreurs est élevée. Les algorithmes (ou copules gaussiennes), sur lesquels se sont appuyées les banques pour s’assurer que les crédits sub-prime étaient sans risque pour eux, ont été publiées. La facture était salée. La facture du changement climatique sera aussi élevée. Raison de plus pour qu’aucune erreur dans les calculs ne soit tolérée là non plus.

Notes

[1] Crédit photo : TenSafeFrogs (Creative Commons By)

[2] Voir à ce sujet l’article du Framablog : Première démonstration « open source » d’un théorème mathématique.




Rapport Fourgous : Le communiqué de l’April et les propositions de l’AFUL

Torres21 - CC by-saNous avons déjà par deux fois évoqué le rapport de la mission parlementaire du député Jean-Michel Fourgous sur la modernisation de l’école par le numérique. D’abord en extrayant les passages qui touchent de près ou de loin le logiciel libre et sa culture, et ensuite en demandant à François Elie de nous en faire une lecture critique.

Nous vous proposons ci-dessous, et l’une après l’autre, les réactions de l’April et de l’AFUL que nous avons malicieusement choisi de réunir ici dans un même billet.

Dans son communiqué, l’April prend acte de certaines avancées tout en regrettant la timidité des mesures préconisées. L’Aful quant à elle se veut constructive en faisant état de douze propositions, non pas pour « réussir l’école numérique » mais, nuance, pour « réussir le numérique à l’école »[1].

April / Rapport Fourgous : une reconnaissance partielle des apports fondamentaux du libre à l’éducation

URL d’origine du document

Paris, le 4 mars 2010. Communiqué de presse.

L’April se félicite que certaines de ses positions soient reprises dans le rapport de la mission parlementaire de Jean-Michel Fourgous[2] sur la modernisation de l’école par le numérique mais regrette qu’après avoir montré que le logiciel libre est une approche privilégiée pour réussir l’école numérique, il ne propose aucune mesure concrète pour tirer parti de cette opportunité.

Le rapport de la mission parlementaire de Jean-Michel Fourgous, député des Yvelines, sur la modernisation de l’école par le numérique a été remis le 15 février 2010 au Ministre de l’Éducation nationale Luc Chatel.

L’April en tant qu’observateur attentif de l’évolution de l’usage et de l’enseignement de l’informatique dans le système éducatif[3] a contribué à cette mission[4] dans le cadre de la consultation préalable. Elle se félicite de la prise en compte, même partielle, de sa contribution mais regrette que le logiciel libre ne soit cité que marginalement et ne fasse l’objet d’aucune mesure concrète alors qu’il est un élément central des solutions possibles.

Le rapport précise que le libre permet, entre autres de lutter contre la fracture numérique mais aussi qu’il favorise l’apprentissage des fonctionnalités plus que des outils. Il est également précisé que « en apprenant à utiliser des fonctionnalités plus que des outils, le libre habitue les élèves à la pluralité, à la diversité »[5].

Nous retrouvons là les positions défendues par l’April. Selon Benoît Sibaud, vice-président : « Notre association est, en matière éducative, attachée à la formation d’utilisateurs autonomes, éclairés et responsables. Nous considérons que les logiciels libres constituent, de par la transparence technologique qui les définit et les valeurs de partage qui les fondent, l’un des leviers les plus précieux à la disposition de la communauté enseignante pour l’enseignement à et par l’informatique ».

Plus loin l’accent sur les « pratiques coopératives et collaboratives » des enseignants est mis. À nouveau le rapport préconise de « favoriser le développement de ressources libres »[6]. De nombreuses structures encadrant la mutualisation de ressources pédagogiques libres entre enseignants existent déjà. Citons Sésamath, EducOOo[7], Scideralle[8] ou encore Ofset[9]. Le rapport fait explicitement référence à l’April par la voix de Benoît Sibaud : « Les enseignants devraient ainsi être incités à partager leurs travaux en protégeant ceux-ci par l’emploi de licences de libre diffusion du type Creative CommonsBySA, GNU Free Documentation License ou Licence Art Libre ».

L’April regrette cependant que ces points n’aient pas été davantage pris en compte dans la liste des priorités définies par la mission et que le libre ne soit cité que marginalement. Il est préconisé de généraliser les manuels numériques sans se préoccuper de la façon dont les enseignants pourraient se les approprier. Pour faire sienne une ressource pédagogique, un enseignant doit pouvoir justement l’adapter à son public, à sa situation pédagogique et à ses pratiques. Les manuels numériques actuels ne le permettent pas, ils sont vendus dans des formats rarement modifiables voire l’interdisent sur le plan légal. Il est regrettable que le rapport n’incite pas à encourager de façon institutionnelle des regroupements d’enseignants tels Sésamath[10] qui ont justement déjà produit des manuels numériques libres de mathématiques reconnus pour leur qualité pédagogique[11]. À la place un fonds de développement à seule destination d’éditeurs privés semble préconisé.

Sur le plan de l’exception pédagogique, l’April regrette de ne voir aucune mesure claire destinée à mettre un terme à l’insécurité juridique qui fait partie du métier d’enseignant. Il est certes préconisé de créer (en urgence) cette exception dans le système juridique du droit d’auteur alors qu’il suffirait dans un premier temps de favoriser la mutualisation entre professionnels de l’éducation et le développement de ressources libres. Concernant le B2i, le rapport va dans le sens des conclusions de l’April[12] ?et de nombreux autres acteurs comme l’EPI et le groupe ITIC-ASTI[13] car : « le B2i ne prend pas en compte ni la capacité à pouvoir se former tout au long de la vie, ni les connaissances techniques de base nécessaires pour comprendre les outils numériques ». L’April ne peut que se réjouir de voir mentionné que « La mise en place d’une matière informatique est une nécessité dans une société où tout fonctionne via le numérique »[14].

Enfin concernant les tableaux numériques interactifs (TNI), « la France comptera 50 000 TNI en 2010 »[15] le rapport n’évoque pas les problèmes d’interopérabilité. Chaque fabriquant de tableau développe son propre format qui ne peut être utilisé qu’avec leurs propres logiciels. Ces formats sont propriétaires et fermés et empêchent donc toute mutualisation avec des professeurs utilisant d’autres marques. En cas de mutation dans un autre établissement, tout le travail réalisé par le professeur peut être tout simplement inutilisable si le fabricant n’est plus le même. Il conviendrait donc de définir un cahier des charges national afin d’élaborer un format commun et interopérable pour les ressources utilisant les TNI. Rappelons que sous l’impulsion du BECTA[16] britannique un format de fichier ouvert destiné aux applications de type TNI a été publié[17]. Ce format est endossé par le projet European Schoolnet dont est d’ailleurs membre le Ministère de l’Éducation Nationale. Plusieurs fabricants de TNI ayant accepté de prendre en charge ce format, il nous semble ainsi naturel que son intégration soit requise dans les appels d’offre à venir.

En vertu des points mentionnés ci-dessus, l’April appelle le gouvernement à enfin mettre en place une véritable politique publique d’utilisation des logiciels, ressources libres et formats ouverts dans l’éducation. C’est là une opportunité à saisir dans l’intérêt des élèves et de l’école numérique. Enfin, l’April rappelle la nécessité forte de mettre en place un enseignement de l’informatique en tant que tel dès le Collège.

AFUL / Douze propositions pour l’école à l’ère numérique

URL d’origine du document

Suite à la publication du rapport FOURGOUS « Réussir l’école numérique », l’AFUL, l’ADULLACT et SCIDERALLE font douze propositions pour « Réussir le numérique à l’école ».

Le rapport Fourgous, dense, riche et touffu, semble hésiter entre une école numérique fondée sur le collaboratif et la richesse de ressources partagées d’une part, et d’autre part une école numérique qui serait le marché tout trouvé d’une industrie du numérique en mal de clients.

« Il y aura deux manières de rater l’école numérique : ne pas réussir à intégrer le numérique dans les situations d’enseignement, réduire le système éducatif à n’être qu’un client pour des industries numériques. Nous devons craindre davantage ce second danger » François Élie.

Nous vous invitons donc à découvrir nos propositions et à en discuter sur la liste dédiée à l’usage des logiciels libres dans l’éducation du groupe de travail Éducation de l’AFUL.

Douze propositions pour « réussir le numérique à l’école » :

  1. Liberté – Les logiciels et les ressources numériques acquises, développées ou produites avec participation de fonds publics doivent être placées sous licence libre et disponibles dans un format ouvert afin de permettre leur libre partage : les utiliser, étudier, modifier, redistribuer librement.
  2. Égalité – Avant de viser des solutions dites innovantes, il faut privilégier l’équipement et la disponibilité des ressources pour le plus grand nombre, par la mutualisation et des mécanismes de péréquation.
  3. Fraternité – Le travail collaboratif entre les élèves, les professeurs, les associations partenaires de l’école et tous les acteurs de l’éducation, en particulier les collectivités, doit être encouragé et soutenu.
  4. Un observatoire permanent composé de spécialistes de la mesure est chargé d’évaluer en continu et avec précision les impacts de tel ou tel usage lié au numérique dans les domaines scolaire et para-scolaire.
  5. La mise en œuvre de dispositifs TICE efficaces ou innovants est prise en compte dans l’évolution de la carrière des enseignants.
  6. Les Inspections sont chargées dans toutes les matières d’organiser, de maintenir et de faire croître le recensement, la production collaborative et l’indexation de contenus libres, avec des enseignants volontaires rémunérés pour ce travail. Les éditeurs (privés ou non) peuvent évidemment utiliser ce fonds pour proposer des manuels scolaires. Le modèle de Sésamath peut être une piste à suivre.
  7. Les collectivités et l’État conjuguent leurs efforts pour mutualiser leurs ressources et faire produire et maintenir un patrimoine de logiciels libres d’usage administratif et pédagogique à destination des 70 000 écoles et établissements scolaires français, par souci d’efficience, d’interopérabilité et d’égalité républicaine.
  8. L’école numérique s’appuie pour le développement et la maintenance de ses infrastructures matérielles, logicielles et documentaires, ainsi que pour la formation continue et l’accompagnement des enseignants, sur un réseau structuré de Centres de Ressources Informatiques.
  9. Les possibilités offertes par les nouvelles technologies dans le domaine du travail asynchrone ou distant sont explorées pour faciliter la liaison école-famille et améliorer les liens entre l’école et les élèves ne pouvant s’y rendre.
  10. L’informatique devient une discipline à part entière, dont l’enseignement obligatoire dès le primaire est réalisé par des professeurs ayant le diplôme requis dans cette spécialité ou ayant bénéficié d’une formation qualifiante. La gestion des compétences, l’accompagnement des enseignants et la formation initiale et continue font l’objet du plus grand soin.
  11. Afin de garantir l’égalité des chances, les collectivités et l’État mutualisent leurs efforts pour offrir un vaste support en ligne gratuit à l’échelle nationale, animé par des professeurs nommés dans la 31e académie : l’académie en ligne. Ces professeurs sont formés au tutorat en ligne.
  12. Les activités de production en ligne des élèves (écriture dans Wikipédia, site web, blog…) peuvent être intégrées dans un portfolio qui leur est proposé.

Ces douze propositions au format PDF.

Notes

[1] Crédit photo : Torres21 (Creative Commons By-Sa)

[2] Pour le consulter: http://www.reussirlecolenumerique.fr/. Voir aussi Libres extraits du rapport Fourgous sur la modernisation de l’école par le numérique (par A. Kauffmann), Rapport Fourgous – Notes de lecture de François Elie et Douze propositions pour l’école à l’ère numérique

[3] Voir notamment Jean Louis Gagnaire interpelle le ministère de l’éducation nationale à propos de la plateforme SIALLE, Audition de l’April à la mission e-educ, site du groupe de travail éducation de l’April

[4] Former les citoyens de demain : lettre de l’April à Jean-Michel Fourgous

[5] Réussir l’école numérique – Rapport de la mission parlementaire de Jean-Michel Fourgous, député des Yvelines, sur la modernisation de l’école par le numérique, page 259

[6] Réussir l’école numérique – Rapport de la mission parlementaire de Jean-Michel Fourgous, député des Yvelines, sur la modernisation de l’école par le numérique, Page 285

[7] EducOOo.org «  L’association EducOOo a pour vocation d’aider à la mutualisation de ressources éducatives libres autour de la suite bureautique OpenOffice.org. Elle encadre aussi le développement d’OOo4kids qui est une version d’OpenOffice.org spécialement adaptée pour les élèves de l’enseignement primaire voire début du secondaire »

[8] Scideralle, issue du projet AbulÉdu, Scideralle se fixe pour mission de soutenir et promouvoir des projets visant à fournir à tout public des logiciels et ressources libres pour l’éducation

[9] Ofset a été créée pour développer des logiciels libres éducatifs et des ressources afférentes pour le système GNU

[10] Sesamath.net « L’association Sésamath a pour vocation essentielle de mettre à disposition de tous des ressources pédagogiques et des outils professionnels utilisés pour l’enseignement des Mathématiques via Internet. »

[11] Les manuels Sésamath ont été préfacés par une Inspectrice Générale de l’Éducation Nationale de mathématiques

[12] Option « Informatique et sciences du numérique » au lycée : une première avancée avant un mouvement de fond ?

[13] http://www.epi.asso.fr/revue/docu/d0912a.htm

[14] Réussir l’école numérique – Rapport de la mission parlementaire de Jean-Michel Fourgous, député des Yvelines, sur la modernisation de l’école par le numérique, page 189.

[15] Réussir l’école numérique – Rapport de la mission parlementaire de Jean-Michel Fourgous, député des Yvelines, sur la modernisation de l’école par le numérique, page 72.

[16] Le BECTA est l’équivalent de la SDTICE en Grande-Bretagne : http://www.becta.org.uk/

[17] Le format "Interactive Witheboard Common File Format" (IWBCF) dont on peut d’ores et déjà télécharger les spécifications sur la page BECTA de SourceForge




Médecine 2.0 – Une conférence accessible et passionnante de Dominique Dupagne

Sur ce blog nous nous méfions du qualificatif « 2.0 » trop souvent récupéré et vidé de son sens par le marketing. Sauf à faire comme Benjamin Bayart et ne pas hésiter à comparer l’évolution d’Internet à un ironique et menaçant « Minitel 2.0 ».

Cela reste néanmoins parlant, voire pertinent, lorsqu’il s’agit d’envisager l’hypothèse d’un changement majeur, un saut quantique, dans une discipline donnée, en particulier lorsque les nouvelles technologies participent à cette (r)évolution.

La discipline dont il est question dans ce billet nous concerne tous puisqu’il s’agit de la médecine. Et d’après Dominique Dupagne, médecin généraliste et créateur du site Atoute.org, elle est peut-être en train de connaître une mutation importante qualifiée donc ici de « médecine 2.0 », par opposition à une « médecine 1.9 » :

Les communautés de patients et la fluidité de l’information changent le visage de la médecine. La Médecine 2.0 traduit l’idée d’une évolution majeure de la relation entre le médecin, le malade et la maladie. Comme en informatique, le changement d’unité traduit une nette évolution par rapport aux versions précédentes (1.1, 1.2… 1.9, 1.9.1 etc.). La médecine 2.0 représente donc une forme de révolution. Elle reprend le concept de Web 2.0 dont elle utilise les valeurs et les outils.

En voici quelques points forts issus de cet article (ou résumés dans cette courte vidéo YouTube) :

  • Les patients créent de la connaissance
  • Les patients découvrent ou inventent de nouvelles maladies
  • Le savoir des soignants s’étend lui aussi
  • La qualité et la disponibilité de l’information augmentent
  • La mesure de la qualité en médecine fera intervenir des critères inhabituels mais enfin pertinents

Pour en savoir plus, nous avons reproduit ci-dessous la conférence de Dominique Dupagne à l’Ecole de Hautes Etudes en Sciences Sociales, présentée le 19 février dernier lors d’un séminaire du centre Edgar Morin (sous licence Creative Commons By).

Dans cette intervention non dénuée d’humour, il sera question de Google, « d’hôpital magnétique » et « d’empowerment ». Mais il sera surtout question d’une médecine bousculée positivement par les nouvelles technologies et des patients bien décidés en se les appropriant à ne plus demeurer passifs.

La médecine 2.0 reprendrait donc « le concept de Web 2.0 dont elle utilise les valeurs et les outils ». Vous vous apercevrez peut-être comme moi au passage qu’elle reprend parfois également, consciemment ou non, les valeurs et les outils du logiciel libre.

Parce qu’entre les communautés de patients dont on redonne parole, action et expertise collective et les communautés d’utilisateurs de logiciels libres, il y a souvent de fortes similitudes…

—> La vidéo au format webm

PS : Grâce à notre ami JosephK d’ITheora, nous testons actuellement sur le Framablog la lecture directe au format Ogg pour les navigateurs compatibles HTML 5. Merci de nous faire part de tout retour positif ou négatif dans les commentaires.