Le nuage de Cozy monte au troisième étage

Tristan Nitot est un compagnon de route de longue date pour l’association Framasoft et nous suivons régulièrement ses aventures libristes, depuis son implication désormais « historique » pour Mozilla jusqu’à ses fonctions actuelles au sein de Cozy, en passant par la publication de son livre Surveillance://

Nous profitons de l’actualité de Cozy pour retrouver son enthousiasme et lui poser quelques questions qui nous démangent…

— Bonjour Tristan, je crois bien qu’on ne te présente plus. Voyons, depuis 2015 où tu es entré chez Cozy, comment vis-tu tes fonctions et la marche de l’entreprise ?

Tristan Nitot par Matthias Dugué, licence CC-BY

— Ça va faire bientôt trois ans que je suis chez Cozy, c’est incroyable comme le temps passe vite ! Il faut dire qu’on ne chôme pas car il y a beaucoup à faire. Ce job est pour moi un vrai bonheur car je continue à faire du libre, et en plus c’est pour résoudre un problème qui me tient énormément à cœur, celui de la vie privée. Autant j’étais fan de Mozilla, de Firefox et de Firefox OS, autant je détestais l’idée de faire un logiciel libre côté navigateur… qui poussait malgré lui les gens dans les bras des GAFAM ! Heureusement Framasoft est là avec Degooglisons-Internet.org et CHATONS, mais il y a de la place pour d’autres solutions plus orientées vers la gestion des données personnelles.

C’est quoi l’actualité de Cozy ?

La grosse actu du moment, c’est le lancement de Cozy pour le grand public. Le résultat de plusieurs années de travail va enfin être mis à disposition du grand public, c’est très excitant !

Fin 2016, nous avons commencé une réécriture complète de Cozy. Ces deux derniers mois, nous avons ouvert une Bêta privée pour près de 20 000 personnes qui en avaient fait la demande. Et puis hier, nous avons terminé cette phase Bêta pour ouvrir l’inscription de Cozy en version finale à tous. Autrement dit, chacun peut ouvrir son Cozy sur https://cozy.io/ et disposer instantanément de son espace de stockage personnel.

Allez, dis-nous tout : qu’est-ce qui a changé depuis le départ de Frank Rousseau ? Cozy a changé de politique ou bien reste fidèle à ses principes initiaux ?

En 18 mois, Cozy a bien grandi, nous sommes dorénavant 35 employés à temps plein, donc plus de structure qu’avant, plus de méthode, ce qui implique une accélération du développement. Par ailleurs, nous avons réécrit une très grosse partie du code, qui donne cette fameuse Cozy V3, plus rapide, plus économe en énergie et en ressources (c’est important !) et aussi plus jolie et beaucoup plus ergonomique. Nous avons aussi développé des applications de synchro pour GNU/Linux, MacOS, Windows, Android et iOS. Ce qui n’a pas changé, par contre, c’est notre attachement au logiciel libre, à la sécurité des données et au respect de la vie privée.

On peut avoir les chiffres ? Combien de particuliers se sont installé une instance cozycloud sur leur serveur/raspberry/autre ?

C’est difficile à dire car nous ne pistons pas nos utilisateurs. On sait juste qu’il y a eu quelques centaines de téléchargements de la version 3 par des gens qui veulent s’auto-héberger. Nous faisons des ateliers pour apprendre à installer Cozy et les places y sont rares tellement elles sont demandées ! Mais on imagine que pour des raisons de sécurité et de simplicité, la plupart des gens vont choisir de se faire héberger par Cozy Cloud. Je viens de vérifier, nous avons plus de 8000 instances Cozy sur notre infrastructure en Bêta fermée. Maintenant que nous venons de passer en version finale, nous espérons que ça va grimper très vite !

On voit bien quel intérêt est pour Cozy de s’appuyer sur une communauté de développeurs qui vont enrichir son magasin d’applications. Mais l’intérêt de la communauté, il est où ? Si je suis développeur et que j’ai une bonne idée, pourquoi irais-je la développer pour Cozy plutôt que pour un autre projet ?

C’est une excellente question ! Développer pour Cozy, c’est avant tout développer pour le Web, avec des technos Web, avec une spécificité : disposer d’une API pour accéder aux données personnelles de l’individu et donc fournir des applications innovantes. Cozy, c’est un espace sur un serveur où je peux stocker mes données personnelles, avec en plus des connecteurs pour récupérer des données stockées chez des tiers (données de consommation électrique ou téléphonique, bancaires, factures, etc.) et enfin c’est une plateforme applicative. C’est la combinaison de ces trois choses qui fait de Cozy une solution unique : en tant que développeur, tu peux écrire des applications qui utilisent ces données personnelles. Personne d’autre à ma connaissance ne peut faire pareil. Et en plus, elle est libre et auto-hébergeable !

Cozy en est à la version 3 et on a l’impression que ça évolue peu, malgré le numéro de version qui passe de 1 à 2 et de 2 à 3. Normal ? Est-ce qu’il existe des remaniements importants en arrière-plan qui ne seraient pas perceptibles par les utilisateurs et utilisatrices ?

Cozy est avant tout une plateforme, ce qui veut dire que c’est quand même une grosse base de code. Ça n’est pas juste une application, c’est un truc fait pour faire tourner des applications, donc c’est normal que ça prenne du temps de développement. Ces douze derniers mois ont été consacrés à la réécriture en langage Go pour plus de performance et d’ergonomie. La version 2 était encore très geek et pouvait rebuter les Dupuis-Morizeau, mais maintenant nous sommes dans un logiciel libre avec une finition et une ergonomie visant le plus grand nombre. Nous avons aussi profité de la réécriture du back-end pour revoir les applications Fichiers et Photos ainsi que les connecteurs. Par ailleurs, nous proposons une nouvelle application, Cozy Banks, qui est un agrégateur bancaire.

Un clin d’œil côté CGU – Leur détail est disponible aussi

 

On peut lire les engagements de Cozy sur cette page vie privée et ça fait plaisir. Mais au fait pour la sécurité comment on se débrouille ? C’est compliqué à administrer une instance Cozy sur son serveur personnel ?

J’aimerais pouvoir dire à tout le monde de s’auto-héberger, mais franchement ça ne serait pas raisonnable. Pour le faire, il faut des compétences, du temps, et de l’envie, et c’est trop vite arrivé de mal paramétrer sa machine pour ensuite se retrouver « à poil sur Internet ». Je déplore cette situation, mais il faut voir tout de même que qu’Internet est un milieu hostile, patrouillé par des robots qui attaquent toutes les adresses IP qu’ils trouvent. L’autre jour, lors d’un atelier Cozy sur l’auto-hébergement, on a créé des serveurs temporaires avec des mots de passe un peu trop simples (pour pouvoir les partager avec les stagiaires qui n’avaient pas de serveurs à eux). Résultat : la première attaque a été enregistrée au bout de 37 minutes seulement. Elle a réussi au bout de 3 h, alors qu’on finissait l’atelier ! Monter son serveur est relativement facile, c’est vrai, mais le maintenir en sécurité est nettement plus complexe et nécessite un vrai savoir-faire et l’envie d’y passer du temps. Donc c’est à chacun de décider ce qui lui convient. Cozy laisse le choix à chacun.

Ces applications sont sympas mais pourquoi elles ne fonctionnent pas hors de l’univers Cozy Cloud ? Pas de standalone ? En particulier, pourquoi développer une application pour Cozy, avec les contraintes techniques qui feront qu’elle ne pourra fonctionner que dans Cozy ? Est-ce que cela ne fractionne pas l’écosystème libre ?

En fait, une application Cozy, c’est une application Web, avec la possibilité de faire appel à des API pour accéder à des données personnelles. Comme tu le soulignes, Cozy n’a aucun intérêt à fragmenter l’écosystème libre. Par contre, Cozy veut innover et proposer des choses jamais vues ailleurs, comme l’accès à des données personnelles, et ça passe par les API que nous avons créées, pour aller chercher la donnée dans le file system ou la base de données Couch

On comprend bien que vous souhaitez combattre les silos, mais est-ce que les contraintes de croissance de la startup ne vont pas à l’encontre de cet objectif, menant à une possible dérive de Cozy en tant que silo ? Quelles mesures adoptez-vous pour éviter que Cozy ne devienne un nouveau silo ?

Encore une excellente question. Effectivement, il ne faut pas que Cozy devienne un silo, puisque c’est contraire à nos valeurs. Pour cela, nous avons dès le départ pensé à un certain nombre de choses qui permettent d’éviter cela. Tout d’abord, Cozy est un logiciel Libre, donc son code source est librement téléchargeable (sur https://github.com/cozy/ ) et ceux qui le veulent peuvent l’auto-héberger. Il y a donc une indépendance forte de l’utilisateur qui peut rapatrier ses données quand il le veut. Par ailleurs, pour ceux qui ne veulent pas s’auto-héberger, il est prévu que plusieurs hébergeurs proposent une offre Cozy, pour qu’on puisse déménager son instance et reprendre son indépendance. Si Cozy réussit, ça devient un standard libre. Reprocherait-on à GNU/Linux de s’être imposé sur les serveurs ? Au contraire, on s’en félicite !

Tu parles de SIRCUS (Système Informatique Redonnant le Contrôle aux UtilisateurS) dans ton livre Surveillance:// ; est-ce que CozyCloud en est un, autrement dit est-ce qu’il respecte tous les critères des SIRCUS ?

Avec le concept de SIRCUS, je définis plus des principes que des critères « durs ». La façon dont nous concevons Cozy fait que c’est un SIRCUS à la base, mais ça n’est pas juste Cozy qui décide de cela. L’utilisateur et son hébergeur ont aussi leur mot à dire. Par exemple, si vous installez une application propriétaire sur votre Cozy, vous vous éloignez du concept de SIRCUS. Ou si un hébergeur vous propose de l’espace disque gratuit en échange de publicité ou de fouiller dans vos données, ou si vous désactivez le chiffrement… c’est pareil : ça n’est plus vraiment un SIRCUS (voire plus du tout !).

En même temps, on l’a vu avec la problématique de l’auto-hébergement, c’est difficile d’avoir un SIRCUS «100 % pur ». Je redoute cette idée de pureté absolue, parce qu’elle est difficile à atteindre et peut décourager le plus grand nombre qui se dira « à quoi bon » voire « je n’ai rien à cacher », juste parce que ça semble inatteignable. Chez Cozy, on veut toucher le plus grand nombre avec la meilleure solution possible, pas se limiter à une élite geek, à un 1 % numérique.

Est-ce que toutes mes données personnelles stockées sur Cozy transitent et restent uniquement chez Cozy, et non chez l’un de ses partenaires ?

En fait, ça dépend de plusieurs critères, à commencer par la solution d’hébergement choisie : si vous êtes auto-hébergé, les données sont chez vous. Si vous avez une instance Cozy, ça reste sur les serveurs que Cozy loue à OVH. Si vous utilisez l’application Cozy Banks, laquelle fonctionne en partenariat avec Linxo (nous utilisons leurs connecteurs bancaires), alors vos données bancaires transitent via les machines de Linxo.

Parmi les missions qui sont les tiennes au sein de Cozy, il y a l’objectif de mobiliser la communauté. Est-ce que cette mobilisation a répondu à tes/vos attentes ? Quel message souhaites-tu transmettre à la communauté libriste aujourd’hui ?

La réécriture de Cozy pour faire la v3 a été difficile de ce point de vue-là. Je suis ravi du résultat en termes de performance, de fonctionnalités et d’ergonomie, mais cela a gêné le développement de la communauté, puisque nous sommes restés de longs mois sans « os à ronger » : les anciens connecteurs ne fonctionnaient plus avec la v3, les outils changeaient, la v2 ne progressait plus, bref, pas facile d’animer une communauté dans de telles conditions.

Mais tout cela est maintenant derrière nous avec l’arrivée de Cozy V3 : c’est le moment d’essayer Cozy, d’en parler autour de soi, d’y stocker ses données. J’espère qu’on va réussir avec Cozy ce qu’on a fait avec Firefox, à savoir un produit libre et bien fichu que les non-geeks ont envie d’utiliser et que les geeks et/ou libristes ont envie de recommander. L’arrivée de Cozy V3, c’est aussi l’occasion de l’utiliser comme plateforme pour développer des applications qui tirent parti de données personnelles. Allez voir sur Github ! On organise aussi des meetups et ateliers pour ça, venez et participez ! On peut même voir comment en organiser en régions 🙂

Parlons un peu business. Après une grosse (deuxième) levée de fonds, Cozy peut progresser, mais pour aller vers où ? Est-ce que l’expérience en cours avec la MAIF est un exemple que Cozy veut voir se multiplier ? Selon toi, pourquoi des entreprises comme la MAIF (aussi La Poste, INRIA, EDF, Orange…) adoptent-elles Cozy Cloud ou s’y intéressent-elles? Ce ne serait pas parce qu’elles ont peur de se faire dépasser dans leur domaine d’activité par le grand méchant Google ?

La vérité, c’est que presque personne n’a intérêt à ce que les GAFAM dominent le monde : ni les consommateurs, qui sont transformés en bétail produisant de la donnée et consommant de la pub ciblée, ni les entreprises qui sont à deux doigts de se faire uberiser. Les États aussi ont beaucoup à perdre, vu l’optimisation fiscale hyper agressive des GAFAM. Donc redonner aux entreprises les moyens de repenser leur relation client avec des moyens techniques permettant de respecter la donnée personnelle, ça a du sens, beaucoup de sens ! Donc nous avons la chance d’avoir la MAIF qui est très mûre dans cette approche, qui pourrait nous aider, en proposant un jour des instances à ses clients. Ça nous permettrait de toucher un public plus large avec du logiciel libre respectueux de la vie privée. Je trouve cette perspective très excitante, bien plus que ce qu’on constate actuellement avec des plateformes centralisées et privatrices. Et c’est pour ça que je me lève le matin avec autant d’enthousiasme 🙂

Le respect de la confidentialité des données est un atout majeur de Cozy par rapport à des solutions de cloud hégémoniques. Comment ça se traduit concrètement pour une entreprise qui s’adresse à vous ? Est-ce que c’est perçu comme un avantage décisif ?

Oui, absolument, c’est une des particularités de la solution Cozy. Mais surtout, c’est une opportunité pour les entreprises de battre les GAFAM en changeant les règles du jeu. Les géants de l’Internet veulent les données personnelles pour désintermédier les entreprises ? Ces dernières aident leurs clients à reprendre la main sur leurs données personnelles pour entrer dans une relation client/fournisseur plus saine.

Et finalement comment vous comptez gagner des sous ? Vos investisseurs (MAIF et Innovacom) attendent quoi de votre réussite ?

C’est une question essentielle ! Nous avons annoncé hier le modèle de financement de Cozy, qui est un modèle dit freemium, c’est-à-dire un mix entre un modèle gratuit et un modèle payant. En bref, on peut avoir son espace Cozy gratuitement, mais il est limité à 5Go de stockage. Si vous voulez disposer de plus, il est possible d’avoir 50Go de stockage pour 2,99€ par mois ou pour les gloutons de la donnée, 1000 Go pour 9,99€ par mois. Évidemment, ceux qui veulent s’auto-héberger n’auront pas à payer : le logiciel est libre et gratuit (téléchargeable depuis https://docs.cozy.io/fr/install/debian/ ). Cozy est un logiciel libre et le restera !

Merci d’avoir répondu à nos questions, on te laisse comme il est de coutume le mot de la fin !

On voit bien le succès des services Dégooglisons Internet, on constate que le mouvement CHATONS prend de l’ampleur, et dans quelques jours, c’est le FOSDEM où j’aide à l’organisation d’une salle dédiée à la décentralisation d’Internet et à la vie privée. Et hier, c’était le lancement public de Cozy. Même Mark Zuckerberg, le patron de Facebook, annonçait dans ses vœux qu’il voulait réparer Facebook (attention les yeux, lien vers FB ) et remettre la décentralisation d’Internet à l’ordre du jour, pour redonner à chacun plus de pouvoir sur ses données, donc sur sa vie numérique, donc sa vie tout court. Je pense que ce moment est venu. Nous entrons doucement dans l’ère post-GAFAM. Comme le dit une association que j’aime beaucoup, le chemin est long, mais la voie est libre !

 

 




Un nouveau polar médiéval dans la collection Framabook

Yann Kervran continue à rééditer les enquêtes d’Ernaut de Jérusalem chez Framabook, pour notre plus grand plaisir.

Nous lui avons demandé de répondre à quelques questions à l’occasion de la publication de son deuxième tome, Les Pâques de sang.

Yann, peux-tu nous rappeler qui est Ernaut de Jérusalem ?

C’est le personnage récurrent de ma série d’enquêtes qui se déroule pendant les Croisades, essentiellement dans le royaume de Jérusalem, au milieu du XIIe siècle. C’est un jeune Bourguignon de Vézelay qui vient avec son frère comme pèlerin et qui va rester comme colon. C’est un géant, un colosse dont le physique hors-normes n’est surpassé que par la curiosité. Le premier tome le présentait lors du voyage de traversée, en Méditerranée. Là, on le retrouve quelques huit mois plus tard, pendant les cérémonies de Pâques, à Jérusalem. C’est le moment fort des visites et célébrations pour les pèlerins venus d’Europe.

Ernaut est le fil rouge des intrigues policières, vu que le lecteur enquête dans ses pas, mais c’est aussi un naïf qui découvre un nouveau monde, et qui sert donc de passeur, de guide, pour arpenter cet univers. Celui-ci, que j’ai appelé Hexagora, dépasse d’ailleurs le cadre des enquêtes car je tente de le rendre plus vaste encore, plus complexe, avec un ensemble de récits courts que j’appelle Qit’a. J’ai aussi l’envie d’écrire des textes parallèles, qui n’appartiennent pas au registre policier. Mon espoir est de rendre plus vivante cette période de l’histoire méconnue du grand public, tout en faisant œuvre pour le commun, en caractérisant fortement un univers imaginaire, même si puissamment ancré dans la réalité historique.

Argh, mais c’est de l’Histoire avec un grand H… Rassure-nous, tu nous fais pas un cours non plus, hein ?

Pourquoi ce «Argh» ? L’histoire peut être passionnante, comme n’importe quel sujet, pour peu que le passeur qui t’y emmène soit habile et intéressant. Alors, bien sûr, c’est en effet extrêmement documenté, autant que je peux me le permettre. Dans le cas contraire, ce serait mensonger de s’attribuer l’épithète «historique». Mais je travaille énormément à rendre ça fluide, accessible et indolore pour ceux qui ont des boutons à l’idée qu’on leur demande de dater le siècle de Philippe Auguste.

Les retours que j’ai vont d’ailleurs toujours dans ce sens : le public aime autant le récit en lui-même que l’immersion temporelle et géographique que je propose. Je suis également photographe et reconstitueur, donc je puise largement dans mon expérience personnelle pour rendre sensuelle l’expérience de lecture. Je me souviens qu’un de mes lecteurs de la première édition m’avait dit qu’il avait eu faim à lire le passage d’Ernaut dans les quartiers où l’on s’achetait à manger. Il avait l’impression d’entendre le grésillement des plats sur le feu, de sentir les effluves de pâtes chaudes luisantes de graisse cuite.

Couverture du roman Les Pâques de sang

 

Non, mais on aime bien l’Histoire, hein… Mais faudrait pas en oublier l’aspect roman…

Bien sûr. Il est essentiel pour moi que le lecteur oublie qu’il tient un livre qui propose une vision de l’histoire, avec des sources (que je présente à la fin, pour les curieux et les historiens qui veulent vérifier ma documentation). J’ai l’espoir qu’il accompagne Ernaut dans les ruelles, soit bousculé avec lui dans la foule sur le parvis, s’éponge le front au haut d’une longue côte, avant d’embrasser la vue sur les jardins de Gethsémané où frissonnent les oliviers sous le vent.

Par ailleurs, avec mon premier éditeur, nous avions pas mal échangé sur les dialogues, et c’est lui qui m’a convaincu de créer cette langue pseudo-médiévale, dépaysante dans ses structures et sonorités. Bien que cela demeure un subterfuge narratif, des lecteurs m’ont indiqué que cela les faisait voyager en un «ailleurs». En outre, pour certains, cela les avait fait réfléchir à leur propre usage de la langue, au sens de certaines expressions ou habitudes grammaticales contemporaines. C’est donc bien plus intéressant et efficace que si j’avais tenté de faire des vrais dialogues en français médiéval, qui auraient été indigestes.

Alors, que se passe-t-il dans ce tome 2 ?

Ernaut et son frère Lambert sont en Terre sainte depuis quelques mois. Ils ont écumé tous les sites de dévotion catholique et sont à Jérusalem pour assister aux célébrations les plus importantes, celles de Pâques qui commémorent la victoire du Christ sur la mort. Des événements tragiques viennent ébranler la ville et Ernaut ne peut s’empêcher d’aller y mettre son nez une fois de plus. Mais il y découvrira plus qu’il ne l’aurait voulu, y compris sur lui-même.

C’est l’occasion de découvrir un peu Jérusalem sous son aspect de cité sainte pour la chrétienté médiévale, mais aussi comme ville régie par des pouvoirs et des luttes d’influence. Je me suis consacré à une partie bien délimitée de la topographie, autour du Saint-Sépulcre en gros, mais il y a là déjà beaucoup de choses à présenter, que ce soit d’un point de vue urbanisme, société mais aussi pouvoirs locaux.

Plan du Saint-Sépulcre CC-BY-SA Yann Kervran

J’ai aussi souhaité donner une idée de ce que pouvait représenter la religion pour les simples fidèles. Ernaut est catholique, bien sûr, d’autant qu’il a grandi à l’ombre de la basilique abritant des reliques de Marie-Madeleine. Mais ce terme est trop fourre-tout pour rendre compte d’une réalité fluctuante selon l’époque, la classe sociale et même les personnes. Alors j’ai tenté de mettre en scène ces importantes célébrations religieuses vues de l’extérieur, du profane populaire. J’avais la chance d’avoir le texte complet de la liturgie du XIIe siècle, et j’ai donc travaillé à partir de là pour mettre en place la trame.

Par ailleurs, de nouveaux personnages qui prendront de l’importance à l’avenir sont introduits dans ce tome.

J’ai besoin d’avoir lu le tome 1, La Nef des loups ?

Absolument pas. Chaque nouveau volume initie une enquête distincte qui s’achève en ses pages. Je conseille de lire les tomes dans l’ordre, de façon à pouvoir assister à l’évolution du personnage, de son environnement, mais ce n’est nullement nécessaire. On peut se contenter d’en lire un seul, indépendamment de tous les autres textes Hexagora.

Je conçois l’ensemble de mes écrits de façon cohérente et organisée, mais en laissant à chacun le choix du parcours. Il est même possible de reprendre toutes les sections de mes différents textes et de les réorganiser par date (vu que chacun est précisément daté et localisé) et découvrir comment les choses se déroulent de façon purement temporelle, indépendamment de la cohérence narrative que je conçois pour chaque œuvre que je réalise.

Ce pourrait être un exercice intéressant quoique je crains que ce ne soit vertigineux, j’ai presque 300 personnages et plus de 70 textes qu s’imbriquent dans l’univers Hexagora. D’ailleurs, une édition papier des textes courts Qit’a est prévue chez Framabook, en plusieurs volumes.

La nef des loups était quasiment un huis-clos en pleine mer… Tu as repris la même formule pour Les Pâques de sang ?

Non, j’ai abordé ce second tome de façon complètement opposée. La nef des loups, c’est un whodunnit à la Agatha Christie, avec tous les indices semés pour que le lecteur puisse trouver qui est l’assassin, avec une problématique qui tient un peu de l’exercice de style, du mort retrouvé dans une pièce fermée de l’intérieur. J’avais par ailleurs opposé à ce lieu clos qu’était le Falconus, perdu au milieu des flots un temps extrêmement long, pour dépayser le lecteur. Au XIIe siècle, tout était lent, à l’aune de nos sociétés effervescentes d’aujourd’hui et j’ai beaucoup travaillé cet aspect.

La seconde enquête m’a permis une approche inverse : je suis dans un lieu bien plus large : Jérusalem et ses abords immédiats, mais avec un écart temporel réduit, la Semaine sainte. Je me suis donc attaché à y appliquer un traitement qui tient plus du thriller, avec un Ernaut qui court ici et là, qui s’agite beaucoup plus.

Du coup y’aura de l’action…?

Oui. Je me suis même amusé à concevoir une scène qui fait également partie de l’arsenal narratif du genre policier, mais dans l’audiovisuel : la course-poursuite. J’ai gardé un souvenir extrêmement fort de la scène où, dans French Connection, Popeye Doyle/ Gene Hackman poursuit le métro aérien (tellement un classique que la séquence est même sur YT). Une scène d’anthologie qui a marqué les esprits. Cela m’a donné envie de voir comment je pouvais rendre compte d’une telle intensité avec l’écrit, et sans voiture ni métro. J’ai été très heureux quand des lecteurs m’ont fait part de leur plaisir à lire cette scène qu’ils avaient trouvée haletante, sans bien sûr y détecter une telle influence, fort éloignée.

De façon plus générale, j’ai abordé ce second volume encore une fois avec une préparation formelle assez précise, en étudiant certains codes pour voir comment je pouvais m’en emparer. Cela m’offrait l’opportunité de me frotter à différentes approches du genre policier à travers ses déclinaisons, de façon à laisser à un style personnel le temps d’émerger. J’ai continué avec le tome trois et c’est encore un peu vrai avec le quatre, que je suis actuellement en train d’écrire. Néanmoins, je me sens plus à l’aise pour arpenter une voie moins balisée et il m’est de moins en moins possible de me définir par rapport à un genre précis. Je définis mes propres formes narratives désormais en fonction de la pertinence qu’elles me semblent avoir par rapport à mon projet fictionnel. Cela permet d’avoir une écriture moins affectée au final.

Si ça me plaît, et que je veux contribuer à ton univers, je fais comment ?

Il y a de nombreuses façon de contribuer, mais pour pouvoir créer à partir de mon travail, dans la plupart des cas, le mieux sera de commencer par récupérer tous mes textes dans un format simple (j’utilise le markdown pour rédiger). J’indique comment s’y prendre sur mon site.

Après, si vous avez envie de m’aider à faire connaître le monde des croisades, mon travail d’écriture, vous pouvez en parler autour de vous, diffuser les epubs sur les réseaux pair-à-pair, remplir des notices sur des sites de partage. N’hésitez pas à me contacter à ce sujet si vous avez besoin d’éléments que je n’ai pas encore partagés.
De la même façon, si vous avez l’opportunité d’organiser des rencontres autour de l’histoire, de l’écriture, avec les enquêtes d’Ernaut comme prétexte, prenez contact avec moi. Je suis très disert sur ces sujets et toujours heureux de partager avec tous les publics, étudiants, scolaires ou simples curieux. La grande difficulté aujourd’hui est d’arriver à se faire connaître, donc il s’agit là d’une contribution essentielle.

Je cherche également des partenaires qui seraient intéressés pour traduire vers d’autres langues. Le site Internet a été conçu pour être multilingue et ouvert à la contribution (c’est un moteur dokuwiki en fait), pour accueillir les idées d’autres personnes qui souhaitent participer à l’univers Hexagora, donc n’hésitez pas.

Enfin, une autre contribution, et pas la moindre, c’est le soutien financier. J’ai mis en place une page pour accueillir les dons, en particulier via Liberapay, qui propose le moins de frais de transaction possible. Le support matériel du public est essentiel pour permettre une création sereine et pérenniser mon activité d’écriture. Lorsque vous achetez un livre papier, vous financez surtout les marchands de papier et les transporteurs routiers. Avec les technologies modernes, vous pouvez soutenir directement un artiste.




Enquête #Framavous : à vous de nous dire !

Alors voilà : nous proposons aujourd’hui plus de 50 sites web et outils en ligne.

Les millions de visites mensuelles sur l’ensemble de nos sites nous font suspecter que vous êtes entre 200 et 400 000 personnes à les utiliser chaque mois. Et il est hors de question de vous « pister » pour en savoir plus.

Mais comment savoir dans quel cadre vous utilisez les « framachins » ? Comment connaître vos attentes sur nos projets actuels et à venir, sur nos actions, sur ce que l’on fait et comment on le fait ? Comment apprendre à faire les choses pour vous, avec vous, tout en respectant votre vie privée ?

Et si, tout simplement, on vous demandait ?

OK ! C’est ici : https://frama.link/framavous

 

Nous avons demandé à Recherches & Solidarités, une association indépendante de Framasoft, de créer cette petite enquête sur vos usages et vos attentes. Grâce à leur recul et leur expérience, nous espérons avoir des retours objectifs qui nous aideront à nous aiguiller pour les mois à venir.

Auriez-vous quelques minutes à nous accorder ?

Bien entendu, aucune donnée nominative n’est demandée lors de cette enquête. De plus, Recherches & Solidarités (qui a toute notre confiance) nous transmettra les résultats de cette enquête de manière anonymisée.

L’enquête va être ouverte pendant une quinzaine de jours : à vous d’y répondre ! Participer à cette enquête vous prendra 7 à 8 minutes de votre temps. C’est là une autre manière de contribuer activement à nos actions : si nous faisons ces outils pour vous, vous êtes les mieux placé·e·s pour nous dire ce que vous en attendez, non ?

Merci d’avance à ceux et celles d’entre vous qui prendront le temps de répondre et de partager cette enquête : https://frama.link/framavous




Working Class Heroic Fantasy, le roman-feuilleton qui vous fera l’année

Gee, notre Simon, l’auteur des bandes dessinées GKND et Grise Bouille, que sa plume démange depuis un bon moment comme en témoignent ses nouvelles, se lance dans le roman avec Working Class Heroic Fantasy (notez le jeu de mots, il en est super content, faudrait pas lui gâcher le plaisir).

Gee

Il va publier son ouvrage sous forme de feuilleton (on se demande qui lui a donné des idées pareilles). Pour vous faire découvrir cet univers, les trois premiers chapitres sont disponibles dès aujourd’hui sur son blog, et il devrait poursuive la publication avec un chapitre par semaine.

L’action se passe dans un monde un peu comme le nôtre, avec des open-space, des divorces et des syndicats… Mais aussi avec des elfes, mages, orques et gobelins. Imaginez que nos meilleurs romans de Fantasy soient en fait le chapitre Moyen-Âge de leurs livres d’histoire… Vous y êtes ?

Voilà : c’est la Terre de Grilecques, le monde où vit Barne Mustii, petit employé de bureau chez Boo’Teen Corp, une entreprise qui vend des bottes. Barne est un humain un peu résigné qui subit les brimades de son gobelin de patron, jusqu’au jour où c’est l’insulte de trop. Et si un simple tour à la permanence du syndicat l’entraînait dans une épique lutte des classe contre l’oligarchie orquogobelinesque…?

La couv qui a la classe, et si vous cliquez dessus elle vous mène au premier chapitre.

 

Ne ratez pas ça, c’est féroce et drôle, et ça rebondit comme une balle magique dans tous les sens : dystopie et gaudriole, anarchie et fantasy, non-binarité et lutte des classes. Ce roman, c’est peu comme si Marx et Tolkien avaient eu un enfant qui aimerait bien se poiler avec Pratchett.

Oui, c’est du copinage, ou alors de la publicité en avance, parce que forcément, il le publiera chez Framabook ensuite. Et tant mieux !

En attendant, filez lire ça sur : https://grisebouille.net/working-class-heroic-fantasy/




Graines de troc : cinq ans de partage

Comme beaucoup d’associations, Graines de troc est née un peu par hasard, de rencontres et d’envies. Cinq ans après, Sébastien Wittevert a toujours les mains dans la terre quand elles ne sont pas sur un clavier.

Tripou l’a interviewé pour nous en vue de savoir ce qu’il devenait depuis l’article que l’ami Calimaq lui a consacré. Tiens, tiens, mais alors ce serait encore une histoire de biens communs ?


Comment s’est faite ta transition entre informatique et maraîchage, pour transformer les lignes de code en lignes de carottes ?

J’ai mis le pied par gourmandise dans une AMAP (association pour le maintien d’une agriculture paysanne / de proximité), et j’ai pris l’habitude de venir y chercher mes légumes facilement. A l’heure ou je sortais du boulot, il n’y avait plus grand-chose d’ouvert, et difficile pour moi de me lever pour aller au marché le dimanche. Du coup, j’ai pu avoir accès à un autre monde alternatif, convivial, militant, engagé qui m’a ouvert les yeux, et y rencontrer ma compagne. Après avoir rendu plusieurs fois service aux maraîchers, nous avons voulu voir d’autres formes de maraîchage, et nous avons atterri à la ferme du Bec-Hellouin pour un stage découverte de la traction animale. Séduit par la ferme et les techniques de permaculture, nous avons décidé de nous y former.
En novembre 2011, alors que je remplissais déjà mes poches de graines, suite à de nouvelles lois liberticides sur les échanges de semences, nouvelle atteinte au bien commun des semences. Je me demandais, jeune colibri, que pouvais-je donc faire ?
En alliant mes compétences informatiques, ma passion des graines, et une dose de monnaie complémentaire, j’ai imaginé et codé la plateforme qui a vu le jour en mai 2012.
Après avoir réfléchi le projet agricole, nous avons déménagé à La Rochelle pour y semer les premières lignes de carottes et y faire vivre les balbutiements de l’association.

Graines de troc, c’est une association pour échanger des graines, comment ça marche concrètement ?

Le logo de Graines de troc

La plateforme est aujourd’hui un projet de l’association comme un autre, chacun pouvant y échanger des graines et son savoir-faire.
Le site recense par exemple les trocs locaux qui peuvent avoir lieu en France.
Nous avons également lancé le concept des grainothèques, afin de promouvoir la biodiversité locale, et les échanges, dans un tiers lieu, comme les médiathèques.
Adhérer et agir avec graines de troc, c’est donc un peu tout ça. Faire sa part, pour défendre, promouvoir, échanger et sauvegarder notre héritage commun.

Y a t-il des différences par rapport à semeur.fr ?

Je ne sais pas si Semeur est constitué en association. Mais pour le projet de la plateforme en lui-même, les différences sont le jeton, la gestion/suivi des échanges, la non-mise à disposition du contact des troqueurs.
En fait, il n’y a pas besoin d’obtenir l’accord ou négocier avec un troqueur pour échanger. On peut suivre les échanges. Si l’échange n’aboutit pas, on récupère nos jetons. Et tout le monde est au même niveau, ce qui fait qu’on ne s’adressera pas juste à quelqu’un parce qu’il a une liste longue comme le bras.

Alors comme pour les logiciels, y’a des graines libres et des graines propriétaires, comment les reconnaît-on ?

Les graines commerciales ont effectivement parfois un COV, Certificat d’Obtention Végétale. Pour ce qui est des hybrides F1, inutile de les reproduire et les échanger, ils sont dégénérescents. On les reconnaît car l’inscription est obligatoire sur les sachets de graines HF1 ou F1. Sinon, la législation concerne essentiellement les usages commerciaux. Nous n’encourageons que les échanges de variétés anciennes et reproductibles, et les pratiques naturelles, qui permettent seules une autonomie semencière et alimentaire. Aller utiliser des semences dopées aux engrais de synthèses n’est donc pas notre objectif.

L’érosion variétale, baisse de la diversité des végétaux cultivés

 

Après la graine, sont arrivées les grainothèques, puis les greniers (lieux pour relier les initiatives locales, s’entraider, se réapproprier, échanger ensemble graines et savoir-faire…) puis drôles de jardiniers (animations avec les enfants, conservation variétale,etc.). Quels sont les retours que vous avez de ces différentes initiatives ?

Graines de troc a 5 ans, et nous vivons la jeunesse de chacun de ces projets.

La plateforme attire de nombreux jardiniers, et souffre de son succès, nous nous lançons actuellement dans un projet de refonte. Les grainothèques sont encore en plein essor, les citoyens y voient un moyen de faire leur part et mettre en place un outil de reliance locale, une belle manière de médiatiser la graine. Nous aurons la deuxième réunion des grainothécaires en mai/juin 2018, afin de discuter des retours d’expérience, des ateliers, et différentes évolutions possibles. Les greniers sont en effet, la deuxième marche après la grainothèque, c’est la constitution d’un groupe local, un outil pour fédérer les initiatives locales, les mettre en avant et les relier aux utilisateurs de la plateforme. Il y a de formidables initiatives à soutenir. Nous les soutenons en les mettant en avant, localement.

Pour drôles de jardiniers, c’est une formidable expérience de faire passer aux enfants nos passions pour la graine, la terre. En leur amenant des fondamentaux qu’ils sont rares à connaître chez eux. Cette mission nous sollicite beaucoup sur La Rochelle, mais le projet semble vouloir essaimer un peu partout tant il semble important.

Quelle est la prochaine étape de votre conquête du monde ?

C’est que graine par graine, j’ai bien le sentiment, qu’ensemble, avec un grand nombre d’acteurs, on arrive à nourrir les consciences. On ne se sent plus du tout seul ! Les graines s’échangent, elles poussent, et gagnent du terrain.
Plus pragmatiquement, nous concernant, nous souhaitons vraiment limiter le frein que nous imposent les problèmes techniques pour améliorer les échanges, avec le projet de refonte de la plateforme. Cela pourra nous permettre de mieux nous concentrer sur les graines, les savoirs-faire, et réussir à aider la myriade de petits colibris semeurs qui œuvrent partout, mettre la lumière sur cette biodiversité si belle et gourmande, celle qui nous nourrit et nous soigne. Plus d’autonomie et de conscience, plus de mains dans la terre plutôt que sur un clavier…
La prochaine étape est locale, et entre les mains de chacun, sur chaque territoire, dans chaque école, dans chaque jardin, dans chaque champ, et que cette biodiversité regagne sa place, avec tout ce que cela implique pour notre alimentation, autonomie, santé, et notre regard sur la terre et l’environnement.

Comment ça se passe si je souhaite participer à un de vos projets ?

Ça va dépendre des projets.

Pour la plateforme, et sa refonte : nous sommes en train de former le groupe de travail et les équipes qui vont y travailler. Nous aurons besoin d’informaticiens, mais aussi de testeurs, de conseils.
Pour la partie échanges : il suffit de participer en ligne, mais il y a aussi les trocs locaux bien réels, que la plateforme met en avant. N’hésitez pas à inscrire ces événements dans l’agenda des graines afin de les faire mieux connaître.
Pour le projet grainothèque, c’est une initiative citoyenne libre. Il est possible de proposer le dispositif dans les lieux qui vous sembleront utiles. Il faut ensuite idéalement faire vivre cette initiative, mais il est possible qu’il en existe déjà, vers lesquelles il suffit de se rapprocher. Apportez le surplus de graines de vos jardins !

Pour le projet, « j’adopte une graine », nous le lançons tout juste, et il s’agit de cultiver une variété particulière, de la graine à la graine, et de nous renvoyer une part de votre production afin de contribuer à son essaimage. Le projet est également pédagogique, car si vous participez, récupérez des graines, vous apprenez aussi son itinéraire cultural et semencier !
Pour aider localement, depuis chez vous, ou sur un projet de l’association en France, nous avons établi un questionnaire afin de proposer à chacun de nous aider selon son lieu, ses envies et sa disponibilité : http://grainesdetroc.fr/article.php?id=396. Par exemple : ensacher des graines, reproduire des semences, rejoindre un projet de jardinage local, proposer vos compétences …

Quelles seront les fonctionnalités du nouveau site Internet ?

Nous souhaitons effectivement refondre notre plateforme afin de moderniser un site initialement très amateur, apporter les nombreuses améliorations que nous avons imaginées en 5 ans, et construire les outils dont l’association a besoin avec sa dimension actuelle. Nous prévoyons des outils pour faciliter les échanges, des outils de communication et de reliance pour les groupes locaux de l’association, et nous permettre de mieux communiquer sur la vie de l’association, sur les histoires de graines … et des projets qui germent un peu partout…

Nous faisons cette interview au mois de novembre, il y a des choses à semer actuellement, quelles graines à récolter ?

Dans notre région, on peut se permettre de semer pas mal de choses : mâches, épinards, fèves, pois, et on tente aussi des semis plus risqués, car à la vue des changements qui nous attendent, ça vaut le coup d’essayer. Des laitues, des engrais verts, des carottes…
En novembre la récolte de graines est sur la fin. Normalement il pleut trop, c’est trop humide de manière générale, mais comme un peu partout il ne pleut pas assez, on en profite pour récolter sur les derniers portes graines. Maintenant, on extrait plutôt à l’intérieur les graines de courges par exemple ou les portes-graines qui sèchent…

 

humour

Un dernier mot à ajouter ?
Chapeau à l’équipe Framasoft pour son engagement, et à l’exemple qu’elle concrétise en défendant nos biens communs. Merci pour mettre en œuvre la reliance nécessaire à nos causes communes, et pour le plaisir à l’idée que se croisent nos causes à l’occasion d’un projet concret…




Merci de nous avoir donné les moyens de continuer !

Le 21 novembre dernier, à l’occasion de l’annonce du projet Framatube, nous avons lancé un appel aux dons : il nous manquait 90 000 € pour boucler notre budget 2018, sachant que notre principale ressource (90 % de notre budget), ce sont vos dons.

Mer-ci !

Aujourd’hui, nous avons atteint cette somme, alors nous voulons prendre le temps de vous dire, tout simplement : merci.

Soutenir et contribuer à nos actions

Chez Framasoft, nous voyons vraiment notre petite association (qui, rappelons-le, est et reste une bande de potes) comme un lieu d’expérimentation concrète des libertés numériques. Y’a des idées qui nous tentent, alors on se lance, et cela nous permet de nous rendre compte si l’idée parle et si sa réalisation est possible, reproductible, dans quelles limites et avec quels moyens.

Vos dons nous soutiennent en cela : nous vous racontons ce que nous faisons, nous annonçons ce que nous allons faire (par exemple avec notre feuille de route pour les trois années à venir : Contributopia). Si vous voulez nous voir avancer dans cette voie, une des manières (et pas la seule !) de nous soutenir et de contribuer, c’est de nous donner de l’argent. Considérer vos dons comme autant de contributions est quelque chose d’assez inhabituel, en fait.

Merci à Aryeom, du projet Ze Marmott pour cette bien belle illustration !

Aujourd’hui, dans la culture des financements participatifs (crowdfundings) où tout don est soumis à une contrepartie, on essaie de transformer la personne qui donne en une espèce de consommatrice, de « client-roi » qui aurait le droit d’afficher des caprices (« je donne si vous faites ceci ou ne faites plus cela », « je donne donc vous devez répondre oui à ma demande », etc.). Cela crée l’illusion de décider sur des détails, mais aucunement le pouvoir de participer à la production commune, ni de s’en emparer après coup.

Ce fonctionnement-là ne nous parle pas. Vos dons sont parmi les indices qui nous indiquent si nous tenons la barre vers le bon cap. Visiblement, affirmer que Dégoogliser c’est bien mais ça ne suffit pas, aller explorer les outils numériques des mondes de Contributopia, c’est un chemin que vous avez envie de parcourir avec nous. Mine de rien, savoir que nos envies résonnent avec les vôtres, voir votre enthousiasme, cela fait chaud au cœur, alors merci de votre confiance.

À quoi va servir votre argent ?

Alors nous avons déjà détaillé cela dans notre dernière newsletter, donc on peut vous dire que, dans les grandes lignes, nous allons continuer. Pour 2018, cela signifie :

Contribuons ensemble vers cette Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Ça fait court, dit comme ça, mais mine de rien, nous allons avoir une année bien remplie, et des projets qui vont vous demander, régulièrement, d’intervenir et de vous en emparer si vous désirez que cela avance.

De fait, si nous avons atteint les moyens nécessaires pour accomplir ces actions en 2018, il n’est pas trop tard pour donner : nombreux sont les projets que nous avons budgetés de manière raisonnée, et qui seraient accélérés par des fonds supplémentaires. On pense, notamment, à l’avancement de Framatube après mars 2018 : plus nous dépasserons la barre fixée, mieux nous pourrons accompagner ce projet après ce lancement.

Essaimer c’est aimer

Ce n’est pas pour rien que l’on dit « copier, c’est aimer » : les projets libres sont des communs, et ils ne s’épanouissent que si chacun et chacune d’entre nous les cultivons. Par exemple, grâce à vous, nous avons pu accomplir de bien belles choses en 2017 :

Dégooglisons Internet, vu par Péhä (CC-By)

Encore une fois, un immense merci à toutes les personnes qui nous ont soutenus cette année (et aussi à celles qui ont soutenu d’autres associations comme, par exemple, La Quadrature du Net, Nos Oignons  ou l’April).

Et si ce n’est pas encore le cas : n’hésitez pas ! Rappelons que 100€ de dons en 2017 vous permettront de déduire 66€ de vos impôts en 2018… une belle manière de contribuer à nos actions en utilisant vos… contributions 🙂 !
Soutenez Framasoft

Toute l’équipe de Framasoft vous envoie plein de datalove, et vous souhaite de belles fêtes, dans le partage et la chaleur commune.




Framatube : fédération et design de PeerTube

Cela fait quelques semaines déjà que Chocobozzz a rejoint notre équipe pour se consacrer au développement de PeerTube, le logiciel que l’on vous présente sur Framatube.org.

L’occasion de faire un premier point d’étape, avec quelques belles nouvelles à vous annoncer !

Fédérer c’est bien, bien fédérer c’est mieux.

Pour rappel, Framatube ne sera qu’une des portes d’entrée des fédérations PeerTube. Et Framatube n’hébergera pas vos vidéos : nous préférerons vous accompagner pour créer votre propre hébergement PeerTube (ou rejoindre un existant), afin que se multiplient ces portes d’entrées, ces instances de PeerTube.

Car c’est un des gros intérêts de PeerTube, pouvoir faire en sorte que chacune de ces instances, que chacun de ces sites d’hébergement de vidéos puisse se relier aux autres, se fédérer. Le tout est de savoir comment fédérer !

Pour cela, PeerTube vient d’implémenter une première version du protocole ActivityPub [EN]. Pour ceux qui ne le connaîtraient pas, il s’agit d’un protocole de fédération développé par le W3C. C’est-à-dire qu’on standardise la manière dont différentes instances communiquent. Si deux plateformes différentes savent parler la même langue, alors elles peuvent s’échanger des données. Ça n’a l’air de rien comme ça mais ça ouvre des possibilités immenses aux logiciels décentralisés.

Imaginez que demain MediaGoblin implémente le protocole ActivityPub (et ce sera normalement le cas !) et soit compatible avec PeerTube, alors votre ami qui avait installé ce logiciel sur son serveur pourra envoyer l’index de ses vidéos à votre serveur PeerTube et vice versa. Vous pourrez chercher n’importe quelle vidéo stockée sur son serveur (ou encore d’autres serveurs !) en restant tranquillement sur votre interface web PeerTube. Au lieu d’avoir des plateformes concurrentes, nous avons un réseau fédéré encore plus puissant à l’aide de la collaboration. Et c’est une valeur qui nous est chère, dans le libre.

Illustration : CC-By-SA Emma Lidbury

 

Mais ça, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Là où ça devient vraiment très excitant, c’est lorsque deux plateformes n’ayant pas la même fonction communiquent entre elles. Imaginez une instance Mastodon, qui est une alternative décentralisée à Twitter avec plus d’un million de comptes et qui implémente déjà le protocole ActivityPub. Imaginez maintenant une instance PeerTube avec un vidéaste que vous appréciez et qui poste régulièrement des vidéos. Est-ce que ce ne serait pas génial de pouvoir le suivre via votre interface Mastodon, et de voir des statuts dans votre fil d’actualité contenant directement la vidéo à chaque fois qu’il en publie une ? Eh bien ce sera possible.

Mais là ou ça deviendra vraiment très, très excitant, c’est que lorsque vous répondrez au statut de la vidéo sur Mastodon, le message sera envoyé ensuite à l’instance PeerTube. Votre réponse sera donc visible en dessous de la vidéo, dans l’espace commentaire. Bien sûr si une autre personne à l’autre bout du monde répond à votre commentaire via son instance PeerTube ou Mastodon, vous le verrez comme une réponse à votre statut dans Mastodon. Si demain Diaspora (l’alternative à Facebook derrière Framasphere) implémente ActivityPub, ce sera la même chose. Nous aurons une multitude de plateformes capables de fédérer les commentaires.

Il a l’air balourd, mais ce vieux mastodonte pourrait bien écrabouiller Twitter, si nous nous laissions aller à le choisir…

 

On reproche souvent à raison aux alternatives libres de ne pas avoir de valeur ajoutée par rapport aux plateformes centralisées. Avec ActivityPub, voilà notre premier gros avantage. Car avec les plateformes centralisées, vous aurez du mal à avoir sous votre vidéo YouTube les réactions des personnes qui auront commenté sur Facebook, Twitter, DailyMotion, etc. 😉

Bien sûr, nous n’y sommes pas encore.

Il reste un peu de travail dans PeerTube pour améliorer l’implémentation d’ActivityPub, puis tester la communication avec les autres plateformes. Mais les premiers retours sont très encourageants :). En revanche, il nous semble important de dire que les implémentations d’ActivityPub dans PeerTube et Mastodon ne vous permettront pas de vous créer un compte sur une instance PeerTube depuis votre compte Mastodon, ou vice versa.

Le design, c’est un métier !

Au milieu des questions que vous nous avez posées sur le forum FramaColibri, Olivier Massain s’est proposé de nous donner un coup de main pour améliorer le design de PeerTube (et y’en avait besoin !). Les maquettes créées sont magnifiques. Nous avons donc décidé de partager avec vous en avant-première l’intégration de son fantastique travail, avec un petit « avant/après » ! Un énorme merci à lui.

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La contribution, c’est la clé

Framatube, illustré par David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Utiliser le protocole ActivityPub revenait très souvent dans les questions les plus techniques que vous nous avez posées sur PeerTube. D’ailleurs, l’ensemble de vos questions nous ont permis d’améliorer la présentation de PeerTube, en proposant de découvrir Framatube en 10 réponses.

C’est, encore une fois, dans ce même espace d’échanges et de discussion qu’Olivier Massain s’est proposé de contribuer au design de PeerTube. Voici donc la preuve, s’il en fallait une de plus, que la contribution est la clé de la réussite des projets Libres. Ce n’est pas pour rien si nous avons placé Framatube dans le paysage du premier monde de Contributopia : c’est parce que nous savons que nous ne pourrons y arriver que si nous le faisons ensemble.

Une autre manière de contribuer est de participer au financement des activités de Framasoft, et, là aussi, nous devons vous dire combien nous sommes émerveillé·e·s du soutien que vous nous accordez. Le 21 novembre dernier, nous avons associé l’annonce de Framatube avec notre appel aux dons, car il nous manquait alors 90 000 € pour boucler le budget 2018 de l’association. Nous avons découpé cette somme en trois paliers :

 

À l’heure où nous écrivons ces lignes, le deuxième palier est presque atteint ! Alors oui, il reste un effort à faire et rien n’est gagné, mais d’ores et déjà, nous tenons à vous remercier de cette confiance que vous nous portez et nous souhaitons tout faire pour nous en montrer dignes. Petit rappel aux personnes qui paient des impôts sur le revenu en France : il vous reste jusqu’au 31 décembre pour faire un don à Framasoft qui puisse être déduit de vos revenus 2017 (sachant qu’un don de 100 € revient, après déduction, à 34 €).

Si vous le voulez et le pouvez, pensez à soutenir Framasoft , et/ou à faire passer cette information autour de vous !

 Pour aller plus loin :




Avancer ensemble vers la contribution…

Contribuer, oui, mais comment ? Comment susciter des contributions, les accueillir, les dynamiser, lever les obstacles et les blocages de tous  ordres ?

Tel a été le questionnement à l’origine du Fabulous Contribution Camp qui s’est déroulé à Lyon, du 24 au 26 novembre dernier, à l’initiative de La Quadrature et de Framasoft. Toutes les personnes qui ont participé ont eu à cœur d’identifier les difficultés honnêtement mais aussi de proposer des pistes et des pratiques pour les surmonter…

Pour en témoigner, nous donnons la parole aujourd’hui à Maiwann qui est UX designer et que nous avions invitée. L’article ci-dessous est la simple republication de son compte-rendu sur son blog. Ses observations, ses réactions et ses chouettes sketchnotes font véritablement plaisir (bientôt peut-être d’autres billets des participants?) et nous indiquent des voies qui sont déjà celles de Contributopia.. C’est un début prometteur, parions que beaucoup d’associations pourront en tirer profit et continuer l’exploration de la contribution positive.


Fabulous Contribution Camp

Pour finir ce mois de novembre en beauté, j’ai été invitée par Framasoft à participer au Fabulous Contribution Camp qu’ils co-organisaient avec La Quadrature du Net. Je suis donc partie à Lyon pour rencontrer des contributeur·ice·s de tous horizons (et pas seulement de la technique !) pour parler des outils et de comment aider celleux qui le souhaitent à contribuer plus simplement.

Un petit état des lieux

Pyg le disait lors du Capitole du Libre (dans la conférence Contributopia que vous pouvez retrouver ici), la majorité des projets de logiciel libre sont soutenus par très peu (voire pas) de contributeur·ice·s. L’exemple le plus marquant est celui des pads (une alternative à GoogleDocs permettant d’écrire collaborativement en ligne): Sur l’année dernière, il n’y a pas une seule personne ayant réalisé plus de 50 contributions, alors que le logiciel est très populaire !

C’est assez inquiétant, et en même temps pour avoir déjà échoué personnellement, parfois On a l’envie de contribuer et on y arrive pas. Ce qui est quand même assez comique lorsqu’on voit à quel point le logiciel libre a besoin encore et toujours de personnes volontaires !

J’avais donc hâte de me joindre à des groupes de réflexion sur le sujet afin d’identifier les problématiques et envisager des pistes de solution tout au long du FCC. Autant vous dire que tout le monde s’est transformé·e·s en designer pour concevoir une meilleure expérience contributeur·ice (Peut-on envisager de dire des CX Designer qui au lieu de signifier Customer eXperience sera notre Contributor eXperience Designer ? ^.^ )

FCC c’est parti !

Le FCC avait lieu à Grrrnd Zero, un lieu au caractère très affirmé, où les murs sont recouverts d’illustrations, près d’un immense chantier participatif destiné à devenir à la fois salle de concert, d’enregistrement et atelier de bricolage/dessin… Nous nous sommes fait accueillir avec un petit déjeuner fabuleux, cette première journée démarrait vraiment bien !

Après un icebreaker rigolo nous demandant de nous regrouper d’abord par provenance géographique (mais comment font les nomades ?), ensuite par coiffure, ensuite par système d’exploitation préféré (oui on était un peu chez les geeks quand même) et enfin par notre engagement associatif principal, nous nous sommes lancés sur des ateliers collaboratifs, animés par les enthousiastes Meli et lunar !

Failosophy : Identifier les problèmes

Pour démarrer, nous nous sommes regroupés par 4 et avons raconté chacun une expérience marquante où notre envie de contribuer s’est soldée par un fail. Nous notions les différentes problématiques rencontrées sur des post-its avant de toutes les regrouper sur un grand mur pour avoir une vue d’ensemble des cas les plus fréquents. Ensuite, nous avons collaborativement trié les post-it ce qui prend “étrangement toujours 8 minutes peu importe le nombre de post-its ou de personne” d’après Lunar… Il faut dire qu’il avait raison 😉

De grandes catégories regroupent les post-its et font apparaître des motifs récurrents. Ceux que je retiens (car ils me font écho) :

  • La difficulté d’identifier un interlocuteur référent pour s’intégrer au projet
  • La peur de demander « Comment faire »
  • La peur de ne pas être assez doué·e / de dire des « choses bêtes »
  • Ne pas savoir par où commencer
  • La peur de ne pas s’intégrer à la communauté
  • Le manque de temps
  • La difficulté de déléguer à d’autres un projet qu’on a toujours porté
  • Le fait de ne pas avoir réussi à créer une communauté autour d’un projet
  • Ne pas connaître la ligne de route d’un projet
  • Ne pas savoir comment exprimer les besoins de contribution pour que les intéressé·e·s les comprennent

J’ai la sensation qu’un grand nombre de ces problèmes peuvent être résolus en:

  • Listant clairement les besoins de contributions, avec les compétences nécessaires, via une interface plus facile d’accès qu’un github (qui est réellement anxiogène pour les non-développeur·euse·s)
  • Désignant une personne accueillante comme point d’entrée pour les nouveaux·lles arrivant·e·s, à laquelle il sera facile de s’adresser, et qui saura aiguiller chacun·e vers des tâches simples pour découvrir le projet.

Cela se recoupe avec les discussions du Capitole du Libre, ce qui donne la sensation que nous sommes sur la bonne voie et que les hypothèses que j’ai entendues la semaine dernière sont des solutions à des problèmes récurrents pour les contributeur·ice·s !

Étude de cas : 6 projets appelant à la contribution

Dans la phase suivante, pour s’imprégner un peu de ce qui se fait parmi les projets nécessitant contribution, nous avons eu le droit à la présentation de:

  • Exodus, une plateforme qui analyse les applications Android et liste les logiciels traquant notre activité qu’elle y trouve.
  • La Revue de Presse de la Quadrature du Net, permettant de soumettre des articles à la revue de presse de façon collaborative.
  • Diaspora, un réseau social décentralisé assez proche de la configuration initiale de facebook.
  • FAI Maison, un fournisseur d’accès associatif et nantais, qui propose le prix libre (ou contribution consciente)
  • Le PiPhone, une plateforme de La Quadrature du Net permettant d’avoir accès à des numéros de députés afin de les appeler pour les encourager à soutenir (ou non) une loi, en proposant un set d’arguments et un retour d’expérience après l’appel.
  • FramaForm, une des alternatives de Dégooglisons Internet lancée par Framasoft, que Pyg a développée seul (!) en 15 jours (!!!). Avec le souci notamment que le logiciel permet plein de choses différentes mais que les options sont difficiles à trouver.

Le tour d’horizon permet de voir que si chaque projet recherche à fédérer une communauté de contribution, ils sont tous très différents et n’intéressent sans doute pas du tout les même personnes. Les présentations étaient elles aussi très variées selon la personne, de celui qui démarre par l’aspect technique à celui qui met tout de suite en avant les problématiques d’ergonomie. Bien sur, la présentation varie énormément selon les affinités et les problématiques rencontrées par chacun·e. Peut-être qu’avoir une description homogène (qui ne parte dans l’aspect technique que face à des personnes orientées technique) puis des pistes selon les compétences / envies de la personne en face serait à envisager ? (c’est un point que je laisse en suspens, mais il faut avouer qu’à force je suis rebutée par ceux qui m’expliquent immédiatement en quelle technologie est leur application alors que je suis très interessée par celleux qui ont des problématiques de conception 😉 )

Icebreaker rigolo

Petite recette: Prenez une feuille et écrivez en gros au marqueur ce dont vous avez envie de parler / un truc à apprendre à quelqu’un, montrez la feuille à tout le monde et formez un binôme avec une personne qui est intéressé·e par votre thème et a un thème qui vous intéresse (ou pas) !

Grodébat I

Après déjeuner (des lasagnes végétariennes à tomber <3) nous avons repris certaines catégories de problématiques listées le matin et nous sommes séparés en petits groupes pour déterminer:

  • C’est quoi le problème ?
  • Dans l’idéal, avec une baguette magique, qu’est-ce qu’on fait ?
  • Quelles solutions concrètes pour y arriver ?

Nous sommes arrivés à tout un tas de solutions pour nous mettre le pied à l’étrier:

Vision :

Créer un manifeste et créer des rencontres mêlant communauté de contributeur·ice·s et utilisateur·ice·s

Accès au savoir & Appropriation :

Formuler des avantages concurrentiels pour les marchés publics et rendre transparents les logiciels utilisés dans le service public

Sortir de l’entre-soi :

Trouver des métaphores pour expliquer sans être technique, lister les communautés avec des objectifs similaires mais des besoins différents.

Répartition des tâches :

Lister l’ensemble des tâches à faire et leur avancement.

Expression des besoins :

Lister & Publier les besoins de contribution en petites tâches, Créer un bouton “J’ai un problème” qui s’adresse à un humain (facilitateur ou UX designer)

Rapports de pouvoir :

Mettre et afficher un système de résolution des conflits.

Gestion du temps (et de l’argent) :

Mesurer le temps mis pour une tâche pour le prioriser dans le futur et compléter le financement par le don.

Accueil :

Avoir un·e référent·e du projet, co-rédiger une charte d’accueil “Comment accueillir les personnes”.

Toutes ces solutions qui sont autant de petits pas à mettre en œuvre m’ont beaucoup enthousiasmée : j’ai l’impression que le chemin est tout tracé pour réaliser de belles choses ensemble ! Nous avons d’ailleurs enchaîné avec de petits groupes de travail concrets permettant de débuter la rédaction d’une charte, designer un bouton “J’ai un problème” ou encore réfléchir à une plateforme listant les besoins de contribution.

Tout ça en une seule journée autant vous dire que nous étions lessivé·e·s à la fin, mais après un bon repas (préparé par les cuistots de Grrrnd Zero) il était temps de se coucher pour être fraî·che·s le lendemain !

C’est reparti pour un tour !

C’est avec une fraîcheur toute relative que nous avons entamé la seconde journée du FCC. La fatigue est là, mais la bonne humeur et l’enthousiasme général donnent vraiment envie de finir le week-end en beauté. Nous entamons un tour de météo avec pas mal de personnes dans le brouillard du matin, mais très vite nous faisons chauffer les méninges collectivement.

Contributeur·ice·s, où êtes-vous ?

Nous démarrons par une séance de « boule de neige » où nous sommes invité·e·s à lister les endroits où, demain, nous pourrions aller pour parler du logiciel libre et trouver de nouvelles personnes pour contribuer ! Sur un autre tas, nous écrivons plutôt ce qui nous empêche de le faire actuellement.

Je liste personnellement mes précédentes écoles de design qui sont, à mon avis, des nids à designers motivé·e·s mais pour qui le monde du libre est inexistant (on a tendance à nous parler principalement de droit d’auteur et nous n’entendons jamais parler de licences libres). Pour y aller cependant, il me faut plus de connaissances sur les licences et une liste de projet dont ils pourraient s’emparer afin de commencer à contribuer rapidement.

À la fin nous collons tout nos post-it sur les murs et, comme a dit lunar: “Si chacun ramène 3 personnes, la prochaine fois on est 300.”. Il n’y a plus qu’à !

Gros Débat II : Le retour

Nous enchaînons sur des groupes de travail thématiques. Je rejoins celui qui aborde le sujet du financement, et y apprends sans surprise que les subventions demandent un investissement énorme (environ 1/3 du temps total de travail passé pour les demander) et que, si le fonctionnement grâce aux dons permet beaucoup plus de liberté, il est soumis à des règles strictes, notamment au fait qu’on ne peut pas donner de contrepartie en échange d’un don, qui doit être fait uniquement pour soutenir le travail passé et à venir de l’association (dans les grandes lignes).
Le monde des financements a l’air très nébuleux, ce qui nous fait envisager de rechercher des contributeur·ice·s s’y connaissant en financement comme l’on en rechercherait en design ou en admin sys !

Les autres groupes ont pour leur part envisagé :

Accueil :

Montrer de l’intérêt aux personnes qui arrivent, lister les besoins afin qu’iels puissent s’en emparer.

Discutons ensemble :

Diversifier les compétences en listant les besoins (les solutions se regroupent, chouette !), ne pas imposer des outils libres aux futurs utilisateur·ice·s mais partir de leurs problèmes plutôt (on dirait bien une démarche de conception centrée utilisateur·ice \o/ )

Rencontrer les utilisateur·ice·s :

Avoir des relais au sein de l’association ou se greffer à une rencontre existante afin de faciliter les échanges, demander à des UX Designers de se joindre aux rencontres et motiver certains devs à venir voir les tests utilisateurs.

Comment on garde le lien post-FCC :

Avoir une plateforme ou l’on puisse mettre des photos, un article de blog (collaboratif ?) récapitulant le week-end, et au-delà, une plateforme listant les besoins de contribution (oui, encore, chouette !)

La machine infernale !

Après le repas composé de pizzas maison (c’est vraiment sympa Grrrnd Zero), nous nous lançons dans la machine infernale : une première personne se place et commence à enchaîner un son et un geste, de façon répétitive. Une seconde personne la rejoint et va elle aussi réaliser son geste, et chacun va à son tour rejoindre la machine infernale, en répétant indéfiniment son geste et son son jusqu’à ce que… la machine s’emballe ! C’était un petit jeu très chouette et revigorant après la phase digestive !

Gros Débat III

Pour ce troisième groupe de réflexion, je rejoins pyg qui a envie de réunir des associations afin de les informer sur le logiciel libre, qui leur plaît pour des raisons évidentes de prix, mais aussi de valeurs ! Cependant le numérique est un domaine assez vaste et pour des assos qui ne s’y connaissent pas, il y a besoin de faire de l’éducation aux usages et à ce que cela engendre d’utiliser tel ou telle logiciel ou application.

Le groupe fourmille d’idées, je retiens pêle-mêle:

  • Il y a un besoin de sensibilisation, de démonstration des possibilités des logiciels libres, et d’accompagnement à la transition,
  • Les associations ont besoin d’indépendance, de communiquer et de collaborer
  • Les mettre en relation vis à vis de leurs besoins peut permettre une mise en commun de financement pour développer des logiciels ouverts et adaptés
  • Il faut aller voir les assos pour savoir ce dont elles ont besoin et ce qu’elles recherchent
  • Selon les retours, décider du format, plutôt conférence organisée ou Summer Camp très ouvert ?

Moi qui recherche à participer à des choses qui ont du sens, me voilà pile au bon endroit et j’en suis très heureuse ^.^

Ça sent la fin !

Enfin, pour finaliser le FCC, nous avons 4 catégories de post-it, à remplir puis à afficher au mur:

  • ❤️ Ce que nous avons fait ce week-end et qui nous a plu !
  • 🌟 Ce que j’ai envie de faire dès demain pour contribuer.
  • ➡ Ce que je fais dans les prochains mois.
  • 😊 Ce que j’ai envie que quelqu’un d’autre ici fasse (et chacun pouvait récupérer un post-it de ce type pour s’y engager)

Voici les miens :

Merci le FCC !

Ce Fabulous Contribution Camp a été une très bonne expérience : J’ai pu parler UX en long, en large et en travers, à des personnes qui se sont montrées à l’écoute de ce que j’avais à leur raconter (et ça ça fait plaisir !). Les différentes solutions énoncées, avec des pistes concrètes de réalisation pour se lancer rapidement me donnent des ailes, et j’espère que cette motivation ne va pas retomber de sitôt !

Je vous tiendrai au courant de mes avancées dans le monde du libre et de la contribution, en tout cas je remercie Framasoft de m’avoir permis de venir partager un week-end à Lyon avec eux à parler et rêver du futur du numérique !

Pour finir, voici les sketchnotes de ce week-end collaboratif. Prenez soin de vous 🙂


Griffonné le 30 novembre 2017

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