Nouveau projet Framapad : pensez-y si vous souhaitez collaborer en ligne !

Framapad - Copie d'écranContraction de Framasoft et d’Etherpad, Framapad est un nouveau projet à la fois modeste et ambitieux.

Modeste car il ne s’agit que de l’installation du logiciel libre Etherpad sur l’un de nos propres serveurs[1].

Mais ambitieux car nous espérons profiter de la visibilité de notre réseau pour faire découvrir et utiliser ce logiciel au plus large public possible.

Qu’est-ce donc qu’Etherpad ? Il s’agit d’un éditeur de texte collaboratif en temps réel qui permet à plusieurs personnes de partager un texte en cours d’élaboration[2].

Les contributions de chacun apparaissent immédiatement sur l’écran de tous les participants et sont signalées par des couleurs différentes. Un historique permet de revenir en arrière et une fenêtre de messagerie instantanée (ou tchat) est également disponible permettant aux différents collaborateurs de communiquer à côté du texte en construction.

Le gros avantage d’Etherpad réside dans sa rapidité et simplicitié d’utilisation.

Ni installation ni inscription ne sont demandées, tout se fait en ligne sur Internet. Il suffit de vous rendre sur le site Framapad en cliquant sur « Créer un Pad » et vous voici tout de suite opérationnel, prêt à inviter d’autres participants à vous rejoindre sur la page de votre texte (ou pad) nouvellemment créée.

Framapad - Copie d'écran

Si vous vous retrouvez en situation de devoir rédiger un texte à plusieurs mains, texte pas trop long et sans mise en forme particulière, pensez à Framapad.

C’est plus pratique (et plus ludique) qu’un wiki et plus libre (et moins lourd) qu’un Google Documents.

Pour ce qui nous concerne nous avons découvert ce logiciel il y a un an lors d’une traduction collective. Depuis nous avons pris l’habitude de l’utiliser au quotidien et le projet Framapad n’est en fait que la mise à disposition de tous de cet outil si pertinent et performant[3].

Par rapport à une installation classique d’Etherpad[4], Framapad propose l’interface en français et une documentation détaillée d’une vingtaine de pages de toutes ses fonctionnalités.

Par défaut, les pads sont publics, permanents et accessibles à tous. Mais il est également possible d’ouvrir des pads privés en se créant un compte. Vous disposerez alors de votre propre sous-domaine d’où vous pourrez gérer vos membres, contrôler l’accès, archiver et supprimer vos pads. Ce point précis fait l’objet d’un autre guide détaillé et illustré.

Merci de diffuser l’information car notre espoir récurrent est d’aller au delà des initiés[5]. L’idée étant, ici comme ailleurs, de rendre service, tout en faisant au passage l’expérience du travail collaboratif à la base même du logiciel libre et de sa culture.

-> Se rendre sur Framapad.org

Notes

[1] Pour la petite histoire, Etherpad est devenu libre en décembre 2009, le jour où Google a décidé de diffuser les sources sous Licence Apache v2.

[2] Il est théoriquement possible de se retrouver jusqu’à 16 collaborateurs sur un même document. Nous avons fixé cette limite à 8 pour le moment afin d’éviter le congestions et voir si notre serveur tient la charge.

[3] Un grand merci au passage à Simon Descarpentries (Siltaar) pour avoir piloté ce projet Framasoft.

[4] Autres exemples d’Etherpad sur le Web : Piratepad, Titanpad, Primarypad ou l’Epad de Recit.org (lui aussi francisé).

[5] Merci également de nous signaler dans les commentaires les bugs rencontrés et plus généralement vos remarques et suggestions sur ce projet.




L’association Framasoft publie son rapport moral 2010

Yesika - CC by-saNé en 2001 Framasoft est un réseau de sites et de projets collaboratifs dont l’objectif est de promouvoir et diffuser le logiciel libre et sa culture au plus large public. Avec le temps ce réseau a pris une telle dimension qu’il a eu besoin de s’appuyer sur une structure associative, créée en 2004, pour soutenir son action.

Vous trouverez ci-dessous le rapport moral et financier de l’association pour l’année 2010.

Encore une année riche et bien remplie. Il faut dire qu’avec un annuaire qui a dépassé les 1 500 logiciels (dont une sélection à installer automatiquement), une collection de désormais 10 livres, une clé USB et un DVD aux multiples déclinaisons, un espace de discussion, un autre d’information, un canal vidéo… et même une boutique en ligne, il y a de quoi faire. Sans compter notre présence sur le terrain à une bonne trentaine de manifestations autour du Libre.

La campagne de dons « 1000 10 1 » (1000 donateurs à 10 euros par mois pendant 1 an) n’a pour le moment pas atteint son objectif initial puisque nous n’en sommes qu’à la moitié du chemin. Elle nous assure cependant déjà la pérennisation complète d’un permanent et nous permet d’envisager l’avenir avec si ce n’est sérénité tout du moins un certain optimisme[1].

Grand merci à tous les donateurs (que la crise n’épargnent souvent pas). Merci également à tous ceux qui nous ont laissés un petit mot sur le site de soutien, nous avons eu l’idée d’en faire une synthèse sous forme de carte heuristique que nous consultons de temps en temps pour nous redonner le moral les jours où le travail se fait trop pesant 😉

Merci enfin et surtout aux animateurs, développeurs, rédacteurs, traducteurs, relecteurs, sous-titreurs, etc., à tous ceux qui de près ou de loin participent avec nous à cette aventure qui voit chaque année le logiciel libre prendre un peu plus de place dans nos ordinateurs et dans nos esprits en témoignant par la pratique que d’autres mondes sont possibles.

Remarque : Framasoft fêtera donc ses 10 ans le 13 novembre prochain (date du dépôt du nom de domaine framasoft.net). Si vous avez des idées originales pour célébrer comme il se doit l’évènement, nous sommes preneurs 😉

Notes

[1] Crédit photo : Yesika (Creative Commons By-Sa)




Internet ne peut pas être contrôlé, autant s’y faire – par Laurent Chemla

Evil Erin - CC byOn trouve un article puissant et inédit de Laurent Chemla en ouverture (ou prolégomènes) du tout récent framabook AlternC Comme si vous y étiez.

Historiquement, techniquement, économiquement et moralement, Internet ne peut pas être contrôlé[1].

Autant s’y faire. Et, contrairement à d’autres, nous nous y faisons très bien 😉

Pour rappel toute l’équipe l’AlternC vous attend à La Cantine lundi 28 mars prochain (de 19h à 22h) pour fêter simultanément la sortie du livre, les dix ans d’AlternC et la version 1.0 du logiciel !

Remarque : Ce n’est pas le premier article de Chemla que nous reproduisons sur le Framablog (cf L’avenir d’Internet). Par ailleurs je le remercie de m’avoir ouvert les yeux en 1999 avec Internet : Le yoyo, le téléporteur, la carmagnole et le mammouth.

Internet ne peut pas être contrôlé, autant s’y faire

Laurent Chemla – juillet 2010 – Licence Creative Commons By-Sa

Plus que jamais, à l’heure où j’écris ces lignes, Internet est la cible des critiques du pouvoir. Il serait responsable de toutes les dérives, de toutes les ignominies, il nous ramènerait aux pires heures de notre histoire et serait le lieu de toutes les turpitudes.

Bon. Depuis longtemps, je dis qu’il est normal – de la part de ceux qui disposaient de l’exclusivité de la parole publique – de s’inquiéter de l’avènement d’un outil qui permet à tout un chacun de s’exprimer. Pas de quoi s’étonner, dès lors, des attaques furieuses que subit le réseau.

Tant qu’il ne s’agit que de mots…

Oh bien sûr, le législateur étant ce qu’il est, il tente souvent d’aller au delà des mots. Il fait aussi des lois. C’est son métier.

Or donc – sans volonté d’exhaustivité – nous avons vu depuis 1995 un certain nombre de tentatives de « régulation », de « contrôle », voire même de « domestication ». Il y a eu la loi Fillon, la commission Beaussant, la LCEN, la DADVSI, la LSI, la LSQ, et plus récemment HADOPI et LOPPSI. Beaucoup d’acronymes et de travail législatif pour un résultat plus que mince : ce qui n’a pas été retoqué par le Conseil Constitutionnel s’est toujours avéré inapplicable.

La seule chose qui reste, c’est le principe d’irresponsabilité pénale des intermédiaires techniques (LCEN). Grand succès !

On pourrait imaginer que le pouvoir apprendrait quelque chose d’une telle suite d’échecs. On pourrait penser, par exemple, qu’il mesurerait le risque de vouloir créer des lois d’exceptions selon qu’on s’exprime sur Internet ou ailleurs. Que nenni : aujourd’hui encore, j’apprends qu’une député vient de se ridiculiser en proposant d’encadrer le journalisme « en ligne ».

J’ai hâte. On en rigole d’avance.

Mais qu’est qui rend Internet si imperméable à ces tentatives réitérées de contrôle ? J’y vois (au moins) quatre raisons majeures :

La première (dans tous les sens du terme) est historique. À la demande de l’armée américaine, qui souhaitait trouver une parade au risque d’une attaque nucléaire contre son réseau de télécommunication, Internet a été inventé à la fin des années 1960 (dans l’Amérique de Woodstock et de la lutte contre la guerre du Vietnam) par de jeunes universitaires qui rêvaient d’un monde dans lequel l’accès à un réseau mondial de communication serait un droit pour tous (pour que son impact social soit positif)[2].

À l’époque de Mac Luhan, les bases théoriques du futur réseau sont toutes influencées par l’utopie du « village global » et teintées d’idéologie libertaire. Le principe selon lequel la rédaction d’une RFC (texte définissant un des standards d’Internet) doit être ouverte à tous, scientifique ou non – et son contenu libre de droit – est adopté en avril 1969.

Quoi d’étonnant dès lors si le résultat est un réseau presque entièrement décentralisé et non hiérarchique ? Après tout, c’est bien ce que l’armée américaine avait demandé à ses jeunes ingénieurs : un réseau centralisé est facile à détruire (il suffit d’attaquer le centre).

Tout ce qui est facile à contrôler est facile à détruire.
Internet est difficile à détruire.
Donc Internet est difficile à contrôler.

Il faudrait, pour qu’Internet soit plus aisément « domestiquable », que ses bases théoriques mêmes soient revues (à l’exemple du Minitel pour lequel l’émission de contenus était soumise à l’approbation préalable de France Telecom). Mais comment démanteler l’existant et interdire l’utilisation d’une technologie ayant fait ses preuves à tous ceux qui l’ont adoptée depuis des années ?

Et surtout – c’est la seconde raison qui fait d’Internet un bastion dont la prise semble bien difficile – le réseau est international.

On peut, même si c’est difficile à envisager, imaginer qu’un pays impose à ses citoyens l’usage d’une technologie « contrôlée » plutôt qu’une autre, trop permissive. Mais quel pouvoir pourrait faire de même à l’échelle du monde ?

Et comment, dès lors qu’il existerait ne serait-ce qu’un seul endroit dans le monde qui protège la liberté totale de communication (comme c’est le cas depuis peu de l’Islande), empêcher les citoyens et les entreprises du monde entier d’exporter dans ce lieu une communication désormais dématérialisée ?

Pour y parvenir, il faudra non seulement pouvoir contrôler tel ou tel réseau imaginaire, mais aussi réussir à interdire toute communication internationale… Mission impossible. Et puis, comment imaginer la fin des « paradis numériques » dans un monde qui n’a jamais réussi à obtenir celle des paradis fiscaux ?

Internet est supranational.
Il existera toujours des paradis numériques.
Donc l’information ne pourra jamais être contrôlée.

D’autant plus – et c’est la troisième raison majeure qui rend dangereuse toute tentative de contrôle des réseaux – qu’Internet est devenu désormais une source de croissance non négligeable. Une croissance qui dépend d’une législation pérenne et qui surtout va faire l’objet d’une concurrence effrénée entre les pays.

On n’imagine pas aujourd’hui une grande entreprise, telle que Google ou Facebook, avoir son siège social dans un pays dont la fiscalité n’est pas, disons, encourageante. Comment imaginer que demain une entreprise innovante, source d’emplois et d’impôts, se créera dans un pays dont la législation imposerait un contrôle trop strict de l’information diffusée ?

Tout contrôle nécessite une infrastructure plus chère, tant humaine que technique. Il va de soi qu’une entreprise capitaliste choisira plutôt, si elle a le choix, le pays d’accueil dont la législation numérique sera la plus laxiste, qui récupérera du coup les emplois et les impôts (et je ne dis pas que c’est bien : je dis juste que c’est dans ce monde là qu’on vit).

Et même avant d’en arriver là : imaginons qu’un pays impose le filtrage à la source de tout contenu illégal (en passant outre la difficulté technique inhérente). Quel entrepreneur de ce pays osera se lancer dans un nouveau projet novateur, sachant qu’il sera immédiatement copié par un concurrent vivant, lui, dans un paradis numérique et qui ne sera pas soumis aux mêmes contraintes ?

Internet est solide, c’est vrai, mais l’innovation reste fragile, et est souvent l’oeuvre de petites structures très réactives et pécuniairement défavorisées. Les lois votées à l’emporte-pièces sans tenir compte de cette fragilité-là sont autant de balles tirées dans le pied de la société toute entière.

La concurrence est mondialisée.
Une législation de contrôle coûte cher.
Donc les lois de contrôle d’Internet sont source de délocalisation.

Malgré tout il existe bel et bien des règles de vie supranationales et qui s’imposent à tout pays se voulant un tant soit peu démocratique. Mais si.

Je vais citer ici l’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Lisez-la bien :

« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ».

Elle a été rédigée en 1948. Bien avant Internet, même si à la lire on a l’impression qu’elle a été écrite spécialement pour lui. Car en effet, il n’existait pas grand chose, avant Internet, pour « recevoir et répandre sans considération de frontière les informations et les idées ». Il faut croire que ses rédacteurs étaient visionnaires…

Comment s’étonner, à la lecture de cet article, du nombre de censures que notre Conseil Constitutionnel a opposé aux diverses velléités de contrôle que le pouvoir a tenté d’imposer depuis 15 ans ?

Le droit de recevoir et diffuser de l’information est inaliénable.
Internet est à ce jour l’unique moyen d’exercer ce droit.
Donc tout contrôle d’Internet risque d’être contraire aux droits de l’homme.

Sauf à s’exonérer des grands principes fondamentaux, et donc à vivre dans une société totalitaire, le contrôle ou le filtrage d’Internet se heurtera toujours à la liberté d’expression. Les états peuvent l’accepter, et à l’instar de l’Islande décider d’en profiter, ou refuser de le voir et, à l’instar de la France, se heurter sans cesse à un mur en essayant encore et encore de réguler ce qui ne peut l’être.

Historiquement, techniquement, économiquement et moralement, Internet ne peut pas être contrôlé.

Autant s’y faire.

Notes

[1] Crédit photo : Evil Erin (Creative Commons By)

[2] J.C.R Licklider et Robert Taylor, The Computer as a Communication Device in Science and Technology, April 1968.




Une France qui s’annonce terrifiante pour Internet et les libertés numériques

Fabrice Epelboin nous révèle aujourd’hui que ReadWriteWeb met fin à ses éditions européennes, avec toutes les questions que cela pose quant au devenir et aux archives de la version française de RWW.

C’est le risque lorsque l’on dépend d’une maison mère américaine et que les articles n’ont jamais eu l’honneur d’une licence Creative Commons (sauf justement ce dernier billet où Epelboin à décidé de s’affranchir de la tutelle dans un dernier baroud d’honneur).

Notez bien que pareille mésaventure peut arriver à tous ceux qui placent du contenu sur Facebook, Twitter ou Google (autant dire à tous le monde). Puisque en vous inscrivant à ces services vous adhérez à des conditions dont il est bien stipulé qu’elles peuvent changer à tout moment si le propriétaire en décide ainsi. Par exemple si les actionnaires de ces sociétés décident d’en modifier le modèle économique CQFD.

Merci au passage à Fabrice Epelboin[1] et à RWW France pour la pertinence et la pugnacité de leurs informations, reportages et analyses (cf l’excellente compilation Chroniques de l’Infowar 2010 De l’Hadopi à Wikileaks à conserver au cas où). Nous n’étions pas de trop pour tenter d’apporter un autre son de cloche face à des institutions publiques et privées qui ont la fâcheuse tendance à prendre le Net et les nouvelles technologies par le mauvais bout de la lorgnette.

Mais ce qui m’a le plus marqué c’est la conclusion du billet. Un peu comme si l’auteur s’était lâché en livrant véritablement le fond de sa pensée. Et cette pensée est d’autant plus pro-fonde que le gus sait de quoi il parle :

« Les temps qui viennent en France sont terrifiants pour internet et les libertés numériques. Du point de vue des lois qui s’y appliquent, nous ne sommes plus, sur l’internet Français, dans une démocratie.

Avec quelques gus dans un garage, nous avons réussi a sensibiliser pas mal de monde à ce problème, mais force est de reconnaître que nous avons, au mieux, mis des bâtons dans les roues d’un char d’assaut qui écrase toutes les velléités de liberté sur internet, et veut le civiliser comme il a colonisé hier ceux qu’il qualifiait de sauvages.

Un autre monde est possible, mais en France, ça va prendre du temps. Une fois de plus, le pays va prendre un retard considérable en matière de numérique, au point que sa place dans le monde de demain est désormais totalement compromise, mais ça, même sans comprendre quoi que ce soit à la neutralité du net ou aux enjeux sociétaux d’Hadopi et de Loppsi, vous avez du vous en apercevoir. »

Aux dernières nouvelles Fabrice Epelboin s’en irait rouler sa bosse en Tunisie. Parce qu’il souhaite désormais « construire avec » et non plus « lutter contre ».

Il reste une place dans l’avion ?




Nouveau Framabook : AlternC Comme si vous y étiez

AlternC Comme si vous y étiez - FramabookOuvrons ce billet par une citation clin d”œil de Jean-Marc Manach qui résume bien le nouveau livre libre framabook que nous sommes fiers de vous présenter aujourd’hui : « Offrez un nom de domaine à un homme et vous le nourrirez pour un jour. Apprenez-lui à l’administrer et vous le nourrirez pour toute la vie. »

C’est en effet ce que propose depuis longtemps déjà le projet libre et associatif AlternC, dont la démarche mais surtout l’existence bien réelle constituent un formidable rempart aux attaques actuelles contre les fondamentaux du Net.

AlternC c’est avant tout une suite logicielle permettant de gérer un ou plusieurs serveurs d’hébergement de site web, email, listes de discussions et autres services Internet.

Que vous soyez simple blogueur, hébergeur associatif ou industriel, professionel du web en agence, ou toute autre structure juridique aux facettes multiples (mairies, grande entreprise, fédération …), AlternC vous permet de gérer facilement les comptes d’hébergement de plusieurs entités, à travers une interface web simple, intuitive et multilingue. Les spécialistes du réseau et administrateurs système profitent aussi d’AlternC pour simplifier et industrialiser leurs processus de gestion d’infrastructure, et pouvoir ainsi confier à leur client la gestion des éléments simples de leur hébergement.

Mais AlternC c’est également se plonger dans l’histoire du Web francophone en général et du Web francophone libre en particulier, puisque le projet est directement issu du mythique service altern.org de Valentin Lacambre.

AlternC c’est enfin un projet politique, une informatique résolument tournée vers les logiciels libres, une volonté d’aider chacun à devenir son propre hébergeur, s’il le souhaite, dans le respect d’Internet et de ce qui fut son fondement toujours menacé : la liberté.

Rédigé, aussi bien à l’occasion des dix ans du projet que de la sortie imminente de la version 1.0 d’AlternC, par ces deux pionniers du libre que sont les hyperactifs Chantal Bernard-Putz et Benjamin Sonntag, cet ouvrage (illustré en couleur de 234 pages) propose un guide pas à pas du logiciel, de la gestion des comptes à l’installation (côté client) et l’administration de la plateforme (côté serveur).

Il a été entièrement réalisé sous LibreOffice. Il est édité par InLibroVeritas sous licence Creative Commons By-Sa. Les auteurs ont gracieusement décidé de céder l’intégralité de leurs droits d’auteur à La Quadrature du Net.

Le guide est encadré par deux articles de Laurent Chemla et Sébastien Canevet. C’est ce dernier que nous avons choisi de reproduire ci-dessous.

Les auteurs vous donnent rendez-vous le 28 mars prochain à 19h à La Cantine (Paris) pour une présentation du livre qui coïncidera avec la sortie de la version 1.0 d’AlternC ! C’est aussi à ce moment-là que symboliquement les sources du livre seront libérées.

-> Découvrir, télécharger et/ou acheter AlternC Comme si vous y étiez sur le site Framabook.

La neutralité du Net ne s’use que si on ne s’en sert pas !

Sébastien Canevet – décembre 2010

L’un des principes fondateurs d’internet conduit à traiter également toute information qui circule sur le réseau, indépendamment de sa source, de sa destination ou de son contenu. C’est la « neutralité du net ».

Lors de la création d’internet, la rusticité des outils alors mis en oeuvre ne permettait pas ce genre de discrimination. Aujourd’hui, le perfectionnement des équipements techniques rend possible une gestion discriminatoire du trafic. Cette idée malvenue ne manque pourtant pas de partisans. Les arguments pour la combattre sont plutôt nombreux, de la démocratie à la promotion de l’innovation et passant l’économie du développement des infrastructures.

Loin des débats théoriques sur ces principes fondamentaux, certains acteurs de l’internet ont choisi de participer à ce débat d’une autre façon, en rendant rapidement et facilement accessible la mise en place d’un hébergeur indépendant. Tel est le projet AlternC.

Alors que l’hébergement d’un site web était hors de portée des acteurs autres que les opérateurs institutionnels, publics ou privés, la mise à disposition de la suite logicielle AlternC permet depuis dix ans de gérer aisément un hébergeur mutualisé, assurant ainsi une indépendance technique à ceux qui souhaitent consacrer un minium de temps et quelques moyens (limités) à cette tâche.

Projet libre, il était logique qu’AlternC fut également un logiciel libre. A l’aube du projet, seuls les informaticiens (ou presque) comprenaient les enjeux de ce choix. C’est donc en connaissance de cause que les promoteurs du projet choisirent un logiciel libre (l’altern de Valentin Lacambre) plutôt que son homologue propriétaire, pour le faire évoluer.

C’est ainsi que, prouvant le mouvement en marchant, et mettant en oeuvre la neutralité du net bien avant que la problématique n’héberge au sein du public averti[1], AlternC permet la mise en oeuvre de l’hébergement de sites internet librement, et ceci aux quatre sens du mot libre lorsqu’il est accolé à nom logiciel.

  • Première des quatre libertés, l‘« exécution du programme », ou plus largement l’utilisation d’AlternC est libre, en ce sens que vous pouvez utiliser ces logiciels pour n’importe quel usage, commercial ou pas, et ceci sans aucune limitation d’aucune sorte. Il est d’ailleurs important pour les logiciels libres en général que leur utilisation dans la sphère commerciale et industrielle soit la plus large possible, ce ci afin d’éviter qu’ils ne soient isolés dans un milieu étroit….
  • La liberté d’étude est la seconde liberté. Alors que leurs homologues « propriétaires » sont enfermés dans un carcan juridique étroit et compliqué[2], l’étude d’AlternC n’est soumise à aucune contrainte. C’est ainsi que l’on peut librement étudier le fonctionnement de ces logiciels, quel que soit l’objectif de cette étude. La libre disposition du code source facilite cette étude.
  • La distribution de copie des logiciels AlternC est elle aussi possible librement, quelles que soient les conditions (gratuité ou pas…) de cette distribution. Une activité économique est ainsi parfaitement imaginable.
  • Enfin, il est possible (et même souhaitable) qu’AlternC soit l’objet d’améliorations. Cette suite logicielle est une oeuvre « in progress », en ce sens que, au sein de la communauté AlternC ou en dehors, toute personne ayant la compétence et la volonté de modifier ces programmes, peut le faire sans contrainte.

J’aime à répéter que ce que l’on ne trouve pas sur internet n’existe pas, tant le réseau est aujourd’hui d’une richesse inouïe.

Bien au delà des seuls usages commerciaux, dans lesquels l’utilisateur n’est envisagé que comme un consommateur, qui n’utiliserait le réseau que pour dépenser son argent, se contentant pour le reste de demeurer tranquillement sous perfusion télévisuelle, l’usager d’AlternC est un véritable acteur du réseau. C’est pour cela que cet ouvrage a été écrit.

-> Découvrir, télécharger et/ou acheter AlternC Comme si vous y étiez sur le site Framabook.

Notes

[1] L’article fondateur de Tim Wu, « Network Neutrality, Broadband Discrimination » date de 2003, mais la prise de conscience collective de l’importance de cette neutralité est bien plus tardive.

[2] En effet, l’étude et la décompilation d’un logiciel non libre n’est possible que dans une mesure très limitée, à seule fin d’assurer l’interopérabilité, et encore à condition que les informations nécessaires ne soient pas déjà rendues publiques.




Avec Open Mesh les humains sont les routeurs (et sauvent les révolutions)

Tanakawho - CC byAyant tiré ses propres conclusions de la révolte tunisienne, l’Égypte décida, le 28 janvier dernier, de couper Internet pour neutraliser les moyens de communication et ainsi contrecarrer les manifestations anti-Moubarak.

Et tout d’un coup, ce qui était un extraordinaire avantage devint une formidable faiblesse.

Comment faire dès lors pour se prémunir d’une telle décision radicale et continuer à assurer l’un des droits de plus en plus fondamental de ce nouveau millénaire ?

Comme pour la Freedom Box, une piste de solution est à rechercher du côté du réseau maillé avec l’originalité de jouer nous-mêmes le rôle de routeurs Internet[1] :

« L’idée fondatrice d’OpenMesh est que nous puissions utiliser de nouvelles techniques pour créer un réseau Internet secondaire dans les pays comme la Libye, la Syrie, l’Iran, la Corée du Nord et d’autres régimes répressifs dans lesquels les citoyens ne peuvent pas communiquer librement. En créant des routeurs mobiles qui se connectent entre eux, nous pourrions créer un réseau auquel les téléphones portables et les ordinateurs personnels se connecteraient. La première priorité serait de relier les personnes entre elles, la seconde de les relier au reste du monde. Sur un second front, nous pourrions utiliser des connexions intermittentes par satellite afin que les citoyens de ces pays puissent mettre en ligne et télécharger des informations avec le reste du monde… »

Les humains sont les routeurs

Humans are the routers

Shervin Pishevar – 27 février 2011 – Techcrunch.com
(Traduction Framalang : Naar, Pandark et Goofy)

Le 7 janvier 2010, j’étais convié à un petit dîner privé avec la secrétaire d’État Hillary Clinton au département d’État avec l’inventeur de Twitter, Jack Dorsey, Eric Schmidt, le PDG de Google et quelques autres. Nous étions là pour parler des technologies et des questions diplomatiques du XXIe siècle. Au cours de la discussion, j’ai remarqué près de moi la petite table sur laquelle Thomas Jefferson rédigea le premier jet de la Déclaration d’Indépendance. J’étais inspiré par l’Histoire qui nous entourait pendant que nous discutions de celle qui s’ouvrait devant nous. Je faisais face à Mme Clinton quand elle m’a posé une question à laquelle j’ai répondu : « Madame la Secrétaire d’État, le dernier bastion de la dictature est le routeur ». Cette soirée a fait germer certaines des idées au cœur de l’important discours de la secrétaire d’État au sujet des libertés sur Internet le 21 janvier 2010.

Passons directement, quasi un an plus tard,au 25 janvier 2011 — un jour qui devait marquer l’Histoire aux côtés de dates comme le 4 juillet 1776. La décision de l’Égypte de bloquer entièrement Internet et le réseau de télécommunications mobiles a été l’une des premières salves dans une guerre de munitions électroniques. Sur ce nouveau front, les humains sont les routeurs, et armés des nouvelles technologies, ils ne pourront plus jamais être bloqués ni réduits au silence.

J’étais debout depuis des jours, partageant et tweetant les informations au fur et à mesure de leur apparition. J’avais deux amis proches en Égypte, qui me transmettaient des informations quand ils le pouvaient. Le jour où l’Égypte a bloqué Internet et le réseau mobile, je me suis souvenu de ce que j’avais dit à la secrétaires d’État Clinton. La seule ligne de défense contre le filtrage et le blocage par un gouvernement des communications et de la coordination entre ses citoyens via les réseaux de communication était de créer un nouveau type de technologies de communication que les gouvernements auraient du mal à bloquer : un réseau maillé, sans fil, dédié. J’ai appelé cette idée OpenMesh et l’ai tweettée.

Au cours des heures qui ont suivi, grâce au travail commun des volontaires, le projet OpenMesh prenait forme, avec un nom de domaine, un site web et un forum. Un volontaire, Gary Jay Brooks, tech-entrepreneur du Michigan, s’est proposé comme directeur bénévole pour coordonner le travail. Une autre société au Canada a offert bénévolement des spécifications pour un mini-routeur mobile pouvant être dissimulé dans une poche, et dont la fabrication ne nous coûterait que 90 dollars par unité. Un autre pionnier des communications s’est manifesté pour faire don d’importants brevets dans ce domaine.

L’idée fondatrice d’OpenMesh est que nous puissions utiliser de nouvelles techniques pour créer un réseau Internet secondaire dans les pays comme la Libye, la Syrie, l’Iran, la Corée du Nord et d’autres régimes répressifs dans lesquels les citoyens ne peuvent pas communiquer librement. En créant des routeurs mobiles qui se connectent entre eux, nous pourrions créer un réseau auquel les téléphones portables et les ordinateurs personnels se connecteraient. La première priorité serait de relier les personnes entre elles, la seconde de les relier au reste du monde. Sur un second front, nous pourrions utiliser des connexions intermittentes par satellite afin que les citoyens de ces pays puissent mettre en ligne et télécharger des informations avec le reste du monde. OpenMesh se veut un lieu d’échange d’informations pour connecter les meilleures idées existantes et mettre les outils entre les mains de tous.

Le réseau OpenMesh est un type de réseau au sein duquel chacun des nœuds reliés au réseau peut agir comme un routeur indépendant ou un dispositif intelligent, qu’il dispose ou non d’une connexion à Internet. Les réseaux maillés sont incroyablement robustes, avec des connexions continues qui peuvent se reconfigurer autour de chemins brisés ou bloqués en « sautant » de nœud en nœud jusqu’à ce que la destination soit atteinte, comme un autre appareil sur le réseau ou une liaison vers Internet. Quand un accès local à Internet est disponible, ils peuvent augmenter le nombre de personnes capables de s’y connecter. Lorsqu’il n’y en a pas, les réseaux maillés peuvent permettre aux personnes de communiquer ensemble même si les autres formes de communication électronique sont hors d’usage. Les dispositifs sont compatibles avec la plupart des ordinateurs équipés du wifi et fonctionnent sur les systèmes Microsoft Windows, Apple OS X et Unix existants, ainsi que les appareils mobiles iPhone et Android. Un réseau open source offre de plus une solution adaptable qui engage des frais réduits tout en évitant les erreurs du passé et les verrous des constructeurs. Combinés à du matériel ouvert, ces réseaux rendent plus facile une maintenance évolutive et leur amélioration sur le long terme.

Nous allons établir, construire, soutenir et distribuer un firmware Mesh open source qui permettra aux citoyens du monde de communiquer sans téléphone ni câblo-opérateur. Le produit brut d’OpenMeshProject.org sera libre et gratuit à télécharger et utiliser. La technologie sera distribuée et maintenue comme projet open source GPL v2. Cela signifie que tout le monde peut utiliser ou modifier le logiciel. Notre travail en tant que communauté sera de soutenir le projet. Nous aiderons à créer des standards. Nous aiderons les communautés à créer des réseaux maillés. Nous ferons pression sur les fabricants d’équipement pour qu’ils rejoignent l’initiative du Projet Open Mesh. L’idée tourne entièrement autour de la technologie sans fil qui nous permettra de communiquer ensemble sans ligne, ni câble, ni fibre. Nous construirons un réseau privé capable de couvrir des pays entiers. Nous donnerons le pouvoir aux citoyens de demain. Au final, une grand-mère pourra trouver ce disque dans la rue, rentrer à la maison, installer le CD dans son ordinateur portable et rejoindre le réseau maillé en deux clics. Après quoi elle commencera à voir les autres sur son réseau, à cliquer pour y appeler d’autres membres, rejoindre des conversations multi-utilisateurs ou chercher des amis en ligne pour discuter. Nous, en tant que communauté d’OpenMeshProject.org, faciliterons la construction et le soutien de ce projet. Nous construirons tous ensemble un maillage. Nous inviterons les gens à participer et à proposer de nouvelles innovations. En travaillant ensemble, nous pouvons assurer les communications qui seront nécessaires demain.

La liberté de communiquer fait partie de nos droits fondamentaux. Le XXIe siècle sera défini par le principe qu’aucun gouvernement, aucun pouvoir ne devra jamais bloquer ni brider le droit de tous les hommes et femmes de communiquer ensemble. Mon rêve le plus cher, c’est que de mon vivant, les dictatures soient bannies de cette planète et qu’une véritable démocratie non limitée fleurisse partout. Il est temps que cessent nos marchés faustiens avec les dictateurs brutaux pour des intérêts à court terme et qu’ils soient remplacés par une nouvelle alliance avec les citoyens du monde entier qui recherchent la liberté. OpenMesh est un premier pas qui aidera à créer un monde où une telle alliance pourra se maintenir, un monde où les personnes courageuses armées de ces nouveaux outils ne pourront plus jamais être contraintes ni muselées.

Note de l’éditeur : L’auteur invité Shervin Pishevar est le fondateur du projet OpenMesh et de SGN, ainsi qu’un Business angel actif.

Notes

[1] Crédit photo : Tanakawho (Creative Commons By)




Raleigh, Montréal… quelle sera la première ville Open Source du monde ?

Open Source CityDeux traductions pour s’interroger ensemble sur le concept de « ville Open Source ».

Il s’agit de voir ici la ville comme une plateforme, une plaque tournante, un incubateur, bref un lieu privilégié où peuvent s’épanouir les entreprises et start-up qui placent l’open source au cœur de leur stratégie et de leur développement.

Les villes de Raleigh (USA) et Montréal (Canada) souhaitent apparemment poser candidature et ont, semble-t-il, de bons arguments.

Encore faudrait-il définir ce qu’est ou peut être une « ville Open Source », et se demander si il est pertinent de vouloir créer, favoriser ou labelliser de telles villes[1].

L’un des auteurs nous propose ainsi trois critères : la volonté de partager, la volonté d’être informé, et une attitude ouverte à l’innovation, à la créativité et aux expérimentations de toutes sortes.

Et en France, me direz-vous ? Cela bouge du côté de l’Open Data (Rennes, Paris…) mais au delà, je ne sais pas. Des avis et des liens sur la question ?

PS : Nous avions déjà évoqué la chose dans un billet sur une autre ville canadienne Vancouver : S’il te plaît… dessine-moi une ville libre.

1. Raleigh, Caroline du nord – la première ville open source au monde

Raleigh, NC—the world’s first open source city

Jason Hibbets – 21 février 2011 – OpenSource.com
(Traduction Framalang : Khyl, Naar, Cheval boiteux et Goofy)

J’ai commencé à méditer sur les qualités qui devaient définir une ville open source il y a quelques mois, quand mon ami Tom Rabon m’en a fait mention au détour d’une conversation. J’étais curieux de voir de quelle façon la ville dans laquelle j’habite, Raleigh, en Caroline du nord, pouvait attirer d’autres entreprises open source et en être un incubateur mondial, pour en devenir un exemple phare de gouvernance. Comment Raleigh pouvait-elle devenir la capitale du monde de l’open source, à l’instar de ce que sont la Silicon Valley pour la technologie et Paris pour la romance ?

Je pense que la réponse peut être trouvée à la fois par le gouvernement et par la population. D’abord, nos dirigeants doivent être partants pour adopter l’open source au quotidien. Ils doivent faire preuve de transparence dans leur gestion des affaires et dans l’encouragement à la participation citoyenne. Les citoyens, quant à eux, doivent être prêts à participer et à contribuer en donnant de leur temps et de leurs connaissances. Les deux ont besoin d’adopter un prototypage rapide pour explorer de nouvelles idées et des solutions innovantes.

Mais en quoi Raleigh se distingue-t-elle des autres villes ? En quoi est-elle plus apte à être une ville open source que New York, San Francisco, Londres, Paris ou Pékin ? J’ai rencontré autour d’une table le maire de Raleigh, Charles Meeker, pour discuter de ce qui faisait qu’une ville pouvait devenir open source.

Le maire Meeker a été élu en 2001 et s’est familiarisé avec l’open source, principalement en s’intéressant à Red Hat et au modèle de développement open source. En tant qu’avocat, il n’est pas étonnant que le maire Meeker comprenne les avantages de la collaboration et du partage des connaissances. Voyons pourquoi la ville de Raleigh est prête à revendiquer son titre de première ville open source au monde.

Quel grand chantier, en dehors de la technologie, a la meilleure chance d’être abordé par la voie open source (c’est-à-dire au moyen de la collaboration, de la transparence, du partage, de la méritocratie, du prototypage rapide, d’une communauté, etc.) ?

Dans une zone de la ville de Raleigh, l’accent a été mis sur l’utilisation d’un éclairage plus éco-énergétique dont nous pouvons mesurer les résultats. Nous nous activons à la promotion et au partage de nos expériences avec les autres municipalités, notamment pour tester notre consommation d’électricité et la qualité de la lumière produite. Le partage de cette information est un élément majeur de notre expérience.

La ville de Raleigh dispose de quarante installations en LED avec une économie moyenne de 200 000 €/an sur les coûts en électricité. Le retour sur investissement est généralement de l’ordre de 3 à 5 ans (en considérant les coûts du capital). C’est une excellente option pour les parkings éloignés. Vous pouvez facilement installer quelques panneaux solaires et ne pas avoir à ajouter de nouvelles lignes ou changer d’infrastructure. La possibilité pour les villes du monde entier d’adopter l’éclairage éco-énergétique est une véritable chance qui s’offre à elles. La ville de Raleigh veut prendre part à l’aventure et être reconnue comme précurseur dans l’adoption de cette technologie. Propager la bonne parole sur l’éclairage par LED avec l’aide de notre partenaire, Cree, est important pour nous.

Quelles sont vos réflexions à propos d’un gouvernement ouvert ou gouv’ 2.0 et que peut faire la ville de Raleigh pour avoir un gouvernement plus ouvert et transparent vis-à-vis de ses citoyens ?

Tout d’abord, toutes nos réunions sont ouvertes au public, à quelques exceptions près. Le véritable défi est de savoir profiter de l’expertise de chacun de nos citoyens. Il y a beaucoup de compétences de haut niveau qui peuvent servir à résoudre les vrais problèmes de la ville.

Une solution se situe au niveau des nouveaux comités, comme le nouveau comité ferroviaire que nous avons mis en place, et la façon dont leurs conseils et leurs recommandations sont pris en compte par la ville. Les questions autour des frais de gestion des eaux pluviales nous ont conduits à puiser dans l’expertise de nos citoyens pour apporter les meilleures solutions.

Le ferroviaire est un domaine qui sera opérationnel pour les 3 ou 4 prochaines années. Nous avons beaucoup de personnes expérimentées dans ce domaine prêtes à partager leur savoir et à mettre en application leurs connaissances pour aider à prendre les futures décisions.

Montrer au public ce que nous faisons et expliquer les bonnes pratiques sont des atouts qui restent sous-utilisés, mais nous avons eu du succès, notamment quand le comité de gestion des eaux pluviales a fait part de son avis sur la façon de mieux gérer les inondations. Le conseil municipal a ainsi été en mesure de mettre à profit l’expertise du comité pour prendre les meilleures mesures politiques à ce sujet.

Quelles sont les qualités requises pour devenir une ville open source ?

Trois critères me viennent à l’esprit :

  • la volonté de partager ;
  • la volonté d’être informé ;
  • une attitude ouverte à l’innovation, à la créativité et aux expérimentations de toutes sortes.

Les citoyens doivent se tenir prêts à adopter le futur. L’open source est une stratégie que nous appliquons pour aller de l’avant.


Pourquoi Raleigh s’est amorcée à devenir la première ville open source au monde ?

Nos citoyens sont prêts faire avancer Raleigh et à être plus concentrés sur la démarche open source. Raleigh est disposée à devenir son incubateur mondial.

L’avantage de Raleigh se situe au niveau de sa croissance et des emplois. Nous aimerions voir le Centre des congrès accueillir plus de conférences sur l’open source. Nous serions honorés de voir un tas de petits Chapeaux Rouges (NdT : référence faite à la distribution GNU/Linux Red Hat), et que des start-up et sociétés bien établies viennent dans notre région parce que nous avons fait le choix de ce modèle de développement.

Les partenaires sont aussi une grande partie de la réponse. Le Centre des congrès, le Syndicat d’Initiative, la Chambre du Commerce et les autres partenaires doivent adopter l’open source et le mettre en évidence dans le cadre de notre stratégie de développement économique.

Comment mettre en œuvre la démarche open source dans votre vie quotidienne ?

Au cabinet juridique pour lequel je travaille, j’ai essayé de fournir des informations à de jeunes avocats. Une sorte de partage des secrets commerciaux pour les aider à réussir plus rapidement, et, pour être franc, l’une des choses les plus difficiles pour toute personne de la fonction publique, c’est l’écoute. J’ai remarqué que l’écoute représente 70 à 80 % du travail. Vous devez pleinement comprendre ce qu’il se passe pour prendre la décision adéquate.

2. Montréal peut-il devenir un incubateur de start-up open source ?

Can Montreal Become an Open Source Startup Hub?

Evan Prodromou – 21 février 2011 – NextMontreal.com
(Traduction Framalang : Khyl, Naar, Cheval boiteux et Goofy)

« Le premier prix est une Cadillac El Dorado. Le deuxième prix est un lot de couteaux à viande. Le troisième prix est votre licenciement. »- Blake, Glengarry Glen Ross

Seth Godin indique, dans son fabuleux ouvrage The Dip (NdT : Un petit livre qui vous enseignera quand renoncer et quand persévérer), que la seule position qui compte dans les affaires, c’est la première. Quand les lois du pouvoir et les effets de réseau sont nécessaires, la première place du classement est la seule où il faut être. Vous devrez être « le meilleur du monde » dans quelque chose, ou bien vous feriez mieux de laisser tomber et de faire autre chose.

Les écosystèmes technologiques – la plupart des marchés d’affaires, en fait – ont des effets de réseau, et cela veut dire que la seule position à avoir, en tant qu’écosystème, est la première. Être le meilleur au monde.

Quelle est la zone la mieux classée au monde dans les start-up du Web ? La baie de San Francisco. Quelle est la deuxième ? Probablement New-York City. Qui a le troisième prix ? Qui s’en soucie ? Le troisième prix, c’est votre licenciement.

Si nous nous soucions de la croissance de notre écosystème local, peut-être que nous aurions besoin d’arrêter notre course à la 14e ou la 29e place du classement dans le monde des start-up orientées Web et réfléchir à construire quelque chose d’autre. Un domaine dans lequel nous serions les meilleurs et sur lequel personne d’autre n’a encore vraiment travaillé. Là où nous pourrions être les meilleurs au monde – pas les 14e, pour ensuite laisser tomber.

Montréal a la capacité d’offrir le meilleur écosystème au monde pour les start-ups centrées sur le développement de logiciels open source. Nous fournissons un bon cadre pour les entrepreneurs qui ont de l’expérience dans la mise en place d’entreprises tournées vers ce secteur économique, nous avons des investisseurs qui ont bien compris le processus d’investissement et d’encouragement de ce type de compagnies et nous avons un très précieux vivier de talents qui ont contribué à cette évolution.

Plus important, il n’y a aucune autre ville autant tournée vers l’open source sur le globe. San Francisco et Boston accueillent quelques sociétés, mais ne sont absolument pas des incubateurs. Le paysage commercial de l’open source se propage beaucoup plus à travers le monde, de Londres à l’Utah en passant par l’Allemagne et Austin.

Plus que tout, c’est sa commercialisation qui est difficile. Demandez à n’importe quelle personne impliquée dans une entreprise open source. La difficulté se trouve dans l’élaboration d’un modèle de travail. Il n’y a pas de solution simple. Les techniques des start-up pour les autres types d’affaires, tels que l’investissement et les stratégies de commercialisation, ne semblent pas s’appliquer aussi bien. Cela signifie qu’il existe un obstacle à l’entrée d’autres écosystèmes, dont un que nous pouvons exploiter.

En ce moment, j’ai connaissance d’au moins cinq start-up open source dans la ville :

  • StatusNet – J’ai lancé cette entreprise ici-même en 2008. Nous avons levé 2,3M $ de fonds à Montréal et New-York. Nous enregistrons environ 5 000 téléchargements par mois et dénombrons 45 000 sites fonctionnant sur notre SaaS. Nous comptons actuellement 9 salariés à Montréal et San Fransisco (NdT : StatusNet est un logiciel libre de microblogging sur lequel repose Identi.ca).
  • Vanilla Forums – Le meilleur système de gestion de forums au monde. Il tourne sur plusieurs centaines de milliers de sites et inclut un service SaaS de haute performance.
  • Bookoven – Cette plateforme sociale de publication s’est tournée vers un modèle de logiciel open source. Dirigée par Hugh McGuire, créateur de Librivox, le très populaire projet de livre audio à contenus ouverts.
  • Stella – Cette société à forte croissance a rendu ses logiciels open source.
  • Subgraph – Startup orientée sur la sécurité développant Vega, logiciel open source d’évaluation des vulnérabilités.

Au rang des investisseurs, deux des plus importants groupes financiers de la ville (iNovia Capital et Real Ventures) tentent l’expérience des start-ups open source. Real Ventures (ou plutôt son prédécesseur, MSU) a déjà investi dans trois entreprises open source locales.

En ce qui concerne le potentiel des employés talentueux… c’est plus difficile. Il y a beaucoup de techniciens compétents dans la ville, et les sociétés open source qui en sont en dehors, comme Canonical ont des équipes techniques locales qui peuvent suivre le bassin des start-up de talent. Quid du personnel d’entreprise talentueux ayant une expérience open source ? Ils sont rares sur le terrain. Heureusement, les gens qui ont travaillé dans les sociétés mentionnées plus haut constituent aussi un bon noyau de ce bassin.

Je crois que les conditions sont réunies pour que Montréal prenne sa place dans le monde des technologies en tant qu’incubateur de start-up open source. La semaine prochaine, je dévoilerai ce que je pense être un projet potentiel pour que Montréal devienne le fer de lance de ce marché.

Notes

[1] Crédit photo : OpenSource.com (Creative Commons By-Sa)




Coupé au montage ou mon trop court passage sur les ondes de France Culture

Brian Fitzgerald - CC by« Apple c’est un peu le Disneyland des nouvelles technologies… »

Aussi étrange que cela puisse sembler j’ai fait une très brève apparition ce matin sur les ondes de France Culture pour évoquer non pas le logiciel libre mais… Apple !

Le journaliste avait à peine trois minutes pour réaliser un sujet d’actualité sur la première Assemblée générale de la société sans Steve Jobs. Et il m’a contacté car il avait visiblement besoin d’un regard critique au milieu d’autres interventions plus laudatives.

Pourquoi moi ?

Je ne le lui ai pas directement demandé mais l’explication la plus plausible est à chercher dans la série d’articles (cf ci-dessous) que nous avons récemment publiés sur ce blog et qui sont assez bien placés dans le référencement des moteurs de recherche (ce qui en creux en dit long sur la présence d’une véritable critique d’Apple[1] dans le Web francophone).

Sachant que ces articles sont eux-mêmes des traductions collectives issues du travail de Framalang, je n’avais aucune légitimité pour m’exprimer. Mais peu importe, me suis-je dit, profitons-en pour tenter de faire passer quelques idées.

Et bien je suis désolé de vous décevoir mais c’est raté 🙁

On ne peut pas trop en vouloir au journaliste qui avait un temps limité (ainsi qu’un sujet qui n’avait rien à voir avec le logiciel libre) et qui a extrait ce qu’il jugeait pertinent de notre entretien téléphonique. Mais ce pertinent pour lui est malheureusement un insignifiant pour moi.

C’est le risque et c’est la loi du genre lorsque l’on n’est pas en direct, mais je me sens solidaire de tous les interviewés qui sont restés frustrés des coupes au montage effectués lors d’un passage radiophonique.

Le reportage tel qu’entendu par les auditeurs de France Culture (3 min – 2 Mo – lien direct au format ogg) :

L’entretien téléphonique presque au complet que le journaliste a eu la gentillesse de mettre en ligne sur le site de la radio (5 min – 6 Mo – lien direct au format ogg) :

Quelques articles du Framablog sur Apple mentionnés plus haut :

Notez que je ne suis pas forcément non plus très satisfait de ma prestation globale lors de l’interview. Vous auriez dit quoi, vous, à ma place ?

J’en conclue donc naïvement que pour réussir ce genre d’exercice, il faut d’abord être bon lors de l’entretien et ensuite prier pour qu’on en tire la substantifique moelle au montage.

Je vous laisse, je vais quand même prévenir ma maman que son fils est passé à France Culture dans le cadre de son quart d’heure warholien de célébrité 😉

Notes

[1] Crédit photo : Brian Fitzgerald (Creative Commons By)