Enquête criminelle en Terre sainte avec Ernaut, un nouveau Framabook

Les aventures médiévales et policières d’Ernaut, après un inquiétant huis-clos maritime et une semaine sanglante, se poursuivent aujourd’hui avec un crime au royaume de Jérusalem.

Pour Ernaut, il va falloir trouver vite le coupable pour sauver d’un combat mortel son propre frère qui s’est porté champion pour un homme injustement accusé.
Heureusement une tempête de sable vient retarder l’échéance mais elle ralentit tout autant l’enquête que mène le colossal sergent.

De manse en casal, du forgeron aux prostituées, des lavandières aux pasteurs paysans, cultivateurs, nomades musulmans, éleveurs, croisés installés de la première heure et nouveaux arrivants, soudards, esclaves évadés, Catalans, Bourguignons et Syriens… c’est tout un monde que croise Ernaut, et bien rares sont ceux qui n’avaient pas une bonne raison de tuer la victime.

Un roman sous licence libre offert par Yann Kervran que nous avons interrogé pour vous.

 

Bonjour Yann ! Alors revoici Ernaut dans « La Terre des morts », brrr pourquoi ce titre ?

Chacun pourra s’en faire une idée. Pour l’essentiel, c’est le sentiment d’appartenir à ce que l’on nommait au Moyen Âge un feu et un lieu : nous existons par nos liens à une communauté humaine et à une zone géographique. Dans des communautés agraires, qu’elles soient de cultivateurs ou d’éleveurs, il est difficile d’exister en-dehors de ces structures qui bornent nos possibilités, d’autant que nous héritons à la fois d’éléments bâtis, aménagés et de cadres sociaux et culturels. C’est la thématique principale de ce tome, qui en illustre diverses articulations.

Il y a ensuite un autre sens, plus anecdotique, lié à l’enquête elle-même, que lecteurs et lectrices découvriront ; j’aime bien jouer sur les différents niveaux de compréhension possibles, en restant suffisamment ouvert pour permettre d’y projeter ce qu’on souhaite.

Le nouveau Framabook est arrivé… Tremblez ! (ou plutôt cliquez sur l’image pour y accéder)

Nous voilà encore dépaysés dans le temps comme dans l’espace ! Pourquoi nous emmener au XIIe siècle au royaume de Jérusalem ?

Ça fait plus de vingt ans que j’y voyage et j’aime parcourir de telles contrées en bonne compagnie. C’est la période de l’histoire que je connais le mieux, elle alimente donc forcément ma réflexion sur le présent. C’est l’un de mes mondes mentaux qui me permet de proposer des récits intéressants et j’espère distrayants, tout en offrant une grille de lecture sur le monde.

J’ai eu l’idée du cycle Hexagora pour rendre moins fantasmatiques les récits de Croisades et le Moyen-orient médiéval. Le lieu et la période historique cristallisent beaucoup de raccourcis et de relectures des faits. L’Histoire sert souvent d’illustration et d’alibi à des décisions et opinions modernes. Il serait naïf de croire que c’est une science dépourvue d’usage politique. Le rôle du poète, de l’écrivain, permet d’assumer un biais, mais le lecteur en est prévenu.
Je tente donc d’apporter ma petite pierre à cet édifice, à ma manière. Je propose à chaque fois les sources qui m’ont inspiré, ceux qui le souhaitent pourront ainsi aller plus loin.

Dans le récit, tu précises chemin faisant, c’est-à-dire sans ralentir le rythme, ce que les personnages mangent et boivent, la saveur particulière d’un breuvage, son amertume dans un gobelet en céramique, comment ils sont vêtus, l’effet du khamsin sur la nature et les êtres etc. On y croirait presque, tu as tout inventé hein ?

En effet, j’invente tout, c’est le travail d’un écrivain que d’inventer, mais en m’appuyant sur des sources scientifiques : ouvrages d’archéologie, textes d’époque (que je lis souvent dans une traduction faite un spécialiste de la langue d’alors, ce que je ne suis pas) ou éléments géographiques voire ethnographiques. C’est une grosse partie de mon travail préparatoire que de recenser les documents, d’y accéder, beaucoup de livres n’étant pas faciles à trouver, ou parfois carrément hors de prix. J’accumule au fil des ans une belle bibliothèque.
C’est de là que naissent aussi mes idées d’enquêtes: je rebondis sur une anecdote (comme c’est le cas pour ce tome), et j’essaie de m’imprégner des lieux, des cultures, des événements pour qu’à la lecture on soit immergé dans un environnement réaliste. Ma longue pratique de la reconstitution historique a aussi nourri bien des aspects sensoriels que je décris. J’aime à dire que je suis un auteur médiéviste qui est déjà monté à cheval en armure, avec lance et bouclier. J’ai aussi une longue familiarité avec des pratiques artisanales, alimentaires, de vie quotidienne, qui se rapprochent, je le pense, de ce qui se faisait à l’époque d’Ernaut.

Dans ce roman, on découvre peu à peu que la victime n’invite guère à la compassion : Ogier est un personnage bien peu sympathique… Pourquoi donc le sergent Ernaut se met-il en tête d’enquêter au lieu d’aller retrouver sa fiancée ?

C’est justement le thème central : le lien aux autres et aux lieux. Ernaut est un déraciné, un immigré en terre étrangère. Il a un besoin viscéral de s’inscrire dans une filiation, une communauté qui atteste de son appartenance au groupe. C’est pourquoi il demeure très proche de son frère, malgré leurs différences. Et par extension, il est dans l’obligation morale de nouer des liens avec les proches de Lambert. Cela ne se fait pas sans heurts dans « l’affaire Ogier », les hésitations et questionnements d’Ernaut le prouvent.

Photographie CC BY SA Philippe Dumay
L’auteur en tenue de chasseur médiéval

L’enquête menée par Ernaut est aussi une course contre la montre (hum les montres n’existaient pas au fait, c’est une expression hein), pourquoi est-ce si urgent de trouver le coupable ?

La justice était relativement rapide par rapport à nos pratiques contemporaines et il y a donc un impératif temporel, qui me sert de ressort dramatique. Comme dans le tome 2 Les Pâques de sang, mais sous une forme différente, Ernaut doit composer avec le temps et l’espace. C’est depuis le tome 1 pour moi l’occasion de parler du rapport à ces deux éléments qui diffère du nôtre. Il n’y a pas le rythme quotidien des heures (du moins pas dans notre acception contemporaine) ni de projection rapide de soi en un autre lieu. Le moindre déplacement est en soi une aventure, et on ne sait pas organiser ses tâches de façon aussi fine et détaillée qu’aujourd’hui. Il y a toujours un certain flottement dans l’estimation des distances, du temps et des modalités de leur organisation.

Un peu brutale cette coutume de s’en remettre au jugement « par bataille », il y a forcément mort d’homme et c’est celui qui meurt qui a tort ? Pas très malin pour des Francs et des Chrétiens de tuer leur prochain ! Et en plus on appelait ça « le jugement de Dieu » ?

À l’époque, un certain Usamah ibn Munqidh, diplomate pour le régime damascène à Jérusalem, trouvait en effet cette pratique révoltante, barbare et imbécile. Mais j’ai eu envie d’en montrer le déroulé précis, la logique interne, qui ne se comprend que par référence à cette communauté, avec ses croyances religieuses et sa dynamique interne.

J’ai toujours été frappé par l’imbécillité de la mise en scène dans les représentations contemporaines de ce que l’on nommait alors en général « Jugement par bataille ». On voit souvent juste un des combattants venir vociférer devant l’autre, lui jeter un gantelet de mailles au visage (ce qui n’existait pas). Pour ensuite se battre à la façon de pirates avinés en fracassant autant de meubles que d’accessoires divers autour d’eux, en ahanant comme des bûcherons. Au final, je trouve cela dénué de sens.

Je ne cherche pas à juger une pratique qui peut sembler brutale. J’ai souhaité remettre cette pratique en contexte, évaluer comment elle prenait place véritablement au sein d’un univers mental distinct du mien. C’est similaire à ce que j’ai fait par rapport aux pratiques religieuses dans le tome 2.

Cette idée de la justice médiévale reviendra dans le cycle, vu qu’Ernaut est appelé à résoudre d’autres meurtres…
Pour l’anecdote, je me suis amusé à présenter dans le récit même des contradicteurs à cette pratique, dans le monde latin, en cherchant un effet ironique quand on découvre l’alternative proposée. Je laisserai les lecteurs et lectrices le découvrir par eux-mêmes.
De façon générale, j’aimerais montrer que les notions de justice, de pouvoir pacificateur n’ont pas suivi un développement linéaire jusqu’à nos pratiques, qui seraient l’aboutissement de ces errements passés. Nos ancêtres n’étaient pas naïfs, même s’ils avaient des croyances qui nous semblent irrationnelles. Sur le long cours, je vais me servir d’Ernaut et de son parcours pour illustrer cette idée que comme aujourd’hui, il y a un aspect réflexif intense entre pratiques et analyse.

Mais dis donc, au cours de cette enquête, nous rencontrons avec Ernaut toutes sortes de populations, comme se fait-il qu’on trouve une telle diversité sur un aussi petit territoire ? On ne peut pas dire que ce soit l’entente cordiale d’ailleurs, on se rend compte qu’il peut y avoir de fortes tensions entre toutes les communautés qui vivent là….

Le territoire où se déroulent les enquêtes est au croisement de nombreuses cultures et populations, depuis des millénaires, l’actualité malheureusement nous le rappelle régulièrement avec des événements violents.
La situation n’était pas plus simple voilà 800 ans et, pour coexister, les populations ne s’appréciaient pas pour autant. Cela allait le plus souvent de l’ignorance froide à la franche hostilité. L’arrivée des colons latins s’inscrit dans un mouvement régulier d’arrivées exogènes, qui venaient s’agréger à l’existant, pour finir en un patchwork avec peu de mélanges. Cette tendance humaine ne provient pas forcément d’un rejet de l’autre, mais plutôt d’une préférence envers ce qui nous ressemble. C’est magnifiquement expliqué dans la parabole des polygones.
Au travers des récits Hexagora , et pas seulement dans les enquêtes d’Ernaut, j’ai eu envie de présenter la société dans sa complexité, et pas comme un univers manichéen, avec d’un côté les Croisés et de l’autre les Musulmans. C’est un choix politique assumé.

Le tome 2, disponible chez Framabook.

Tiens en parlant de choix politique, où en es-tu avec tes publications chez Framabook ? Les deux premiers tomes étaient des rééditions et surtout des « libérations », mais celui-ci est inédit et tu le mets directement en licence libre dès sa première publication ?

En effet. je l’ai écrit voilà des années, à la suite des deux premiers et il patientait dans mes tiroirs. Il va donc être le premier directement diffusé sous licence libre. C’est un long processus pour un auteur que de s’affranchir des habitudes de publication traditionnelle, où le droit d’auteur est privilégié par rapport au droit des publics. Je suis finalement content d’avoir eu du temps pour faire ce chemin complexe.

Alors tout le cycle romanesque à venir va désormais être sous licence libre ?

Oui, le cycle d’Ernaut, mais aussi l’intégralité du monde Hexagora (qui comporte en outre plusieurs dizaines de Qit’a, textes courts). Je publie aussi les sources, à savoir un texte le moins mis en forme possible, pour permettre à chacun de bâtir dessus aisément. Pour cela, j’écris en markdown et je mets à disposition mes fichiers sur un dépôt Git.

Et donc si je veux m’emparer de ton personnage d’Ernaut et le faire évoluer dans d’autres époques et d’autres milieux c’est possible ? Tiens par exemple, je verrais bien Ernaut en justicier interplanétaire, chargé par le Grand Continuum de la Galaxie d’enquêter sur la disparition du prince d’Orion, j’intitulerais ça : L’astéroïde des morts, qu’est-ce que t’en dis ? … – hein ? Comment ça c’est nul ?

Je ne sais pas, on ne peut jamais savoir d’une idée si ce qu’elle produira sera nul, si on adhère à l’idée d’un tel jugement de valeur. Tout le monde a des idées, tout le temps. C’est ce que l’on en fait qui est vraiment intéressant et qui demande du travail. Beaucoup de travail.
Et pour en revenir à ta proposition, pourquoi pas ? J’aime bien la SF et c’est un univers où le policier a toute sa place, même si ce n’est pas le plus développé des sous-genres. Je pense à une série comme The expanse ou un univers comme celui de La culture de Iain Banks où de tels traitements existent.

Est-ce que tu as trouvé de nouveaux lecteurs et nouvelles lectrices grâce à la publication chez Framabook, même si la diffusion en papier demeure un peu anecdotique ?

J’en ai rencontré, en tout cas. La culture libre n’est pas l’aspect le plus connu et le plus mis en avant dans notre société, que ce soit dans les établissements culturels ou même les rencontres libristes. En outre, la diffusion des ouvrages papier est compliquée, les réseaux actuels étant assez étanches à ce genre d’initiative. Cela pose un souci quand on sait que le modèle économique des revenus des écrivains repose sur les ventes de ce support.

Quoi qu’il en soit c’est aussi ce qui m’intéresse dans cette aventure, tenter de décorréler mes revenus d’un produit physique qui ne représente pas l’intégralité de mon travail. D’où l’appel au don, au soutien sous forme de mécénat. Pour un résultat négligeable pour l’instant, je dois l’avouer. Si cela ne s’améliore pas d’ici quelques mois, il va me falloir envisager une reconversion professionnelle. Si jamais vous connaissez des entreprise qui embauchent un spécialiste du 3e quart du XIIe siècle, ça pourrait m’intéresser. 😉

Cliquez sur la couverture pour aller télécharger et/ou acheter la version papier du tome 1 chez Framabook.

Tu as tout de même investi beaucoup de passion, de temps et d’énergie pour élaborer ce cycle romanesque encore en chantier, qu’est-ce qui te donne autant de motivation ?

Desproges aurait répondu « À chacun sa névrose ». Et un de mes amis, John Waller, qui a supervisé pendant longtemps les interprétations historiques au sein du Royal Armouries disait que si quelque chose méritait d’être fait, il méritait d’être bien fait. Aller au-delà de ces aphorismes me coûterait peut-être une fortune en analyse. 😉

Dans quelles sombres et sanglantes aventures vas-tu plonger ce pauvre Ernaut la prochaine fois ? Il va encore voyager, redresser les torts et risquer sa peau ou bien se ranger et fonder une petite famille ?

Je sais à peu près vers quoi je vais pour l’ensemble du cycle narratif, mais le détail n’est pas défini précisément au-delà de quelques volumes. Je suis actuellement en train d’écrire Le souffle du dragon, qui sortira d’ici cet automne. C’est un tome qui verra le personnage prendre de la maturité et où des réseaux relationnels se précisent. On y découvrira comment le personnage d’Ernaut va évoluer. Géographiquement, cela restera encore au cœur du royaume, à mi-chemin entre Jérusalem et la côte, vers Jaffa.
Pour les deux autres enquêtes, je prévois de le faire voyager plus loin. Le tome 5 vers le nord et le 6 vers le sud.
Il y a tant de magnifiques endroits et de lieux passionnants… c’est toujours frustrant de voir le temps que ça prend de mettre les choses en place. J’aimerais pouvoir aller plus vite !

Découvrez le volume 3 des aventures d’Ernaut en vous téléportant sur sa page Framabook !




LibreOffice, c’est stylé ! — un nouveau manuel Framabook

C’est une réalité pour beaucoup d’utilisateurs au travail ou chez soi : pour rédiger une lettre ou un devis, pour un roman ou un essai, les logiciels de traitement de texte ont quelque chose d’incontournable. Christophe Masutti nous propose aujourd’hui, dans la collection Framabook, une adaptation du livre de Bruce Byfield : Designing with Libreoffice, une référence (sous licence libre) !

LibreOffice partout, Savoir nulle part…?

« Mais moi je préfère LaTeX, et d’ailleurs je compile mes documents bien plus vite en ligne de commande… » : oui, oui, on sait. Et d’ailleurs, dans la maison d’édition Framabook, on n’utilise pas vraiment les outils les plus communs. Chacun a ses propres préférences en matière de logiciels, et à condition d’être suffisamment expert, les productions sont à la hauteur des connaissances et des savoir-faire. Il manquait cependant à la collection Framabook un ouvrage à la fois compréhensible et synthétique sur l’un des logiciels-phare de la bureautique : LibreOffice.

À travers ses multiples versions (depuis Apache OpenOffice jusqu’à la version en ligne LibreOffice Online, en passant par des versions propres éditées par des opérateurs spécialisés) l’histoire de cette suite bureautique est à bien des égards exemplaire de ce qu’une communauté mondiale de développeurs, en particulier The Document Foundation, peut produire en termes de performance et surtout de standard (on pense notamment au format Open Document).

Si on peut se réjouir de l’adoption (controversée ou pas) de LibreOffice dans des administrations ou des entreprises à travers le monde, qu’en est-il exactement pour les utilisateurs individuels ? Quel que soit le choix du logiciel, on conçoit mal un usage de l’informatique domestique sans une suite bureautique, mais comment appréhender cet outil ?

« Chez les Dupuis-Morizeau, on utilise le logiciel de traitement de texte comme une machine à écrire façon Remington, et à la moindre difficulté, l’outil devient l’ennemi et source de stress. »

Pourquoi ? parce qu’on ne connaît qu’un minuscule fragment de ses fonctionnalités : il devient une boîte noire, avec ses secrets et parfois même une volonté propre ! C’est toujours la même tragédie : l’équipement logiciel est de plus en plus performant mais l’utilisateur reste éternellement démuni. En réalité, si LibreOffice dispose d’un excellent Wiki dédié à l’aide aux utilisateurs , il n’en demeure pas moins que l’utilisateur doit d’abord avoir une vision claire de son besoin et de la méthode pour comprendre et opérer les procédures qui lui sont proposées. Le livre de Bruce Byfield est construit pour cette raison : collectionner les procédures est une chose mais maîtriser les concepts en est une autre. Le tout est de rester compréhensible et adapter le discours aux débutants.

Un manuel pratique et stylé chez Framabook !

C’est en ces termes que Christophe Masutti a proposé à Framabook une traduction et surtout une adaptation de Designing with LibreOffice, le manuel de Bruce Byfield (voir le site web). Christophe n’en est pas à son coup d’essai avec les Dupuis-Morizeau : il y a pile un an, il publiait un ouvrage pédagogique pour accompagner les utilisateurs dans la jungle numérique et libérer leurs pratiques de l’informatique domestique. Dans la même veine, il poursuit le même objectif en s’attaquant cette fois à ce qui, selon lui, manque cruellement aux pratiques quotidiennes de la bureautique : prendre le temps de comprendre les concepts-clés de LibreOffice et libérer la production de documents. C’est une approche qui est autant destinée à l’utilisateur individuel qu’aux formateurs désirant aborder LibreOffice sous un angle plus analytique.

« Comme l’a montré Bruce Byfield, maîtriser la production de documents avec LibreOffice, c’est d’abord savoir se servir des fonctions de styles ».

Alors que l’auteur de la version originale a choisi de brosser l’ensemble des logiciels composant la suite LibreOffice, Christophe a préféré adapter l’ouvrage en se concentrant sur LibreOffice Writer et les styles. LibreOffice Writer, c’est stylé ! est donc à la fois une traduction et une adaptation. Outre le choix des sections, il a fallu en effet adapter l’ouvrage aux concepts de la typographie française, aux mises à jour récentes de LibreOffice (l’édition originale datait de 2016) tout en assurant une pérennité du contenu afin de le prémunir contre une obsolescence précoce (car on sait à Framabook qu’un manuel ne se met pas à jour si facilement).

Il en résulte alors un ouvrage de près de 400 pages. Mais que les lecteurs se rassurent : toutes ces pages ne sont pas dédiées à une suite épuisante de procédures à appliquer. Au contraire. Par exemple, une grande partie du premier chapitre est dédiée à la confrontation entre les deux manières d’appréhender un logiciel de traitement de texte : formater manuellement ou utiliser les styles. Si les deux méthodes ne sont pas exclusives, l’utilisation des styles suppose un recul nécessaire et une analyse des besoins et des pratiques. C’est le principal atout de l’ouvrage : nous aider à faire le point.

Un autre exemple : beaucoup de questions liées à la typographie sont abordées au fil des chapitres, procurant ainsi, en pratique, une excellente vulgarisation de concepts trop souvent ignorés et qui, pourtant, sont essentiels pour composer des documents et assurer leur bonne lisibilité.

LibreOffice partout, Microsoft WordTM nulle part !

Pour qui compose-t-on des documents ? Quels types de documents et à quelle fréquence ? Bruce Byfield, en tant que journaliste professionnel (spécialisé dans les logiciels libres) a publié Designing with LibreOffice parce que justement il ressentait le besoin de rationaliser ses pratiques bureautiques.

La composition avec les styles, c’est sans doute le principal atout de LibreOffice, grâce auquel la très grande majorité des fonctionnalités avancées deviennent compréhensibles. Pour donner un élément de comparaison, lorsqu’on compose des documents pour le Web en HTML ou destinés à l’impression comme avec LaTeX, les premières opérations concernent la configuration des fichiers de styles. LibreOffice (et la plupart des logiciels de traitement de texte) ne déroge pas à cette règle qui permet d’automatiser la mise en page et se concentrer le plus possible sur le contenu lors de la rédaction.

Comme Bruce Byfield le dit dans une interview de 2016, à bien des égards, et depuis longtemps, le logiciel libre ne joue plus la carte du rattrapage par rapport aux logiciels propriétaires. C’est le cas de LibreOffice Writer qui n’est plus seulement une simple alternative à Microsoft Word car il présente, en particulier dans l’usage des styles, une approche très différente de la composition de document. La comparaison n’est plus une affaire de préférences personnelles, mais une question de stratégie, qu’il s’agisse d’un usage domestique ou professionnel.

Avec LibreOffice Writer, c’est stylé ! les lecteurs trouveront bien plus qu’un manuel. C’est d’un compagnon qu’il s’agit, et on sait que le temps consacré à un compagnon n’est jamais perdu.

Liens utiles




Mon CV ? Il est hébergé par Framasoft !

Les Pages Framasite évoluent encore. Robin, l’infatigable développeur de Pretty Noémie CMS, a ajouté des fonctionnalités pendant qu’on ne regardait pas. C’est le moment de refaire votre CV.

Depuis que nous avons annoncé les pages Framasite, l’outil a été adopté, et a évolué au fil de vos retours.

Une petite liste à la Prévert ?

Des modules supplémentaires !

  • Module agenda avec une insertion de votre Framagenda ou Google agenda (oui, si vous n’avez pas encore dégooglisé votre vie, c’est pas grave, on vous accepte)
  • Module réseaux sociaux (et même ceux qu’on n’aime pas)
  • Module lecteur audio (SoundCloud) si vous souhaitez faire le site de votre groupe de musique

  • Module avec lecteur vidéo et vidéo d’arrière plan

  • Un formulaire d’initialisation pour installer votre site sur un serveur personnel
  • Module de code avec coloration syntaxique, comme les pros

 

Du zouli design !

  • Redimensionnement d’images
  • Bouton « haut de page »
  • La page d’accueil est encore plus cool
  • Le menu réapparaît lorsqu’on scrolle vers le haut
  • Une version mobile pour le menu
  • Les fenêtres sont plus sympas (il y a eu un coup de main d’un designer)

On va glisser sur les nombreuses corrections de bugs.

Un tuto vidéo pour faire son CV

Et comme il restait du temps, hop, Robin a concocté une petite vidéo pour fabriquer son CV sur Framasite.

 

Vous pouvez le mettre sur un média social propriétaire appartenant à un GAFAM, hein. No problemo. C’est cool.

Mais bon, votre CV hébergé par Framasoft, ça fait toujours son petit effet :p !

 

Pour aller plus loin & contribuer :

 




Framaclic, un nouveau service qui compte

Vous avez besoin de compter les visites sur vos sites sans fliquer vos visiteureuses ? On a un framachin pour vous !

Prenons un exemple rapide. Fred aime bien pondre des textes et il les sème un peu partout sur le vaste Ouèbe.

Cela lui pose deux problèmes.

Ses textes sont sur des sites différents avec parfois des adresses web (ou « URL ») longues comme un jour sans pain. Mais pour ça il a trouvé la parade, c’est frama.link, le raccourcisseur d’URL de Framasoft. Il a créé une adresse courte pour chacun de ses textes, et quand on lui demande où on peut lire sa prose, il donne cette URL plutôt qu’une adresse de 256 caractères biscornus. Pour avoir des adresses web encore plus courtes, il pourrait utiliser https://huit.re/.

L’autre souci de Fred, c’est qu’il est affreusement cabotin. Il écrit pour le plaisir, il publie sous licence libre, il a compris qu’il ne bouclerait pas ses fins de mois grâce à sa plume, mais il ne peut pas s’empêcher de se demander si quelqu’un⋅e lit réellement ce qu’il commet.

Fred est donc tout content quand Framasoft sort Framaclic (bon, il ne fait pas des triples saltos, mais il a un moment de jubilation).

C’est quoi ?

Zag, l’adorable mascotte de Dolomon

Framaclic est un raccourcisseur d’URL qui compte les clics. Voilà. Dit comme ça, on dirait que c’est drôlement simple, non ?

Eh bien, bonne nouvelle : c’est simple !

Bon, soyons justes, Frama.link avait déjà un compteur, rudimentaire. Il reconnaît l’auteur de l’URL courte via un petit cookie et est capable de lui fournir un comptage des clics. Seulement, ça ne marche que depuis l’ordinateur et le navigateur sur lesquels l’adresse courte a été créée (à cause du cookie).

« Framaclic est un frama.link dopé aux stéroïdes », nous dit Luc, l’auteur de l’application (qui développe aussi parfois des petites applis complètement inutiles donc parfaitement indispensables).

Comment ça marche ?

Framaclic est basé sur Dolomon, comme DOwnLOad MONitor. Pas besoin d’avoir fait anglais première langue pour piger ça.

Fred se rend sur framaclic.org. Il crée un compte avec un mot de passe, histoire d’être seul à pouvoir accéder à ses statistiques (des fois qu’elles soient mauvaises).

Il fait une liste des adresses de toutes les ressources vers lesquelles il veut créer un lien : ses textes, son blog, son CV, ses galeries de photos, une BD de Simon qu’il adore partager avec ses collègues… Si la liste n’est pas exhaustive, ce n’est pas grave, il pourra en ajouter par la suite.

Comme il aime bien que les choses soient correctement rangées (rappel : cet exemple est une fiction), il crée des catégories et des étiquettes pour s’y retrouver. Surtout qu’il se dit que ce truc-là va drôlement lui rendre service et qu’il va finir par y mettre beaucoup d’adresses.

Ensuite, pour chaque adresse longue il en génère une courte (un « dolo »). Pas besoin de la conserver, Framaclic s’en charge.

 


Les dolos sont créés au fur et à mesure.

Pour suivre les visites sur une page précise, Fred peut créer un dolo pointant sur une petite image transparente (Dolomon vous en propose une) et insérer l’URL générée, comme on insère une image, dans sa page.

Fred aime surtout créer des dolos qui pointent sur un document, au lieu de la page web. Par exemple, un dolo pour le pdf de son roman (http://framabook.org/docs/vieuxflic/FredUrbain_VFVV_cczero20151108.pdf au lieu de la page générique https://framabook.org/vieux-flic-et-vieux-voyou/), un autre pour la version e-pub, et encore un pour le code source en Latex. De cette façon, Fred saura quelle version est la plus téléchargée.

Mais il ne saura rien de plus : Framaclic n’enregistre que des statistiques anonymes, pas les adresses IP des visiteureuses.

Par contre, cela fait de beaux graphiques :

Et comme vos données vous appartiennent, vous pouvez les télécharger dans un fichier CSV, ce qui vous permettra de les manipuler à votre guise, de faire des camemberts colorés…

Ah, un dernier truc cool à savoir : Luc a fait un plugin Dolomon pour WordPress. Si vous avez un blog, vous pourrez créer vos dolos directement depuis votre article.

Contribuez

Comme tout logiciel qui n’a pas encore subi l’épreuve du feu (enfin, l’épreuve de l’utilisation massive), Dolomon comporte certainement quelques bugs ou nécessite un petit coup de polish pour en améliorer l’ergonomie : n’hésitez pas à contribuer en ouvrant des tickets !

Nous tenons au passage à lever notre chapeau à Luc, alias Framasky notre infatigable admin-sys, qui a codé Dolomon pour nos besoins internes, et l’a amélioré afin que l’on puisse l’ouvrir au public ;).

Pour aller plus loin




Framadsense, la publicité qui a du sens

C’est avec le plus grand sérieux que nous lançons aujourd’hui notre alternative à la régie publicitaire Google AdSense : Framadsense !

EDIT 20/09/2023 : Ce « service » est aujourd’hui fermé. Néanmoins, le code source est toujours disponible pour qui est intéressé.

Aujourd’hui on trolle la pub !

On ne va pas noyer le poisson : aujourd’hui est le jour rêvé pour lancer notre outil de bannières publicitaires. C’est dimanche, nos salarié·e·s se reposent, nos bénévoles ont une vie personnelle, vous allez donc pouvoir enflammer les z’internets en toute autonomie.

Vous croyez que c’est une blague…? Vous ne vous doutez pas à quel point nous sommes sérieuxses, dès qu’il s’agit de déconner.

Nous avons déjà parlé ici du fléau qu’est la publicité « digitale » (comme disent les « dir’comm' » et les « dir’mark' »). C’est le profilage publicitaire qui est aux origines des Léviathans qui centralisent le web. Il suffit de voir le talk « Nous créons une dystopie simplement pour obliger les gens à cliquer sur des publicités » pour comprendre combien c’est grave, et combien il faut Dégoogliser Internet. Nous relayons aussi des alternatives plus vertueuses, comme celle de la rédaction de NexINpact.

La pub en ligne est partout, c’est une catastrophe numérique et écologique… On comprend pourquoi certaines personnes s’échangent de formidables astuces pour résister à l’agression publicitaire. L’ironie, c’est que la plupart des alternatives et connaissances qui nous permettent de faire respecter nos intimités numériques sont peu connues… et qu’elles manquent de pub !

Notre sérieux va vous surprendre

C’est parti d’une idée de JosephK. Oui, JosephK, un salarié de Framasoft qui déjà, pour la blague, avait codé le Bingo du Troll (à utiliser sans modération dès qu’un troll vous emmouscaille). Celui qui, récemment, a bidouillé un joli lifting pour le Framablog (vous avez remarqué comme il est plus aéré, plus lisible ?). JosephK, un des plus farouches opposants à la pub parmi nous, qui vient nous proposer :

Et si on montrait les mécanismes de la pub en ligne tout en faisant de la réclame pour les alternatives éthiques ?

Il y a des informations que nos navigateurs web diffusent en permanence : de quel site on vient (c’est le rôle du « référent »), ainsi que les versions de notre système d’exploitation et notre navigateur web (ce que transmet le « user agent »). Rien qu’avec ces infos-là, donc sans pister quiconque, on peut générer des bannières qui expliquent aux personnes utilisant des outils fermés comment mieux se libérer… « Tu viens de Facebook ? Essaie Framasphère ! » ou « Tu utilises Chrome ? Firefox est plus rapide et plus éthique ! »

Framadsense, parce que ça nous fait rire

Si on crée ce micro-outil pour nous, autant le mettre à disposition de tou·te·s, non ? Ainsi est né Framadsense, disponible à l’adresse https://sense.framasoft.org. Si vous voulez l’utiliser pour votre site web, il vous suffit :

  • D’aller sur Framadsense
  • De paramétrer le type de bannière que vous voulez (cocher des cases, quoi !)
  • De copier/coller le code généré à l’endroit de votre site où vous voulez insérer de la (fausse-)pub !

Sense3, le logiciel développé par JosephK, est un logiciel libre (forcément !) qui respecte notre vie privée, et dont les bannières affichent uniquement des projets libres et non lucratifs… voire des œuvres d’art, juste pour le plaisir de remplacer la pollution visuelle par de la culture ! Vous pouvez d’ailleurs proposer de nouvelles bannières en collaborant au code sur son dépôt (nous, on a juste fait les exemples les plus courants… venez pas nous gronder si votre projet libre favori n’y est pas encore !).

Voilà : même quand il s’agit de déconner, on en profite pour hacker les codes de la pub. Plus qu’un poisson, Framadsense est un vrai logiciel qui permet au moins qu’on se pose la question :

comment attirer l’attention de nos proches sur le fait que nos attentions sont sur-sollicitées ?

Vous avez le reste du (long) week-end pour y répondre (ou pour manger du chocolat).

L’équipe de Framasoft.




Aquilenet, 7 ans d’internet libre en Aquitaine

7 ans. Sept ans que Aquilenet, fournisseur d’accès à Internet associatif bordelais, construit de l’Internet bénévolement, localement, politiquement et maintenant en fédération. Sept ans également à faire de la sensibilisation, aussi bien sur les questions d’Internet, de vie privée, de logiciel libre que de critique des médias et de médias indépendants. On aurait pu croire qu’après autant de temps cette association se serait essoufflée mais loin de là : un passage en collégiale, un nouveau local, un data-center associatif et bien plus encore !

Frigo du local – CC-BY-SA – Bram

— Bonjour le collectif d’Aquilenet, c’est un plaisir de vous avoir, est-ce que vous pouvez vous présenter brièvement ?

Bonjour, plaisir partagé 😉, nous sommes donc Aquilenet, Fournisseur d’Accès Internet associatif en Nouvelle Aquitaine, et plus précisément localisé à Bordeaux. Nous comptons actuellement pas loin de 150 membres et sommes actifs depuis 2010 !

Aquilenet est un fournisseur d’accès à internet (FAI) associatif, qu’est-ce que c’est ? En quoi le côté associatif fait une différence ? À qui vous vous adressez ?

Le plus ancien fournisseur d’accès à Internet de France encore actif est un fournisseur d’accès associatif. C’est-à-dire que dès le début de l’Internet en France, on a vu des gens passionnés se rassembler entre eux pour construire quelque chose à leur échelle. Et puis sont arrivés les fournisseurs commerciaux : France Télécom, AOL, Club-Internet, Wanadoo, Neuf… Enfin, maintenant, on connaît leurs nouveaux noms : Orange, SFR, Free, etc. Ce sont d’immenses entreprises, qui couvrent tout le territoire national, et sont là pour faire ce que font les entreprises : vendre des services et faire des bénéfices. On en connaît les dérives : ces entreprises, qui ont la mainmise sur le réseau, peuvent contrôler ce qu’on a le droit – ou non – de consulter, choisir si on peut brider ou non une connexion, desservir volontairement plus ou moins bien le client suivant ce qui les arrange, et évidemment pratiquer une surveillance généralisée : on leur donne les clés et on utilise ce qu’ils veulent bien nous donner.

Un FAI associatif, c’est un petit ensemble de gens passionnés, qui veulent faire du réseau propre et fournir un Internet libre. On peut boire une bière avec. On peut littéralement voir comment c’est fait, voir ce qu’ils font de nos données. Il n’y a pas de dérives mercantiles, car ce n’est de toute manière pas concurrentiel avec les FAI dits « commerciaux ».
En bref, les clés sont à nous, et on se réapproprie Internet, le réseau, et nos données : on fabrique nos propres bouts d’Internet, on est Internet !

En plus de cela, notre volonté étant de créer du réseau, on peut amener Internet là où les FAI commerciaux n’en voient pas l’intérêt. Ce sont les fameuses « zones blanches » dont on entend parfois parler. Pour nous, l’intérêt, c’est d’apporter l’accès au net à tout le monde, partout.

On s’adresse à tout le monde, comme n’importe quel autre FAI, à la différence que les assos sont essaimées partout en francophonie ; et qu’on va donc plutôt essayer d’agir en tant qu’acteur local. Parce qu’une fois de plus, un FAI associatif, c’est à l’échelle humaine. On peut discuter directement avec, on peut s’investir dedans. Et on peut, bien entendu, se contenter d’avoir une connexion Internet propre, neutre et libre de toute surveillance.

En gros, on est un peu comme une « AMAP » (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) de l’Internet !

Bien sûr, on ne peut pas profiter des tarifs de gros auxquels les gros opérateurs ont accès, donc les accès ADSL sont typiquement un peu plus chers : 35-40€ par mois pour de l’ADSL sans téléphone. Mais d’autres fonctionnements sont possibles: des voisins peuvent se regrouper pour partager une ligne ADSL tout en ayant chacun son adresse IP propre, partageant ainsi les coûts.

C’est une démarche fortement engagée politiquement, qu’est-ce qui vous a poussé⋅e⋅s à vous lancer dans cette aventure et à la continuer ?

Pour n’importe quel être humain ayant été connecté à Internet, construire et cultiver son propre carré vert d’Internet peut sembler être une expérience excitante et passionnante ! La soif d’apprendre, la quête de sens avec la participation à la construction d’un Internet « propre », et le fait de devenir un acteur sur le sujet sont des éléments qui nous ont vite motivés à nous lancer dans cette aventure.

D’autre part fournir de l’accès à Internet avec une infrastructure permet d’aider aussi de nombreux projets à émerger, et aussi d’aider pas mal les copains, nous fabriquons ensemble notre bout d’Internet.

Mais au fait il est à qui le net ? À NOUS !!!

Et au-delà de Aquilenet on entend dire que vous lancez une structure qui s’appelle « C’est le bouquet », qu’est-ce que c’est ? Pourquoi vous le faites ? Qui est-ce que vous visez ?

C’est Le Bouquet est une initiative qui a commencé à pointer le bout de son nez en 2017. Nous avons été contacté⋅e⋅s par un certain nombre d’associations ou de collectifs, qui voulaient plus que les services qu’Aquilenet fournit historiquement. Il leur fallait un ensemble d’outils propres, dégooglisés – le lectorat saura de quoi on parle – et sous leur contrôle. Des outils fiables, parce qu’on parle d’associations, ONG, collectifs, et que leurs communications doivent être sous leur contrôle : courriels, travail collaboratif… Pour tout cela, il faut du libre, sur un réseau qu’on sait propre, en lequel ils peuvent avoir confiance et qui sera maîtrisé sur toute la chaîne ou presque.

Alors l’idée a germé de créer quelque chose qui proposerait un bouquet de services libres et neutres, avec tout ce qu’il faut pour que ces structures puissent travailler efficacement. C’est le bouquet était né !

À cela s’ajoute la création d’outils permettant de gérer l’ensemble efficacement, et la mise en place de formations et de SAV pour pouvoir en permanence répondre aux questions, intervenir au besoin, sensibiliser et éduquer à des manières de travailler qui seront parfois nouvelles.

Courriels, CRM, pads, hébergement de document, newsletters, listes de diffusion, et bien plus encore : tout le nécessaire sans Google, équipé de logiciels libres, hébergé sur des serveurs propres et locaux, sans filtrage, ni exploitation de données, ni surveillance, et le tout qui passe par l’Internet propre des tuyaux d’Aquilenet !
Il reste encore beaucoup à faire !

Mais… ça ressemble furieusement à un CHATONS ! Vous en êtes un ? Est-ce que vous pensez rejoindre ce collectif ?

Pour l’instant, ni Aquilenet, ni C’est le Bouquet ne se revendiquent CHATONS. Il n’y a pas pour l’instant de décision tranchée sur si oui ou non nous rejoindrions ce collectif… Le débat continue, entre la volonté d’indépendance de toute étiquette et le fait que, concrètement, les idées se croisent !

La preuve en est qu’il n’est pas besoin de faire partie des CHATONS pour proposer des services web de manière éthique ! Dites, comment on fait pour faire un fournisseur d’accès à Internet ? Comment on se connecte à Internet et on l’amène à des gens ?

Il y a de nombreuses façons d’y arriver, le mieux est de venir nous poser la question à la Fédération FDN, nous avons des documentations sur le sujet, nous pouvons accompagner et fournir des ressources pour aider au démarrage. D’autre part nous pouvons mettre en contact avec une association fédérée géographiquement proche du demandeur. Ce qui est motivant c’est que nous continuons à voir de nouvelles initiatives émerger et nous rejoindre.

Est-ce que vous ne faites que fournir de l’accès à Internet à des gens ?

Non ! À vrai dire, la fourniture d’accès à Internet est une toute petite partie de notre activité. On pourrait dégager deux grands axes pour décrire les activités d’Aquilenet. Un premier axe est davantage centré sur les services. Au-delà des accès ADSL, l’association propose également des accès VPN (bon… c’est un accès à Internet en fait), des machines virtuelles, de l’espace de stockage, du mail ou encore de la VoIP. Nous sommes également parmi les fournisseurs de Brique Internet. Nous participons à différents projets comme The DCP Bay, de la distribution de films pour les salles de cinéma indépendantes. Tout ça repose bien entendu sur du logiciel libre et est garanti sans filtrage ! La seconde activité d’Aquilenet est plus d’ordre militant dans le sens où nous travaillons beaucoup à faire connaître la neutralité du net, le Libre ou à communiquer sur des thématiques dont nous nous sentons proches. Nous sommes impliqués localement pour sensibiliser sur ces thématiques et poussons pour un développement de l’Internet local plus accessible aux petites structures.

Capture d’écran du débat entre Pierre Carles et Usul

D’autre part, nous organisons régulièrement des ateliers pour former les gens qui le souhaitent à des technologies très variées. Nous proposons aussi de temps en temps des projections au cinéma l’Utopia à Bordeaux ou des débats avec des intervenants toujours passionnants. Notre dernière projection en date était le documentaire Nothing to Hide dont nous avons participé à la distribution sur Internet. Dernièrement, nous avons également participé à la venue de Pierre Carles et Usul pour une soirée de discussion ouverte à toutes et à tous . Nous essayons aussi d’ouvrir des sentiers pas encore tracés : nous réfléchissons, par exemple, à l’intégration de Duniter, une cryptomonnaie libre qui se veut plus juste, dans nos moyens de paiement !

En interne, nous organisons des ateliers ouverts à toutes et tous, pour permettre à chacun de se former et de s’investir à son échelle. Nous avons lancé des groupes de travail aussi divers que la desserte en Wi-Fi des zones blanches, la communication, l’administration système, l’accueil, le support… Tout le monde peut mettre la main à la pâte quelles que soient ses compétences : on se forme entre nous !

Vous n’êtes pas le seul FAI associatif qui existe, il y a une même, on l’a vu, une fédération, la FFDN, dont vous êtes fondateurs.  Est-ce que vous pouvez un peu nous en parler ? Quelle est vous relation avec cette fédération ?

Carte des fournisseurs d’accès à internet associatifs montrant ceux de la FFDN (en bleu)

Nous sommes parmi les membres fondateurs de la  FFDN, la fédération qui rassemble les FAI associatifs de toutes tailles et de toutes localisations. Nos membres sont par définition également membres de celle-ci, certains y sont très actifs, d’autres non. Elle se compose donc de camarades d’un peu partout, avec qui nous échangeons nos questions, nos évolutions, nos volontés et nos besoins. Nous partageons ainsi nos connaissances tant techniques que, par exemple, juridiques, afin de toujours pousser le groupe vers l’avant. Les bons plans également, comme des solutions de financement de projets par des organismes publics nationaux ou internationaux. Lorsqu’un besoin se fait connaître, des membres de partout peuvent y répondre. Afin de maintenir ce maillage, des points « bilan » sont régulièrement faits par toutes les associations membres de la FFDN : quels sont les projets, les nouvelles, l’état de santé de l’association, ses besoins, etc. En fait, la FFDN nous permet d’être à la fois beaucoup et peu, partout et juste à un endroit. Elle nous donne une force commune sur tout le territoire, tout en laissant un ensemble de petits acteurs agir localement.

Ça fait sept ans que vous existez, vous avez été jusqu’à présent en structure associative classique avec CA, président etc. et vous avez récemment décidé de passer à une structure de collégiale, pourquoi vous avez fait ce choix ? Comment vous vivez cette aventure et qu’est-ce que ça change pour vous ?

Nous venons en effet de voter le passage en collégiale pour Aquilenet. Il n’y a plus de bureau, de président, de trésorier, mais des bénévoles motivé·e·s. Chacun·e a accès aux droits nécessaires aux actions qu’il ou elle entreprend, les tâches sont réparties entre les adhérents volontaires qui auront rejoint la collégiale, et il n’y a aucune centralisation des pouvoirs. Tout repose désormais sur la volonté de chaque adhérent et sur la confiance mutuelle. C’est un tournant humain, égalitaire, et qui vise à décharger des épaules en invitant tout le monde à faire sa part et à partager le savoir-faire. Là-dessus, nos craintes sont relatives : en dehors de questions technico-juridiques, nous avions déjà un système assez proche de la collégiale. Quiconque voulait faire avait le droit de le faire. L’idée, c’était d’officialiser ça une bonne fois pour toutes !

Et en plus de cette transformation vous avez également désormais un local ! C’est aussi un grand changement, en quoi ça vous impacte ? Qu’est-ce que ça vous permet de nouveau ? On me souffle que vous êtes en train de lancer un data-center associatif, qu’est-ce que c’est et à quoi ça sert ?

On l’a dit plusieurs fois depuis novembre, lors de nos réunions : c’est quelque chose d’important. Nous avons un lieu où nous nous rencontrons, de manière bien plus régulière et libre qu’auparavant. Depuis sa création, Aquilenet se rassemblait mensuellement dans un bar. Lorsque des ateliers avaient lieu, on faisait ça où l’on pouvait (souvent au Labx, hackerlab de Bordeaux). En cas de réunion, nous utilisions une salle… dans un bar, encore ! Maintenant, dès que quelqu’un veut travailler, dès qu’on veut discuter de quelque chose, débattre, préparer, planifier, faire un atelier : on se retrouve à « la Mezzanine », notre local. Il y a presque toujours quelqu’un de présent le mardi soir, toujours des petites réunions entre deux, trois, cinq, dix membres. Ça a donné une vraie existence physique à ce qui était, la majorité du temps, des appels, SMS, emails, échanges sur IRC.

Data-center en tout début de construction – CC-BY-SA – Bram

 

Si le local s’appelle « La Mezzanine », ce n’est pas pour rien : il s’y trouve une Mezzanine que nous allons transformer en data-center associatif. Il possède son propre réseau électrique à part du reste du local, d’origine 100% renouvelable. Une fois que tout sera en place, tout le monde pourra librement y installer son serveur, quelle que soit sa forme et sa taille, du Raspberry Pi à la tour de PC, et l’y poser. Nous fournissons l’énergie, la connexion, au besoin des IP Aquilenet, tout ce qu’il faut ! Un groupe de travail planche actuellement dessus. Il y a du travail encore, mais ça prend forme petit à petit !

Et comment vous rejoindre dans cette belle aventure ?

On est joignables en permanence par courriel depuis la section contact de notre site Internet, et tout le nécessaire pour adhérer à l’association et/ou profiter des services qu’on propose y est disponible ! Et pour plus de chaleur humaine (et de bière1), on se donne rendez-vous chaque premier mardi du mois, 21h, à la mezzanine, le local d’Aquilenet – 20 rue Tourat, Bordeaux, pour accueillir à la fois les membres, les curieuses et les curieux !

Un mot de la fin ?

Devenir fournisseur d’accès Internet est à la portée de tous, si vous n’en avez pas dans votre région et êtes motivés n’hésitez pas à nous contacter, c’est une formidable école sur le fonctionnement de l’Internet et c’est aussi une contribution très utile au développement de la liberté dans notre pays. Enfin sachez que nos associations sont toujours ouvertes à toute personne motivée qui souhaiterait nous aider, les thématiques ne manquent pas et ne sont pas uniquement que techniques, vous êtes toutes et tous bienvenus !

« Sous les pavés, la fibre ! » 😀
Une autre fin du net est possible.
Hacker vaillant rien d’impossible !

 

  1. L’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération.



Robin, stagiaire chez Framasoft et porteur de projet

Vous ne connaissez pas Robin ? C’est le stagiaire qui a conçu les pages Framasites dont nous parlions ici, ou plus exactement le logiciel libre qui les fait tourner, à savoir PrettyNoémieCMS

Si son stage est terminé, nous ne pouvions pas le laisser partir sans parler avec lui de sa démarche, ses projets, etc.

Pour le plaisir, nous avons décidé d’illustrer ce long échange de captures d’écrans de pages Framasite qui ont retenu notre attention.

Cliquez pour découvrir cette page Framasite qui explique comment faire une page Framasite. Hyper-méta, tavu.

Portrait de Robin

Bonjour Robin, peux-tu te présenter en quelques phrases

J’ai bientôt 30 ans et j’ai un parcours avec plein de virages qui m’ont fait passer par les cases école d’ingé, CAP cuisine, travail social… le tout avec des fortes valeurs éthiques et un intérêt particulier et assez central pour l’abolition du capitalisme (lectures, engagement militant, syndical, squat…). le dernier virage m’a amené à l’envie de créer un outil numérique d’émancipation sociale dont l’idée a pointé pendant le mouvement contre la loi travail, j’ai donc dû passer à l’apprentissage du code pour pouvoir le réaliser.

Comment on se retrouve stagiaire pour Framasoft avec ce parcours ?

Framasoft me permettait plusieurs choses intéressantes : découvrir de l’intérieur le monde du libre et de la production collaborative de services web, me faire une expérience intéressante en développant pour eux, et peut-être de faire de ce stage un tremplin pour mon projet… d’éviter enfin de me retrouver à bosser gratuitement pour une entreprise dont la finalité est le profit. J’ai fait une candidature spontanée en parlant de mon parcours de mon projet et de mes valeurs, et ça a très vite collé.

Comment as-tu été accueilli ?

J’ai rien à redire sur mon accueil, à la fois carré et sans laisser de faux espoirs et de fausses promesses et en même temps très chaleureux, rémunéré en plus ce qui est rare… Je suis quelqu’un d’autonome et je m’y suis bien retrouvé, les impératifs de la campagne de financement de fin d’année ne permettaient pas forcément à l’équipe de me tenir par la main, mais j’aime bien la liberté que ça m’a permis. et puis j’ai pu ressentir tout au long de mon stage une grande confiance dans les choix que je faisais et ça a été très encourageant.

Quelle était ta mission / ton cahier des charges ?

J’étais censé réaliser des améliorations de l’interface utilisateur du dernier service proposé par Framasoft : Framasite. L’idée était d’offrir une expérience utilisateur assez proche de la simplicité d’un WIX pour que n’importe qui, sans aucune compétences spécifique en informatique, puisse mettre en ligne un joli site web en quelques clics dans une interface très intuitive. La voie que je devais explorer pour y parvenir consistait à améliorer le CMS sur lequel était basé Framasite, en lui ajoutant tout plein d’améliorations le rendant plus simple à utiliser.

cliquez sur l’image pour découvrir ce fan-site consacré à Pepper and Carrot

 

…et finalement, tu as plongé dans le code et qu’est-ce que tu as découvert ?

Framasite est basé sur GRAV, un CMS au code élégant, qui permet de générer des pages assez rapidement avec relativement peu de compétence en PHP puisque il utilise un mélange de markdown, de fichier de configuration en YML et de templates en TWIG. beaucoup d’aspects sont très automatisés, et cela amène une grande élégance du CMS, comme par exemple la génération automatique des formulaires du panneau administrateur… Pourtant cette automatisation rend très difficile d’adapter l’interface afin d’offrir des parcours utilisateurs simplifiés pour la construction des pages, comme de regrouper certains champs d’un formulaire, n’en faire s’afficher que certains, ou de manière progressive… Il est très difficile de partir de l’expérience utilisateur souhaitée pour réaliser le code correspondant, et l’on se retrouve toujours avec des solutions de « bricolage ».

L’image que j’ai en tête pour des personnes pas très familières avec le code : c’est un peu comme essayer de construire une belle armoire normande à partir d’une armoire IKEA, vu de loin ça a l’air pratique parce qu’on est pas très loin du résultat attendu, mais peu à peu on se rend compte que le design initial est très limitant, et oblige finalement à réaliser un travail bien plus laborieux et complexe que de partir d’un bon tas de planches et d’outils performants… d’autant plus que l’on me demandait que mes modifications restent compatibles avec les mises a jour de GRAV, et donc, pour filer la métaphore, que l’armoire IKEA ne soit pas cassée dans l’opération.

Bref : Un vrai casse-tête.

Donc tu n’as pas rempli ta mission ? C’est un terrrrrrible échec qui te tourmente jour et nuit (debout) ? Comment a réagi la personne qui assurait l’encadrement de ton stage ?

J’ai assez rapidement été découragé de suivre l’option d’une modification de Grav pour obtenir l’effet attendu, et je suis revenu des fêtes de fin d’année en me disant que même si mon stage durait 6 mois, je ne crois pas que j’arriverais a faire mieux pour simplifier la création de site par mon utilisateur que de l’orienter vers un hébergeur solidaire offrant une installation de wordpress à la volée… donc j’en ai parlé à l’équipe et à la personne qui m’encadrait sans trop savoir ce qui allait advenir, j’étais prêt à peut-être partir sur un autre stage… c’est pas facile de remettre en question totalement les choix fait par une équipe, je sais qu’en cuisine ou ailleurs, ça aurait signifié une fin de contrat plus ou moins houleuse…

Mais bon, mes arguments ont été plutôt convaincants, et on est assez vite arrivé a une solution qui m’est venue assez tôt dans le stage, créer un outil simple depuis le début en utilisant un framework PHP nettement plus bas niveau qu’un CMS, et surtout en partant d’une idée de ce que je souhaitais offrir à l’utilisateur plutôt que de partir de quelque chose d’inadapté pour le bidouiller.
Ça a été très motivant et en une quinzaine de jours j’ai pu réaliser une version limitée de cet outil, et j’ai eu de très bons retours, à la fois de mes amis non-codeurs qui étaient très intéressés par la simplicité avec laquelle ils pouvaient réaliser un site web mais aussi par les membres de l’équipe qui étaient très enthousiastes.

Une question de détail par un gars sur Mastodon (Llaq @lelibreauquotidien) : Hé, @Framasoft, pourquoi vous avez appelé le CMS des pages Framasite « PrettyNoemieCms » ?

Oh ben je suis amoureux d’une fille qui s’appelle Noëmie, donc le nom est venu comme ça… le premier nom c’était Easy ShowcaseSite CMS… c’est quand même mieux Noemie CMS, non ? Enfin moi je trouve. Il y a un proverbe dans le libre qui dit que c’est ceux qui font qui ont raison, et vu que c’est moi qui l’ai fait, c’est moi qui ai raison.

Comment a été accueilli ton travail, par Framasoft et par le public ?

À la fin de mon stage, l’outil a été mis en ligne et j’ai tout de suite eu pas mal de bons retours, celui qui m’a fait le plus plaisir c’était quelqu’un qui m’a dit : « c’est le plus simple des CMS ». je sais pas si on peut être aussi catégorique, mais si j’ai réussi à créer un outil auquel on pourrait mettre juste une demi-étoile sur 5 de difficulté, j’aurai vraiment réussi mon pari… En tout cas j’ai fait tout mon possible pour aller dans cette direction. Ce qui me plaît bien aussi c’est des amis non codeurs qui partagent le plaisir créatif qu’ils ressentent en utilisant l’outil, ils me disent qu’ils se sont « amusés » avec Noëmie, ce qui me ravit.

J’ai eu aussi quelques retours de bugs, rapidement corrigés, et aussi plein de personnes qui s’y sont intéressé de près en voyant le potentiel de l’outil et qui m’ont fait part d’idées d’amélioration.
Les membres de l’association m’ont fait part non seulement de leur satisfaction quant à mon travail, mais ils m’ont aussi exprimé qu’ils avaient été impressionnés par ma capacité à sortir quelque-chose d’aussi abouti et de fonctionnel en si peu de temps. Ça me fait chaud au cœur, car je débute dans la programmation, il y a un an et demi je n’avais pas encore écrit une seule ligne de code, et je ne participe à une formation que depuis moins d’un an. Je tiens au passage à remercier chaleureusement Simplon (mon organisme de formation) et son formateur Patrick qui m’ont aidé à prendre peu à peu confiance dans mes capacités de développement, et m’ont guidé dans cet apprentissage.

La page des « Framasoft fan art » de JCFrog nous a fait hurler de rire.

 

Quelle suite pour Noemie CMS ?

Aujourd’hui je pense que ce CMS trouve sa place à côté de ceux déjà existants, grâce a sa simplicité. il ne sera jamais aussi complexe et personnalisable qu’un WordPress ou un Grav, mais il peut trouver sa niche en étant « le plus simple des CMS».

Les contributions sur le Repository vont bon train : déjà 66 issues postées, dont 52 réalisées, 17 merge request, on peut dire que je me sens pas seul sur le projet. Plein de pistes d’amélioration se dégagent, et d’autres que moi se saisissent avec plaisir du projet. Quant à moi je suis partagé entre un projet perso qui me tient vraiment à cœur : HUmanBeing (on en reparlera en fin d’article), ma formation qui s’arrête et le besoin de trouver un moyen pour vivre qui risque de bouffer beaucoup de disponibilités et l’envie de poursuivre le travail entamé sur ce CMS. Ça fait beaucoup d’envies et malheureusement pas suffisamment de temps pour tout faire à 100%.

Dans l’idéal je reprendrais Noemie CMS depuis le début avec un framework JS frontend (Vue-React- angular) afin de rendre l’expérience utilisateur encore plus fluide (pas de rechargement de pages à chaque sauvegarde, possibilité d’aller plus loin dans la complexité du code pour proposer une expérience utilisateur toujours plus simple, et peut-être ajouter la possibilité de créer un site de plusieurs pages… enfin bon, si j’avais plus de temps et pas la nécessité de devoir faire un truc débile, plus ou moins néfaste pour les gens qui m’entourent et dans le seul but d’enrichir un patron pour pouvoir payer mon loyer ces prochains mois c’est ce que je ferais… mais bon… je crois pas que j’en aurai l’opportunité.

En attendant, je vais quand même continuer de faire avancer tout doucement les fonctionnalités, résoudre des bugs, et surtout passer du temps à transmettre aux autres contributeurs « les clefs » de mon code pour qu’ils puissent aussi se l’approprier et le faire évoluer.

Pendant ta période de stage, on t’a aussi obligé à assister à l’assemblée générale de Framasoft, tu peux nous raconter un peu comment ça s’est passé ? Ils t’ont fait quelle impression les membres de l’association ? et le fonctionnement de l’asso, qu’est-ce que tu en penses ?

Ce fut très intéressant, j’ai rencontré plein de chouettes personnes, avec un beau projet en commun. les discussions étaient très riches. je me suis parfois demandé s’ils ne manquaient pas un peu d’ambitions : en effet le bilan financier leur permettrait à mes yeux de s’engager sur plus de projets, en termes de développement direct ou de soutien financier à des projets ; en même temps je comprends tout a fait que la « sérénité financière » de Framasoft est très récente, et je n’ai pas vraiment suffisamment de compétences en gestion pour pouvoir donner un avis là dessus.

Peut-être aussi que ça m’a permis de prendre conscience d’un décalage entre la vision que j’avais de Framasoft et son projet associatif : avant mon stage j’envisageais Framasoft un peu comme une équipe associative de développeurs qui cherchaient à produire des outils libres et gratuits et de la meilleure qualité pour le plus grand nombre, pour le plaisir de pouvoir offrir des services libres et gratuits à leurs utilisateurs… peu à peu j’ai pris conscience que ce qui animait cette association était aussi très militant et axé sur des enjeux « idéologiques » dans le sens de réaliser des actions visant à faire évoluer les consciences, promouvoir le logiciel libre, lutter contre les GAFAM.

Et j’avoue que je me suis moins reconnu dans ces enjeux, Ça peut paraître paradoxal par rapport à mon engagement sur les #NuitDebout, mais en vrai même sur les Nuit debout ça n’a jamais été le côté tribune et réflexion et changements des mentalités qui m’attiraient, mais plutôt le fait de trouver un espace où l’on pouvait participer et collaborer librement avec plein de gens pour produire au mieux toutes sortes de choses sans que viennent se mêler des questions d’argent ni de hiérarchie (cuisine collaborative, organisation de la vie sur la place, résistance contre les flics…). Je crois que je suis pas très militant dans l’âme, dans le sens que j’ai pas la volonté de faire changer les consciences, ce qui m’intéresse c’est plus de partager des expériences de rapports sociaux désaliénés, et d’inviter un max de gens à me rejoindre dans le plaisir que représente le fait de cesser collectivement de se soumettre au fric et à l’état.
Je pense aussi que j’ai pu ressentir un décalage car je suis partagé quant à leur rigueur sur les moyens à employer. J’utilise quotidiennement Google, Chrome, etc. et dans mon travail c’est pareil je vise surtout à utiliser les meilleurs outils dans l’objectif d’offrir des services agréables et gratuits aux personnes qui utiliseront mes travaux sans me préoccuper de leur caractère libre ou non. J’ai tendance à privilégier les outils qui m’offrent pratiquement plus de pouvoir d’agir plutôt que des outils « libres ». Cela ne veut pas dire que je ne reste pas attentif aux effets secondaires de l’utilisation de certains trucs propriétaires, mais je ne les exclus pas d’emblée, et les préfère parfois.

Cliquez pour voir une très, très belle page Framasite : celle du groupe musical Volivent.

 

Tu as eu aussi l’occasion d’intervenir pour présenter ton projet personnel, de quoi s’agit-il au juste ?

C’est ce projet qui m’a amené à l’informatique, guidé dans mon apprentissage des technos du développement web : durant les Nuits debout j’ai pris tristement conscience que 80% des projets ne se font pas car les personnes avec des initiatives se rencontrent trop difficilement. Du coup j’ai essayé de remédier à cela en faisant du lien, d’abord en notant sur un carnet, puis sous forme de fiches papier et de panneau d’affichage où chacun pouvait partager son projet pour potentiellement trouver des personnes pour le rejoindre. Ça avait plutôt bien marché, même si c’était pas du tout scalable pour parler en termes dev : en effet, en trois jours, il y avait 70 fiches de projets et d’initiatives sur le tableau d’affichage et cela devenait très complexe pour quelqu’un venant sur la place pour la première fois de trouver rapidement un projet sur lequel s’investir.

J’ai donc commencé à créer un outil, en réfléchissant à la manière de répondre au mieux à ce besoin de mise en relation dans le monde non-marchand. En effet, le monde marchand dispose des Pôle emploi et des agences d’intérim pour mettre en lien les gens sur la base de leurs compétences et des projets, alors que le non-marchand n’a pratiquement rien de plus que le bouche-à-oreille, et c’est très frustrant de voir que 80% des projets non marchands sont morts-nés faute de participants alors que très souvent les personnes potentiellement intéressées existent, mais ne sont pas dans le même réseau, le même cercle élargi de connaissance. Et on a la même problématique en ce qui concerne le partage, dans une grande majorité de cas, on se résout à aller au supermarché acheter un truc dont on a besoin alors qu’il y a probablement dix personnes dans le quartier, ou une asso qui produit cette ressource qui pourrait le donner ou le prêter gratuitement.

La troisième problématique à laquelle j’aimerais pouvoir apporter une solution avec cette plate-forme, c’est celle de la multiplication exponentielle des outils collaboratifs lorsqu’on est investi sur plusieurs projets. je reçois par exemple en ce moment les mails de 5 listes de mails bavardes, je suis inscrit sur trois systèmes de chat différents, 2 pads, github et gitlab, et un kanban, tous avec leurs adresses différentes que je perds une fois sur deux… Bref : l’enfer, alors que pourtant je crois être plutôt à l’aise avec l’outil informatique. Je rêve de quelque chose qui pourrait les centraliser sur une plate-forme, avec tous mes projets, et pour chacun des projets son agenda, sa liste de tâches, etc. — et ne plus me perdre dans un dédale d’outils collaboratifs dispersés.

L’idée de HUmanBeing c’est de répondre à ce besoin, en proposant :

  • une plate-forme de mise en relations des utilisateurs sur la base des projets qu’ils créent, de leurs centres d’intérêt, de leur localisation, et de leurs compétences
  • une suite d’outil collaboratifs pour tous les projets créés grâce à la plate-forme : agenda, forum-chat de discussion, liste des tâches.
  • une plate-forme de partage pour que les projets et les utilisateurs puissent partager les ressources dont ils disposent, qu’ils créent et dont ils ont besoin.
  • une plate-forme sans modérateur, dont la modération se fait de manière autonome par des votes de la communauté d’utilisateurs venant réguler les conflits et poser les base de ce qu’elle trouve acceptable ou non, une communauté créant ainsi sa propre légitimité autonome des lois étatiques.

L’objectif et l’ambition de cette plate-forme serait dans un premier temps d’apporter un sacré plus à tous les projets collaboratifs et non-marchands en leurs permettant de scaler et de prendre de l’ampleur au-delà des cercles de connaissances de chacun et donner du coup plus de possibilités d’agir sur le monde à tous ceux qui ont déjà cette éthique de vouloir donner du sens à leurs activités au quotidien.
L’espoir qui m’anime au-delà d’apporter ces possibilités à ces personnes, est lié à ma façon pessimiste de penser l’avenir de la société marchande et de l’état dans leur capacité à répondre aux besoins des personnes. Je m’imagine la prochaine crise économique, lorsque par exemple le ramassage des ordures s’arrêtera en raison de la faillite de ma communauté de communes et que l’accès aux soins sera devenu aussi difficile qu’en Grèce… et je me dis, si à ce moment on a un outil qui me permet de trouver 2 médecins, 4 infirmiers pour faire un centre de soins autogéré, ou alors faire une recherche de 5 chauffeurs poids lourds et 10 autres personnes pour créer une équipe de ramassage des ordures en moins d’une journée… Je me dis que cet outil pourrait être un formidable vecteur par lequel la collaboration, le partage et la gratuité pourraient s’imposer face au capitalisme sur le plan de la production matérielle de l’existence des hommes.

Et je me suis mis à le réaliser.

J’avais commencé en symphony (un framework PHP), mais c’était vraiment inadapté, donc je suis parti sur le framework METEOR JS très à l’aise pour gérer le temps réel : bien pratique lorsqu’il s’agit de collaborer. Pour l’instant j’ai une messagerie en temps réel fonctionnelle (chiffrée end to end), on peut créer un projet, inviter d’autres membres, le rechercher en fonction des compétences, localité qu’ils ont renseignée, chaque projet et chaque utilisateur peut s’exprimer publiquement grâce a un blog tout simple. je dirais que j’ai fait 80 % du travail de réflexion et 40 % de l’écriture du code avant de pouvoir en sortir une version Bêta…

Ça fonctionne pas trop mal en local, c’est même plutôt joli, mais j’ai encore des soucis à le mettre en prod sur une version de démo et pas mal de bugs, dont certains pour lesquels je n’ai aucune piste de solution… mais bon, ça viendra, et je suis hyper motivé, j’ai appris à coder pour pouvoir créer cette plateforme, ce projet me tient à cœur depuis 2 ans maintenant, je suis pas prêt de baisser les bras !

J’ai récemment réalisé une vidéo pour présenter l’avancement du travail que vous pouvez regarder ici :

Cliquez sur l’image pour regarder la vidéo (YouTube)

 

Tu as demandé des retours, ils te les ont donnés, ça ne t’a pas paru trop violent ?

Ben d’une certaine manière les retours étaient très bons, ils ont été impressionnés par la quantité et la qualité du travail que j’avais réussi à réaliser en si peu de temps ainsi que par ma courbe d’apprentissage très rapide. D’autre part, l’objectif émancipateur visé par le projet à fait écho au projet associatif de Framasoft, on pourrait même dire que le projet HUmanBeing vise à inscrire la force de la création collaborative de contenus immatériels du libre (Wikipédia, Linux, etc..) dans la réalité matérielle concrète de la production des besoins des hommes.

Néanmoins à mes yeux trois points font que ce projet n’avait pas les prérequis nécessaires pour pouvoir bénéficier du soutien matériel que j’ai demandé à Framasoft (même si cette interview me permet de le faire connaître assez largement et constitue un soutien qui est toujours bon à prendre).

  • Ce projet pose un rapport radical vis-à-vis de l’État et de l’économie ( « nous n’avons rien à attendre d’eux, créons un outil d’organisation qui nous permet de nous en émanciper »). Je pense que ça s’éloigne de la ligne directrice framasoftienne qui aurait plutôt tendance à vouloir créer des outils favorisant l’économie sociale et solidaire, des outils permettant plus d’interactions citoyennes (framapetition, etc.), avec des valeurs de gauche moins radicales, basées, comme une grande partie de la gauche actuelle sur les valeurs du conseil national de la résistance : un état fort et démocratique gérant la répartition des richesses et le soutien au plus démuni. Il me semble que ce temps-là est dépassé, il appartient a une époque où les hausses de productivité annuelles permettaient au capitalisme ce genre de concessions aux travailleurs, et que l’état et l’économie marchande nous démontrent jour après jour, et année après année que nous n’avons rien à attendre d’eux, si ce n’est l’intensification de l’exploitation de l’homme par l’homme et la destruction de l’écosystème permettant la vie des hommes.
  • D’autre part il me semble aussi que la façon d’envisager ce projet s’écarte de l’idéal de décentralisation poursuivi par Framasoft, dans la mesure ou il se propose de rassembler sur une seule et même plateforme beaucoup de services. dans l’idéal je rêverais que HUmanBeing soit décentralisé, avec plusieurs instances communiquant entre elles sur un réseau commun, mais bon, il me semble que ça ne pourra venir qu’après avoir fait la proof of concept de cette plateforme, un début de comm dessus. Il faut bien se rendre compte que développer une application décentralisée double ou triple le temps de développement.
  • enfin la façon de penser la modération de cette plateforme : autogérée et potentiellement porteuse de projets en-dehors du cadre légal (celui qui fait que les riches sont de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres ou jetés en prison), a pu être perçue à juste titre par Framasoft comme quelque chose mettant potentiellement en danger le reste de ses activités.

Enfin bon, je reste plein d’enthousiasme pour la suite, et sais que quand je suis motivé je suis capable de déplacer des montagnes et de résoudre tout un tas de problèmes. Toujours est-il que le soutien matériel de Framasoft aurait permis de solutionner le problème majeur de savoir comment je vais payer mon loyer si je passe 10 heures par jour à développer une plate-forme non marchande…

On voit qu’il reste du boulot pour mener à bien ton projet, c’est peut-être le moment de réunir une petite équipe de gens intéressés pour contribuer ?
Tu as mis les sources quelque part en ligne ? C’est codé en quoi ? Comment on peut contribuer ?

Ben ouais, carrément ! Le projet est dès le départ très très ouvert à toutes les contributions, le « cahier des charges » s’est fait avec les contributions de plusieurs dizaines de personnes durant les Nuits debout, et au fil du temps je fais des rencontres et j’ai quelques petites contributions extérieures, plus tous mes amis qui me font des retours au fur et a mesure que j’avance dans les fonctionnalités. J’ai bien conscience que c’est un énorme projet et qu’il faudra qu’on soit nombreux à y participer pour que ça puisse exister durablement.

Le projet est donc codé en JavaScript, HTML, CSS, mongoDB autour du framework METEOR JS (et matérialize css pour le front end), qui est un outil assez facile à prendre en mains avec de très bons cours en français et en anglais et énormément de ressources. Il faudrait aussi des personnes avec des compétences en comm’ et aussi des personnes sans compétences particulières, avec juste l’envie de participer à l’aventure, et qui apporteront sans aucun doute au projet toute leur richesse.

Comme dirait un enfant du paradis : A vot’ bon cœur M’sieurs dames !

L’asso te remercie de ton implication et de ton travail et te souhaite une pleine réussite dans tes projets. On te laisse le mot de la fin comme d’habitude.

Je vous remercie de m’avoir fait confiance dans la création de Noemie CMS, et de m’avoir permis de faire ce qui me plaît le plus : contribuer, par mon travail, au bien-être des personnes qui m’entourent.
Je profite aussi de cette interview pour renvoyer vers mon CV (créé grâce aux pages Framasite et donc grâce a NoemieCMS), et informer les lecteurs qui auraient des pistes que je suis actuellement à la recherche d’un emploi.

Merci beaucoup de m’avoir offert cet espace d’expression, ce fut un plaisir de répondre à cette interview.




Montpel’libre, l’asso libre tous azimuts

Jour après jour et depuis longtemps, des associations qui promeuvent les logiciels et la culture libre sont au contact de la population et forment un réseau irremplaçable : celui des GUL (Groupes d’Utilisateurs Linux) ou GULL (Groupes d’utilisateurs de Logiciels Libres).

Leurs activités traditionnelles : install’parties, conférences, stands… ont été complétées par une grande variété d’actions adaptées au contexte local et aux évolutions de nos pratiques numériques.

Nous avons choisi de mettre en valeur l’association Montpel’libre parce que (comme d’autres bien sûr) elle offre un exemple intéressant de diversification et de dynamisme (on y trouve même un groupe Framasoft…), et leurs membres ont été assez sympas pour répondre aux 512 questions que nous avions préparées. Voici une sélection de leurs réponses à plusieurs voix…

 

— Bonjour les Montpel’libristes, est-ce que vous pouvez nous dire un peu à quoi ressemble votre association ?

— Bonjour Frama. En préambule, nous avons remarqué que vous avez utilisé un Framapad pour cette interview, ce que nous comprenons parfaitement. Néanmoins, vous auriez pu utiliser un BIMpad sur nos CHATONS.

BIM pour Bienvenue sur l’Internet Montpelliérain, administré et hébergé localement. Voici la page (en construction) où sont tous les services que nous proposons. Après Dégooglisons, nous sommes aussi passés à Contributopia. 😉

Et pour faire connaissance avec notre association, l’essentiel est sur ce petit flyer

flyer qui résume les activités de l'association Montpel'libre

— Avec ce nom d’association on devine que vous rayonnez sur la métropole occitane, mais on voit aussi des événements vers Nîmes ou Béziers, comment vous vous organisez ?

— Effectivement, notre volonté est de faire la promotion des Logiciels Libres, de la Culture Libre et des Biens Communs à l’origine sur Montpellier, mais très vite nous avons pris une dimension régionale. Aujourd’hui nous intervenons sur l’Occitanie, en partie sur PACA, et avons quelques actions sur l’Afrique et le Québec. Nous souhaitons développer ces actions sur ces territoires en y organisant des Jerry-Party, les RMLL, EPN, coworking, ICC et ESS

Nous sommes créatifs, réactifs, simples et souples. Des personnes viennent vers nous avec des demandes sur les logiciels libres, la culture libre et les biens communs et nous trouvons rapidement et simplement comment faire pour les satisfaire.
Comme nous nous inscrivons dans la durée, nous créons des réseaux que nous mettons en synergie et nous trouvons sur place ou non, les personnes qui peuvent nous aider à mener nos projets : des néophytes qu’on fait monter en compétence comme des personnes chevronnées qui prennent le lead sur les actions à mener. Ce qui les fait adhérer à Montpel’libre et y rester, c’est le fait qu’on écoute leur désir profond et qu’on les accompagne pour créer leur projet, en leur apportant la force du groupe, de ses différentes communautés, personnalités, compétences.

— Quand on lit la liste de des activités de Montpel’libre on est pris d’un léger vertige : mais comment font-ils ?
On imagine vu le nombre d’événements, que vous êtes nombreux et nombreuses, et que de nouvelles personnes viennent dans l’asso, comment se passe l’accueil des nouvelles personnes, vous avez une stratégie ou bien ça se fait tout seul ?

—  Plutôt que de constater une étanchéité des communautés, comme c’est souvent le cas, nous avons choisi de favoriser au sein de Montpel’libre une collaboration active de plusieurs communautés : April, Blender, Emmabuntüs, Framasoft, OpenStreetMap, Site Web/Internet, Wikipédia…, cela nous permet ipso facto d’organiser plus rapidement des événements tel que les Opérations Libres, qui font intervenir les communautés Wikipédia, OpenStreetMap, Framasoft, Blender… ces communautés étant actives dans l’asso, l’organisation s’en trouve plus aisée, efficiente et du coup largement moins problématique.

— Nous n’avons pas forcément de plan triennal, cela ne nous empêche pas de nous projeter dans l’avenir. Nous établissons déjà les activités pour 2019, même si celles-ci ne sont pas encore publiées, AprilCamp, PyConFr, Escale à l’UM, Libre de Droit, RMLL à Montpellier, en 2020 RMLL à Rabat… Bien sûr certaines propositions ne sont qu’à l’état d’ébauche, blockchain, smart city, iot, icc, ess… Du libre pour tous, tout de suite et partout !

Nous ne sommes pas conscients de tout ce qui nous a permis de réussir, mais nous savons ce qui est important pour nous. En premier lieu, nous sommes respectueux des différences et de la diversité. Bien des personnes nous rejoignent parce qu’elles savent qu’avec et dans Montpel’libre, elles vont pouvoir mettre en place leurs idées de façon simple et efficace, quoiqu’elles sachent faire, et s’accomplir dans une ambiance conviviale. Elles aiment aussi la créativité que démontre le groupe.

— En même temps, pour développer et mener à bien des projets, nous avons dans le Bureau toutes les compétences complémentaires nécessaires : nous sommes tous utilisateurs de logiciels libres et membre de plusieurs communautés. En fait, quand on éprouve un besoin, la réponse arrive à point nommé : cela repose sur un long travail de fond, chacun dans nos domaines, un partage dans l’esprit du Libre et une écoute profonde

— Les adhérents sont très divers et participent tous à notre succès : on retrouve beaucoup d’électrons libres et de hauts profils dans différentes matières qui font le numérique libre au sens large, mais aussi des enfants, des institutions, des entreprises, des associations, d’autres Gull, des personnes âgées, des personnes en situation de handicap, des stagiaires, des étudiants, et des personnes venues de plusieurs continents…

Montpel’libre présente les logiciels libres à la communauté Emmaüs de Montpellier (décembre 2015)

 

— C’est cette alchimie qui rend l’association étonnante, spécifique, vivante, organique….

— Je crois que ceux qui participent à nos actions (bénévoles, partenaires, fournisseurs) apprécient aussi notre façon de les mettre en valeur : pour nous c’est ensemble que nous faisons les choses et s’il manque une personne, alors l’action ne peut être aussi belle. Nous remercions toujours chacun⋅e en expliquant quelle part il ou elle a pris dans le succès de l’action.

— En conclusion, on pourrait dire : « Il n’est de richesses que de personnes », et nous agissons avec le temps…

— Votre organisation, c’est plutôt cathédrale ou bazar ?

— La contribution collaborative, la prise de décision, l’émergence d’idée, l’esprit critique, le participatif, sont encouragés dans Montpel’libre. Une cathédrale ? Pas forcement. Un bazar structuré, plutôt !

— En fait, ce n’est ni la cathédrale, ni le bazar, c’est autre chose. Plutôt un Ki : l’énergie vitale et primordiale, celle qui est à l’origine de l’action, se transforme et la transforme en permanence.
Nous exprimons. à la fois la diversité de la vie, sa force et sa capacité à se renouveler:)

— C’est quoi les valeurs que vous promouvez, finalement ?

— Montpel’libre considère les Logiciels Libres, la Culture Libre et les Biens Communs (vous remarquerez que nous avons mis des majuscules à chaque mot 🙂 comme l’ADN de l’asso. Notre sacerdoce repose essentiellement sur la liberté 0, que nous qualifions d’accessibilité. Évidemment l’accessibilité au code pour les logiciels, mais aussi l’accessibilité aux ressources, à la culture, au numérique pour les personnes à mobilité réduite, les déficients visuels, mais pas seulement, issus de la diversité, de culture, d’âge ou de genres différents…

 

Nous rendons accessibles et humains le Logiciel libre, la Culture Libre et les Biens Communs. Entre nous, on en plaisante et on se dit « dealers de bonheur, dis-leur le bonheur ! ». Nous aimons le partage et nous apprécions particulièrement de voir les personnes qui ont participé à l’une de nos actions avec des yeux pleins de lumière et de grands sourires. Nous pratiquons beaucoup l’écoute, le partage et la proximité… mais nous aimons aussi la convivialité : les apéros, les bons repas et danser !

Les bénévoles de Montpel’libre pensent aussi aux plus jeunes (ici atelier jeu vidéo) – Photo Montpel’libre – merci @Natouille

— Votre slogan « Les logiciels logiquement libres » c’est chouette, mais ça laisse supposer que vous ne vous occupez que de la promotion du logiciel libre, alors que vos actions sont bien plus larges...

—  L’asso est née en 2008, il y a bientôt 10 ans, vous imaginez bien que nos actions ont évolué, se sont diversifiées, démocratisées et répandues sur un territoire plus élargi. Aujourd’hui, nous nous trouvons à la jonction des secteurs d’activités du numérique, des industries créatives, de l’économie sociale et solidaire, du développement durable, de la recherche et formation ainsi que de l’éducation populaire.

Montpel’libre c’est un jeu de mot qui durera toujours . Montpel’ n’est pas lié : il est libre. Et nous sommes nés à Montpellier, ça, c’est un fait qui ne changera jamais. En revanche aujourd’hui le slogan devrait effectivement changer pour intégrer la Culture libre et les Biens Communs. Il devrait devenir : « Logiquement libres », tout simplement.

— Est-ce que les RMLL à Montpellier ont contribué à booster l’association ou bien était-elle déjà très active et donc a été candidate et choisie pour cela ?

— Bien sûr que les RMLL ont contribué à booster Montpel’libre, en douter serait nier l’évidence, même si nous avions déjà organisé plusieurs fois des salons (confs/stands…) à l’Université de Montpellier. Thierry Stœhr, Christophe Sauthier et d’autres, l’Université de Montpellier, l’Université d’Évry, l’Université Mohammedia de Rabat, 2iE à Ougadougou y ont participé. Nous avons un peu levé le pied là-dessus, car les gens nous demandaient à cette époque des ateliers, des permanences, des confs, bref de la proximité. Nous réfléchissons à relancer ces salons sur la région.
Avant d’organiser les RMLL, nous avions soigneusement travaillé nos réseaux, organisé ou participé à des événements avec les communautés, organisé certains événements comme l’assemblée générale de l’Aful, l’AprilCamp, une étape du tour de France des Logiciels Libres, les assises du Libre… afin de bien connaître et se faire connaître des communautés, des collectivités, des financeurs…

— Les RMLL ont permis d’attirer à Montpel’libre des professions autres que techniques et donc complémentaires et de fédérer les énergies et les bonnes volontés.
En plus, tous ceux qui ont réalisé un événement international le savent, l’organisation en est lourde et des tensions naissent. Le conflit a ceci de bon, quand il est positif, de permettre de s’asseoir à une table, de dire qu’il y a une difficulté et de trouver comment la régler. Montpel’libre a su passer au-dessus des difficultés. Cet événement a été intégrateur de compétences et fédérateur d’énergies et de bonnes volontés.

— C’est quoi le « gros coup » d’après ? Vous avez bien encore un méga-projet dans les cartons ?

— Chut ! Bien sûr, mais comme c’est un projet sensible, nous en discuterons plus tard, si vous le voulez bien.
Hum, mais qui a parlé d’un seul projet ?

— Vous avez une longue liste de partenaires de toutes sortes, est-ce que certains contribuent au financement de l’association ? Et au fait, comment vit financièrement votre association ? Seulement avec les cotisations des membres ?

— Jusqu’à présent, nous ne nous étions pas posé la question, nous avons agi sur fonds propres, c’est à dire des fonds sortis de nos poches ! Aujourd’hui, ce n’est plus possible vu le nombre et la diversité des activités. Il faut donc faire rentrer de l’argent dans les caisses (voyages, hébergement, pérennisation des activités…)
Le premier argent économisé est celui qui n’a pas été dépensé. Nous bénéficions de beaucoup de mécénats en nature (salles gratuites, personnels de service et gardiennage gratuit et dans certains cas cocktail).
Les cotisations de nos membres sont symboliques parce que volontairement nous voulons être accessibles : tout le monde doit pouvoir bénéficier des services de l’association et participer à l’organisation de l’une de ses activités.
Nous réfléchissons à trouver un, voire des modèle(s) économique(s).

— Bon c’est tout de même un peu agaçant, vous cochez toutes les cases de l’asso dynamique et sympathique en plein développement. Vous n’auriez pas un petit truc qui cloche pour tempérer un peu, je ne sais pas moi, un problème, une inquiétude, un truc dont vous regrettez qu’il ne marche pas ?

— Nous avons les mêmes difficultés que tout le monde pour mettre en place des actions et pour les pérenniser. Nous vivons les mêmes joies et questionnements que tout le monde. Nous croyons profondément en notre liberté et nous respectons celle des autres. Si quelqu’un ne veut pas agir avec nous, c’est sa liberté, nous la respectons et nous continuons notre chemin.
Un point qui est à améliorer : nous ne sommes pas assez présents dans des salons sur le logiciel libre (pas assez de stands, conférences, ateliers…).

— Quelle est le projet qui a le mieux réussi à faire venir à vous des Clapassièrs (les habitants de Montpellier) ?

— Ici, dans le Clapàs des Paysannasses notre réputation s’est faite à partir des cartoparties participatives sur l’accessibilité des personnes à mobilité réduite. Nous avons effectivement travaillé trois ans à l’enrichissement d’OpenStreetMap et de l’OpenData de Montpellier avec la ville, les citoyens et les communautés.
Après les cartoparties qui ont fait connaître Montpel’libre, notre association a permis à ceux qui y adhéraient de faire autre chose et autrement, d’où la diversité de ses actions.

 

 

Le groupe OSM : réunion de travail mais aussi cartopartie sur le terrain…

 

 

 

—  Qu’est-ce que vous souhaitez dire aux habitants qui ne vous connaissent pas encore ? Et plus largement, à tous les libristes et tous les GULL ?

— Osez oser ! Construisez à partir de qui vous êtes, c’est-à-dire des compétences que vous avez, et qui font de vous un individu ou une association différente et unique. Le reste viendra tout seul et vous saurez vous réinventer.

— On vous laisse le mot de la fin mais ce n’est qu’un début, continuez le combat !
Bien sûr :

Montpel’libre n’est pas une entreprise,

mais une asso qui entreprend.

 

Liens utiles