Khrys’coronalungo du lundi 11 mai 2020

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


Brave New World

Spécial France

Spécial médias et pouvoir

Spécial Coronavirus – données (plus ou moins) scientifiques

Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé

Spécial travail et inégalités par temps de coronavirus

  • Le cri de détresse des mères isolées en confinement (bondyblog.fr)
  • En France, « le gouvernement ne répond pas aux associations qui l’alertent sur un nécessaire moratoire des loyers » (bastamag.net)

    En Allemagne, un moratoire des loyers pour une période de trois mois est instauré pour les locataires en difficulté, avec un délai de paiement s’étendant jusqu’à septembre 2022. À Lisbonne, ainsi qu’à Barcelone, les maires ont gelé le paiement des loyers dans leur parc HLM jusqu’en juin. Le paiement des prêts immobiliers est suspendu dans toute l’Espagne, les locataires suisses peuvent suspendre sans sanction leur loyer pendant trois mois, les gouvernements canadiens et anglais versent une aide aux locataires… En France, où les loyers n’ont jamais été aussi chers et sont parmi les plus élevés d’Europe, le gouvernement n’agit pas[…] Il prend le risque inconsidéré de provoquer des procédures d’expulsion massives et d’ajouter à l’angoisse générée par l’épidémie celle des locataires en difficulté économique.

  • Chantale chargée des repas à l’hôpital privé d’Antony est décédée du Covid-19 à 44 ans (leparisien.fr)

    Elle était de ceux qu’on voit moins. De ceux qu’on entend moins. Mais qui dans l’ombre prêtent main-forte aux soignants en 1ère ligne dans la lutte contre l’épidémie.

  • Coronavirus : des personnels de l’aéroport de Roissy exposés au Covid-19 (francebleu.fr)

    selon plusieurs sources de la cellule investigation de Radio France, la grande majorité des entreprises de Roissy n’étaient récemment pas en conformité avec le code du travail.[..] il semble qu’il ait fallu, selon plusieurs syndicalistes, la mort d’un agent de filtrage chargé des palpations aux portiques des suites de la Covid-19, début avril, pour que ses collègues soient équipés de masques le 7 avril.

  • Masque obligatoire : les inégalités au grand jour (politis.fr)

    Quand on sait qu’il faut au moins deux masques de ce type par jour pour une journée de travail, en faisant l’addition on se rend vite compte du budget que cela peut représenter pour les familles les plus modestes. Certains n’ont pas les moyens. Vu les disparités de distribution gratuite d’une collectivité à l’autre, cette obligation devient injuste

Spécial répression, violences et abus de pouvoir

Spécial la démocratie et nos droits en prennent un coup

Spécial résistance

Soutenir

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les autres trucs chouettes de la semaine

Deux personnages prennent le café. Le personnage de gauche dit : Eh ben, toujours aussi long ! - la personne de droite répond : Yep, et ça risque de durer encore un petit bout de temps, vu comment nos dirigeants
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).




Khrys’coronalungo du lundi 4 mai 2020

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


Brave New World

Spécial France

Spécial médias et pouvoir

Spécial sortie de confinement

Spécial Coronavirus – app de traçage

Spécial Coronavirus – données (plus ou moins) scientifiques

Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé

  • «Le pouvoir prend les Français pour des abrutis» (liberation.fr)

    Il y a quelque chose de fascinant à voir ces hommes se comporter comme si Internet n’existait pas, ou comme si parmi les atteintes neurologiques liées au coronavirus, on décomptait une épidémie de démences subites.

  • Coronavirus : comment le discours des autorités sur les masques a largement changé (lemonde.fr)
  • Hôpitaux de province : la deuxième lame de crise ne sera pas le Covid (liberation.fr)
  • Le nombre “sidérant” de masques annoncés indigne les professionnels de santé qui en ont tant manqué (huffingtonpost.fr) – voir aussi : Polémique sur les masques: la grande distribution n’a pas en stock les millions de masques annoncés (bfmtv.com)
  • Les masques tombent ! (ordre-sages-femmes.fr)

    Aujourd’hui, la consternation s’allie au dégoût. Toute guerre a ses profiteurs. C’est malheureusement une loi intangible de nos conflits. Comment s’expliquer que nos soignants n’aient pas pu être dotés de masques quand on annonce à grand renfort de communication tapageuse des chiffres sidérants de masques vendus au public par certains circuits de distribution. Où étaient ces masques quand nos médecins, nos infirmiers, nos pharmaciens, nos chirurgiens-dentistes, nos masseurs-kinésithérapeutes, nos pédicures-podologues, nos sages-femmes mais aussi tous nos personnels en prise directe avec la maladie tremblaient et tombaient chaque matin ?

  • «Bas les masques» : des couturières professionnelles ne veulent plus travailler gratuitement (liberation.fr)
  • Tutos partout, santé publique nulle part (liberation.fr)

    Pourquoi se retrouve-t-on dans la situation d’accepter de faire nous-mêmes, dans l’urgence, ce que d’autres auraient dû faire pour nous dans la prévoyance ? D’autres que nous finançons par nos impôts, par exemple. D’autres qui pourraient l’être par une politique fiscale plus juste et redistributive, autre exemple.

  • “Les prix des masques réutilisables en tissu, dont les modèles sont très variés, ne seront pas encadrés”, avertit l’asso de consommateurs. (60millions-mag.com)
  • Covid-19 : “Sur les tests, tout le monde ment, on ne pourra pas en faire 700 000”, affirme le Pr Froguel (francetvinfo.fr)

    Beaucoup de choses me désespèrent. Exemple récent : la carte avec les départements en rouge ou en vert. Le gouvernement a parlé de trois critères. Finalement, il y en a un qui a sauté. Et sur le premier (la circulation du virus), les données nous manquent forcément puisqu’on n’a pas fait assez de tests. Seul le critère sur la situation des services de réanimation est fiable. Par ailleurs, l’étude de l’Institut Pasteur nous dit que 4 millions de personnes ont été infectées. Mais en réalité, on ne sait pas. On n’a pas fait assez de tests. Cette modélisation n’est pas fiable. Dans cette crise, on a manqué de science. On n’a pas fait assez de statistiques.

  • «Nos généraux continuent de nous traiter comme de la chair à canon» (liberation.fr)

    Mardi 28 avril, j’ai reçu mes premiers masques FFP2 depuis le début de la pandémie. Six masques. Six masques offerts par le gouvernement. Jusqu’ici je n’avais reçu que des chirurgicaux, sporadiquement. Jusqu’ici j’ai pu me protéger uniquement parce que j’avais constitué un petit stock, périmé depuis longtemps. […] Ce scandale se déroule sous vos yeux, ici et maintenant. Ce n’est pas le Rainbow Warrior, ce n’est pas l’affaire Karachi. Tout ceci ne se passe pas dans un pays lointain, il y a une quinzaine d’années, mais ici et maintenant. Ceux qui vous soignent sont mis en danger, tombent malades, meurent, du fait d’une succession de décisions politiques aux conséquences meurtrières. Vous n’en êtes pas responsables, mais vous en êtes témoins.

  • Thread de Maître Pandaï sur le confinement / déconfinement (threadreaderapp.com)

    Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on peut craindre que l’équipe de bras cassés qui nous gouverne ne fasse une espèce de grand chelem des erreurs : confiner trop tard (fait), mal confiner (fait), déconfiner sans être prêts (c’est bien parti). […] D’abord, pourquoi a-t-il fallu confiner ? Le confinement général est une méthode bourrine, extrême que l’on est contraint d’utiliser lorsqu’on ne peut plus appliquer une méthode à la fois plus logique, plus élégante et moins destructrice : le confinement ciblé des malades. […] Lorsque la bureaucratie Macron se réveille enfin, à partir du 12 mars, pour commencer à prendre avec un retard massif les mesures qui s’imposaient, l’épidémie était en fait déjà très avancée par endroits, menaçant de submerger les capacités du système de santé. Quand Macron aurait-il dû confiner ? Le 5 mars, il déclare que l’épidémie est « inexorable » : il doit en tirer aussitôt les conséquences et réagir au plus vite. Le lendemain, on était à 9 morts et 600 cas recensés : c’est à peu près à ce stade que Wuhan avait été confiné. Macron aurait dû confiner le 10 mars au plus tard ; car l’Italie, qui annonçait la couleur avec 9 jours d’avance, avait confiné la veille. […] Les 6 à 10 jours de retard (pour être gentil, car on pouvait boucler “préventivement” dès le 1er mars) dans les mesures de fermetures et de confinement ont coûté extrêmement cher en vies humaines. Le prix de la nullité du pouvoir : la mort en masse.

Spécial travailleur·euses par temps de coronavirus

Spécial répression, violences et abus de pouvoir

Spécial la démocratie et nos droits en prennent un coup

  • Pour lutter contre l’épidémie, un partage des données médicales «sans le consentement» des malades (liberation.fr)
  • Crise sanitaire : la Technopolice envahit l’université (laquadrature.net)
  • L’état d’urgence sanitaire et l’état du droit du travail (lundi.am)

    Les secteurs utiles dans la lutte contre le Covid 19 avaient déjà toute latitude pour augmenter le temps de travail. L’ordonnance n’est utile que pour les secteurs qui ne sont pas utiles à cette lutte. L’Etat d’urgence sanitaire prévoit de nombreuses mesures inutiles dans la lutte contre le virus. Les mesures relatives aux temps de travail font mieux : elle ne contiennent que des mesures inutiles dans la lutte contre le virus. C’est une curiosité. […] Très clairement, dans de nombreux cas, la santé a été pensée comme secondaire par le Gouvernement, la priorité étant la poursuite de l’activité économique. Il s’agit de positions qui sont relativement proches de celles des dirigeants les plus caricaturaux de la planète, comme Trump ou même Bolsonaro. Nous ne sommes pas aussi éloignés que cela de ces malades mentaux que nous avons tendance parfois à croire exotiques. […] L’avenir dépendra, comme d’habitude, du rapport de force. Celui-ci a souvent été perdu par le passé. Cela ne veut pas dire qu’il le sera encore à l’avenir. Il est certain que le Gouvernement craint la force des mobilisations qui pourraient suivre le confinement. Il nous appartient de lui montrer que ses craintes sont sous-estimées.

  • État d’urgence sanitaire : l’ordre social quoi qu’il en coûte (lundi.am)

    L’état d’urgence n’est pas le confinement, loin de là. Il ne durera pas ce que le confinement durera, loin de là. L’état d’urgence sanitaire n’implique pas qu’une modification de nos quotidiens pour la protection de notre santé collective. Il implique aussi l’instauration d’un État autoritaire pour la sauvegarde de l’ordre social en perspective de l’offensive capitaliste annoncée. […] Réduire les enjeux de l’EUS aux modalités du confinement évacue toute critique conséquente de la gestion de la crise. Car cette loi concerne bien plus que la santé. Elle met en place un régime politique qui n’est malheureusement pas inédit. Lorsque les pouvoirs sont concentrés dans les mains de l’exécutif et qu’il peut en user de manière discrétionnaire cela porte un nom, même si cela heurte les mythes du pays des droits de l’homme et de l’Europe de la démocratie. […] Dans la rue, c’est la police qui décide de manière arbitraire si nos déplacements sont légitimes ou non, sans qu’aucun texte ne précise les conditions de l’infraction au non-respect du confinement et sans que les tribunaux de police puissent statuer en cas de contestation : désormais toute personne dans la rue est délinquante sauf preuve du contraire, ou plutôt sauf acquiescement aléatoire des flics. Un blanc-seing leur est donné pour les contrôles abusifs et les violences, surtout dans les quartiers populaires où les brutalités habituelles de la police se sont intensifiées. En outre, la répétition de verbalisations est devenue un délit, ce qui est parfaitement contraire aux règles du droit. […] L’instauration d’un nouveau régime est un choix politique, non une fatalité virologique déterminée par la catastrophe sanitaire. La culpabilisation et la répression à l’encontre des classes populaires ne suffisent pas à masquer les dénis du gouvernement, ses mensonges, sa gestion mortifère, l’absurdité de ses consignes contradictoires, non plus la mesquinerie de ses politiques budgétaires, la férocité de ses réformes, sa logique de privatisation à tout va. Il est des mesures prises qui ne peuvent en aucun cas se justifier par la prévention sanitaire mais qui servent sans aucun doute une stratégie de domestication de la population. […] En quelques jours, les droits de la défense ont été anéantis à toutes les étapes du parcours judiciaire, de l’arrestation jusqu’à la sortie de prison.

  • Emmanuel Todd : « Macron n’est plus républicain » (lvsl.fr)

    le gouvernement est effectivement en marche, mais vers l’anti-constitutionnalité. Nommez cette conséquence illégalité ou illégitimité, comme vous voulez. Le gouvernement de la France se promène hors la loi, régnant par la police et il s’approche du coup d’État.

  • Confinement : le débat interdit (liberation.fr)

    Tant que l’État d’urgence sanitaire s’appliquera (jusqu’à la fin du mois de juillet vient-on d’apprendre), la France n’est plus une démocratie, même si elle n’est pas tout à fait une dictature. En son temps, François Mitterrand avait dénoncé le « coup d’État permanent » qu’étaient les institutions de la Ve République. Le coronavirus a permis d’aller jusqu’au bout de cette logique institutionnelle.

Spécial résistance

Soutenir

VPN et services sécurisés pour nous organiser en ligne : soutenons Riseup ! (paris-luttes.info)

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

  • Face au virus, « un arsenal techno-sécuritaire démesuré et absurde » (cqfd-journal.org)
  • Aux masques citoyens. Stigmate, uniforme et panoplie. (affordance.info)

    quand le masque se déploie à l’échelle d’une société contrainte dans ses mouvements et policée par l’arbitraire d’états d’urgences persistants, alors le masque est la première pièce de l’uniforme. D’une mise au pas. D’une mise au pli. […] Nous avons davantage besoin d’armes que d’ordres. Lorsque nous les aurons, portons nos masques comme des panoplies, jamais comme des uniformes.

  • Dynamique des confinements généraux (lundi.am)

    Le mot d’ordre du confinement général est parfaitement inédit, non seulement en ce qu’il constitue une consigne sanitaire jamais expérimentée et qui ne tient ni du soin ni de la quarantaine, mais surtout en ce qu’il vise, dans un même mouvement, à alarmer et protéger ; il est à la fois la gifle et les jupes de maman. Ramener chacun à son havre de sécurité, logement, famille, et surtout s’opposer à toute activité exploratoire même parfaitement solitaire, à toute sortie. Le confinement ne se nourrit ni de la solidarité avec les concitoyens, que l’on préserverait ainsi de la contamination, ni de la solidarité avec les soignants, à qui on éviterait l’épuisement, mais de mille petites ou immenses vexations qui activent l’attachement ; propagande inédite en son ampleur qui termine tout discours par “restez chez vous, prenez soin de vous”, privation des libertés de circulation et de réunion, même pour des obsèques, suspension de certaines protections offertes notamment par le droit pénal (obligation de soumettre une cause au débat et de motiver la décision) et le droit du travail (droit au repos), formulaires divers, contrôles de police arbitraires, amendes, dénonciations, arrêtés municipaux, etc., mille vexations qui viennent sonner l’alarme afin de priver le sujet de toute velléité exploratoire et de le renvoyer si possible à un havre de sécurité.

  • Le confinement amplifie la numérisation du monde (reporterre.net)

    Avec l’épidémie et le confinement, nous sommes non seulement privés de monde au sens culturel et politique, mais aussi de monde sensible […] La seule chose qu’on nous laisse, […] c’est l’écran d’ordinateur. On s’y engouffre d’autant mieux que les outils numériques ont cette capacité de donner l’illusion qu’ils maintiennent ou recréent le monde autour de nous – l’illusion d’être ensemble, alors que nous sommes isolés.

  • Nouvelles réflexions – Giorgio Agamben (lundi.am)

    Moi, je ne suis ni virologue ni médecin, mais je m’en tiens à citer des sources officielles fiables. […] Je cite les mots du Docteur Blangiardo : “Au mois de mars 2019, les décès de maladies respiratoires s’élèvent à 15 189 et l’année précédente à 16 220. Incidemment, on constate un total plus élevé que le nombre correspondant de décès par Covid (12 352) déclarés au mois de mars 2020”. Mais si cela est vrai et nous n’avons pas de raison d’en douter, sans vouloir minimiser l’importance de l’épidémie, il faut pourtant se demander si celle-ci peut justifier des mesures de limitation de la liberté qui n’avaient jamais été prises dans l’histoire de notre pays, pas même durant les deux guerres mondiales. Naît le doute légitime qu’en répandant la panique et en isolant les gens dans leurs maisons, l’on a voulu se décharger sur la population des gravissimes responsabilités des gouvernements qui avaient d’abord démantelé le service sanitaire national et ensuite, en Lombardie, commis une série d’erreurs non moins graves dans la façon d’affronter l’épidémie.

  • Les évidences incomprises de la pandémie (lundi.am)

    le problème est que nous continuons à utiliser le travail comme outil d’accès aux ressources nécessaires pour vivre tandis que nous en avons de moins en moins besoin, une fois les grandes infrastructures mises en place. […] Le désengagement progressif mais assez rapide entre travail et revenu de subsistance adéquat n’est pas alors une mesure radicale mais un simple ajustement aux conditions actuelles.

  • Vivre et laisser mourir (lundi.am)

    « Pourquoi les vies que l’on tente de sauver aujourd’hui nous paraissent-elles plus importantes que celles que l’on ne sauve pas d’habitude ? » la faim et la pauvreté tuent 25000 personnes chaque jour dans le monde. Et il faudrait moins d’un milliard d’euros par jour pour que ce ne soit plus le cas. Un milliard par jour – à trouver dans le monde entier – alors que pour lutter contre le coronavirus, la France seule n’hésite pas à perdre le double.

  • Sauver des vies (lundi.am)

    « Quelle vie sauvons-nous, exactement, en ce moment ? » On enferme avec bienveillance, on retire de la vie pour protéger – protéger de l’autre, car l’Autre est dangereux. L’Autre, en marchant sur les trottoirs avec ses courses, l’Autre assis dans le tram pour aller à l’école ou travailler, l’Autre, membre de sa famille, qui ne vit pas sous le même toit mais qu’on aime : cet Autre peut contaminer, donc tuer le vieux.

  • Comment le capitalisme du « juste-à-temps » a diffusé le coronavirus (agitationautonome.com)
  • Quatre hypothèses sur la situation économique (blog.mondediplo.net)

    Récemment interrogé quant aux suites à donner à la crise présente, Macron répond qu’elle « n’enlève rien de ce qu’on a fait avant » et qu’« on rebâtira sur cette base-là ». « Nous allons prendre un grand tournant mais sur cette base de la ligne droite ». La politique comme géométrie non-euclidienne, même Gilles Le Gendre, toujours inquiet de se montrer trop intelligent et trop subtil, pourrait avoir du mal

  • Mes chers élèves, vous allez nous épater ! (liberation.fr)

    Vous êtes la génération qui subit la déflagration majeure : élevés, nourris, bichonnés dans la confiance en un progrès global via la société de consommation, vous voici, à peine adultes, aux premières loges pour assister au premier bug mondial d’un système qui, en douce, avait déjà fragilisé notre tissu vital. Vous le savez, tout indique que de tels bugs, il y en aura d’autres.

  • Revenu universel : la fausse bonne idée qui ravira les patrons (frustrationmagazine.fr)
  • A Brief History of the Gig (logicmag.io)
  • La 5G, infrastructure logique d’internet (lundi.am)
  • Mémorandum Covid-19 pour du libre et de l’open en conscience : enseignements et impulsions futures (framablog.org)
  • « Le syndicalisme, c’est l’auto-organisation des faibles pour se défendre contre les forts » (lenumerozero.info)
  • Les Martyrs de Chicago – aux origines du 1er mai (rebellyon.info)
  • Confiné·e·s : pour renverser le capitalisme, prenons le temps de nous organiser et de nous fédérer ! (a-louest.info)

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les autres trucs chouettes de la semaine

Deux personnages prennent le café. Le personnage de gauche dit : Eh ben, toujours aussi long ! - la personne de droite répond : Yep, et ça risque de durer encore un petit bout de temps, vu comment nos dirigeants
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).




Khrys’coronalungo du lundi 27 avril 2020

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


Brave New World

Spécial France

Spécial sortie de confinement

Spécial Coronavirus – app de traçage

Spécial Coronavirus – données (plus ou moins) scientifiques

Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé

Spécial inégalités par temps de coronavirus

Spécial travailleur·euses par temps de coronavirus

Spécial répression, violences et abus de pouvoir

Spécial la démocratie et nos droits en prennent un coup

  • Les droits fondamentaux en quarantaine ? (liberation.fr)
  • StopCovid, un bracelet électronique pour tous (liberation.fr)
  • État d’urgence sanitaire et état de droit – Entretien avec le juriste Paul Cassia (lundi.am)

    Ici, le confinement ayant été justifié par la nécessité de préserver le droit à la vie, cette liberté fondamentale vient en quelque sorte « écraser » un nombre considérable d’autres libertés – celles de réunion, d’entreprendre, d’exercer son activité professionnelle, d’aller et de venir, de manifester… De plus, le Conseil d’Etat considère qu’il n’a pas à inspirer ou insuffler une politique publique à l’égard de l’exécutif, de sorte qu’il a accentué la règle du confinement « brut » (c’est à cause d’une décision du Conseil d’Etat du 22 mars 2020 que le Premier ministre a pris la décision de fermer les marchés alimentaires ouverts), tout en refusant de la mettre en balance avec les carences pourtant avérées de la lutte contre le covid-19 : il est inacceptable qu’après un mois de confinement, toute la population ne dispose pas de masques, de gants, de tests – sans même évoquer les mesures particulières qui auraient dû être prises à l’égard des médicaments et du personnel hospitalier. […] Le principal danger de l’état d’urgence sanitaire pour les libertés publiques est d’ordre philosophique : il serait de penser que la solution aux risques de toute nature (attentats, catastrophe sanitaire…) est de type quasi-répressif, ou en tout cas relève de la police administrative, alors qu’elle relève essentiellement du terrain politique. […] Il aurait sans doute été possible de mieux concilier la prévention de l’ordre public sanitaire et les libertés individuelles en n’adoptant pas une logique guerrière et, en parallèle d’un bref confinement, en réquisitionnant l’industrie française tout en donnant au service public hospitalier les moyens de fonctionner à hauteur des exigences du moment. Mais après tout, on a les dirigeants que l’on mérite.

  • La justice pénale sous état d’urgence sanitaire (lundi.am)

    Lorsque l’on prend un peu de recul, la contradiction confine à l’aporie : enfermer pour protéger la santé publique alors que les mesures de prophylaxie élémentaires pour empêcher la propagation du virus consistent dans la distanciation et imposent donc de vider les prisons. En réalité, cette ordonnance n’est pas un moyen pour l’Etat d’adapter la justice pénale à la lutte contre le virus. Elle est le moyen pour l’Etat de poursuivre la répression malgré la pandémie.

  • Ordonnance après ordonnance, le Conseil d’Etat refuse de suspendre les ordonnances (blog.landot-avocats.net)
  • Tribunal de Nanterre : les avocats dénoncent les détentions illégalement prolongées (leparisien.fr)
  • Le Covid-19, nouvelle menace sur la liberté de la presse (liberation.fr)

Spécial résistance

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

  • Cent ans de crise – Yuk Hui (lundi.am)
  • La pandémie montre ce que la voiture a fait de nos villes (theatlantic.com – en anglais)
  • « Le solutionnisme technologique restreint complètement nos imaginaires politiques » (lundi.am)
  • Contre l’inflation technologique : « Arrêter de nourrir la bête qui nous dévore » (cqfd-journal.org)

    C’est d’ailleurs ce que montre la façon dont Tenochtitlan, devenue Mexico après la prise du pouvoir par les Espagnols, a évolué : les nouveaux maîtres de la ville, qui était une splendide cité lacustre, décident de démolir tous les bâtiments et d’assécher les lacs. Notamment pour construire des routes, sur lesquelles faire rouler les chariots à roues… Une décision stupide, car la ville est une cuvette, arrosée par les montagnes environnantes et les pluies tropicales une partie de l’année. Conséquence : la cité est très régulièrement inondée, parfois même pendant plusieurs années. Et c’est un problème qui n’a toujours pas été résolu à ce jour, malgré la construction d’un grand canal d’évacuation au début du XXe siècle, qui est déjà obsolète, la ville s’affaissant un peu plus chaque année. Au fond, les Mexicains sont encore en train d’éponger les conneries des Espagnols. C’est une très bonne illustration d’un progrès qu’on te donne comme fabuleux alors qu’il est défaillant. […] les Mexicains d’aujourd’hui disent “la roue manquait aux Aztèques” alors qu’il y avait surtout une chose qui manquait : la sagesse aux Espagnols. Il faut faire attention à l’impératif d’efficacité, y compris chez ceux qui cherchent à penser autrement la société. […] Si tu refuses de nourrir la machine, alors quelque chose peut arriver. Je crois vraiment à l’arrêt. Arrêter de nourrir la bête qui nous dévore[…] Internet a été un parfait exemple en ce sens : on disait, on espérait, que ça allait tout changer, en bien […] le nouveau livre, la connaissance universelle, le dialogue sans frontières. Sauf que non : on s’est fait piéger par cette Gorgone au regard glaçant qui s’appelle progrès. C’est allé vers le pire, comme d’habitude.

  • « Il y a une main humaine derrière l’automatisation apparente de la commande en ligne » (lundi.am)
  • Du dernier kilomètre au premier mètre. Urbi et Orbi de la pandémie. (affordance.info)

    Epidémie. Etymologiquement “sur” le peuple. Pandémie. Etymologiquement “tout” le peuple. Et – pardon pour le néologisme – peut-être aujourd’hui une sorte “d’ubiquidémie”. Etymologiquement “partout” le peuple. C’est à dire l’idée d’un peuple ou de l’humanité dans son entier, qui devrait ou pourrait être tracée, suivie partout à la fois, de son premier mètre à son dernier kilomètre.

  • Starlink, LSD et Sillicon Valley – Elon Musk in the Sky with Diamonds (lundi.am)

    Quand prendre un avion connecté à Internet n’interrompt plus le flux de votre travail, vous êtes en contrôle. Quand vous êtes sur une île déserte et que vous êtes toujours connecté, vous êtes en contrôle. Quand un bracelet connecté continue de relever vos signaux biométriques et votre position, vous êtes en contrôle. Vous maîtrisez tous les aléas de votre destin. Et êtes donc responsable, redevable, de chaque imprévu qui pourrait impacter votre productivité.

  • Covid-19 : pour un vaccin libre de droits (tcrouzet.com)

    Si aujourd’hui, après une brève pénurie, on ne manque plus de gel, c’est parce que les formulations hydro-alcooliques sont libres de droits, parce qu’elles sont un bien commun, et que de ne nombreuses bonnes volontés se sont mises à les produire dès que la demande a augmenté. Pourquoi n’avons-nous pas de masques ? Tout simplement parce qu’avant la crise aucun de fiable, de testé, de suffisamment simple à produire n’avait été versé au compte des biens communs. Nous avons fait confiance à l’économie de marché, partant du principe qu’elle était la plus efficace, et nous avons eu la démonstration que cette assomption était fausse. Nous en sommes réduits à faire appel à des industriels qui spéculent, se font la guerre, se vendent aux plus offrants. Résultat : les masques arrivent au compte goûte. […] Pourquoi personne ne parle de tests Covid-19 brevetés ? Parce que Christian Drosten et son équipe ont libéré dès la mi-janvier le test qu’ils ont mis au point.

  • Euro : le miracle ou la mort (blog.mondediplo.net)
  • The many languages missing from the internet
  • BlackRock devrait être saisi pour crimes contre la planète (vice.com – en anglais)

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les autres trucs chouettes de la semaine

Deux personnages prennent le café. Le personnage de gauche dit : 27 minutes pour le 27 avril, avoue que tu l'as fait exprès ! - la personne de droite répond : Nope, même pas
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).




StopCovid une application qui vous veut du bien ?

On continue notre dossier StopCovid, avec cette fois la (re)publication d’un billet de Loïc Gervais, médiateur numérique, formateur et citoyen engagé. Il partage ici son ressenti en tant que professionnel de la médiation numérique sur l’application StopCovid.

[Article paru originellement sur http://mediateurnumerique.org/, sous licence Creative Commons By]

Accéder aux articles déjà publiés dans notre dossier StopCovid


Dans son adresse aux Français du 13 avril, le Président de la République Emmanuel Macron a fait mention de l’application StopCovid sans la nommer.

Plusieurs innovations font l’objet de travaux avec certains de nos partenaires européens, comme une application numérique dédiée qui, sur la base du volontariat et de l’anonymat, permettra de savoir si, oui ou non, on s’est trouvé en contact avec une personne contaminée. Vous en avez sûrement entendu parler.

Une chose est certaine, nous entendons beaucoup parler de cette application. Mais qu’en savons-nous vraiment ? Le rôle du médiateur numérique est d’accompagner le citoyen dans les enjeux liés au numérique. Autrement dit de lui donner les éléments essentiels de culture numérique pour qu’il puisse se forger une opinion sur cette application et ainsi participer au débat. Voyons donc à travers ce billet son principe de fonctionnement dans un premier temps. Vous avez été nombreux à me questionner aussi sur les risques de sécurité informatique ainsi que sur les risques liés à nos données personnelles.

 

Le laboratoire de Mr Q

Dans les films de James Bond, le professeur Q est celui qui fournit à 007 les innovations technologiques pour accomplir au mieux sa mission. Pour autant la réussite du plus célèbre des agents secrets ne repose que très partiellement à son recours à l’aide technologique. À tel point que les inventions du Professeur Q sont pour nous autres de simples gadgets.

Quel que soit le problème, il y aura toujours une main qui se lèvera pour proposer une solution technologique. En fait il y aura plusieurs mains qui se lèveront. Et dans la plupart des cas, les solutions proposées ne fonctionneront pas comme espéré. Les inventeurs réclameront davantage de crédit ou une meilleure implication du public cible. Rarement le principe d’avoir recours à la technologie sera remis en cause en tant que tel. C’est pourtant la première question à laquelle nous devons répondre. Avons-nous besoin de nouveaux outils technologiques pour gérer la situation actuelle ? Qu’est-ce que le corps médical attend comme fonctionnalités de ces nouveaux outils ? En la matière dans son communiqué daté du 2 avril le Conseil Scientifique préconisait  « de nouveaux outils numériques permettant de renforcer l’efficacité du contrôle sanitaire de l’épidémie »

Principe de fonctionnement.

Le gouvernement s’est donc lancé dans le développement de l’application StopCovid. Le but de cette application est de  limiter les contaminations en identifiant des chaînes de transmission. Il est important d’insister sur ce point. Le but de StopCovid est de limiter la propagation du virus. L’application n’a pas pour objectif de soigner ou d’éradiquer le Coronavirus, uniquement de limiter sa propagation.

Je télécharge l’application (si je le souhaite) et si j’entre en contact avec une personne (qui possède l’application) et qui a développé le virus alors je reçois une notification. En aucun cas cela ne veut dire que je suis moi-même contaminé⋅e. Cela m’invite à passer un test, s’il y a quelques jours j’ai croisé quelqu’un positif.

Autrement dit l’application repose sur le principe que tout le monde joue le jeu. En effet 70 % des Français possèdent un smartphone (62 % des 60-69 ans et 44 % des 70 ans et plus). Selon une étude de l’université britannique d’Oxford publiée dans la revue « Science », un tel dispositif prouverait son efficacité si au moins 60 à 70% de la population l’utilise.

Des questions restent en suspens. Si je suis positif est-ce que c’est moi qui le notifie à mon application ? Et si je suis notifié comment garantir que je vais bien aller faire mon test de dépistage ? L’application repose sur une grand part de civisme des utilisateurs. Et bien sûr il faut que la technologie utilisée soit en elle-même fiable.

Sécurité.

En amont de la rédaction de ce billet les questions ont tourné sur le degré de précision de l’application, la sécurité et la confidentialité. Reprenons ces questions. « Le bluetooth est il aussi précis que le GPS ? » me demande Matthieu.

A priori le choix du Gouvernement s’oriente vers une technologie Bluetooth. Celle-ci a le mérite de fonctionner dans plus d’endroits (par exemple dans le métro). Le Bluetooth a un degré de précision de l’ordre de 10 mètres et est plus respectueuse de ma vie privée. Le Bluetooth localise mon téléphone, mais pas son propriétaire. Ainsi si j’ai été en contact avec quelqu’un de positif, je recevrais une notification sans que personne puisse identifier la source. De la même manière personne ne saura que j’ai reçu cette notification. On saura juste que les appareils ont été en contact. Ces appareils seront identifiés par des références anonymes qui changeront toutes les X minutes. A 15h00 mon téléphone s’appellera YT59 à 15hX il s’appellera RD26. Je recommande de prendre 10 minutes pour écouter mon camarade Matti Schneider à ce sujet.

Cliquez sur l’image pour la visionner sur invidio.us

 

Le Bluetooth ravive de mauvais souvenirs chez certains. Julien me demande ainsi si le fait d’activer le BlueTooth en permanence ne constitue pas un risque en matière de vol de données du téléphone. Il est vrai que dans son guide du nomadisme numérique, l’Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d’Information « recommande de désactiver les services qui sont potentiellement sources de menaces, comme  le Bluetooth » . j’ai interrogé l’ANSSI à ce sujet. Je n’ai pas eu de retour à ce jour.

Liberté.

« Cette application respecte toutes nos lois et toutes nos valeurs en termes de libertés publiques et de protection de la vie privée. Il n’y a aucune donnée qui est accessible, ni pour l’État, ni pour qui que ce soit. »

 

Cédric Ô, France Info 17 avril 2020.

Marie-Laure DENIS, Présidente de la Commission Nationale Informatique et Libertés a été auditionnée par la commission des lois de l’Assemblée nationale le 8 avril 2020 a précisé les choses en la matière de son point de vue :

« Si un suivi individualisé des personnes était mis en œuvre, il faudrait d’abord, à droit constant, qu’il soit basé sur le volontariat, avec un consentement réellement libre et éclairé – et le fait de refuser l’application n’aurait aucune conséquence préjudiciable. Ensuite, la CNIL veillerait notamment à ce que ce dispositif soit mis en place pour une durée limitée. » (Source).

En tout état de cause, la solution retenue  ne peut constituer qu’un des éléments d’une réponse sanitaire plus globale. D’un point de vue technologique, l’application peut très bien être dans les clous.

C’est sur le terrain social que nos libertés pourraient être mises à rude épreuve. Pour que l’application soit efficace, il faut un grand nombre d’utilisateurs. Il faut s’attendre donc à de grandes campagnes de communication du Gouvernement en ce sens. Vos collègues de boulot vous demanderont si vous l’avez téléchargé. On ne peut pas exclure non plus que l’employeur l’installe par défaut sur les téléphones professionnels. Le risque est que l’on s’habitue à ce type de solutions et qu’on en redemande sans même savoir si c’est efficace. En la matière, les caméras de vidéo-protection (ou vidéo-surveillance) constituent un exemple. Malgré leur coût faramineux et leur impact limité nous nous sommes habitués à être filmés partout. Tant et si bien que nous en demandons plus, en dépit de toute objectivité.(Voir par ailleurs)

Image tirée de l’article de La Quadrature Du Net

L’indispensable médiation.

Le Secrétaire d’État au Numérique a saisi le Conseil National du Numérique sur StopCovid. Dans sa lettre adressée à la Présidente du CNNUM, Salwa TOKO, Cédric O demande des « recommandations sur les conditions qui pourraient permettre l’adoption [de StopCovid] par le plus grand nombre et notamment sur la question essentielle de l’inclusion ». Le ministre invite le Conseil National du Numérique à rencontrer les acteurs de la société civile. Aussi, je prends les devants et  expose le point de vue d’un médiateur numérique.

Il y a quelques années, je participais avec les membres d’alors à la rédaction du rapport inclusion numérique de votre institution. Je me permets de reformuler ici la deuxième des sept propositions : « faire de la littératie pour tous le socle d’uns société inclusive ».

Je participe actuellement à la plateforme Solidarité-Numérique. Nous avons reçu des milliers appels. Cette semaine nous devrions traiter beaucoup de demandes liées aux déclarations d’impôts. Je doute très sincèrement que nos appelants soient en mesure de donner un consentement réellement libre et éclairé concernant StopCovid.

L’une des actions qui pourrait permettre l’adoption de  StopCovid est de développer davantage les actions de littératie numérique. La crise que nous traversons montre à quel point nous sommes tous collectivement en déficit numérique. On parle souvent de 13 millions de Français éloignés du numérique. Cette crise nous montre que ce chiffre est sous-évalué, largement.

Nous n’aurons pas les moyens dans les semaines qui suivent de faire monter en compétence autant de personnes. Nous n’aurons pas les moyens de donner à chaque citoyen les éléments de littératie numérique pour comprendre les tenants et les aboutissants de cette application. Je ne suis pas certain d’ailleurs que beaucoup de médiateurs numériques aient eux-mêmes ces éléments.

Pour une société numérique inclusive.

Cette crise extraordinaire questionne de fond en comble nos rapports au numérique. Elle met en relief le besoin indispensable de médiation pour permettre au citoyen de prendre part au débat. Beaucoup d’informaticiens, de juristes, d’élus ont exprimé leur réserve, voire leur opposition à ce projet. Beaucoup de citoyens vont se retourner vers un médiateur numérique pour avoir un avis sur cette application.

  • La pertinence de cette application repose sur un fort taux d’utilisation (minimum 60%) qui ne peut être atteint de manière volontaire.
  • Des incertitudes subsistent sur le traitement des données.
  • Le solutionnisme technologique n’est pas une solution. L’application SAIP développée pour prévenir en cas de risques a été abandonnée peu de temps après son lancement.
  • Personne à ce jour n’est capable de prouver qu’une application de contact tracking fonctionne, bien au contraire.
  • Le téléchargement d’une application et l’activation de la fonctionnalité Bluetooth ne sont pas maîtrisés par une partie des publics les plus éloignés du numérique.
  • Les publics les plus éloignés du numérique n’ont pas les moyens de donner un consentement réellement libre et éclairé.

A titre personnel, je ne peux conseiller à quiconque d’avoir recours à cette application tant qu’elle n’apporte aucune garantie suffisante. Pour autant les questions abordées à travers ce projet nous interrogent sur notre vision du vivre ensemble d’une part et sur l’impérieuse nécessité d’accompagnement aux usages numériques d’autre part. Comme je l’ai indiqué dans un précédent article, de nouveaux équilibres sont à trouver pour la médiation numérique.

 

 




Deux ou trois choses sur les applications de suivi de contacts pendant l’épidémie

Notre petit dossier sur l’application de contact-tracing « StopCovid » s’enrichit aujourd’hui d’un article de Stéphane Bortzmeyer, que nous avons déjà invité à de multiples reprises sur le Framablog.

La position de Framasoft au sujet de cette application est plutôt claire : StopCovid est un leurre de communication politique.

Cependant, nous trouvons important d’apporter au débat des articles plus pédagogiques. Ce que nous avons fait par exemple en publiant la bande dessinée de Nicky Case, et aujourd’hui avec cet article qui, nous l’espérons vous éclairera un peu plus dans le débat.

Accéder aux articles déjà publiés dans notre dossier StopCovid

(NB : cet article est une republication, avec l’accord de son auteur, de l’article https://www.bortzmeyer.org/tracking-covid-19.html dont la première publication est datée du 19 avril 2020 – Nous vous encourageons à vérifier sur le site originel si l’article a pu être mis-à-jour depuis).


Deux ou trois personnes m’ayant demandé si j’avais une opinion sur les applications de suivi de contacts, dans le contexte de l’épidémie de COVID-19, je publie ici quelques notes, et pas mal d’hyperliens, pour vous donner de la lecture pendant le confinement.

D’abord, des avertissements :

  • Je ne suis pas épidémiologiste. Même si je l’étais, il y a encore beaucoup de choses que la science ignore au sujet des infections par le SARS-CoV2, comme les durées exactes des phases où on est contagieux.
  • Je ne suis pas non plus un spécialiste de la conception et de l’analyse de protocoles de suivi de contacts. Mais ce n’est pas très grave, pour les raisons que j’exposerai rapidement par la suite.
  • Vous ne trouverez pas ici d’analyse de l’application annoncée par le gouvernement français, StopCovid, pour la bonne et simple raison qu’elle n’existe pas. Il y a eu des promesses sous la forme de quelques mots (« anonyme », « sur la base du volontariat ») mais aucun détail technique n’a été publié. À l’heure actuelle, il n’est donc pas possible de dire quoi que ce soit de sérieux sur cette application spécifique.
  • D’une manière générale, la situation évolue vite, et il est très possible que, dans une ou deux semaines, cet article ne vaille plus rien.

Maintenant, rentrons dans le vif du sujet. Dans la description et l’analyse des protocoles comme PACT, DP3T ou ROBERT ? Non, car, pour moi, c’est une question très secondaire. Voyons les problèmes par ordre décroissant d’importance.

D’abord, il faut se demander si une telle application de suivi des contacts est utile et, surtout, si elle justifie les efforts qu’on y consacre, par rapport à des sujets moins high-tech, moins prestigieux, moins startup-nation, qui motivent moins les informaticiens mais qui ont plus d’importance pour la santé publique, comme la production et la distribution de masques, ou comme la revalorisation des rémunérations et des conditions de travail du personnel de santé. Je ne vais pas insister sur ce point, c’est certes le plus important mais la Quadrature du Net en a déjà parlé, et mieux que moi.

Bref, ce projet d’application de suivi des contacts semble davantage motivé par le désir d’agir, de faire quelque chose, même inutile, désir qui est commun en temps de crise, plutôt que par un vrai problème à résoudre. (C’est ce que les anglophones nomment la maladie du do-something-itis.) Il y a également des enjeux commerciaux, qui expliquent que certaines entreprises se font de la publicité en affirmant travailler sur le sujet (sans tenir compte des travaux existants).

Mais surtout, une application n’a de sens que si on teste les gens, pour savoir qui est contaminé. Comme on peut apparemment être contagieux et pourtant asymptomatique (pas de maladie visible), il faut tester ces personnes asymptomatiques (qui sont sans doute celles qui risquent de contaminer le plus de gens puisque, ignorantes de leur état, elles sortent). Or, Macron a bien précisé dans son discours du 13 avril qu’on ne testerait pas les personnes asymptomatiques (probablement car il n’y a pas de tests disponibles). Cela suffit à rendre inutile toute application, indépendamment des techniques astucieuses qu’elle utilise, car l’application elle-même ne peut pas déterminer qui est malade ou contagieux.

Ensuite, le protocole est une chose, la mise en œuvre dans une application réelle en est une autre. Le diable est dans les détails. Comme indiqué plus haut, on ne sait encore rien sur l’application officielle, à part son nom, StopCovid. Pour formuler un avis intelligent, il ne faudra pas se contenter de généralités, il faudra regarder son code, les détails, les traqueurs embarqués (une plaie classique des applications sur ordiphone, cf. le projet ExodusPrivacy), etc. Il faudra aussi se pencher sur le rôle du système d’exploitation (surtout s’il y a utilisation de l’API proposée par Google et Apple). Le fait que l’application soit en logiciel libre est évidemment un impératif, mais ce n’est pas suffisant.

Si vous n’êtes pas informaticienne ou informaticien, mais que vous voulez vous renseigner sur les applications de suivi de contacts et ce qu’il y a derrière, souvenez-vous qu’il y a plusieurs composants, chacun devant être étudié :

  • L’application elle-même, celle que vous téléchargez sur le magasin, qui est la partie visible (mais pas forcément la plus importante).
  • Le protocole qui est l’ensemble des règles que suit l’application, notamment dans la communication avec le reste du monde (autres ordiphones, serveur central…). Avec le même protocole, on peut créer plusieurs applications assez différentes.
  • Le système d’exploitation qui, après tout, a un complet contrôle de la machine et peut passer outre les décisions des applications. C’est un sujet d’autant plus sensible que, sur les ordiphones, ce système est étroitement contrôlé par deux entreprises à but lucratif, Apple et Google.
  • Le serveur central (la grande majorité des protocoles proposés nécessite un tel serveur) qui peut être piraté ou, tout simplement, géré par des gens qui ne tiennent pas leurs promesses.

Parmi les bonnes lectures accessibles à un large public :

Voilà, on peut maintenant passer aux questions qui passionnent mes lecteurs et lectrices passionnés d’informatique, les protocoles eux-mêmes. Il en existe de nombreux. J’ai une préférence pour PACT, dont je vous recommande la lecture de la spécification, très claire. La proposition DP3T est très proche (lisez donc son livre blanc).

Ces deux propositions sont très proches : l’ordiphone émet en Bluetooth des identifiants temporaires, générés aléatoirement et non reliables entre eux. Les autres ordiphones proches les captent et les stockent. Ces identifiants se nomment chirps dans PACT (qu’on pourrait traduire par « cui-cui ») et EphID (pour Ephemeral ID) dans DP3T. Lorsqu’on est testé (rappel : il n’y a pas assez de tests en France, on ne peut même pas tester tous les malades, ce qui est un problème bien plus grave que le fait d’utiliser tel algorithme ou pas), et détecté contaminé, on envoie les données à un serveur central, qui distribue la liste. En téléchargeant et en examinant cette liste, on peut savoir si on a été proche de gens contaminés.

C’est évidemment une présentation très sommaire, il y a plein de détails à traiter, et je vous recommande de ne pas vous lancer dans de longues discussions sur Twitter au sujet de ces protocoles, avant d’avoir lu les spécifications complètes. Les deux propositions ont été soigneusement pensées par des gens compétents et le Café du Commerce devrait lire avant de commenter.

PACT et DP3T ont assez peu de différences. Les principales portent sur le mécanisme de génération des identifiants, PACT déduit une série d’identifiants d’une graine renouvelée aléatoirement (on stocke les graines, pas réellement les identifiants), alors que DP3T déduit chaque graine de la précédente, des choses comme ça.

La proposition ROBERT est assez différente. La liste des identifiants des contaminés n’est plus publique, elle est gardée par le serveur central, que les applications doivent interroger. Globalement, le serveur central a bien plus de pouvoir et de connaissances, dans ROBERT. La question est souvent discutée de manière binaire, avec centralisé vs. décentralisé mais le choix est en fait plus compliqué que cela. (Paradoxalement, un protocole complètement décentralisé pourrait être moins bon pour la vie privée.) Au passage, j’ai déjà discuté de cette utilisation très chargée de termes comme « centralisé » dans un article à JRES. Autre avantage de ROBERT, la discussion sur le protocole se déroule au grand jour, via les tickets de GitHub (cf. leur liste mais lisez bien la spécification avant de commenter, pas juste les images). Par contre, son analyse de sécurité est très insuffisante, comme le balayage de tous les problèmes liés au serveur central en affirmant qu’il sera « honnête et sécurisé ». Et puis la communication autour de cette proposition est parfois scientiste (« Ce sont des analyses scientifiques qui permettent de le démontrer, pas des considérations idéologiques [comme si c’était mal d’avoir des idées, et des idées différentes des autres] ou des a priori sémantiques. ») et il y a une tendance à l’exagération dans les promesses.

Enfin, un peu en vrac :

(cette page est distribuée sous les termes de la licence GFDL)




Khrys’coronalungo du lundi 20 avril 2020

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


Brave New World

Spécial France

Spécial sortie de confinement

Spécial Coronavirus – données scientifiques

Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé

Spécial travailleur·euses par temps de coronavirus

Spécial répression, violences et abus de pouvoir

Spécial la démocratie et nos droits en prennent un coup

Spécial résistance

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

  • L’immunité collective numérique n’existe pas. (affordance.info)

    Tant que nous n’aurons pas fait le deuil de l’idée même d’une possible immunité numérique, nous ne serons en effet qu’un troupeau se laissant mener à l’abattement sinon à l’abattoir. […] ce n’est pas de surveillance mais de confiance dont nous avons besoin. Confiance dans les politiques de santé publique et leurs modes de financement pérennes, et non confiance dans des applications de surveillance conçues dans l’urgence. […] Nous avons construit ou laissé construire une dystopie juste pour que les gens cliquent sur des publicités. Et des gouvernements dépendent aujourd’hui de l’analyse de ces clics publicitaires pour informer et documenter des décisions de santé publique dans un contexte d’urgence sanitaire. C’est cela, le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. […] Il n’y a pas besoin de soldats ou de héros car nous ne sommes pas en guerre. Seulement de soignants, d’équipements médicaux, de lits d’hôpitaux et de financements pérennes de la recherche fondamentale et appliquée. Il n’y a pas besoin de surveillance car nous ne sommes pas en délinquance ni en délation et que le suivi épidémique doit pouvoir reposer uniquement sur le cadre éthique qui est celui du soin.Il est possible de veiller sans surveiller.

  • L’urgence des libertés (liberation.fr)

    L’état d’urgence ne peut être un état vide de droit où s’exercerait seule la violence pure du souverain. Protéger le corps social n’est pas seulement une question sanitaire.

  • Félix Tréguer: «Des technologies de surveillance se normalisent à l’aune de cette crise» (letemps.ch)
  • Covid-19 : sommes-nous devenus trop intolérants au risque ? (/usbeketrica.com)
  • Leurs Communs numériques ne sont (toujours) pas les nôtres ! (scinfolex.com)
  • «Avec le revenu de base, une sécurité économique aurait été assurée automatiquement» (korii.slate.fr)
  • Cette crise inédite depuis l’Après-guerre nécessite la mise en place du revenu de base (huffingtonpost.fr)

    Il ne s’agit pas d’un plan de sauvetage “helicopter money” visant à préserver l’économie financière, mais bien d’investir dans le capital humain et d’engager les mutations nécessaires vers une société solidaire et résiliente, socialement et écologiquement responsable, où personne n’est laissé de côté.

  • Un ISF européen permettrait d’éponger en 10 ans les dettes liées au coronavirus (lareleveetlapeste.fr)
  • Une taxation minimale des multinationales pour enrayer l’évitement fiscal (liberation.fr)

    Ce dispositif aurait l’avantage de lier la contribution fiscale des multinationales à leur activité économique réelle tout en augmentant les recettes des Etats. En cas de crise majeure, comme celle du Covid, la mesure rendrait acceptable les futurs plans de sauvetage.

  • Aurélien Bernier : “Personne ne parle vraiment de démondialisation” (marianne.net)

    Alors que nos dirigeants rabâchent le mot “innovation” cent fois par jour, que voit-on ? Qu’ils ont rendu notre industrie incapable d’assembler un bout de tissus et deux élastiques pour faire des masques ! C’est tellement ridicule qu’ils devraient mourir de honte.

  • Et soudain nous fûmes défaits (lundi.am)
  • La Peste et la Colère (lundi.am)

    Nous vivons la peste, mais ce temps suspendu peut aussi être celui où nous cultivons et accumulons les colères. L’opportunité de leur affirmation viendra avec la vie, après le temps des charognards […] le silence n’est pas toujours le calme, c’est aussi le temps où l’on aiguise les armes des comptes à régler.

  • Pouvoir, domicile, mort : à l’ère du Covid-19 (lundi.am)
  • La guerre des masques (lundi.am)

    On nous dit que les technologies ne sont pas intrinsèquement porteuses des mauvais usages qu’on en fait, mais elles créent tout de même des attentes qui sont autant de pressions sociales, d’exigences nouvelles pour soi et les autres et elles réclament qu’on se conforme à leurs normes pour pouvoir être utilisées pleinement. Par exemple, la généralisation de la voiture induit l’attente de voir l’autre se rendre disponible plus facilement, la généralisation du téléphone portable induit l’attente de voir l’autre être joignable à tout moment, la généralisation de l’internet induit l’attente de voir l’autre pouvoir travailler à tout moment et en tout endroit, etc. Plus la technologie est efficace, plus la marge acceptable de l’aléa et de la non-conformité à la technologie est réduite, plus nous paraissons suspects en ne nous y conformant pas. […] La question qui dès lors se pose à nous est de voir quelles attentes sociales seront créées avec la généralisation de la reconnaissance faciale ? Devra-t-on maîtriser ses expressions faciales de manière à ne jamais paraître déviants ? […] Quelles formes de sociabilités découleront du déploiement massif de la reconnaissance faciale dans nos lieux de vie ?

  • Coronavirus et faillite globale du néolibéralisme (attac.org)
  • Naomi Klein analyse la crise du coronavirus : “L’austérité sera la facture à payer.” (huffingtonpost.fr)

    Ce virus s’est propagé dans le monde entier du fait des déplacements de voyageurs principalement riches, pour des conférences ou des croisières. Mais, bien sûr, ce sont les pauvres, les migrants qu’on blâme et qui en paieront une fois de plus les conséquences […] La question est de savoir ce que nous voulons faire aujourd’hui.[…] nous devons non seulement dire non à l’austérité qui pourrait survenir, mais aussi construire un modèle différent. […] D’autres outils que la grève existent: l’éducation politique, l’établissement de nouveaux liens, etc. Ça a déjà commencé sur internet et nous devons faire en sorte que cet activisme perdure. Le confinement n’est pas éternel. […] on peut gérer la crise avec autorité mais en respectant la démocratie, sans arrière-pensées, sans boucs émissaires, sans violer aucun droit et en gouvernant par consensus. Ces dirigeants forts existent, et ce sont surtout des femmes.

  • Patience (mondediplo.net)

    Bien sûr il y a d’abord la souffrance physique (de ceux qui sont malades), la souffrance morale (des proches, des soignants), la souffrance psychique (du salariat chair à canon). Mais il y a aussi, pour bon nombre d’autres, la souffrance politique : assister à ce délire, et n’y rien pouvoir. À un moment, on en revient toujours à l’os : la politique, c’est la co-présence des corps parlants — et agissants. L’épidémie met en panne la politique. Elle ne laisse debout que le gouvernement — qui, précisément, prospère en étant séparé. Et n’aime rien tant que les sujets à l’isolement. […]
    Au moins nous laissent-ils nous faire une idée assez précise de ce qui nous attend. Il est radicalement exclu que des individus pareils puissent négocier, autrement qu’en mots, le moindre virage. Par quel miracle se mettrait-on à faire l’exact contraire de ce qu’on a toujours fait et de ce en quoi on a toujours cru — sinon sur un mode entièrement factice ? Le pire étant peut-être, comme en témoignent les mots « jours heureux » dans la bouche de Macron, qu’ils dégueulassent tout ce qu’ils touchent.

  • Covid-19 : « Ne nous attendons pas à un après ressemblant à une aube radieuse » (usbeketrica.com)
  • Face au mur de la croissance exponentielle (theconversation.com)
  • Non, ce virus n’est une bonne chose pour rien, ni personne (liberation.fr)
  • Je ne vous pardonnerai pas – « Comment osons-nous pousser des caddies et abandonner nos morts ? » (lundi.am)

    Il n’est plus question ici de contagiosité. Il n’est plus question ici de coronavirus. On peut pousser son caddy au supermarché, mais on ne peut pas accompagner le cercueil de sa mère. […] Je ne vous pardonnerai pas votre inhumanité habillée d’urgence sanitaire. […] Vous voulez que je médite sur le sens de l’existence. La voilà ma méditation métaphysique : vous êtes des chiens aveugles qui piétinez nos âmes sur l’asphalte du progrès. Vous êtes les fantômes d’un monde mortifère détruisant nos songes.

  • Homme de pouvoir : sexo-maniaque ? (sexes.blogs.liberation.fr)
  • Christine Brisset, la madone des squatteurs (causette.fr)

    De 1945 au milieu des années 1960, celle qu’on surnommait aussi “la fée des sans logis” a organisé près de huit cents squats à Angers et a fait construire des milliers de logements pour les plus démunis. Elle dérangeait, mais n’en avait que faire. Anticonformiste et résolue, elle a mené son combat coûte que coûte avec un seul mot d’ordre : un logement pour tous

  • Confiné pendant la Grande Peste, Isaac Newton avait efficacement télétravaillé (courrierinternational.com)

    Loin de son université de Cambridge et de ses professeurs, dans le jardin de la demeure familiale où Isaac Newton était confiné pendant la terrible Grande Peste de Londres, entre 1655 et 1656, se trouvait… un pommier.

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les autres trucs chouettes de la semaine

Deux personnages prennent le café. Le personnage de gauche dit : Alors, toujours coronalungo cette semaine ? - la personne de droite répond : Yep, mais ça semble se calmer un peu : on sent qu'on va vers le déconfinement...
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).




Khrys’coronalungo du lundi 13 avril 2020

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


Brave New World

Spécial France

Spécial Coronavirus – données scientifiques

Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé

  • Il y a urgence ! (humanite.fr)

    Sous les discours de circonstance, les libéraux qui nous gouvernent et leurs assistants zélés persistent dans leur politique de destruction des services publics […] Les salariés doivent se taire, sinon ils sont sanctionnés comme notre collègue de Marseille qui, après avoir publié une vidéo dénonçant la piètre qualité des surblouses fournies par l’hôpital, a été convoquée pour un entretien à visée disciplinaire. Mais dans quel pays vivons-nous ?

  • Négligences, mensonges et désinvolture : les fautes du gouvernement dans la gestion de la crise (bastamag.net)
  • Masques: après le mensonge, le fiasco d’Etat (mediapart.fr)

    Les boîtes mails des conseillers d’Olivier Véran détiennent un trésor d’une valeur aujourd’hui inestimable : des millions de masques, dont des FFP2, ce matériel protection qui fait aujourd’hui tant défaut aux soignants […] plusieurs membres du cabinet du ministère ont en effet reçu de la part d’entreprises françaises, dans le courant du mois de mars, des propositions d’importations rapides et massives de matériel. Ils ont choisi de ne pas y donner suite. […] Selon un décompte effectué par Mediapart, les entreprises et les collectivités locales françaises, qui ont elles aussi passé de grosses commandes, ont déjà réussi à se faire livrer au moins 50 millions de masques, soit davantage que les 40 millions livrés à l’État que nous avons pu recenser, destinés au personnel soignant.

  • Le Conseil d’Etat et l’état d’urgence sanitaire: bas les masques! (mediapart.fr)

    En cette période d’état d’urgence sanitaire, le Conseil d’Etat est un organe de labellisation juridictionnelle des décisions prises par le Premier ministre, lui-même membre de cette institution. […] Le Conseil d’Etat est-il prêt à prendre le risque, devant l’Histoire, que le bilan catastrophique de l’(in)action gouvernementale face à la pandémie soit aussi le sien ?

  • Masque. Nom masculin. (affordance.info)

    Une lettre de différence. Masque. Manque. Alors nommer le manque. Manque de masques. Manque de consignes claires. Prophylaxie de la pénurie plutôt que de la maladie. C’est la guerre. Au front les soignants. Fronts brûlants de fièvre. Sans masque. En manque. En marche. […] Les personnels, les parents et les élèves on les félicite de leur engagement, de leur dynamisme, de leur implication, de leur capacité d’adaptation ou d’aller cueillir des fraises, comme pour mieux s’en féliciter soi-même. Mais la maladie n’est pas là. Absente.[…] Il y a pourtant des enseignants qui sont aussi malades. Ou morts. Sans masques. C’est la guerre on vous dit. La “nation apprenante” est en ordre de marche. “En marche”. Ou crève.

  • Les charognards à l’affût (humanite.fr)

    « En même temps » qu’ils multiplient les éloges sur les personnels de santé des hôpitaux publics, nos gouvernants commandent en douce des rapports qui visent à poursuivre l’asphyxie de notre système de santé public !

  • Aux héros anonymes et aux connards reconnus. À commencer par Christophe Lannelongue. (affordance.info)

    Alors que les hôpitaux du Grand-Est font front depuis plusieurs semaines devant une pandémie tout à fait inédite et que les morts, chez les soignants comme chez les patients dépassent l’imaginable, ce connard sublime […] directeur de l’ARS, explique qu’il n’y a pas de raison de remettre en cause la suppression de 598 emplois et de 174 lits prévus pour début Juin

  • Le directeur de l’Agence régionale de santé du Grand Est limogé après sa déclaration polémique sur le CHU de Nancy (francetvinfo.fr)
  • La Mort en Marche (sarkofrance.blogspot.com)
  • Coronavirus. Les masques commandés en Chine seront livrés en France d’ici la fin juin (ouest-france.fr)
  • La réponse française au COVID-19 : des difficultés intrinsèques à l’intersection de la science, de la santé publique et de la politique (thelancet.com – en anglais)
  • Pendant la pandémie, le gouvernement commande des drones et des gazeuses (nantes-revoltee.com)

Spécial inégalités face au coronavirus

Spécial travailleur·euses par temps de coronavirus

Spécial répression, violences et abus de pouvoir

Spécial la démocratie et nos droits en prennent un coup

Spécial résistance

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

  • COVID-19, l’ami des dominants (ardeur.net – voir aussi plus bas la vidéo avec Franck Lepage, fort instructive)
  • Plus nocif que le Covid-19 (monde-diplomatique.fr)
  • Orientations (mondediplo.net)

    En réalité, c’est simple. Nous savons maintenant indubitablement que la manière dont nous avons vécu – la manière capitaliste – mène au désastre général. Par conséquent, nous devons en changer. Entièrement. Il fallait sans doute la catastrophe pour fermer la longue parenthèse de la préhistoire – celle du développement matériel. Le malheur ne sera pas venu pour rien s’il nous fait entrer enfin dans l’histoire – celle du développement humain.

  • « Prophètes et technologistes à l’ère de la suspicion généralisée » (framablog.org)

    Ainsi, par exemple, l’illectronisme des enfants et de leurs enseignants livrés à une Éducation Nationale numériquement sous-dotée, est le fruit d’une volonté politique. Comment pourrait-il en être autrement ? Afin d’assurer la « continuité pédagogique » imposée par leur ministre, les enseignants n’ont eu d’autres choix que de se jeter littéralement sur des services privateurs. Cette débandade est le produit mécanique d’une politique de limitation volontaire de toute initiative libriste au sein de l’Éducation Nationale et qui serait menée par des enseignants pour des enseignants. […] Ce serait sans doute l’une des plus grandes leçons de cette épidémie : la consécration du capitalisme de surveillance comme la seule voie possible. Cela, ce n’est pas une prophétie, ce n’est pas une révélation, c’est le modèle dans lequel nous vivons et contre lequel nous ne cessons de résister (même inconsciemment).

  • « L’épidémie d’aujourd’hui est un bon rabot contre l’orgueil transhumaniste » (usbeketrica.com)
  • La géographie, ça sert, d’abord, à dominer (liberation.fr)
  • Pandémie : la sécurité sanitaire au risque de nous perdre ? (vududroit.com)

    Après des lois enfreignant de manière constante les libertés publiques […] il s’agirait à présent d’accepter un contrôle des données de santé individuelles sous couvert de crise sanitaire.](Si cette technique d’hyper-contrôle a fait ses preuves là où elle a été déployée, elle n’en pose pas moins des questions sur la valeur même de la vie sociale que l’on souhaite avoir et du prix que l’on est prêt à payer en échange de notre peur collective et contemporaine de la mort. Il n’est guère besoin d’anticiper une dystopie catastrophiste pour imaginer que, pour les mêmes raisons d’encadrement sanitaire du biologique humain, un quelconque exécutif puisse ensuite étendre ce contrôle prophylactique aux patients porteurs du VIH afin de s’assurer de leurs contacts, de leurs rapports sexuels, ou s’assurer au nom d’un contrôle bénéfices/coûts que des personnes en surpoids ne vont plus acheter de produits jugés néfastes pour leur santé […] Enfin, les extensions de l’utilisation de ce véritable bracelet de surveillance électronique (géolocalisation, contrôle des contacts, recueil des données médicales personnelles etc.) pourraient à tout moment servir à des fins non sanitaires, dans le cadre par exemple du contrôle d’un mouvement d’opposition sociale ou politique (à tout hasard…), mettant en « danger la démocratie ».

  • « Si les citoyens ne s’intéressent pas à leur vie privée, rien ne peut arrêter le gouvernement » (usbeketrica.com)
  • Désobéissance, à cause de toi, je vais survivre (paris-luttes.info)
  • Safe or Just Surveilled?: Tawana Petty on the Fight Against Facial Recognition Surveillance (logicmag.io)
  • Les lumières du Pouvoir (blog.montjovent.com)
  • Qu’est-ce qu’un chef? (michelonfray.com)

    «Emmanuel Macron qui est taillé pour le costume du Chef comme un collégien à qui l’on a destiné le vêtement pour la représentation de fin d’année. Il est bon pour les Jésuites de La Providence à Amiens, mais pas au-delà»

  • De quelques rapports entre le coronavirus et l’État (lundi.am)
  • Le Corona Virus comme analyseur : Autopsie de la vulnérabilité systémique de la mondialisation capitaliste (bouamamas.wordpress.com)

    Il y a les aléas et il y a la vulnérabilité conduisant aux catastrophes. La confusion entre ces deux questions est une des caractéristiques essentielles du discours officiel du gouvernement français (et de très nombreux autres). Il n’y a rien d’étonnant à cette confusion volontaire qui a comme fonction de masquer et de faire disparaître la seconde. Cette dernière fait en effet fonction d’analyseur des contradictions d’un système social, de révélateur du réel que l’idéologie dominante masque ou déforme habituellement […] Le centrage volontaire sur la dimension « catastrophe » diffuse en effet des images d’imprévisibilité, d’incertitude, d’absence de responsabilité humaine, etc. Le centrage sur la vulnérabilité interroge les causes économiques et sociales d’une situation, les raisons réelles de l’ensemble des conséquences d’une catastrophe et les intérêts économiques qui ont produit cette vulnérabilité. […] Il n’est plus possible, au moins momentanément, de tenir un discours libéral sur la santé, de mépriser les services publics et de louanger le privé et même simplement de diaboliser l’intervention de l’Etat. Cependant d’ores et déjà le jour d’après la pandémie est en préparation […] stratégie visant à présenter l’ampleur prévisibles des conséquences de la pandémie comme résultat de l’indiscipline irresponsable et non comme découlant de causes politiques et économiques. Si la pandémie est un analyseur de la mondialisation capitaliste et de sa politique économique ultralibérale, elle n’en est pas pour autant sa défaite. Le jour d’après sera celui de la facture et de la désignation de qui la paiera. Malgré notre atomisation liée au confinement, il est impératif de le préparer dès aujourd’hui comme le prépare d’ores et déjà les classes dominantes.

  • Ce que le confinement nous apprend de l’économie (mediapart.fr)

    On fera donc tout pour que le confinement produise une violente crise économique qui, effectivement, sera cruelle et coûteuse en vies humaines. On le fera simplement : en se contentant de « geler » le système économique et en se gardant de profiter de cette suspension pour le modifier. Une fois décongelé, l’économie marchande donnera le pire d’elle-même. Ses mécanismes propres se déchaîneront. Mais on devra l’accepter comme une loi divine.

  • Devenir des robots pour échapper au virus ? (laquadrature.net)
  • Comment Mandela a su rester en forme dans sa minuscule maison de Soweto et en prison (theconversation.com)

    Il commençait par courir sur place pendant 45 minutes, suivi de 100 pompes avec doigts en extension, 200 abdos, 50 flexions profondes des genoux et des exercices de gymnastique appris lors de son entraînement en salleMandela se tenait à cette routine du lundi au jeudi, puis se reposait pendant trois jours.

  • «Les jours heureux» sont pour demain (liberation.fr)
  • Internet peut-il résister au confinement ? (alternatives-economiques.fr)
  • De l’alternumérisme : d’autres numériques sont-ils possibles ? (internetactu.net)
  • Il n’y a pas de solution, il n’y a que nous (framablog.org)
  • Le Virus a changé la façon dont nous utilisons Internet (nytimes.com – en anglais)
  • À propos du débat sur la 5G, quelques points par Stéphane Bortzmeyer (bortzmeyer.org)
  • Sécurité informatique : tout le monde peut embrouiller Big Brother (cqfd-journal.org)

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les autres trucs chouettes de la semaine

Deux personnages prennent le café. Le personnage de gauche dit : Ouh là, corona-lungo cette semaine ! - la personne de droite répond : Ouais, je me sens un peu débordée, là... pas eu trop le temps de faire le tri
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).




StopCovid : le double risque de la “signose” et du “glissement”

Nous sommes aujourd’hui très honoré⋅e⋅s de pouvoir publier cet article d’Hubert Guillaud. Depuis de nombreuses années, Hubert Guillaud publie des analyses précieuses autour du numérique sur le site InternetActu.net dont il est le rédacteur en chef (nous vous invitons vivement à découvrir ce site si vous ne le connaissiez pas, et pas seulement parce qu’il est soutenu par nos ami⋅e⋅s de la Fing).

Nous republions ici avec son accord un article initialement publié sur Medium, qui interroge les risques autour de l’application StopCovid.

C’est donc le troisième article que le Framablog publie aujourd’hui sur cette application. Le premier, traduit par le (fabuleux) groupe de traduction Framalang, reprenait les arguments en une dizaine de points de l’organisation AlgorithmWatch. Le second, rédigé par Christophe Masutti, administrateur de Framasoft et auteur de « Affaires Privées, au sources du capitalisme de surveillance », faisait le lien entre (dé)pistage et capitalisme de surveillance.

Pourquoi un troisième article, alors ? D’abord, parce qu’Hubert Guillaud prend le problème de StopCovid sous un autre angle, celui du risque de « faire de la médecine un travail de police », comme le dit l’écrivain Alain Damasio. Mais aussi parce qu’il pose clairement la problématique de notre acceptation de « solutions techniques », en tant qu’individu comme en tant que société. Cette acceptation est d’ores et déjà facilitée (préparée ?) par de nombreux médias grands publics qui présentent StopCovid comme une solution pour sortir plus vite du confinement, à grands coups de sondages auprès d’une population sur-angoissée et mal-informée. « Les algorithmes ne sont pas l’ennemi. Le vrai problème réside dans notre paresse à nous gouverner », nous dit la chercheuse Antoinette Rouvroy, citée dans cet article. Assurons nous de faire l’effort de ne pas être paresseux.

Accéder aux articles déjà publiés dans notre dossier StopCovid

 



L’application StopCovid sera donc basée sur le volontariat et le respect des données personnelles, comme l’expliquaient le ministre de la Santé, Olivier Véran, et le secrétaire d’État au numérique, Cédric O, au Monde. Très bien ! C’est la loi !, a rappelé la CNIL. L’application de pistage massif des Français sera chiffrée et les données complètement anonymisées complète Mediapart. Elle sera une “brique” de déconfinement parmi d’autres (qui n’ont pas été annoncées). On nous l’assure !

Soit ! Mais pour combien de temps ? Quelle sera la durée de cette assurance ? Que dirons-nous quand mi-mai, fin mai, mi-juin, nous n’aurons toujours ni masques ni tests en quantité suffisante (les autres “briques”, je suppose ?) ?

Le risque face à une absence de masques et de tests qui est là pour durer est que cette brique logicielle devienne un peu le seul outil à notre disposition pour “déconfiner”. Que StopCovid, de “brique incertaine” devienne le seul outil prêt à être utilisé, tout comme aujourd’hui l’attestation dérogatoire de déplacement est devenue le seul outil de maîtrise du confinement qu’on renforce d’arrêtés municipaux ou nationaux (quand ce n’est pas d’appréciations liberticides des agents) sans réelle motivation sanitaire (comme l’interdiction de courir ou de faire du vélo ou la fermeture des parcs ou pire encore des marchés : alors qu’on peut organiser des marchés voir des commerces non essentiels comme des accès aux espaces verts avec des règles de distanciations sociales). Et donc que tout le monde souhaite le renforcer : en le rendant peut-être obligatoire et pire peut-être en le rendant accessible au contrôle policier ! Et dans l’urgence et le dénuement, pour sortir d’une crise qui se révèle chaque jour plus dramatique, nul doute que nombreux seront prêt à s’y précipiter !

Le problème principal de StopCovid, c’est de ne reposer sur aucune science ! La seule étude disponible sur le sujet dans Science estime que ce type d’application doit accueillir 60% de la population pour être efficace et être associée à une politique de dépistage — dont nous ne disposons pas !

À Singapour, l’application TraceTogether, qui rassemblait 15% de a population, pourtant couplée au dépistage n’a pas suffi, comme le rappelle Olivier Tesquet pour Télérama ou Margot Clément depuis Hong Kong pour Mediapart : c’est certainement le signe (pas assez fort pourtant) que ce n’est pas une solution.

L’entrepreneur et spécialiste de l’intelligence artificielle Rand Hindi a très clairement exposé le fonctionnement d’une application de ce type, dans un thread sur Twitter !

Il semble y avoir beaucoup de confusion au sujet de l’efficacité et confidentialité de l’app #StopCovid. Je vais ici tenter d’expliquer la techno DP3T sous jacente et pourquoi dépendre du volontariat n’apportera pas les résultats espérés. #privacy #covid19 @cedric_o @olivierveran

— Rand Hindi (@randhindi) April 9, 2020

À lire ce thread (lisez-le !), chacun comprendra que la confidentialité des données ne devrait pas être le problème de cette application si elle respecte les développements prévus ! On semble plutôt là devant une technologie “privacy by design”, conçue pour préserver la vie privée ! Et le déploiement d’un outil aussi respectueux des individus devrait être salué ! Mais les bons points en matière technique ne suffiront pas à pallier les deux risques d’usages que masque StopCovid.

Le risque de la “signose” : “prendre le signal pour la chose” !

Comme s’en désespère la philosophe du droit Antoinette Rouvroy, le coeur du problème de nos outils d’analyse de données, c’est de relever bien plus d’une “signose” plutôt que d’une diagnose. Une signose consiste à “prendre le signal pour la chose”. C’est-à-dire transformer le signe (la barbe) en signal (la radicalisation) ! Souvenez-vous ! C’est le problème fondamental qui se cache dans les outils d’analyse automatisés et que dénoncent sans relâche nombre de spécialistes du sujet, comme la mathématicienne Cathy O’Neil ou Kate Crawford par exemple.

StopCovid transforme la proximité avec un malade (le signe) en signal (vous avez été infecté) pour déclencher une alerte nécessitant un traitement (confinement, test).

Image : illustration schématique du fonctionnement de StopCovid par LeMonde.fr.

Son inverse, la “diagnose”, elle transforme des symptômes (fièvre, test) en diagnostic (positif ou négatif) pour déclencher un traitement (confinement, prescription médicale, soins…).

Le problème de StopCovid comme d’autres solutions de backtracking proposées, c’est de transformer une notion de proximité en alerte. Or, être à proximité d’un malade ne signifie pas le devenir automatiquement ! La médecine a besoin de suivre et confiner les malades, ceux qu’ils contaminent et ceux qui les ont contaminés. Mais cela ne peut pas se faire sur la base de conjoncture, de corrélation, d’approximation, de proximité et de localisation.

Très souvent, le coeur des problèmes des systèmes réside dans les données utilisées et dans les décisions très concrètes qui sont prises pour décider ! Ici, tout le problème de cette proximité réside dans sa définition, sa qualification. Comment est définie la proximité par l’application ? Quelle durée ? Quelle distance ? Quelles conditions ? Quel contexte est pris en compte ? Et pour chacun de ces critères avec quelle précision et quelle fiabilité ? Pour reprendre les termes de Rand Hindi, le fait que Bob ait été à proximité d’Alice ne signifie pas qu’il ait été contaminé ! Si on ne peut pas apprécier les conditions de cette proximité, celle-ci risque d’être peu pertinente ou de déclencher beaucoup de faux positifs. Ou de refléter bien autre chose que l’exposition virus : des conditions sociales inégalitaires : une caissière de supermarché aura bien plus de chance de croiser un malade qu’un cadre qui va pouvoir continuer à limiter ses interactions sociales et ses déplacements. Pourtant, celle-ci est peut-être protégée par un plexiglas, des gants, des masques… des mesures de distanciation pris par son employeur : elle aura croisé des malades sans qu’ils la contaminent, quand le cadre aura pu croiser l’enfant d’un ami (sans téléphone) qui lui aura toussé dessus. Bref, StopCovid risque surtout de sonner bien plus pour certains que pour d’autres ! Toujours les mêmes !

En réduisant le contexte à une distance, à une proximité, StopCovid risque surtout d’être un outil approximatif, qui risque de renvoyer la plupart d’entre nous, non pas à notre responsabilité, mais à des injonctions sans sens. À nouveau, proximité n’est pas contamination : je peux avoir été dans la file d’attente d’un magasin à côté d’un malade ou avoir parlé à un ami malade en gardant les gestes barrières et sans avoir été infecté !

Le risque bien sûr, vous l’aurez compris, est que StopCovid produise énormément de “faux positifs” : c’est-à-dire des signalements anxiogènes et non motivés ! Dont il ne nous présentera aucun contexte : on ne saura pas ni qui, ni quand nous avons été à proximité d’un malade, donc incapable d’apprécier la situation, de lui rendre son contexte pour l’apprécier. Nous serons renvoyés à l’injonction du signal ! Sans être capable de prendre une décision informée (dois-je me confiner ? me faire tester — pour autant que ce soit possible !?).

En fait, quand on regarde un questionnaire d’enquête épidémiologique — par exemple, dans une forme très simple, prenons celui-ci proposé pour des cas de co-exposition au virus, on se rend compte que la proximité n’est pas le seul critère évalué. Les dates, les symptômes, l’état de santé de l’exposé, le degré de relation et sa description sont essentiels. Ils permettent notamment d’évaluer très vite un niveau de risque : faible, modéré ou élevé. Une enquête épidémiologique consiste à répondre à des questions sur ses relations, les lieux qu’on a fréquentés, les gens qu’on côtoie plus que ceux que l’on croise, ceux dont on est proche : qu’on touche et embrasse… L’important n’est pas que le questionnaire comme vous diront tous ceux qui mènent des enquêtes, c’est également la relation, la compréhension d’un mode de vie, d’un niveau de risque (respectez-vous les gestes barrières : assidûment ou pas du tout ?). Bref, l’important, c’est aussi d’introduire du rapport humain dans le suivi épidémique. Ce qu’une appli ne peut pas faire sauf, comme vous le diront leurs promoteurs, en collectant toujours plus de données, en étant toujours plus liberticides, pour qualifier toujours mieux le signe en signal !

Le risque des “glissements liberticides et discriminatoires” : de la contrainte à l’obligation !

Le risque c’est qu’en l’absence de tests, de masques (et cette absence va durer !), StopCovid devienne le seul recours d’une politique sanitaire de catastrophe. Le risque est — comme toujours — de “glisser” d’une signose à une politique. Ce que j’appelle “le glissement”, c’est le changement de finalité et l’évolution des autorisations d’accès. C’est le moteur de l’innovation technologique (une manière de pivoter dirait-on dans le monde entrepreneurial, c’est-à-dire de changer la finalité d’un produit et de le vendre pour d’autres clients que son marché originel). Mais le glissement est aussi le moteur de la surveillance, qui consiste bien souvent à transformer des fonctions simples en fonctions de surveillance : comme quand accéder à vos outils de télétravail permet de vous surveiller. Le risque du glissement consiste à faire évoluer dans l’urgence les finalités de l’application StopCovid, qu’elles soient logicielles ou d’usage. C’est ce dont s’inquiète (.pdf) très justement le comité consultatif national d’éthique en prévenant du risque de l’utilisation de l’application pour du contrôle policier ou du contrôle par l’employeur. Même inquiétude pour La Quadrature du Net et l’Observatoire des libertés numériques : le risque c’est qu’une “telle application finisse par être imposée pour continuer de travailler ou pour accéder à certains lieux publics”.

Or, il n’existe aucune garantie contre ces “glissements”… d’autant plus quand la colère et la crainte, la crise économique, le manque de tests et de masques, la durée du confinement, vont rendre le déconfinement encore plus pressant et l’exaspération encore plus réactive. Le risque le plus évident bien sûr est que votre employeur demande à voir votre application sur votre smartphone chaque matin ! Les commerçants, les bars, les policiers, les voisins… Que StopCovid devienne le “certificat d’immunité”, qu’évoquait dans son plan de déconfinement — tout à fait scandaleusement il me semble — la maire de Paris, Anne Hidalgo (sans compter qu’elle l’évoque comme un moyen de contrôle par l’employeur qu’elle représente, la Ville de Paris !). Le “glissement” le plus insidieux c’est que StopCovid devienne une application non pas obligatoire, mais injonctive. Que la santé de chacun soit à la vue de tous : employeurs, voisins, police ! Que nous devenions tous des auxiliaires de police plutôt que des auxiliaires de santé !

L’autre risque du certificat d’immunité, comme le souligne Bloomberg, c’est de faire exploser nos systèmes de santé par un déconfinement total, massif, calculé, où le seul sésame pour participer au monde de demain serait d’avoir survécu au virus ! Un calcul bien présomptueux à ce stade : Pourquoi ? Parce que pour l’instant, on évalue le nombre de Français immunisés par le virus à 10–15% pour les évaluations les plus optimistes, d’autres à 1,5 million soit seulement 2% de la population (et encore bien moins si on rapporte le taux de létalité de 0,37% au nombre de morts). Arriver à 60% d’immunité n’est pas le meilleur pari à prendre à court ou moyen terme !

Dans sa note (.pdf) (complète et intéressante) recensant les différentes techniques de pistage existantes, l’inénarrable Mounir Mahjoubi, ex-Secrétaire d’État au numérique, concédait un autre glissement : celui de l’obligation à utiliser une application comme StopCovid. Pour atteindre le taux d’usage de 60% de la population, Mahjoubi soulignait que “les autorités pourraient être ainsi être tentées de recourir à des mesures coercitives pour motiver l’installation”. Dans son analyse l’entrepreneur Rand Hindi arrivait à la même conclusion, en pire : rendre l’application obligatoire et faire que les autorités puissent accéder aux personnes qui reçoivent une alerte pour leur “appliquer” un confinement strict ! C’est-à-dire lever la confidentialité de l’état de santé, rien de moins.

L’application — pourtant “privacy by design” — n’est pas encore déployée que déjà on nous prépare aux glissements, autoritaires ou contraints ! Le risque bien sûr est de passer d’un contrôle des attestations à un contrôle de l’application ! Un élargissement continu de la pratique du contrôle par la police qui a tendance à élargir les dérives… Ou, pour le dire avec la force d’Alain Damasio : “faire de la médecine un travail de police”.

Le risque enfin c’est bien sûr de faire évoluer l’application par décrets et modification successive du code… pour finir par lui faire afficher qui a contaminé qui et quand, qui serait le meilleur moyen d’enterrer définitivement nos libertés publiques !

Le risque du glissement, c’est de croire qu’en lançant StopCovid nous pourrons toujours l’améliorer. C’est de croire, comme toujours avec le numérique, qu’il suffit de plus de données pour avoir un meilleur outil. C’est de continuer à croire en la surenchère technologique, sans qu’elle ne produise d’effets autres que la fin des libertés publiques, juste parce que c’est la seule solution qui semble rationnelle et qui s’offre à nous !

Le risque, finalement est de continuer à croire que l’analyse de mauvaises données fera pour moins cher ce que seule la science peut faire : mais avec du temps et de l’argent. Le risque, c’est de croire, comme d’habitude que le numérique permet de faire la même chose pour moins cher, d’être un soin palliatif de la médecine. On sait où cette politique de baisse des coûts nous a menés en matière de masques, de lits et de tests. Doit-on encore continuer ?

Le risque c’est de croire qu’une application peut faire le travail d’un médecin, d’un humain : diagnostiquer, traiter, enquêter, apaiser… Soigner et prendre soin. Le risque c’est de rendre disponible des informations de santé de quelque nature qu’elles soient en dehors du circuit de santé et de soin !

Faire de la science !

Face à cette crise, face aux défauts de l’industrie et de la mondialisation qu’elle a révélée tout cru, face à des flux trop tendus, à une compétition encore plus acharnée que jamais, et en attendant que l’industrie parvienne à nouveau à répondre à nos besoins mondiaux, notre seul recours reste la débrouille et la science ! La débrouille, car il risque de falloir faire longtemps avec ce qu’on a. Ou plutôt ce qu’on n’a pas : ni masques, ni tests, ni vaccins !

L’application ne soignera pas. Il va falloir retourner au contact ! Trouver les malades. Les diagnostiquer. Les traiter, enquêter pour remonter les contaminations. “Je ne sais pas faire porter un masque à un point” dit très justement l’épidémiologue Renaux Piarroux. Le confinement va nous donner un répit. Il va nous permettre de faire ce que nous aurions dû faire depuis le début : diagnostiquer et traiter, surveiller et isoler, enquêter pour trouver les personnes en contact… Pour cela, nous ne partirons pas de rien : nous avons Covidom et les techniques de l’enquête épidémiologique. Faire un lent et patient travail que le numérique ne peut pas faire. Modestement. Courageusement. Patiemment.

****

Le numérique ne peut pas tout ! Alors qu’on y a recours comme jamais depuis le confinement, cette crise nous montre que le numérique ne livre pas les produits des Drive, ni n’assure la continuité pédagogique. Il ne repère pas non plus les malades ni ne le soigne. Pour cela aussi, nous avons encore besoin des hommes, des femmes, des premiers de cordée, ceux qui sont aux avant-postes, ceux qui sont essentiels, les irremplaçables («la responsabilité suppose une exigence d’irremplaçabilité”, disait la philosophe Cynthia Fleury).

La fin du confinement est l’occasion d’un recommencement stratégique. Recommençons convenablement : suivons les cas, isolons-les, enquêtons sur leurs relations. Trouvons-les asymptotiques. Surveillons les températures. Testons si c’est possible ! Revenons-en à la science, c’est la seule qui ait fait ses preuves ! Faisons confiance à la débrouille et accueillons là au mieux.

Ce que nous devons garantir en tant que société : c’est que les informations de santé demeurent des informations de santé. Que l’état de chacun face au Covid n’a pas à être communiqué : ni aux entreprises, ni à la police, ni aux employeurs, ni aux voisins ! La santé doit rester à la médecine et la médecine ne doit pas devenir la police. Devant un homme malade, on ne doit pas mettre une application, mais bien un soignant.

Il va nous falloir accepter que tous nos remèdes contre le virus soient imparfaits, qu’aucun ne soit radical. Il va nous falloir apprendre à vivre avec les mauvaises herbes des coronavirus. Il va nous falloir faire avec, car nous n’aurons pas de solutions magiques et immédiates : ni tests à foison, ni masques, ni application magique !

Nous avons besoin de science, d’intelligence, de coopération et de réassurance. Il faut arrêter de terroriser les gens par des discours changeants, mais les aider à grandir et comprendre, comme le souligne, énervé, François Sureau. Ni les injonctions, ni la peur, ni le moralisme ne nous y aideront.

Une chose me marque beaucoup depuis le début de cette pandémie, c’est la colère et l’angoisse des gens, non seulement face à un confinement inédit, face à l’inquiétude d’une crise sans précédent qui s’annonce, mais surtout terrifié par la crainte de chopper ce terrible virus dont on leur parle en continu. Une inquiétude qui n’a cessé d’être aggravée par les injonctions contradictoires des autorités, par les changements de stratégies, les annonces démenties, les promesses non tenues, les retards dans les prises de décision… et plus encore les décisions infantilisantes, sans explications, voire prises en dépit du bon sens épidémique. Une population inquiète parce ce que nous savons que cette crise va durer longtemps et que nous n’avons aucune solution facile et immédiate à disposition. Une population angoissée par la perspective que la pandémie puisse faire 20 millions de morts sur la planète, 230 000 personnes en France (selon le taux de létalité de 0,37% : 230 000 morts, c’est ⅓ de la mortalité annuelle du pays — 600 000 morts par an). Une population rongée à l’idée de se retrouver seule et démunie à l’image de nos aînés, dont les derniers moments nous sont cachés, confisqués à leurs proches, d’une manière foncièrement inhumaine.

Nous avons besoin de décisions claires et sincères, d’explications qui aident à grandir et à comprendre. Nous en sommes loin ! Beaucoup trop loin ! Et j’avoue que de semaine en semaine, c’est ce qui m’inquiète le plus !

Hubert Guillaud