Conseils pour bien préparer son hackathon autour d’un projet libre

L’équipe d’OpenHatch organise régulièrement des rencontres, ateliers, événements, sprints, hackathons, etc. invitant de nouveaux contributeurs à participer au développement de logiciels libres. Elle nous livre ici le fruit de son expérience.

L’enthousiasme et la motivation sont indispensables mais ne peuvent faire l’économie d’une solide organisation et réflexion en amont. Happy Hacking 🙂

Note : On remarquera que les deux livres cités en référence pour aller plus loin font partie de nos traduction Framabook : Libres conseils et Produire du logiciel libre.

 

OpenHatch team

 

Le guide de l’événement libre in situ

The In-Person Event Handbook

L’équipe OpenHatch – février 2014
(Traduction : Omegax, zak, François, Ju, MrTino, Wan, Asta, François, goofy, amha)

Faire en sorte que votre projet soit prêt pour de nouveaux contributeurs

Il semble que chaque jour apparaisse un nouvel atelier, hackaton ou autre sprint, où des projets open source sont invités à travailler avec de nouveaux contributeurs. À OpenHatch, nous avons nous-mêmes souvent organisé ce genre d’événements ! Nous avons découvert que pour en tirer un profit maximal, il est important de planifier les choses en amont. Expliquer vos objectifs, identifier les tâches appropriées, et tester l’organisation de votre projet sont autant de points indispensables pour aboutir à de belles réalisations et passer un bon moment. Ce travail a grandement amélioré nos expériences, et nous pensons qu’il mérite l’effort significatif qu’il mplique.

Nous avons créé ce guide pour aider les projets open source à se préparer pour ces événements. Nous avons utilisé notre propre projet, l’application web OpenHatch.org, comme un exemple dans ce qui suit. Au bas de la page, vous trouverez des aide-mémoires. Elles contiennent en condensé les conseils dispensés dans ce guide, et peuvent vous aider à monitorer vos progrès durant la phase de préparation de votre projet.

Les sources de ce guide sont libres. Un tas de merci à nos contributeurs. (Vous pouvez contribuer, vous aussi !)

Définir des objectifs

Vous devez être capable de présenter clairement vos objectifs pour l’événement, car cela donne à votre groupe une ambition générale à atteindre. Vous pouvez donc commencer par vous demander :

Quel est l’objectif global de votre projet ?

Il vous faut une réponse courte (un paragraphe ou moins) à cette question que vous pourrez utiliser pour attirer les contributeurs potentiels vers votre projet. Les détails, c’est bien joli, mais vous ne devriez pas avoir besoin d’être trop technique à ce moment là. À de nombreux événements, comme les sprints PyCon, on vous demandera un court résumé à exposer devant tout le monde. Pourquoi ne pas vous y préparer ?

Exemple :

L’objectif de OpenHatch est de rendre les communautés de logiciels libres plus accueillantes pour les nouveaux venus. Pour ce faire, nous fournissons documents et support logistique pour animer des ateliers « Introduction à l’open source », un site web avec des ressources libres, des « missions d’entraînement », un découvreur de talents parmi les bénévoles, et plusieurs autres projets en cours de réalisation.

Que voulez-vous accomplir à cet événement ?

Réfléchissez à ce que vous souhaitez voir spécifiquement réalisé lors de cet événement. Vous pouvez catégoriser ces objectifs selon les différentes parties du projet, si vous en avez plusieurs. Il devrait être spécifié clairement de quelle manière ces actions contribueront au progrès général du projet. Toutefois, il ne s’agit pas de « tâches » — il devrait être toujours nécessaire de diviser ces objectifs pour mieux les atteindre.

Il est utile de les lister en termes d’objectifs « principaux » et « étendus ». Avoir des objectifs principaux réalistes et bien définis vous donne quelque chose à célébrer à la fin de l’événement, tandis que les objectifs étendus ou secondaires vous permettent de prévoir le cas excitant où vous vous retrouviez avec une équipe nombreuse et efficace, capable d’accomplir une tonne de travail.

En général, il vaut mieux avoir trop d’objectifs que pas assez, mais priorisez-les. Lorsque vous arriverez à l’étape du découpage en tâches, prenez le temps de traiter en détail chaque objectif avant de passer au suivant.

Exemple :

  • Faire une nouvelle mission d’entraînement
    • Objectif principal : Choisir une compétence sur laquelle baser une nouvelle mission d’entraînement, et concevoir cette mission. En créer une maquette.
    • Objectif étendu : Implémenter la maquette et la faire tester par des volontaires de l’événement.
  • Faire le ménage dans le suivi de tickets
    • Objectif principal : Passer en revue l’outil de suivi, et étiqueter les tickets selon le « ménage » à y faire. Un bug doit-il être vérifié ? Un patch doit-il être testé ? Une demande de fonctionnalité doit-elle être être rattachée à un jalon ?
    • Objectif étendu : Utiliser ces étiquettes comme guide pour « faire le ménage » . Vérifier les bugs, tester les patches, etc.

Installation du projet

Dans notre expérience, la phase d’installation du projet est l’obstacle majeur à la participation. Nous avons vu (et conduit !) des événements où les participants passaient le plus clair de leur temps à seulement mettre en place leur environnement de développement et faire connaissance avec le projet. Si notre objectif est de permettre à de nouveaux venus de contribuer, tâchez d’estimer le temps qu’il faut pour installer votre projet. Puis trouvez un ami qui n’est pas familier avec votre projet pour voir combien de temps il faut vraiment. Vous pouvez aussi trouver quelqu’un pour vous aider à faire cela dans #openhatch.

Documenter et améliorer le processus à l’avance peut faire économiser du temps et de l’énergie à tout le monde. Si vous savez qu’une partie de votre projet sera inévitablement dévoreuse de temps, assurez-vous que tous les participants savent exactement à quoi s’en tenir.

Toutes les informations ci-dessous devraient être documentées dans un fichier LISEZ-MOI placé à la racine de votre dépôt. Vous pouvez également placer cette information dans une section « Vous voulez participer ? » sur le site web de votre projet, et/ou vous pouvez inclure un lien vers le LISEZ-MOI dans la signature de votre liste de diffusion ou dans la barre de statut de votre canal IRC.

Comment trouver une communauté et des mainteneurs pour le projet

Les informations des contacts devraient être explicitement affichées, étant donné que vous pourriez avoir des contributeurs éloignés ou des contributeurs qui voudraient démarrer en amont de l’événement. Les types d’informations de contacts peuvent inclure :

  • Un lien vers votre mailing-list ;
  • Votre nom de canal et de serveur IRC (avec le lien vers le guide pour installer IRC et le lien vers sa version webchat) ;
  • Les comptes de réseaux sociaux tels que Identi.ca, Twitter ou Facebook si votre projet en possède ;
  • Le contact des mainteneurs du projet, si vous vous sentez à l’aise pour le mentionner.

Si vous avez une préférence pour le type de prise de contact, précisez-le.

Exemple:

OpenHatch laisse en deux endroits des informations de contact que nous essayons le plus possible de garder à jour et en cohérence l’un avec l’autre. Il y a nos informations de contacts dans la documentation, référencées principalement depuis notre répertoire où sont déposés les codes sources, et nos informations de contacts dans le wiki, référencées à partir de la page d’accueil du site web.

La structure du projet

Décrivez la structure de base de votre projet. Quels sont les plus gros composants et où sont-ils situés ? Comment ces composants interagissent-ils ? Puis décomposez chaque partie. Vous n’avez pas à parler de chaque fichier ou sous-dossier de votre projet, mais prenez soin de ne pas prendre pour acquis que chaque nouveau venu comprendra le sens de tel script, ou la manière dont interagissent tels fichiers, ou dans quel langage est programmée telle partie du projet.

Selon la taille et la complexité de votre projet, cela peut être une tâche particulièrement imposante. Chez OpenHatch, nous travaillons toujours à documenter la structure complète du projet. Nous recommandons de commencer par une explication « en vue d’ensemble » de la structure projet – juste assez de détails pour remplir d’une demi-page à une page. Quand vous aurez plus de temps, vous pourrez rentrer dans le détail, en commençant par les parties du projet sur lesquelles les gens travaillent le plus souvent (ou qui sont plus susceptibles de faire l’objet de sprints ou de hackatons). Si vous utilisez d’autres frameworks ou librairies, vous pouvez gagner du temps en mettant des liens vers leur documentation et leurs tutoriels.

Exemple :

Une description d’ensemble de la structure du projet OpenHatch peut être trouvée dans « Project Overview ». Une description de la structure de OH-Mainline (le dépôt derrière notre site web) y est présente.

Comment mettre en place un environnement (« de développement ») local

Pour contribuer à votre projet, les gens ont généralement besoin d’une version locale du projet où ils peuvent faire des modifications et les évaluer. Plus votre guide d’installation/développement est détaillé et clair, mieux c’est.

Voici quelques éléments pour la mise en place d’un environnement de développement à mettre dans votre guide :

  • Préparer leur ordinateur
    • Assurez vous qu’ils connaissent bien les outils de leurs systèmes d’exploitation, comme le terminal / la ligne de commande. Vous pouvez le faire en donnant un lien vers un didacticiel et en demandant aux utilisateurs s’ils le comprennent bien. Souvent, de très bons didacticiels existent déjà, celui d’OpenHatch sur la ligne de commande est disponible ici.
    • Si les contributeurs doivent mettre en place un environnement virtualisé, accéder à une machine virtuelle ou installer un kit de développement en particulier, expliquez-leur comment faire.
    • Donnez la liste de toutes les dépendances nécessaires pour faire tourner le projet, et une explication pour les installer. Fournissez un lien vers de bons guides d’installation, s’il en existe.
  • Téléchargement du code source
    • Donnez des instructions détaillées sur comment télécharger le code source du projet, dont les obstacles et problèmes fréquemment rencontrés.
    • S’il existe plusieurs versions du projet, dites clairement quelle version ils doivent télécharger.
  • Comment voir / tester les changements
    • Expliquer aux contributeurs comment voir et tester les changements qu’ils ont effectués. Ceci peut varier selon ce qu’ils ont changé, mais faites votre possible pour couvrir les changements les plus fréquents. Cela peut être, tout simplement, afficher un document html dans un navigateur, mais ce peut aussi être plus compliqué.

L’installation pourra différer pour chaque contributeur en fonction de leur système d’exploitation. Vous aurez probablement besoin de créer des instructions séparées pour les utilisateurs de Windows, Mac et Linux, dans différentes parties de votre guide. Si vous entendez ne supporter le développement que pour un seul système d’exploitation, assurez-vous que cela soit dit clairement pour les utilisateurs,

Exemple:

Vous pouvez voir comment OpenHatch annonce cela dans son guide d’installation. Les instructions pour tester des changements peuvent être trouvées . Des tâches plus spécifiques peuvent avoir leur documentation additionnelle (par exemple la documentation concernant les différents changements du code).

Contributions et retours

Comment les contributeurs doivent-ils procéder pour amener leurs modifications au projet ? Est-ce qu’ils soumettent une pull request sur Github ? Doivent-ils générer un patch et l’attacher à un ticket sur le système de tickets ? Assurez-vous que cette information est explicitement fournie.

Example :

Le guide d’OpenHatch pour soumettre des changements peut être trouvé ici.

Il est aussi utile d’indiquer aux gens comment ils peuvent faire des retours/signaler des bugs sur le projet. Si votre projet n’a pas de système de suivi de tickets, envisagez d’en créer un. Sur Github, tous les dépôts disposent du système de tickets (bien que vous ayez à l’activer en allant dans Settings puis Features). Il y a beaucoup d’autres systèmes de suivi de tickets.

Si votre projet est de petite taille, vous pouvez ne pas avoir besoin ou ne pas vouloir de systèmes de suivi de tickets. Aucun problème. Le principal est que les contributeurs sachent comment vous remonter des informations.

Example :

Les problèmes avec le projet « Open Source Comes to Campus » peuvent être signalés ici. La plupart des autres problèmes liés à OpenHatch peuvent être signalés .

Les outils tels que le suivi de tickets sont très utiles pour communiquer de manière asynchrone. Ce n’est peut-être pas la solution la plus appropriée lors d’un événement physique. Si vous voulez changer les choses pour l’occasion – comme demander aux participants de vous notifier par IRC les liens vers les nouveaux tickets, pour éviter qu’ils ne passent entre les mailles du filet – assurez-vous de leur en parler !

Vérifiez votre documentation

Vérifiez que cette documentation est complète et effective en la testant auprès de personnes qui n’ont pas participé à votre projet auparavant. Pour chaque sytème d’esploitation, trouvez au moins une personne pour lire votre documentation, tenter d’installer, faire et tester des modifications et participer aux différentes modifications du projet (au choix de votre testeur, ces modifications peuvent être des faux changements ou des vraies tâches). Vérifiez que vos testeurs ont des compétences et/ou une expérience similaire à celle des nouveaux arrivants à votre évènement.

Si vous rencontrez des difficultés pour trouver des personnes pour vous aider, essayez la chaine #openhatch sur IRC.

Assurez-vous que tous les problèmes qui surviennent lors de ce processus de vérification soient intégrés à la documentation. Une fois que la documentation a été vérifiée, ajoutez une ligne au début de votre guide pour annoncer ce qui a été vérifié et quand.

Par exemple :

Instructions de l’environnement de développement testées avec succès sur Ubuntu 12.04 (le 03/10/2013), Mac OS X 10.8 (le 01/10/2013) et Windows XP (en janv. 2005). Vous pouvez consulter cette démarche à OpenHatch ici.

Idéalement, vous devriez vérifer que tout fonctionne : installer, faire des modifications, les tester et les intégrer. Si vous n’avez le temps que pour une seule de ces tâches, nous vous recommandons de vérifier l’intallation. Notre expérience nous a appris que c’est sur ce point qu’émergent la plupart des problèmes.

Définir les tâches des participants

Retournons aux objectifs de l’événement dont nous avons parlé dans la première section. Chaque objectif devrait être décomposé en étapes distinctes qui permettront de l’atteindre. Ces étapes sont les tâches à confier aux participants.

Ces tâches devraient inclure un résumé en anglais simple aussi bien que les informations sur la localisation des modifications (par exemple, quels fichiers ou fonctions sont altérés). Nous recommendons d’inclure une liste des compétences nécessaires (par exemple : compétences en design, Python basique) et des outils (par exemple: Développement sur environnement Mac). Il est aussi utile d’inclure le nombre estimé d’heures que la tâche va prendre, d’étiqueter certaines tâches comme plus ou moins importantes, et de marquer où quelle tâche est dépendante d’une autre.

Cela semble représenter beaucoup de travail mais cela devrait aider vos participants à trouver rapidement et facilement les tâches appropriées pour eux. Etant donné que l’un des objectifs principaux d’un événement en personne est de donner une expérience positive aux participants, nous pensons que cela en vaut la peine.

Créer un système pour suivre les tâches

Nous recommandons l’utilisation d’un wiki ou un document de planification similaire pour garder une trace des tâches. OpenHatch dispose d’un navigateur pour suivre les tâches que nous utilisons pour nos événements. Vous pouvez, si vous le souhaitez, faire un fork et l’adapter à votre projet ou événement ; cependant, nous vous recommandons d’attendre un peu, car nous allons bientôt faire de grosses améliorations. Quelque chose de très simple, comme un etherpad (NdT : ou Framapad), peut également faire l’affaire (ici, un cadre et un service exemple que vous pouvez utiliser).

Préparer les tâches

Pour vous rendre compte du nombre de tâches à préparer, nous vous recommandons de vous baser sur la durée de l’événement et le nombre de participants attendus pour prédire la charge en temps/homme de votre projet. Vous pouvez utiliser les estimations de temps que vous avez faites pour évaluer chaque tâche. Nous suggérons que vous prévoyiez 30% de plus que ce dont vous pensez que vous aurez besoin : il vaut mieux avoir trop que pas assez.

Exemple :

  • Objectif de base : parcourir l’interface et étiqueter les tickets selon le type de résolution nécessaire. Est-ce qu’un bug doit être vérifié ? Est-ce qu’un patch doit être testé ? Une fonctionnalité doit-elle être rattachée à un jalon ?
    • Tâche 1 : étiqueter les problèmes
      • Compétences et outils nécessaires : compétences de base en anglais, connaissance des concepts de vérification, tests, jalons…
      • Temps estimé : ~20 minutes par problème
      • Pour démarrer : prenez connaissance du suiveur de tickets, et comment il affiche les informations. (Voyez cette documentation.) Demandez un accès Administrateur pour pouvoir ajouter des étiquettes au suiveur.
      • Pour chaque problème : lisez la discussion relative à chaque problème, et identifiez où la communauté intervient dans le signalement de ce problème. Si c’est un bug non vérifié, ajoutez le label non vérifié. Si c’est un patch non testé, ajoutez l’étiquette patch non testé, etc. Si c’est une fonctionnalité qui n’est rattaché à aucun jalon, ajoutez l’étiquette jalon nécessaire.
  • Objectif étendu : utilisez les étiquettes comme un guide pour résoudre chaque ticket. Vérifiez les bugs, testez les patch, etc.
    • Tâche 1 : Vérifier les bugs
      • Compétences et outils nécessaires : compétences de base en anglais, et dans l’idéal connaître les machines virtuelles pour effectuer des tests sur plusieurs OS.
      • Temps estimé : 20 minutes par bug (variance élevée).
      • Pour démarrer : téléchargez l’environnement de développement et assurez vous que vous pouvez lancer le projet. Assurez vous que vous avez un compte sur Le suiveur de tickets et que vous savez ajouter des commentaires ou changer les étiquettes.
      • Pour chaque bug : essayez de reproduire le bug. Enregistrez les résultats dans un commentaire, avec des informations concernant le type de l’OS et sa version. Si possible, effectuez le test sur plusieurs navigateurs. S’il y a plusieurs commentaires récents sur les trois OS majoritaires, ajoutez l’étiquette prêt pour test par le mainteneur (NdT : ready_for_maintainer_review).

Quoi qu’il en soit, les participants doivent être rattachés à une tâche correspondant à leurs compétences et à leurs intérêts. Effectuer ce travail préparatoire fera démarrer les participants immédiatement plutôt que de les faire attendre que vous leur suggériez une tâche adéquate. Dans l’idéal, les organisateurs d’événements auront collecté des informations sur les compétences et intérêts des participants bien en amont, donc vous pourrez adapter la liste à votre groupe de contributeurs.

Rendre explicites les étapes de chaque tâche facilite l’entraide entre les participants. En identifiant clairement les compétences et concepts nécessaires, il devient plus facile pour les gens de dire : « Oh, je comprends comment faire ça ! Attends, je vais te montrer ».

Suite

Il est possible que les contributeurs ne puissent pas finir les tâches sur lesquelles ils travaillent pendant l’événement, ou qu’ils veuillent continuer à participer au projet en travaillant sur d’autres tâches. Penser en amont de l’événement à comment vous allez organiser sa suite rend plus facile l’échange d’informations avec les participants et la planification de la direction de votre projet.

Nous recommandons de demander à chaque participant de répondre aux questions suivantes à propos des tâches sur lesquelles ils ont travaillé. Donnez leur cette liste au début de l’événement : cela les aidera à documenter ce qu’ils font. Vous pouvez imprimer cette liste, l’envoyer par mail aux participants, faire un formulaire web, comme vous préférez.

Par exemple :

  • Pour chaque tâche sur laquelle vous avez travaillé, veuillez répondre aux questions suivantes :
    • Sur quelle tâche avez-vous travaillé ?
    • Veuillez documenter brièvement votre workflow. Quelles étapes, dans quel ordre, pourquoi ?
    • Où puis-je trouver le travail que vous avez réalisé pendant l’événement ? Ceci inclut le code, la documentation, les maquettes, et autres choses.
    • Si vous avez créé des comptes pour le projet, veuillez lister les sites et les noms des comptes. Enregistrez le mot de passe dans votre gestionnaire de mot de passes préféré, ou assurez vous que moi ou un autre mainteneur y aie accès.
    • Quels obstacles avez-vous rencontré en travaillant sur cette tâche ? Avez-vous des retours à me faire pour améliorer le processus pour les futurs contributeurs ?
    • Voudriez-vous rester impliqué dans ce projet ? Si oui, dans quelle mesure ?

S’il y a suffisamment d’enthousiasme pour continuer le travail, assurez-vous de rester en contact ! Nous suggérons que vous rassembliez les emails des participants intéressés et que vous les contactiez dans les 48 heures suivant l’événement. Dans votre email, remerciez-les pour leur aide et fournissez des informations sur comment rester dans la communauté par, par exemple, IRC ou des listes de diffusion.

Nous recommendons aussi de prévoir un rendez-vous suite à l’événement. Si vous êtes tous originaires de la même région, essayez de fixer une date après l’événement pour vous et votre équipe au café du coin, à l’espace de coworking, ou à une soirée-projet. Si vous êtes éloignés géographiquement, fixez une date pour vous rencontrer sur IRC ou sur Google Hangout. 2-3 semaines après l’événement est un bon créneau, toutefois cela dépend si vous et vous nouveaux contributeurs êtes très occupés.

Checklists

Merci de votre attention ! Pour vous aider à garder un oeil sur chaque étape, nous avons créé deux checklists pour vous. La version détaillée inclut tous les conseils ci-dessus. La checklist la plus courte inclut les conseils que nous pensons les plus importants. Nous vous recommandons de démarrer avec la cheklist la plus courte. Une fois que vous avez accompli correctement cette checklist, vous pouvez revenir et faire les étapes supplémentaires si vous avez le temps et l’énergie.

Pour voir et/ou imprimer les checklists, se rendre ici.

Remerciements

Merci à tous ceux qui ont contribué ou aidé au projet.

Contributeurs
  • Shauna Gordon-McKeon : maintenance, contenu
  • Ni Mu : design
  • Sheila Miguez : testeuse
  • Asheesh Laroia : testeuse
Pour aller plus loin



L’April en campagne – Entretien avec Lionel Allorge et Frédéric Couchet

L’April repart en campagne « afin d’augmenter sa capacité d’action, de donner la priorité au logiciel libre et de contribuer à construire une société plus libre, plus égalitaire et plus fraternelle ».

Nous en avons profité pour faire le point en interrogeant ci-dessous son président, Lionel Allorge, et son délégué général, Frédéric Couchet.

Avec tout notre soutien…

Campagne April

Entretien avec Lionel Allorge et Frédéric Couchet

Bonjour Lionel et Frédéric, une rapide présentation personnelle et de l’April ?

Bonjour, je m’appelle Lionel Allorge et je suis membre de l’association April depuis 14 ans et président depuis 2 ans. Bonjour, je m’appelle Frédéric Couchet, l’un des fondateurs de l’April en 1996, et actuellement son délégué général.

L’April est l’association nationale de promotion et défense du logiciel libre. Depuis 1996, côté pile nous menons des activités visant à promouvoir le logiciel libre auprès du grand public, des professionnels, des associations et des pouvoirs publics. Côté face, nous luttons contre toute atteinte au logiciel libre et plus globalement aux libertés fondamentales à l’ère du numérique.

Certains disent que vous êtes un lobby pro-logiciel libre. Vous reconnaissez-vous dans cette qualification ?

Lobby, contre-lobby, on a souvent entendu ces termes. Mais nous rejetons le terme de lobby. Pour nous un lobby est un organisme qui défend des intérêts particuliers (entreprises…). Mais au fond, peu importe les termes, l’important est ce que nous faisons, pourquoi nous le faisons et comment nous le faisons.

Bien sûr, nous agissons pour diffuser nos idées auprès de tous les publics, dont notamment les responsables politiques (mais pas uniquement). Nous défendons une vision particulière de l’intérêt général et non l’intérêt particulier de quelques-uns. Et nous travaillons dans la transparence, nos positions sont connues, nos documents publiés. Les personnes que nous côtoyons savent que nous militons pour nos idées et que nous ne sommes pas des « professionnels de la profession » comme disait l’autre, ce qui n’empêche pas que nous travaillons de façon professionnelle et rigoureuse. Nous essayons de protéger la liberté informatique de tous les citoyens.

Pour plus d’informations sur nos actions vous pouvez consulter notre rapport d’activités 2013.

Votre dernière grande campagne d’adhésion date de plus de 5 ans, que s’est-il passé depuis pour l’April et pour le logiciel libre : succès, résistances, fronts politiques et juridiques, etc. ?

Le logiciel libre est aujourd’hui très largement utilisé et se répand partout. Et rappelons que de très nombreux logiciels libres utilisés aujourd’hui (grands publics ou autre) sont relativement récents (moins de 10 ans pour certains).

Côté politique publique, on note une inflexion positive en faveur du logiciel libre. Ainsi en France, en 2012 il y a eu la circulaire Ayrault sur le bon usage du logiciel libre dans les administrations.

Et, en 2013, le parlement français a adopté pour la première fois une disposition législative donnant la priorité au logiciel libre.

De son côté, l’Italie vient de mettre en place la priorité pour le logiciel libre dans l’administration.

Bien sûr, des résistances persistent à ce changement et il reste du travail pour faire connaître et protéger le modèle du libre.

Des menaces et des blocages existent toujours : brevets logiciels (notamment en Europe), la vente forcée ordinateurs/logiciels; les DRM (voir notamment la tentative d’introduire les DRM dans HTML5) ; l’informatique déloyale, les contrats comme l’Openbar Microsoft/Défense

Au niveau international, le scandale Prism, qui a révélé l’ampleur des écoutes généralisées commises par les USA et de certains de ses alliés sur les communications de tous les citoyens, a rappelé l’importance de contrôler son système informatique. Les logiciels libres, parce qu’ils peuvent être vérifiés et améliorés par tous, sont une brique de base pour construire une informatique au service des utilisateurs et non pas un outil pour ceux qui souhaitent les asservir.

Mais il est possible d’agir aussi sur les décideurs politiques par la mobilisation citoyenne, qui donne des résultats, comme par exemple sur ACTA.

Il reste encore beaucoup de travail pour réellement libérer la voie 🙂

Pourquoi avoir attendu si longtemps et quels sont les objectifs de cette campagne ?

Notre dernière campagne d’adhésion date de 2008, elle nous avait permis de gagner en crédibilité auprès de nos interlocuteurs et de financer nos actions (outils de sensibilisation, actions menées par l’équipe de permanents…).

Malheureusement, phénomène commun à toute structure associative, la base de nos adhérents s’est érodée au fil du temps. Les cotisations représentant l’essentiel de nos ressources financières on parlait en interne depuis longtemps du besoin de relancer une campagne d’adhésion. Mais pris par les dossiers et les actions on a repoussé, repoussé 🙂 On a récemment trouvé un peu de temps pour formaliser une campagne.

Cette campagne a pour objectif notamment d’augmenter nos capacités d’action, car il y a beaucoup à faire pour donner la priorité au logiciel libre, et remettre le logiciel libre dans les préoccupations principales des gens.

Adhérer à une association, ça n’est pas seulement rester passif en ayant la carte. Un certain nombre de projet et d’actions bénévoles ont été mis en place. Pouvez-vous nous en dire plus et êtes vous satisfaits de l’implication des membres ?

De nombreuses personnes adhérent seulement pour nous soutenir et ne participent pas directement aux actions de l’association. Ces personnes nous permettent d’être plus représentatif (plus nous sommes nombreux, plus nous sommes écoutés) et de financer nos actions. De plus ces personnes sont souvent des militants qui font de la sensibilisation au logiciel libre dans leur entourage. Pour ceux qui souhaitent participer, nous leur proposons de rejoindre des listes de discussions et des groupes de travail qui produisent des documents et des analyses, des traductions, des transcriptions, tiennent des stands ou donnent des conférences. Les activités possibles sont nombreuses (pour en savoir plus voir notre rapport d’activités). Certains bénévoles indiquent le nombre d’heures qu’ils passent sur leurs actions, pour 2013 cela représente plus de 4 200 heures mais c’est très loin de refléter la réalité de la contribution bénévole à l’April.

Que répondez-vous à ceux qui disent que le logiciel libre a déjà gagné et que ça n’est plus la peine de se battre pour lui comme par le passé ?

Je pense au contraire que les développements récents de l’informatique nomade, tablettes, ordiphones, liseuses, avec leur cortège de pratiques néfastes : Brevets logiciels, DRM, informatique déloyale et vente forcée ont fait reculer nettement les logiciels libres. Pouvez-vous me monter un ordiphone (smartphone) actuel sur lequel je puisse installer une distribution entièrement libre sans perdre des fonctionnalités importantes de mon appareil ? Personnellement je n’en connais pas. Il me semble donc plus que jamais nécessaire de défendre le logiciel libre contre le penchant naturel de l’industrie et de l’état de souhaiter contrôler l’informatique des citoyens, alors que pour nombre d’entre-nous, nous confions à ces machines une part de plus en plus grande de notre vie !

Il y a 10 ans, le côté obscur de la force était symbolisé par Microsoft. Diriez-vous qu’aujourd’hui c’est « GAFA » (Google-Apple-Amazon-Facebook) qui a pris le relais ?

Microsoft reste toujours une menace, mais n’est effectivement plus la seule. J’ai vu que la campagne 2013 Framasoft prônait « moins de Google et plus de Libre », d’autres entreprises comme Apple, Amazon ou Facebook, menacent le logiciel libre. Ces entreprises privent aujourd’hui leurs utilisateurs de leurs libertés sans qu’ils s’en rendent pleinement compte, abusent de leur confiance, récupèrent leurs données privées, accèdent à leur informatique sans les prévenir,

C’est ce genre de menace-là qui nous encourage à aller au contact des citoyens, non pas seulement pour promouvoir les logiciels libres mais surtout pour les informer de ce qu’ils subissent et de ce qu’il existe pour en échapper et donc se libérer.

Les principes de liberté de l’utilisateur et de contrôle de son informatique sont donc plus pertinents que jamais. Le logiciel libre n’est certainement pas la solution ultime et unique à ces problématiques, mais il constitue une brique essentielle et nécessaire dans le combat pour les libertés.

Et que va-t-il se passer selon vous dans les 5 années à venir pour l’April et le logiciel libre ?

Madame Irma n’est pas encore membre de l’April 🙂 De plus en plus de personnes, organisations sont convaincues que les modèles basés sur la coopération, le partage de l’information valent mieux socialement, politiquement et économiquement que ceux basés sur le contrôle d’usage et la rente. Il faut continuer à agir pour accélérer ce mouvement et faire apparaître un monde numérique où il fait bon vivre. Le temps que cela prendra dépend principalement de notre capacité de mobilisation et d’action.

Concrètement, on fait comment pour adhérer et/ou vous soutenir ?

Pour adhérer, il suffit de se rendre sur cette page de notre site et de remplir le formulaire en ligne. Pour le paiement de la cotisation, cela peut se faire en ligne par carte bancaire ou par virement, ou bien par l’envoi d’un chèque à notre adresse. Il est également possible de nous payer en espèces lors des principaux événements du libre où nous tenons un stand comme les JDLL en avril, Solutions Libres en mai, ou RMLL en juillet etc.

Il est possible également de relayer notre campagne d’adhésion auprès de ses amis, collègues… Faire connaître le logiciel libre est une autre façon de nous aider, sur le site EnVenteLibre certains de nos outils de sensibilisation sont disponibles.

Pour les personnes qui souhaiteraient être active la plupart de nos groupes de travail sont ouverts, il suffit de s’inscrire sur les listes de discussion de groupe.

Enfin, dans les semaines qui viennent il y a nos campagnes Candidats.fr pour les élections municipales de mars en France et du FreeSoftwarePact.eu pour les élections européennes de mai.




Les filles et le logiciel

Le témoignage ci-dessous ne devrait pas laisser indifférent ni faire consensus.

Il s’agit de Susan Sons, fille hacker avant d’être femme hacker, qui semble regretter le temps où l’on ne s’enflammait pas sur la théorie du genre (troll inside).

« Je suis venue au monde de l’open source car j’aimais faire partie d’une communauté où mes idées, mes capacités et mon expérience comptaient, pas mes seins. Cela a changé, et ce changement est dû à l’action de gens qui disent vouloir une communauté où les idées, les capacités et l’expérience comptent plus que des seins. »

Remarque : On pourra lire sur le sujet, les autres articles du Framablog.

Les filles et le logiciel

Girls and Software

Susan Sons – 4 février 2014 – LinuxJournal
(Traduction : Eve, RemyG, lyn, RyDroid, Asta, Kifferand, Wan, Diin, numahell, KoS, MFolschette)

L’article EOF de décembre 2013 nommé « Mars a Besoin de Femmes » a exploré un sujet intéressant : celui du rapport hommes/femmes parmi les lecteurs de Linux Journal, et parmi les développeurs du noyau Linux. Ce rapport est si déséquilibré (beaucoup d’hommes, peu de femmes) qu’en faire un graphe reviendrait presque à tracer une ligne verticale. J’espérais que l’article amènerait un hacker Linux du côté féminin de ce graphe à se mettre en avant et à faire avancer la conversation. Chose dite chose faite, voici Susan Sons aka @HedgeMage. À lire ci-dessous. — Doc Searls

Les filles et le logiciel. Oui, j’ai bien dit « les filles ». Sachant que les hommes ont d’abord été des garçons, mais que les femmes ont jailli de la tête de Zeus, à leur taille adulte, et en se battant comme des Athéna des temps modernes, vous pouvez commencer à m’insulter maintenant pour avoir utilisé ce mot… à moins que vous ne préfériez voir l’industrie à travers les yeux d’une fille qui est devenue femme au sein d’un ensemble de communautés open source.

Quand je pense aux hackers de mon entourage, les meilleurs ont commencé avant la puberté. Même s’il n’avaient pas d’ordinateurs, ils démontaient leurs réveils, réparaient leurs taille-crayons ou jouaient les radio-amateurs. Certains ont construit des lance-citrouilles ou des trains en LEGO. J’ai commencé à coder quand j’avais six ans, dans le bureau de mon père au sous-sol, sur la machine qu’il utilisait pour suivre l’inventaire de son entreprise de réparations. Après un été marqué par des essais et des erreurs, j’ai finalement réussi à faire jeter à des gorilles autre chose que des bananes explosives. Ça avait un goût de victoire ! (NdT : sans doute une référence au jeu Gorilla)

Quand j’ai eu 12 ans, j’ai mis les mains sur un disque d’une distribution Slackware et je l’ai installé sur mon ordinateur — un cadeau de Noël de mes parents après une année particulièrement bonne pour l’entreprise de mon père — et j’ai trouvé un bogue dans un programme. Le programme était en C, un langage que je n’avais jamais vu. J’ai frayé mon chemin vers IRC et expliqué le problème : ce qui n’allait pas, comment le reproduire, et l’endroit d’où semblait venir le problème.

J’étais vraiment naïve à cette époque — je n’avais même pas réalisé que la raison pour laquelle je n’arrivais pas à bien lire le code était qu’il existait plusieurs langages de programmation — mais les résidents du salon IRC m’ont dirigée vers le gestionnaire de tickets du projet, m’ont expliqué son intérêt et m’ont aidée à soumettre mon premier rapport de bogue.

Ce dont je n’avais pas connaissance à l’époque, c’était cet échange privé entre un des vétérans qui m’avait aidée et un des résidents du salon qui avait reconnu mon surnom sur une mailing list :

développeur0 : C’était une question vraiment bien posée… mais pourquoi est-ce que j’ai l’impression que c’est un gamin de 16 ans ?

développeur1 : Parce que c’est une fille de 12 ans.

développeur0 : Wow… Qu’est-ce que ses parents font, pour qu’elle pense comme ça ?

développeur1 : Je pense qu’elle vit dans une ferme, en fait.

Quand développeur1 m’a parlé de cette conversation, j’ai été convaincue par l’open source. Étant une petite fille d’une région rurale, qui avait été exclue encore et encore de toute activité intellectuelle, sous prétexte que je n’étais pas assez riche, trop campagnarde, pas assez âgée pour être désirée, je ne pouvais pas croire la facilité avec laquelle j’avais été acceptée et traitée comme tout le monde sur le salon, même s’ils savaient qui j’étais. Et j’ai été encore plus impressionnée quand j’ai appris que développeur0 n’était autre que Eric S. Raymond, dont j’avais dévoré les textes peu après avoir découvert Linux.

L’open source était mon refuge parce que c’était un endroit où personne ne prêtait attention à mes « ancêtres » ou ce à quoi je ressemblais — les gens s’intéressaient uniquement à ce que je faisais. Je me faisais bien voir des gens qui pouvaient m’aider en m’occupant de tâches ingrates : trier les tickets pour garder les listes propres, rédiger de la documentation et corriger les commentaires dans le code. J’aidais tout le monde, donc quand j’avais besoin d’aide, la communauté était là. Je n’avais encore jamais rencontré un autre développeur dans le monde réel, mais j’en savais plus sur le développement que certains étudiants.

C’est vraiment une question de filles (et de garçons)

Les filles de 12 ans d’aujourd’hui ne vivent généralement pas les expériences que j’ai vécues. On conseille généralement aux parents d’éloigner leurs enfants de l’ordinateur, de peur qu’ils se fassent attraper par des prédateurs sexuels, ou pire encore — deviennent obèses ! Cela vaut d’autant plus pour les filles, qui finissent diplômées en sciences humaines et sociales. Plus tard, à l’approche de leur vingt ans, quand quelqu’un trouve que le déficit de filles dans les communautés technologiques est un problème, on vient les chercher par la manche et on les emmène à une rencontre LUG (NdT : Linux User Group / Groupe des utilisateurs de Linux) ou sur un salon IRC. Étonnamment, cela ne fait pas de ces jeunes femmes des hackers.

Pourquoi croit-on que cela va marcher ? Prenez une jeune femme qui a déjà construit son identité. Jetez-la dans un monde qui est construit sur des schémas sociaux différents de ceux dont elle a l’habitude, où plein de gens parlent d’un sujet qu’elle ne comprend pas encore. Dites-lui ensuite qu’il existe une hostilité de la communauté envers les femmes et que c’est pour cela qu’il n’y en a pas assez, tout en la mettant en avant comme une bête de concours en expliquant que vous êtes ravi d’avoir recruté une femme. C’est la recette de l’échec.

Les jeunes femmes ne deviennent pas magiquement des technophiles à 22 ans. Les jeunes hommes non plus. Les hackeurs sont nés dans l’enfance, parce que c’est à cet âge que l’envie de résoudre des puzzles ou de créer quelque chose apparait chez ceux qui ont connu ce moment de « Victoire ! », comme la fois où j’ai réussi à imposer ma volonté à un couple de primates électroniques.

Malheureusement, notre société a conditionné les filles à ne pas être technophiles. Mon fils est à l’école primaire. L’année dernière, son école a fait un cours sur la robotique uniquement pour les filles. Quand mon fils a demandé pourquoi il ne pouvait pas y participer, on lui a expliqué que les filles ont besoin d’une aide spéciale pour s’intéresser à la technologie, et que s’il y a des garçons autour, les filles auront trop peur d’essayer.

Mon fils est rentré à la maison très perturbé. Vous voyez, il a grandi avec une mère qui codait en l’allaitant et l’a amené à sa première réunion du LUG à l’âge de sept semaines. La première fois qu’il a vu un robot fait maison, il lui a été montré par un membre d’un hackerspace local, une femme qui administre un des plus gros super-ordinateurs du pays. Pourquoi son école agissait comme si les filles étaient stupides ?

Merci beaucoup, « féminisme » moderne, pour avoir mis des idées pas très féministes dans la tête de mon fils.

Il y a un autre endroit dans ma vie, autre que ma maison, où l’idée selon laquelle la technologie est « un truc de gars » est complètement absente : ma ville natale. De temps en temps, je retourne à l’école de Sandridge, le plus récemment c’était quand mon professeur de mathématiques m’a invitée à une discussion avec les étudiants sur les carrières dans les Sciences, la Technologie, l’Ingénierie et les Mathématiques (NdT : STEM en anglais). Je suis presque sûre que je suis le seul programmeur que quiconque ait jamais vu dans cette ville… Je suis donc une sorte de représentante des geeks pour eux. Et certains considèrent même que c’est un « truc de filles ».

Pourtant, je ne peux pas dire que la région produise des quantités de hackeuses. Même en mettant de côté la pauvreté, l’urbanisation et la hausse de la criminalité, les filles ne sont pas plus portées à hacker dans ma ville natale que partout ailleurs. Quand j’ai parlé à des classes de mathématiques de CM2, les garçons m’ont expliqué qu’ils réparaient leurs consoles de jeux, ou débridaient leurs téléphones. Les filles n’ont pas fait de projets, elles ont parlé de mode ou de quête de popularité, pas de construire des choses.

Qu’est-ce qui a changé?

Je n’ai jamais eu de problème avec les hackers de la vieille école. Ils me traitent comme l’un d’eux, plutôt que comme « la femme du groupe », et beaucoup sont assez âgés pour se souvenir d’avoir travaillé dans des équipes composées d’un tiers de femmes, et personne ne trouvait cela bizarre. Bien sûr, le mot clé ici est « âgé » (désolée les gars). La plupart des programmeurs dont j’apprécie la compagnie sont plus proches de l’âge de mon père que du mien.

La nouvelle génération de développeurs open source n’est pas comme l’ancienne. Ils ont changé les règles à tel point que mon sexe est sous les projecteurs pour la première fois en 18 ans passés dans cette communauté.

Lorsque nous appelons un homme un « technicien », cela signifie qu’il est programmeur, administrateur système, ingénieur électrique ou quelque chose du même genre. C’était également le cas lorsqu’on appelait une femme une « technicienne ». Cependant, selon la nouvelle génération, une femme technicienne peut être également une graphiste ou quelqu’un qui gagne sa vie en tweetant. Cela dit, je suis contente de savoir qu’il y a des gens spécialisés dans les médias — cela veut dire que je n’ai pas à m’occuper de cet aspect des choses — mais les mettre à côté des programmeurs donne l’impression que ces « femmes techos » sont la partie handisport des JOs de la programmation.

Avant, je me sentais à l’aise avec les hommes, et personne ne se souciait de mon apparence. Aujourd’hui, j’ai l’impression de perdre mon temps à parler de genre plutôt que de technologies… Ceci dit, il y a plusieurs visions :

  • La vision « il n’y a aucune femme dans l’assemblée ». Je suis dans l’assemblée, mais on me dit que je ne compte pas puisque je porte t-shirt, jeans, bottes, et que je n’ai pas de maquillage.
  • La vision « tu nies ta féminité pour rentrer dans le moule ; c’est une forme d’oppression ! ». On me dit que c’est dans ma nature de femme d’aimer absolument le maquillage et la mode. Alors que je suis simplement une geek qui se soucie peu de son apparence.
  • La vision « tu ne représentes pas les femmes ; tu serais un meilleur modèle pour les filles si tu avais le bon look ». Marrant, le reste du monde semble très occupé à dire aux filles d’être à la mode (il suffit de regarder un magazine ou marcher dans le rayon fille d’un magasin de jouets). Je ne pense pas que quelqu’un d’aussi peu doué que moi dans ce domaine doive s’en occuper.

À une exception près, j’ai entendu ces réprimandes venir uniquement de femmes, et de femmes qui ne savent pas coder. Quelquefois, j’ai envie de crier « vous n’êtes pas une programmeuse, vous faites quoi ici ?! »

J’en suis aussi venue à réaliser que j’ai un avantage que les nouvelles arrivantes n’ont pas : j’étais ici avant le début de la panique morale autour du sexisme. Quand une douzaine de mecs décident de boire et hacker dans la chambre d’hôtel de quelqu’un, je suis invitée. Ils me connaissent depuis des années, donc je suis sûre. Les nouvelles, quelles que soient leurs compétences, ne sont pas invitées à moins que je ne sois là tout du long. Une accusation de harcèlement sexuel potentielle plane, et personne ne veut se risquer à avoir 12 hommes seuls avec une seule femme et des boissons alcoolisées. Du coup, les nouvelles restent dehors.

Je n’ai jamais été mise dans un groupe « Les femmes dans X », à l’écart de l’action réelle d’un projet. J’ai assez d’influence pour dire non quand on me dit que je devrais être loyale et réserver mon temps de travail pour des groupes féminins au lieu de le consacrer à la technologie. Je ne suis pas assez jeune ou impressionnable pour écouter les goûts de l’Initiative Ada[1], qui m’aurait tenue de donner de façon passive-agressive des cartons rouges à quiconque me dérange, ou m’aurait fait ressentir tous les hommes comme une menace, ou encore m’aurait fait comprendre que n’importe quel différend que je peux avoir serait causé par mon sexe.

Voici une nouvelle pour vous : à l’exception des polymathes dans le groupe, les hackers sont généralement socialement inadaptés. Si quelqu’un de n’importe quel sexe fait quelque chose qui viole mes limites, je suppose que c’est un malentendu. J’explique calmement et précisément ce qui m’a dérangé et comment éviter le franchissement de cette limite, je tiens à ce que la personne sache que je ne suis pas en colère contre elle, je veux juste m’assurer qu’elle est au courant, de sorte que cela ne se reproduise pas. C’est ce que font les adultes, et cela fonctionne. Les adultes ne cherchent pas à tout prix à se vexer, à donner des « creeper cards », et ne s’attendent pas à ce qu’on lise dans leurs esprits. Je ne suis pas un enfant, je suis un adulte, et j’agis comme tel.

On s’en fout de mes nibards

Je suis venue au monde de l’open source car j’aimais faire partie d’une communauté où mes idées, mes capacités et mon expérience comptaient, pas mes seins. Cela a changé, et ce changement est dû à l’action de gens qui disent vouloir une communauté où les idées, les capacités et l’expérience comptent plus que des seins.

Il y a très peu de filles qui veulent hacker. J’imagine que ça a beaucoup à voir avec le fait que l’on donne aux filles des poupées de mode et du maquillage et qu’on leur dit de fantasmer à propos d’amour et de popularité, alors qu’on donne aux garçons des LEGO et des boites à outils et qu’on leur dit d’en faire quelque chose. J’imagine que ça a beaucoup à voir avec le genre de femmes qui roucoulaient « mais elle pourrait être tellement belle si seulement elle ne passait pas autant de temps avec les ordinateurs ». J’imagine que ça a beaucoup à voir avec la manière dont les filles sont associées à l’éphémère — popularité, beauté et bien-être — alors qu’on enseigne aux garçons à se délecter de la réalisation. Donnez-moi une jeune personne de n’importe quel sexe avec une mentalité de hacker, et je vais m’assurer qu’elle aura le soutien dont elle a besoin pour devenir incroyable. Pendant ce temps, achetez à votre nièce ou votre fille une boite de LEGO et apprenez-lui à souder. J’aime voir des enfants aux rencontres de LUG et aux hackerspaces — amenez-les ! Il n’y aura jamais trop de hackers.

Ne blâmez pas les hommes simplement parce qu’ils sont là. Le « privilège des hommes » est une manière de dire « tu te sens coupable car tu n’as pas de seins, honte à toi, même si tu ne fais rien de mal », et j’ai perdu trop de mon temps à protéger des mecs sympas de cette idée. Oui, certaines personnes sont des ordures. Appelez-les des ordures, et ne reprochez à personne ayant la même anatomie d’avoir ce comportement. L’amalgame entre les bons mecs et les mauvais n’aide personne, ça empêche juste les mecs sympas d’interagir avec les femmes car ils sentent qu’ils ne pourront pas s’en tirer. Je suis fatiguée de dépenser mon temps et mon énergie à protéger les mecs bien de ce drame.

Ne blâmez pas les hackers d’avoir des défauts de non-hackers. Ce n’est pas ma faute si certaines personnes ne lisent pas les pages du manuel, pas plus que c’est mon travail de leur tenir la main étape après étape pour qu’ils n’aient pas à les lire. Ça n’est pas à moi d’amener de force des femmes aux rencontres de LUG et de tenter de leur laver le cerveau de manière à vous rendre plus à l’aise avec le ratio homme/femme, et de toute manière procéder ainsi ne marcherait pas.

Avant tout, je suis déçue. J’avais un havre, un endroit où personne n’accordait d’importance à mon apparence, à ce à quoi mon corps ressemblait ou à n’importe quel attribut éphémère — car ils s’intéressaient à ce que je pouvais faire — et ce décalage de culture m’a volé mon havre. Au moins, je l’ai eu. Les filles qui me suivent ont raté cela.

Je me rappelle qu’à cette époque, dans mon havre, si quelqu’un était désagréable ou essayait de m’intimider, les gens autour de moi réagissaient avec un retentissant « Comment oses-tu être désagréable avec quelqu’un qu’on apprécie ! ». Aujourd’hui, si un homme se comporte mal, on s’embourbe dans un raisonnement beaucoup plus complexe : « Est-ce que c’est parce qu’elle est une femme ? », « Est-ce que je vais passer pour un héros si j’interviens ? », « Est-ce que je suis misogyne si je n’interviens pas ? », « Qu’est-ce que ça implique pour les femmes dans le monde de la technologie ? », « Est-ce que je veux vraiment participer à un énième débat sur la politique des sexes ? ». C’était tellement plus simple lorsqu’on n’avait pas besoin de tout analyser, et qu’on tombait sur des gens désagréables seulement parce qu’ils étaient désagréables.

La passion de Susan Sons pour l’éducation l’a conduite vers l’open source avec Debian Edu, Edubuntu, et elle a aussi initié Frog et Owl qui aident les technophiles à interagir avec les enseignants pour développer des outils éducatifs plus utiles.

Notes

[1] Source: wikipedia: Ada Initiative est une organisation américaine visant à accroître la participation des femmes dans la culture libre et l’open source. Elle a été fondée en 2011 par les informaticiennes et défenseurs de l’open source Valerie Aurora et Mary Gardiner.




Entretien avec le fondateur de Vikidia, l’encyclopédie libre pour les enfants

Vikidia, dans sa présentation la plus simple, est l’équivalent de Wikipédia pour les enfants. Ouvert depuis 7 ans, ce wiki réunit maintenant 16 000 articles et reçoit 600 000 visiteurs uniques par mois pour sa version première en français. Vikidia est détenu par l’association du même nom, avec le soutien de Wikimédia France et est hébergé par Tuxfamily. Des versions ont été ouvertes en espagnol, en italien et en russe.

Ses objectifs, ses bases et son fonctionnement très proches de ceux de sa grande sœur comprennent l’ouverture à la participation des enfants et adolescents pour sa construction et dans la plupart des aspects de son fonctionnement. C’est ce qui se passe effectivement avec une distribution très intergénérationnelle des contributeurs.

Orikrin1998, actif sur ces deux wikis a conduit cette interview d’Astirmays (Mathias Damour), le fondateur de Vikidia et également wikipédien. Celle-là a été complétée et actualisée pour être publiée sur le Framablog.

Vikidia

Entretien avec Astirmays (Mathias Damour)

Orikrin1998 : Bonjour Astirmays, et merci de m’avoir accordé le plaisir de t’interviewer.

Astirmays : Bonjour !

Orikrin1998 : Avant tout, peux-tu te définir tel que tu es dans la vie réelle, ce que tu fais, tes passions …?

Astirmays : J’habite à Annecy, je travaille dans un service chargé de l’application de la réglementation sur l’environnement, et les cours d’eau en particulier. Je profite du lac où je vais me baigner une bonne partie de l’année. Mon travail n’a donc pas de lien avec l’éducation, mais je me suis intéressé à ces questions à la fin et suite à ma propre scolarité.

Orikrin1998 : Comment as-tu découvert Wikipédia et eu envie d’y participer ?

Astirmays : Je me souviens qu’à l’été 2005, j’ai appris ce que sont les bases de fonctionnement de Wikipédia (ouvert à tous) et ça m’a tout de suite paru intéressant. Quelques mois plus tard, j’ai fait quelques modifications sous IP, et je me suis inscrit en janvier 2006, quand j’ai eu l’ADSL, en fait avec tout de suite l’intention d’y participer, peut-être pas massivement, mais disons sérieusement.

Orikrin1998 : Tu es le fondateur de Vikidia ; comment t’es venue l’idée de créer un tel site, et pourquoi ?

Astirmays : J’ai eu connaissance du projet Wikipédia Junior, sans m’y pencher plus que ça en premier abord, je participais à la discussion qui a mené à la création du label “bon article” comme variante d‘“Article de qualité”. En relisant les discussions de Wikipédia Junior et en commençant à y participer, j’ai vu rapidement que le projet n’était pas ce que j’avais imaginé d’abord, et qu’il y avait lieu de créer un wiki “junior” qui ait sa vie propre plutôt qu’une simple sélection d’articles. Certaines références en matière de pédagogie me permettaient de voir en quoi c’était possible de plusieurs points de vue : production de contenu, mode de gouvernance wiki. Un Wikipédia pour enfants pouvait être rapproché de certaines pratiques de classes ou d’écoles plus ou moins répandues, mais qui ont néanmoins fait leurs preuves, comme l’élaboration de ressources documentaires en pédagogie Freinet, l’école de Summerhill en Angleterre, qui fonctionne depuis 90 ans : les élèves et le personnel y tiennent une assemblée chaque semaine où peuvent être votées de nouvelles règles pour l’établissement. Je me suis aperçu par ailleurs que l’idée d’un tel wiki avait déjà été émise, et même mise en œuvre en néerlandais (WikiKids.nl ouvert début 2006) mais que personne ne semblait déterminé à mener un tel projet en Français ou comme projet international au sein du mouvement Wikimédia. Ayant une bonne représentation de ce qu’un tel projet pouvait être, j’ai alors décidé de l’ouvrir sans plus attendre !

Orikrin1998 : Cela a-t-il été dur ? Étais-tu seul au tout début, ou bien des proches ou des futurs vikidiens t’aidaient-ils déjà ?

Astirmays : Du temps, du travail certainement, mais dur, non. Le projet a été investi dès son lancement par un groupe de Wikipédiens, et on a eu la chance qu’ils s’impliquent comme ça, adhérant largement au projet, avec quelques tâtonnements et interrogations au début mais surtout beaucoup d’initiatives. Le lancement de Vikidia a certainement bénéficié de la dynamique du projet auquel il succédait : Wikipédia Junior, et en pratique c’était même pendant quelques mois un bandeau d’évaluation sur la page de discussion de près de 2000 articles de Wikipédia qui permettait d’annoncer ce wiki. On a eu de la chance également que les contributeurs se succèdent sans “trou d’air” important, jusqu’à aujourd’hui.

Orikrin1998 : T’attendais-tu à ce que Vikidia devienne ce qu’il est aujourd’hui ?

Astirmays : Je n’étais pas du tout certain que ça fonctionne, mais je l’espérais à peu près comme ce à quoi il ressemble maintenant, pas dans les détails bien sûr ! S’il y a un décalage par rapport à ce que j’imaginais dans le meilleur des cas, c’est d’une part que du côté participation, c’est régulier mais loin d’être massif, les contributeurs forment une communauté limitée. À l’inverse, je ne pensais pas à la qualité du résultat telle qu’on peut la mesurer notamment à travers les appréciations des lecteurs sur le livre d’or, qui sont maintenant déposées régulièrement.

Orikrin1998 : En ressens-tu de la fierté ?

Astirmays : Certainement oui, comme j’en ai ressenti à mon premier (et seul) article de qualité sur Wikipédia, et comme j’espère qu’en ressentent beaucoup de contributeurs de Vikidia en voyant le produit de leur travail intégré dans cette ressource !

Orikrin1998 : Quelles ont été, quelles sont et quelles seront tes contributions sur Vikidia ? Tiens-tu toujours un rôle de « fondateur », ou bien la masse d’utilisateurs t’a-t-elle supplanté sur ce plan là ?

Astirmays : Je ne suis pas un très gros rédacteur, mais il y a quelques articles dont je suis fier aussi. Quant à mon rôle, la communauté n’est pas si importante qu’on s’y perde ! Chaque contributeur compte. Pour employer un mot que je ne connaissais pas au lancement du wiki, je suis de fait comme un gestionnaire de communauté (« community manager »).

Orikrin1998 : Quels sont les objectifs du site maintenant ? De quel œil vois-tu l’éventuelle insertion de Vikidia dans la fondation Wikimédia ? Les utilisateurs sont nettement partagés sur ce point de vue.

Astirmays : Concernant les objectifs du site, les commentaires laissés par les lecteurs sont assez éclairants, on a beau avoir rédigé une masse déjà considérable d’articles, ils veulent encore plus de contenu, plus de sujets traités !

Après avoir travaillé au projet d’adoption de Vikidia par la Wikimedia Foundation, plusieurs raisons nous ont fait changé notre fusil d’épaule. La communauté Wikimédia internationale était peu réactive sur ce projet, et j’ai vu passer au cours du temps des objections assez radicales, portant par exemple sur la capacité des enfants à une participation constructive ou sur les obstacles légaux et juridiques supposés. Ces objections auraient certainement émergé à nouveau en cas d’avancée de la proposition. Une part des vikidiens voyaient plutôt avec enthousiasme une éventuelle adoption de Vikidia par la fondation qui détient Wikipédia, mais le scepticisme montait également de la part de participants plutôt anciens qui y voyaient un risque de perte de certains aspects de notre fonctionnement, sans avantages décisif en face. Les avantages d’une fusion comme une meilleure visibilité paraissaient moins convaincants au stade de développement où nous en étions arrivés. Enfin la Wikimedia Foundation, quoiqu’elle respecte une autonomie poussée de la communauté de chaque wiki, a selon moi un fonctionnement très centralisé pour tout le reste. Peut-être les grosses organisations qui ont réussi ne sont pas les mieux placées pour développer les innovations suivantes ! On a donc interrompu la démarche de demande/offre d’adoption de Vikidia par la Wikimedia Foundation.

Un sujet annexe devait être pris en compte, c’est l’existence de la version de Wikipédia en Simple English, selon un modèle qui n’a été copié dans aucune autre langue : viser un niveau de langage plus simple tout en se défendant d’être destiné aux enfants, ou bien en maintenant l’ambiguïté sur ce point. Dans l’optique de l’adoption de Vikidia comme projet ayant une vocation multilingue, la présence de Simple English Wikipedia ne facilitait pas la tâche puisque chaque option imaginable avait ses inconvénients ou ses difficultés : par exemple réorienter l’objectif de Simple English Wikipedia (y a-t-il quelque chose de plus difficile que de faire changer d’avis ou même d’identité tout une communauté ?) ou reprendre son contenu qui aurait été une sorte de fork interne à l’organisation… Abandonner le projet d’être adopté par la WMF nous libère sur cet aspect et nous avons décidé simultanément d’ouvrir une version de Vikidia en anglais, qui sera lancée à la fin du mois de février !

Orikrin1998 : Merci d’avoir répondu à ces quelques questions, et bonne continuation sur Vikidia !

Astirmays : Merci à toi, bonne fin d’après-midi !




Framabag, un nouveau service libre et gratuit

Une interview de Nicolas, son développeur.

Il ne vous a sûrement pas échappé que notre consommation de contenus du Web est terriblement chronophage et particulièrement frustrante tout à la fois : non seulement nous passons beaucoup (trop ?) de temps en ligne à explorer les mines aurifères de la toile, y détectant pépites et filons, mais nous sommes surtout constamment en manque. Même si nous ne sommes pas dans le zapping frénétique si facilement dénoncé par les doctes psychologues qui pontifient sur les dangers du numérique pour les jeunes cervelles, il nous vient souvent le goût amer de l’inachevé : pas le temps de tout lire (TL;DR est devenu le clin d’œil mi-figue mi-raisin d’une génération de lecteurs pressés), pas trop le temps de réfléchir non plus hélas, pas le temps de suivre la ribambelle de liens associés à un article…

Pour nous donner bonne conscience, nous rangeons scrupuleusement un marque-page de plus dans un sous-dossier qui en comporte déjà 256, nous notons un élément de plus dans la toujours ridiculement longue toudouliste, bref nous remettons à plus tard, c’est-à-dire le plus souvent aux introuvables calendes grecques, le soin de lire vraiment un article jugé intéressant, de regarder une vidéo signalée par les rézossocios, de lire un chapitre entier d’un ouvrage disponible en ligne…

Alors bien sûr, à défaut de nous donner tout le temps qui serait nécessaire, des solutions existent pour nous permettre de « lire plus tard » en sauvegardant le précieux pollen de nos butinages de site en site, et d’en faire ultérieurement votre miel ; c’est bel et bon mais les ruches sont un peu distantes, ça s’appelle le cloud (nos amis techies m’ont bien expliqué mais j’ai seulement compris que des trucs à moi sont sur des machines lointaines, ça ne me rassure pas trop) et elles sont souvent propriétaires, ne laissant entrer que les utilisateurs consommateurs payants et qui consentent à leurs conditions. Sans compter que de gros bourdons viennent profiter plus ou moins discrètement de toutes ces traces de nous-mêmes qui permettent de monétiser notre profil : si je collecte sur ces services (ne les nommons pas, justement) une série d’articles sur l’idée de Nature chez Diderot, je recevrai diverses sollicitations pour devenir client de la boutique Nature & Découverte du boulevard Diderot. Et si d’aventure les programmes de la NSA moulinent sur le service, je serai peut-être un jour dans une liste des militants naturistes indésirables sur les vols de la PanAm (je ne sais plus trop si je plaisante là, finalement…)

La bonne idée : « se constituer un réservoir de documents sélectionnés à parcourir plus tard » appelait donc une autre bonne idée, celle d’avoir le contrôle de ce réservoir, de notre collection personnelle. C’est Nicolas Lœuillet, ci-dessous interviewé, qui s’y est collé avec une belle application appelée euh… oui, appelée Wallabag.

Framasoft soutient d’autant plus son initiative qu’on lui a cherché des misères pour une histoire de nom et qu’il est possible d’installer soi-même une copie de Wallabag sur son propre site.

Le petit plus de Framasoft, réseau toujours désireux de vous proposer des alternatives libératrices, c’est de vous proposer (sur inscription préalable) un accès au Framabag, autrement dit votre Wallabag sur un serveur Frama* avec notre garantie de confidentialité. Comme pour le Framanews, nous vous accueillons volontiers dans la limite de nos capacités, en vous invitant à vous lancer dans votre auto-hébergement de Wallabag.
Cet article est trop long ? Mettez-le dans votre Framabag et hop.

Framablog : Salut Nicolas… Tu peux te présenter brièvement ?

Salut ! Développeur PHP depuis quelques années maintenant (10 ans), j’ai voulu me remettre à niveau techniquement parlant (depuis 3 ans, j’ai pas mal lâché le clavier). Pour mes besoins persos, j’ai donc créé un petit projet pour remplacer une solution propriétaire existante. Sans aucune prétention, j’ai hébergé ce projet sur Github et comme c’est la seule solution open source de ce type, le nombre de personnes intéressées a augmenté …

Les utilisateurs de services Framasoft ne le savent pas forcément, mais tu as déjà pas mal participé à la FramaGalaxie, non ?

En effet. J’ai commencé un plugin pour Framanews, ttrss-purge-accounts, qui permet de nettoyer la base de données de comptes plus utilisés. Mais ce plugin a besoin d’être terminé à 100% pour être intégré au sein de Framanews (et donc de Tiny Tiny RSS), si quelqu’un souhaite m’aider, il n’y a aucun souci.
J’ai aussi fait 1 ou 2 apparitions dans des traductions pour Framablog. Rien d’extraordinaire, je ne suis pas bilingue, ça me permet de m’entraîner.

Parlons de suite de ce qui fâche : ton application Wallabag, elle s’appellait pas “Poche”, avant ? Tu nous racontes l’histoire ?

Euh en effet … Déjà, pourquoi poche ? Parce que l’un des trois « ténors » sur le marché s’appelle Pocket. Comme mon appli n’était destinée qu’à mon usage personnel au départ, je ne me suis pas torturé bien longtemps.

Cet été, on a failli changer de nom, quand il y a eu de plus en plus d’utilisateurs. Et puis on s’est dit que poche, c’était pas mal, ça sonnait bien français et puis avec les quelques dizaines d’utilisateurs, on ne gênerait personne.

C’est sans compter avec les sociétés américaines et leur fâcheuse manie de vouloir envoyer leurs avocats à tout bout de champ. Le 23 janvier, j’ai reçu un email de la part du cabinet d’avocats de Pocket me demandant de changer le nom, le logo, de ne plus utiliser le terme “read-it-later” (« lisez le plus tard ») et de ne plus dire que Pocket n’est pas gratuit (tout est parti d’un tweet où je qualifie Pocket de « non free » à savoir non libre). Bref, même si je semblais dans mon droit, j’ai quand même pris la décision de changer de nom et Wallabag est né, suite aux dizaines de propositions de nom reçues. C’est un mélange entre le wallaby (de la famille des kangourous, qui stockent dans leur poche ce qui leur est cher) et bag (les termes sac / sacoche / besace sont énormément revenus). Mais maintenant, on va de l’avant, plus de temps à perdre avec ça, on a du pain sur la planche.
wallaby avec bébé dans sa poche crédit photo William Warby qui autorise explicitement toute réutilisation.

Bon, alors explique-moi ce que je vais pouvoir faire avec Framabag…

Alors Framabag, ça te permet de te créer un compte gratuitement et librement pour pouvoir utiliser Wallabag. Seule ton adresse email est nécessaire, on se charge d’installer et de mettre à jour Wallabag pour toi. Tu peux d’ailleurs profiter d’autres services proposés par Framasoft ici.

À ce jour, il y a 834 comptes créés sur Framabag.

Vous avez vraiment conçu ce service afin qu’on puisse l’utiliser avec un maximum d’outils, non ?

Autour de l’application web, il existe déjà des applications pour smartphones (Android et Windows Phone), des extensions Firefox et Google Chrome.

Comme Wallabag possède des flux RSS, c’est facile de lire les articles sauvegardés sur sa liseuse (si celle-ci permet de lire des flux RSS). Calibre (« logiciel de lecture, de gestion de bibliothèques et de conversion de fichiers numériques de type ebook ou livre électronique »,nous dit ubuntu-fr.org) intègre depuis quelques semaines maintenant la possibilité de récupérer les articles non lus, pratique pour faire un fichier ePub !

D’autres applications web permettent l’intégration avec Wallabag (FreshRSS, Leed et Tiny Tiny RSS pour les agrégateurs de flux). L’API qui sera disponible dans la prochaine version de Wallabag permettra encore plus d’interactivité.

Y a-t-il un mode de lecture hors ligne ou est-ce que c’est prévu pour les prochaines versions ?

Il y a un pseudo mode hors ligne, disponible avec l’application Android. On peut récupérer (via un flux RSS) les articles non lus que l’on a sauvegardés. Une fois déconnecté, on peut continuer à lire sur son smartphone ou sa tablette les articles. Par contre, il manque des fonctionnalités : quand tu marques un article comme lu, ce n’est pas synchronisé avec la version web de Wallabag. J’espère que je suis presque clair dans mes explications.

Pour la v2, qui est déjà en cours de développement, où je suis bien aidé par Vincent Jousse, on aura la possibilité d’avoir un vrai mode hors ligne.

Alors si on veut aider / participer / trifouiller le code / vous envoyer des retours, on fait comment ?

On peut aider de plusieurs façons :

  • utiliser wallabag et nous remonter les problèmes rencontrés ;
  • participer au développement de l’application https://github.com/wallabag/wallabag Si Silex / Symfony2 / HTML5 / etc. te parlent, n’hésite pas !
  • comme tout projet, le gros point noir est le manque de documentation. Elle est dispo ici mais il manque plein de choses et tout n’est pas à jour ;
  • parler de Wallabag autour de vous ;
  • il existe un compte Flattr.

Le mot de la fin…?

Merci à Framasoft d’accueillir et de soutenir Wallabag !

La route est encore bien longue pour ne plus utiliser de solutions propriétaires, mais on devrait y arriver, non ?

framasoft plein les poches
hackez Gégé !




Pourquoi j’aime être un community manager open source

La fonction, et parfois le métier, de community manager (gestionnaire de communauté en français) est relativement récente dans le paysage numérique.

Récent mais déjà à la mode et à toutes les sauces, parce que tout le monde, même Orange ou la SNCF, aime à dire qu’il est présent sur le réseaux sociaux et dialogue avec sa « communauté ».

Qu’en est-il dans le milieu bien spécifique du logiciel libre où l’existence d’une « communauté » est bien moins un adjuvant marketing qu’une condition de la réussite d’un projet ?

Des réponses parfois redondantes mais souvent vivifiantes 😉

Salvador Moreira - CC by-sa

Que préférez-vous dans votre métier de community manager de projet open source ?

What’s the best thing about being an open source community manager?

Jason Hibbets – 27 janvier 2014 – OpenSource.com
(Traduction : Zizi, alpha, GregR, Omegax, Scailyna, Asta, lamessen, Diin, ttoine + anonymes)

Il y a peu, j’avais dressé la liste des cinq meilleures pratiques pour les community managers en 2014. En ce jour de reconnaissance des community manager (NdT : Community Manager Appreciation Day), nous avons recueilli les réflexions de quatorze grands représentants issus de diverses communautés open source invités à répondre à la question suivante :


Quel est le meilleur aspect du métier de community manager ?


Voici ce qu’ils ont répondu.


Zohar Babin, directeur de la communauté chez Kaltura :

Étant community manager pour un projet open source de grande échelle, et ayant un grand succès commercial, je pense que le plus gros de mon boulot est de rassembler les deux choses que j’aime le plus : les relations humaines et la technologie. Ma responsabilité est d’équilibrer les deux, de garantir une bonne ambiance qui assure une communication harmonieuse, et une visibilité dans un environnement ouvert. Je suis une sorte de « jongleur-scientifique ». Je mesure, analyse et expérimente fréquemment, tandis que la performance quotidienne est purement artistique.

Jono Bacon, community manager pour Ubuntu :

Je pense que les communautés mettent en avant le plus bel atout que l’être humain possède : le sens du partage. Quand les gens collaborent ensemble, ils ont l’opportunité de créer de plus grandes et plus puissantes choses que quelqu’un pourrait accomplir seul dans son coin. Rallier différentes façons de penser et différentes motivations pour créer quelque chose déconcertant de simplicité est complexe. C’est un beau et vivifiant challenge, et quand le résultat de ce travail profite à de vraies personnes, je me dis que gérer une communauté est quelque chose à laquelle j’aimerais consacrer ma vie.

Ben van’t Ende, community manager pour TYPO3

Repérer les opportunités de coopération entre des groupes et des individus, faire correspondre ces initiatives et donner à ces individus la chance de partager leurs compétences au profit d’une communauté pour qu’ils soient appréciés pour leur savoir ou rien que pour leur effort. La plupart des membres d’une communauté veulent partager ce qu’ils savent avec le reste de cette communauté, mais ils ont souvent des difficultés à trouver où exactement aller pour partager leurs idées ou quand faut il le faire. En tant que community manager, vous avez le point de vue qui vous permet d’opérer cette magie, et je trouve ceci vraiment enrichissant.

Britta Gustafson, community manager pour Cydia (et aussi community manager bénévole d’OpenHatch) :

La meilleure chose en étant community manager est de créer le lien entre les personnes qui utilisent un projet et les personnes qui travaillent dessus, en aidant les deux parties à avoir de meilleures informations — ce qui signifie que j’aide à faire de meilleurs projets (et plus joyeux). J’aime me concentrer sur les personnes qui utilisent un projet, parler avec eux, et apprendre ce qu’ils découvrent et ce qu’ils demandent — c’est pratique et puissant de faire attention à la face extérieure et publique d’un projet.

J’apprécie aussi la diversité des tâches que je fais en tant que « community manager » — du support, de la modération, un peu de publicité, un peu de gestion de produit, et toutes sortes d’écrits pour améliorer les choses et les coller ensemble. C’est assez créatif : devoir considérer l’ensemble du projet, comprendre comment le côté technique et le côté social s’assemblent, et être une personne qui fait des connexions et rempli des trous — en identifiant les problèmes intéressants et en trouvant une manière de les résoudre.

Daniel Hinojosa, community manager pour SourceForge :

J’adore écouter les gens, qu’ils utilisent SourceForge ou pas. J’aime entendre parler des difficultés qu’ils rencontrent en écrivant leur code, en développant leur propre communauté, et élaborant des stratégies pour résoudre des problèmes vraiment compliqués. Actuellement, mon but est de comprendre la division qui existe au sein de la communauté des logiciels libres entre publier tôt, et publier souvent (NdT ; release eraly, release often).

David Hurley, community manager en charge de la partie développement de Joomla :

La meilleure chose qui soit pour un community manager, est, sans aucun doute, la communauté. La possibilité qu’il y a de discuter, d’encourager et de permettre à des membres de plus s’engager dans un projet, une idée ou un rêve. J’ai pas mal appris en écoutant les autres partager leurs idées et, en tant que community manager, j’ai le privilège d’aider ces idées à être concrétisées en actions.

Francesca Krihely, senior manager en charge de la relation avec la communauté pour MongoDB :

Lorsque l’on est un community manager, la meilleure chose qui soit, ce sont les gens avec lesquels vous travaillez. Vous êtes amenés à rencontrer des personnes passionnées, intelligentes, stimulantes qui contribuent tout en restituant ce que les communautés dont ils font partie leur ont apportées. J’ai beaucoup de chance de travailler avec une communauté composée d’ingénieurs vraiment doués et intelligents qui sont aussi curieux et réactifs. J’apprécie vraiment lorsque je vois des membres de la communauté avec lesquels j’ai pu travailler pendant des années gagner des prix, lancer leurs entreprises, lever des fonds ou encore inventer leurs propres projets Open Source. C’est un boulot génial que d’aider des personnes brillantes et talentueuses à réussir.

Heathr Leson, Directrice de l’implication de la communauté pour l’Open Knowledge Foundation (elle est aussi membre du conseil d’administration au sein d’Humanitarian OpenStreetMap) :

L’étincelle. C’est cette étincelle qui se produit lorsque vous mettez en lien une personne avec une idée ou un parcours d’apprentissage ou que mettez les personnes en relation puis que vous vous retirez. Ce moment de beauté a lieu lorsque les gens trouvent leur voie ou leur passion avec un soupçon d’encouragement ou d’orientation. À ce moment, vous réalisez que votre travail, permettre l’émergence des prochains contributeurs ou représentants open source est la plus grande source de motivation qui soit.

Vincent Mayers, community manager open source chez inBloom :

Avoir une vision claire de l’avenir est tellement important pour le développement et l’évolution d’un projet open source, et tout le monde a la sienne ! En tant que community manager, j’ai la charge de propager auprès de nos équipes produits et de nos dirigeants la vision des communautés open source, afin que nous puissions l’intégrer dans notre feuille de route (NdT : « roadmap »). J’adore cette contribution venant de tant d’origines différentes. Et aussi, j’adore mon rôle qui combine tant de disciplines : vente, marketing, relations publiques, recrutement, évènementiel, gestion de projet, développement produit et bien sûr, le jonglage.

Angela Oduor, community manager open source chez Ushahidi :

Ce sont les gens qui font tourner le monde. La meilleure chose concernant le fait d’être un community manager à Ushahidi est que je peux être un pont entre la technologie et ces gens.

Nicolas Pastorino, community manager open source chez eZ Publish :

La meilleure chose que j’aime faire en tant que community manager est d’accompagner de l’intérieur un groupe de bénévoles motivés et engagés. Lorsque la mission et les objectifs d’une communauté sont largement partagés, une énergie inégalée est créé, qui converge vers sa réalisation, comme je l’ai rarement vu ailleurs.

Lydia Pintscher, community manager pour KDE :

La meilleure et la pire des choses pour un community manager dans une communauté de bénévoles est que vous ne pouvez forcer personne à faire quoi que ce soit. Vous devez rallier les membres de la communauté à votre cause encore et encore. Cela peut être un véritable défi, mais quand vous les avez enfin recrutés, vous savez qu’ils sont vraiment avec vous parce qu’ils le veulent et qu’ils veulent faire ce qu’ils font.

David Stokes, community manager pour Oracle / MySQL :

La meilleure chose à propos du fait d’être un gestionnaire de communauté MySQL c’est de voir ce que les gens font avec le produit ! Que ce soit une municipalité qui ouvre publiquement l’ensemble de ses données ou un chercheur qui utilise MySQL pour rassembler des données exotiques ou bien même une petite entreprise qui utilise notre système de base de données de manière innovante. Voir un outil aussi basique qu’une base de données être utilisé de millions de manières différentes pour aider des personnes à atteindre leurs objectifs ne me lasse pas de me surprendre.

Andreas Tille, développeur principal pour le projet DebianMed :

Le mieux, c’est lorsqu’il faut apprendre aux nouveaux arrivants comment rejoindre la communauté et abaisser toutes les barrières à l’entrée. Sur DebianMed, on travaille ainsi sur deux programmes : le meilleur tutorat du mois et le parrainage. Plus de détails sur ces thèmes sont accessibles via mes présentations.

Crédit photo : Salvador Moreira (Creative Commons By-Sa)




Valentina, logiciel libre de création de vêtements (et Gucci devint GNUcci)

Le monde du logiciel libre manque d’applications dédiées à la création de vêtements. D’autant qu’avec le boom des fab labs, on formerait plein de stylistes en herbe qui proposeraient autre chose que des produits chinois.

Raison de plus pour mettre en lumière ci-dessous le projet émergent qu’est Valentina.

Pour illustrer ce qu’il peut potentiellement réaliser, voici trois images chronologiques :

Valentina

Valentina

Valentina

Remarque : si le sujet intéresse, on pourra aussi lire Nous avons enfin compris pourquoi le diable s’habillait en Prada.

http://valentina-project.blogspot.ru/2013/12/blog-post_10.html

Présentation de « Valentina », un logiciel libre de création de vêtements

Introducing Valentina, free fashion design software

Alexandre Prokoudine – 31 décembre 2013 -LibreGraphicsWorld
(Traduction : GregR, @cartron, Mooshka, Scailyna, Asta, Lolo le 13 + anonymes)

Au fil du temps, nous avons assisté à de nombreuses discussions sur la viabilité du logiciel libre pour le graphisme, le design graphique et la conception de plans. Mais qu’en est-il de la création de vêtements ?

Tout d’abord, quel est le problème avec le logiciel commercial ? Comme beaucoup de systèmes de CAO (Conception Assistée par Ordinateur), c’est cher. Même si certains éditeurs, comme TUKAtech, proposent en option des abonnements mensuels à 145 $ pour répartir le coût de possession dans le temps (ce qui rend plus obscur le TCO/coût total de possession), d’autres éditeurs sont moins libéraux.

Par exemple, le département de relations publiques de Optitex n’a pas peur de rediffuser des études de cas qui mettent en évidence les éléments suivants :

Les prix ne sont pas du tout abordables pour une jeune société qui vient de se monter : environ 16.000 $, sans formation, et sans compter le coût de l’ordinateur, du scanner (si vous avez besoin de dessiner vos modèles à la main), et du traceur (si vous voulez imprimer le modèle en taille réelle).

OK, vous comprenez l’idée. Le résultat, c’est que les stylistes qui démarrent leur activité sont bloqués entre des logiciels chers qu’ils ne peuvent pas se permettre d’acheter, des applications simplistes, et des systèmes de CAO génériques divers et variés (de l’abordable aux versions chères piratées). Tout cela ne rend pas les choses faciles.

Vous êtes déjà en train d’aller dans en bas de cet article, pour y laisser un commentaire acide disant qu’on ferait mieux de parler de liberté ? Eh bien, disons qu’il serait assez génial de donner aux gens un outil libre et gratuit qui fonctionne et qui fournisse une grande flexibilité.

Donc, un logiciel de mode libre du coup ?

Susan Spencer Conklin a été la première à aborder le sujet (non existant) du logiciel libre pour le design de mode, au « Libre Graphics Meetings 2010 », avec l’intention de démarrer une conversation avec la communauté. Un an plus tard, à la même conférence, elle montrait déjà son propre logiciel, qui fait partie du projet Tau Meta Tau Physica (TMTP).

Vous pouvez lire cette entretien avec Susan pour avoir plus de détails sur son projet. Pour résumer, Susan se concentre sur le développement d’un système qui génère un modèle de taille unique qui ira à n’importe qui avec très peu d’ajustements à faire.

Bien que Susan ait aussi réussi à faire quelque chose qui marchotte avec Inkscape, il y a toujours de la place pour un outil de design de modèle dans l’écosystème. Et c’est là que Valentina rentre en jeu.

Valentina

Bien que ce projet soit assez récent, Roman Telezhinsky a commencé à travailler sur son propre outil de création de modèle quand il était étudiant.

Cette version de l’application fonctionne sur Linux et Windows, et supporte le design et le classement de modèles. Vous pouvez faire pas mal de choses, comme créer manuellement des agencements pour exporter en SVG et PNG, puis les couper avec un traceur.

En fait, il est déjà possible d’utiliser Valentina pour créer de vrais vêtements à partir d’un patron de couture, comme illustré sur le blog du projet. Et si on créait GNUcci ? 🙂

Cependant, à ce stade du développement, Roman suggère humblement de ne pas traiter Valentina comme un outil de production, car il manque toujours des fonctionnalités importantes, et le format de fichier interne n’est pas encore stabilisé.

Une collaboration entre Susan et Roman est tout à fait possible. Ils ont beaucoup discuté en 2013, et il y a pas mal de choses intéressantes à porter de TMTP à Valentina.

Il y a encore beaucoup de travail en perspective. En mettant de côté les fonctionnalités Design Patern, il y a toute la question de la 3D. De plus en plus d’applications pour la conception de mode permettent de tester simplement votre création sur des personnages virtuels et voir le résultat dans des poses différentes. Réécrire ce type de fonctionnalités entièrement peut être un énorme chantier.

Une façon de voir cela est d’estimer quelles parties pourraient êtres déléguées à des logiciels comme l’add-on MakeClothes pour Blender, puis de voir s’il serait facile d’intégrer Valentina, Blender + MakeClothes, et MakeHuman. Ceci permettrait d’attirer l’attention des développeurs sur l’utilisation de Blender pour la simulation de vêtements.

Maintenant, vous souhaitez sans doute voir du concret : vous trouverez un fichier d’installation de Valentina à côté des Tarball du code source sur Bitbucket. Pour commencer, lisez le tutoriel par Roman Telezhinsky et Christine Neupert.

Donnons sa chance à Valentina.




Exemplaire libération du jeu CodeCombat

« Oui, nous venons de rendre open source la dernière année de notre vie : tout le code, le graphisme, et la musique de CodeCombat ! » Ainsi s’exprime NIck sur le blog de ce jeu particulier puisqu’on y fait l’apprentissage sérieux mais ludique du JavaScript.

Une libération exemplaire dans la mesure où, comme cela arrive trop souvent, ça n’est pas qu’un effet d’annonce. Tout a en effet été minutieusement préparé sur GitHub pour faciliter la tâche des futurs contributeurs.

Longue vie à CodeCombat…

CodeCombat

Nous avons tout mis en open source

We’ve Open-Sourced Everything

Nick – 6 janvier 2014 – CodeCombat Blog
(Traduction : Monsieur Tino, Théotix, goofy, audionuma, baba, Sphinx, Asta, moedium, vvision + anonymes)

CodeCombat est un jeu de programmation pour apprendre à coder ; un concours de codage multijoueurs dans une arène pour affûter vos compétences ; une startup lancée avec un financement par Y-combinator ; et depuis le week-end dernier, le plus important projet open source utilisant Coffeescript et une porte d’entrée géniale pour l’open source et le développement de jeux. Que vous soyez un programmeur novice désireux de vous faire une idée de ce qu’est ce Github ou un gourou de l’open source qui cherche dans quoi mordre à belles dents, regardez notre Github et rejoignez plus de deux cents Grands Mages de CodeCombat dans la construction du meilleur jeu de programmation qui soit.

Oui, nous venons de rendre open source, sous les licences MIT et Creative Commons CC By-SA, la dernière année de notre vie : tout le code, le graphisme, et la musique de CodeCombat !

« Attendez un peu, vous êtes une startup à but lucratif, et vous venez de libérer tout votre code ? Mais vous êtes fou ? »

Nan ! Fermer son code source est peut être le choix fait par pratiquement toutes les startups et studios de jeux vidéo, mais nous pensons que c’est une convention qui doit être repensée. CodeCombat est déjà un projet communautaire, avec des centaines de joueurs se portant volontaires pour créer des niveaux, écrire de la documentation, aider les débutants, faire des tests et même traduire le jeu en dix-sept langues ! Maintenant les programmeurs peuvent se joindre à la fête eux aussi.

Notre noble mission est de vous apprendre à coder. Nous avons plus de 9000 niveaux de difficulté qui vous feront gravir tous les échelons, de simple novice à sorcier du code comme Fabrice Bellard, alors pourquoi ne pas vous lancer dans un projet open source accessible aux débutants pour continuer à apprendre ? Nous ne nous contentons pas de balancer du code en vrac — nous avons travaillé dur pour qu’il soit simple de contribuer. Vous n’avez pas besoin de connaître git, vous n’avez pas besoin d’avoir quoi que ce soit d’installé, et vous n’avez même pas besoin de savoir coder pour aider à résoudre certains problèmes sur notre Github.

Ou alors, si vous êtes intéressés par les compilateurs, les langages de programmation, les simulations physiques, la géométrie, le design, l’expérience utilisateur, l’intelligence artificielle, l’optimisation des performances, le traitement audio, les jeux de stratégie en temps réel, les jeux de rôle, l’internationalisation et la localisation, la sécurité, le dessin vectoriel 2.5D, le développement piloté par les tests, les bases de données, les discussions en visioconférence, les environnements de développement intégrés, ou les débogueurs, vous adorerez hacker ce projet. Avec des technologies sympas, des problèmes détaillés, une documentation complète pour les développeurs, un script convivial pour mettre en place l’environnement de développement et l’équipe de CodeCombat prête à vous aider à mettre en place vos idées, c’est le jeu open source parfait pour débuter. Ne soyez pas timide !

CodeCombat

Nous avons besoin de votre aide. Il y a tout juste deux mois, nous avons lancé notre bêta. Il y a deux semaines, nous avons écrit un billet sur les 180 000 enfants qui avaient joué avec CodeCombat cette semaine-là. Il y a une semaine, nous avons essayé un niveau difficile, un défi pour développeur, et presque 10 000 programmeurs chevronnés y ont joué — nous n’avons pas encore fini de répondre à tous ceux qui ont battu notre propre algorithme à plate couture et voulaient qu’on les aide à trouver un boulot de programmeur. CodeCombat devient un phénomène qui dépasse largement le domaine d’un simple jeu. Si vous souhaitez écrire du code qui montrera à des millions de joueurs à quel point ça peut être sympa de programmer, alors cliquez sur ce lien et devenez un Grand Mage. Nous avons vraiment hâte de voir ce que vous avez réalisé.

CodeCombat

Vous voulez aider d’une autre façon ? Rejoignez nous en tant qu’Artisan créateur de niveaux, Aventurier bêta-testeur, Scribe de documentation, Diplomate traducteur, Ambassadeur serviable ou Conseiller expert.