Leçon n°1 : Cliquer sur le gros E bleu permet d’accéder à Internet

Tajai - CC byCe blog n’est pas le dernier à le constater : les enseignants et le logiciel libre, c’est parfois tout un poème…

Enfin surtout aux États-Unis où un enseignant se propose carrément ci-dessous « d’éduquer ses collègues au Libre », et de se demander au passage si la situation ne serait pas meilleure ailleurs.

En Angleterre certainement, mais en France ?

C’est, en l’absence de statistiques fiables, difficile à évaluer[1]. En bas ça fourmille à n’en pas douter d’initiatives pas forcément médiatisées, mais en haut ?

En haut, ça coince toujours pour je ne sais quelles obscures raisons. Où sont les documents d’informations, les plans d’action ou les directives courageuses ? Et confier la chose à Microsoft ou Google n’est certainement pas la solution…

Il faut éduquer les profs au Libre

Teachers Need An Open Source Education

Matt Hartley – 27 janvier 2009 – Datamation
(Traduction Framalang : Daria, Don Rico et Tyah)

Vous rappelez-vous en 2008, quand un professeur nommé « Karen » avait interdit à ses élèves d’utiliser Linux ? Apparemment, dans son raisonnement, des élèves qui utilisaient Linux étaient sans doute impliqués dans des pratiques illégales.

Elle s’est plus tard excusée même si dans les deux camps on a continué à se crêper le chignon. Il me semble que ce ne sont pas seulement les acteurs du logiciel propriétaire qui ne connaissent rien aux logiciels Open Source. Il semblerait qu’à présent le groupe des fanas de la désinformation inclut aussi les professeurs.

C’est la liberté qui compte, pas la gratuité

Malgré la croissance récente dans l’adoption des logiciels Open Source sur les plateformes propriétaires, il reste d’innombrables responsables et décisionnaires qui ignorent tout des logiciels libres/Open Source (Free/Open Source Software : FOSS). Et pour être complètement juste, il n’est pas difficile d’imaginer le trouble d’un professeur bombardé par le discours des présentateurs des grands médias qui passent plus de temps à brandir la menace du « piratage de logiciels » qu’à parler de leurs alternatives libres (FOSS).

Même les « freeware » (gratuiciels) peuvent être échangés illégalement puisqu’ils contiennent souvent un accord de licence stipulant qu’il faut la permission expresse de ses créateurs pour distribuer les travaux créés avec ces gratuiciels. On imagine alors sans mal comment un professeur mal informé peut être enclin à tirer des conclusions hâtives quand un de ses étudiants fait passer un CD contenant un « logiciel inconnu » à ses camarades.

En réalité, ces mêmes étudiants utilisent leur liberté de choix pour sélectionner les alternatives légales aux logiciels propriétaires. Ils évitent ainsi tout recours au piratage de logiciels. Grâce aux nombreuses licences Open Source existantes, les étudiants peuvent échanger ces logiciels sans restriction. Cette liberté n’a aucune conséquence néfaste. Hélas, la plupart des professeurs l’ignorent.

Ce qui n’arrange en rien cette incompréhension entre élèves et enseignants, ce sont les fortes présomptions voulant que les responsables informatique qui travaillent dans les mêmes établissements que ces professeurs mal informés ne sont pas en reste pour encourager ce genre de réactions et faire en sorte qu’elles aillent plus loin encore.

Des professionnels de l’informatique qui ont besoin de « retourner à l’école »

Essayez de suggérer à un utilisateur de Linux qu’il devrait retirer Linux de son PC : il y a de fortes chances qu’il vous rie au nez. Pourtant, il semblerait que ce soit des pratiques courantes dans les établissements.

Le problème, c’est que les utilisateurs de Linux eux-mêmes sont perçus comme des éléments perturbateurs dans un univers régi par des administrateurs certifiés Microsoft. Ces admins, qui étalent souvent leur « grande connaissance de Linux » acquise lors d’une aventure de vingt minutes avec une distribution Linux prise au hasard il y a quelques années, choisissent d’apporter leur pierre à la désinformation. On les accuse parfois de fabriquer des semi-vérités à propos de ceux qui utilisent exclusivement cette plateforme, ou de leur avoir simplement refusé l’accès au réseau. Voilà qui pose problème dès lors que les étudiants concernés viennent d’une famille où l’on n’utilise que Linux, ce qui pourrait les contraindre à devoir apporter au lycée leur propre portable tournant sous Linux.

Est-ce un problème mondial, ou est-un problème propre aux établissements scolaires américains ? Même si j’ai lu dans certains articles que ça se passe un peu partout, le gros des exemples cités semble venir essentiellement des États-Unis.

Les établissements scolaires américains sont-ils seuls à nager dans l’ignorance ?

À l’heure actuelle, les établissements américains sont plus doués pour enseigner la « docilité envers Microsoft » que pour faire en sorte que les élèves sachent lire avant leur entrée au lycée. Remarquez, ce n’est pas grave, ces mêmes élèves ont déjà appris tout seuls à cliquer sur « le gros E bleu » pour se rendre comme des grands sur MySpace et Facebook.

Ajoutez à cela le talent avec lequel ils utilisent la toute dernière suite de sécurité propriétaire pour se prémunir des programmes malveillants qui se baladent sur Internet, et nos élèves américains, en grandissant, deviendront une ressource sur laquelle on pourra compter.

Pendant ce temps, des régions du monde telles que l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud connaissent des taux record de migrations vers Linux. Les lycéens de pays bien plus pauvres que le nôtre apprennent à mettre à profit leurs capacité à résoudre les problèmes pour contourner les « anicroches » de leur OS, alors qu’aux États-Unis, les lycéens s’échinent à améliorer leur perso World of Warcraft !

Même au Canada, notre voisin immédiat, des dépêches annoncent chaque mois que des groupements d’établissements passent à des alternatives Open Source, simplement parce qu’ils préfèrent consacrer leur budget éducatif à autre chose qu’à des licences Microsoft.

Arrêtez-moi si je me trompe, mais il y a quelque chose qui cloche, non ? Les enseignants et les administrateurs système serinent aux jeunes élèves portés vers les nouvelles technologies que s’ils veulent être compétitifs sur le marché, ils doivent utiliser Windows. N’oublions pas que nous espérons former ces mêmes élèves à être performants dans un monde ou Linux et Windows sont tous les deux très utilisés.

D’accord, on voit souvent passer des articles qui affirment que l’utilisation de Linux est marginale. Pourtant, quand on demande comment on peut bien s’y prendre pour comptabiliser un système d’exploitation qui ne fournit pas de réel moyen de le comptabiliser, ces mêmes sources médiatiques se referment comme des huîtres. En d’autres termes, nul ne peut fournir un pourcentage tangible, et ceux qui montrent des camemberts représentant les parts de marché en avançant des arguments confus doivent comprendre qu’ils ne racontent pas toute la vérité.

Mais revenons à nos moutons. Avec le budget éducatif dont disposent actuellement les établissements scolaires américains, il semblerait qu’il y ait un paquet d’argent à dépenser en logiciels et en renouvellement de matériel ! Les économies réalisées par les établissements américains qui utilisent toujours Windows 98 et 2000 Pro, voilà qui à l’évidence est plus rentable qu’embaucher des administrateurs formés à plusieurs systèmes d’exploitation et capables de travailler sur autre chose que Windows, non ?

Ces administrateurs ne passent quand même pas plus de temps à lutter contre les logiciels malveillants qu’à améliorer l’environnement informatique pour les élèves, non ? Ah si, au temps pour moi.

Une proposition modeste

Je vais faire une proposition. Et si on permettait aux élèves qui le souhaitent d’apprendre à se servir de Linux, et ce sur leur temps libre ? Peut-être pourrait-on même en faire une option qui leur vaudrait des points supplémentaires, ce qui serait forcément mieux que de les assommer d’ennui avec des matières en option dont ils se fichent comme d’une guigne.

Cela ne coûterait rien aux établissements, et pour couronner le tout, contribuerait à parfaire les capacités de résolution de problème des élèves.

En outre, je suggère que les enseignants et les techniciens informatique formés par Microsoft se documentent davantage sur Linux avant de porter dessus des jugements hâtifs.

Bien que je reconnaisse volontiers que Linux n’est pas une plateforme accessible à tout le monde, elle est de plus en plus utilisée dans le monde entier, et ceux qui la maîtriseront en plus des systèmes d’exploitation propriétaires seront en bien meilleure position pour réussir sur le marché du travail.

Qui plus est, n’importe quel utilisateur de Linux peut se coller devant une machine tournant sous Windows et réussir à s’en servir en quelques minutes. Pouvons-nous en dire autant de l’utilisateur de Windows de base qui tenterait la même expérience avec Linux ? Sans « le gros E bleu » sur le bureau, c’est peu probable.

Notes

[1] Crédit photo : Tajai (Creative Commons By)




Numérique, droit d’auteur et pédagogie

Mr. Theklan - CC by-saPour ceux qui arrivent encore à résister aux sollicitations permanentes d’Internet pour réussir l’exploit de parcourir jusqu’au bout de longs documents, nous vous proposons aujourd’hui la lecture d’un article de Jean-Pierre Archambault, paru initialement dans la revue Terminal, qui interroge le présent mais surtout l’avenir des ressources pédagogiques à l’ère du numérique.

Parce que si l’on n’y prend pas garde, on pourrait bien vite se retrouver peu ou prou en face des mêmes tensions que celles qui ont été mises à jour lors de l’examen du projet de loi Création et Internet. Quid en effet d’un monde[1] où la propriété finirait par contraindre de trop l’accès et le partage, a fortiori à l’école ?

Numérique, droit d’auteur et pédagogie

Jean-Pierre Archambault
Terminal n° 102, Automne-Hiver 2008-2009, édition l’Harmattan, p. 143-155.

Les ressources pédagogiques utilisées dans les cours sont l’un des cœurs de l’enseignement, correspondant à des démarches et des conceptions d’apprentissage. Il y a les ressources que se procurent les enseignants. Éditées à des fins explicitement pédagogiques ou matériaux bruts non conçus initialement pour des usages scolaires, mais y trouvant naturellement leur place, comme une œuvre musicale ou une reproduction de tableau. Leurs modèles économiques et leurs modalités de propriété intellectuelle, vis-à-vis de l’institution éducative sont nécessairement distincts.

Il y a aussi les ressources produites par les enseignants eux-mêmes, aujourd’hui dans le contexte radicalement nouveau issu de l’omniprésence de l’ordinateur et d’Internet, à des échelles dont les ordres de grandeur sont sensiblement différents de ceux de l’ère du pré-numérique. Elles sont élaborées dans des processus collaboratifs qui appellent nécessairement des réponses en termes de droits d’auteur de nature à permettre et favoriser l’échange par une circulation fluide des documents.

La problématique juridique est vaste. Nous examinerons les licences de logiciels et de ressources libres – certains points qui font débat comme la sécurité juridique, considération importante pour les établissements scolaires. En effet, elles éclairent et illustrent la situation nouvelle et irréversible créée par l’irruption du numérique dans les processus de création de biens informationnels et la place de ceux-ci, sans cesse croissante, relativement et en valeur absolue. Nous poserons la question de l’exception pédagogique, en relation avec les missions de l’École et l’exercice concret du métier d’enseignant, au temps nouveau du numérique.

Un modèle français

Les ressources pédagogiques, au premier rang desquelles les manuels scolaires, mais aussi la banale préparation de cours, l’article ou la photographie « sur laquelle on est tombé »… ont toujours joué un rôle important dans l’exercice du métier d’enseignant, variable selon les disciplines. Comme support de cours bien sûr, mais aussi comme vecteur de mise en oeuvre de nouveaux programmes ou support de formation (derrière un scénario pédagogique, il y a toujours une pratique professionnelle). Il existe un modèle français de l’édition scolaire dont la figure centrale, le manuel des élèves, relève pour l’essentiel du secteur privé. Ce modèle a acquis ses lettres de noblesse et fait ses preuves depuis deux siècles. L’histoire de l’édition scolaire en France est l’histoire des relations entre trois acteurs majeurs, l’État, les éditeurs et les auteurs – des enseignants et des inspecteurs – et de leurs rapports de force mouvants, dans lesquels il arrive que la technique intervienne. Ainsi, à partir de 1811, un auteur ne peut plus soumettre directement à l’État un manuscrit sous prétexte, parmi d’autres raisons, que son examen est long et difficile. Une proposition de manuel doit être obligatoirement communiquée sous forme d’imprimé. L’éditeur devient, de fait, incontournable.

Depuis une quarantaine d’années, les manuels scolaires se sont profondément transformés. L’iconographie occupe jusqu’à 50 % de la surface. L’ouvrage permet des lectures plurielles et des usages multiples, qui préfigurent ceux de l’hypermédia. Il n’y a plus de cours en tant que tel… Le résultat combiné de cette complexité croissante des manuels, de la concurrence des méthodes actives et de la souplesse de la photocopie est sans appel : on constate depuis les années quatre-vingt une tendance à la perte de vitesse de l’utilisation du manuel traditionnel, même si l’attachement symbolique demeure[2][3]. L’enfant chéri de l’édition scolaire connaît une forme de crise…

Une rupture

…et le numérique arrive dans ce contexte. Rude concurrent ! En effet, le manuel scolaire, ce livre d’une centaine de pages, qu’on ne lit plus d’une façon linéaire mais dans lequel on navigue avec des index et des renvois, ce livre ne saurait rivaliser avec Internet et le multimédia, leurs hyperliens, leurs millions de pages et leurs outils de recherche automatisée. Le livre n’est désormais plus « l’enfant unique ».

Plus généralement, le numérique transforme radicalement le paysage éditorial installé. Certes, les enseignants ont toujours réalisé des documents à l’intention de leurs élèves, en préparant leurs cours. Jusqu’à l’arrivée de l’ordinateur et d’Internet, une élaboration collaborative avec des collègues et la visibilité des ressources produites ne pouvaient aller au-delà d’un cercle restreint et rapproché. Modifier un document écrit à la main était et demeure une opération lourde, qui plus est quand il circule et que chacun y met sa griffe. Dans les années 70 encore, les photocopieuses étaient rarissimes, les machines à alcool fastidieuses à utiliser.

Des échanges sur une plus grande échelle supposaient de mettre en forme des notes manuscrites, et la machine à écrire manquait de souplesse, ne tolérant pas vraiment les fautes de frappe. Le manuel scolaire était alors la seule perspective pour une diffusion élargie, l’éditeur le passage obligé, et on lui accordait d’autant plus facilement des droits sur la fabrication des ouvrages que l’on ne pouvait pas le faire soi-même ! Mais, aujourd’hui, les conditions de la production des ressources pédagogiques, numériques pour une part en augmentation régulière, ont donc radicalement changé, du fait de la banalisation des outils informatiques de réalisation des contenus (du traitement de texte aux logiciels de publication) et d’Internet qui favorise à la fois les productions individuelles et le développement du travail collectif des enseignants, dans leur établissement, ou disséminés sur un vaste territoire, à la manière des programmeurs qui écrivent des logiciels libres.

Il y a une transférabilité de l’approche du libre, des logiciels à la réalisation des autres biens immatériels. Internet permet aux auteurs de toucher un vaste public potentiel qui peut aisément reproduire leurs documents, les utiliser, les modifier… La profusion des ressources éducatives que l’on peut consulter sur Internet est là pour en témoigner. En nombre, les enseignants auteurs-utilisateurs sont devenus un acteur autonome à part entière de l’édition scolaire. On peut, pour le moins, parler de turbulences dans le secteur[4][5].

Sésamath

Cette association est synonyme d’excellence en matière de production pédagogique et de communauté d’enseignants-auteurs-utilisateurs. En effet, Sésamath a reçu une mention d’honneur pour le prix 2007 Unesco-Roi Hamad Bin Isa Al-Khalifa sur l’utilisation des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation. L’Unesco a décidé d’attribuer une mention spéciale au projet de manuel libre « pour la qualité de ses supports pédagogiques et pour sa capacité démontrée à toucher un large public d’apprenants et d’enseignants ». L’association a également été récompensée aux Lutèce d’Or (Paris, capitale du libre). Elle regroupe une soixantaine de professeurs de mathématiques de collèges. De l’ordre de 400 contributeurs-auteurs utilisent régulièrement les outils de travail coopératif qu’elle a mis en place (Wiki, Spip, forums, listes de diffusion…). Animée d’une volonté forte de production de ressources sous licence libre, et si possible formats ouverts, Sésamath ne soutient que des projets collaboratifs dont elle favorise et encourage les synergies. L’association donne les résultats : environ un million de visiteurs sont comptabilisés chaque mois sur l’ensemble de ses sites. Parmi les projets soutenus par l’association figure Mathenpoche. Dix académies hébergent le logiciel sur un serveur local, en plus du serveur mis à disposition par Sésamath pour les professeurs des autres académies, en partenariat avec le Centre de ressources informatiques de Haute-Savoie (Citic74).

Ce sont ainsi 5 000 professeurs qui utilisent la version réseau de Mathenpoche à laquelle sont inscrits 260 000 élèves. Plus de 160 000 connexions élèves sont enregistrées sur les serveurs chaque mois, auxquelles il faut ajouter 236 000 connexions en accès libre sur le site public de Mathenpoche. MathémaTICE est une revue en ligne sur l’intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques, née en septembre 2006. Enfin, Le Manuel Sésamath pour la classe de cinquième, premier manuel scolaire libre, fruit du travail collaboratif d’une cinquantaine de collègues, s’est vendu à 72 000 exemplaires à la rentrée 2006. Le Manuel Sésamath pour la quatrième s’est vendu, lui, à plus de 90 000 exemplaires en septembre 2006. à n’en point douter, en cette rentrée 2008, le Manuel de troisième connaîtra le succès, comme ses prédécesseurs.

Les communautés d’enseignants auteurs-utilisateurs se multiplient[6][7][8]. Utilisant à plein les potentialités d’interaction du Web, elles fonctionnent comme les communautés de développeurs de logiciels libres. Leurs membres ont une vision et une identité communes. Organisées pour fédérer les contributions volontaires, dans une espèce de synthèse de « la cathédrale et du bazar », ces communautés répondent à des besoins non ou mal couverts et doivent compter en leur sein suffisamment de professionnels ayant des compétences en informatique. Les maîtres mots de la division du travail y sont « déléguez » et « distribuez ».

Les licences de logiciels libres

Les logiciels libres sont désormais une composante à part entière de l’informatique[9]. Parmi les raisons qui expliquent cette rapide évolution, le fait que l’approche du libre, qui relève du paradigme de la recherche scientifique, est en phase avec la nature profonde de l’activité d’écriture de logiciels (difficile par exemple de mener des projets combinant des millions et des millions de lignes de programme quand on n’a pas accès au code source) et qu’elle est ainsi gage d’efficacité et de qualité. Les enseignants utilisent des logiciels libres et certains en produisent. Pour autant, le long fleuve du libre, en général et dans l’éducation en particulier, n’est pas toujours tranquille. Intimement liées au modèle économique, il y a les réponses en termes de droit d’auteur. Et il arrive que des questions juridiques soient mises en avant, notamment celles ayant trait à la compatibilité des licences libres avec le droit français, à une certaine insécurité juridique. Qu’en est-il exactement ?[10].

La typologie classique des licences Logiciel libre comprend deux ensembles principaux, licences avec ou sans copyleft, et un cas spécial : le domaine public. La caractéristique des licences sans copyleft, dites type BSD est de ne pas obliger à conserver la même licence pour une oeuvre dérivée. Le code des logiciels utilisant ces licences peut donc être intégré dans du logiciel propriétaire ou du logiciel libre avec copyleft.

Les licences avec copyleft exigent qu’un logiciel dérivé conserve son statut de logiciel libre, notamment par la fourniture du code source de la version modifiée. En pratique, cela signifie qu’il n’est pas possible de diffuser un logiciel propriétaire incorporant du code utilisant une telle licence. La principale licence de ce type est la GNU General Public licence (GNU GPL) de la FSF (Free Software Fondation). D’autres licences de ce type sont la Lesser General Public License (LGPL) de la FSF, qui offre la possibilité de lier dynamiquement le programme à une application propriétaire. La LGPL est notamment utilisée par le projet OpenOffice.org. La licence CeCILL est une licence francophone proposée par le CEA, le CNRS et l’Inria pour les mondes de la recherche, de l’entreprise et des administrations, et plus généralement pour toute entité ou individu désirant diffuser ses résultats sous licence de logiciel libre, en toute sécurité juridique. Les auteurs de CeCILL l’ont déclarée compatible avec la GNU GPL. Et la FSF a indiqué que CeCILL faisait partie des licences compatibles avec la GNU GPL. Chaque licence doit préciser les licences qui lui sont compatibles.

« Une complexité conceptuelle de la licence GPL est qu’elle prétend ne pas être un contrat, ce qui peut poser des difficultés de compréhension en Europe ». Si, aux États-Unis, la GPL s’appuie essentiellement sur le copyright, en France et dans de nombreux pays d’Europe, l’habitude est de licencier les logiciels par des contrats, acceptés par les deux parties avec les clauses de responsabilité inhérentes aux contrats logiciels. « L’utilisation licite d’un programme sous GNU GPL n’impose pas une relation contractuelle entre l’utilisateur et le titulaire des droits d’auteur »[11]. Cette différence d’appréciation et la volonté d’avoir une licence d’origine française ou européenne basée sur une mécanique contractuelle sont à l’origine de la rédaction des licences CeCILL et EUPL. « Néanmoins, la validité de la licence GPL a été confirmée à plusieurs reprises par des tribunaux européens ». La diffusion sous des licences d’origine américaine comme la GNU GPL pouvant poser certaines questions de droit, engendrant des incertitudes qui peuvent dissuader des entreprises ou des organisations d’utiliser ou d’apporter leurs contributions aux logiciels libres. Dans ce contexte, le Cea, le Cnrs et l’Inria ont donc entrepris la rédaction de contrats de licences de logiciels libres visant à accroître la sécurité juridique « en désignant un droit applicable (et les tribunaux compétents pour juger d’éventuels litiges), en l’occurrence le droit français, conforme au droit européen et qui a vocation à concerner 27 pays », à préciser exactement l’étendue des droits cédés et à encadrer « la responsabilité et les garanties accordées par les concédants dans les limites permises par le droit français et européen ». Il y a une version française qui, avec la version anglaise fait également foi. Elle s’impose, de par la loi, aux organismes de recherche et établissements publics français.

L’utilisateur secondaire, c’est-à-dire la personne admise à utiliser un logiciel libre (vous et moi) à l’exclusion de tout acte de copie, de modification, d’adaptation et de distribution, est dans une situation juridique spéciale. Il n’a pas de relation contractuelle avec le concédant de la licence dans la mesure où il n’a pas consenti à la licence et ne connaît pas le plus souvent le concédant, auteur du logiciel libre qu’il utilise. « Il ne paraît pas possible de faire valoir un éventuel consentement implicite à la conclusion d’une licence et ce d’autant plus que le droit français ne permet pas en cette matière les accords tacites ».

Ces difficultés tiennent pour une part au droit, français notamment, qui, s’il accorde aux auteurs un droit exclusif sur leurs créations, ne dit rien d’explicite quant à des modalités leur permettant de faire connaître leurs volontés concernant les usages de leurs œuvres. Il y a là un vide juridique, sinon une forme d’incohérence. Cela étant, les licences de type GPL sont particulièrement protectrices des droits des utilisateurs dans la mesure où les contributeurs successifs s’obligent les uns les autres à respecter les dits droits, en s’appuyant sur les traités internationaux en matière de droit d’auteur. De plus, la publication et l’utilisation par les administrations françaises et européennes de licences libres (comme CeCILL et EUPL) traduisent la maturation juridique de la diffusion du libre, contribuant ainsi de fait, plus que fortement, à créer un environnement « sécurisé » pour les utilisateurs. Et puis, il y a des millions et des millions d’utilisateurs de logiciels libres en France et dans le monde. Une des vertus du droit étant de s’adapter aux évolutions, technologiques en particulier… l’insécurité, très relative, ne manquera pas de n’avoir été que momentanée.

Les licences de ressources libres

Les enseignants et les institutions éducatives ont encore tendance à mettre en ligne des ressources pédagogiques sans se poser explicitement la question de leurs licences. D’où un certain flou. Mais les licences de ressources libres ont commencé à faire leur chemin dans les problématiques éditoriales. Leur objectif est de favoriser le partage, la diffusion et l’accès pour tous sur Internet des œuvres de l’esprit, en conciliant les droits légitimes des auteurs et des usagers. Cela passe par des modalités juridiques correspondant aux potentialités de la Toile, notamment à cette possibilité de diffusion quasi instantanée d’une ressource immatérielle à des milliers et des millions de personnes. Le projet Creative Commons s’y emploie[12]. Il a vu le jour à l’université de Standford, au sein du Standford Law School Center for Internet et Society, Lawrence Lessig en étant l’un des initiateurs. Il s’agit donc d’adapter le droit des auteurs à Internet.

Creative Commons renverse le principe de l’autorisation obligatoire. Il permet à l’auteur d’autoriser par avance, et non au coup par coup, certains usages et d’en informer le public. Il est autorisé d’autoriser. Métalicence, Creative Commons permet aux auteurs de se fabriquer des licences, dans une espèce de jeu de Lego simple, constitué de seulement quatre briques. Première brique : attribution. L’utilisateur, qui souhaite diffuser une œuvre, doit mentionner l’auteur. Deuxième brique : commercialisation. L’auteur indique si son travail peut faire l’objet ou pas d’une utilisation commerciale. Troisième brique : non-dérivation. Un travail, s’il est diffusé, ne doit pas être modifié. Quatrième brique : partage à l’identique. Si l’auteur accepte que des modifications soient apportées à son travail, il impose que leur diffusion se fasse dans les mêmes termes que l’original, c’est-à-dire sous la même licence. La possibilité donnée à l’auteur de choisir parmi ces quatre composantes donne lieu à onze combinaisons de licences. Grâce à un moteur de licence proposé par le site de Creative Commons, l’auteur obtient automatiquement un code HTML à insérer sur son site qui renvoie directement vers le contrat adapté à ses désirs.

L’exception pédagogique

Les enseignants utilisent des documents qu’ils n’ont pas produits eux-mêmes, dans toutes les disciplines, mais particulièrement dans certaines d’entre d’elles comme l’histoire-géographie, les sciences économiques et sociales ou la musique : récitation d’un poème, lecture à haute voix d’un ouvrage, consultation d’un site Web… Ces utilisations en classe ne sont pas assimilables à l’usage privé. Elles sont soumises au monopole de l’auteur dans le cadre du principe de respect absolu de la propriété intellectuelle. Cela peut devenir mission impossible, tellement la contrainte et la complexité des droits se font fortes. Ainsi pour les photographies : droits du photographe, de l’agence, droit à l’image des personnes qui apparaissent sur la photo ou droit des propriétaires dont on aperçoit les bâtiments… Difficile d’imaginer les enseignants n’exerçant leur métier qu’avec le concours de leur avocat ! Mais nous avons vu les licences Creative Commons qui contribuent, en tout cas sont un puissant levier, à développer un domaine public élargi de la connaissance. Et la GNU GPL et le CeCILL qui permettent aux élèves et aux enseignants de retrouver, dans la légalité, leurs environnements de travail sans frais supplémentaires, ce qui est un facteur d’égalité et de démocratisation. Mais la question de l’exception pédagogique dans sa globalité, une vraie question, reste posée avec une acuité accrue de par le numérique : quelque part, le copyright est antinomique avec la logique et la puissance d’Internet.

L’exception pédagogique, c’est-à-dire l’exonération des droits d’auteurs sur les oeuvres utilisées dans le cadre des activités d’enseignement et de recherche, et des bibliothèques, concerne potentiellement des productions qui n’ont pas été réalisées à des fins éducatives. Par exemple, le Victoria and Albert Museum de Londres, à l’instar du Metropolitan Museum of art de New York, a décidé de ne plus facturer le droit de reproduction des œuvres de sa collection lorsqu’elles sont publiées à des fins d’enseignement, leur mise en ligne restant cependant soumise à conditions 13.

La société Autodesk a ouvert un portail étudiant de l’ingénierie et de la conception numérique depuis lequel les élèves, étudiants et enseignants de toutes les disciplines peuvent notamment télécharger gratuitement des versions pour étudiants de ses logiciels, toutes ses ressources concernant la conception architecturale, la conception graphique, le génie civil et la conception mécanique et électrique.

L’activité d’enseignement est désintéressée et toute la société en bénéficie. L’éducation n’est pas un coût mais le plus nécessaire (et le plus noble) des investissements. L’exception pédagogique a donc une forte légitimité sociétale. De plus, entrés dans la vie active, les élèves auront naturellement tendance à, par exemple, préconiser les logiciels qu’ils auront utilisés lors de leur scolarité. En la circonstance le système éducatif promeut des produits qu’il a pendant longtemps payé cher (avant que le libre contribue à une baisse sensible des prix pratiqués). D’un strict point de vue économique, il ne serait nullement aberrant que ce soit au contraire les éditeurs qui payent pour que les élèves utilisent leurs produits ! On n’en est pas encore là. Sans nier certains excès auxquels la photocopie non maîtrisée peut donner lieu, il ne faut pas oublier que les établissements d’enseignement contribuent déjà à la défense du droit d’auteur en versant des sommes importantes (près de trois millions d’euros de la part des universités) pour la photocopie d’œuvres protégées, au nom de la fameuse lutte contre le « photocopillage ». Les bibliothèques, quant à elles, doivent déjà faire face au paiement de droits de prêt diminuant fortement leur pouvoir d’achat.

On distingue le cas de l’édition scolaire dont la raison d’être est de réaliser des ressources pour l’éducation, et qui bien évidemment doit en vivre. L’édition scolaire traverse une période de turbulences de par le numérique. Les questions posées sont notamment celles de son positionnement par rapport aux productions enseignantes, du caractère raisonnable ou non des prix pratiqués, de l’existence d’un marché captif, d’un nouveau modèle économique combinant licences libres et rémunération sur les produits dérivés… mais pas celle du bien-fondé d’une légitime rémunération d’un travail fait, dans le contexte d’une école républicaine gratuite et laïque. Deux types de solutions existent pour assurer l’exception pédagogique : la voie contractuelle et la voie législative.

La voie contractuelle

En mars 2006, le ministère de l’Éducation nationale a signé des accords avec les syndicats d’éditeurs. Ils concernent les œuvres des arts visuels ; les enregistrements sonores d’oeuvres musicales, la vidéo-musique et les interprétations vivantes des œuvres musicales ; les œuvres cinématographiques et audiovisuelles ; les livres et les musiques imprimées ; les publications périodiques imprimées. Ils autorisent et limitent certains usages d’œuvres protégées par les enseignants, à des fins d’illustration des activités d’enseignement et de recherche. Ils couvrent une période allant de janvier 2007 à 2009, date à laquelle une exception sera inscrite dans le Code de la Propriété intellectuelle (CPI).

Les publics visés sont notamment la classe et la formation initiale. Les cas autorisés sont la diffusion ou projection en classe d’œuvres protégées de tout enregistrement audio (même intégral), de toute image, texte ou de partition, de toute œuvre audiovisuelle obtenue par un canal hertzien gratuit, de toute représentation (interprétation en particulier) en classe d’une œuvre ; la reproduction papier d’œuvres protégées pour les élèves de la classe (10 % maximum d’un livre ou d’une partition, 30 % d’un périodique) avec selon les types d’établissements un quota de copies par élève et par an ; la reproduction numérique d’images protégées donnée à titre temporaire pour toute œuvre diffusée en classe, avec un maximum de 20 images incorporées dans chaque travail pédagogique ou de recherche mis en ligne sur Intranet et des limitations (400 × 400 pixels, 72 dpi, pas de recadrage, pas d’accès direct aux œuvres, pas d’indexation, déclaration des œuvres par formulaire à l’AVA) ; la diffusion audio et audiovisuelle lors de concours ou colloques (extraits audio d’une œuvre limités à 30 secondes dans la limite de 10 % de la durée totale chacun, représentants, additionnés, moins de 15 % du total).

Les accords ne concernent notamment pas l’analyse d’une œuvre pour elle-même, la formation continue, l’utilisation en classe de DVD ou de VHS du commerce (les droits de diffusions ou de prêt doivent être alors acquittés par les centres de documentation des établissements), la création de bases d’œuvres protégées numérisées consultables en Intranet (sous forme de fichiers image, son ou vidéo en particulier), la distribution de fichiers numériques d’œuvres protégées aux élèves, la possibilité de faire des liens profonds sur des sites pour disposer, par exemple, d’extraits audio organisés de manière thématique.

Pour les livres et les musiques imprimées, les accords prévoient des vérifications (Article 10) : « Les représentants des ayants droit pourront procéder ou faire procéder à des vérifications portant sur la conformité des utilisations d’œuvres visées par l’accord au regard des clauses de l’accord. Les agents assermentés de chaque représentant des ayants droit auront la faculté d’accéder aux réseaux informatiques des établissements afin de procéder à toutes vérifications nécessaires. Ils pourront contrôler notamment l’exactitude des déclarations d’usage et la conformité de l’utilisation des œuvres visées par l’accord avec chaque stipulation de l’accord. En cas de manquement à ces obligations contractuelles, les représentants des ayants droit pourront requérir du chef d’établissement ou du responsable du réseau le retrait des œuvres ou extraits d’œuvres visées par l’accord utilisé illicitement. En cas de contestation sur l’application de l’accord, le comité de suivi se réunit pour constater l’absence de respect d’une clause de l’accord et proposer une solution aux parties. » Cette possibilité d’intrusion sur les réseaux des établissements scolaires a été diversement appréciée.

Des entraves à l’activité pédagogique

Les limitations prévues dans les accords (nombre de pixels, durée des extraits…) ne sont pas sans poser de réels problèmes pédagogiques. Yves Hulot, professeur d’éducation musicale à l’IUFM de Versailles (Cergy-Pontoise), en pointent quelques-uns. La combinaison d’une résolution limitée à 400 × 400 pixels et d’une définition de 72 dpi de la représentation numérique d’une œuvre avec une utilisation portant sur l’œuvre intégrale empêche le recours à des photos de détails des oeuvres.

Par exemple : « Le tableau Les noces de Cana de Véronèse comporte une intéressante viola da braccio au premier plan. Avec une telle limite de résolution sur cet immense tableau, il est impossible de projeter et de zoomer convenablement sur ce détail. Qui peut croire justifier de telles limitations ? » La durée des extraits d’une oeuvre musicale crée également des obstacles de nature pédagogique. « Si je travaille en classe de troisième sur la compagnie des Ballets russes, il me semble évident que pour apprécier l’importance de la révolution qu’elle apporta, une analyse d’au moins deux ballets s’impose, en l’occurrence L’après-midi d’un faune et Le sacre du Printemps, ce qui permet d’aborder deux musiciens capitaux, Debussy et Stravinsky. Le premier dure environ dix minutes, le second environ trente. Habitués que sont nos élèves à côtoyer majoritairement le genre chanson, il me semble utile de les confronter à d’autres durées et d’autres langages musicaux ou chorégraphiques. Mais je crains qu’à trop limiter l’activité pédagogique des enseignants on finisse par empêcher ceux qu’ils éduquent de réellement avoir les clés d’accès à la culture ! »

La voie législative

Les contenus numériques en ligne sont quasiment absents des accords précités. Est-ce un hasard ? L’affrontement fondamental est-il prudemment différé ? C’est principalement l’écrit numérique qui est envisagé, l’audio et l’audiovisuel en étant exclus. La mise en ligne d’images protégées suppose qu’elles soient incorporées à un travail pédagogique ou de recherche, et qu’elles soient limitées en qualité et en quantité. Ces accords couvrent essentiellement des activités de diffusion en classe, les seuls cas de reproduction à des fins de distribution concernent la photocopie. Les possibilités d’échange de fichiers numériques avec les élèves et les étudiants sont donc limitées, tout comme les échanges entre collègues lors de travaux interdisciplinaires.

Ils favorisent une offre éditoriale qui est de type catalogue et non sur-mesure ou granulaire malgré les développements récents de l’offre numérique. « En dehors du cadre et des limites prévus par les accords, l’obtention dans l’enseignement des droits d’exploitation d’œuvres protégées, représente une double difficulté : savoir à quels ayants droit demander les autorisations et avoir le budget éventuellement nécessaire pour s’en acquitter. D’où la nécessité de proposer un dispositif permettant aux enseignants d’être à la fois clairs du point de vue juridique et d’obtenir facilement les droits pour ce qu’ils se proposent de faire pour leurs élèves ou leurs étudiants. »[13]

Les enjeux de l’exception pédagogique demeurent

À l’occasion de la transposition par le Parlement, en 2006, de la directive européenne sur les Droits d’auteurs et les droits voisins dans la société de l’information (Dadvsi), qui prévoit la possibilité d’une exception pédagogique, la CPU (Conférence des présidents d’université) et l’ADBU (Association des directeurs de bibliothèque universitaire), constatant que la France était est l’un des rares pays européens à ne pas l’avoir retenue dans son projet de loi, redoutaient que cette législation n’aboutisse à une domination accrue de la littérature de langue anglaise déjà majoritaire parmi les ressources d’information disponibles en ligne, notre seule référence devenant Google et nos seules sources étant les données anglo-saxonnes.

Un amendement adopté lors du débat de 2006, applicable en 2009 (CPI L122-5 3-e), définit l’exception pédagogique comme : « La représentation ou la reproduction de courtes œuvres ou d’extraits d’œuvres, autres que des œuvres elles-mêmes conçues à des fins pédagogiques, à des fins exclusives d’illustration ou d’analyse dans le cadre de l’enseignement et de la recherche, à l’exclusion de toute activité ludique ou récréative, et sous réserve que le public auquel elles sont destinées soit strictement circonscrit au cercle des élèves, étudiants, enseignants et chercheurs directement concernés, que leur utilisation ne donne lieu à aucune exploitation commerciale, et qu’elle soit compensée par une rémunération négociée sur une base forfaitaire nonobstant la cession du droit de reproduction par reprographie mentionnée à l’article L. 122-10 ». Il comporte des aspects restrictifs. Le rendez-vous de 2009 est important.

Un usage loyal

Pierre-Yves Gosset, délégué de Framasoft, se prononce pour un système de fair use à l’américaine. Aux États-Unis, le fair use, (usage loyal, ou usage raisonnable, ou usage acceptable) est un ensemble de règles de droit, d’origine législative et jurisprudentielle, qui apportent des limitations et des exceptions aux droits exclusifs de l’auteur sur son œuvre (copyright). Il essaie de prendre en compte à la fois les intérêts des bénéficiaires des copy – rights et l’intérêt public, pour la distribution de travaux créatifs, en autorisant certains usages qui seraient, autrement, considérés comme illégaux. Des dispositions similaires existent également dans beaucoup d’autres pays.

Les critères actuels du fair use aux États-Unis sont énoncés au titre 17 du code des États-Unis, section 107 (limitations des droits exclusifs : usage loyal (fair use) : « Nonobstant les dispositions des sections 106 et 106A, l’usage loyal d’une oeuvre protégée, y compris des usages tels la reproduction par copie, l’enregistrement audiovisuel ou quelque autre moyen prévu par cette section, à des fins telles que la critique, le commentaire, l’information journalistique, l’enseignement (y compris des copies multiples à destination d’une classe), les études universitaires et la recherche, ne constitue pas une violation des droits d’auteur. Pour déterminer si l’usage particulier qui serait fait d’une œuvre constitue un usage loyal, les éléments à considérer comprendront : l’objectif et la nature de l’usage, notamment s’il est de nature commerciale ou éducative et sans but lucratif ; la nature de l’œuvre protégée ; la quantité et l’importance de la partie utilisée en rapport à l’ensemble de l’œuvre protégée ; les conséquences de cet usage sur le marché potentiel ou sur la valeur de l’œuvre protégée. Le fait qu’une œuvre ne soit pas publiée ne constitue pas en soi un obstacle à ce que son usage soit loyal s’il apparaît tel au vu de l’ensemble des critères précédents ». « L’originalité du fair use par rapport aux doctrines comparables est l’absence de limites précises aux droits ouverts : alors que les autres pays définissent assez précisément ce qui est autorisé, le droit des États-Unis donne seulement des critères (factors) que les tribunaux doivent apprécier et pondérer pour décider si un usage est effectivement loyal. Par conséquent, le fair use tend à couvrir plus d’usages que n’en autorisent les autres systèmes, mais au prix d’un plus grand risque juridique. »

De la propriété à l’accès ?

Lors des Rencontres de l’Orme 2008, Frédérique Muscinési, médiatrice culturelle, a risqué le débat : « Aujourd’hui, l’intermédiaire ne peut plus constituer l’agent de la culture établie, ni du discours officiel. Il doit réfléchir, à l’heure des nouvelles technologies et de la substitution progressive de la propriété par la notion d’accès, à son rôle dans le cadre d’une probable et enfin réalisable démocratisation de la culture, non de sa consommation que son propre rôle antérieur rendait impossible ou invalidait, mais de sa création. » Elle a rappelé que « l’imitation et la modification sont à la base de la création entendue comme mémoire et transmission, puisqu’elles sont le moteur de l’apprentissage, processus ou objet même de la création ».

En conséquence, la propriété intellectuelle appliquée aux objets ou aux expériences artistiques, a passé d’être un appui aux auteurs à celui des industries culturelles qui, restreignant l’accès à l’objet de création, restreignent par là même ses possibilités. Culture et éducation cheminent ensemble, c’est bien connu…

Notes

[1] Crédit photo : Mr. Theklan (Creative Commons By-Sa)

[2] Les manuels scolaires : histoire et actualité, Alain Choppin, INRP, Hachette 1992

[3] « L’édition scolaire au temps du numérique », Jean-Pierre Archambault, Médialog n° 41

[4] Les turbulences de l’édition scolaire, Jean-Pierre Archambault, colloque SIF « Les institutions éducatives face au numérique », organisé par la Maison des Sciences de l’Homme de Paris-Nord, Paris les 12 et 13 décembre 2005

[5] Sur le blog du CNS (Canal numérique des savoirs), Laurent Catach (dictionnaires Le Robert) propose à ses collègues des voies de sortie des turbulences, leur demandant de se montrer optimistes : «  Éditeurs, ayez confiance, le web est une formidable opportunité, comme sans doute il n’en arrive que tous les quelques siècles… ». Il s’emploie à les rassurer : « Il est en effet logique et inévitable que plus la quantité d’informations augmente plus on a besoin de la hiérarchiser, de la filtrer, de la commenter, de l’animer et de la fédérer. Comment par exemple feront les élèves pour se repérer et trouver une juste information dans les 15 millions de livres numérisés de Google ? ». Il voit « se profiler un véritable eldorado éditorial ! ». Il met les points sur les i : « Nous avons à notre disposition un matériau informationnel extraordinaire (toute la richesse du web) à mettre en forme et à mettre en scène. Et l’information et sa mise en scène, n’est-ce pas là très précisément notre métier ?… La question n’est donc pas de savoir si les éditeurs scolaires ont un rôle à jouer sur le web : c’est une évidence. Et c’est même leur responsabilité vis-à-vis des jeunes générations de ne pas laisser les élèves se débrouiller tous seuls avec Internet. La seule et unique question est de savoir comment ils seront rémunérés. »

[6] Squeak – Hilaire Fernandes, « Squeak, un outil pour modéliser », EpiNet n° 86

[7] Abuledu

[8] Voir Wikipédia, notamment un « Wikipédia éducatif » et « Wikipédia : la rejeter ou la domestiquer », Éric Bruillard, Médialog n° 61

[9] Pour l’éducation voir « Les logiciels libres dans le système éducatif », Jean-Pierre Archambault et « Favoriser l’essor du libre à l’École », Jean-Pierre Archambault, Médialog n° 66

[10] Voir le Livre blanc sur les modèles économiques du libre, publié par l’April et Rapport du CSPLA (Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique) sur la diffusion ouverte des oeuvres de l’esprit

[11] Voir note 8, le Livre blanc sur les modèles économiques du libre, publié par l’April

[12] « Naissance d’un droit d’auteur en kit ? », Jean-Pierre Archambault, Médialog n° 55 et « Les licences Creative Commons dans le paysage éducatif de l’édition… rêve ou réalité ? », réflexions de Michèle Drechsler

[13] Arsmusicae Site d’information sur l’exception pédagogique pour l’enseignement et la recherche




Quand le Cned confond formation bureautique avec formation Microsoft

Sailor Coruscant - CC byNous sommes en mars 2009. Vous êtes un organisme public souhaitant offrir à son personnel une formation bureautique à distance. Comment vous y prendriez-vous ?

On pourrait définir et présenter les différentes fonctionnalités du traitement de texte, du tableur, du logiciel de présentation. Puis insister sur l’importance d’utiliser des formats ouverts. Et illustrer le tout avec des logiciels libres disponibles gratuitement pour tous les systèmes d’exploitation, comme la suite OpenOffice.org (qui a justement la bonne idée de produire un format ouvert, l’Open Document)[1].

Ce n’est visiblement pas l’option retenue par le Centre national d’enseignement à distance (plus connu sous l’acronyme Cned), dont l’un des enseignants à qui s’adresse cette formation, nous a fait parvenir le courriel suivant (c’est moi qui souligne) :

From: XXX
Date: 17 mars 2009
Subject: Formation bureautique à distance

Mesdames, Messieurs,

Dans le cadre de la mise en œuvre du plan de formation 2008/2011 de l’établissement, la Direction des ressources humaines de la Direction générale procède au recensement des besoins en formation bureautique à distance.

Vous avez la possibilité de suivre une formation aux logiciels Microsoft Outlook, Word, Excel et PowerPoint en ligne ou par le biais d’un CD-Rom.

Vous trouverez dans le document joint « organisation des formations » les différentes modalités des formations, des versions, en ligne ou sur CD-Rom.

Si vous êtes intéressé par l’une de ces formules, vous voudrez bien renseigner le formulaire joint et le renvoyer avant le 15 avril 2009, auprès de votre institut de rattachement.

La Direction des ressources humaines reste à votre disposition pour tout renseignement complémentaire.

Cordialement,

XXX
Direction des ressources humaines
Cned – Direction générale

Ce mail était donc accompagné d’une pièce-jointe au format .doc où l’on peut lire explicitement les informations suivantes :

  • « Pendant votre formation, vous travaillez directement dans l’environnement Microsoft correspondant au logiciel étudié. »
  • « Les formations ne sont pas compatibles Mac et Linux. »
  • « Formation demandée (2 au maximum) : Word – Excel – PowerPoint – Outlook. »

Pour rappel, il s’agit d’un « plan de formation 2008/2011 »…

On pourra toujours m’objecter que le Cned ne fait que s’adapter à la demande puisque tous ses enseignants travaillent sur la suite Microsoft Office. D’abord cela reste à prouver mais admettons que ce soit bien le cas (n’oublions pas qu’il y a une véritable machine de guerre économique déployée dans les coulisses pour qu’il en soit ainsi). Est-ce une raison suffisante pour ne pas adopter et faire adopter de bonnes pratiques, surtout lorsque l’on se définie comme une institution éducative de formation ?

Pensez une seconde aux conseils que ces enseignants ainsi « formés » prodigueront aux élèves dont ils ont la charge à distance ! Vont-ils eux aussi confondre « Word » avec « traitement de texte » ? Qu’adviendra-t-il lorsqu’ils recevront un fichier .doc ? Et bonjour le fracture numérique, puisque tous ces élèves n’ont pas forcément l’OS Windows et la suite MS Office (dûment achetés) à disposition !

La noble mission de service public du Cned ne doit pas s’arrêter aux portes de la formation numérique.

Notes

[1] Crédit photo : Sailor Coruscant (Creative Commons By)




Désobéissance civile en vue à l’école ?

ComputerHotline - CC by-saJusqu’où va-t-on descendre ? C’est la question que l’on peut légitimement se poser avec cette loi Création et Internet qui, chaque jour passant, l’éloigne de la solution et la rapproche du problème.

Dans la famille déjà nombreuse des effets collatéraux néfastes du projet de loi, je demande désormais… l’éducation.

Lors d’un récent communiqué, L’April s’était fort justement inquiétée d’un article introduit au Sénat prévoyant que élèves « reçoivent une information, notamment dans le cadre du brevet informatique et internet des collégiens (B2i), sur les risques liés aux usages des services de communication au public en ligne, sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles pour la création artistique, ainsi que sur les sanctions encourues en cas de manquement à l’obligation définie à l’article L. 336-3 du code de la propriété intellectuelle et de délit de contrefaçon. Les enseignants sont également sensibilisés. »

Commentaires de l’April :

Les promoteurs du projet de loi Hadopi affichent une ambition d’instaurer de nouvelles formes de soutien aux artistes et de nouveaux modèles économiques pour revivifier la filière culturelle. Pourtant, ils occultent purement et simplement la libre diffusion des contenus et œuvres sous licences ouvertes et libres, alors qu’ils constituent une offre légale abondante pour le public3 donnant lieu à une rémunération de leurs auteurs.

Ces licences sont un outil adéquat du partage de la connaissance et des savoirs, et se montrent particulièrement adaptées au monde de l’éducation. Inspirées du mouvement pour le logiciel libre, les licences d’œuvres en partage ouvrent de nouveaux modèles économiques en phase avec les nouvelles technologies.

Et de citer alors deux articles du Framablog : l’étude riche d’enseignements du cas musical Trent Reznor, et la situation un peu ubuesque dans laquelle se retrouve les enseignants lorsqu’ils utilisent des « œuvres protégées » (non copyleft) en situation d’apprentissage.

Les craintes de l’April étaient malheureusement bien fondées puisqu’aujourd’hui l’Assemblée a ni plus ni moins rejeté un amendement de pur bon sens de Martine Billard souhaitant, dans un souci de « pluralisme et neutralité » que l’article en question évoque également « les avantages pour la création artistique du téléchargement et de la mise à disposition licites des contenus et œuvres sous licences ouvertes ou libres » (pour plus de détails lire l’article de Guillaume Champeau reproduit ci-dessous ainsi que la transcription exacte de l’échange sur le site de l’April).

Comme quoi certains masques tombent définitivement.

C’est d’autant plus inepte que ces licences ouvertes ou libres seront, ma main à couper, l’une des prochaines révolutions scolaires, non plus restreintes à la création artistique mais à tout ce qui touche aux ressources éducatives.

Par anticipation, je m’engage d’ores et déjà à faire acte de « désobéissance civile » lorsqu’arrivera le temps où mes élèves seront censés recevoir l’information en question dans le cadre du B2i[1]. Cette information sera bien diffusée mais elle sera immanquablement accompagnée d’une sensibilisation aux licences libres et ouvertes et d’un débat sur les tenants et aboutissants des uns et des autres.

Gageons alors que mes élèves sauront en tirer leurs propres conclusions…

PS : Qu’il me soit d’ailleurs permis de remercier ici le travail respectivement politique et médiatique de Martine Billard et Guillaume Champeau, qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour nous alerter et tenter de faire évoluer la situation.

Pas de licence libre dans la propagande pro-majors à l’école

URL d’origine du document

Guillaume Champeau – 2 avril 2009 – Numerama
Article diffusé sous licence Creative Common by-nc-nd 2.0

Pouvait-on faire plus caricatural pour démontrer que la lutte contre le piratage n’a pas pour but d’aider les artistes, mais d’imposer un modèle économique au bénéfice des grandes maisons de disques ?

Le projet de loi Création et Internet prévoit de sanctionner par un diplôme au collège la connaissance des « risques liés aux usages des services de communication au public en ligne, sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles pour la création artistique, ainsi que sur les sanctions encourues en cas de téléchargement illégal ». Pour préparer ce diplôme, la commission des affaires culturelles a proposé d’ajouter un amendement qui prévoit que les élèves reçoivent une « information sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles pour la création artistique ».

Dans le but d’équilibrer la proposition, la députée Verts Martine Billard a alors proposé jeudi de préciser que cette information doit être « neutre et pluraliste », et couvrir notamment « les avantages pour la création artistique du téléchargement et de la mise à disposition licites des contenus et œuvres sous licences ouvertes ou libres », c’est-à-dire en particulier des œuvres sous Creative Commons.

Mais malgré le soutien de Muriel Marland-Militello, l’amendement de Martine Billard a été rejeté par la majorité. « Ça n’est vraiment pas du niveau de la loi, ça n’est vraiment pas nécessaire, au mieux ça sera une directive du ministère », a expliqué le rapporteur Frank Riester, comme si la propagande sur le téléchargement « légal » ne pouvait pas lui aussi faire l’objet d’une simple directive ou avait davantage sa place dans la loi. « Même position », dira simplement Christine Albanel. Sans protestation des bancs socialistes.

Notes

[1] Crédit photo : ComputerHotline (Creative Commons By-Sa) – Mais qui donc inscrit le nom de « La Quadrature du Net » au tableau ?




Google attendra pour attirer nos enfants dans sa Toile

Kit Pédagogique - Extrait - Google - ChercheNet« On souhaite que les élèves soient initiés à Internet le plus tôt possible pour apprendre la maîtrise de ses risques et de ses dérives (…) Ce travail de sensibilisation est absolument indispensable. »

C’est, d’après l’AFP, ce qu’a déclaré le ministre Xavier Darcos, le 24 mars dernier, en visite au collège Françoise-Giroud de Vincennes lors du lancement officiel du jeu « ChercheNet », destiné aux collégiens français.

Et si les « risques » et les « dérives » se cachaient jusqu’à l’intérieur même de cette initiative censée « apprendre à les maitriser » ?

C’est la question que pose ce billet d’un blog qui critique assez souvent la forte influence de Microsoft à l’Éducation Nationale pour ne pas s’émouvoir ce qui vient de se produire ici avec l’un de ses principaux concurrents, à savoir Google.

Une louable intention

Voici comment le jeu « ChercheNet » est présenté sur le site du ministère :

Afin d’aider les élèves à maîtriser Internet et les outils de communication numérique en toute sécurité, le ministère de l’Éducation nationale soutient le jeu « ChercheNet » initié par Google et mis en œuvre par Calysto, spécialiste de la pédagogie Internet en milieu scolaire. « ChercheNet » est un concours pédagogique proposé aux collégiens de sixième et de cinquième dont le terrain de jeu est l’internet. Tout en résolvant des énigmes autour du thème de l’écologie et du développement durable, les collégiens apprendront les bons usages des outils du web 2.0.

Retenons déjà, la nuance a son importance, que c’est le ministère qui « soutient ce jeu initié par Google » et non l’inverse.

Toujours est-il que l’intention est louable, surtout si l’on s’en réfère au communiqué de presse commun à Google et Calysto :

La recherche d’information et la communication avec les réseaux sociaux sont les deux usages les plus répandus sur Internet. Le développement du « web 2.0 » a permis aux internautes, y compris les plus jeunes, de devenir eux-mêmes des créateurs de contenu. L’usage d’Internet est aujourd’hui généralisé à tous les publics, ce qui implique que nous soyons mieux formés à ses usages.
C’est dans ce but précis que le jeu pédagogique ChercheNet a été conçu : développer par le jeu une vigilance collective (professeurs, parents, élèves) sur tous les usages d’internet pour un développement durable d’Internet.

Le jeu fonctionne sur le principe d’un jeu-concours. Les élèves devront répondre à une série d’énigmes sur le développement durable (biodiversité, eau, énergie, déchets, etc.)

Les différentes étapes du jeu amènent les élèves à développer un comportement « web-citoyen » pour rédiger un blog collectif :
— Préparer un travail, une recherche sur Internet, en respectant les droits de propriété intellectuelle
— Rechercher efficacement en vérifiant les sources d’information
— Apprendre à protéger sa vie privée et celle des autres sur les réseaux sociaux ou les blogs
— Apprendre à s’appliquer, à rédiger, « même sur Internet » et mettre de côté le « langage SMS »

Difficile de ne pas agréer à la démarche. On notera que l’on entrechoque le développement durable en tant que tel avec un « développement durable d’Internet » qui reste à définir.

Sur le jeu proprement dit, je n’ai aucune information à vous apporter puisqu’il faut s’inscrire et que les premières énigmes arriveront courant avril. Il en va autrement pour le « Kit pédagogique » accompagnant ce jeu, mis initialement à disposition sur le site de l’opération par Calysto et… retiré aussitôt après dans la foulée !

Un très éphémère « Kit pédagogique » !

ChercheNet - Copie d'écranPas plus tard qu’il y a deux jours, lorsque vous vous rendiez sur le page « Pour vous aider » du site « Cherchenet », vous aviez la possibilité de télécharger un « Kit pédagogique » ainsi défini (voir la copie d’écran que nous avons conservé en cliquant sur l’image ci-contre) : « Véritable mode d’emploi des outils du numérique, vos élèves en auront besoin pour résoudre les énigmes en respectant les règles et usages liés à l’Internet. »

Aujourd’hui sur la même page, il n’y a plus rien à télécharger directement. Le « Kit pédagogique » a fait place à un « Kit pratique d’outils numériques » et sa formulation est elle aussi sensiblement différente : « Véritable mode d’emploi d’outils du numérique (recherche, géolocalisation,…), vous pourrez l’utiliser afin que vos élèves apprennent quelques astuces pour mieux se servir d’outils du web et pour mieux respecter les règles et usages liés à l’Internet. Le kit pratique est disponible et vous sera envoyé par courriel par simple demande adressée à… »

Il n’est plus question de mise à disposition d’un Kit qui a perdu son qualificatif « pédagogique ». Les élèves n’en ont d’ailleurs plus « besoin », tout au plus son remplaçant pourra leur faire apprendre « quelques astuces »… Une posture plus modeste est soudainement adoptée.

Mais que contenait donc ce « Kit pédagogique » pour mériter une si courte apparition publique ?

« Kit pédagogique » ou « Google everywhere » ?

Kit Pédagogique - Sommaire - Google - ChercheNetNous avons juste eu le temps de conserver une copie du fameux document. Et nous vous invitons à en parcourir sa dizaine de pages pour… tout de suite comprendre où le bât blesse !

Le sommaire nous avait prévenu (image ci-contre cliquable), mais moteur de recherche (simple ou avancé), moteur d’images, Google Maps, Google Earth, Picasa, Google Traduction, Google Document, Google Agenda, Blogger… n’en jetez plus. C’est pas compliqué, il n’y en a que pour Google dont quasiment toute la panoplie est passée en revue !

À la trappe les réseaux sociaux web 2.0 de type Facebook, les blogs a la sauce Skyblog, les outils de travail en ligne comme tels ceux de Windows Live, sans oublier ce drôle de site souvent utile en situation de recherche qu’est Wikipédia. Et pour l’anecdote, toutes les copies d’écran ont été réalisées sous Mac OS X.

Il y a bien sûr de pertinents et bienvenus conseils qui parsèment le Kit (avec mention, page 7, des licences Creative Commons et Art Libre) mais impossible de se décoller de l’impression générale tenace d’avoir à faire à une sorte de publi-information de Google.

Et mis à part le moteur de recherche, que faut-il faire pour bénéficier de tous ces merveilleux services ? Je vous le donne en mille, il faut posséder un compte Google, ce qui est bien spécifié en page 8 du kit :

Google ce n’est pas seulement un moteur de recherche, tu peux accéder aussi à pleins de services gratuits : tu peux localiser un lieu sur une carte, retoucher des photos, envoyer des mails, gérer ton emploi du temps… Si tu veux utiliser ces outils, c’est gratuit, simple et rapide ! Un seul compte te permettra d’accéder à tous les outils Google. Tu dois remplir le formulaire en suivant les instructions et cliquer sur le bouton « j’accepte créer un compte ».

Un mail te sera envoyé à l’adresse spécifiée lors de la création de ton compte. Pour valider ton inscription, tu devras cliquer sur le lien présent dans ce mail.

Rappelons-nous le libellé initial du Kit sur le site ChercheNet : « Véritable mode d’emploi des outils du numérique, vos élèves en auront besoin pour résoudre les énigmes en respectant les règles et usages liés à l’Internet. » Je me demande si il n’aurait pas été plus sincère de dire « Véritable mode d’emploi des outils Google, vos élèves auront besoin d’un compte Google pour résoudre les énigmes en respectant les règles et usages liés à l’Internet. ». C’eut été plus sincère mais plus problématique et surtout moins… pédagogique !

Et le problème c’est que l’emprise de Google sur le réseau est telle que l’entreprise est parfois surnommée le « Big Brother d’Internet », en référence au fait qu’elle possède de très nombreuses informations personnelles sur nos comportements numériques, informations décuplées à partir du moment où vous prenez un compte chez eux justement.

Du coup il y a un léger paradoxe à vouloir sensibiliser nos jeunes à « développer une vigilance collective » et « apprendre à protéger sa vie privée » (via un jeu « web-citoyen » soutenu par le ministère), tout en incitant plus que fortement à se créer un compte chez Google !

Google s’en défend ainsi dans les colonnes du Monde : « C’est le constat d’une réalité : nos outils sont les plus utilisés. Nous prenons nos responsabilités pour que leur usage soit sans risque et responsable. Si nous ne faisions rien à ce propos, on nous critiquerait. » Ce n’est pas autrement que s’exprimerait un Thierry de Vulpillières pour justifier de l‘activisme de Microsoft à l’école.

Et pour ce qui concerne Calysto, dans les mêmes colonnes : « Les outils sont libres, Google n’est qu’un simple sponsor. » Ben dites-moi… curieux de savoir ce que cela aurait bien pu donner si Google avait été plus qu’un « simple sponsor » ! On dirait le Café Pédagogique nous expliquant d’aplomb que Microsoft n’est qu’un simple sponsor de leur Forum des enseignants innovants.

Quant aux outils qui seraient « libres », c’est justement l’objet du prochain paragraphe.

Et le logiciel libre dans tout ça ?

Kit Pédagogique - Picasa - Google - ChercheNetJe ne sais pas très bien ce que Calysto entend par « outils libres » mais je n’ai pas été tout à fait honnête lorsque j’ai pu dire plus haut qu’il n’y en avait que pour Google.

En effet, on trouve trace du logiciel libre dans le « Kit pédagogique ». Mais réelle volonté de le promouvoir au sein de l’Éducation Nationale ou alibi pratique pour faire passer la pilule ? Les deux mon Capitaine. Un peu comme, chose curieuse, la politique globale et générale de Google vis-à-vis de « l’Open Source »…

Les premières (et sibyllines) références arrivent page 12/13 et 18/19. La page 12/13 est complètement dédiée au logiciel de retouche d’image Picasa. Mais tout en bas, on peut lire (avec la loupe qui nous accompagne dans tout le Kit) la chose suivante : « Logiciels libres : Gimb, Artweaver ». Et… c’est tout ! Aucune explication, aucun lien cliquable, bref cela arrive comme un cheveu sur la soupe. Et puis, pour votre gouverne, on ne dit pas « Gimb » mais GIMP, tandis que Artweaver est sûrement un bon logiciel mais il n’est tout simplement pas libre.

Kit Pédagogique - Logiciel Libre - Google - ChercheNetRebelote en page 18/19 entièrement consacrée au moteur de blog Blogger, avec un « Logiciels libres : Dot clear, WordPress… ». C’est mieux cette fois-ci mais on n’arrive toujours pas à atteindre la perfection puisqu’on écrit Dotclear et non « Dot clear » 😉

Dans le même style minimaliste, on aurait pu s’attendre à ce que la suite bureautique libre OpenOffice.org soit évoquée en bas de l’article sur Google Document (page 15/16). Une autre fois sans doute.

Mais il y a surtout la totalité de la page 20 titrée « Qu’est-ce qu’un logiciel libre ? ». Il s’agit certes de la dernière page du Kit mais il y a de quoi se réjouir a priori. Sauf que la teneur de l’exposé m’a laissé parfois un peu perplexe, quand bien même nous connaissons tous la difficulté à vulgariser la notion de logiciel libre.

Pour comprendre ce qu’est un logiciel libre, il te faut avant tout connaître la signification du terme logiciel ; il s’agit d’un ensemble de programmes qui permet d’effectuer une tache particulière (par exemple le traitement de texte, la retouche de photo, …). Les logiciels sont soumis à des licences d’utilisation, qu’il faut très souvent acheter.

L’expression « logiciel libre », traduite de l’anglais free software, fait référence à la « liberté d’expression » et non pas au prix. C’est pourquoi ils sont souvent téléchargeables gratuitement sur l’Internet et peuvent être copiés légalement par tous.
Le logiciel libre s’oppose au logiciel dit propriétaire, qui ne fournit pas les éléments pour le modiier et ne permet pas de le partager. En revanche, le logiciel libre garantit un certain nombre de libertés à ses utilisateurs : la liberté de l’utiliser pour quelque usage que ce soit, celle d’en redistribuer des copies et enfin la liberté de le modifier et de rendre publiques les modifications.

Soit. C’est un peu emberlificoté tout ça (et c’est plutôt dommage de passer sous silence l’aspect mouvement social du logiciel libre, cher à Richard Stallman) mais ça se termine plutôt bien. Quant à la suite, attention, c’est un beau nid de trolls :

Quels sont les autres avantages d’un logiciel libre ?

Il est plus fiable car moins vulnérable aux virus et aux failles de sécurité. En effet, comme beaucoup de monde a accès à ce type de logiciel, les erreurs sont corrigées plus vite ! De plus ils produisent des fichiers dans des formats dits ouverts, utilisables plus longtemps qu’avec des formats fermés, et sont moins gourmands en énergie et en ressources pour ton ordinateur que leurs équivalents propriétaires.

Je suis bien entendu plutôt d’accord mais comme dirait Wikipédia : « référence demandées ». C’est un peu brutal et péremptoire de présenter les choses ainsi. Les défenseurs du logiciel propriétaire apprécieront !

Et puis, si ces logiciels libres ont tant de vertus, pourquoi Google ne s’est-il pas donné la peine de « libérer » Picasa et Blogger au moment de leur rachat ?

On notera que ce texte porte en quelque sorte la « caution » de Frédéric Couchet de l’April puisqu’on le remercie personnellement en bas de page (je l’attends dans les commentaires !). On notera enfin que Framasoft est également cité, avec là encore une URL explicite mais non cliquable.

Où les trouver ?

Tu peux télécharger de nombreux logiciels libres sur www.framasoft.net, un des annuaires les plus complets de logiciels compatibles avec les PC. Mais tu peux aussi les acheter dans certains grands magasins !

Vous nous voyez fiers et honorés, mais j’ai un peu de mal à m’imaginer un élève de sixième cinquième se rendre sur Framasoft à la suite de la lecture de ce Kit. Tout comme j’ai du mal à m’imaginer ce que l’élève et son professeur pourront bien retenir du logiciel libre au sortir du Kit.

Et plus généralement j’ai un peu de mal à faire la corrélation directe entre le contenu du Kit et sa présentation (que je rappelle une dernière fois) : « Véritable mode d’emploi des outils du numérique, vos élèves en auront besoin pour résoudre les énigmes en respectant les règles et usages liés à l’Internet. »

Quelles que soient les qualités des services de la société américaine (j’en consomme abondamment), c’est bien plus d’un « Kit Google » que d’un « Kit pédagogique » dont il s’agit ici.

Voilà une étonnante maladresse de la part d’un Calysto (qui se targue d’être un « spécialiste de la pédagogie Internet en milieu scolaire ») mais surtout d’un Google qui nous avait habitué à un marketing moins trivial. Ont-ils vraiment pensé que ce Kit allait tranquillement passer comme une lettre à la poste ? Bien que ce ne fut heureusement pas le cas ici, cela en dit long sur l’état actuel de notre passivité vis-à-vis de la marchandisation de l’école.

Un ministère embarrassé (mais réactif)

On comprendra alors fort bien que lorsque le ministère s’est penché sur ce Kit (aidé en cela par les premiers articles parus dans la presse comme celui du Monde) il ait vraisemblablement un peu « tiqué », quand bien même au départ il affirmait serein que « s’il était obligatoire d’utiliser Google, il n’aurait pas autorisé l’opération » (même source). Soutien à un projet pour « apprendre à maîtriser Internet et les outils du numérique », oui. Soutien aux services Google aboutissant à la création de comptes Google en masse chez les 11/12 ans, non. D’autant plus que Xavier Darcos en personne s’est déplacé pour inaugurer le projet !

Premier petit aparté.
Il faut dire aussi que si le ministère avait été réellement capable de nous offrir des ENT cohérents et mutualisés dignes de ce nom, les élèves auraient certainement moins « besoin » d’utiliser les services Google (à commencer par le très riche Google Apps Education).
Fin du premier petit aparté.

Second petit aparté.
Et si le ministère faisait confiance aux enseignants pour produire ce genre de supports plutôt que confier cela à une société commerciale « spécialiste de la pédagogie Internet en milieu scolaire » ? On mesure ici le haut degré de confiance accordé à son personnel dont c’est pourtant le métier !
Fin du second petit aparté.

Toujours est-il que Calysto et Google France ont dû se faire gentiment tirer les oreilles, avec pour conséquence la réactualisation de notre article du Monde :

Le mardi 23 mars, le ministère de l’Éducation a demandé à son partenaire de retirer le kit pédagogique du jeu ChercheNet. Le ministère a expliqué "ne pas souhaiter que Google soit aussi fortement mis en avant sur ce document destiné aux professeurs et aux élèves". Un nouveau livret sera mis en ligne prochainement.

Prière de revoir sa copie donc, ce qui apparaît être une sage décision.

Nous attendons avec impatience la deuxième version revue et corrigée, et Framasoft se tient à l’entière disposition de Calysto et Google France si jamais ils souhaitent nous impliquer dans cette nouvelle mouture (pourquoi pas, après tout, puisque nous y sommes nous aussi dans ce premier Kit).

Money, money, money !

Sage décision donc, mais qui ne doit pas occulter le rôle et la responsabilité du ministère dans toute cette petite affaire (source ReadWriteWeb) :

Éduquer au plus vite au « réflexe » Google, c’est pouvoir être sûr de garder 70% de part de marché mondiales et donc continuer à faire tourner à fond la machine AdWords et AdSense. Tout cela parait de bonne guerre, mais pose question quand à la présente aussi forte d’une marque dans un programme pédagogique soutenu par l’Éducation Nationale.

Et surtout, interroge quant à la capacité de cette dernière à fournir des programmes sensibilisant aux nouvelles technologies en adéquation avec les besoins et savoirs des élèves. La vénérable institution serait-elle aussi dépassée sur ce point, quitte à devoir se raccrocher officiellement à une initiative extérieure ?

Un ministère qu’on aimerait voir faire preuve de la même promptitude vis-à-vis de l’entrisme de Microsoft à l’école (abondamment développé sur ce blog). Parce que c’est exactement la même logique qui opère lorsque sous couvert « d’accompagner l’initiation de vos élèves ou de vos enfants au B2i », on propose, sur un site du service public, des vidéos qui sont à la limite de la publicité déguisée pour la suite bureautique MS Office de Microsoft.

Hier Microsoft, aujourd’hui Google avec ce vrai faux « Kit pédagogique »… nous n’avons décidément pas fini de relater les relations complexes entre l’école et ces multinationales qui ne souhaitent que le bien de nos enfants (quand bien même il y ait étrangement à chaque fois des effets collatéraux bénéficiant au généreux sponsor).

Quant au logiciel libre, il n’est que trop rarement convié à la fête. Il faut dire que tant que l’époque privilégiera les fêtes privées et payantes, et ce jusqu’à l’intérieur même du sanctuaire scolaire, la situation n’aura guère de chance d’évoluer…




Open Education avec les professeurs Mozilla et Creative Commons

Lepiaf.geo - CC byVoici une excellente nouvelle (que vous ne trouverez pas dans le Café Pédagogique) : l’annonce d’un prochain séminaire de cours en ligne autour de « l’Open Education », réalisé conjointement par les deux poids lourds du « mouvement du Libre » que sont Mozilla et Creative Commons.

Ce concept « d’Open Education » demeure un peu flou (Wikipédia a encore du mal à le définir, c’est vous dire), mais ce sera justement l’occasion de le préciser. Disons qu’il regroupe non seulement les Ressources Éducatives Libres que la technologie associée (logiciels libres, formats ouverts…), sans oublier les modes collaboratifs de production.

Il sera destiné à tout éducateur intéressé par le sujet (c’est-à-dire dans quelques années à tout éducateur tout court). Le nombre de places est bien entendu limité mais les autres pourront accéder en temps réel aux cours dont, fallait-il le préciser, toutes les ressources seront placées sous licence libre (Creative Commons By)[1].

Pour ce qui me concerne, je suis ravi de trouver aussi Mozilla sur ce terrain-là. J’y vois en effet une piste plus qu’intéressante pour minimiser à terme l’influence trop forte de Microsoft dans le secteur éducatif, sachant que cette influence est beaucoup plus une question de mentalités, voire de culture, qu’une question pratique liée à la technique et au logiciel.

Mozilla et CreativeCommons vont donner des séminaires en ligne sur « l’Open Education »

Mozilla and CC to teach online seminar on open education

Jane Park – 17 mars 2009 – Creative Commons Blog
(Traduction Framalang : Don Rico)

ccLearn, en collaboration avec la Peer 2 Peer University et Mozilla, va former les enseignants, ou toute autre personne intéressée par l’initiative, sur les aspects pratiques de l’éducation ouverte (NdT : « open education »). Voici un extrait du wiki du stage :

« Ce stage de six semaines s’adresse aux enseignants, qui acquerront les compétences élémentaires en matière de licences, de technologie et de pédagogie ouvertes (NdT : « open pedagogy »). Ils travailleront sur des prototypes de projets d’éducation ouverte, et bénéficieront de l’expérience de certains des plus grands noms internationaux de l’innovation.

Le stage commencera par un séminaire en ligne le jeudi 2 avril et s’étalera sur 6 semaines.

Lors de séminaires en ligne hebdomadaires, on abordera de nouveaux sujets traitant par exemple du choix de licence pour les contenus, des dernières technologies ouvertes et des pratiques d’évaluation collégiale. Les participants partageront des idées de projets avec une communauté de pairs, travailleront sur des projets individuels, et recevront des retours de tuteurs chevronnés. On s’intéressa aussi de très près à certains des exemples de pédagogie ouverte les plus novateurs, et discutera avec leurs concepteurs. On étudiera par exemple :

  • Les cours sur les logiciels libres délivrés à l’université de Seneca ;
  • L’Introduction à la pédagogie ouverte de David Wiley ;
  • L’infrastructure de blog ouverte de l’université de Mary Washington ; etc.

Ce stage est destiné aux enseignants qui souhaitent contribuer à l’élaboration de l’enseignement ouvert de demain.

Vous désirez participer ? Rendez-vous sur le wiki du stage, et soumettez-nous vos idées de projets !

Descriptif du stage : https://wiki.mozilla.org/Education/EduCourse

Inscriptions : https://wiki.mozilla.org/Education/EduCourse/SignUp

Si vous avez des questions concernant le stage ou la procédure d’inscription, veuillez contacter :

Philipp Schmidt
Peer 2 Peer University
philipp AT peer2peeruniversity.org »

Les créneaux vont se remplir très vite, mais cela n’empêchera pas les non-inscrits de bénéficier d’un accès complet et ouvert au stage en temps réel. Et puisque les matériaux de Mozilla Education, mis à disposition sous licence CC BY, peuvent être réutilisés, redistribués et remixés, les utilisateurs sont libres de créer un wiki miroir et de mettre en place leurs propres projets.

Notes

[1] Crédit photo : Lepiaf.geo (Creative Commons By)




Étudiantes, étudiants : libérez vos travaux universitaires !

Foundphotoslj - CC byLe titre de ce billet est une suggestion et non une injonction. Il invite les étudiants à considérer la mise sous licence Creative Commons de leurs écrits universitaires (mémoires, thèses…) afin de faciliter le partage, l’échange et la mise en commun du savoir et de la connaissance.

Nous avions tenté en introduction d’un billet précédent d’expliquer la différence entre « copyleft » et « copyright ». Or, en l’absence de toute mention de licence, les travaux sont alors automatiquement placés par défaut sous le régime du « copyright classique », avec des effets collatéraux, comme ceux décrits ci-dessous, qui ne sont pas forcément désirés par leurs auteurs.

Étudiantes[1], étudiants, vous pouvez bien entendu refuser ce choix (par exemple parce que, modestes, vous ne jugez pas votre travail digne d’être diffusé). Mais encore faudrait-il que vous ayez conscience qu’un tel choix existe[2].

Les choses bougent mais, nous semble-t-il, encore trop rares sont les étudiants réellement au courant de cette alternative. Et nous comptons sur les enseignants et leurs administrations universitaires pour en faire si ce n’est la promotion tout de moins le minimum syndical en matière d’information.

Copyright et Copyleft dans les publications universitaires

Copyright and Copyleft in Publications

Ian Elwood – 17 février 2009 – The Daily Californian
(Traduction Framalang : Don Rico)

Creative Commons une alternative au traditionnel copyright ou la promotion d’un accès plus large à la connaissance

Le prix des recueils de textes et documents pour les cours d’université s’élève à 200 dollars à cause des coûts excessifs des autorisations de droits d’auteur. Les bibliothèques sont paralysées par les prix exorbitants des bases de données propriétaires et des revues à accès restreint. L’accès au savoir devient de plus en plus la chasse gardée de grosses entreprises qui cherchent à rentabiliser l’éducation en limitant l’accès à l’information.

À l’université de Californie, à Berkeley, nombreux sont les étudiants à ne pas se soucier de la propriété intellectuelle ou des droits d’auteur. Même si les travaux d’étudiants tels que les thèses ou les mémoires sont la propriété de l’étudiant, jusqu’à une période récente la mention de copyright standard sur un mémoire indiquait par défaut « Tous droits réservés ». Bien que cette pratique n’ait pas d’impact direct sur l’augmentation du coût des études, un étudiant qui choisirait une solution alternative au droit d’auteur traditionnel constituerait une action modeste pouvant servir de catalyseur à la réduction de nombreux coûts dans le domaine des études.

Lawrence Lessig, professeur de droit à l’université de Stanford, a créé les licences Creatives Commons afin que les détenteurs de droits d’auteur puissent autoriser de nouvelles façons d’utiliser leurs travaux artistiques et universitaires. Le détenteur d’un copyright peut opter pour une licence « Certains droits réservés » qui encourage les autres membres de la communauté à adapter et à réutiliser ses travaux sans avoir à demander l’autorisation ou verser des droits d’auteur. Cette licence ouvre de nombreuses possibilités dans le monde universitaire, tels que la mise à disposition de recueils de textes et documents en ligne gratuits, de contenu multimédia éducatif à coût nul, et de didacticiels en ligne gratuits. Même le prix des manuels scolaires pourrait en être fortement réduit. Plus important peut-être que l’aspect financier, utiliser la licence Creative Commons revient surtout, en partageant vos productions intellectuelles avec la communauté universitaire, à apporter votre pierre à la mise en commun du savoir, car les générations futures de chercheurs auront un accès facilité à vos travaux.

Deux étudiants de Berkeley, Joseph Lorenzo Hall et Danah Boyd, ont récemment placé leur mémoire sous une licence Creative Commons. Hall s’est heurté de nombreux obstacles bureaucratiques, mais la plupart de ses difficultés provenaient de simples problèmes formels, et non d’opposition idéologique de la part l’université. Peu après, une autre diplomée de la School of Information (NdT : faculté des Sciences de l’information), Danah Boyd, a elle aussi placé son mémoire sous licence Creative Commons.

Le 28 janvier 2009, le Doyen du département de troisième cycle s’est engagé à ce que les futurs étudiants puissent opter pour la licence Creative Commons. Tous les étudiants désireux de rendre l’éducation plus abordable et plus accessible devraient envisager de recourir aux Creative Commons plutôt qu’au copyright traditionnel.

Prendre part à ce mouvement est d’une simplicité enfantine : il suffit de procéder à deux modifications sur un mémoire ou sur une thèse. Tout d’abord, l’auteur inscrit « Certains droits réservés » au lieu de « Tous droits réservés » sur la page de copyright. Ensuite, il inclut en appendice le contrat complet (Code juridique) de la licence Creative Commons de son choix. Ceux qui souhaitent libérer leur publications universitaires peuvent voir des exemples sur les sites respectifs de Joseph Lorenzo Hall et Danah Boyd.

Notes

[1] Crédit photo : Foundphotoslj (Creative Commons By)

[2] Le choix ne se limite pas aux licences Creative Commons. Ne pas oublier qu’il existe également la Licence Art Libre qui, bien que peu diffusée dans le monde anglophone, est tout aussi indiquée dans le cas qui nous concerne ici.




Le plan britannique en faveur de l’Open Source sous l’angle de l’éducation

Arwen Abendstern - CC byLe gouvernement britannique affiche sa volonté de soutenir l’Open Source disions-nous tout récemment, au travers du prisme de la BBC, en évoquant l’annonce d’un plan d’action gouvernemental explicite et ambitieux.

En attendant la traduction du plan himself (qui ne saurait tarder), voici le point de vue du site OpenSourceSchools, dont nous avons eu l’occasion de dire tout le bien que nous en pensions dans un billet dédié[1].

L’égalité des chances pour le logiciel Open Source

A level playing field for open source software

MBerry – 25 février 2009 – OpenSourceSchools.org
(Traduction Framalang : Don Rico et Goofy)

Il faut saluer la décision du gouvernement d’encourager l’utilisation des logiciels libres, comme indiqué dans le communiqué publié hier. L’éducation au Royaume-Uni se déroulant principalement dans le secteur public, nous sommes en droit d’espérer que ce soutien du gouvernement central aura pour conséquence de donner aux établissements scolaires et aux collectivités locales la confiance nécessaire pour adopter, élaborer et développer des solutions Open Source, rendant ainsi possible la ré-utilisation et le partage des logiciels, et peut-être un jour les contenus, au sein des établissements scolaires et des collectivités locales.

L’introduction au document, signée par Tom Watson, ministre de l’Engagement numérique, décrit l’Open Source comme « une des avancées culturelles majeures de ces vingt dernières années dans le domaine des TIC et au-delà », et démontre que « tout un chacun, en travaillant de façon collaborative… peut concevoir des produits qui rivalisent et parfois surpassent ceux de gigantesques corporations ». La méthode collaborative pour le développement de projet logiciel est très proche de la pédagogie chère à de nombreux acteurs de l’éducation. Le ministre est résolu à faire en sorte que le secteur public soit doté des meilleures solutions pour le meilleur rapport qualité/prix. Dans ce document, on trouve des exemples de solutions Open Source employées par le gouvernement, tels qu’Apache et des infrastructures basées sur Linux, même si hélas Moodle n’est pas la plateforme d’apprentissage en ligne prédominante pour une grande partie du secteur éducatif, et notamment dans le supérieur.

Ce document souligne la nécessité de lancer des mesures concrètes pour s’assurer que l’on instaure « une égalité des chances véritable entre les logiciels libres et propriétaires et de démontrer en quoi le logiciel Open Source peut contribuer à des objectifs plus vastes de ré-utilisation et de standards ouverts ». Engagement est pris de faire en sorte que « les solutions Open Source soient étudiées comme il se doit et qu’elles soient retenues comme solutions professionnelles du gouvernement lorsqu’elles offrent le meilleur rapport qualité/prix (en prenant en compte d’autres avantages, telles que la réutilisation et la flexibilité) ». Pour les cas de figure où les coûts seraient identiques, le choix par défaut devra se porter sur les logiciels Open Source, en raison de la plus grande flexibilité qu’ils apportent.

Hélas, ce serait pécher par optimisme d’espérer que les mentions telles que « Lorsque ce choix se révélera judicieux, les logiciels d’application générale développés pour le gouvernement seront mis à disposition en tant que logiciels Open Source » s’appliqueront à la multitude de programmes éducatifs et administratifs développés pour les établissements financés par l’État, mais peut-être est-ce une règle qui devrait figurer dans les spécifications techniques pour les futures passations de marché ? En effet, le point 9 du Plan d’action indique qu’une clause standard devrait figurer dans les appels d’offre publiés au Journal officiel de l’Union européenne stipulant que « les solutions sont achetées dans l’optique de leur réutilisation possible dans d’autres branches du secteur public », et que le gouvernement a le droit de fournir le code de ces solutions suivant les principes de l’ Open Source.

L’association BSF (Building Schools for the Future) devrait approuver le point 5 du Plan d’action :

« Les administrations exigeront de leurs fournisseurs qu’ils prouvent leur capacité à proposer des solutions Open Source et qu’ils auront activement étudié la possibilité de recourir à des produits Open Source pour tout ou partie de leur offre commerciale… On accordera une attention particulière aux produits Open Source existants et ayant fait leurs preuves dans d’autres secteurs de l’État. Les fournisseurs qui proposeront des produits non Open Source devront apporter la preuve qu’ils ont soigneusement étudié des solutions alternatives Open Source et expliquer pourquoi celles-ci n’ont pas été retenues. »

Dans ce rapport, il est également beaucoup question des standards ouverts, et parmi ceux-ci du format ODF, utilisé dans OpenOffice.org, et nous pouvons donc nous montrer optimistes quant à la possibilité de voir des protocoles ouverts et standards employés dans le domaine des plateformes d’apprentissage en ligne, aussi bien selon les critères préconisés par le SIF (Schools Interoperability Framework) que de la prise en charge des standards pour le « curriculum mapping » (NdT : Les profils de programmes).

On y mentionne aussi que le choix de l’Open Source peut s’appliquer également au contenu, et fournir une nouvelle façon d’aborder la propriété intellectuelle. L’envie de « partager et réutiliser ce que le contribuable a déjà acheté via le secteur public » pourrait, en théorie du moins, s’appliquer aux ressources péddagogique comme par exemple pour ce qui concerne les cours disponibles sur Moodle élaborés par d’innombrables enseignants et équipes pédagogiques d’établissements publics.

Les diverses applications possibles des techniques de l’Open Source bénéficient d’une certaine reconnaissance, ce qui dans les établissements scolaires pourrait se traduire par une plus grande attention accordée à l’apprenant, et surtout une meilleure compréhension des apprenants, alors acteurs de l’élaboration de leur programme scolaire.

Notes

[1] Crédit photo : Arwen Abendstern (Creative Commons By)