Pas si FACIL pour Microsoft au Québec

Arturo de Albornoz - CC by-saPlus de dix millions de dollars attribués sans appels d’offres à Microsoft par l’administration québécoise principalement pour cause de… passage à Vista de ses postes informatiques, c’était sans compter sur l’association FACIL qui à juste titre ne l’entend pas de cette oreille et a déclenché la procédure juridique.

Tout ceci est très bien expliqué dans cette dépêche de LinuxFr. Je me suis juste permis d’y ajouter ci-dessous le tout frais petit extrait du journal télévisé local de Radio-Canada (ne serait-ce que parce que c’est pas tous les jours qu’on peut voir notre manchot préféré apparaitre ainsi à l’écran à côté du présentateur).

Cette scandaleuse malheureuse histoire m’a fait penser aux recommandations du rapport Becta (il n’est pas conseillé de migrer vers Windows Vista, les coûts sont importants et les bénéfices incertains, idem pour MS Office 2007 qui n’est pas capable en l’état d’offrir une convaincante interopérabilité, etc.). Elles étaient certes destinées au secteur éducatif mais elles demeurent selon moi pertinentes pour l’administration publique dans son ensemble[1].

Quoiqu’il en soit nous soutenons sans réserve la FACIL dans son initiative, quand bien même je ne puis m’empêcher de penser aux administrations de tous les pays qui n’ont pas de FACIL pour leur ouvrir les yeux.

Ceci dit il faut également reconnaître qu’il n’est pas toujours évident pour le logiciel libre d’apparaitre dans ces fameux appels d’offres des marchés publics si il n’est pas soutenu par des structures (le plus souvent des sociétés de services) qui soient capables de bien communiquer dessus et de monter des projets solides qui donnent confiance aux décideurs pressés. Mais heureusement expérience, maturité et, comme ici, activisme citoyen font évoluer favorablement une situation qui ne pourra plus se permettre de l’oublier.

Dans le communiqué de presse, reproduit ci-dessous, on remarquera qu’ils prennent exemple sur la situation de l’administration française. C’est un honneur mais même chez nous il reste encore beaucoup à faire notamment dans l’éducation.

—> La vidéo au format webm

URL d’origine du communiqué de presse

Montréal, le 28 août 2008 – FACIL, association à but non lucratif, qui prône l’appropriation collective de l’informatique libre, dénonce les pratiques d’achats de logiciels nécessaires à l’administration publique sans appel d’offres de la part du Gouvernement du Québec. FACIL a déposé une requête en Cour supérieure du Québec pour faire cesser ces agissements car elle considère ces pratiques comme contraire au Règlement sur les contrats d’approvisionnement, de construction et de services des ministères et des organismes publics (R.Q. c. A-6.01, r.0.03) et à l’intérêt du Québec.

Au Québec, l’accès aux marchés publics est la règle alors que l’attribution de contrat sans appel d’offres est l’exception. En principe, un marché doit être ouvert à tous, de manière transparente et équitable. Les solutions et les propositions déposées doivent être évaluées objectivement à partir de critères reconnus et acceptés de tous. De plus, la loi impose que les marchés publics doivent favoriser le développement économique local et les technologies québécoises.

FACIL a constaté que des contrats d’achats de logiciels qui totalisent plus de 25 millions de dollars durant la période de février à juin 2008, ont été obtenus par de grandes multinationales par avis d’attribution sans passer par le processus normal d’appel d’offres. Ces achats se font au détriment de l’industrie du service en logiciel basée sur le logiciel libre au Québec et sont un obstacle au développement des entreprises québécoises dans le secteur des technologies de l’information. FACIL dénonce cette façon de procéder qu’elle considère intolérable, illégale et contraire à l’intérêt de la société québécoise.

Une politique rigoureuse et déterminée d’utilisation de logiciels libres dans les administrations publiques permettrait la création de très nombreux emplois durables, ainsi que des économies substantielles en licences de logiciels et inutiles mises à jour. Cependant, trop souvent l’administration québécoise refuse d’envisager et même d’évaluer l’option du logiciel libre.

Alors que la plupart des pays industrialisés ont débuté, depuis plusieurs années, la migration de leurs infrastructures technologiques en utilisant des logiciels libres, l’administration publique québécoise accuse déjà un retard prononcé. Parmi de nombreux exemples, en France, des centaines de milliers de postes de travail de fonctionnaires migrent vers des logiciels libres et, au Pays-Bas, l’administration publique, l’une des plus modernes du monde, a décidé d’interdire l’utilisation de logiciels propriétaires dans le secteur public.

Malgré de nombreuses initiatives, et devant le refus de dialogue et de concertation des responsables de l’administration publique, FACIL a décidé d’en appeler à la justice afin d’exiger que la loi sur les marchés publics soit respectée par le Gouvernement.

Notes

[1] Crédit photo : Arturo de Albornoz (Creative Commons By-Sa)




Vista et MS Office 2007 – Rapport Becta – Extraits et Recommandations

Rapport Becta - CouvertureNous avons tout récemment mis en ligne notre traduction du Rapport Becta dont nous espérons beaucoup comme cela a été dit dans le billet de présentation.

Il ne s’agit nullement de faire une sorte de guerre à Microsoft aussi puérile que contre-productive. Il s’agit de faire en sorte que, comme en Grande-Bretagne, l’école française se pose de bonnes questions.

  • Mon établissement scolaire a-t-il réellement besoin de migrer vers Vista ? vers MS Office 2007 ?
  • Les coûts d’une telle opération seront-ils compensés par la qualité de ces nouveaux produits ? A l’échelle nationale, les coûts globaux d’une telle opération ne pourraient-ils pas être épargnés et affectés ailleurs ?
  • Un parc hétérogène Windows XP et Windows Vista ne va-t-il pas créer de la confusion chez mes utilisateurs ? ne va-t-il compliquer la tâche de l’administrateur du réseau ?
  • Si je me retrouve avec MS Office 2007, dois-je utiliser par défaut le nouveau format de Microsoft Open XML (OOXML) ?
  • Est-ce que tout a été fait pour garantir une bonne interopérabilité ? Est-ce je facilite la vie numérique de mes élèves dans leur liaison école/domicile ?
  • La collectivité territoriale qui me fournit en machines neuves a-t-elle prévue d’intégrer nativement une suite bureautique libre ? A-t-elle prévue que je puisse sans entraves lire et écrire par défaut au format OpenDocument ODF ?
  • Si Windows Vista et MS Office 2007 ne sont pas recommandés, n’est-il pas temps d’évaluer sérieusement si Linux (associé à OpenOffice.org) pourrait constituer une réelle alternative ?

Voici, entre autres, quelques question d’importance qu’aborde ce rapport.

Et pour vous en faire tout de suite une meilleure idée, et donner envie d’en savoir en plus en parcourant l’intégralité du rapport, nous vous proposons ci-dessous quelques extraits.

Rapport Becta - Recommandations

Les recommandations

p.18 – § 4.29 « Les nouvelles fonctions de Vista apportent une certaine valeur ajoutée mais, si l’on prend en compte les coûts de déploiement et les bénéfices potentiels, une mise à jour généralisée du parc informatique des écoles et des universités n’est pas recommandée. »

p.19 – § 4.31 « Le mélange des systèmes d’exploitation peut très bien se faire dans les écoles ou le réseau informatique fonctionne déjà avec plusieurs systèmes d’exploitation comme Windows, Mac et Linux quand cette mixité est adaptée. Nous recommandons cependant que les écoles et universités ayant un parc informatique cohérent sous Windows XP faisant l’acquisition de systèmes avec Vista préinstallé exercent, lorsque c’est possible, leur droit du choix du système d’exploitation et maintiennent la cohésion de leur installation avec Windows XP. »

p.20 – § 4.32 « Les écoles et les universités ne devraient envisager le passage à Vista seulement s’il est question d’installer un nouveau parc informatique complet et ne devraient pas envisager la mise à jour des systèmes existants ou faire cohabiter les deux environnements. »

p.21 – § 4.36 « Aucun déploiement de grande ampleur de Office 2007 ne devrait avoir lieu tant que les écoles et les universités ne sont pas certaines d’avoir mis en place tous les mécanismes permettant l’interopérabilité et permettant d’éviter toute fracture numérique possible comme celles citées plus tôt dans ce rapport. »

p.21 – § 4.37 « Les écoles et les universités qui envisagent le passage à Microsoft Office 2007 ne devrait le faire que dans un contexte de renouvellement complet pour n’utiliser qu’une seule version de la suite bureautique dans un établissement/environnement donné. »

p.35 – § 6.15 « Quand cela est possible, les écoles et les universités devraient s’assurer que les étudiants, les professeurs et les parents connaissent l’existence de l’ensemble des suites bureautiques "libres d’utilisation" disponibles, qu’ils savent comment se les procurer et comment les utiliser. Les écoles et les universités devraient configurer les outils de bureautique de manière à ne pas créer d’obstacles pour les élèves, les enseignants et les parents qui utilisent ces produits alternatifs (y compris les produits "libres d’utilisation") à domicile. »

p.36 – § 6.17 « Les entreprises des TIC devraient prendre les devants et configurer les produits qu’ils envoient aux écoles et aux universités pour faciliter l’accès à une suite bureautique « libres d’utilisation », idéalement une suite sous licence libre. Lors de l’achat de nouveaux systèmes, les écoles et les universités devraient normalement exiger qu’une suite bureautique capable d’ouvrir, d’éditer et de sauvegarder les documents au format standard international ODF soit installée et que ce format soit configuré par défaut. De tels produits devraient être choisis avec comme critère la possibilité pour les étudiants, les professeurs et les parents de s’en procurer une version sans avoir à payer de frais de licence supplémentaire. Les écoles et les universités devraient être prudentes lorsqu’elles utilisent une version d’essai d’un logiciel commercial, particulièrement lorsque les étudiants, les professeurs et les parents peuvent avoir l’impression que la seule manière pour eux d’accéder aux fichiers créés est d’acheter une copie du logiciel. »

Rapport Becta - Extraits

Morceaux choisis

p.3 – § 1.2 « Les nouvelles fonctionnalités de Microsoft Vista présentent certes un intérêt, mais ne justifient pas une implantation immédiate dans le domaine de l’éducation : les coûts seraient élevés et les avantages loin d’être évidents. »

p.3 – § 1.2 « Office 2007 n’apporte aucune fonctionnalité indispensable et il faudrait que Microsoft présente une étude d’impact bien étayée pour justifier son implémentation dans le secteur de l’éducation. »

p.3 – § 1.2 « Il existe des problèmes d’incompatibilité concernant Office 2007 ; de plus, Microsoft devrait assurer au plus vite la compatibilité de sa suite bureautique avec le format OpenDocument (ODF). »

p.4 – § 1.4 « Dans notre rapport intermédiaire nous exprimions le souhait que Microsoft facilite la conduite de quelques activités pilotes permettant de mettre plus en évidence les avantages du déploiement de Vista dans un établissement scolaire et de mieux appréhender le coût qu’aurait ce déploiement. Becta n’a pas eu connaissance d’une telle analyse de rentabilité effectuée par Microsoft.. »

p.4 – § 1.8 « Alors qu’on estime à 66% le nombre de machines du parc informatique scolaire pouvant fonctionner avec Vista (d’après la définition de Microsoft), nous estimons quant à nous à 22% le nombre de machines répondant aux critères pour faire fonctionner Vista de manière correcte. »

p.5 – § 1.10 « Notre rapport intermédiaire recommandait que Microsoft présente une étude d’impact bien étayée pour justifier l’implantation d’Office 2007 dans l’éducation nationale en Grande-Bretagne. Aucun document de ce type n’a été porté à notre connaissance. Le rapport final confirme que son déploiement n’est pas absolument nécessaire. Il confirme également que l’utilisation d’Office 2007 pourrait avoir un effet pervers sur l’interopérabilité entre l’école ou l’université et le domicile. »

p.5 – § 1.11 « Nous conseillons de ne pas effectuer de déploiement massif d’Office 2007 avant que les écoles et les universités ne soient certaines d’avoir mis en place tous les mécanismes nécessaires pour assurer l’interopérabilité et éviter un potentiel « fossé numérique » mis en évidence lors des tests. Agir à l’encontre de ce conseil entraînerait des difficultés inutiles et restreindrait le choix offert aux étudiants, aux professeurs et aux familles qui doivent échanger des documents entre le domicile et l’école. De plus, cela imposerait également aux parents une contrainte financière. »

p.5 – § 1.13 « une standardisation de fait (par l’utilisation généralisée de produits d’un même fournisseur) peut être néfaste pour la concurrence et le choix, ce qui revient à augmenter les coûts. De plus en plus, les gouvernements, les entreprises et le système d’éducation refusent de voir leurs informations contrôlées par un fournisseur unique. Il en résulte un mouvement qui tend à délaisser les formats de fichiers propriétaires pour s’intéresser aux nouveaux formats de fichiers, plus ouverts, sous le contrôle d’un organisme de normalisation efficace. »

p.5 – § 1.14 « Nous avons identifié un certain nombre de points critiques concernant les capacités d’interopératibilité d’Office 2007. Ces points sont les suivants : l’adoption par Office 2007 d’un nouveau format de fichier qui n’est compatible avec aucun autre produit, et le manque de prise en charge du format de document standard international (ODF) qui est de plus en plus utilisé par les produits concurrents. »

p.6 – § 1.16 « Microsoft n’a rien fait pour répondre aux demandes concernant l’interopérabilité exprimées dans notre rapport intermédiaire. Office 2007 ne gère toujours pas efficacement le format de document standard international ODF. Microsoft a continué à chercher à obtenir la normalisation de son format de fichier Office 2007, ce qui ferait cohabiter deux formats standards. Cette opération a soulevé une importante controverse. »

p.6 – § 1.18 « Nous ressentons une certaine incompréhension vis-à-vis de l’approche adoptée pour le support de l’ODF dans Office 2007. Alors que le produit permet de lire quasiment tous les autres formats attendus nativement, les manipulations à effectuer pour utiliser les fichiers ODF sont vraiment fastidieuses. Nous avons dénombré 10 étapes qu’un utilisateur devrait suivre pour trouver et installer le convertisseur permettant à Office 2007 d’accéder aux fichiers ODF et nous avons également noté que les procédures pour ouvrir ou enregistrer des fichiers ODF dans Microsoft Office 2007 ne sont pas intuitives car elles diffèrent des procédures familières aux utilisateurs. D’après nous, ces procédures présentent suffisamment de difficultés techniques pour la plupart des utilisateurs pour qu’ils soient découragés d’utiliser des produits concurrents, ce qui pourrait affaiblir la compétition. »

p.6 – § 1.20 « Nous pensons que les obstacles que Microsoft a placés sur le chemin des utilisateurs qui voudraient utiliser le format de fichier qui devient de plus en plus commun dans les produits de la concurrence auront pour effet de limiter l’utilisation de ces produits. La compatibilité que Microsoft propose dans Office 2007 avec les produits concurrents est moindre que celle qu’il offre pour sa propre famille de produits. Nous nous sommes plaints à l’Office of Fair Trading (OFT) du risque que cela fait courir à la concurrence et que cela constitue un abus de position dominante par Microsoft. Notre plainte est considérée par l’OFT. »

p.7 – § 1.21 « Si les établissements scolaires devaient faire la mise à jour vers Office 2007 maintenant, nous ne pensons pas que cela apporterait un plus au niveau de l’interopérabilité (indépendamment des standards) mais, au contraire, cela se ferait au détriment de l’interopérabilité et que cela introduirait des difficultés supplémentaires dans le travail quotidien. La mise en œuvre de l’interopérabilité dans un usage à domicile et à l’école ne peut pas être considéré comme facile, que ce soit pour une utilisation directe ou après configuration des éléments nécessaires (packs de compatibilité, modifications des formats de fichiers par défaut ou extensions ODF). »

p.7 – § 1.24 « Sans faire de jugement sur les avantages techniques du format de document standard international (ODF) ou du deuxième format de document proposé pour devenir un standard international (OOXML), nous pensons toujours que la cohabitation de plusieurs normes internationales incompatibles offrant globalement les mêmes fonctionnalités n’est pas dans l’intérêt des utilisateurs. Cela ne fera qu’apporter confusion et complexité et introduira un surcoût inutile. Cela constituera une formidable occasion manquée qui sera préjudiciable au marché, au monde de l’enseignement et au concept lui-même de norme internationale. »

p.9 – § 1.33 « Nous recommandions que les fournisseurs facilitent le choix aux écoles en s’assurant que les ordinateurs pour ce marché soient proposés avec un choix de suites bureautiques et que ces offres devraient idéalement comprendre une solution en logiciels libres. Nos entretiens avec l’industrie ont confirmé qu’il n’y a pas de raison concrète pour que la mise à en œuvre de cette proposition pose problème. »

p.9 – § 1.34 « Nous proposons que les écoles et les universités, lorsqu’elles établissent le cahier des charges, devraient insister pour que leurs fournisseurs leur proposent une suite bureautique capable d’ouvrir, d’éditer et de sauvegarder des documents au format ODF et permettant de définir l’ODF comme format de fichier par défaut. »

p.14 – § 4.4 « Les essais ont confirmé qu’Office 2007 fonctionne toujours bien sous Windows XP, ce qui veut dire qu’il n’est pas absolument nécessaire de migrer vers Vista avant une mise à jour vers Office 2007. »

p.15 – § 4.9 « Office 2007 introduit un nouveau format de fichier par défaut et, comme le souligne notre rapport intermédiaire, cette évolution pose quelques problèmes de compatibilité. L’interopérabilité entre Office 2007 et les versions précédentes de Microsoft Office ainsi qu’avec les suites bureautiques d’autres fournisseurs n’est pas satisfaisante. »

p.17 – § 4.22 « Le coût total du déploiement de Vista dans les écoles anglaises et galloises se situe autour de 175 millions de livres sterling (environ 230 millions d’euros). Si cette estimation n’inclut pas les cartes graphiques supplémentaires nécessaires au fonctionnement de l’interface Aero (ce qui augmenterait nettement le montant minimum) elle tient compte des mises à niveau matérielles nécessaires, du coût des licences, des tests ainsi que du coût de la configuration et du déploiement. Environ un tiers de cette somme est imputable au prix des licences Microsoft. »

p.17 – § 4.23 « Le coût d’une mise à jour de Vista sur tout le parc informatique d’une école primaire typique serait de l’ordre de £5000 (environ 6500€) (environ £125 (160€) par machine). Pour un lycée, le coût d’une mise à jour semblable serait de l’ordre de £24000 (31200€), ce qui revient à un coût par machine d’environ £75 (98€). »

p.19 – § 4.30 « Nous suggérons que les nouvelles machines achetées avec Windows Vista pré-installé soient remises sous Windows XP en attendant que tout le réseau puisse être mis à jour. »

p.19 – § 4.31 « L’interface utilisateur différente de Vista par rapport à Windows XP peut impliquer que le personnel et les élèves aient besoin d’un entraînement ou d’une familiarisation avec le nouveau système d’exploitation. Cela pourrait être source de confusion si un cours ou un enseignement clé utilise les deux systèmes. »

p.19 – § 4.31 « Les machines sous Vista pourraient ne fonctionner qu’avec une autre version d’une application voir même seulement avec des produits différents. Cela peut être source de confusion si le personnel ou les élèves doivent travailler avec les deux systèmes d’exploitation. Il pourrait aussi être nécessaire de dupliquer le travail pour certaines leçons ou pour certains projets pour les adapter à Windows Vista et Windows XP. »

p.21 – § 4.36 « Il est important de ne pas placer d’obstacles inutiles sur le chemin des élèves, des professeurs et des familles lorsque des documents doivent faire le va-et-vient entre le domicile et l’école ou l’université. De tels obstacles pourraient restreindre l’utilisation de systèmes utilisant des formats de documents différents ou aboutir à des contraintes financières inutiles. »

p.22 – § 5.2 « Une véritable interopérabilité entre documents réduit les coûts, améliore la productivité des utilisateurs et permet d’éviter de se retrouver piégé par une technologie. »

p.23 – § 5.6 « Microsoft n’a pas cherché à remédier aux préoccupations relatives à l’interopérabilité que nous avions identifiées quant au support de la norme internationale existante. Au contraire, Microsoft a continué à rechercher l’approbation pour la création d’une seconde norme internationale de documents (Office Open XML) basée sur ses propres formats de fichiers Office 2007. »

p.23 – § 5.10 « L’approche actuelle de Microsoft pour assurer l’interopérabilité avec le standard ODF est de faciliter le développement par de tierces parties de modules ou de convertisseurs pour Office 2007 plutôt que réaliser le développement elle-même et de l’intégrer complètement dans son produit. Cette approche soulève des questions en ce qui concerne les utilisateurs béotiens, comment vont-ils accéder à la fonctionnalité nécessaire et quel va être son niveau d’ergonomie. »

p.23 – § 5.11 « Sous certaines conditions, inhérentes à la date de l’étude, les utilisateurs devaient aller sur un site web tiers et effectuer une série de tâches techniques avant de pouvoir de manière satisfaisante ouvrir, modifier et enregistrer des documents au format de fichier ODF. »

p.25 – § 5.14 « Nous pensons que ces bricolages pour accéder et utiliser la possibilité d’interopérer avec les produits concurrents de Microsoft Office 2007 présentent des difficultés techniques. Ces difficultés sont susceptibles de rendre les utilisateurs moins enclins à se servir des produits concurrents et donc de fausser la compétition. »

p.26 – § 5.19 « L’interoperabilité entre Microsoft Office 2007 et des versions antérieures de Microsoft Office n’est pas supporté de façon native. Malgré tout, Microsoft a publié une mise à jour de l’ensemble de ses modules de compatibilité qui devrait permettre aux versions antérieures de Microsoft Office d’ouvrir les formats de fichiers Office 2007. Cette solution est la plupart du temps suffisante mais, en fonction de l’application bureautique utilisée et dans certaines circonstances, elle va provoquer divers degrés de dégradation ou de perte de fidélité. »

p.28 – § 5.28 « Si l’on n’intervient pas, ces évolutions vont créer, pour les utilisateurs béotiens, une vision de l’intéropérabilité des documents qui sera complexe et partisane, ce qui serait un échec de l’objectif initial d’aller vers des standards ouverts. Microsoft a une position dominante sur le segment des systèmes d’exploitation pour PC et cette position risque d’être renforcée par son approche actuelle des standards de documents ouverts. »

p.30 – § 5.33 « Les utilisateurs d’Office 2003 ou antérieur devraient installer le pack de compatibilité afin de pouvoir ouvrir n’importe quel document OOXML Office 2007. Ils ne devraient pas enregistrer leurs documents dans le format OOXML. Comme les utilisateurs d’Office 2007, ils devraient les enregistrer dans les anciens formats Microsoft (.doc pour les documents texte, .xls pour les tableurs et .ppt pour les présentations). »

p.30 – § 5.34 « Les utilisateurs d’OpenOffice.org ou de Star Office (ou d’ailleurs de n’importe quelle suite bureautique basée sur les standards libres) auront plus besoin d’être conscients de la technologie utilisée par la personne à qui ils destinent leur document pour pouvoir tenir compte des limitations d’Office 2007. Pour permettre la compatibilité, ces utilisateurs devraient toujours enregistrer leurs documents dans les anciens formats Microsoft car c’est le plus petit dénominateur commun, entre ces produits disparates, qui peut permettre l’interopérabilité . »

p.30 – § 5.36 « Les fournisseurs doivent développer des applications qui sont capables de traiter toutes les normes internationales pertinentes, en laissant aux utilisateurs le choix de savoir quel sera leur format "par défaut". »

p.31 – § 5.38 « Nous ne sommes pas convaincus que le développement de plusieurs standards internationaux traitant essentiellement du même champ d’activité soit de l’intérêt du milieu éducatif. Comme nous l’avons précédemment exprimé, nous estimons qu’une telle approche va introduire confusion, complexité et coûts inutiles. Elle constitue une formidable occasion manquée qui risque de perturber le marché, la communauté éducative et le concept même de standards internationaux. »

p.32 – § 6.4 « Ces évolutions mettent en avant le nombre grandissant de concurrents dans le domaine des suites bureautiques et montrent que des systèmes innovants basés sur des alternatives à Windows commencent à voir le jour. »

p.32 – § 6.5 « Cependant, afin que ces innovations se développent sur le marché de l’éducation il ne faut pas que des barrières réduisent la concurrence, que ce soit par des restrictions liées aux licences ou par des obstacles liés à l’interopérabilité. Ainsi, par exemple, Becta considère qu’un arrangement par lequel un appareil fonctionnant sous Linux est sujet à un paiement annuel à Microsoft selon les termes d’un programme de licence Accord School, même si cet appareil n’utilise aucun logiciel de Microsoft, n’est pas acceptable. De tels arrangements font partis des pratiques qui font l’objet de notre plainte à l’OFT. »

p.33 – § 6.9 « Contrairement à d’autres secteurs ou la demande pour des solutions en logiciels libres est visible et croissante, les estimations dans le secteur éducatif montrent une demande faible, Becta est vu comme un facteur clé dans l’instauration de cette demande. »

p.34 – § 6.11 « Au cours des douze prochains mois Becta prendra un certain nombre de mesures pour encourager un choix plus efficace dans le cadre d’un usage éducatif. Ce travail inclura la publication d’un programme de travail dont le but sera de :
– fournir plus d’informations sur le site de Becta sur ce qu’est un logiciel libre et quels sont ses avantages pour l’éducation en Grande-Bretagne
– compléter la base de recherche actuelle qui recense les usages des logiciels libres dans le secteur éducatif et identifier des déploiements modèles de logiciels libres. Cela engloberait également l’esquisse d’un tableau national des usages des logiciels libres dans les écoles et les universités
– travailler avec la communauté du logiciel libre pour établir un catalogue en ligne des logiciels libres appropriés pour l’usage dans les écoles de Grande-Bretagne. Parmi les informations disponibles on retrouvera les moyens d’obtenir une assistance dédiée à ces logiciels et comment contribuer à leur développement futur. Ce catalogue sera publié sous une licence Creative Commons afin que les fournisseurs puissent le modifier pour leur propre usage
– donner des indications aux sociétés de services en logiciels libres pour qu’elles puissent efficacement participer dans de nouvelles structures compétitives et pour qu’elles puissent proposer des logiciels libres via la structure de fournisseurs existante de Becta »

p.34 – § 6.12 « Le point de vue de certaines écoles et universités est qu’elles doivent utiliser des logiciels propriétaires particuliers car ces produits sont les plus utilisés dans l’industrie et le commerce et que, d’après cet argument, les élèves doivent se familiariser avec ce qu’ils rencontreront dans la "vraie vie". »

p.34 – § 6.13 « Les étudiants aujourd’hui sont cependant en général à l’aise avec les TIC et ils sont capables d’utiliser une large gamme de logiciels à l’école ou à l’université et certainement plus encore à leur domicile. Ils peuvent également passer sans problème de l’ordinateur de l’école à celui à la maison ou celui de la bibliothèque de quartier ou encore à celui du cybercafé. Il est très peu probable qu’ils se retrouvent démunis devant une suite bureautique particulière après leurs études parce qu’ils auront été habitués à utiliser, par exemple, OpenOffice.org à l’école. »

p.35 – § 6.14 « En résumé, l’argument de la "familiarité" est recevable pour les élèves des années 80 et 90 mais moins pour ceux du 21ème siècle. Ce serait en effet un triste constat pour l’éducation aujourd’hui en matière de TIC si, dès qu’ils s’éloignaient de leur apprentissage, les élèves n’étaient pas capables d’utiliser des programmes basiques (comme les suites bureautiques ou les navigateurs) simplement à cause de différences de fonctionnement ou entre les interfaces utilisateurs. Posséder des compétences multiples devrait faciliter la recherche d’emploi au 21ème siècle, pas la compliquer. »

Rapport Becta - Standards




Stallman, Torvalds, Brown et Zemlin : mais que pensent-ils donc de Microsoft ?

Encore un article de Bruce Byfield que nous avons trouvé ma foi fort intéressant de traduire. Il s’agit de l’avis sur Microsoft de quatre fortes personnalités de la communauté du logiciel libre : Peter Brown (Free Software Foundation), Jim Zemlin (Linux Foundation), Richard Stallman et Linus Torvalds.

Enfin, pour être plus précis, de deux éminents représentants du logiciel libre (Peter Brown et Richard Stallman) et deux éminents représentants de l‘open source (Jim Zemlin et Linux Torvalds). Difficile en effet de passer ici à côté de cette distinction, importante pour certains, de l’ordre de la nuance pour d’autres. Toujours est-il que si l’on veut alors regrouper ces deux mouvements, on parlera de FOSS.

L’accent a été mis sur les questions suivantes :

  • Comment Microsoft affecte votre travail et votre informatique personnelle ?
  • Quelle menace représente Microsoft pour le logiciel libre ?
  • Quelles sont les chances pour que Microsoft devienne un membre apprécié de la communauté ?

On ne vous en dit pas plus mais la conclusion est réconfortante…

Un grand merci à Claude Le Paih pour le traduction. Il a choisi de ne pas traduire proprietary par propriétaire et il s’en explique ainsi : « Mon choix personnel va au néologisme privateur, privatrice plutôt que propriétaire. J’assume cette non-orthodoxie opposée à la doxa par le fait que propriétaire ne peut être adjectif car c’est un nom commun désignant une personne, laquelle possède… quelque chose. On ne peut donc dire une chaussure propriétaire, une chaîne hi-fi propriétaire, une guitare propriétaire…etc ! Par contre, proprietary est bien un adjectif, en américain, désignant une chose sous marque déposée. Le néologisme privateur fut trouvé par Richard Stallman lors d’un voyage en Espagne en référence au privador employé en espagnol. Richard Stallman préconise l’emploi de privateur. »

Copie d'écran - Datamation

Que pensent de Microsoft les leaders du logiciel libre et de l’open source ?

What do Free and Open Source Software Leaders Think of Microsoft?

Bruce Byfield – 16 juin – Datamation

Aucun utilisateur de logiciels libres (NdT : FOSS) ne peut éviter d’avoir une opinion sur Microsoft : les produits et la technologie Microsoft représentent ce qu’ils ont délaissé. Certains les considèrent de plus en plus sans intérêt, d’autres comme une entité informe comparable à Satan au Moyen Âge ou à l’Union Soviétique au temps de la guerre froide. A la limite peu importe ce que les autres membres de la communauté FOSS pensent de Microsoft, nous avons tous une opinion bien définie sur le sujet que nous pouvons exprimer sur le champ avec éloquence.

Mais quelle attitude ont les dirigeants du FOSS vis à vis de Microsoft ? Ce n’est pas qu’une question de commérage ou un test de confiance : leurs réponses peuvent indiquer leurs valeurs et priorités, mais aussi si elles méritent d’être suivis à la lettre. De plus, malgré (ou peut être à cause de) la grande menace que fait peser Microsoft sur le monde du logiciel libre, le majorité d’entre nous entrevoit rarement le point de vue des acteurs et agitateurs (NdT : "movers and shakers", terme désignant les personnes exerçant un pouvoir ou influentes dans une sphère d’activité) à son sujet.

Pour aider à donner un meilleur éclairage, j’ai demandé à quelques dirigeants bien en vue du FOSS comment Microsoft affecte leur travail et leur informatique personnelle, quelle menace représente Microsoft pour le FOSS, et quelle sont les chances pour que la compagnie devienne un membre apprécié de la communauté FOSS.

Ceux qui ont répondu sont Peter Brown de la Free Software Fondation (NdT : Fondation pour le Logiciel Libre), Jim Zemlin de la Linux Foundation (NdT : Fondation Linux), Richard Stallman , fondateur du mouvement du logiciel libre, et Linus Torvalds. Tous ont donné des réponses non seulement complexes et nuancées, mais parfois étonnantes comparées aux attitudes qu’ils assument souvent.

Peter Brown, Directeur Général de Free Software Foundation

De lui même, Peter Brown n’aurait quasiment pas de contact avec les produits ou la technologie Microsoft. « Il y a beaucoup de sites avec de la camelote privatrice, et certaines agences gouvernementales demandent toujours des systèmes d’exploitation précis. Mais j’évite généralement ce genre de chose, ou je trouve des alternatives », dit il. En parlant de l’évolution des systèmes d’opérations libres comme GNU/Linux depuis le passage du dernier millénaire, il ajoute : « je dois admettre que je ne ressens aucun inconvénient maintenant. »

De plus, suivre les pistes des menaces touchant les libertés des utilisateurs de logiciels fait partie de son travail. Avec ce mandat, il porte une attention particulière à ce que disent les cadres de Microsoft et quelle technologie est utilisée dans leurs produits. « Ce n’est qu’une chose naturelle de suivre les fournisseurs de logiciels privateurs et le Digital Right Management (DRM) » dit il. Il ajoute cependant : « Nous n’examinons pas tous les coins et recoins car une fois que vous êtes dans le monde privateur, il n’y a pas grand chose à dire hormis la nécessité de le quitter. »

Le problème avec Microsoft, selon Brown, est que c’est une entreprise comme les autres, et « les sociétés n’ont pas de valeurs intrinsèques. La seule déclaration de mission, dont il faut être conscient en ce qui concerne une société, est celle qui dit : nous sommes ici pour faire de l’argent. » Avec cette manière de penser, Brown n’a pas confiance en Microsoft, ni particulièrement aux autres entreprises, qu’elles soient privatrices comme Apple ou qu’elles aient un modèle d’affaire incluant l’open source, comme Google ou Red Hat.

Quand une société est amicale envers les FOSS, il attribue en grande partie cette attitude à une individualité qui défend les valeurs du FOSS. « Vous avez vu ce qui est arrivé à Sun ? » dit il, se référant au remplacement de Scott McNealy par Jonathan Schwartz en tant que CEO (NdT : Chief Executive Officer = chef de direction) de Sun Microsystems. « D’abord, c’est privateur et n’aime pas les logiciels libres, un changement de directeur et on aime les logiciels libres. » Dans l’ensemble, il considère les individus plus dignes de confiance que les entreprises, mais seulement « jusqu’à un certain point. »

Dans cette perspective, Brown pense que Microsoft pourrait devenir un jour un participant accepté du logiciel libre, mais non sans changements majeurs dans son modèle d’affaire et son équipe de direction. A la différence de Sun, dont les revenus proviennent d’abord du matériel, Microsoft, dit Brown, est quasiment dépendant de la vente de son système d’exploitation et de sa suite bureautique.

« Ce qui empêche Microsoft d’être un acteur important du logiciel libre », dit Brown, « est le fait qu’ils ne peuvent le faire d’une manière significative en raison de leur flux monétaire. Si vous y réfléchissez, ils vont se battre bec et ongles là où ces deux produits sont concernés, ce qui veux dire en plein dans notre poire. Je ne vois pas Microsoft être différente de n’importe quelle autre entreprise concernant ses intérêts économiques ».

A présent, Brown pense que tout ce que peut faire Microsoft est de tâter du logiciel libre dans l’espoir d’attirer les forces vives du développement vers la plate-forme Windows et d’essayer de ralentir leur adoption. Quoiqu’il en soit, il rejette l’éventuelle destruction du FOSS par Microsoft comme seulement « théoriquement » possible. Sa préoccupation principale est que Microsoft « peut présenter un danger pour la liberté des utilisateurs car elle est capable d’empêcher ceux-ci d’utiliser les logiciels libres par des ruses comme la création de plates-formes séduisantes, les obligeant à rester du fait des inconvénients importants liés au changement ».

Brown est particulièrement inquiet à l’idée qu’en rejetant Microsoft des utilisateurs ne se tournent vers une autre compagnie.« Il est important que les gens ne disent pas : Oh , Apple est bien mieux que Microsoft ! » dit-il. « Je pense réellement que ce n’est pas l’objectif. Si Apple avait ces deux produits, Windows et la suite Office, ils se comporteraient de la même manière vue la direction en place. Avec l’iPhone, ils montrent déjà exactement la même conduite. Ce sera donc son dernier mot : ne pas imaginer que Microsoft soit différente des autres entreprises ».

Jim Zemlin, Directeur de la Linux Foundation

Comme Peter Brown, Jim Zemlin considère l’observation de Microsoft comme faisant partie de son travail. Cependant, tandis que Brown à la Free Software Foundation surveille les menaces pesant sur les libertés des utilisateurs, Zemlin dit : « Une partie de mon travail en tant que directeur de la Linux_Foundation est de contrôler les annonces de Microsoft. Notre équipe fournit un important service à nos membres et au marché en traduisant les actions parfois ambigües de Microsoft. Nous étudions les changements dans la technologie Microsoft qui rendent plus facile l’interopérabilité avec leur plate-forme pour les applications Linux et open source. L’intention de Microsoft de supporter le format ODF dans MS Office est un bon exemple de ce que nous suivons. Nous veillons à ce qu’ils publient leurs protocoles techniques sous des termes compatibles avec le développement et les pratiques des licences open source. »

Quoiqu’il en soit, en ce qui concerne l’informatique personnelle de Zemlin, Microsoft « n’est pas important du tout ». Sa description d’un jour typique est une litanie d’applications web et de produits utilisant GNU/Linux: « Mes journées commencent en écoutant de la musique à la maison sur un système Sonos basé sur Linux. Je peux enregistrer un spectacle TV sur mon DVR Linux et ensuite foncer au bureau où je travaille sur un bureau Linux. Je passe la plupart de ma journée sur un navigateur : accédant à des applications Google, utilisant notre application SugarCRM sur le web, me connectant à Facebook ou lisant un livre sur un lecteur Kindle, tout cela tournant sous Linux. La seule fois où je suis concerné par Microsoft c’est quand je reçois un fichier Microsoft Office que j’ouvre dans OpenOffice qui le convertit au format ODF.

Zemlin remarque que la participation à la communauté est possible pour tout le monde, mais ajoute que « cela demande un désir sincère de collaboration et de vouloir faire de meilleurs logiciels. Quand cela fera réellement partie de la vision de Microsoft, j’espère que cette société deviendra un membre de la communauté. Le modèle open source est dominant pour le développement de logiciels et ne fera que s’accroître en influence dans les années à venir. »

Zemlin refuse de spéculer sur les intentions de Microsoft à l’égard du FOSS, mais clairement, il ne le voit pas comme une grande menace. « Microsoft est une société intelligente et un excellent concurrent » dit il, « ils rendent Linux meilleur chaque jour, rien qu’en étant un opposant acharné. Mais ils opèrent selon un modèle de développement dépassé qui ne tiendra pas longtemps dans l’actuelle économie du logiciel. Les consommateurs demandent une ouverture et un choix de vendeur, quelque chose que Microsoft met du temps à comprendre. Linux, un des premiers exemples de ce que l’on peut atteindre avec le modèle de développement open source, est en position naturelle pour saisir ces nouvelles dynamiques du marché. Microsoft va continuer à lutter. »

Richard Stallman, Président fondateur de la Free Software Foundation.

En tant que personnage principal du mouvement pour le logiciel libre, Richard Stallman fait une distinction entre la technologie et les actions de Microsoft. « Je n’essaie pas de suivre la technologie Microsoft », dit-il, « car dans la plupart des cas, les changements dans la technologie Microsoft n’ont pas d’effet immédiat sur la communauté du logiciel libre. Je suis plus concerné par les menaces légales de Microsoft à l’encontre des logiciels libres et ses tentatives pour recruter dans les écoles, gouvernements et entreprises afin d’orienter et contraindre le public à une utilisation de Windows. »

Interrogé sur la manière dont Microsoft affecte ses objectifs, Stallman répond, « Mon but à long-terme est un monde dans lequel tous les utilisateurs de logiciels sont libres de partager et échanger les programmes qu’ils utilisent. En d’autres mots, un monde dans lequel tous les logiciels sont libres. Tant que des sociétés comme Microsoft ou Apple se consacrent à distribuer des programmes refusant l’utilisation de ces libertés, elles s’opposent à ces objectifs. »

Cela dit, Stallman peut imaginer qu’un jour Microsoft puisse contribuer au logiciel libre, mais seulement si « elle retire des services comme Hotmail, et abandonne les programmes privateurs comme Windows et MS Office. Alors, elle pourrait contribuer au logiciel libre de façon à faire progresser la communauté à une plus ou moins grande échelle. Cependant, sans ces changements fondamentaux, j’espère que toute contribution faite par Microsoft n’aura qu’une portée marginale sur qui que ce soit dans le monde libre. »

En attendant, Stallman remarque que « Microsoft fait de grands efforts pour empêcher l’adoption du système GNU/Linux et OpenOffice.org ». Il donne trois exemples.

D’abord, il commente la récente annonce au sujet du projet One Laptop Per Child (OLPC) qui, originellement pensé pour donner des ressources technologiques aux nations en développement, va commencer à embarquer Windows. Selon Stallman, avec cette annonce, « Microsoft subordonne le projet OLPC en le convertissant en une campagne massive de formation Windows. Le projet dit que cela donne plus de choix aux gouvernement acquéreurs en supportant tant Windows que GNU/Linux, mais ces gouvernements vont avoir tendance à choisir Windows par défaut. Dans certains pays, des gens vont faire campagne pour empêcher cela. Si celles-ci réussissent, le projet OLPC représenterait alors une contribution positive au monde, sinon, cela fera avant tout du mal. »

Ensuite, parlant de la bataille des standards où Microsoft réussit à faire accepter son format OOXML comme ouvert face au format ODF favorisé par OpenOffice.org et d’autres applications bureautiques libres, Stallman note que « Microsoft a corrompu beaucoup de membres de l’ISO afin de gagner l’approbation de son format bidon de document ouvert OOXML. Ainsi, les gouvernements qui gardent leurs documents sous format exclusif Microsoft peuvent prétendre utiliser des formats ouverts. Le gouvernement d’Afrique du Sud a déposé un appel contre cette décision, mentionnant les irrégularités de la procédure. »

Stallman poursuit en disant « Même dans les parties moins cruciales du secteur, Microsoft essaie d’affaiblir la communauté. Par exemple, elle contribua par un substantiel montant à un projet, SAGE, lequel en conséquence décida de ne pas passer à la version 3 de la GPL ». La seule consolation dans ce cas, nous dit Stallman, est que cette affaire montre « que Microsoft considère la version 3 de la GPL comme une défense efficace de la liberté des utilisateurs. »

En complément de ces exemples, Stallman condamne Microsoft pour les portes ouvertes de sa sécurité. « Windows Vista permet à Microsoft d’installer des modifications de logiciels sans l’autorisation de l’utilisateur », observe-t-il, « vous ne pouvez pas avoir plus faux que cela ».

Cependant, malgré ces opinions, Stallman nous avertit aussi « qu’il est commun dans le champ de l’informatique de comparer Microsoft au diable, mais c’est une erreur. Cela conduit les gens à fermer les yeux sur les actions néfastes faites par les autres sociétés dont beaucoup sont simplement mauvaises. Microsoft n’est pas la seule entreprise dont les conduites en affaire piétinent la liberté des usagers. Des milliers de sociétés distribuent des logiciels privateurs, ce qui veut dire des utilisateurs divisés et impuissants. C’est mauvais, peu importe la société qui pratique cela. »

Linus Torvalds, Coordinateur du projet Linux Kernel (noyau Linux)

Linus Torvalds ne fait aucun effort pour suivre Microsoft. La plupart de ses informations sur la société sont de seconde main, en lisant les sites généraux traitant de technologie ou en recevant des mails de journalistes lui demandant un commentaire sur une action ou une annonce de Microsoft. Malgré tout, il confesse avoir lu occasionnellement le blog Mini-Microsoft « car c’était intéressant pour moi de voir un point de vue différent sur le monde tech world (NdT : monde la technologie) »

« J’ai simplement tendance à ne pas comparer Linux aux autres OS » dit-il, « je m’attache à rendre Linux meilleur que lui-même, et essayer de voir ce que font les autres n’est pas du tout pertinent. Évidemment, il est important que les choses fonctionnent bien avec d’autres systèmes d’exploitation, mais c’est un domaine ou je ne peux pas réellement aider car je n’ai pas d’autres systèmes à la maison. »

Torvalds admet que, pour un choix donné, il achètera un souris Logitech plutôt qu’une souris Microsoft car il préfère éviter de supporter Microsoft. Mais il appelle cela une préférence « irrationnelle ». Par ailleurs, il ajoute, « je ne me rappelle pas la dernière fois ou j’ai pris une décision qui ait à voir en quoi que ce soit avec Microsoft. »

Torvalds observe que Microsoft s’ouvre déjà à la communauté FOSS, mais il note que sa participation est limitée car « ils semblent avoir un complexe lié à la GPL, et ne travaillent qu’avec des projets, qu’ils ne voient pas être en concurrence directe, comme une infrastructure de serveur web, plutôt que tout autre projet central. Vont-ils s’étendre à d’autres domaines et vont-ils se débarrasser de leur peur irrationnelle de la GPL ? Je ne le sais pas. »

A propos d’un danger créé par Microsoft, Torvalds se dérobe en observant premièrement ceci : « je ne pense pas qu’il y ait un Microsoft. Je suspecte qu’il y a beaucoup d’ingénieurs MS qui aiment réellement le logiciel libre et, probablement, l’utilisent-ils à la maison même, en dehors de tout travaux en relation avec des tests de compatibilité. De plus, je suspecte que plusieurs secteurs de la société ont des idées divergentes à propos de l’open source, et je ne pense pas qu’ils approuvent. »

Il continue : « ceci dit, quelques membres de Microsoft sont assez clairement anti open source, et, oui, s’ils pouvaient le détruire, ils le feraient avec bonheur. »

Quoiqu’il en soit, Torvalds écarte l’idée qu’une tentative de démolition puisse avoir un quelconque succès. « Comment combattre réellement quelque chose qui est plus une idée et une façon de faire qu’un concurrent direct sur le marché ? » demande-t-il usant de rhétorique.

Torvalds ajoute qu’il ne se réfère plus à Microsoft en public comme cela lui arrivait auparavant. « Je faisais des plaisanteries sur Microsoft au cours d’entretiens » dit il, « Et j’ai simplement arrêté, car je ne pense pas que la peur et le dégoût (NdT : fear-and-loathing) qui sont si communs (ou peut être pas communs…ce ne sont probablement que des paroles) soient complètement sains. Je pense que si vous prenez des décisions basées sur la peur de ce que font les autres gens et sociétés, vous n’allez pas faire le meilleur travail. Je préfère voir le monde être pro-Linux plutôt qu’anti-Microsoft, parce que ce dernier groupe, en étant motivé par un sentiment négatif, n’est simplement pas constructif à long terme. »

Par dessus tout, le plus fort sentiment de Torvalds à propos de Microsoft semble être celui d’une société ayant perdu son orientation. « Alors que je ne suis évidemment pas un adorateur de Microsoft », dit-il, « je pense qu’ils ont sérieusement cassé la baraque il y a plus de dix ans car ils ont réellement donné aux gens ce qu’ils voulaient, et à bas prix. Voilà une bonne raison qui permit à Microsoft de surclasser les traditionnels vendeurs UNIX. Cela dit, ils semblent avoir oublié ces racines. Tout ce que je vois maintenant c’est qu’ils ne semblent pas essayer de servir leur clients mais de les contrôler (par exemple, tous les plans fous de locations de licences, tous leurs ridicules travaux sur les DRMs etc.) ».

Conclusion

Le premier point évident au sujet de ces réponses est que, bien qu’elles aient été données par les défenseurs des deux mouvements distincts, le logiciel libre et l’open source, les différences sont si mineures qu’elles pouvaient être attendues quelles que soient la personnalité ou la position. Toutes les personnes interrogées trouvent Microsoft complètement sans intérêt pour leur informatique personnelle, toutes suggèrent que Microsoft doit se transformer elle-même, mais n’écartent pas la possibilité que la société fasse de réelles contributions au FOSS si elle parvient à changer. Toutes également semblent voir le triomphe du FOSS comme plus ou moins inévitable. Les similarités sont un rappel que, malgré les différences réelles entre les priorités des deux mouvements, les deux camps sont alliés.

L’autre point qui ressort est combien les réponses sont dépassionnées comparées aux sentiments souvent exprimés par d’autres impliqués dans le FOSS. Tous ces interviewés voient en Microsoft un antagoniste, mais il le font sans la paranoïa qui dénature certains cercles FOSS. La raison pourrait être leur croyance que le FOSS gagnera au final, ou peut être simplement, l’impossibilité pour chacun de maintenir une rage bouillonnante chaque jour et minute de leur vie professionnelle.

Quelle qu’en soit la raison, cette impartialité relative les met potentiellement en marge de quelques uns à l’intérieur de la communauté, spécialement ceux qui voient Microsoft au centre d’une conspiration anti-FOSS. Jim Zemlin, dont les réponse sont plus souples que les autres, a été attaqué par le passé dans les médias pour ses opinions.

En refusant de voir leur adversaire principal comme une représentation unidimensionnelle du diable, ces leaders se sont mis librement entre parenthèses pour adopter une vue plus complexe de leur situation. Non seulement, ils voient Microsoft luttant en vain pour se redéfinir elle-même après tant d’années, mais ils soulignent aussi que Microsoft est simplement la plus grande des menaces privatrices envers le FOSS mais pas la seule, et que se focaliser avec trop d’attention sur Microsoft apporte ses propres dangers.

Certains lecteurs pourraient désapprouver telle ou telle vision exprimée ici. Je le fais moi même. Mais, en parlant plus généralement, je trouve dans ce mélange d’optimisme idéaliste et d’observation lucide, une garantie que la communauté est entre de bonnes mains.




Le débat sur Windows Vista et MS Office 2007 à l’école aura-t-il lieu ?

Alessandro Pucci - CC byLe Becta (British Educational Communications and Technology Agency) est une agence du Department for Children, Schools and Families du Royaume-Uni qui n’a pas d’équivalent en France[1]. Il fait office d’organe principal du gouvernement britannique pour la stratégie et le développement des technologies de l’information et de la communication pour l’éducation (TICE) auprès duquel il joue un rôle de conseil et de prescripteur.

En janvier 2008 le Becta publiait une étude détaillée sur Windows Vista et MS Office 2007. Avec son aimable autorisation, Framasoft vous en propose aujourd’hui sa traduction intégrale dont vous trouverez de larges extraits dans ce billet.

Pourquoi avons-nous pris le temps et le soin d’effectuer (bénévolement et collectivement) un tel travail[2] ?

  • Parce que nous sommes en présence d’un document dense, rigoureux et objectif, qui émane d’un organisme officiel et non d’un repaire de « libristes intégristes » comme le Framablog 😉
  • Parce que ce document n’est pas une énième pièce à charge contre Microsoft mais une étude pragmatique qui tente d’évaluer les conséquences de l’adoption de Vista et MS Office 2007 dans le contexte scolaire pour en tirer de justes recommandations.
  • Parce qu’au délà de Microsoft, ce rapport passe en revue quelques questions majeures que tout acteur du monde éducatif un tant soit peu impliqué dans les TICE devrait se poser. Parce que, enseignants, administrations, collectivités, parents d’élèves, etc. nous estimons qu’il en va de la responsabilité de chacun de se positionner sur ces questions et de faire ses choix en toute connaissance de cause.
  • Parce qu’en France, le Ministère de l’Education n’a pas jugé opportun de mener une telle étude et ne communique pas sur le sujet. Nous ne comprenons pas un tel silence. Nous pensons a contrario que ces questions sont d’importance et que les conditions d’un véritable débat sont réunies.
  • Parce que Microsoft se montre en ce moment très entreprenant à l’école. Dernier exemple en date : La mise à disposition gratuite de MS Office pour tous les enseignants. Lisez le rapport et vous comprendrez aisément le pourquoi du comment d’un tel « cadeau ».
  • Parce que plus nous serons nombreux à être informés et vigilants et plus nous aurons de chance de voir Microsoft modifier non pas ses prix mais ses pratiques. Dernier exemple en date : L’annonce de l’intégration du format ODF dans MS Office 2007 pour le premier semestre 2009, dont « Microsoft assure que sa décision n’est pas liée à la récente plainte déposée auprès de Bruxelles par l’agence gouvernementale britannique Becta » (source ZDNet).
  • Parce que tout comme le Becta nous ne sommes pas convaincus par la pertinence du format OOXML de Microsoft dont la récente standardisation ISO a posé plus de questions qu’elle n’en a résolues.
  • Parce que s’interroger sérieusement sur l’opportunité de Windows Vista et de MS Office à l’école amène à évaluer sérieusement les alternatives que proposent les logiciels libres.
  • Parce que nombreux sont les éléments exposés ici pour l’école qui valent également en dehors de l’école.
  • Parce qu’il n’y aucune fatalité à voir notre école accepter passivement une situation qui la voit simultanément dépenser inutilement ses deniers publics et prendre le risque de devenir toujours plus dépendante d’un unique éditeur de logiciels (et de formats) propriétaires. Parce que, sauf cas particuliers, les raisons qui la poussent à adopter aujourd’hui Windows Vista et MS Office 2007 ne résistent pas à l’analyse. Parce que, osons l’expression, nous ne souhaitons pas qu’elle vienne nous dire dans quelques années qu’elle ne savait pas.
  • Parce qu’il n’est pas trop tard et que nous y voyons un prétexte à enfin lancer un véritable débat en France. Parce qu’avec la magie d’internet (comprendre votre soutien et votre relai) nous avons l’espoir de sortir de notre communauté pour toucher un maximum de monde, décideurs scolaires et politiques inclus.
  • Parce que nonobstant la technicité du sujet, ce rapport demeure fort agréable à lire (si, si, je vous assure).

C’est pourquoi nous vous invitons à parcourir ce document[3], à l’évaluer pour éventuellement le partager, le diffuser (sites, blogs, listes, mails…), le rendre disponible en salle des professeurs, l’évoquer avec les enseignants de vos enfants, en parler autour de vous, etc.[4]

La période, proche des vacances, est peu propice, mais on se retrouvera à la rentrée. Et en attendant nous proposons à tous ceux qui voudraient porter ce débat avec nous de s’inscrire à une liste de diffusion spécialement créée pour l’occasion[5].

Quand bien même nous serions en phase avec les recommandations du rapport Becta, nous ne souhaitons pas vous convaincre de la pertinence de son contenu. Nous souhaitons simplement que les arguments avancés ici soient enfin discutés sérieusement sur la place publique, sachant que l’éducation nous concerne tous.

Merci de votre attention et bonne lecture…

Télécharger la traduction du rapport Becta (PDF, 370 Ko, 38 pages)

PS : Il sera beaucoup question de cette traduction lors de mon intervention intitulée « Windows Vista, accélérateur du Libre à l’école ? » qui aura lieu aux prochaines Rencontres Mondiales du Logiciel Libre de Mont de Marsan, le jeudi 3 juillet à 16h.

Notes

[1] Crédit photo : Alessandro Pucci (Creative Commons By)

[2] Cette traduction est une œuvre collaborative (et de longue haleine) de notre groupe de travail Framalang. Qu’ils en soient tout ici remerciés comme il se doit et tout particulièrement Olivier, GaeliX, Bruno, Daria, Burbumpa et enfin Vincent Lozano pour la mise en forme.

[3] Si vous manquez un peu de temps, vous pouvez retrouver de larges extraits du rapport dans ce billet.

[4] Si vous pouviez en profiter pour éventuellement évoquer au passage l’existence de Simple comme Ubuntu et Changer pour OpenOffice.org, deux livres libres de notre collection Framabook qui nous semblent être liés au sujet, nous vous en serions forts reconnaissants. Sur ce modèle, et en partenariat avec notre éditeur In Libro Veritas, nous pourrions du reste proposer une version livre du rapport si le besoin s’en faisait sentir.

[5] Pour s’inscrire à la liste de discussion et porter ce débat avec nous, il suffit d’envoyer un mail à rapport-becta@framasoft.net.




Libérons les logiciels à l’école – 6 ans déjà…

Dans la série « La route est longue mais la voie est libre ».

Un peu d’histoire… Le 18 juin 2002, il y a 6 ans jour pour jour (et jour symbolique), j’avais activement participé via la liste de discussion dédiée à l’éducation de l’AFUL à une petite opération Libérons les logiciels libres à l’école en réaction à un courrier de promotion que Microsoft avait réussi à mettre dans les casiers des collègues enseignants.

Aujourd’hui Microsoft offre sa suite MS Office à tous les enseignants et le fait savoir en grandes pompes via son canal de diffusion préféré que constitue désormais son partenaire du Café Pédagogique. Et ceux qui œuvrent pour développer, faire connaitre et diffuser le logiciel libre à l’école continuent leur travail de fourmis mais ont toujours du mal à se faire entendre en haut lieu.

Il n’empêche que beaucoup de choses ont bougé en 6 ans, à commencer par la qualité des logiciels évoqués dans l’appel. Aucune raison d’être défaitiste même si on peut constater lucidement que les choses avancent peut-être plus lentement que prévu.

Copie d'écran - Framasoft

Libérons les logiciels à l’école

18 juin 2002

Des acteurs du monde éducatif font de la résistance en invitant les enseignants à "libérer" les logiciels.

Cher collègue,

En cette fin d’année scolaire, nous sommes nombreux à avoir reçu dans nos casiers une brochure publicitaire non sollicitée de la société Microsoft. Sur la couverture, cette simple phrase : "Vous faites tout pour économiser du temps et de l’argent… …voici une opportunité pour en gagner !"

Nous ne ferons pas de commentaires ici sur la manière de faire ni sur le contenu de l’offre, mais il est assez symptomatique que cette société aborde l’école en lui parlant avant tout d’argent.

Dans ce contexte, il nous paraît urgent d’informer plus encore la communauté éducative que de réelles et crédibles alternatives existent parmi la dynamique catégorie des LOGICIELS LIBRES.

Ces derniers, qui se préoccupent beaucoup moins d’argent que de liberté, participent au développement d’une informatique ouverte et pluraliste. Et nous ne pouvions rester insensibles au fait que, de part leur mode original de production et de distribution, ils abordent l’école en lui parlant plutôt de mutualisation, de travail collaboratif, d’intelligence partagée et de transmission réciproque des savoirs.

Ainsi rien qu’avec les trois logiciels OpenOffice.org, Mozilla et The Gimp, vous tenez en version française une suite bureautique complète, une remarquable panoplie d’outils pour le web et un puissant éditeur graphique, que vous pouvez en toute légalité installer sur votre ordinateur personnel et distribuer sur cédérom à vos collègues et vos élèves. Et, quand bien même nous l’appellerions de nos voeux, il n’est pas nécessaire d’être sous le système d’exploitation libre Linux pour les utiliser puisqu’ils se trouvent être également disponibles pour le système d’exploitation propriétaire Windows.

Pour les expérimenter au quotidien, nous pensons que leur utilisation est pertinente dans nos établissements scolaires et permet en outre de s’affranchir d’une logique économique qui n’est pas la nôtre. Si vous ne les connaissez pas encore nous vous invitons vivement à les essayer. Et, n’ayant pas, c’est le moins que l’on puisse dire, les moyens marketing de la société précédemment citée, nous vous invitons également à nous soutenir en relayant cette information sur le Net mais aussi en imprimant la simple page ci-dessous pour l’afficher dans votre salle des professeurs.

Bien cordialement.

Cette lettre et la feuille à imprimer qui l’accompagne ont été rédigées à plusieurs mains par des abonnés de la liste de diffusion "Linux et logiciels libres dans l’éducation" hébergée par l’AFUL.




Microsoft Office 2007 désormais gratuite pour tous les enseignants

Copie d'écran - OfficePourLesEnseignants.frIl fallait s’y attendre, la suite bureautique propriétaire Office 2007 de Microsoft est désormais proposé gratuitement à tous les enseignants (ils ne disent pas gratuit mais téléchargeable sans frais ou accessible à tous mais c’est du pareil au même).

C’est annoncé en Une du Café Pédagogique dont j’ai déjà eu l’occasion de pointer les relations plus qu’étroites avec Microsoft.

Du coup sur le très ambitieux site de l’opération on apprend, entre autres choses intéressantes, qu’un forum dédié sera hébergé par le Café Pédagogique.

Il n’y a pour le moment que deux messages d’ouverture et de bienvenue sur ce forum. Ils ont été rédigés par un membre fondateur de l’association Projetice dont, désolé pour la répétition, j’ai déjà eu l’occasion de pointer les relations plus qu’étroites avec Microsoft.

Il n’y a pas à dire ils sont bien organisés…

« Que cache une offre aussi importante ? » demande le Café Pédagogique à Eric le Marois, Directeur Education & Recherche chez Microsoft France. Réponse de l’intéressé : « Rien ».

Bon, je retourne en cours (en salle informatique pour être plus précis, équipée de la suite bureautique libre OpenOffice.org pour être encore plus précis) et m’en irai poster un billet plus complet quand la cloche aura sonné.




MSN Windows Live Messenger : Un succès qui interpelle

Copie d'écran - MSN Windows Live Messenger

– Papa tu m’achètes un ordinateur ?
– Euh, oui, enfin, pourquoi faire, pour les cours ?
– Pour tchater avec mes copines sur MSN.

Il y a quelque chose dont je n’arrive pas du tout à mesurer la portée c’est l’usage de MSN chez les jeunes. C’est bien simple, j’ai l’impression qu’ils l’utilisent tous ![1] (en dehors de l’école où il est en général prohibé)

Notons que ce qu’ils appellent MSN n’est autre que le logiciels MSN Messenger qui a récemment changé de nom en Windows Live Messenger (nous en ferons de même pour ce billet). Mais, plus révélateur, ce qu’ils appellent MSN est purement et simplement synonyme de messagerie instantanée. Un peu comme quand mon nouveau voisin me parle de Word lorsqu’il veut évoquer le traitement de texte (alors qu’évidemment mon ancien voisin, désormais sous OOo, il fait bien la distinction lui).

Tirer de grandes généralités sur la base de quelques témoignages est pour le moins dangereux, mais quand j’aborde la question avec mes élèves, rarissimes sont ceux qui ne l’utilisent pas. Il faut alors soit ne pas être connecté à la maison, soit être connecté mais subir les foudres de l’interdiction parentale, soit être connecté mais être barré par la grande sœur qui est déjà dessus (l’accès à MSN étant certainement aujourd’hui dans le top five des engueulades fratricides lorsqu’il n’y qu’une seule machine par foyer), soit enfin, dernière et étrange catégorie, l’avoir… décidé ainsi ! « J’aime pas MSN » proclame fièrement l’ado dark-rebelle schtroumpf-grognon par pur esprit de contradiction, quitte à ce que cet acte héroïque mais désocialisant ne lui fasse plus conserver qu’un seul ami : son psy. Quant à celui qui vous dirait : « J’aime pas MSN parce que derrière MSN il y a Microsoft dont je n’aime pas la vision du monde depuis que j’ai découvert le logiciel libre » alors là ce n’est plus chez le psy qu’il faut l’emmener mais directement en centre de rééducation !

Mais redevenons un peu sérieux. Et répétons-nous pour le moment cette hypothèse de travail : Tous les jeunes connectés sont sur MSN ! (même mon lycéen).

Il faut dire que pour confirmer ou informer cette radicale supposition, je ne suis guère aidé par la blogosphère et autres grands médias présents sur le net qui semblent briller par leur quasi-silence sur le sujet (encore plus que pour le logiciel libre, c’est vous dire…). On pourrait néanmoins penser qu’ils sont au courant mais juge le phénomène indigne d’intérêt ou marginal. J’y vois quant à moi plutôt une énième illustration d’un fossé générationnel d’autant plus troublant que tout se passe dans la maison où la génération du dessus sont les parents de la génération d’en dessous. « Il est tranquille dans sa chambre, on ne va tout de même aller le déranger, et puis, vous savez, on peut apprendre plein de choses avec internet… »

Petite parenthèse. Pour être tout à fait exact, il arrive que MSN soit évoqué dans la presse mais on le trouve alors le plus souvent dans la rubrique faits divers lorsque tel enfant a rencontré tel adulte d’abord virtuellement via MSN puis ensuite physiquement (malheureusement parfois dans tous les sens du terme). Il est absolument FONDAMENTAL d’éduquer nos enfants à reconnaitre et éviter ces risques bien réels (lien 1, lien 2, lien 3). Mais se borner à citer MSN dans ce seul cas de figure me fait penser à ceux qui n’évoquent Wikipédia que pour pointer ses bouts d’articles malveillants ou erronés, histoire de mettre en doute sa pertinence voire d’inspirer la méfiance. Inconsciemment ou non, une certaine presse continue encore de nous communiquer sa crainte du réseau (qui participe il est vrai du bouleversement actuel de la profession).

En attendant MSN est bien omniprésent dans l’univers numérique de nos adolescents jusqu’à faire office de véritable plaque tournante de leurs sessions internet (bien plus que le navigateur, il faudra que j’en parle à Tristan Nitot). Ouvrir son compte MSN est en effet de loin la première chose que fait notre jeune lorsqu’il se connecte (quand il ne l’a pas automatiquement paramétré), compte qu’il laissera ouvert en toile de fond pendant toute la durée de la session. Et quand bien même il s’en irait par la suite consulter son blog ou plutôt, correction, son skyblog (parce qu’un contact MSN vient de lui dire qu’il y a laissé un commentaire), voir une vidéo YouTube (parce qu’un autre contact lui signale le lien), ou consulter Wikipédia (parce qu’il y a la dissert’ de français à finir et qu’un contact propose d’y copier/coller un passage de l’encyclopédie), il y revient toujours sachant que tout contact peut le solliciter à tout moment.

Faut pas croire, c’est important cette histoire de contacts. « Combien t’as de contacts MSN ? » est une question courante dans une cour de récré. Et, si elle ne se confond pas (encore) avec « Combien t’as d’amis ? », elle n’en constitue pas moins un repère majeur chez nos adolescents. Il y a bien sûr quantité et qualité, mais pour faire bonne figure il convient impérativement de donner une réponse à deux chiffres sous peine d’éveiller les soupçons !

Bon, le décor étant planté, un certain nombres de questions affleurent inévitablement.

Il y a toutes celles, plus ou moins sociologiques, concernant la messagerie instantanée en général. Pourquoi un tel attrait chez les jeunes ? Combien de temps y passent-ils dessus ? Les filles plus que les garçons ? Pour quels usages ? Peut-on évoquer une sorte de réseau social entre contacts ? La langue, la lecture et l’écriture sortent-elles renforcées de leur passage sur MSN au style SMS si particulier (où l’on a vite fait de se disqualifier si l’on commence à… rédiger normalement). Les options à disposition (VoIP, MSN sur votre mobile, webcam, partage de fichiers, de musique, jeux en ligne…) sont-elles prisées ? Quelles perceptions ont les parents de ce jardin secret cultivé par leurs enfants ? (souvenez-vous des temps préhistoriques où les parents contrôlaient de près ou de loin toutes les communications via le seul et unique téléphone fixe du salon !). N’oublions pas non plus la fracture numérique, quid d’une jeune sans MSN parce que sans ordinateur ? Etc.

Mais il y a également toutes les questions qui concernent MSN en particulier. Regardez un peu comment Microsoft présente la nouvelle version de son logiciel sur le site dédié dont on comprend tout de suite à qui il s’adresse. C’est beau, c’est lisse, c’est clair et la jeune fille qui en fait la démonstration vidéo est souriante et pleine d’énergie (pour ne pas dire tout à fait craquante). Idem pour la version MSN pour votre mobile qui permet donc potentiellement d’être absolument tout le temps en contact avec vos contacts !

On se retrouve donc peu ou prou avec un logiciel qui a su capter toute une génération. Et pas n’importe quel logiciel, un logiciel propriétaire de l’éditeur Microsoft qui a visiblement mis tout son savoir faire technique et marketing à son service pour aboutir au succès actuel. Le tout… gratuitement. Pourquoi ? Pourquoi Microsoft accorde-t-il tant d’attentions et d’efforts à son logiciel de messagerie qu’il s’en va proposer gratuitement à la jeune génération ?

Je passe outre les réponses du type « parce que les enfants aiment et qu’on veut leur faire plaisir » qui ne peuvent convaincre que ceux qui pensent que Microsoft est une association à but non lucratif. Les mêmes sans doute qui pensent que Microsoft le philanthrope accompagnent les enseignants sans arrière-pensée.

Plus sûrement il y a la publicité. Elle est en effet présente dans MSN sous la forme d’onglets à gauche de la fenêtre de contacts et en bannière sous cette même fenêtre. Sachant que MSN est utilisé par plusieurs millions d’utilisateurs globalement moins publiphobes que leurs ainés, si ça n’est pas le pactole ça y ressemble fortement.

J’en veux pour preuve la récente nouveauté de Windows Live Messenger : le module de contrôle parental. Quand bien même il aura mis un certain temps à arriver, c’est une excellente initiative : les parents peuvent désormais surveiller la liste des contacts MSN de leurs enfants et autoriser ou non les nouveaux ajouts (moyennant, tiens, tiens, création d’un identifiant Windows Live ID). Par contre rien n’a été fait pour proposer de bloquer également la publicité, ce qui aurait pourtant été dans la logique d’une meilleure protection. Du coup, même si vos parents ont installé ce contrôle, rien n’empêche des publicités pour, par exemple, des sites de rencontres d’apparaitre dans MSN ! Si vous n’y voyez pas une contradiction…

Et l’on pourrait multiplier les exemples éducativement problématiques. On trouve ainsi une étude de cas fort intéressante sur la page McDonalds goûte au succès de MSN pour toucher un public jeune et branché du site Microsoft Advertising. Cela concerne l’Espagne mais j’imagine que la France n’a pas été épargnée. Extraits. « Des publicités élégantes sous forme de bannières et de skyscrapers sur la page d’accueil de MSN Espagne, sur MSN Hotmail, MSN Entertainment et MSN Messenger attiraient l’attention des utilisateurs par une question teaser avant de les rediriger vers le mini-site et leur donner la possibilité de recevoir gratuitement une ceinture tendance ». Quant aux résultats : « La campagne en ligne a généré 180400 clics en seulement deux mois » et un peu plus loin « La campagne globale a généré une augmentation de 19 % de la perception de McDonalds comme une marque « tendance », dépassant de 15 % l’objectif pré-campagne ».

Certains m’objecteront alors peut-être qu’il existe le généreux programme i’m où l’utilisateur MSN a la possibilité de choisir une organisation caritative à qui sera versée une partie (combien exactement ?) des bénéfices issues de son propre affichage publicitaire. Depuis le lancement de l’opération c’est ainsi plus d’un millions de dollars qui ont été distribués à l’Unicef ou la Croix Rouge américaine. Agir pour un monde meilleur grâce à la pub de mon MSN, je tire un grand coup de chapeau à la division marketing de Microsoft !

Toujours est-il que les 180400 clics en deux mois de la campagne McDonalds uniquement circonscrite à l’Espagne me laissent songeur. Il est vrai qu’ils ne provenaient pas tous de MSN Messenger mais également des autres services MSN. Or justement, blog (Spaces), mail (Hotmail), galerie photographique (Gallery), espace de stockage (SkyDrive), bureautique en ligne (Office Live), etc. MSN constitue une excellente porte d’entrée vers les autres services et produits Microsoft avec qui il est en totale synergie. Il y a clairement là une volonté de contrer Google en retenant l’utilisateur sur sa plate-forme, concurrence de la publicité en ligne oblige. Mais ce que je vois surtout c’est que lorsqu’un élève me poste un message avec son email perso il s’agit presque exlusivement d’une adresse Hotmail, conséquence directe de son inscription à MSN. Du coup on se retrouve non seulement avec une génération MSN messenger mais également avec une génération Hotmail. Il n’y a pas à dire, c’est bien pensé.

L’intégration est en effet poussée à son maximum. Une fois sur MSN vous pouvez d’une simple clic accéder à votre Spaces (blog) ou votre Gallery (photo). De plus lorsque vous recevez une nouvel email Hotmail (et uniquement Hotmail) vous êtes automatiquement prévenu. Tout comme vous êtes prévenu lorsque le Spaces d’un contact vient de se mettre à jour. Autant de raisons de conserver tous ces avantages et donc de rester dans l’univers Microsoft. Dernier élément concernant la publicité inhérentes à tous ces services. Très souvent il s’agit d’autro-promotion Microsoft. Nos millions d’adolescents MSN peuvent donc très souvent voir apparaitre telle ou telle info-promo sur par exemple Windows Vista ou la suite MS Office 2007. Et la boucle est bouclée en quelque sorte.

Si je résume mon propos on pourrait dire que, vis-à-vis de la jeunesse, MSN est un peu à Microsoft ce que l’iPod est à Apple. Une petite poule aux œufs d’or qui rapport directement, doublée d’un formidable produit d’appel, qui justifierait presqu’à lui tout seul l’achat d’un ordinateur sous Windows, triplée d’une fonction cheval de Troie susceptible par la suite de faire adopter les autres logiciels et services de l’univers Microsoft. Le tout en donnant au passage à la société une excellente image de marque auprès des adolescents, futurs étudiants puis futurs travailleurs et donc futurs clients et consommateurs. C’est a priori imparable et l’on comprend bien dans ces conditions que Microsoft fasse tout pour bichonner son joyau (comprendre mettre un paquet de développeurs sur le coup pour ajouter toujours plus de fonctionnalités et de confort à l’utilisateur).

Tout ceci m’interpelle. En tant que parent, en tant que prof, mais aussi en tant que rédacteur du Framablog.

Admettons que je n’exagère pas l’importance de MSN chez les adolescents, ou tout du moins chez les adolescents français (parce que j’ai cru comprendre que le taux de pénétration de MSN était très différent d’un pays à l’autre). Admettons que les nouveaux entrants comme MySpace mais surtout Facebook ne soient pas encore à même de rivaliser dans la tranche d’âge. On peut alors se demander si la situation, telle que décrite ci-dessus, est un problème lorsque l’on souhaite faire la promotion du logiciel libre et son état d’esprit ? N’y a-t-il pas là, quelque part, un frein à sa diffusion ?

Culture du gratuit, publicité banalisée, contrat que l’on signe les yeux fermés et donc absence totale de réflexion sur le devenir de ses données personnelles (qui transitent par les serveurs de Microsoft), protocole de communication centralisé et fermé (était-il besoin de préciser que c’est bien le cas ici ?), hégémonie Microsoft renforcée, etc. J’ai bien peur qu’il ne faille répondre affirmativement à cette ultime question.

Le logiciel libre est certes habitué à faire face à des situations de monopole : « Tout le monde travaille sous Word, pourquoi changer ? ». Mais ici c’est encore plus complexe parce que MSN n’est pas une activité solitaire et capte des citoyens en devenir.

Que faire alors ? Impossible de demander à un jeune de quitter son réseau de contacts, ce qui serait à peu près équivalent pour lui a s’en aller sur une île déserte. Il n’y donc plus que la solution de créer des clones libres de MSN qui ont de bons arguments et font de réels efforts pour se rapprocher de l’original mais ont néanmoins du mal à suivre (notamment à cause de cette histoire de protocole fermé que Microsoft ouvre de temps en temps selon son bon vouloir). Allez-y, faites l’expérience, montrer à un jeune qu’on peut faire du MSN via aMSN, emesene ou PixaMSN. Il vous dira « Ouais c’est pas mal mais il n’y a pas ceci ou cela » (comme par exemple l’audio/vidéo) et il retournera invariablement à son MSN. Et ce n’est pas qu’une question d’habitudes parce qu’il y a l’ergonomie, le confort, les options… bref tout ce qui fait qu’aujourd’hui MSN est, me semble-t-il, intrinsèquement le meilleur logiciel de messagerie instantanée disponible sur le marché (et je ne demande qu’à être contredit).

Vous pouvez bien sûr sans crier gare, dans une double crise d’autorité parentale et d’éveil mystique à la culture libre, décréter unilatéralement qu’à partir d’aujourd’hui tous les ordinateurs de la famille passent désormais aux logiciels libres à commencer par le système d’exploitation. Bon courage alors, je suis de tout cœur avec vous. Parce qu’il faudra tenir bon, surtout quand la petite dernière arrivera les yeux plein de larme vous soupirer : « C’est nul, y’a plus mon MSN, mais pourquoi papaaa tu me fais çaaa à môaaa ? »

Ne reste plus qu’à faire preuve d’écoute, de dialogue et de pédagogie où vous évoquerez avec votre enfant non seulement la messagerie instantanée en général mais aussi (voire surtout) MSN en particulier. Et qui sait, peut-être arriverez-vous à le convaincre de renoncer au client Microsoft pour adopter un client libre comme Pidgin, Kopete ou Miranda, (en plus de ceux cités plus haut). Peut-être aussi, rêvons un peu, en fera-t-il de même avec tous ces amis/contact. Jusqu’à, soyons fous, abandonner le circuit MSN et adopter ensemble un protocole de communication ouvert comme Jabber.

Sauf à penser qu’il faut bien que jeunesse numérique se passe (c’est-à-dire reconnaitre à demi-mot que Microsoft est trop fort sur ce terrain-là). Et d’attendre alors qu’il soit un peu plus grand pour envisager que ce fils chéri mais un poil conditionné devienne un homme de plus en plus libre.

Couverture de la BD @accrocs d'MSN par Lol et Mdr

Notes

[1] L’illustration initiale est une copie d’écran de la page d’accueil de site officiel de Windows Live Messenger. L’illustration finale est un détail de la couverture de la BD @ccrocs d’MSN tome 1 de Lol et Mdr.




Quand l’étudiant hongrois se trompe de cible ?

La vidéo fait sourire et est certainement promise à une belle carrière sur YouTube.

Lors d’une récente conférence à Budapest, Steve Ballmer le PDG de Microsoft planqué derrière sa tribune pour échapper aux œufs lancés (mollement) par un étudiant en colère (tee-shirt « Microsoft = Corruption » dans le dos) qui exhorte Microsoft à rendre l’argent qu’il aurait volé aux hongrois en passant, si j’ai bien compris, des accords avec les universités du pays.

Au delà de l’anecdote médiatique (qui nous rappelle celle de l’étudiant chinois), je crois que ce genre de manifestations (aussi dérisoires et pathétiques soient-elles) témoignent de l’irritation croissante des étudiants vis-à-vis de la société de Redmond dont ils comprennent petit à petit que non seulement ils peuvent s’en passer mais qu’utiliser des alternatives libres est bien plus en phase avec la culture et l’éthique des valeurs éducatives.

Dans ce contexte, lorsque leurs administrations signent des accords avec Microsoft, l’argument « c’est pour le bien de nos étudiants » (et accessoirement de notre budget) a de plus en plus de mal à passer. Ce qui me fait dire qu’en toute logique il vaudrait mieux réserver les œufs aux directeurs des institutions publiques éducatives qui entérinent ces accords (puisque Microsoft ne fait que son boulot après tout).

Quant à la situation en France autour du même sujet, si on prenait la peine de la regarder d’un peu plus près, peut-être porterait-elle Monsieur Darcos à rendre plus souvent visite à son teinturier.