Ubuntu dans le New York Times

Stopped - CC bySamedi dernier Ubuntu a eu l’honneur d’apparaître dans les colonnes du très prestigieux et (encore) très diffusé journal américain New York Times, repris ensuite par le non moins prestigieux mais plus européen International Herald Tribune.

Il s’agissait avant tout de dresser le portrait de son charismatique et atypique père fondateur Mark Shuttleworth. Il n’en demeure pas moins qu’à travers ce prisme c’est non seulement la plus célèbre des distributions GNU/Linux mais également, nous semble-t-il, la communauté du libre dans son ensemble qui se trouve ainsi mise en lumière auprès d’un large public[1].

Dans la mesure où, au-delà de cette reconnaissance de principe, l’article nous a semblé intrinsèquement intéressant, nous avons mis nos plus fins limiers traducteurs sur le coup pour vous le proposer moins d’une semaine après sa parution.

Un bon samaritain du logiciel qui ne fait pas du Windows

A Software Populist Who Doesn’t Do Windows

Ashlee Vance – 10 janvier 2009 – The New York Times
(Traduction Framalang : Goofy et aKa)

On les considère soit comme de misérables casse-pieds soit comme ceux-là même qui pourraient causer la chute de Windows. À vous de choisir.

Au mois de décembre, des centaines de ces développeurs controversés de logiciels étaient rassemblés pour une semaine au quartier général de Google à Mountain View, en Californie. Ils venaient des quatre coins du globe, arborant beaucoup de signes de reconnaissance des mercenaires du code : jeans, queues de cheval, visages hirsutes aux yeux injectés de sang.

Mais au lieu de se préparer à vendre leur code au plus offrant, les développeurs ont conjugué leurs efforts généralement bénévoles pour essayer d’ébranler le système d’exploitation Windows de Microsoft qui équipe les ordinateurs personnels, et dont les ventes ont rapporté près de 17 milliards de dollars l’an dernier.

Le clou de la réunion était une chose appelée Ubuntu et un certain Mark Shuttleworth, le charismatique milliardaire sud-africain, qui tient lieu de chef spirituel et financier de cette tribu des codeurs.

Créé il y a maintenant tout juste quatre ans, Ubuntu (prononcez ou-BOUN-tou) s’est imposé comme la version du système d’exploitation pour Linux dont le développement a été le plus rapide et la notoriété la plus grande, il concurrence Windows avant tout par son très, très bas prix : 0 dollar.

On estime à plus de dix millions le nombre d’utilisateurs d’Ubuntu aujourd’hui, et ils représentent une sérieuse menace pour l’hégémonie de Microsoft dans les pays développés, peut-être même plus encore dans les contrées qui sont en train de rattraper la révolution technologique.

« Si nous réussissons, nous changerons complètement le marché du système d’exploitation,» a déclaré M. Shuttleworth pendant une pause au cours de la rencontre, le sommet des développeurs d’Ubuntu. « Microsoft devra s’adapter, et je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose. »

Linux est gratuit, mais il y a toujours moyen de gagner de l’argent pour les entreprises qui gravitent autour du système d’exploitation. Des firmes comme IBM, Hewlett-Packard et Dell installent Linux sur plus de 10% de leurs ordinateurs vendus comme serveurs, les entreprises paient les fabricants de matériel et de services informatiques comme les vendeurs de logiciels Red Hat et Oracle, pour régler tous les problèmes et tenir à jour leurs systèmes basés sur Linux.

Mais Canonical, l’entreprise de Mark Shuttleworth qui élabore Ubuntu, a décidé de se concentrer à court terme sur les PC utilisés au travail et par les gens chez eux.

Les partisans de l’Open Source caressent depuis longtemps le rêve de voir en Linux un puissant rival de Windows, et dans une moindre mesure de l’OS X pour Mac de Apple. Ils proclament haut et fort que les logiciels qui peuvent être librement modifiés par le plus grand nombre peuvent s’avérer moins chers et meilleurs que le code propriétaire produit par des entreprises boulimiques. Cependant, ils ont eu beau faire tout leur possible, les adeptes zélés de Linux n’ont pas réussi à provoquer un usage généralisé de Linux sur les ordinateurs de bureau et les portables. Cet excentrique objet qu’est le logiciel demeure la spécialité des geeks, pas celui des grands-mères.

Mais avec Ubuntu, croient les prosélytes, il se pourrait qu’il en aille autrement.

« Je pense qu’Ubuntu a attiré l’attention des gens sur l’ordinateur de bureau Linux, » a déclaré Chris DiBona, le patron du département des logiciels Open Source chez Google. « S’il existe un espoir pour l’ordinateur de bureau Linux, c’est d’Ubuntu qu’il viendra »

Près de la moitié des 20 000 employés de Google utilisent une version légèrement modifiée d’Ubuntu, plaisamment appelée Goobuntu.

Les gens qui feront connaissance avec Ubuntu pour la première fois le trouveront très proche de Windows. Le système d’exploitation propose une interface graphique agréable, avec des menus familiers et toute la gamme des applications habituelles d’un ordinateur : un navigateur Web, un client courriel, un logiciel de messagerie instantanée et une suite bureautique libre pour créer des documents, des feuilles de calcul et des présentations.

Bien que relativement facile à utiliser pour les familiers de la technologie numérique, Ubuntu – et toutes les autres versions de Linux – peut poser quelques problèmes à l’utilisateur moyen. Beaucoup d’applications créées pour Windows ne fonctionnent pas sous Linux, y compris les jeux les plus populaires et les logiciels de gestion financière, par exemple. Et les mises à jour de Linux peuvent provoquer quelques problèmes dans le système, affectant des fonctions de base comme l’affichage ou la gestion de la carte son.

Canonical a essayé de régler en douceur un grand nombre de problèmes qui empêchaient Linux d’atteindre le grand public. Cette attention portée aux détails dans une version de Linux pour ordinateur de bureau contraste vivement avec les préoccupations des grands distributeurs de systèmes d’exploitation comme Red Hat et Novell. Bien que ces entreprises produisent des versions pour ordinateur de bureau, elles passent le plus clair de leur temps à rechercher de juteux profits sur les serveurs et les centres de traitement des données. Résultat : Ubuntu est apparu comme une sorte de communauté rêvée pour tous ces développeurs de logiciel idéalistes qui se voient comme des acteurs d’une contre-culture.

« C’est tout à fait comparable à ce qu’ont réussi des firmes comme Apple et Google, c’est-à-dire constituer une communauté mais surtout une communauté de passionnés », a dit Ian Murdock, le créateur d’une version précédente de Linux appelée Debian, sur laquelle est bâti Ubuntu.

Les entreprises de technologie grand public ont pris bonne note de la vague d’enthousiasme autour d’Ubuntu. Dell a commencé à vendre des PC et des ordinateurs de bureau avec ce logiciel dès 2007, et IBM a commencé plus récemment à proposer Ubuntu en tête d’un lot d’applications qui rivalisent avec Windows.

Canonical, implanté à Londres, a plus de 200 employés à temps plein, mais sa force de travail entière s’étend bien au-delà, grâce à une armée de bénévoles. L’entreprise a invité à ses frais près de 60 d’entre eux à assister à une réunion de développeurs, en considérant qu’ils étaient des contributeurs importants du système d’exploitation. 1000 personnes travaillent sur le projet Debian et mettent leur logiciel à la disposition de Canonical, tandis que 5000 diffusent sur Internet les informations sur Ubuntu, et 38000 se sont enregistrés pour traduire le logiciel en diverses langues.

Lorsqu’une nouvelle version du système d’exploitation est disponible, les fans d’Ubuntu se ruent sur Internet, sur les sites Web souvent dépassés par les événements qui distribuent le logiciel. Et des centaines d’autres organisations, surtout des universités, aident également à la distribution.

La société de recherche en hautes technologies IDC estime que 11% des entreprises américaines utilisent des systèmes basés sur Ubuntu. Ceci dit, la majeure partie des adeptes d’Ubuntu est apparue en Europe, où l’hégémonie de Microsoft a dû subir un sévère contrôle politique et juridique.

Le ministère de l’éducation de Macédoine fait confiance à Ubuntu, et fournit 180000 copies du système d’exploitation aux écoliers, tandis que le système scolaire espagnol procure 195000 portables Ubuntu. En France, l’Assemblée Nationale et la Gendarmerie Nationale (un corps militaire chargé de missions de police) sont équipés ensemble de 80000 ordinateurs sous Ubuntu. « Le mot libre était très important », précise Rudy Salles (NdT : Difficile ici de savoir si il s’agit de « free » dans le sens de « libre » ou de « gratuit », sûrement un peu des deux), le vice-président de l’Assemblée, en observant que cet équipement a permis au corps législatif d’abandonner Microsoft.

Il ne fait aucun doute que la croissance rapide d’Ubuntu ait été aidée par l’enthousiasme qui a entouré Linux. Mais c’est M. Shuttleworth et son mode de vie décoiffant qui ont surtout suscité un intérêt dont bénéficie Ubuntu. Alors qu’il préfère se vêtir sans façons à la manière des développeurs, certaines de ses activités, notamment un voyage dans l’espace, sortent de l’ordinaire.

« Bon, j’ai une vie très privilégiée, d’accord… » dit M. Shuttleworth. « Je suis milliardaire, célibataire, ex-cosmonaute. La vie pourrait difficilement être plus belle pour moi. Être un fondu de Linux rétablit une sorte d’équilibre.»

M. Shuttleworth a commencé à fonder sa fortune juste après avoir obtenu un diplôme de commerce de l’Université du Cap en 1995. Il payait ses factures en gérant une petite entreprise de conseil en technologie, en installant des serveurs Linux pour que des compagnies puissent faire tourner leur site Web, et autres services de base. Son goût pour le commerce et ses connaissances acquises dans les technologies numériques l’ont incité à miser sur l’intérêt croissant de l’Internet. « Je suis plus un universitaire qu’un marchand de tapis prêt à tout pour faire des coups », dit-il. J’étais très intéressé par la façon dont Internet modifiait le commerce et j’étais résolu à aller plus loin encore.»

M. Shuttleworth décida de lancer en 1995 une entreprise appelée Thawte Consulting (NdT : à prononcer comme « thought » la pensée), qui proposait des certificats numériques, un système de sécurité utilisé par les navigateurs pour vérifier l’identité des entreprises de commerce en ligne. À l’âge de 23 ans, il rendit visite à Netscape pour promouvoir un standard généralisé de ces certificats. Netscape, qui était alors le navigateur Web dominant, prit une participation, et Microsoft, avec son navigateur Internet Explorer, en fit autant.

Quand la folie du point.com (NdT : La bulle internet) se déclencha, des entreprises se montrèrent intéressées par cette boîte implantée en Afrique du Sud qui faisait du profit. En 1999, VeriSign, qui gérait un grand nombre de services structurels pour Internet, acheta Thawte pour 575 millions de dollars. (M. Shuttleworth avait décliné une offre à 100 millions de dollars quelques mois plus tôt.) Comme il était le seul détenteur de la société Thawte, M. Shuttleworth, fils d’un chirurgien et d’une institutrice de jardin d’enfant, s’est retrouvé très riche à 26 ans à peine.

Alors que peut bien faire un millionaire fraîchement éclos ? M. Shuttleworth a regardé vers les étoiles. En versant une somme évaluée à 20 millions de dollars aux autorités russes, il s’est offert un voyage de 10 jours dans l’espace à bord de la station spatiale internationale Soyouz TM-34, en 2002, devenant ainsi le premier « afronaute », comme l’a appelé la presse. « Après la vente de la société, il ne s’agissait pas de se vautrer sur des yachts avec des bimbos » a-t-il dit. « Il était très clair que j’étais dans une situation exceptionnelle qui me permettait de choisir de faire des choses qui auraient été impossibles sans cette fortune. »

Dans les années qui ont suivi, M. Shuttleworth a soutenu des startups et des organisations humanitaires. Grâce à ses investissements aux États-Unis, en Afrique et en Europe, il dit avoir amassé une fortune de plus d’un milliard de dollars. Il passe 90% de son temps, cependant, à travailler pour Canonical, qu’il considère comme un autre projet destiné à reculer les limites du possible.

« Je me suis bien débrouillé dans mes investissements, dit-il, mais cela n’a jamais été pleinement satisfaisant. J’ai peur d’arriver à la fin de ma vie en ayant l’impression de n’avoir rien bâti de sérieux. Et réaliser quelque chose que les gens pensaient impossible est un défi excitant ».

Le modèle choisi par Canonical permet cependant difficilement d’en tirer économiquement profit.

Beaucoup de compagnies Open Source offrent gracieusement une version gratuite de leur logiciel avec quelques limitations, tout en vendant la version intégrale accompagnée des services additionnels qui assurent au produit sa mise à jour. Canonical offre tout, y compris son produit phare, et espère que quelques entreprises vont alors se tourner vers lui pour acheter des services comme la gestion de grands parcs de serveurs et d’ordinateurs, au lieu de gérer ça elles-mêmes avec des experts maison.

Canonical dispose d’une autre source de revenus avec des compagnies comme Dell qui vendent des ordinateurs avec Ubuntu installé, et qui contribuent au logiciel avec des projets technologiques tels que l’implantation de fonctions propres à Linux sur les portables. L’un dans l’autre, le chiffre d’affaires de Canonical doit s’approcher des 30 millions de dollars par an, selon M. Shuttleworth. Un chiffre qui n’a pas de quoi inquiéter Microsoft.

Mais M. Shuttleworth défend l’idée que 30 millions de dollars par an est un revenu qui se suffit à lui-même, juste ce dont il a besoin pour financer les mises à jour régulières d’Ubuntu. Et un système d’exploitation qui s’auto-finance, dit-il, pourrait bien changer la manière dont les gens perçoivent et utilisent le logiciel qu’il ont chaque jour sous les yeux.

« Sommes-nous en train de répandre la paix sur le monde ou de le changer radicalement ? Non », dit-il. « Mais nous pouvons faire évoluer les attentes des gens et le degré d’innovation qu’ils peuvent espérer pour chaque dollar dépensé. »

On estime que Microsoft emploie depuis 5 ans 10000 personnes sur Vista, son nouveau système d’exploitation pour ordinateur de bureau. Le résultat de cet investissement qui se chiffre en milliards de dollars est un produit arrivé trop tard sur le marché, et que les critiques ont descendu en flammes.

Dans le même temps, Canonical publie une nouvelle version d’Ubuntu tous les six mois, en ajoutant des fonctionnalités qui tirent parti des dernières avancées fournies par les développeurs et les fabricants de composants comme Intel. Le modèle de développement de la société c’est avoir une longueur d’avance sur Microsoft, à la fois sur les prix et sur des fonctions qui lui ouvrent de nouveaux marchés.

« Il est pour moi tout à fait clair que la démarche Open Source aboutit à de meilleurs résultats,» dit M. Shuttleworth. De tels propos venant d’un homme désireux de financer un logiciel pour les masses – et par les masses – confortent ceux qui voient dans l’Open Source plus une cause à défendre qu’un modèle économique.

Sur son temps libre, Agostino Russo par exemple, qui travaille à Londres pour un fonds d’investissement chez Moore Europe Capital Management, a conçu une application appelée Wubi qui permet d’installer Ubuntu sur des ordinateurs tournant sous Windows.

« J’ai toujours pensé que l’Open Source était un mouvement socio-économique très important » dit M. Russo.

Mais en fin de compte, plusieurs aspects de l’entreprise de M. Shuttleworth paraissent encore chimériques. Linux demeure mal dégrossi, et le modèle économique de Canonical le rapproche plus d’une organisation humanitaire que d’une entreprise en passe de devenir un poids lourd de l’édition logicielle. Et même si Ubuntu, produit Open Source, s’avère un succès phénoménal, le système d’exploitation sera largement utilisé pour tirer parti de services en ligne propriétaires proposés par Microsoft, Yahoo, Google et les autres.

« Mark est tout à fait sincère et il croit véritablement à l’Open Source » dit Matt Asay, un chroniqueur des technologies Open Source qui dirige la société de logiciels Alfresco. « Mais je pense qu’à un moment donné il va passer par une remise en question de son credo. » M. Asay se demande si Canonical pourra faire vivre durablement sa philosophie du « tout est offert » et « tout est ouvert ».

Canonical ne montre pourtant pas de signe avant-coureur de ralentissement ni d’inflexion de sa trajectoire. « Nous avons déjà une idée claire du terrain sur lequel il nous faut concurrencer Windows », dit M. Shuttleworth. « Maintenant la question est de pouvoir créer un produit élégant et épatant. »

Dans sa vie privée, il continue de tester tout ce qui est possible, demandant par exemple qu’une connexion par fibre optique soit installée chez lui, à la frontière des quartiers chics de Londres que sont Chelsea et Kensington. « Je veux savoir ce que ça fait d’avoir une connexion à un gigaoctet chez soi », dit-il. « Ce n’est pas que j’aie besoin de regarder du porno en haute définition mais parce que je veux voir en quoi ça modifie notre comportement. »

Il affirme que Canonical n’est pas simplement une entreprise de bienfaisance menée par un individu qui a du temps, de l’argent et la volonté de s’attaquer à Microsoft bille en tête. Son idéal est de faire d’Ubuntu le standard pour un ou deux milliards d’êtres humains qui vont bientôt s’acheter un ordinateur personnel.

Notes

[1] Crédit photo : Stopped (Creative Commons By)




Le fabuleux destin de Windows Vista

Johnsu01 - CC by-saLa campagne BadVista de la Free Software Foundation est close. Initiée au même moment que la sortie de Windows Vista, il s’agissait d’informer et de mettre en garde contre les dangers du nouveau système d’exploitation de Microsoft. Les arguments éthiques ont fait mouche mais reconnaissons que les piètres qualités intrinsèques de Vista ont bien aidé (surtout après une si longue attente). Toujours est-il que les objectifs ayant été atteints, félicitons-nous et passons à autre chose, tel est le résumé de cette nouvelle traduction[1].

Il faut dire que l’échec est retentissant surtout si on le mesure à l’aune des moyens marketings sans précédents mis en œuvre à l’échelle mondiale par Microsoft pour le faire adopter par les utilisateurs (avec la complicité des constructeurs qui voyaient là une manière de vendre de nouvelles machines puisque Vista, à performances égales que XP, nécessitait bien plus de puissance). Je n’ai pas de chiffres exacts mais j’ai comme l’impression qu’en deux ans, le Mac et GNU/Linux ont pour ainsi dire doublé leurs parts de marché (à la louche, les uns passant de 5% à 10% et les autres de 0,5% à 1%). Cela aura également mis en avant le caractère nuisible de la venté liée sans lequel Microsoft n’aurait pu éviter le naufrage. Et ne parlons pas du phénomène des netbooks totalement incapables d’accueillir le mammouth Vista et qui aura rallongé d’autant l’existence de XP à la mort maintes fois programmée et maintes fois repoussée. Soit dit en passant, quelle dommage que l’école française ait fait comme si de rien n’était et n’en ait pas profité pour l’étudier de plus près et en tirer quelques salutaires enseignements comme le rapport Becta le suggérait en Angleterre.

Aujourd’hui sortent à la hâte les premières versions bêtas publiques du prochain système d’exploitation de Microsoft, Windows 7, qui donne un peu le coup de grâce à Vista puisque nombreux vont être les utilisateurs restés sous XP à l’attendre sans passer par la case Vista. Nous verrons bien ce que cela donnera mais nul doute que Vista aura grandement contribué à ce que le colosse Microsoft se découvre encore plus vite que prévu des pieds d’argile.

BadVista : Bref mais intense

Badvista: We hardly knew ye

John Sullivan – 9 janvier 2009 – BadVista.org
(Traduction Framalang : Don Rico et Goofy)

Le 15 décembre 2006, la FSF lançait sa campagne BadVista.org pour défendre la liberté des utilisateurs, se dresser contre l’adoption du nouveau système d’exploitation Windows Vista de Microsoft, et promouvoir les alternatives libres. Deux ans plus tard, notre campagne a mobilisé près de 7000 partisans enregistrés, aux yeux du public le nom de Vista est synonyme de fiasco, et aujourd’hui nous déclarons victoire.

À l’instar de Joan Benoit Samuelson, championne olympique de marathon, nous considérons les victoires comme des « jalons le long d’une très longue route ». Nous n’avons pas encore convaincu tous les utilisateurs de Windows, ni même les utilisateurs de Vista, de passer à un système d’exploitation totalement libre tel que gNewSense. Nous avons encore beaucoup de pain sur la planche et de nombreuses bornes à franchir. Néanmoins, la campagne BadVista a été initiée avec des objectifs précis, et tandis que nous y mettons un terme, nous tenons à faire connaître et à célébrer ce que cette campagne et ceux qui l’ont soutenue ont permis d’accomplir.

En premier lieu, nous avons réussi à créer un point d’entrée où les personnes intéressées par Vista pouvaient apprendre l’existence de solutions alternatives libres. Les utilisateurs potentiels de Vista qui tapaient « windows vista » dans un moteur de recherche populaire obtenaient et obtiennent toujours BadVista.org sur la première page de résultats. Par sa tentative de forcer les utilisateurs à abandonner les versions antérieures de Windows pour Vista, Microsoft nous a fourni l’occasion de suggérer aux utilisateurs que s’ils étaient prêts à prendre la peine de changer de système d’exploitation, décision contre laquelle la crainte du changement œuvre souvent, alors ils feraient bien mieux d’opter pour GNU/Linux.

Nous avons ainsi réussi à transformer le pilonnage marketing sans précédent de Microsoft en occasion de faire découvrir le logiciel libre à des milliers de personnes. La preuve en est, sur notre page Free Software Free Society, un appel publié dans le cadre de notre campagne contre Vista qui a été signé par plus de 1600 particuliers, mais aussi par des organisations extérieures au monde du logiciel, tels le Green Party, Friends of the Earth International, People & Planet, New Internationalist et Legambiente.

Nous avons également contribué à dénoncer les restrictions que Vista impose à ses utilisateurs. Dans notre section Vista Watch, nous avons regroupé plus de 250 articles de presse évoquant le nouveau système de Gestion des Restrictions Numériques Digital Restrictions Management de Vista, ses failles de sécurité, ainsi que les multiples problèmes inhérents à son statut de logiciel propriétaire. Outre rassembler ces articles, nous avons joué un rôle de source d’informations aux journalistes qui écrivaient sur Vista, leur fournissant des réponses franches concernant ses restrictions qu’ils n’auraient jamais obtenues de Microsoft.

Les actions menées lors de cette campagne, parmi lesquelles des manifestations dans Times Square à New York et près du Fenway Park à Boston, on contribué a maintenir ces inquiétudes au cœur de l’actualité et à contrer la propagande servie à ceux qui assistaient aux évènements organisés par Microsoft. Grâce aux opérations organisées d’étiquetage que nous avons menées sur Amazon, ceux qui envisageaient d’acquérir une copie de Vista sur ce site ne pouvaient passer à côté des renseignements concernant les restrictions qu’il impose.

Deux ans plus tard, il est évident que Vista a manqué le coche pour bénéficier d’une adoption massive. Particuliers, gouvernements, grandes entreprises, universités et organisations, tous ont massivement fait l’impasse sur Vista, voire carrément abandonné Microsoft. Une étude récente, par exemple, indique un taux d’adoption de 6% seulement par les entreprises. Le fait que Microsoft ait à maintes reprises repoussé la fin de la commercialisation de XP et publie déjà une bêta publique de Windows 7 constitue la preuve irréfutable de l’échec de Vista. Pour les entreprises qui ont adopté Vista, elles l’ont souvent fait contraintes par des contrats de support coercitifs imposés par Microsoft. Il va falloir du temps aux utilisateurs pour se libérer de ces accords, et c’est un aspect de notre mission à long terme que de les y aider.

Merci à tous pour avoir fait de cette campagne un succès. Nous retirons à présent le site du Web et mettons un terme à cette campagne pour consacrer nos efforts et nos ressources à de nouvelles campagnes qui nous permettront d’atteindre les prochains jalons sur la route menant à un monde où tout un chacun pourra choisir sans risque le logiciel libre. Galvanisés par cette réussite, nous aurons besoin que vous continuiez à nous prêter votre énergie et votre créativité afin que nous puissions ensemble empêcher les logiciels propriétaires d’empiéter sur nos libertés. BadVista.org aura non seulement permis de faire avancer cette cause mais également permis de mesurer nos forces pour les actions à venir.

Notes

[1] Crédit photo : Johnsu01 (Creative Commons By-Sa)




De l’évidence du choix Microsoft à l’Éducation Nationale

Outre la question des formats, le problème avec les sites de vidéos en ligne c’est qu’on ne sait jamais trop bien d’où provient la ressource et sous quelle licence est autorisée la diffusion (quand elle est autorisée !). Toujours est-il que je suis tombé sur une vidéo qui s’apparente fort à un reportage de promotion interne de Microsoft dans le secteur éducatif.

La société nous présente là en effet sa solution ENT-E dans le cadre des Espaces numériques de travail (ENT) qui commencent à se déployer un peu partout dans les académies.

Il y a aurait beaucoup à dire sur ces ENT, à commencer par rappeler qu’on en parle depuis plus de cinq ans, mais ce sera l’objet d’un futur billet. En attendait je vous laisse juge de la manière dont Sylvain Geron, Manager Éducation et Recherche chez Microsoft France, nous vend le sien :

Concrètement l’ENT-E c’est un portail web qui permet au chef d’établissement, à l’élève, à ses parents d’échanger entre eux des contenus. Par exemple le professeur peut mettre des contenus relatifs à un TP sur internet, l’élève peut les préparer depuis chez lui, peut poser des questions, le parent peut suivre le travail de l’élève, regarder ses notes… Le chef d’établissement peut faire des statistiques sur les notes ou vérifier les taux de présence des différents élèves dans l’établissement. Finalement l’ENT-E permet à toutes ses catégories de personnes de se retrouver ensemble autour de l’élève sur internet.

Puis une voix off qui tourne brillamment autour du pot du logiciel libre :

Microsoft propose aux collectivités territoriales une solution adaptée à leurs besoins grâce à un code spécifiquement développé pour créer un ENT. La preuve en est la mise à disposition gratuite de ce code spécifique, la possibilité de modification et de distribution dans les académies.

Et Sylvain Geron d’ajouter :

L’ENT-E s’appuie sous le code qui a été développé sur des briques de bases des produits Microsoft, et bien évidemment plus de gens utiliseront l’ENT-E plus les produits Microsoft sous-jacents seront utilisés.

Cela va sans dire mais cette franchise vous honore…

Mais ce qui a provoqué la rédaction de ce billet c’est l’ultime intervention que nous devons à Claudine Colomina, conseillère pour les TIC à l’académie de Montpellier, qui répondait visiblement à la question du choix Microsoft :

Pourquoi Microsoft ? Heu… Le problème ne s’est… on en a souvent discuté… le problème ne s’est absolument pas posé dans l’Académie. Il était évident que l’on voulait travailler sur des outils pérennes, sur du solide, que nous n’avions pas d’équipes de développement qui nous permettaient de travailler sur du libre par exemple, qu’il fallait un suivi dans toutes les activités, dans tout ce que l’on allait construire. Et il n’a jamais été question d’envisager un autre partenariat qu’avec Microsoft pour ce faire.

Et voici enfin la vidéo dont il est question dans tout ce billet :

Si un enseignant initié de Montpellier (ou d’ailleurs) passe par là, nous le remercions par avance des précisions qu’il pourrait apporter, parce que cette histoire « d’équipes de développement permettant ou non de travailler sur du libre » ne me semble pas très claire…

Edit du lundi 12 janvier : « L’initié » est bien intervenu en la personne de Benjamin Clerc qui précise dans les commentaires : « Je suis dans l’académie de Montpellier, chargé de mission à la Matice. Cette vidéo date … Mme Colomina est à la retraite depuis plus d’un an et c’est bien une solution libre qui a été retenue dans l’académie de Montpellier (en relation avec les académies de Bordeaux, Orléans et Lille), basée sur e-sup portal. »




Linux est-il menacé par les anciens de chez Windows ?

Zach Klein - CC byC’est indéniable, le système d’exploitation GNU/Linux est en forte croissance et attire chaque jour de nouveaux utilisateurs. Parmi ces derniers, on compte une large part d’anciens utilisateurs Windows qui pour x raisons, à commencer par « la déception Vista », ne souhaitent plus continuer avec Microsoft.

Nous ne pouvons que nous en réjouir et vive la démocratisation Linux ! Sauf que cette nouvelle vague de migration n’est pas sans poser questions voire problèmes à la communauté Linux existante. En effet elle s’accompagne souvent d’un désir plus ou moins inavoué de voir Linux s’uniformiser et s’approcher le plus possible de Windows[1], quitte à le singer et prendre alors le risque de perdre sa propre identité.

Quand les utilisateurs de Windows veulent changer Linux… Comment réagir ?

How Windows Users are Changing Linux and What We Should Do About It

Linux Canuck’s Weblog – 3 décembre 2008
(Traduction Framalang : Goofy et Olivier)

Pas de doute, de nombreux utilisateurs ont décidé de quitter Windows pour s’en aller vers le Mac mais également vers Linux. Pour une part c’est parce qu’ils ne sont pas satisfaits de Vista. Mais ce n’est pas la raison qui importe ici, c’est ce qui en découle pour la communauté Linux.

Je suis actif sur plusieurs forums d’aide et je vois passer beaucoup de demandes. Un grand nombre d’entre elles viennent d’utilisateurs de Windows complètement perdus. Leur nombre et leur façon d’appréhender Linux ont une certaine influence. Personne n’a de statistiques précises, mais nous savons que la migration vers Linux va s’accroissant. Comme la plupart des nouveaux utilisateurs viennent de l’univers Windows, ils apportent avec eux leurs habitudes et leur expérience de Windows. Le passage n’est pas aussi aisé que la migration d’une version de Windows à l’autre, comme, disons, de passer de XP à Vista. Passer de XP à Linux est un choc pour beaucoup d’entre eux.

Heureusement, la communauté Linux est accueillante et a l’esprit large. Beaucoup d’entre nous étions dans la même situation qu’eux. Pas tous, cependant. Ce qui peut créer quelques problèmes : par exemple quand un gourou d’Unix demande à un débutant venu de Windows d’ouvrir un terminal et d’éditer GConf en ligne de commande avec Nano. Il est certain qu’un échange entre ces deux-là est fort intéressant. Mais pour une raison étrange c’est souvent la frustration qui prédomine pour chacun d’eux au final. Il faut s’attendre à de telles choses quand deux univers différents entrent en collision frontale…

Or nous découvrons que les utilisateurs de Windows ont sur la communauté Linux une influence que nous n’avions par prévue. Les utilisateurs de Windows n’ont pas l’habitude de choisir. À leurs yeux l’éventail des choix proposés sous Linux est déstabilisant.

Parlons d’abord du nombre de distributions. Par quel bout commencer pour faire son choix ? Chacun a son opinion, mais on ne sait pas qui croire. Si bien que les utilisateurs se fient à la réputation et à la popularité. Ils se peut qu’ils choisissent Fedora parce qu’ils savent que c’est un produit de Red Hat et qu’ils ont entendu dire que Red Hat est un poids lourd de Linux (pour les serveurs, mais ils ne font pas la différence). Ils n’ont pas conscience que Fedora n’est pas une distribution pour débutants et aucun argument ne les en fera démordre. Pire encore, ceux qui ont une ancienne version de Red Hat, qui veulent l’utiliser sur un vieil ordinateur de bureau et qui espèrent la voir fonctionner comme on leur a décrit Linux, de façon moderne et ergonomique. Et puis il y a Ubuntu. Ils l’utilisent parce que c’est la distribution que la plupart des gens utilisent. Il n’est donc pas surprenant que nos forums débordent de confusion et souvent même de frustration.

Voici donc où selon moi se trouve le problème. Cette frustration et cette confusion incitent les utilisateurs de Windows à déclarer que Linux devrait ressembler davantage à Windows. Ils veulent supprimer les choix et ils veulent que les choses soient standardisées. Pire encore, un petit nombre d’entre eux veulent changer Linux pour qu’il s’approche le plus possible de Windows. Nous devons donc être prêts à faire face à de telles déclarations et à préserver ce qui fait la spécificité de Linux.

Le problème survient souvent ingénument. Certains vont se trouver devant un problème d’installation de paquetage qui va leur faire dire quelque chose comme « c’est bien plus facile d’installer sous Windows ». Ce n’est pas le cas et nous devons leur expliquer pourquoi c’est faux et ce assez gentiment pour qu’ils ne soient pas rebutés. Ou encore ils peuvent demander quel est le meilleur programme antivirus à installer, ou bien comment défragmenter un disque, des choses classiques dans un environnement Windows mais qui n’ont pas d’équivalent sous Linux.

Vous pouvez entendre proclamer qu’il ne devrait pas y avoir autant de choix. Que ça submerge les débutants et que ce serait mieux s’il n’y avait qu’une seule distribution. J’ai lu hier encore un billet d’humeur à ce sujet. En fait, c’est assez fréquent. Ils disent quelque chose comme ça : « Linux a un problème et, s’il veut réussir, il faut qu’il concurrence Windows, par conséquent, Linux doit changer ». L’auteur de l’article poursuit en disant à quel point Linux ne peut se comparer favorablement avec Windows. La gestion des fichiers de configuration est « chaotique » et le besoin d’une base de registre centralisée se fait sentir. Il existe trop de gestionnaires de paquetages et donc les développeurs commerciaux ne peuvent pas tous les supporter, voilà ce qu’ils disent. Et puis le noyau change tout le temps à cause de sa gestion séparée…

Les critiques viennent de deux groupes, celui des débutants de base et celui des utilisateurs bien informés qui ont des besoins particuliers. Je suis certain que vous avez déjà entendu de telles récriminations, ainsi que l’idée que Linux est trop diversifié pour réussir un jour à s’imposer.

Le problème est que personne n’a jamais franchi le pas qu’ils voudraient voir franchir. Linux n’a nul besoin d’entrer en compétition avec quoi que ce soit. Il suit sa propre voie et se développe avec l’assentiment de tous. Par conséquent les seuls changements qui lui sont nécessaires relèvent de son évolution naturelle.

Linux est déjà un succès. Il n’a pas besoin de devenir ce qu’il n’est pas. Si, comme certains le souhaitent, Linux devait essayer de rivaliser avec Windows, il y perdrait son identité. Il deviendrait le modèle dominant et ne serait plus ce qu’il est, une alternative au modèle dominant.

Alors comment devons-nous répliquer face à de telles réclamations ? D’abord il nous faut être vigilants pour mieux les détecter. Ensuite, nous devons les identifier pour ce qu’elles sont, des tentatives de détournement de Linux. Nous devons tenir bon et être fiers de ce que nous avons, sans rêver à ce que cela pourrait devenir si par hasard nous leur emboitions le pas. Linux est ce qu’il est et Windows est ce qu’il est. Les utilisateurs ont le choix. Un point c’est tout.

D’un point de vue pratique, nous devons répondre de façon circonstanciée. Il faut éduquer les débutants, leur montrer comment se servir de Linux. Ils ont besoin de savoir pourquoi nous faisons les choses à notre manière et il faut leur rappeler que la force de Linux vient de sa diversité.

Ceux contre qui il est plus difficile de rétorquer, ce sont ceux qui publient des commentaires et qui bloguent, ceux qui connaissent Linux et ses particularités. Ils présentent ces dernières comme des erreurs et exposent leurs arguments. Dans ce cas de figure nous devons comprendre et nous former avant de leur répliquer. Nous devons leur exposer des arguments de poids pour expliquer que nous ne pouvons les suivre sur ce terrain. Pour cela nous devons savoir d’où ils viennent, vers quoi ils nous engagent et peut-être même quel est le motif secret qui les anime. Chacun a son petit secret.

Pour espérer défendre les couleurs de notre champion Linux, il nous faut être préparés à rester fermes sur nos positions. Nous devons tout d’abord accepter Linux tel qu’il est. Si nous-mêmes sommes d’accord avec ces détracteurs, nous devons apprendre pourquoi les choses sont ce qu’elles sont. Linux a une histoire. Il existe de bonnes raisons qui ont fait qu’il nous arrive ainsi aujourd’hui.

À chaque fois que les gens essaient de modifier radicalement le cours des choses, c’est un échec. Le changement révolutionnaire déclenche des forces incontrôlables. Au contraire, les évolutions construisent et améliorent les fondements. C’est plus lent mais c’est plus sûr. Linux change, mais change à sa manière. C’est sain et naturel.

Linux est Open Source, donc les gens sont libres d’en faire ce qu’ils veulent. Chacun, Microsoft compris, peut créer sa propre distribution qui fait précisément ce qu’on lui demande. Le problème c’est que cela ne produit pas le résultat escompté. Cela ne fait qu’accroître le nombre de distributions. En fait, c’est une révolution que certains veulent faire. Ils voudraient que Linux cesse d’être ce qu’il est pour que leur vision devienne une réalité. Ils ont besoin que les autres projets s’interrompent tout autant que de faire réussir les leurs. Voilà pourquoi de telles discussions sont intrinsèquement dangereuses, et pourquoi nous devons hausser le ton.

La plupart des utilisateurs de Linux sont bien informés et experts. Beaucoup sont également silencieux. Puisque Linux n’a pas de porte-parole, il ne peut compter que sur nous, ses utilisateurs et développeurs qui partageons la même idée. Nous devons proclamer ce que Linux représente et ne pas rester silencieux lorsqu’il est nécessaire de nous exprimer.

Parfois certains feraient mieux de s’abstenir de répondre. Les commentaires du genre « tu as tort », « tu es un crétin » ne sont pas constructifs. Ils montrent qu’on est passionné, mais pas grand-chose d’autre. Ceux qui émettent des critiques méritent qu’on leur explique pourquoi les choses sont telles qu’elles sont. Nous devons dire pourquoi nous ne partageons pas leur désir de changer ce qui est déjà bon.

Personnellement je me fiche de savoir où en est Microsoft. Je n’utilise pas Windows et ne l’utiliserai pas. Que Microsoft triomphe ou s’effondre n’est pas une question qui m’intéresse. Linux n’a nul besoin que Windows s’effondre pour réussir. Il n’y a pas de compétition dans mon esprit. Dès que les gens commencent à parler comme si elle existait, je me méfie de leurs motivations et de leurs intentions. Les gens qui écrivent que Windows 7 va tuer Linux ne comprennent manifestement ni Linux ni ses utilisateurs.

Nous n’allons pas partir à l’abordage dès que Microsoft lance quelque chose. Nous utilisons Linux parce qu’il correspond à nos besoins et traduit notre désir de liberté, de contrôle et de maitrise de notre ordinateur, ce que Microsoft ne poura jamais offrir. Chez Microsoft comme chez Apple, les objectifs sont diamétralement opposés. Ils conçoivent l’ordinateur comme quelque chose qu’ils devraient contrôler et par extension, ils aimeraient bien vous contrôler vous et vos habitudes. Les gens qui ont ça en tête ne choisissent pas Linux et ne le feront jamais. Voilà précisément le problème selon moi.

Microsoft déteste ce que représente Linux. Cela n’a rien à voir avec les problèmes pratiques tels que les expriment les gens qui veulent changer Linux pour qu’il ressemble à Windows. Cela a tout à voir avec la façon radicalement différente dont nous voyons les choses et le fait que pour la première fois ils entrent en compétition avec une idéologie qu’ils ne peuvent pas acheter comme une entreprise, si bien que leur solution est de changer l’idéologie, en lançant à ses trousses des gens qui soulèvent des problèmes pratiques. Tout cela fait partie d’une campagne d’intox à laquelle il se peut que certains s’activent délibérément, tandis que d’autres en sont les instruments inconscients, depuis longtemps avalés par la Machine.

Au bout du compte, il n’importe guère de savoir s’ils sont délibérément actifs ou passivement impliqués. Le fait est qu’ils sont en campagne. J’ai lu des rapports ces dernières semaines mentionnant que Microsoft offre des portables gratuits à des blogueurs et verse de l’argent à des entreprises pour que tous recommandent Windows. De là à envisager qu’ils paient des personnes et des entreprises de la même façon pour d’autres buts, il n’y a qu’un pas. Non seulement il est nécessaire pour Microsoft de s’attaquer à l’idéologie, mais la firme veut aussi réduire le fossé entre les deux systèmes d’exploitation de telle sorte que peu de choses les différencient. Ils veulent nous affadir pour nous détruire plus facilement.

Nous avons beaucoup à faire pour éviter ce résultat. Nous avons besoin de maintenir Linux sur sa lancée, pour que nous puissions être une alternative. Si nous ne sommes plus une alternative, nous n’avons plus rien à offrir, sinon un prix, et le prix à payer est une chose avec laquelle Microsoft sait très bien s’arranger.

Je conseille de parler haut et fort en faveur de Linux et de promouvoir l’unité de la communauté Linux. C’est normal d’avoir des rivalités amicales entre distributions, mais nous devons être sur nos gardes vis-à-vis d’attaques bien plus insidieuses venant de l’extérieur, et protéger ce que nous avons en commun. Si Linux doit changer, que cela demeure de l’intérieur.

Notes

[1] Crédit Photo : Zach Klein (Creative Commons By)




Au secours, mon livre est sous licence Microsoft !

Gwilmore - CC byDans son livre Rapture for the Geeks: When AI Outsmarts IQ, que l’on pourrait traduire par Au bonheur des geeks : Quand l’IA l’emporte sur le QI, Richard Dooling s’est amusé à imaginer son ouvrage sous un contrat de licence type de logiciels Microsoft en suivant presque mot à mot les termes de son contenu.

Le résultat est à la limite du surréalisme, jusqu’à se demander si ces licences Microsoft ne sont pas intrinsèquement surréalistes, quand bien même uniquement appliquées aux logiciels ! L’occasion du reste pour certains lecteurs[1] de ce blog sous Windows d’enfin lire « le contrat qu’on ne lit jamais » qu’ils ont passé à l’achat avec Microsoft.

Et si le CLUF de Microsoft s’appliquait aux livres

If Microsoft’s EULA Applied To Books

Richard Dooling – 7 octobre 2008
(Traduction Framalang : Don Rico et Yonnel)

RAPTURE FOR THE GEEKS : (VENTE AU DÉTAIL)

CONTRAT DE LICENCE POUR L’UTILISATEUR FINAL (CLUF)

Date de publication : 7 octobre 2008

1. CONCESSION DE LICENCE. Richard Dooling vous concède les droits suivants, sous réserve que vous respectiez les termes du présent CLUF :

2. INSTALLATION ET UTILISATION. Vous êtes autorisé à installer, utiliser, accéder à, afficher ou exécuter UN (1) EXEMPLAIRE DE CE LIVRE sur UNE SEULE PERSONNE, telle qu’un adulte, un homme, une femme, un adolescent ou tout autre être humain. Ce livre NE PEUT être lu par plus d’une personne.

3. ACTIVATION OBLIGATOIRE. Les droits de licence qui vous sont concédés au titre du présent CLUF sont limités aux trente (30) premières minutes à compter de votre installation initiale du LIVRE, à savoir son ouverture, à moins que vous ne fournissiez les informations requises pour activer votre exemplaire sous licence, de la manière décrite dans cette page. Il est possible que vous deviez également réactiver le livre si vous vous modifiez ou changez de personnalité. Par exemple, si vous vieillissez et gagnez en maturité, développez une maladie mentale, changez de régime alimentaire, ou recevez des membres ou des articulations artificiels, un pacemaker, des implants, ou bénéficiez d’une greffe d’organe, vous devrez alors réactiver votre licence avant d’être autorisé à pouvoir de nouveau consulter le livre.

4. UTILISATION FRAUDULEUSE. Ce livre contient des technologies conçues pour empêcher toute utilisation frauduleuse ou illégale du livre. Un puce intégrée permet à l’éditeur de scanner vos rétines de temps à autre afin de s’assurer que c’est bien VOUS et VOUS SEULEMENT qui lisez ce livre, et non quelque pirate voleur de livres. Au cours de ce processus, Richard Dooling ne collectera sur vous aucune information permettant de vous identifier personnellement, mais seulement des échantillons de sang, de tissus organiques et de moelle épinière (de force si nécessaire) afin de déterminer votre séquence d’ADN. Si vous ne disposez pas d’un exemplaire sous licence valable du livre, vous n’êtes pas autorisé à lire le livre ni ses mises à jour ultérieures.

5. TRANSFERT DU LIVRE. Vous êtes autorisé à effectuer un transfert permanent du livre à un autre utilisateur final, mais après ledit transfert vous devrez procéder à la suppression de tout souvenir du livre présent dans le cerveau du lecteur précédent. Si le livre était mémorable au point que les souvenirs ne peuvent être totalement retirés du lecteur précédent, exécutez ce dernier avec le moins de cruauté possible (liste des méthodes à employer fournie en Appendice A) et adressez sous pli la preuve de l’exécution et l’acte de décès (avec cachet du notaire) à Richard Dooling, à l’adresse indiquée ci-dessous.

6. RÉSILIATION. Sans préjudice de tous autres droits, Richard Dooling pourra résilier le présent CLUF si vous n’en respectez pas les termes. Dans ce cas, vous devrez détruire tous les exemplaires de ce livre et tous ses composants, détruire toute note que vous auriez prise concernant ce livre, et oublier tout passage du livre que vous seriez tenté de vous remémorer. Si vous trouvez ce livre absolument inoubliable, décapitez-vous et envoyez votre tête par colis postal à Richard Dooling, afin d’obtenir un remboursement de 50$. Veillez bien à joindre l’original de votre facture (pas de photocopie !), le code-barre préalablement découpé sur la couverture du livre, et le formulaire de remboursement fourni dans votre exemplaire, que vous prendrez soin de remplir avant de détacher et poster votre tête.

7. PROTÉGEZ-VOUS ! Ne lisez que des livres authentiques achetés chez un revendeur autorisé. Ne téléchargez pas de livres piratés ! Chaque fois que vous lisez un livre contrefait, vous encourez de graves dangers. Dans une enquête récente, un institut mandaté par Richard Dooling a montré que 25% des sites Web proposant des exemplaires piratés de livres tentaient également d’installer des espiogiciels et des troyens susceptibles d’endommager votre système d’exploitation et de vous empêcher de consulter des sites porno sur votre ordinateur dans de bonnes conditions.

Assurez-vous que votre exemplaire de Rapture for the Geeks est AUTHENTIQUE ! Vous bénéficierez alors d’un accès facile aux mises à jour, suites, deuxième et troisième éditions du livre, téléchargements, support technique et offres spéciales. Validez SANS TARDER votre exemplaire de Rapture for the Geeks grâce au Richard Dooling’s Genuine Advantage !

À présent, si vous êtes sûr d’être en possession d’un exemplaire AUTHENTIQUE de Rapture for the Geeks, il est sans doute sans danger de poursuivre.

Extrait de Rapture for the Geeks: When AI Outsmarts IQ, par Richard Dooling.

Notes

[1] Crédit photo : Gwilmore (Creative Commons By)




Quand Bill Gates testait les qualités de Windows

Maveric2003 - CC byBill Gates n’est plus aujourd’hui à la tête de Microsoft, préférant consacrer plus de temps à sa Fondation. Il avait peut-être beaucoup de défauts mais certainement pas celui de s’être enfermé dans sa tour d’ivoire à compter ses milliards.

Ainsi il pouvait lui arriver de faire lui-même « l’expérience utilisateur » de Windows comme aurait pu le faire n’importe quel employé de sa société[1]. Quitte à connaître par là-même parfois quelques épiques mésaventures…

Attention, nous sommes ici en 2003. Rien ne dit que la situation ne se soit pas améliorée depuis 😉

Quand Bill Gates vide son sac… un courriel épique !

Full text: An epic Bill Gates e-mail rant

Todd Bishop – 24 juin 2008 – Seattlepi.com
(Traduction Framalang : Olivier, Penguin et Don Rico)

Il arrive que les logiciels ne soient pas si magiques. Même pour Bill Gates.

En guise d’introduction à notre série d’articles sur la fin de l’ère Gates chez Microsoft, nous voulions décrire avec précision le rôle de son co-fondateur, de manière à jauger l’impact qu’aura son départ. Mon investigation m’a donc amené à relire les mails internes présentés par l’accusation lors du procès antitrust visant l’entreprise, à la recherche de nouveaux indices sur sa personnalité.

Voici l’un des joyaux qui a été révélé : on y découvre Gates dans le rôle d’agitateur en chef (Document original : PDF, 5 pages). On y découvre que même le co-fondateur de Microsoft, qui prêche la « magie du logiciel », n’est pas immunisé contre les frustrations que rencontrent chaque jour les utilisateurs de PC. N’oubliez pas que cela remonte à cinq ans, cela ne reflète pas nécessairement les choses telles qu’elles le sont aujourd’hui. En fin d’article, vous pourrez lire ce que Gates m’a répondu quand je l’ai interrogé sur ce message, la semaine dernière.

Voici le courrier d’origine :

De : Bill Gates Envoyé : Mercredi, 15 Janvier 2003, 10:05
À : Jim Allchin
Cc : Chris Jones (WINDOWS); Bharat Shah (NT); Joe Peterson; Will Poole; Brian Valentine; Anoop Gupta (RESEARCH)
Objet : La dégradation systématique de l’ergonomie de Windows

Je suis très déçu par l’évolution négative de l’ergonomie de Windows et par le fait que les groupes de gestion des programmes ne règlent pas ces problèmes d’ergonomie.

Laissez-moi vous conter ma petite expérience d’hier.

J’ai décidé de télécharger MovieMaker et d’acheter le service Digital Plus… je me suis donc connecté à Microsoft.com. On y trouve une page de téléchargement, je m’y suis donc rendu.

Mes 5 premières tentatives pour me rendre sur la page de téléchargement se sont soldées par des échecs à cause de temps d’attente trop long. Enfin, après un délai de 8 secondes, elle s’est affichée.

Le site est tellement lent qu’il en devient inutilisable.

Le programme ne se trouvait pas dans le top 5 et j’ai donc déroulé la liste des 45 autres.

Ces 45 noms n’ont aucun sens. En comparaison, des trucs comme ce qui suit semblent limpides :
C:\Documents and Settings\billg\My Documents\My Pictures

Ils ne sont pas filtrés par le système… et beaucoup de ces noms sont étranges.

Je me suis limité à la partie Multimédia. Toujours pas de Moviemaker. J’ai cherché dans Film. Rien. J’ai cherché moviemaker. Rien.

J’ai alors abandonné et j’ai envoyé un e-mail à Amir pour lui demander où se trouve le lien pour Moviemaker… s’il existe.

On m’a alors répondu qu’ils ne s’attendaient pas à ce qu’on utilise la page de téléchargements pour télécharger quelque chose.

On m’a recommandé de me rendre sur la page principale et d’utiliser la fonction de recherche avec movie maker (et pas moviemaker !).

J’ai donc essayé ça. Le site était d’une lenteur pathétique mais après 6 secondes d’attente, la page est apparue.

J’étais alors persuadé qu’il ne me resterait plus qu’à cliquer sur un lien pour lancer le téléchargement.

En fait, ça tient plus de la résolution d’un puzzle. Il m’a redirigé vers Windows Update pour y faire un tas d’incantations.

J’ai trouvé ça carrément bizarre. Pour quelle raison dois-je me rendre ailleurs et faire un scan pour télécharger Moviemaker ?

J’ai donc ouvert Windows Update. Windows Update décide alors qu’il faut que je télécharge un tas de contrôles et je me retrouve face à des boîtes de dialogues ésotériques, pas seulement une fois mais plusieurs fois.

Est-ce que Windows Update ne sait pas communiquer avec Windows ?

Ensuite, j’ai procédé à la recherche de mises à jour. Cela a pris un certain temps, et on m’a alors annoncé que je devais télécharger de toute urgence 17 Mo de fichiers divers et variés.

Ça, c’était après qu’on m’ait dit que l’on fournissait des correctifs incrémentaux, mais plutôt que de pouvoir ne télécharger que les 6 trucs qui sont signalés de la manière la plus effrayante qui soit, j’ai dû télécharger les 17 Mo.

Alors j’ai procédé au téléchargement. Là, ç’a été rapide. Ensuite, j’ai voulu passer à l’installation. Ça a pris 6 minutes, et la machine est devenue si lente que je n’ai rien pu faire d’autre pendant ce temps.

Mais qu’est-ce qui se passe, durant ces 6 minutes ? C’est fou. C’était après que le téléchargement soit terminé.

Ensuite j’ai dû redémarrer ma machine. Pourquoi ? Je redémarre toutes les nuits, pourquoi redémarrer à ce moment précis ?

Alors j’ai redémarré parce que le programme a INSISTÉ. Évidemment, ça signifiait aussi que j’allais perdre ma session Outlook en cours.

Une fois la machine redémarrée, je suis retourné sous Windows Update. Mais j’avais déjà oublié ce que j’y faisais, puisque tout ce que je voulais, c’était installer Moviemaker.

Je suis retourné sur Microsoft.com pour y suivre les instructions. J’ai alors dû cliquer sur un dossier nommé WindowsXP. Pourquoi est-ce que je devrais faire ça ? Windows Update sait que je suis sur Windows XP.

Et ça m’avance à quoi de cliquer sur ce dossier ? Apparaît alors tout un tas de trucs déstabilisants, mais cette fois c’est bon, Moviemaker en fait partie.

Je commence alors le téléchargement. Le téléchargement en lui-même est rapide mais l’installation prend quelques minutes. C’est dingue comme c’est lent. À un moment, on m’annonce que je dois télécharger Windows Media Series 9.

Je décide donc de gentiment suivre les instructions. Là, une boîte de dialogue disant Ouvrir ou Sauvegarder apparaît, sans indication de ce que je dois faire. Je n’ai aucune idée de ce sur quoi je dois cliquer.

Le téléchargement est rapide et l’installation prend 7 minutes.

À ce moment-là je pense être en possession de Moviemaker. Je vais dans Ajouter/Supprimer programmes pour m’assurer qu’il s’y trouve bien.

Il n’y est pas.

Qu’est-ce qu’il y a à la place ? On y trouve le bordel suivant. Microsoft Autoupdate Exclusive test package, Microsoft Autoupdate Reboot test package, Microsoft Autoupdate testpackage1. Microsoft Autoupdate testpackage2, Microsoft Autoupdate Test package3.

Quelqu’un a donc décidé de foutre en l’air la seule partie de Windows qui fonctionnait bien ? Le système de fichier n’est plus utilisable. La base de registre n’est pas utilisable. La liste des programmes était encore jusque-là un endroit sensé, mais désormais c’est un grand foutoir.

Et encore, ce n’est que le début des emmerdes. Par la suite j’ai trouvé des trucs comme Windows XP Hotfix voir Q329048 pour plus d’informations. C’est quoi Q329048 ? Pourquoi ces correctifs figurent-ils ici ? Certains étaient même simplement notés Q810655 sans le voir 329048 pour plus d’informations.

Quel bordel !

Et Moviemaker est toujours aux abonnés absents.

J’ai donc abandonné mon idée d’installer Moviemaker et j’ai décidé de télécharger le Digital Plus Package.

On me dit que je dois entrer quelques informations personnelles.

Je remplis tous les champs et, parce qu’il a décidé que j’ai mal tapé quelque chose, je dois recommencer. Et évidemment, il a effacé presque tout ce que j’avais déjà tapé.

Je m’y reprends à 5 fois et il continue à tout effacer pour que je recommence.

Donc après plus d’une heure de péripéties douteuses, après avoir rendu ma liste de programmes inutilisable, après m’être fait quelques frayeurs et m’être rendu compte que Microsoft.com est un site horrible, je n’ai pas pu lancer Moviemaker,et je n’ai pas le Digital Plus Package.

Le manque d’attention portée à l’ergonomie, que ces péripéties ont démontré, me dépasse. Je pensais qu’on avait touché le fond avec Windows Network ou avec les messages que je reçois quand je tente d’utiliser le Wi-Fi (vous aussi vous adorez ce message avec le certificat administrateur, non ?).

Quand j’aurai réussi à utiliser tout ça pour de bon, je suis sûr que j’aurai encore d’autres commentaires à vous soumettre.

Alors que notre interview de la semaine passée touchait à sa fin, j’ai montré à Gates une copie de ce mail et lui ai demandé s’il avait finalement réussi à faire fonctionner MovieMaker. Il m’a répondu que Microsoft envisageait d’inclure Moviemaker dans Windows Live, afin que l’on dispose du programme lorsqu’on téléchargera ce paquet. Il n’y a pour le moment rien d’officiel de la part de Microsoft, mais ce n’est pas vraiment une surprise.

Quant au courrier en lui-même, Gates a souri et a dit : « Il n’y pas un seul jour où je n’envoies pas de mails… comme cet email. C’est mon boulot. »

Notes

[1] Crédit photo : Maveric2003 (Creative Commons By)




Putain de saloperie de Windows Vista de merde !

Stephmcg - CC byC’est un titre qui claque ça non ? (et qui se dégage facilement du flot des flux RSS) Il est spécialement dédié à celui qui aura entré texto cette expression dans un moteur de recherche et qui sera arrivé jusqu’ici. Courage, vous avez toute ma compassion.

Bon, il faut quand même que je vous dise lâchement, avant que Thierry de Vulpillières de Microsoft France ne me poursuive en diffamation, que ce morceau de prose flamboyante n’est pas de moi. Mais cela reste dans la maison car cela provient d’un autre prof, Jérôme (une vraie poucave le aKa), et devant les élèves qui plus est, et même que c’est sur le site de Libération !

Son petit témoignage « j’vide mon sac car ça fait du bien » sur l’arrivée d’un tout nouveau tableau numérique interactif (TNI) dans la classe serait savoureux si l’expérience n’avait pas viré au cauchemar[1] pour son auteur !

Eh oui, ça marche sous XP mais ça marche plus sous Vista. Encore un bahut qui n’a pas pris la peine de lire le rapport Becta dont voici un petit extrait pour rappel : « Les machines sous Vista pourraient ne fonctionner qu’avec une autre version d’une application voir même seulement avec des produits différents. Cela peut être source de confusion si le personnel ou les élèves doivent travailler avec les deux systèmes d’exploitation. Il pourrait aussi être nécessaire de dupliquer le travail pour certaines leçons ou pour certains projets pour les adapter à Windows Vista et Windows XP. » (p.19 – § 4.31)

Ou encore : « Le mélange des systèmes d’exploitation peut très bien se faire dans les écoles ou le réseau informatique fonctionne déjà avec plusieurs systèmes d’exploitation comme Windows, Mac et Linux quand cette mixité est adaptée. Nous recommandons cependant que les écoles et universités ayant un parc informatique cohérent sous Windows XP faisant l’acquisition de systèmes avec Vista préinstallé exercent, lorsque c’est possible, leur droit du choix du système d’exploitation et maintiennent la cohésion de leur installation avec Windows XP. » (p.19 – § 4.31)

Et je ne vous parle même pas de logiciels libre pour une fois. Non, juste du fait que strictement personne en haut lieu n’a cru bon de mettre en garde les établissements scolaires comme l’a fait le Becta en Angleterre. Du coup les collectivités territoriales arrosent aujourd’hui les lycées avec Vista pour justement aboutir à des magnifiques parcs informatiques hétérogènes, avec tous les problèmes qui vont avec (dont cette magnifique illustration n’est certainement pas un cas isolé).

Comme quoi ça sert le lobbying !

Quand le prof devient grossier…
19 décembre 2008 – Blog de Libération

Notes

[1] Crédit photo : Stephmcg (Creative Commons By)




L’influence de Microsoft à l’école n’est-elle pas disproportionnée ?

Lettre aux enseignants - Offre Microsoft Office 2007Les enseignants doivent se sentir flattés d’un tel intérêt. En effet, en moins de six mois voici la troisième lettre qui leur est adressée par la société américaine Microsoft, et comme les précédentes missives nominativement dans leurs casiers de la salle des professeurs (vous en trouverez une image scannée en fin d’article).

Quel que soit son enrobage pédagogique cautionné par des associations d’enseignants complices de la manœuvre, le fond du sujet est toujours le même : la suite bureautique Microsoft Office 2007. On ne s’en cache pas du reste puisque l’objet de la lettre est texto : « Téléchargez Office 2007 chez vous sans frais ! ».

À croire que malgré la véritable machine de guerre déployée elle peine à être adoptée. Il faut dire qu’il n’y a pas que cette suite en jeu. Tapis derrière elle, c’est le nouveau système d’exploitation Windows Vista que Microsoft voudrait voir massivement installé dans les établissements scolaires (jackpot financier à la clé), alors que, répétons-le, absolument rien ne le justifie. Et encore plus loin c’est d’un véritable choix « culturel » qu’il s’agit. Souhaitez-vous que vos logiciels, formats, ressources, pratiques, échanges… soient majoritairement libres ou propriétaires ?

Vous connaissez notre réponse. Voici celle de Microsoft et ses acolytes avec cette nouvelle lettre aux enseignants qui a le mérite de synthétiser et d’exposer au grand jour toute la stratégie Microsoft en la matière. Nous vous proposons ci-dessous une petite lecture décryptée commentée. Pour finir pour nous demander en guise de conclusion si nous devons ou pouvons y faire quelque chose.

En route vers le B2i !

Dans la famille « Microsoft à l’Éducation Nationale », j’ai nommé la justification pédagogique…

C’est par ce slogan lancé par une charmante jeune femme que s’ouvre la lettre. Il est à noter que le Brevet Informatique et Internet (B2i) existe depuis plus de sept ans déjà mais qu’à cela ne tienne, allons vers… et allons-y gaiement et en confiance puisque Microsoft est justement là pour nous accompagner et nous faciliter la vie numérique.

Il y aurait beaucoup à dire d’ailleurs sur ce B2i, véritable fausse bonne idée de l’Éducation Nationale. Moins on a d’élèves et plus il est vanté, jusqu’à se montrer dithyrambique lorsque l’on a n’a plus d’élèves du tout ! Quitte au passage à donner mauvaise conscience aux collègues qui se permettraient de montrer quelques signes de perplexité quant à sa mise en application effective, accusés alors un peu vite de faire de la « résistance au changement ».

Il n’empêche que le B2i est là, qu’il y a désormais obligation de le valider, par exemple pour obtenir son Brevet en fin de collège, et qu’on doit donc faire avec et en l’état pour le moment. Et c’est plutôt bien vu de la part de Microsoft que de choisir cet angle d’attaque.

Depuis le mois de juin, vous avez le droit de télécharger sans frais Microsoft Office 2007 sur www.officepourlesenseignants.fr, comme tous les membres du corps enseignant des écoles, des collèges et des lycées, conformément à l’Accord cadre signé entre Microsoft et le Ministère de l’Éducation Nationale.

Dans la famille « Microsoft à l’Éducation Nationale », j’ai nommé la justification contractuelle…

Tout ce passage est rédigé en gros et gras. On notera qu’on prend bien soin de ne pas prononcer le mot gratuit, le droit conféré est un « droit pour une installation sur votre PC à domicile pour votre usage professionnel ». Drôle de licence que voilà, quid d’un ordinateur portable qui sortirait du domicile et quid d’un enseignant qui souhaiterait ponctuellement en faire un usage non professionnel ?

En tout cas après le B2i, et c’est toujours aussi bien vu de la part de Microsoft, on va s’appuyer sur ce fameux Accord cadre contracté en décembre 2003 et reconduit depuis. Je vous invite à le parcourir dans son ensemble mais si l’on devait n’en retenir qu’une phrase ce pourrait être la suivante, qui apparait à même le très officiel site Educnet : « L’Accord cadre a pour objectif de rendre plus homogènes et d’actualiser les systèmes d’exploitation du parc de PC des écoles, collèges et lycées, en favorisant l’accès à la dernière version de la suite bureautique Microsoft Office. » On ne peut être plus clair, la mise à jour vers Vista trouvant ici un magnifique alibi. Et tant pis pour le logiciel libre.

Rapport Becta en main, il pourrait être facile de critiquer cette prise de position discutable et arbitraire du Ministère de l’Éducation Nationale. Sauf qu’on ne peut l’accuser frontalement de favoritisme puisqu’il existe d’autres Accord cadres (Apple, IBM, Intel, Sun…) dont un très particulier que l’AFUL présentait ainsi dans un récent communiqué : « Le 28 octobre 1998, le Ministère de l’Éducation nationale signait un accord avec l’Association Francophone des Utilisateurs de Linux et des Logiciels Libres (AFUL), accord cadre permettant le développement de l’usage des technologies de l’information et de la communication auprès de l’ensemble des établissements d’enseignement français et des enseignants en ce qui concerne l’emploi des ressources informatiques libres et la disponibilité de ressources commerciales liées à l’informatique libre. Depuis dix ans, conséquences directes de l’accord cadre ou souvent simplement facilitées par son existence, de très nombreuses réalisations ont vu le jour dans ce secteur capital qu’est l’éducation, et les logiciels et les ressources libres y sont désormais bien présents, à tous les niveaux. »

Soit. L’AFUL met en valeur et c’est bien normal ce qui à l’époque constituait symboliquement une magnifique reconnaissance pour le logiciel libre à l’école. Il n’empêche qu’on se retrouve selon moi dix ans plus tard quelque peu piégé par la co-présence de ces deux Accord cadres que Microsoft fait bien plus fructifier que l’AFUL. Si ce constat est partagé, il conviendrait de voir ce que l’on peut faire ensemble pour remédier à cela.

Mais poursuivons la lecture de la lettre…

L’association d’enseignants Projetice vous propose plus de 120 formations réparties dans les Académies pour échanger et prendre en main des applications pratiques d’usages pédagogiques des TICE autour notamment des nouvelles fonctionnalités offertes par Microsoft Office 2007.
http://www.projetice.fr/formations/formations_office.aspx

Dans la famille « Microsoft à l’Éducation Nationale », j’ai nommé l’association d’enseignants qui prêchent la bonne parole sur le terrain…

Et revoici l’association d’enseignants Projetice. J’en avais parlé l’année dernière sans que personne ne vienne m’apporter la contradiction sauf… Thierry de Vulpillières, directeur des partenariats éducation chez Microsoft France ! Mes hypothèses non encore infirmées étaient les suivantes : Projetice a été créée sous l’impulsion de Microsoft, Projetice est quasi exclusivement financée par Microsoft, et les prestations de ses membres ne sont pas bénévoles et donnent lieu à rémunération et couvertures de frais par l’association et donc indirectement par Microsoft.

Et parmi les prestations il y a donc désormais ces « plus de 120 formations ». Quelle force de frappe ! Un véritable réseau parallèle au très officielle plan de formation continue de l’Education Nationale. Une aubaine pour le Ministère qui cherche à faire des économies à tous les étages (dont celui de la formation continue justement). Et comme ce n’est pas Microsoft qui entre dans les établissements scolaires mais de vrais collègues, les portes se trouvent être bien entendu grandes ouvertes.

J’aimerais beaucoup recueillir ici-même quelques témoignages d’enseignants qui ont eu l’honneur d’assister à l’une des ces formations. Parce que là encore on mélange allègrement dans le libellé les « pratiques d’usages pédagogiques des TICE » avec les « nouvelles fonctionnalités offertes par Microsoft Office 2007 ». On va finir par croire que l’un ne va pas sans l’autre ! La confusion venant de fait que les formateurs endossent simultanément leurs habits d’enseignants et de « VRP Microsoft ». Alors réelle formation pédagogique ou « publi-information » qui ne veut pas dire son nom ?

Les éditions Nathan vous propose l’ouvrage « Maîtriser les fonctions indispensables d’Office 2007 » qui permet une prise en main rapide et simplifiée de la nouvelle suite bureautique Office 2007. Nathan s’associe également à une offre très attractive d’équipement des établissements disponible sur le site www.nathan.fr/Office2007

Dans la famille « Microsoft à l’Éducation Nationale », j’ai nommé le partenaire éditeur scolaire…

Il fallait bien aussi un grand éditeur. Je note au passage qu’avec le titre proposé, « Maîtriser les fonctions indispensables d’Office 2007 », le rôle de Nathan ici est bien moins celui d’un éditeur scolaire que celui d’un éditeur informatique. Sachant que pour l’un comme pour l’autre, nous avons d’autres modèles à proposer comme par exemple Génération 5 pour le scolaire et… Framabook pour l’informatique 😉

Nathan nous offre lui aussi son petit service autour du B2i. Pas très conforme à son esprit du reste puisqu’il nous est proposé en ligne « d’évaluer et valider les connaissances de vos élèves » pour au final « délivrer l’attestation de réussite à chaque élève ». On se retrouve en fait avec une sorte de QCM que le Café Pédagogique devrait tout particulièrement apprécier. On remarquera par ailleurs que le site n’est pas non plus très conforme avec les standards du Web puisque « Attention, le site B2i est consultable uniquement sur PC et utlisant le navigateur Explorer ».

Curiosphere.tv (la web educative de France 5) vous propose désormais plus d’une centaine de vidéos à usage pédagogique et notamment à travers le site thématique consacré au B2i « tutoriels vidéos, se former au B2i »
http://www.curiosphere.tv/ressource/19636-tutoriels-video-se-former-au-b2i

Dans la famille « Microsoft à l’Éducation Nationale », j’ai nommé le partenaire institutionnel…

J’ai eu également déjà l’occasion de consacrer un billet (puis un deuxième) à Curiosphere.tv. La principale critique venant du fait qu’à parcourir les vidéos proposées, on hésitait entre formation B2i et formation aux logiciels Microsoft, l’un servant un peu de couverture à l’autre.

Comprenez-vous pourquoi par exemple la vidéo titrée « Tutoriel Word : modifier un schéma » se trouve être placée dans la catégorie « B2i > Adopter une attitude responsable » ? Et tout est à l’avenant. On participe à la réalisation de vidéos de promotion des produits Microsoft et après on les place aux forceps, un peu n’importe comment, dans les « cases B2i ». À trop vouloir tirer sur la corde de la justification pédagogique, elle finit par casser…

Mais arrêtons-nous quelques instants plus en détail sur ces vidéos. Si vous avez huit minutes, prenez le temps de regarder « Tutoriel Word : créer une frise chronologique » où un virtuose de Word vient nous montrer effectivement comment réaliser de but en blanc un tel objet. C’est franchement spectaculaire (et je ne crois pas qu’OpenOffice.org 3.0 dispose d’une telle fonctionnalité).

Le problème est double. D’abord on peut légitimement se demander si le jeu en vaut la chandelle pour un enseignant qui, si il se met à la tâche, passera certainement plus de temps que notre virtuose. Sans oublier que peut-être, après tout, notre enseignant était satisfait des frises qu’il proposait à ses élèves « du temps d’avant Microsoft Office 2007 ». Il s’agit donc déjà de faire la part des choses entre le gadget aussi clinquant soit-il et ses réels besoins.

Mais admettons qu’il estime que cette « frise qui fait jolie » mérite d’être insérée dans ses cours. On se retrouve alors face à un nouveau problème et non des moindres. En effet, il n’a pas, me semble-t-il, été prévu de mutualiser, échanger, éditer, modifier… collaborativement les ressources « pédagogiques » ainsi produites. Et ce n’est malheureusement guère étonnant car Microsoft n’a ni expérience ni culture en la matière. Ses formats de fichiers sont fermés et non interopérables, ses produits et ses ressources ne sont pas sous licences libres, et surtout la société ne s’est jamais appuyée sur des communautés d’utilisateurs pour « créer ensemble ». Elle n’a que des clients, et c’est aussi pour cela qu’elle se trouve parfois mal à l’aise voire parfois carrément en porte-à-faux lorsqu’elle aborde les rives du secteur éducatif.

Il n’y qu’à visiter les sites de Projetice et du Café Pédagogique, tous deux réalisés avec le concours de Microsoft, pour s’en convaincre. Les possibilités d’interactions avec le visiteur y sont minimales. Le plus emblématique étant le site du fameux Forum des enseignants innovants de Rennes qui « visait à faire connaître et à valoriser les nombreux projets pédagogiques innovants ». Que reste-t-il aujourd’hui sur le site de la centaine de projets sélectionnés ? Rien. Personne n’a pensé qu’il pouvait être a posteriori opportun de les mettre à disposition des collègues internautes qui n’ont pu se rendre à la manifestation.

Parce que c’est bien gentil mais pourquoi devrais-je réinventer la roue et créer de A à Z ma propre « frise qui fait jolie » ? Pourquoi ne me propose-t-on pas le document qui a permis de réaliser cette frise ? Cela me permettrait de ne pas démarrer à vide, de mieux comprendre comment le virtuose s’y est pris et surtout de pouvoir la modifier pour l’adapter à mes besoins. En lien et place on trouve sous la vidéo le texte suivant : « Extrait de : Office pour les enseignants – Word 2007 © 2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés. » qui n’invite pas forcément à la collaboration.

On remarquera que le site de Microsoft dédiée à l’opération propose lui aussi la même vidéo. La seule différence c’est la possibilité de télécharger la vidéo (au format fermé .wmv) mais aussi de… « l’envoyer à un ami » ! Que la dimension collective se résume à prévenir un ami en dit long sur l’état d’esprit du projet.

J’ajoute que la mise à disposition du document source ayant permis de créer la « frise qui fait jolie » est une condition nécessaire mais non suffisante à une collaboration optimale. Il conviendrait en effet d’en proposer un format ouvert et pérenne (ce qui n’est malheureusement pas encore le cas du .docx) et de placer le tout sous une licence qui favorise le partage. Et puis, si l’on veut vraiment bien faire les choses, pourquoi ne pas regrouper toutes ces ressources sur un site dédié permettant aux enseignants de réellement communiquer avec leurs pairs ? Vous verrez qu’alors des synergies apparaîtront spontanément entre les collègues et des projets insoupçonnés se mettront en place.

C’est toute la différence entre la culture du logiciel libre et celle du logiciel propriétaire. Et c’est ici je crois que le logiciel libre a beaucoup à apporter à l’école. Ce que la société Microsoft, malgré sa pléthore de moyens et ses alliés de circonstance, est bien incapable d’imaginer, enfermée qu’elle est par son modèle économique traditionnel. Aujourd’hui, en l’absence de toutes ces considérations, la « frise qui fait jolie » demeure au niveau de la pure poudre aux yeux. Ce n’est plus de la pédagogie, c’est du simple marketing.

Réalisé par un collectif d’enseignants, le Café Pédagogique publie chaque jour « l’Expresso », un flash d’information sur l’éducation. Le « Café Mensuel » partage entre profs les « bonnes pratiques » et les ressources pédagogiques nouvelles dans votre discipline. Vous êtes déjà plus de 180.000 abonnés à ces éditions. Le « Guide de Web pédagogique » vous donne les clés pour faire entrer les TICE dans la classe. Le « Guide du BAC et du Brevet » aidera vos élèves dans leurs révisions.
http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/Entrezlestice.aspx

Dans la famille « Microsoft à l’Éducation Nationale », j’ai nommé l’association d’enseignants qui prêchent massivement la bonne parole sur internet…

Je me demande si parmi « les clés pour faire entre les TICE dans la classe », on ne trouve pas aussi celles de Microsoft.

Toujours est-il que le Café Pédagogique a lui aussi fait l’objet d’un billet dédié tout récemment. Je n’y reviens pas si ce n’est pour dire que la seule réponse obtenue fut un mail privé. La porte est fermée, le débat public refusé et je le regrette.

En vous souhaitant une bonne prise en main de ces offres, nous vous prions d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de nos respectueuses salutations. Eric le Marois, Directeur Éducation et Recherche, Microsoft France.

Avec en bas de page, les logos de tous les partenaires (dont celui de Microsoft qui joue ici les modestes en se fondant avec les autres).

Voilà. Qu’ai-je voulu dire ici quitte à radoter pour la énième fois et irriter le lecteur avec mes idées fixes ?

Tout d’abord montrer la solidité et l’intelligence de la toile tissée par Microsoft au sein de l’Éducation Nationale. Je félicite sincèrement Thierry de Vulpillières pour cette politique d’entrisme menée de main de maître en fort peu de temps. L’école ayant de nombreux chats à fouetter, des difficultés budgétaires et peu d’expérience en matière « d’intelligence économique », elle ne pouvait clairement et momentanément pas lutter, surtout si l’on se permet de montrer patte blanche via un réseau de partenaires et d’associations d’enseignants financièrement dépendants du bailleur de fonds. Franchement, et n’en déplaisent à mes détracteurs, il est difficile, quand on regarde l’envergure et l’ambition de l’opération, de considérer Microsoft comme une société commerciale comme les autres. Et puis d’abord quelle est sa réelle légitimité pour venir nous parler de pédagogie ?

Mais je tenais également à témoigner, et ceci n’engage que moi, de la faiblesse actuelle de ceux qui souhaitent faire une plus juste place aux logiciels libres à l’école (« culture du libre » incluse !). Oui, comme le dit l’AFUL, et ce n’est pas le réseau Framasoft qui va la contredire, « de très nombreuses réalisations ont vu le jour dans ce secteur capital qu’est l’éducation, et les logiciels et les ressources libres y sont désormais bien présents, à tous les niveaux ». Mais oui aussi ces réalisations, aussi nombreuses soient-elles, sont éparses, pas encore assez structurées et organisées, et faiblement soutenues par l’Institution. Oui encore cette trop forte présence et prégnance de Microsoft à l’école freine non seulement le logiciel libre mais une certaine idée que l’on se fait des TICE. Et oui surtout nous ne sommes pas capable aujourd’hui de proposer des actions similaires d’une telle cohérence et d’une telle dimension. Non pas, comme certains aimeraient le croire, pour « bouter Microsoft hors de l’école », mais simplement pour faire entendre notre voix et, parce que l’indifférence amène l’ignorance, offrir ainsi à une majorité d’enseignants les conditions du choix. Un choix qui, nous le savons, va bien au delà de la praticité d’usage de tel ou tel logiciel.

Pouvons-nous adresser un courrier personnalisé dans le casier de chaque enseignant ? Pouvons nous proposer plus de cent formations non pas aux nouvelles fonctionnalités de la dernière version d’OpenOffice.org mais plutôt à l’utilisation pédagogique d’une suite bureautique illustrée par exemple avec OpenOffice.org ? (formations que l’Accord cadre avec l’AFUL autorisent pleinement du reste) Pouvons-nous, comme on nous y invite, réaliser plus d’une centaine de vidéos didactiques ? Pouvons-nous enfin communiquer d’un coup avec des centaines de milliers d’enseignants comme peut le faire le Café Pédagogique avec les produits de son partenaire ? (ce qui serait pratique par exemple pour diffuser le rapport Becta).

Malheureusement non. Rien nous oblige bien entendu à vouloir reproduire à l’identique cette manière de faire. Mais force est de constater qu’aujourd’hui nous ne pouvons rivaliser. On peut bien sûr décider de ne rien faire de plus que ce l’on fait actuellement (ne serait-ce que parce qu’on ne peut en faire plus) et s’en remettre à la sagesse et à la clairvoyance de nos collègues en se disant que jour après jour, dans l’ombre du terrain, le logiciel libre et son état d’esprit avancent et finiront par atteindre une telle masse critique qu’on ne pourra plus feindre de les ignorer.

Certes, mais on peut aussi être plus volontariste, surtout si l’on accepte le fait que ce qui est exposé dans cet article est potentiellement à même de nous faire reculer de dix bonnes nouvelles années ! Ce recul étant bien moins celui des logiciels que celui des mentalités. Si cela ne tenait qu’à moi, et si j’avais la moindre légitimité pour le faire, j’irai même jusqu’à convoquer d’urgence un… « Grenelle du Logiciel Libre dans l’Éducation » !

C’est une boutade, mais je crois sincèrement que, la balle étant dans notre camp, il y a là prétexte à se mettre en mouvement et unir nos quelques forces. Partout ailleurs dans l’administration publique, le logiciel libre est évalué et bien souvent adopté. Pourquoi en irait-il autrement à l’Éducation Nationale ? Parce qu’avec la complicité passive du Ministère, Microsoft aura fait acte héroïque de résistance en compagnie de quelques enseignants que le court terme aveugle ?

Je ne puis m’y résoudre et vous pose pour conclure la question suivante : Ce billet n’est-il qu’une nouvelle déclinaison de l’obsession paranoïaque d’un adepte de la théorie du complot ou bien au contraire sommes-nous face à un réel problème qui nécessite de réelles réponses ?