Curiosphere.tv et Microsoft : merci le service public !

Dans la série « ça ne servait à rien de traduire le Rapport Becta »

Copie d'écran - Curiosphère TV

Curiosphere.tv vous connaissiez ? C’est la webTV de France 5 (du groupe France Télévision) dont on peut lire sur le site la description suivante :

Curiosphere.tv a une vocation éducative généraliste. Cette webTV s’est donnée pour mission d’« offrir aux médiateurs éducatifs – profs, parents, éducateurs – les meilleurs contenus audiovisuels afin de favoriser l’éducation citoyenne des enfants et leur accès à la culture ».

Ce sont ainsi plus de six cents vidéos qui sont proposées dont on précise qu’elles sont « accessibles gratuitement pour une utilisation dans un cadre scolaire ou à domicile » (les licences de type Creative Commons attendront encore un peu, mais là n’est pas mon propos).

Parmi ces vidéos, il y a une nouvelle rubrique dédiée au B2i, le fameux Brevet informatique et internet ainsi introduit par l’institution sur son site officiel Educnet :

Pour assurer l’égalité des chances, l’Éducation nationale doit dispenser à chaque futur citoyen la formation aux utilisations des technologies de l’information et de la communication qui lui permettra : d’en faire une utilisation raisonnée, de percevoir les possibilités et les limites des traitements informatisés, de faire preuve d’esprit critique face aux résultats de ces traitements, d’identifier les contraintes juridiques et sociales dans lesquelles s’inscrivent ces utilisations.

Le décor est donc planté, les louables intentions et objectifs de l’un comme de l’autre clairement affichés.

Là ou le bât blesse c’est que Curiosphère s’est associé à Microsoft pour produire les tutoriels vidéos de cette rubrique B2i. Et comme les intentions et objectifs de ce troisième larron sont quelque peu différents de ceux mentionnés ci-dessus, on se retrouve avec la présentation suivante :

Pour accompagner l’initiation de vos élèves ou de vos enfants au B2I, Curiosphere.tv, en partenariat avec Microsoft, met à votre disposition un ensemble de tutoriels vidéo réalisés par des enseignants. Reprenant des exemples concrets dans différentes disciplines, ces tutoriels vidéo décryptent dans le cadre des compétences B2I, un grand nombre de fonctionnalités et de modules de Word, Excel, Publisher, Power Point, Outlook ou encore Internet Explorer.

Illustration par l’exemple avec des titres qui ne se cachent pas derrière des termes génériques comme Traitement de texte ou Tableur :

Copie d'écran - Curiosphère TV

Et il y en a des dizaines d’autres du même acabit ! Tenez, voici comment débute texto celui-là :

Les élèves vont donc utiliser Internet Explorer pour faire des recherches afin de réaliser un exposé multimédia. Par exemple « la respiration des êtres vivants ». Live Search propose 47.000 résultats…

No comment (si ce n’est que comme par hasard il s’agit de la version 2007 de la suite MS Office qui est montrée dans ces vidéos). Toujours est-il qu’ils sont modernes web 2.0 à Curiosphere.tv puisqu’ils proposent plein de fils RSS par catégorie :

Copie d'écran - Curiosphère TV

Si Microsoft est une discipline alors je comprends mieux maintenant : Apprenons tous le Microsoft à l’école avec les deniers du contribuable !

Edit : la suite ici




Informatique à l’école : Tout ne va pas très bien Madame la Marquise

La France est-elle numériquement sous-éduquée ? Et si oui doit-on faire quelque chose pour modifier la donne en particulier à l’école ? Ce n’est pas tout à fait ainsi que Jean-Pierre Archambault[1] et Maurice Nivat exposent la problématique dans l’article que nous reproduisons ci-dessous mais cela y ressemble un peu.

Que l’on soit ou non d’accord avec leur exposé des faits et leurs propositions, cela mérite selon nous au moins un débat. Or, de la même manière que la présence de Microsoft à l’école n’est pas discutée, la présence d’un éventuelle discipline informatique à part entière n’est pas à l’ordre du jour (quand bien même uniquement en lycée et uniquement dans les sections scientifiques comme il est pragmatiquement suggéré dans un premier temps par nos auteurs).

Et si ce n’est pas à l’ordre du jour c’est que notre vénérable institution scolaire a fait le choix de l’informatique en tant qu’outil sur l’informatique en tant qu’objet d’enseignement en arguant que tout va très bien Madame la Marquise puisqu’existe le Brevet Informatique et Internet (B2i) décliné et distillé de l’école élémentaire jusqu’au lycée en passant par le collège.

Le problème c’est qu’on se retrouve en face d’un double échec. Le premier échec c’est que l’on passe alors à côté d’une certaine culture informatique tout en ne formant pas les développeurs de demain dont nous aurons nécessairement besoin (sauf à se mettre à tout externaliser en Asie ou ailleurs). Développeurs en général mais aussi, ça coule de source, développeurs de logiciels libres en particulier (dont on ne s’étonnera pas de trouver trace dans leur projet de programme pour les sections scientifiques des lycées).

Le second échec, et ceci n’engage que moi et ma petite expérience, c’est que le B2i est globalement une mascarade qui ne veut pas dire son nom. Des enseignants juqu’aux directions académique en passant par les chefs d’établissement, tout le monde a intérêt à dire que le B2i fonctionne dans une logique de remontée hypocrite et enjolivée des informations dont l’Éducation Nationale a le secret. Mais dans la réalité, j’en mets ma main à couper, on est loin des objectifs et on se retrouve le plus souvent avec une parodie de B2i, les élèves de plus en plus sensibilisés hors de l’école commencent d’ailleurs à s’en rendre bien compte. Vous aurez beau me sortir la dizaine d’établissements où les B2i est une réelle réussite collective (exemples toujours mis en exergue par l’institution), vous ne m’ôterez pas de l’idée que depuis le temps qu’on parle du B2i, c’est-à-dire 8 ans, ça ne marche pas bien voire pas du tout (sauf parfois en collège là où les enseignants de technologie organisent quasiment en solitaire le B2i de par la proximité des compétences à valider avec leur propres programmes d’enseignement mais alors ça ne valait pas la peine dépenser autant d’énergie pour créer le B2i). Ne reste donc-t-il plus que les blogs de profs d’en bas pour dire que le roi B2i est nu ?

Il n’est pas question de nier les problèmes liés par exemple aux emplois du temps souvent surchargés des élèves que la création d’une nouvelle discipline ne risque pas d’améliorer. Simplement il faut savoir ce que l’on veut. D’accord pour que les hommes politiques nous fassent de beaux discours sur la fracture numérique[2], les nouvelles générations à l’ère du numérique, etc. Mais alors il faudrait joindre réellement les actes à la parole en cessant quelque peu de se voiler la face.

Ulaanaatar Mongolia - OLPC - CC-By

Pour un enseignement de l’informatique et des TIC

Maurice Nivat et Jean-Pierre Archambault
1er septembre 2008t
URL d’origine sur le site de l’EPI

Dans sa leçon inaugurale au Collège de France, Gérard Berry indiquait que « tout le monde le voit et le dit, notre civilisation est en train de devenir numérique », mais que « les fondements de la locution "monde numérique" restent largement ignorés du public ». Et Il ajoutait que « ce n’est pas étonnant car l’information synthétique est encore pauvre dans ce domaine qui ne repose pas sur des bases enseignées classiquement ».[3]

L’informatique est partout, dans la vie de tous les jours, au domicile de chacun, avec l’ordinateur personnel et l’accès à Internet ; dans l’entreprise où des systèmes de contrôle informatisés font fonctionner les processus industriels. Ses métiers, et ceux des télécommunications, occupent une place importante dans les services. On ne compte plus les objets matériels qui sont remplis de puces électroniques.

C’est l’informatique, pour ne prendre que ces exemples, qui a récemment fait faire de très spectaculaires progrès à l’imagerie médicale et qui permet ceux de la génétique. Elle modifie progressivement, et de manière irréversible, notre manière de poser et de résoudre les questions dans quasiment toutes les sciences expérimentales ou théoriques qui ne peuvent se concevoir aujourd’hui sans ordinateurs et réseaux. Elle change la manière dont nous voyons le monde et dont nous nous voyons nous-mêmes.

L’informatique s’invite aussi au Parlement, ainsi on s’en souvient, en 2006, pour la transposition de la directive européenne sur les Droits d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information (DADVSI), suscitant des débats complexes où exercice de la citoyenneté rimait avec technicité et culture scientifique. En effet, s’il fut abondamment question de copie privée, de propriété intellectuelle… ce fut sur fond d’interopérabilité, de DRM, de code source.

Il y a de plus en plus d’informatique dans la société, mais les entreprises ont du mal à recruter les informaticiens qualifiés dont elles ont besoin, et cela vaut pour l’ensemble des pays développés. Le Syntec se plaint du manque d’attractivité chez les jeunes pour les métiers de l’informatique. Gilles Dowek, professeur d’informatique à l’École Polytechnique, fait le constat du faible niveau en informatique des ingénieurs généralistes en France, et de « nos étudiants, comparés à leurs camarades indiens et chinois, bien entendu, mais aussi européens »[4]. Dans leur rapport sur l’économie de l’immatériel, Maurice Lévy et Jean-Pierre Jouyet citent, parmi les obstacles qui freinent l’adaptation de notre pays à cette économie nouvelle et constituent un handicap majeur pour l’innovation, « notre manière de penser », invitant à changer un certain nombre de « nos réflexes collectifs fondés sur une économie essentiellement industrielle ». Ils insistent sur le fait que, dans l’économie de l’immatériel, « l’incapacité à maîtriser les TIC constituera une nouvelle forme d’illettrisme, aussi dommageable que le fait de ne pas savoir lire et écrire ». Nous sommes manifestement en présence d’un enjeu de culture générale, correspondant aux missions traditionnelles de l’École, former « l’homme, le citoyen et le travailleur ». Il faut donc se tourner résolument vers le système éducatif.

Si un consensus s’est dégagé au fil des ans sur la nécessité de donner une culture informatique aux élèves, des divergences sérieuses subsistent quant aux modalités pour y parvenir. Pas de problème pour considérer que l’ordinateur est un outil pédagogique aux vertus et potentialités reconnues, auquel il faut recourir avec pertinence, et un outil de travail personnel et collectif de la communauté scolaire. Ou pour intégrer les évolutions engendrées dans les disciplines par l’informatique qui modifie pour une part leur « essence », à savoir leurs objets et leurs méthodes.

En revanche, à aucun moment les élèves ne rencontrent dans leur formation générale une approche conceptuelle et disciplinaire de l’informatique, sous la forme d’un enseignement en tant que tel. Les conséquences en sont pour le moins fort dommageables.

Il y a eu dans les années quatre-vingts une option dans les lycées. Elle a été supprimée par deux fois pour de mauvaises raisons. En effet, deux approches pédagogiques s’affrontent. Pour les uns, les apprentissages doivent se faire exclusivement à travers les utilisations de l’outil dans les disciplines existantes. Une discipline informatique serait inutile. Ainsi, point besoin de savoir quoi que ce soit, ou peu s’en faut, pour se servir de logiciels. Étrange propos. Depuis que l’« homo faber » fabrique des outils et s’en sert, une bonne intelligence de l’outil (matériel ou conceptuel) est considérée comme nécessaire pour une bonne utilisation, efficace, précise et raisonnée : plus on en sait mieux cela vaut, partout. Il n’y aurait que l’informatique qui échapperait à cette règle et où l’ignorance serait un avantage ! Autre argument avancé, celui selon lequel on ne va quand même pas faire de tous les enfants des informaticiens ! Comme si l’enseignement des mathématiques ou du français, dont tout le monde admet la nécessité, avait pour but de faire de tous les élèves des mathématiciens ou des écrivains.

Pour les autres, dont nous sommes, lorsqu’un champ de la connaissance est partout, il doit être quelque part en particulier dans la culture générale scolaire, pour tous les élèves, sous la forme d’une discipline, avec ses professeurs, ses contenus, ses horaires. C’est la solution la plus efficace que l’on ait trouvée, la plus rationnelle, et la plus économique. C’est le cas par exemple des mathématiques, outil conceptuel au service de l’ensemble des disciplines, omniprésentes dans la société et, à ce titre, objet d’enseignement pour elles-mêmes. Il doit en aller à l’identique pour l’informatique. La culture scolaire est ainsi faite que des disciplines apparaissent en fonction de nouveaux savoirs et des besoins de la société, d’autres disparaissent, toutes évoluent.

« Objet » et « outil » d’enseignement, loin de s’opposer, sont complémentaires et se renforcent mutuellement. L’expérience montre que l’approche exclusive par l’utilisation de l’outil ne fonctionne pas, aussi bien dans l’enseignement scolaire que dans les classes préparatoires aux grandes écoles. Or, malheureusement, le B2i (Brevet informatique et internet) relève de cette démarche : les acquisitions doivent se faire dans des contributions multiples et partielles des disciplines, à partir de leurs points de vue, sans le fil conducteur de la cohérence didactique des outils et notions informatiques. Passe encore à l’école primaire où, et c’est fondamental, il y a un enseignant unique qui maîtrise donc ses progressions pédagogiques et leurs cohérences, l’organisation du temps scolaire et qui se coordonne facilement avec lui-même ! Mais ce n’est pas le cas au collège ou au lycée : là résident pour une bonne part les difficultés constatées de mise en oeuvre du B2i. On conviendra effectivement du caractère ardu de la tâche au plan de l’organisation concrète. Ainsi, un rapport de l’IGEN soulignait-il que « si différentes circulaires précisaient les compétences devant être validées, elles laissaient néanmoins dans l’ombre de l’autonomie des établissements les modalités concrètes de mise en oeuvre »[5]. Pour se faire une idée de la difficulté de l’exercice, il suffit d’imaginer l’apprentissage du passé composé et du subjonctif, du pluriel et de la subordonnée relative qui serait confié à d’autres disciplines que le français, au gré de leurs besoins propres (de leur « bon vouloir »), pour la simple raison que l’enseignement s’y fait en français.

De plus, comment organiser des apprentissages progressifs sur la durée lorsque les compétences recherchées sont formulées de manière très générale (par exemple : « maîtriser les fonctions de base » ou « effectuer une recherche simple »), éventuellement répétitives à l’identique d’un cycle à l’autre, et que les contenus scientifiques, savoirs et savoir-faire précis permettant de les acquérir, ne sont pas explicités. Sans oublier des conditions matérielles, accès, maintenance, gestion des parcs de machines… ne répondant pas forcément aux besoins. S’ajoute une formation des enseignants insuffisante. On n’envisage pas de faire enseigner la littérature française, ou les sciences de la vie, ou l’histoire par quelqu’un dont les connaissances ne dépasseraient pas celles qu’on peut acquérir en quelques semaines ou mois de stage. C’est pourtant le cas en ce qui concerne l’informatique et les technologies de l’information et de la communication. Certes, cela rend d’autant plus méritoires les efforts de tous les professeurs d’autres disciplines qui, en plus de leur matière principale, enseignent de l’informatique, souvent avec enthousiasme. Mais ils ne sont qu’une minorité. La boucle est bouclée : on retombe sur l’absence d’une discipline scientifique et technique avec des connaissances spécifiques et des méthodes identifiées et nommées.

L’association EPI (Enseignement public et informatique) a créé au sein de l’ASTI (fédération des Associations françaises des Sciences et Technologies de l’Information) un groupe de travail, de réflexion et d’action, sur l’enseignement de l’informatique et des TIC[6]. Ce groupe a élaboré un projet de programme pour les sections scientifiques des lycées[7]. Selon l’EPI et l’ASTI, qui ont notamment été reçues à l’Élysée, à Matignon et au Ministère de l’Éducation nationale, les réponses apportées par le système éducatif en matière de culture générale informatique de l’« honnête homme du XXIe siècle » ne sont pas à la hauteur des enjeux et des exigences de la société de l’immatériel. Enseigner l’informatique est une nécessité, par ailleurs de nature à lutter contre la crise des vocations scientifiques. Il serait temps qu’en particulier cesse ce paradoxe qui voit les futurs scientifiques, les générations à venir d’ingénieurs de la société de la connaissance, ne pas rencontrer dans leur scolarité l’informatique en tant que telle : théorie de l’information, algorithmique, programmation, réseaux… et autres notions et concepts, tous indispensables à une culture informatique et TIC permettant des usages raisonnés.

Maurice Nivat
Professeur émérite à l’Université Paris 7
Membre correspondant de l’Académie des Sciences

Jean-Pierre Archambault
Professeur agrégé de mathématiques
Président de l’association Enseignement Public et Informatique (EPI)

Notes

[1] Á plus d’un an d’intervalle, c’est le deuxième article du Framablog sur le sujet. Comme quoi Jean-Pierre Archambault est persévérant et nous aussi !

[2] Crédit photo : Ulaanbaatar, Mongolia par OLPC sous licence Creative Commons BY.

[3] http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/inn_tec/p1200929441219.htm

[4] « Quelle informatique enseigner au lycée ? », intervention à l’Académie des Sciences du 15 mars 2005 http://www.lix.polytechnique.fr/~dowek/lycee.html

[5] http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/074000125/0000.pdf en page 17

[6] http://www.epi.asso.fr/blocnote/blocsom.htm

[7] http://asti.ibisc.univ-evry.fr/groupe-itic/Programme-04-03-2008.pdf




Appel à traduction pour un livre sur les ressources éducatives libres

Copie d'écran - WikiEducator

Dans la série Traductions Ambitieuses nous sommes déjà impliqués sur de gros chantiers comme La bio de Stallman et Producing Open Source Software (tous deux en phase de relecture d’ailleurs et donc bientôt sur framabook).

Mais puisqu’il n’y pas de raison de s’arrêter en si bon chemin et puisque c’est la rentrée des classes, que ne diriez-vous de traduire ensemble, de l’anglais vers le français, le très intéressant (et tout récent) Open Educational Resources Handbook sous licence Creative Commons BY-SA et disponible au format PDF en noir et blanc ou en couleur.

Parce que si vous voulez mon humble avis, ce serait un livre majeur à mettre entre les mains des éducateurs (au sens large) de France et de Navarre. Histoire de faire découvrir, d’informer et d’inciter afin que nous soyons toujours plus nombreux à participer à l’aventure collective de la diffusion, de la création, de la modification et du partage de ressources éducatives sous licences libres et ouvertes.

(j’ajoute, et ceci n’engage que moi, que ce ne serait pas du luxe si l’on présuppose que globalement la culture actuelle du corps enseignant dans ce domaine est encore en pleine phase d’apprentissage)

Véritable guide pratique, ce livre se décompose en plusieurs chapitres : chercher, créer, adapter, utiliser, partager et licencier de telles ressources. On peut le parcourir linéairement mais aussi le picorer en puisant dans un chapitre particulier au gré de nos besoins.

Précisons que cette traduction nécessiterait, nous semble-t-il, quelques petites adaptations locales. Il conviendrait ainsi par exemple de substituer certaines références et liens anglophones vers leurs pendants francophones si ils existent. Il conviendrait également de contextualiser juridiquement la notion anglophone de fair use qui n’existe pas chez nous. C’est un travail supplémentaire mais c’est un travail, nous semble-t-il là encore, fort enrichissant (et non réservé à des traducteurs soit dit en passant).

Précisons également que la version originale ayant été conçue dans un wiki, cela devrait grandement nous faciliter la tâche.

Voilà. Nous serions vraiment fiers et ravis d’apporter nous aussi et avec vous notre pierre à l’édifice en réussissant à mener à bien ce projet utile et enthousiasmant.

Un enthousiasme partagé ?

Cela tombe bien parce qu’avec de l’enthousiasme, un peu de réseau et des licences libres, on peut déplacer des montagnes (voire même des mammouths) !

Si vous souhaitez en être, ce dont nous vous remercions, il suffit de nous laisser un petit message à openeducation@framasoft.net. Nous commencerons pour nous compter sur une liste de discussion puis nous verrons alors ensemble comment organiser la chose.




Vista et MS Office 2007 – Rapport Becta – Extraits et Recommandations

Rapport Becta - CouvertureNous avons tout récemment mis en ligne notre traduction du Rapport Becta dont nous espérons beaucoup comme cela a été dit dans le billet de présentation.

Il ne s’agit nullement de faire une sorte de guerre à Microsoft aussi puérile que contre-productive. Il s’agit de faire en sorte que, comme en Grande-Bretagne, l’école française se pose de bonnes questions.

  • Mon établissement scolaire a-t-il réellement besoin de migrer vers Vista ? vers MS Office 2007 ?
  • Les coûts d’une telle opération seront-ils compensés par la qualité de ces nouveaux produits ? A l’échelle nationale, les coûts globaux d’une telle opération ne pourraient-ils pas être épargnés et affectés ailleurs ?
  • Un parc hétérogène Windows XP et Windows Vista ne va-t-il pas créer de la confusion chez mes utilisateurs ? ne va-t-il compliquer la tâche de l’administrateur du réseau ?
  • Si je me retrouve avec MS Office 2007, dois-je utiliser par défaut le nouveau format de Microsoft Open XML (OOXML) ?
  • Est-ce que tout a été fait pour garantir une bonne interopérabilité ? Est-ce je facilite la vie numérique de mes élèves dans leur liaison école/domicile ?
  • La collectivité territoriale qui me fournit en machines neuves a-t-elle prévue d’intégrer nativement une suite bureautique libre ? A-t-elle prévue que je puisse sans entraves lire et écrire par défaut au format OpenDocument ODF ?
  • Si Windows Vista et MS Office 2007 ne sont pas recommandés, n’est-il pas temps d’évaluer sérieusement si Linux (associé à OpenOffice.org) pourrait constituer une réelle alternative ?

Voici, entre autres, quelques question d’importance qu’aborde ce rapport.

Et pour vous en faire tout de suite une meilleure idée, et donner envie d’en savoir en plus en parcourant l’intégralité du rapport, nous vous proposons ci-dessous quelques extraits.

Rapport Becta - Recommandations

Les recommandations

p.18 – § 4.29 « Les nouvelles fonctions de Vista apportent une certaine valeur ajoutée mais, si l’on prend en compte les coûts de déploiement et les bénéfices potentiels, une mise à jour généralisée du parc informatique des écoles et des universités n’est pas recommandée. »

p.19 – § 4.31 « Le mélange des systèmes d’exploitation peut très bien se faire dans les écoles ou le réseau informatique fonctionne déjà avec plusieurs systèmes d’exploitation comme Windows, Mac et Linux quand cette mixité est adaptée. Nous recommandons cependant que les écoles et universités ayant un parc informatique cohérent sous Windows XP faisant l’acquisition de systèmes avec Vista préinstallé exercent, lorsque c’est possible, leur droit du choix du système d’exploitation et maintiennent la cohésion de leur installation avec Windows XP. »

p.20 – § 4.32 « Les écoles et les universités ne devraient envisager le passage à Vista seulement s’il est question d’installer un nouveau parc informatique complet et ne devraient pas envisager la mise à jour des systèmes existants ou faire cohabiter les deux environnements. »

p.21 – § 4.36 « Aucun déploiement de grande ampleur de Office 2007 ne devrait avoir lieu tant que les écoles et les universités ne sont pas certaines d’avoir mis en place tous les mécanismes permettant l’interopérabilité et permettant d’éviter toute fracture numérique possible comme celles citées plus tôt dans ce rapport. »

p.21 – § 4.37 « Les écoles et les universités qui envisagent le passage à Microsoft Office 2007 ne devrait le faire que dans un contexte de renouvellement complet pour n’utiliser qu’une seule version de la suite bureautique dans un établissement/environnement donné. »

p.35 – § 6.15 « Quand cela est possible, les écoles et les universités devraient s’assurer que les étudiants, les professeurs et les parents connaissent l’existence de l’ensemble des suites bureautiques "libres d’utilisation" disponibles, qu’ils savent comment se les procurer et comment les utiliser. Les écoles et les universités devraient configurer les outils de bureautique de manière à ne pas créer d’obstacles pour les élèves, les enseignants et les parents qui utilisent ces produits alternatifs (y compris les produits "libres d’utilisation") à domicile. »

p.36 – § 6.17 « Les entreprises des TIC devraient prendre les devants et configurer les produits qu’ils envoient aux écoles et aux universités pour faciliter l’accès à une suite bureautique « libres d’utilisation », idéalement une suite sous licence libre. Lors de l’achat de nouveaux systèmes, les écoles et les universités devraient normalement exiger qu’une suite bureautique capable d’ouvrir, d’éditer et de sauvegarder les documents au format standard international ODF soit installée et que ce format soit configuré par défaut. De tels produits devraient être choisis avec comme critère la possibilité pour les étudiants, les professeurs et les parents de s’en procurer une version sans avoir à payer de frais de licence supplémentaire. Les écoles et les universités devraient être prudentes lorsqu’elles utilisent une version d’essai d’un logiciel commercial, particulièrement lorsque les étudiants, les professeurs et les parents peuvent avoir l’impression que la seule manière pour eux d’accéder aux fichiers créés est d’acheter une copie du logiciel. »

Rapport Becta - Extraits

Morceaux choisis

p.3 – § 1.2 « Les nouvelles fonctionnalités de Microsoft Vista présentent certes un intérêt, mais ne justifient pas une implantation immédiate dans le domaine de l’éducation : les coûts seraient élevés et les avantages loin d’être évidents. »

p.3 – § 1.2 « Office 2007 n’apporte aucune fonctionnalité indispensable et il faudrait que Microsoft présente une étude d’impact bien étayée pour justifier son implémentation dans le secteur de l’éducation. »

p.3 – § 1.2 « Il existe des problèmes d’incompatibilité concernant Office 2007 ; de plus, Microsoft devrait assurer au plus vite la compatibilité de sa suite bureautique avec le format OpenDocument (ODF). »

p.4 – § 1.4 « Dans notre rapport intermédiaire nous exprimions le souhait que Microsoft facilite la conduite de quelques activités pilotes permettant de mettre plus en évidence les avantages du déploiement de Vista dans un établissement scolaire et de mieux appréhender le coût qu’aurait ce déploiement. Becta n’a pas eu connaissance d’une telle analyse de rentabilité effectuée par Microsoft.. »

p.4 – § 1.8 « Alors qu’on estime à 66% le nombre de machines du parc informatique scolaire pouvant fonctionner avec Vista (d’après la définition de Microsoft), nous estimons quant à nous à 22% le nombre de machines répondant aux critères pour faire fonctionner Vista de manière correcte. »

p.5 – § 1.10 « Notre rapport intermédiaire recommandait que Microsoft présente une étude d’impact bien étayée pour justifier l’implantation d’Office 2007 dans l’éducation nationale en Grande-Bretagne. Aucun document de ce type n’a été porté à notre connaissance. Le rapport final confirme que son déploiement n’est pas absolument nécessaire. Il confirme également que l’utilisation d’Office 2007 pourrait avoir un effet pervers sur l’interopérabilité entre l’école ou l’université et le domicile. »

p.5 – § 1.11 « Nous conseillons de ne pas effectuer de déploiement massif d’Office 2007 avant que les écoles et les universités ne soient certaines d’avoir mis en place tous les mécanismes nécessaires pour assurer l’interopérabilité et éviter un potentiel « fossé numérique » mis en évidence lors des tests. Agir à l’encontre de ce conseil entraînerait des difficultés inutiles et restreindrait le choix offert aux étudiants, aux professeurs et aux familles qui doivent échanger des documents entre le domicile et l’école. De plus, cela imposerait également aux parents une contrainte financière. »

p.5 – § 1.13 « une standardisation de fait (par l’utilisation généralisée de produits d’un même fournisseur) peut être néfaste pour la concurrence et le choix, ce qui revient à augmenter les coûts. De plus en plus, les gouvernements, les entreprises et le système d’éducation refusent de voir leurs informations contrôlées par un fournisseur unique. Il en résulte un mouvement qui tend à délaisser les formats de fichiers propriétaires pour s’intéresser aux nouveaux formats de fichiers, plus ouverts, sous le contrôle d’un organisme de normalisation efficace. »

p.5 – § 1.14 « Nous avons identifié un certain nombre de points critiques concernant les capacités d’interopératibilité d’Office 2007. Ces points sont les suivants : l’adoption par Office 2007 d’un nouveau format de fichier qui n’est compatible avec aucun autre produit, et le manque de prise en charge du format de document standard international (ODF) qui est de plus en plus utilisé par les produits concurrents. »

p.6 – § 1.16 « Microsoft n’a rien fait pour répondre aux demandes concernant l’interopérabilité exprimées dans notre rapport intermédiaire. Office 2007 ne gère toujours pas efficacement le format de document standard international ODF. Microsoft a continué à chercher à obtenir la normalisation de son format de fichier Office 2007, ce qui ferait cohabiter deux formats standards. Cette opération a soulevé une importante controverse. »

p.6 – § 1.18 « Nous ressentons une certaine incompréhension vis-à-vis de l’approche adoptée pour le support de l’ODF dans Office 2007. Alors que le produit permet de lire quasiment tous les autres formats attendus nativement, les manipulations à effectuer pour utiliser les fichiers ODF sont vraiment fastidieuses. Nous avons dénombré 10 étapes qu’un utilisateur devrait suivre pour trouver et installer le convertisseur permettant à Office 2007 d’accéder aux fichiers ODF et nous avons également noté que les procédures pour ouvrir ou enregistrer des fichiers ODF dans Microsoft Office 2007 ne sont pas intuitives car elles diffèrent des procédures familières aux utilisateurs. D’après nous, ces procédures présentent suffisamment de difficultés techniques pour la plupart des utilisateurs pour qu’ils soient découragés d’utiliser des produits concurrents, ce qui pourrait affaiblir la compétition. »

p.6 – § 1.20 « Nous pensons que les obstacles que Microsoft a placés sur le chemin des utilisateurs qui voudraient utiliser le format de fichier qui devient de plus en plus commun dans les produits de la concurrence auront pour effet de limiter l’utilisation de ces produits. La compatibilité que Microsoft propose dans Office 2007 avec les produits concurrents est moindre que celle qu’il offre pour sa propre famille de produits. Nous nous sommes plaints à l’Office of Fair Trading (OFT) du risque que cela fait courir à la concurrence et que cela constitue un abus de position dominante par Microsoft. Notre plainte est considérée par l’OFT. »

p.7 – § 1.21 « Si les établissements scolaires devaient faire la mise à jour vers Office 2007 maintenant, nous ne pensons pas que cela apporterait un plus au niveau de l’interopérabilité (indépendamment des standards) mais, au contraire, cela se ferait au détriment de l’interopérabilité et que cela introduirait des difficultés supplémentaires dans le travail quotidien. La mise en œuvre de l’interopérabilité dans un usage à domicile et à l’école ne peut pas être considéré comme facile, que ce soit pour une utilisation directe ou après configuration des éléments nécessaires (packs de compatibilité, modifications des formats de fichiers par défaut ou extensions ODF). »

p.7 – § 1.24 « Sans faire de jugement sur les avantages techniques du format de document standard international (ODF) ou du deuxième format de document proposé pour devenir un standard international (OOXML), nous pensons toujours que la cohabitation de plusieurs normes internationales incompatibles offrant globalement les mêmes fonctionnalités n’est pas dans l’intérêt des utilisateurs. Cela ne fera qu’apporter confusion et complexité et introduira un surcoût inutile. Cela constituera une formidable occasion manquée qui sera préjudiciable au marché, au monde de l’enseignement et au concept lui-même de norme internationale. »

p.9 – § 1.33 « Nous recommandions que les fournisseurs facilitent le choix aux écoles en s’assurant que les ordinateurs pour ce marché soient proposés avec un choix de suites bureautiques et que ces offres devraient idéalement comprendre une solution en logiciels libres. Nos entretiens avec l’industrie ont confirmé qu’il n’y a pas de raison concrète pour que la mise à en œuvre de cette proposition pose problème. »

p.9 – § 1.34 « Nous proposons que les écoles et les universités, lorsqu’elles établissent le cahier des charges, devraient insister pour que leurs fournisseurs leur proposent une suite bureautique capable d’ouvrir, d’éditer et de sauvegarder des documents au format ODF et permettant de définir l’ODF comme format de fichier par défaut. »

p.14 – § 4.4 « Les essais ont confirmé qu’Office 2007 fonctionne toujours bien sous Windows XP, ce qui veut dire qu’il n’est pas absolument nécessaire de migrer vers Vista avant une mise à jour vers Office 2007. »

p.15 – § 4.9 « Office 2007 introduit un nouveau format de fichier par défaut et, comme le souligne notre rapport intermédiaire, cette évolution pose quelques problèmes de compatibilité. L’interopérabilité entre Office 2007 et les versions précédentes de Microsoft Office ainsi qu’avec les suites bureautiques d’autres fournisseurs n’est pas satisfaisante. »

p.17 – § 4.22 « Le coût total du déploiement de Vista dans les écoles anglaises et galloises se situe autour de 175 millions de livres sterling (environ 230 millions d’euros). Si cette estimation n’inclut pas les cartes graphiques supplémentaires nécessaires au fonctionnement de l’interface Aero (ce qui augmenterait nettement le montant minimum) elle tient compte des mises à niveau matérielles nécessaires, du coût des licences, des tests ainsi que du coût de la configuration et du déploiement. Environ un tiers de cette somme est imputable au prix des licences Microsoft. »

p.17 – § 4.23 « Le coût d’une mise à jour de Vista sur tout le parc informatique d’une école primaire typique serait de l’ordre de £5000 (environ 6500€) (environ £125 (160€) par machine). Pour un lycée, le coût d’une mise à jour semblable serait de l’ordre de £24000 (31200€), ce qui revient à un coût par machine d’environ £75 (98€). »

p.19 – § 4.30 « Nous suggérons que les nouvelles machines achetées avec Windows Vista pré-installé soient remises sous Windows XP en attendant que tout le réseau puisse être mis à jour. »

p.19 – § 4.31 « L’interface utilisateur différente de Vista par rapport à Windows XP peut impliquer que le personnel et les élèves aient besoin d’un entraînement ou d’une familiarisation avec le nouveau système d’exploitation. Cela pourrait être source de confusion si un cours ou un enseignement clé utilise les deux systèmes. »

p.19 – § 4.31 « Les machines sous Vista pourraient ne fonctionner qu’avec une autre version d’une application voir même seulement avec des produits différents. Cela peut être source de confusion si le personnel ou les élèves doivent travailler avec les deux systèmes d’exploitation. Il pourrait aussi être nécessaire de dupliquer le travail pour certaines leçons ou pour certains projets pour les adapter à Windows Vista et Windows XP. »

p.21 – § 4.36 « Il est important de ne pas placer d’obstacles inutiles sur le chemin des élèves, des professeurs et des familles lorsque des documents doivent faire le va-et-vient entre le domicile et l’école ou l’université. De tels obstacles pourraient restreindre l’utilisation de systèmes utilisant des formats de documents différents ou aboutir à des contraintes financières inutiles. »

p.22 – § 5.2 « Une véritable interopérabilité entre documents réduit les coûts, améliore la productivité des utilisateurs et permet d’éviter de se retrouver piégé par une technologie. »

p.23 – § 5.6 « Microsoft n’a pas cherché à remédier aux préoccupations relatives à l’interopérabilité que nous avions identifiées quant au support de la norme internationale existante. Au contraire, Microsoft a continué à rechercher l’approbation pour la création d’une seconde norme internationale de documents (Office Open XML) basée sur ses propres formats de fichiers Office 2007. »

p.23 – § 5.10 « L’approche actuelle de Microsoft pour assurer l’interopérabilité avec le standard ODF est de faciliter le développement par de tierces parties de modules ou de convertisseurs pour Office 2007 plutôt que réaliser le développement elle-même et de l’intégrer complètement dans son produit. Cette approche soulève des questions en ce qui concerne les utilisateurs béotiens, comment vont-ils accéder à la fonctionnalité nécessaire et quel va être son niveau d’ergonomie. »

p.23 – § 5.11 « Sous certaines conditions, inhérentes à la date de l’étude, les utilisateurs devaient aller sur un site web tiers et effectuer une série de tâches techniques avant de pouvoir de manière satisfaisante ouvrir, modifier et enregistrer des documents au format de fichier ODF. »

p.25 – § 5.14 « Nous pensons que ces bricolages pour accéder et utiliser la possibilité d’interopérer avec les produits concurrents de Microsoft Office 2007 présentent des difficultés techniques. Ces difficultés sont susceptibles de rendre les utilisateurs moins enclins à se servir des produits concurrents et donc de fausser la compétition. »

p.26 – § 5.19 « L’interoperabilité entre Microsoft Office 2007 et des versions antérieures de Microsoft Office n’est pas supporté de façon native. Malgré tout, Microsoft a publié une mise à jour de l’ensemble de ses modules de compatibilité qui devrait permettre aux versions antérieures de Microsoft Office d’ouvrir les formats de fichiers Office 2007. Cette solution est la plupart du temps suffisante mais, en fonction de l’application bureautique utilisée et dans certaines circonstances, elle va provoquer divers degrés de dégradation ou de perte de fidélité. »

p.28 – § 5.28 « Si l’on n’intervient pas, ces évolutions vont créer, pour les utilisateurs béotiens, une vision de l’intéropérabilité des documents qui sera complexe et partisane, ce qui serait un échec de l’objectif initial d’aller vers des standards ouverts. Microsoft a une position dominante sur le segment des systèmes d’exploitation pour PC et cette position risque d’être renforcée par son approche actuelle des standards de documents ouverts. »

p.30 – § 5.33 « Les utilisateurs d’Office 2003 ou antérieur devraient installer le pack de compatibilité afin de pouvoir ouvrir n’importe quel document OOXML Office 2007. Ils ne devraient pas enregistrer leurs documents dans le format OOXML. Comme les utilisateurs d’Office 2007, ils devraient les enregistrer dans les anciens formats Microsoft (.doc pour les documents texte, .xls pour les tableurs et .ppt pour les présentations). »

p.30 – § 5.34 « Les utilisateurs d’OpenOffice.org ou de Star Office (ou d’ailleurs de n’importe quelle suite bureautique basée sur les standards libres) auront plus besoin d’être conscients de la technologie utilisée par la personne à qui ils destinent leur document pour pouvoir tenir compte des limitations d’Office 2007. Pour permettre la compatibilité, ces utilisateurs devraient toujours enregistrer leurs documents dans les anciens formats Microsoft car c’est le plus petit dénominateur commun, entre ces produits disparates, qui peut permettre l’interopérabilité . »

p.30 – § 5.36 « Les fournisseurs doivent développer des applications qui sont capables de traiter toutes les normes internationales pertinentes, en laissant aux utilisateurs le choix de savoir quel sera leur format "par défaut". »

p.31 – § 5.38 « Nous ne sommes pas convaincus que le développement de plusieurs standards internationaux traitant essentiellement du même champ d’activité soit de l’intérêt du milieu éducatif. Comme nous l’avons précédemment exprimé, nous estimons qu’une telle approche va introduire confusion, complexité et coûts inutiles. Elle constitue une formidable occasion manquée qui risque de perturber le marché, la communauté éducative et le concept même de standards internationaux. »

p.32 – § 6.4 « Ces évolutions mettent en avant le nombre grandissant de concurrents dans le domaine des suites bureautiques et montrent que des systèmes innovants basés sur des alternatives à Windows commencent à voir le jour. »

p.32 – § 6.5 « Cependant, afin que ces innovations se développent sur le marché de l’éducation il ne faut pas que des barrières réduisent la concurrence, que ce soit par des restrictions liées aux licences ou par des obstacles liés à l’interopérabilité. Ainsi, par exemple, Becta considère qu’un arrangement par lequel un appareil fonctionnant sous Linux est sujet à un paiement annuel à Microsoft selon les termes d’un programme de licence Accord School, même si cet appareil n’utilise aucun logiciel de Microsoft, n’est pas acceptable. De tels arrangements font partis des pratiques qui font l’objet de notre plainte à l’OFT. »

p.33 – § 6.9 « Contrairement à d’autres secteurs ou la demande pour des solutions en logiciels libres est visible et croissante, les estimations dans le secteur éducatif montrent une demande faible, Becta est vu comme un facteur clé dans l’instauration de cette demande. »

p.34 – § 6.11 « Au cours des douze prochains mois Becta prendra un certain nombre de mesures pour encourager un choix plus efficace dans le cadre d’un usage éducatif. Ce travail inclura la publication d’un programme de travail dont le but sera de :
– fournir plus d’informations sur le site de Becta sur ce qu’est un logiciel libre et quels sont ses avantages pour l’éducation en Grande-Bretagne
– compléter la base de recherche actuelle qui recense les usages des logiciels libres dans le secteur éducatif et identifier des déploiements modèles de logiciels libres. Cela engloberait également l’esquisse d’un tableau national des usages des logiciels libres dans les écoles et les universités
– travailler avec la communauté du logiciel libre pour établir un catalogue en ligne des logiciels libres appropriés pour l’usage dans les écoles de Grande-Bretagne. Parmi les informations disponibles on retrouvera les moyens d’obtenir une assistance dédiée à ces logiciels et comment contribuer à leur développement futur. Ce catalogue sera publié sous une licence Creative Commons afin que les fournisseurs puissent le modifier pour leur propre usage
– donner des indications aux sociétés de services en logiciels libres pour qu’elles puissent efficacement participer dans de nouvelles structures compétitives et pour qu’elles puissent proposer des logiciels libres via la structure de fournisseurs existante de Becta »

p.34 – § 6.12 « Le point de vue de certaines écoles et universités est qu’elles doivent utiliser des logiciels propriétaires particuliers car ces produits sont les plus utilisés dans l’industrie et le commerce et que, d’après cet argument, les élèves doivent se familiariser avec ce qu’ils rencontreront dans la "vraie vie". »

p.34 – § 6.13 « Les étudiants aujourd’hui sont cependant en général à l’aise avec les TIC et ils sont capables d’utiliser une large gamme de logiciels à l’école ou à l’université et certainement plus encore à leur domicile. Ils peuvent également passer sans problème de l’ordinateur de l’école à celui à la maison ou celui de la bibliothèque de quartier ou encore à celui du cybercafé. Il est très peu probable qu’ils se retrouvent démunis devant une suite bureautique particulière après leurs études parce qu’ils auront été habitués à utiliser, par exemple, OpenOffice.org à l’école. »

p.35 – § 6.14 « En résumé, l’argument de la "familiarité" est recevable pour les élèves des années 80 et 90 mais moins pour ceux du 21ème siècle. Ce serait en effet un triste constat pour l’éducation aujourd’hui en matière de TIC si, dès qu’ils s’éloignaient de leur apprentissage, les élèves n’étaient pas capables d’utiliser des programmes basiques (comme les suites bureautiques ou les navigateurs) simplement à cause de différences de fonctionnement ou entre les interfaces utilisateurs. Posséder des compétences multiples devrait faciliter la recherche d’emploi au 21ème siècle, pas la compliquer. »

Rapport Becta - Standards




Le débat sur Windows Vista et MS Office 2007 à l’école aura-t-il lieu ?

Alessandro Pucci - CC byLe Becta (British Educational Communications and Technology Agency) est une agence du Department for Children, Schools and Families du Royaume-Uni qui n’a pas d’équivalent en France[1]. Il fait office d’organe principal du gouvernement britannique pour la stratégie et le développement des technologies de l’information et de la communication pour l’éducation (TICE) auprès duquel il joue un rôle de conseil et de prescripteur.

En janvier 2008 le Becta publiait une étude détaillée sur Windows Vista et MS Office 2007. Avec son aimable autorisation, Framasoft vous en propose aujourd’hui sa traduction intégrale dont vous trouverez de larges extraits dans ce billet.

Pourquoi avons-nous pris le temps et le soin d’effectuer (bénévolement et collectivement) un tel travail[2] ?

  • Parce que nous sommes en présence d’un document dense, rigoureux et objectif, qui émane d’un organisme officiel et non d’un repaire de « libristes intégristes » comme le Framablog 😉
  • Parce que ce document n’est pas une énième pièce à charge contre Microsoft mais une étude pragmatique qui tente d’évaluer les conséquences de l’adoption de Vista et MS Office 2007 dans le contexte scolaire pour en tirer de justes recommandations.
  • Parce qu’au délà de Microsoft, ce rapport passe en revue quelques questions majeures que tout acteur du monde éducatif un tant soit peu impliqué dans les TICE devrait se poser. Parce que, enseignants, administrations, collectivités, parents d’élèves, etc. nous estimons qu’il en va de la responsabilité de chacun de se positionner sur ces questions et de faire ses choix en toute connaissance de cause.
  • Parce qu’en France, le Ministère de l’Education n’a pas jugé opportun de mener une telle étude et ne communique pas sur le sujet. Nous ne comprenons pas un tel silence. Nous pensons a contrario que ces questions sont d’importance et que les conditions d’un véritable débat sont réunies.
  • Parce que Microsoft se montre en ce moment très entreprenant à l’école. Dernier exemple en date : La mise à disposition gratuite de MS Office pour tous les enseignants. Lisez le rapport et vous comprendrez aisément le pourquoi du comment d’un tel « cadeau ».
  • Parce que plus nous serons nombreux à être informés et vigilants et plus nous aurons de chance de voir Microsoft modifier non pas ses prix mais ses pratiques. Dernier exemple en date : L’annonce de l’intégration du format ODF dans MS Office 2007 pour le premier semestre 2009, dont « Microsoft assure que sa décision n’est pas liée à la récente plainte déposée auprès de Bruxelles par l’agence gouvernementale britannique Becta » (source ZDNet).
  • Parce que tout comme le Becta nous ne sommes pas convaincus par la pertinence du format OOXML de Microsoft dont la récente standardisation ISO a posé plus de questions qu’elle n’en a résolues.
  • Parce que s’interroger sérieusement sur l’opportunité de Windows Vista et de MS Office à l’école amène à évaluer sérieusement les alternatives que proposent les logiciels libres.
  • Parce que nombreux sont les éléments exposés ici pour l’école qui valent également en dehors de l’école.
  • Parce qu’il n’y aucune fatalité à voir notre école accepter passivement une situation qui la voit simultanément dépenser inutilement ses deniers publics et prendre le risque de devenir toujours plus dépendante d’un unique éditeur de logiciels (et de formats) propriétaires. Parce que, sauf cas particuliers, les raisons qui la poussent à adopter aujourd’hui Windows Vista et MS Office 2007 ne résistent pas à l’analyse. Parce que, osons l’expression, nous ne souhaitons pas qu’elle vienne nous dire dans quelques années qu’elle ne savait pas.
  • Parce qu’il n’est pas trop tard et que nous y voyons un prétexte à enfin lancer un véritable débat en France. Parce qu’avec la magie d’internet (comprendre votre soutien et votre relai) nous avons l’espoir de sortir de notre communauté pour toucher un maximum de monde, décideurs scolaires et politiques inclus.
  • Parce que nonobstant la technicité du sujet, ce rapport demeure fort agréable à lire (si, si, je vous assure).

C’est pourquoi nous vous invitons à parcourir ce document[3], à l’évaluer pour éventuellement le partager, le diffuser (sites, blogs, listes, mails…), le rendre disponible en salle des professeurs, l’évoquer avec les enseignants de vos enfants, en parler autour de vous, etc.[4]

La période, proche des vacances, est peu propice, mais on se retrouvera à la rentrée. Et en attendant nous proposons à tous ceux qui voudraient porter ce débat avec nous de s’inscrire à une liste de diffusion spécialement créée pour l’occasion[5].

Quand bien même nous serions en phase avec les recommandations du rapport Becta, nous ne souhaitons pas vous convaincre de la pertinence de son contenu. Nous souhaitons simplement que les arguments avancés ici soient enfin discutés sérieusement sur la place publique, sachant que l’éducation nous concerne tous.

Merci de votre attention et bonne lecture…

Télécharger la traduction du rapport Becta (PDF, 370 Ko, 38 pages)

PS : Il sera beaucoup question de cette traduction lors de mon intervention intitulée « Windows Vista, accélérateur du Libre à l’école ? » qui aura lieu aux prochaines Rencontres Mondiales du Logiciel Libre de Mont de Marsan, le jeudi 3 juillet à 16h.

Notes

[1] Crédit photo : Alessandro Pucci (Creative Commons By)

[2] Cette traduction est une œuvre collaborative (et de longue haleine) de notre groupe de travail Framalang. Qu’ils en soient tout ici remerciés comme il se doit et tout particulièrement Olivier, GaeliX, Bruno, Daria, Burbumpa et enfin Vincent Lozano pour la mise en forme.

[3] Si vous manquez un peu de temps, vous pouvez retrouver de larges extraits du rapport dans ce billet.

[4] Si vous pouviez en profiter pour éventuellement évoquer au passage l’existence de Simple comme Ubuntu et Changer pour OpenOffice.org, deux livres libres de notre collection Framabook qui nous semblent être liés au sujet, nous vous en serions forts reconnaissants. Sur ce modèle, et en partenariat avec notre éditeur In Libro Veritas, nous pourrions du reste proposer une version livre du rapport si le besoin s’en faisait sentir.

[5] Pour s’inscrire à la liste de discussion et porter ce débat avec nous, il suffit d’envoyer un mail à rapport-becta@framasoft.net.




Microsoft Office 2007 désormais gratuite pour tous les enseignants

Copie d'écran - OfficePourLesEnseignants.frIl fallait s’y attendre, la suite bureautique propriétaire Office 2007 de Microsoft est désormais proposé gratuitement à tous les enseignants (ils ne disent pas gratuit mais téléchargeable sans frais ou accessible à tous mais c’est du pareil au même).

C’est annoncé en Une du Café Pédagogique dont j’ai déjà eu l’occasion de pointer les relations plus qu’étroites avec Microsoft.

Du coup sur le très ambitieux site de l’opération on apprend, entre autres choses intéressantes, qu’un forum dédié sera hébergé par le Café Pédagogique.

Il n’y a pour le moment que deux messages d’ouverture et de bienvenue sur ce forum. Ils ont été rédigés par un membre fondateur de l’association Projetice dont, désolé pour la répétition, j’ai déjà eu l’occasion de pointer les relations plus qu’étroites avec Microsoft.

Il n’y a pas à dire ils sont bien organisés…

« Que cache une offre aussi importante ? » demande le Café Pédagogique à Eric le Marois, Directeur Education & Recherche chez Microsoft France. Réponse de l’intéressé : « Rien ».

Bon, je retourne en cours (en salle informatique pour être plus précis, équipée de la suite bureautique libre OpenOffice.org pour être encore plus précis) et m’en irai poster un billet plus complet quand la cloche aura sonné.




Quand l’étudiant hongrois se trompe de cible ?

La vidéo fait sourire et est certainement promise à une belle carrière sur YouTube.

Lors d’une récente conférence à Budapest, Steve Ballmer le PDG de Microsoft planqué derrière sa tribune pour échapper aux œufs lancés (mollement) par un étudiant en colère (tee-shirt « Microsoft = Corruption » dans le dos) qui exhorte Microsoft à rendre l’argent qu’il aurait volé aux hongrois en passant, si j’ai bien compris, des accords avec les universités du pays.

Au delà de l’anecdote médiatique (qui nous rappelle celle de l’étudiant chinois), je crois que ce genre de manifestations (aussi dérisoires et pathétiques soient-elles) témoignent de l’irritation croissante des étudiants vis-à-vis de la société de Redmond dont ils comprennent petit à petit que non seulement ils peuvent s’en passer mais qu’utiliser des alternatives libres est bien plus en phase avec la culture et l’éthique des valeurs éducatives.

Dans ce contexte, lorsque leurs administrations signent des accords avec Microsoft, l’argument « c’est pour le bien de nos étudiants » (et accessoirement de notre budget) a de plus en plus de mal à passer. Ce qui me fait dire qu’en toute logique il vaudrait mieux réserver les œufs aux directeurs des institutions publiques éducatives qui entérinent ces accords (puisque Microsoft ne fait que son boulot après tout).

Quant à la situation en France autour du même sujet, si on prenait la peine de la regarder d’un peu plus près, peut-être porterait-elle Monsieur Darcos à rendre plus souvent visite à son teinturier.




Education – Pourquoi la Finlande ?

Finnish Flag - Wstryder - CC-By-Sa

Le Framablog étant tenu par un enseignant, il se permet de temps en temps des petites digressions comme celle d’aujourd’hui sur la réussite du système scolaire finlandais.[1]

En effet, en décembre dernier paraissait le nouveau rapport du programme PISA qui vise à mesurer les performances des systèmes éducatifs de la plupart des pays. Pour cette session l’accent était mis sur les sciences. Comme par le passé la Finlande a trusté les premières places tandis que la France ou les USA sont demeurés dans le ventre mou du classement (avec même une légère baisse pour la France).

Contrairement aux enquêtes précédentes, les réactions nationales furent cette fois-ci nombreuses et variés. On peut bien entendu interroger les conditions de l’évaluation PISA mais on peut aussi étudier la spécificité finlandaise pour finir par se demander pourquoi eux et pas nous ?

Pour ce qui nous concerne nous avons choisi de traduire[2] un article du Wall Street Journal qui présente la particularité pour un francophone d’étudier le cas finlandais au travers du filtre du système éducatif américain (vous trouverez également en annexe un extrait vidéo Dailymotion d’un petit reportage de France 3 dans une école finlandaise où l’on y évoque le Mind Mapping).

Quant au rapport avec le logiciels libre, a priori il n’y en a pas, si ce n’est l’anecdote historique qui a vu ce système enfanter de Linus Torvalds le papa de Linux. Et pourtant voici mon hasardeuse hypothèse (qu’il conviendrait de développer, peut-être dans un prochain billet) : Les caractéristiques du système scolaire finlandais sont bien plus susceptibles de favoriser l’émergence d’une culture libre que celles du système scolaire français.

Copie d'écran The Wall Street Journal

Qu’est ce qui rend les enfants finlandais si intelligents ?

What Makes Finnish Kids So Smart?

Ellen Gameran – 29 février – The Wall Street Journal

Les adolescents finlandais obtiennent des notes remarquables à un test international. Des professeurs américains tentent de déterminer pourquoi.

Les lycéens ici reçoivent rarement plus d’une demi-heure de devoir à faire le soir. Ils ne portent pas d’uniformes, il n’y a pas sociétés honoraires, pas de major de classe, pas de bonnet d’âne et pas de classes réservées aux meilleurs. Il y a peu de tests standardisés, les parents ne se saignent pas aux quatre veines pour payer l’université à leurs enfants et les élèves ne commencent pas l’école avant l’âge de 7 ans.

Et pourtant d’après un test international, les adolescents finlandais sont parmi les meilleurs dans le monde. Ils obtiennent certaines des meilleurs notes dans la catégorie des 15 ans qui ont passé le test dans 57 pays. Les adolescents américains ont obtenu la note moyenne de C (sur une échelle de A à F, A étant la meilleure note) alors même que les professeurs américains matraquent leurs élèves avec encore plus de devoirs, de standards et de règles. La jeunesse finlandaise, comme son alter-ego américaine, passe également beaucoup d’heures connectée. Ils se teignent les cheveux, aiment les sarcasmes et écoutent du rap et du heavy metal. Mais arrivés en 3ème ils sont bien en avance en math, en sciences et en lecture, et bien partis pour permettre aux Finlandais de conserver leur titre de travailleurs les plus productifs au monde.

Les Finlandais ont attiré l’attention grâce à leurs résultats lors des tests triennaux sponsorisés par l’Organisation de Coopération et de Développement Economique, un groupe financé par 30 pays qui suit les tendances sociales et économiques. Dans le test le plus récent, qui était axé sur les sciences, les élèves finlandais se sont classés premiers en sciences et n’étaient pas loin des meilleurs en mathématiques et en lecture d’après les résultats publiés en fin d’année dernière. Un décompte officieux des notes combinées obtenues par les Finlandais les classe premiers au général, d’après Andreas Schleider, qui dirige les tests de l’OCDE, connus également sous le nom de Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves ou PISA. Les Etats-Unis se positionnent en milieu de classement en mathématiques et en sciences, leurs scores de lecture ne sont pas pris en compte à cause d’une erreur. Environ 400 000 élèves de par le monde ont répondu à des questionnaires à choix multiples et ont rédigés des dissertations qui évaluaient leur sens critique et la mise en pratique de leurs connaissances. Un exemple de sujet : Discutez de la valeur artistique des graffitis.

Les prouesses académiques des étudiants finlandais ont attiré beaucoup la curiosité et ce sont des professeurs de plus de 50 pays qui au cours de ces dernières années ont tenté de percer le secret du pays, parmi eux : un membre du Ministère de l’éducation américain. Ce qu’ils découvrent est simple mais pas facile : des professeurs bien formés et des enfants responsables. Très tôt les enfants se débrouillent sans l’intervention des adultes et les professeurs adaptent leurs cours à leurs élèves. "Nous ne possédons pas de pétrole ou d’autres richesses. Le savoir est ce que nous les Finlandais avons." dit Hannele Frantsi, Diréctrice d’école.

Les visiteurs et les professeurs en formation peuvent avoir un aperçu de cette formule magique depuis un balcon surplombant une salle de classe à l’école Norssi à Jyväskylä, une ville dans le centre de la Finlande. Ils y observent une approche détendue, un retour au source. L’école, qui est un campus modèle, n’a pas d’équipe de sport, pas d’orchestre ou de bal de fin d’année.

Suivre Fanny Salo, une jeune fille de 15 ans de Norssi, nous donne un aperçu de ce cursus sans fioritures. Fanny est une élève de collège pétillante qui adore lire "Gossip Girl", regarder la série télévisée "Desperate Housewives" et qui adore fouiller dans les rayons des magasins H&M avec ses amies.

Fanny n’obtient que des A et comme il n’y a pas de classe spéciale pour les meilleurs, elle griffonne parfois dans son journal en attendant que les autres terminent. Elle aide aussi souvent ses camarades en difficulté. "C’est sympa d’avoir un peu de temps pour se décontracter en plein cours" dit-elle. Les professeurs finlandais pensent qu’ils obtiennent de meilleurs résultats globalement en concentrant leurs efforts sur les étudiants plus faibles plutôt que de pousser les bons élèves, ce qui tendrait à accroître les différences. L’idée est que les bons élèves peuvent aider leurs camarades moyens sans que cela ne nuise à leurs progrès.

A l’heure du déjeuner, Fanny et ses amis quittent l’établissement pour acheter du salmiakki, de la réglisse salée. Ils reviennent pour le cours de physique qui commence quand tout le monde s’est calmé. Les professeurs et les élèves s’appellent par leurs prénoms. Les seuls règles qui s’appliquent en classe sont : pas de portable, pas d’iPod et pas de chapeau.

Les amies de Fanny les plus rebelles se teignent leurs cheveux blonds en noir ou portent des dreadlocks roses. D’autres portent des débardeurs ou des talons aiguilles pour se la jouer dur dans le climat froid. L’auto-bronzant est populaire dans un groupe. Les groupes d’adolescents se distinguent par leur style, on y retrouve les "fruittari" ou BCBG, les "hoppari" ou hip-hop, ou encore, plus déroutant, les "fruittari-hoppari" qui mélangent les deux genres. Si vous posez une question évidente on vous répondra "KVG", une abréviation qui signifie "Utilise Google idiot". Les fans de heavy-metal écoutent Nightwish, un groupe finlandais et les adolescents se rencontrent sur internet sur irc-galleria.net.

L’école de Norssi est dirigée comme un hôpital universitaire avec environ 800 professeurs formés chaque année. Les étudiants de troisième cycle travaillent avec les enfants et leurs instructeurs les évaluent. Les professeurs doivent détenir un diplôme de Master et une forte compétition existe : il arrive que plus de 40 personnes postulent pour un même poste. Les salaires sont équivalents à ceux des professeurs aux Etats-Unis, mais ils bénéficient en général de plus de libertés.

Les professeurs finlandais choisissent les livres et adaptent leurs leçons mêmes s’ils visent tous les mêmes standards nationaux. "Dans la plupart des pays, l’éducation ressemble à une usine de fabrication de voitures. En Finlande, les professeurs sont les entrepreneurs" confie M. Schleicher de l’OCDE Paris, l’organisme qui a lancé le test international des élèves en 2000.

L’une des explications au succès finlandais est leur amour pour la lecture. Les parents de nouveaux-nés reçoivent un cadeau de l’Etat, on y trouve en particulier un livre d’images. Certaines bibliothèques sont construites à côté des centres commerciaux et des bibliobus sillonnent le pays pour atteindre les quartiers reculés.

Le finnois n’est parlé que dans ce pays et les livres étrangers ne sont traduits que longtemps après leur parution, même pour les plus populaires en anglais. Beaucoup d’enfants se sont donné le mal de lire le dernier Harry Potter en anglais par crainte d’entendre la fin avant qu’il ne soit disponible en finnois. Les films et programmes TV sont sous-titrés en finnois et non pas doublés. Une étudiante de l’université dit qu’elle a appris à lire rapidement quand elle était enfant parce qu’elle était accro à la série des années 90 "Beverly Hills, 90210".

En novembre, une délégation américaine s’est rendue en Finlande en espérant découvrir l’usage que font les professeurs finlandais des nouvelles technologies. Les membres du Ministère de l’Education, de la National Education Association et de l’American Association of School Librarians se sont retrouvés devant des professeurs utilisant des craies et un tableau noir plutôt que des feutres et un tableau blanc et affichant le cours grâce à un rétro-projecteur plutôt que grâce à Powerpoint. Keith Krueger a été moins impressionné par la technologie que par les bonnes méthodes d’enseignement dont il a été témoin. "On se demande comment on pourrait accomplir la même chose chez nous." s’interroge M. Krueger, PDG du Consortium for School Networking, une association de responsables des TIC dans les écoles qui a organisé le voyage.

Elina Lamponen, élève de terminale, peut parfaitement témoigner de ces différences puiqu’elle a passé un an au lycée de Colon, Michigan. Là-bas des règles plus strictes ne se traduisaient pas en leçons plus dures ou en élèves plus dévoués, dit-elle. Lorsqu’elle demandait à ses camarades s’ils avaient fait leurs devoirs ils répondaient : "Nan. Et toi, t’as fait quoi hier soir ?" se rappelle-t-elle. Les tests d’histoire étaient souvent des questionnaires à choix multiples. Les questions de dissertation, dit-elle, ne laissaient pas beaucoup de place pour s’exprimer. Les projets en cours se résumaient surtout à "colle ça sur ce poster pendant 1 heure". Son lycée finlandais a forcé Mlle Lamponen, jeune fille de 19 ans aux cheveux coiffés en pointes, a refaire son année quand elle est revenue.

Lloyd Kirby, administrateur des écoles de Colon dans le sud du Michigan, dit que l’on propose aux étudiants étrangers de demander du travail supplémentaire s’ils trouvent l’enseignement trop simple. Il révèle qu’il tente de rendre ses écoles plus rigoureuses en demandant aux parents d’être plus exigeants avec leurs enfants.

Malgré l’apparente simplicité de l’éducation finlandaise il serait difficile de la reproduire aux Etats-Unis. Avec une population très homogène, les professeurs ont peu d’élèves qui ne parlent pas finnois. Aux Etats-Unis, ce sont environ 8% des élèves qui apprennent l’anglais d’après le Ministère de l’éducation. Il y a moins de disparités dans l’éducation et moins d’écarts de revenus chez les Finlandais. La Finlande fait une sélection pour l’entrée au lycée, cette sélection se base sur les notes et 53% des élèves vont au lycée et le reste intègre le lycée technique. (Tous les élèves de 15 ans ont passé le test PISA). Dans les lycées finlandais le taux d’échec est de 4%, et de 10% dans les lycées techniques, comparé à environ 25% aux Etats-Unis, d’après les ministères de l’éducation des deux pays.

Une autre différence est économique. Chaque année scolaire, les Etats-Unis dépensent une moyenne de $8700 par étudiant alors que les Finlandais dépensent $7500. Le système de taxes élevées en Finlande assure aux élèves un financement à peu près équitable, à l’opposé des disparités entre les écoles publiques de Beverly Hills par exemple et les écoles dans des districts plus pauvres. L’écart entre l’école la meilleure et la plus mauvaise en Finlande était le plus faible de tous les pays au test PISA. Les Etats-Unis se situent dans le milieu du classement.

Les étudiants finlandais connaissent peu l’angstata ou l’angoisse de l’adolescent au sujet de l’entrée dans les meilleures universités et ils n’ont pas d’inquiétude pour le financement de leurs études. L’université est gratuite. Il existe une compétition entre les universités, mais elle se joue entre les spécialités offertes, comme l’école de médecine par exemple. Mais même les meilleures universités n’ont pas un statut élitiste comme Harvard.

Sans la compétition pour entrer dans "les bonnes écoles", les enfants finlandais peuvent profiter d’une jeunesse où ils subissent moins de pression. Alors que beaucoup de parents américains se tracassent pour faire entrer leurs bambins dans des écoles maternelles orientées sur la réussite, les Finlandais ne commencent pas l’école avant 7 ans, un an plus tard que la plupart des élèves de classe préparatoire aux Etats-Unis.

Une fois qu’ils commencent l’école les Finlandais sont plus indépendants. Alors que certains parents aux Etats-Unis pestent lorsqu’ils doivent accompagner ou aller chercher leurs enfants à l’école et préparent toutes les excursions et sorties, les jeunes Finlandais se débrouillent beaucoup plus par eux-mêmes. A l’école de Ymmersta dans une banlieue proche de Helsinki, quelques élèves de CP se trainent sous les arbres au feuillage persistant dans l’obscurité presque totale. Quand vient l’heure du repas de midi ils choisissent leurs plats, que toutes les écoles proposent gratuitement, et portent leur plateau jusqu’à leur table. L’accès à Internet n’est pas filtré dans la bibliothèque de l’école. Ils peuvent se promener en chaussettes pendant les cours, mais, à la maison, même les plus jeunes sont censés savoir lacer leurs chaussures ou chausser leurs skis seuls.

Les Finlandais bénéficient d’un niveau de vie parmi les plus élevés au monde, mais eux aussi ont peur d’être pris de vitesse par les changements liés à la mondialisation de l’économie. Leurs emplois dépendent de leurs entreprises d’électronique et de télécommunications, comme le géant finlandais du téléphone portable Nokia, ainsi que de l’exploitation forestière et minière. Certains professeurs seraient d’avis de favoriser leurs plus brillants élèves, comme le font les Etats-Unis, avec des programmes plus poussés afin de produire plus de battants. Les parents commencent également à faire pression pour que leurs enfants reçoivent une attention particulière, admet Tapio Erma, principal de l’école de Olari. "Nous sommes de plus en plus conscients du développement des idées américaines chez les parents" dit-il.

L’école de M. Erma est un établissement témoin. L’été dernier, pendant une conférence au Pérou, il a évoqué l’idée de l’adoption des méthodes d’enseignement finlandaises. Récemment, pendant un de ces cours de mathématiques avancés de l’après-midi, un lycéen s’est endormi sur sa table. Le professeur ne l’a pas dérangé et s’est plutôt concentré sur les autres élèves. Même si faire une sieste pendant les cours n’est pas excusé, M. Erma pense que "Nous devons simplement accepter le fait que ce ne sont que des enfants et qu’ils apprennent à vivre."

Annexe

Extrait vidéo du JT de France 3 (daté du 6 novembre 2004) : Reportage dans une école finlandaise (où il est notamment question de Mind Mapping ou Carte heuristique.

Notes

[1] Crédit photo : Finnish Flag par Wstryder sous licence Creative Commons By-Sa

[2] Une traduction Framalang by Olivier supervisée par Daria et GaeliX.