Appel pour le revenu de vie : soyons réalistes, demandons l’impossible !

Jam343 - CC byAyant un faible prononcé pour les projets utopiques, j’ai signé avec responsabilité et enthousiasme l’appel pour le revenu de vie, reproduit ci-dessous.

Ce revenu s’apparente peu ou prou à ce qu’on peut lire sur Wikipédia dans l’article Allocation universelle : « versement d’un revenu unique à tous les citoyens d’un pays, quels que soient leurs ressources, leur patrimoine, et leur statut professionnel, permettant à chaque individu de satisfaire ses besoins primaires (se nourrir, se loger, se vêtir, voire acquérir certains biens culturels de base), et laissant l’individu libre de mener ensuite sa vie comme il l’entend ».

En quoi cela concerne ce blog, les logiciels libres et leur état d’esprit ? A priori en rien, mais peut-être en ira-t-il autrement dans les commentaires.

Une hypothèse cependant : « la communauté du logiciel libre et des biens communs » ne se porterait pas plus mal si on assurait à certains de ses membres cet étrange revenu.

Ne ménageant pas mes efforts depuis plusieurs années pour le réseau Framasoft, j’ai été sensible à la distinction faite entre l’emploi et le travail. C’est vrai quoi, on n’entre pas dans le PIB mais ça bosse quand même ici, et pas qu’un peu 😉

Mention spéciale à ce passage : « Il est plus que jamais nécessaire que chacun puisse travailler, d’abord à prendre soin de lui-même, de ses parents, de ses enfants et de ses proches, travailler ensuite pour contribuer aux biens communs accessibles à tous (connaissances, arts, culture, logiciels, etc.), travailler enfin à inventer et à mettre en œuvre à toutes les échelles les moyens qui permettront de léguer une planète vivable aux générations futures. »

J’ai également été sensible au fait que le texte de cet appel ait élaboré à l’aide du logiciel libre co-ment de Philippe Aigrain, mais surtout qu’il ait été publié sous Licence Art Libre.

Le débat est bien entendu ouvert. Ainsi (encore Wikipédia) : « Sur un plan plus moral, cela pose le risque d’institutionnalisation d’une culture de paresse et la remise en cause de la valeur travail. Les opposants à l’allocation universelle arguent ainsi que chacun a le devoir de contribuer dans le cadre de ses possibilités et aptitudes personnelles au bien-être de la société, et voient dans l’allocation universelle, si elle est trop élevée, une exhortation à l’inactivité et à l’égoïsme. Certains libéraux jugent donc immoral le concept de revenu versé sans réciprocité. »

L’écueil sera d’autant plus susceptible d’être évité qu’il s’accompagnera d’une certaine éducation baignant dans une certaine culture[1]. Si on se laisse aller à offrir trop de « temps de cerveau disponible » en pensant que l’objectif à atteindre est « d’avoir une Rolex avant ses cinquante ans », on n’y arrivera sans doute pas.

Appel pour le revenu de vie

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Licence Art Libre

Au delà des clivages sociaux, des corporations, des écoles de pensée, nous, signataires du présent appel, voulons contribuer à provoquer dès maintenant une transformation réaliste et constructive de la société : celle du revenu de vie.

Qu’est-ce que le revenu de vie ?

L’idée est soutenue de longue date par de nombreuses personnalités, de tous horizons politiques, de toutes confessions et de toutes nationalités. Elle est connue sous des appellations diverses: allocation universelle, revenu d’existence, revenu citoyen, revenu universel, revenu social garanti, etc. (cf. Wikipédia)

Le revenu de vie ne doit pas être confondu avec le RMI, le RSA et autres allocations attribuées de manière conditionnelle. Le revenu de vie, lui, est automatique, inconditionnel et inaliénable. Il concerne tout le monde, riches ou pauvres. Il est attribué à chaque individu, de la naissance à la mort. Son montant est suffisant pour garantir à chacun une existence décente – quoi qu’il arrive -. Il est cumulable avec les autres revenus (salariés ou non). Il ne peut être saisi aux plus modestes, mais il entre dans l’assiette d’imposition des plus aisés.

Le revenu de vie ne rémunère pas l’emploi, mais le travail au sens large

Ni l’emploi salarié, ni les revenus du capital, ni les aides sociales classiques ne peuvent prétendre désormais garantir le droit à l’existence de chacun tel que défini à l’article III de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. C’est un fait : en raison de l’informatisation et de l’automatisation de la production, le plein-emploi ne peut plus être atteint. Par contre le travail est toujours d’actualité, et sa tâche est immense.

Il est plus que jamais nécessaire que chacun puisse travailler, d’abord à prendre soin de lui-même, de ses parents, de ses enfants et de ses proches, travailler ensuite pour contribuer aux biens communs accessibles à tous (connaissances, arts, culture, logiciels, etc.), travailler enfin à inventer et à mettre en œuvre à toutes les échelles les moyens qui permettront de léguer une planète vivable aux générations futures.

Loin d’être un encouragement à la paresse, nous affirmons que le revenu de vie permettra à chacun, dans la mesure de ses capacités et de son désir, de s’engager de manière sereine, libre et responsable, dans des travaux essentiels pour l’intérêt général que les emplois traditionnels n’ont pas vocation à assumer.

Comment financer le revenu de vie ?

Il s’agit précisément d’engager pour le financement du revenu de vie tous les moyens alloués à l’entretien de la chimère du plein emploi. L’institution du revenu de vie implique pour les pays qui le mettront en place de revoir leur système fiscal et social, et probablement de reprendre un certain niveau de contrôle sur la création monétaire qu’ils avaient abandonné aux banques. Les calculs des économistes qui ont réfléchi en profondeur à cette question montrent que cela est parfaitement possible (cf. simulations).

Il n’est nul besoin d’attendre quelque cataclysme pour envisager cette profonde transformation. Cela peut se faire progressivement et sans dommage, à condition qu’il existe une prise de conscience et un engagement suffisamment massif. C’est à cet engagement que nous, signataires de cet appel, voulons amener.

Qu’avons-nous à perdre ?

L’illusion d’un emploi salarié et dûment rémunéré pour tous s’est volatilisé avec la crise. Avec cette disparition, va s’évanouir aussi pour beaucoup le réflexe de se définir en fonction de son activité professionnelle. Il ne faut pas le cacher, l’institution du revenu de vie amènera probablement à s’interroger plus encore, sur notre identité, notre rôle dans la société, notre aspiration à procréer en regard des problèmes de démographie, et sur la nature de ce que nous voulons transmettre à nos enfants.

L’institution du revenu de vie ne va pas sans mises en cause profondes de nombreuses habitudes. Nous pensons néanmoins que cette mutation des consciences et des comportements peut s’effectuer sans violence, et dans un esprit d’entraide mutuelle afin que se développe une nouvelle culture de la responsabilité.

Qu’avons-nous à gagner ?

L’institution du revenu de vie remet en cause le « travail » tel qu’il est compris usuellement, à savoir comme base du capital et des rapports sociaux. On le sait, la réduction du « travail » au seul « emploi » provoque automatiquement l’exclusion de ceux qui en sont privés, la peur du chômage chez les salariés, et le contrôle social des assistés. Cette confusion entre « travail » et « emploi » a un coût énorme pour la société aussi bien financièrement que socialement. Les pathologies sociales et psychiques qu’elle entraîne ne sont tout simplement plus soutenables.

Nous n’attendons pas du revenu de vie qu’il règle tous les maux, mais nous affirmons qu’il est absolument nécessaire pour surmonter la crise de confiance actuelle en réduisant le niveau intolérable, de pauvreté, d’exclusion et de peur.

Action

Au moment où les médias relayent quotidiennement les avis d’experts annonçant l’imminence de catastrophes provoquées par l’effondrement des économies, le réchauffement climatique ou les pandémies, nous affirmons qu’il existe un moyen efficace pour faire face collectivement et pour mobiliser les forces vives: c’est la voie du revenu de vie.

Nous citoyens signataire de cet appel, demandons, aux politiques de tous bords, aux syndicats et aux experts, en France et partout dans le monde, de prendre en compte cette voie dans les délais les plus brefs et d’engager avec nous cette grande transformation.

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Notes

[1] Crédit photo : Jam343 (Creative Commons By)




Le mouvement du logiciel libre vu par Hervé Le Crosnier

Aussiegall - CC by« … mais ce serait peut-être l’une des plus grandes opportunités manquées de notre époque si le logiciel libre ne libérait rien d’autre que du code. »

Quand Hervé le Crosnier s’immisce sur le site de l’association Attac pour leur (et nous) parler du mouvement du logiciel libre, cela donne un article majeur qui vient parfaitement illustrer la citation mise en exergue sur ce blog, permettant de mesurer à l’instant t le chemin parcouru[1].

Extrait : « N’ayons pas peur de dire la même chose avec d’autres mots qui parleront peut-être plus clairement aux héritiers du mouvement social et ouvrier : le mouvement des logiciels libre a fait la révolution, créé de nouveaux espaces de liberté, assuré un basculement des pouvoirs et libéré plus largement autour de lui ce qui aurait pu devenir un ordre nouveau, balisé par les décisions de quelques entreprises. Comme toute révolution, elle est fragile, comporte des zones d’ombres, des « risques » de dérapages ou de récupération. Mais avant tout, comme les révolutions sociales, elle est un formidable espoir qui va ouvrir à la joie du monde non seulement les acteurs, mais tous les autres courants entraînés dans la dynamique… »

À lire, en évitant le « syndrome des textes longs à l’ère de la distraction permanente » (pour vous aider : version PDF de cet article), mais aussi et surtout à faire lire à votre entourage.

Leçons d’émancipation : l’exemple du mouvement des logiciels libres

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Hervé Le Crosnier – 24 avril 2009 – Attac
Licence Creative Commons By-Nc

Un mouvement ne parle que rarement de lui-même. Il agit, propose, théorise parfois sa propre pratique, mais ne se mêle qu’exceptionnellement de la descendance de son action dans les autres domaines, qu’ils soient analogues, tels ici les autres mouvement dans le cadre de la propriété immatérielle, ou qu’ils soient plus globalement anti-systémiques. Les incises sur le rôle politique du mouvement du logiciel libre dans la phase actuelle et sa puissance d’émancipation ne sont donc que mes propres interprétations… même si une large partie du mouvement en partage, si ce n’est l’expression, du moins le substrat. Mais d’autres, pourtant membres du même mouvement, et construisant eux aussi le bien commun du logiciel libre pourraient penser que leur motifs d’adhésion et leur objectifs restent largement différents, considérant l’élaboration de logiciels libres comme une autre approche de l’activité capitalistique et de marché, mais qui leur semble plus adaptée au travail immatériel. Approche « pragmatique » et approche « philosophique » ne sont pas incompatibles, c’est du moins la principale leçon politique que je pense tirer de ce mouvement et de son impact plus global sur toute la société. Car si un mouvement ne parle pas de lui-même, il « fait parler » et exprime autant qu’il ne s’exprime. Le mouvement des logiciels libres, et ses diverses tendances, est plus encore dans ce cas de figure, car son initiateur, Richard M. Stallman n’hésite pour sa part jamais à placer les fondements philosophiques au cœur de l’action du mouvement.

Introduction

Pour saisir la genèse du mouvement des logiciels libres, mais aussi son réel impact libérateur pour toute la société, il convient de revenir à la question même du logiciel. Le néophyte a souvent tendance à assimiler le logiciel aux outils de productivité, tels les traitements de texte ou les navigateurs. Mais il convient de comprendre que le logiciel intervient dès qu’une machine, un microprocesseur, sait « traiter l’information », i.e. transformer des signaux d’entrée (souris, clavier, réseau, mais aussi capteurs les plus divers) en signaux de sortie exploitables soit directement par les humains (écran, impression,…), soit utilisés en entrée par une autre machine de « traitement de l’information ».

Le logiciel est partout dans le monde informatique :

  • c’est l’outil essentiel d’accès aux connaissances et informations stockées dans les mémoires numériques
  • il est lui même une forme d’enregistrement de la connaissance et des modèles du monde produits par les informaticiens
  • enfin chaque logiciel est une brique nécessaire au fonctionnement des ordinateurs (système d’exploitation), des réseaux et de plus en plus de tous les appareils techniques qui incorporent une part de « traitement de l’information », depuis les machines-outils de l’industrie jusqu’aux outils communicants de « l’internet des objets ».

Le logiciel est donc tout à la fois un « produit » (un bien que l’on acquiert afin de lui faire tenir un rôle dans l’activité privée ou industrielle), un service (un système, certes automatisé, auquel un usager va faire remplir des tâches) et une méthode (une façon de représenter le monde et les actions possibles). Ce statut ubiquitaire du logiciel est essentiel pour comprendre certaines des revendications de liberté des acteurs du mouvement : il ne s’agit pas simplement d’un outil (un produit de type « machine-outil »), mais d’un système-monde dans lequel se glissent peu à peu la majeure partie des activités humaines, dans tous les domaines, de la production industrielle à la culture, de la communication à l’éducation,… André Gorz parle d’une « logiciarisation de toutes les activités humaines »[2].

La conception des logiciels s’en trouve affectée, ainsi que sa catégorisation qui lui dessine une place spécifique dans le cadre même du « marché ». Le logiciel est à la fois :

  • une œuvre de création : on peut réellement parler d’un « auteur » de logiciel, au moins collectif grâce au développement de techniques de partage de code et de maintenance (génie logiciel et programmation par objets). Chaque logiciel porte la trace des raisonnements de celui qui l’a programmé ;
  • un travail incrémental : un logiciel comporte des « bugs », qui ne peuvent être corrigés qu’au travers de l’expérience utilisateur, et un logiciel doit suivre l’évolution de son environnement informatique (les autres logiciels). Ceci implique la coopération comme base de la construction de logiciels fiables, évolutifs, et adaptables aux divers besoins ;
  • une production de connaissances (les « algorithmes ») qui pourraient devenir privatisées si les méthodes de raisonnement et les formes du calcul ne pouvaient être reprises par d’autres programmeurs (cette question est au coeur du refus par le mouvement des logiciels libres des brevets de logiciels et de méthodes).

Le développement de l’informatique, et l’extension du réseau et du numérique à tous les aspects de la production, de la consommation et des relations interpersonnelles (au niveau privé comme au niveau public) crée un véritable « écosystème », dans lequel :

  • chaque programme doit s’appuyer sur des couches « inférieures » (des applications déjà existantes jusqu’aux pilotes des machines électroniques dites « périphériques ») et rendre des informations à d’autres logiciels. La définition des « interfaces » entre programmes devient essentielle, et la normalisation de ces échanges une nécessité vitale.
  • les programmes peuvent lire ou écrire des données provenant d’autres programmes ou outils. C’est l’interopérabilité.

Que ces échanges soient « ouvert » ou « à discrétion d’un propriétaire » devient une question déterminante. Dans le premier cas, l’innovation s’appuie sur ce qui existe, et peut rester concurrentielle (nouveaux entrants, mais aussi nouvelles idées) ; dans le second, tout concours à la monopolisation (au sens de monopoles industriels, mais aussi de voie balisée limitant la créativité). D’autant qu’un « effet de réseau » (privilège au premier arrivé[3]) vient renforcer ce phénomène.

Tous ces points techniques forment un faisceau de contraintes et d’opportunités pour les industries du logiciel comme pour les programmeurs individuels :

  • la capacité à « rendre des services aux usagers » sans devoir maîtriser une chaîne complète. Ce qui entraîne la création d’un « marché du service » et la capacité de détournement social de tout système numérique : innovation ascendante, usage de masse, relations ambiguës entre les facilitateurs -producteurs de logiciels ouverts ou de services interopérables – et les usagers,… ;
  • la mise en place d’un espace d’investissement personnel pour les programmeurs (autoréalisation de soi, expression de la créativité, capacité à rendre des services associatifs et coopératifs). On rencontre ici un changement émancipateur plus général que Charles Leadbeater et l’institut Demos a nommé « the pro-am révolution »[4].

Le mouvement des logiciels libres

Les logiciels libres partent de cette intrication du logiciel, de la connaissance et du contenu : tout ce qui limite l’accès au code source des programmes va :

  • limiter la diffusion de la connaissance,
  • privatiser les contenus (avec les dangers que cela peut représenter pour les individus, mais aussi les structures publiques, des universités aux États)
  • brider la créativité

Le « code source » est la version lisible par un « homme de l’art » d’un logiciel. L’accès à ce code est un moyen de comprendre, d’apprendre, de modifier, de vérifier, de faire évoluer un logiciel. C’est de cette liberté là qu’il est question dans le mouvement des logiciels libres.

Il s’agit de construire la « liberté de coopérer » entre les programmeurs. Un logiciel libre respecte quatre libertés :

  • la liberté d’exécuter le programme, pour tous les usages (liberté 0.)
  • la liberté d’étudier le fonctionnement du programme, et de l’adapter à ses besoins (liberté 1) ; pour cela, l’accès au code source est nécessaire.
  • la liberté de redistribuer des copies, donc d’aider son voisin, (liberté 2).
  • la liberté d’améliorer le programme et de publier ses améliorations, pour en faire profiter toute la communauté (liberté 3) ; pour cela, l’accès au code source est nécessaire.

On notera que cet ensemble de « libertés » constitue une nouvelle « liberté de coopérer », et non un « droit » au sens où la responsabilité de la continuité de cette liberté reposerait sur des structures et des forces extérieures aux communautés concernées. C’est parce qu’ils ont besoin de coopérer pour libérer leur créativité (et aussi souvent pour gagner leur vie avec cette création de logiciel) que les développeurs ont installé, dans le champ de mines des entreprises du logiciel et de l’informatique, les espaces de liberté dont ils pouvaient avoir besoin. Le maintien de cet espace de liberté peut évidemment demander l’intervention de la « puissance publique » : procès, respect des contrats de licence, mais aussi financement de nouveaux logiciels libres ou amélioration/adaptation de logiciels libres existants, … Mais à tout moment, c’est la capacité à élargir et faire vivre les outils, méthodes, normes et réflexions par la communauté des développeurs du libre elle-même qui détermine l’espace de cette « liberté de coopérer ».

Une des conséquences, souvent marquante pour le grand public, au point d’occulter le reste, vient de la capacité de tout programmeur à reconstruire le programme fonctionnel (le logiciel « objet ») à partir du « code source »… Si le « code source » est accessible, pour toutes les raisons énumérées ci-dessus, il existera donc toujours une version « gratuite » du logiciel. Mais ce n’est qu’une conséquence : un logiciel libre peut être payant, c’est d’ailleurs souvent le cas : mais les copies seront à la discrétion de celui qui aura acheté un logiciel. S’il le souhaite, il peut redistribuer gratuitement. Le produit payant, s’il veut avoir une « raison d’être », y compris dans le modèle du marché, doit donc incorporer du service complémentaire. On passe d’un modèle « produit » à un modèle « service ».

La question économique pour la communauté des développeurs de logiciels libres, tourne alors autour du phénomène de « passager clandestin », celui qui va profiter des logiciels libres produits par d’autres, sans lui-même participer à l’évolution de l’écosystème. Pire, celui qui va privatiser la connaissance inscrite dans les logiciels libres. Par exemple, le système privé Mac OS X s’appuie sur l’Unix de Berkeley. Apple profite du choix des concepteurs de ce dernier, dans la pure tradition universitaire, de considérer leur logiciel comme une « connaissance » construite à l’Université et donc délivrée par elle pour tous les usages, sans règles et sans contraintes… une subtile question de gouvernance au sein du mouvement des logiciels libres, mais qui a des conséquences sociales d’ampleur… Dans la théorie des biens communs, la maintenance de la capacité des communautés à continuer d’accéder aux biens communs qu’elles ont produite est centrale.

Le « mouvement des logiciels libres » part de cette double contrainte :

  • favoriser la coopération autour du code informatique pour étendre l’écosystème
  • laisser fonctionner un « marché de l’informatique » (tout service mérite rétribution)

L’invention de la GPL (« General Public Licence »)[5] en 1989 par Richard Stallman et Eben Moglen va marquer un tournant :

  • auparavant le modèle « universitaire » produisait des biens de connaissance dont les usagers (étudiants, mais aussi industries) pouvaient disposer sans contraintes. Ceci permettait le développement de plusieurs produits construits sur les mêmes connaissances (vision positive), mais aussi la privatisation par les entreprises associées aux centres de recherche universitaires ou publics ;
  • écrite pour protéger une construction communautaire, celle du projet GNU (GNU’s Not Unix), la GPL produit une forme de gouvernance adaptée à un type de bien, à une série de règles et normes communautaires, et à un projet politique (représenté par la Free Software Foundation).

La GPL s’appuie sur le « droit d’auteur » pour compléter celui-ci par un « contrat privé » (une « licence ») qui autorise tout usage (donc offre les quatre libertés du logiciel libre), mais contraint celui qui s’appuie sur du code libre à rendre à la communauté les ajouts et corrections qu’il aura pu apporter. On parle d’une « licence virale » : tout logiciel qui utilise du logiciel libre doit lui aussi rester un logiciel libre.

Cette invention juridique est fondatrice, non seulement du mouvement des logiciels libres, et du maintien et extension de cet espace alternatif de liberté, mais aussi fondatrice pour d’autres mouvements qui vont exploiter la capacité des détenteurs de connaissance (ou les producteurs de culture) à décider volontairement de construire de nouveaux espaces de coopération et de liberté.

Un mouvement symbole

Le mouvement des logiciels libre représente une expérience sociale de grande ampleur, qui a profondément bouleversé le monde de l’informatique. Il suffit d’imaginer un monde dans lequel seul l’achat d’un logiciel permettait de tester des produits et services informatiques : dans ce monde il n’y aurait pas d’internet (les règles de l’organisme technique qui élabore les normes, l’IETF, imposent l’existence d’au moins un logiciel libre pour valider un protocole), pas d’échange de musique numérique, l’évolution des sites web serait soumise à la décision d’opportunité économique des géants oligopolistiques qui se seraient installés sur l’outil de communication, l’apprentissage des méthodes de développement informatique dans les universités seraient soumises à la « certification » de tel ou tel béhémot du logiciel ou des réseaux,…

N’ayons pas peur de dire la même chose avec d’autres mots qui parleront peut-être plus clairement aux héritiers du mouvement social et ouvrier : le mouvement des logiciels libre a fait la révolution, créé de nouveaux espaces de liberté, assuré un basculement des pouvoirs et libéré plus largement autour de lui ce qui aurait pu devenir un ordre nouveau, balisé par les décisions de quelques entreprises. Comme toute révolution, elle est fragile, comporte des zones d’ombres, des « risques » de dérapages ou de récupération. Mais avant tout, comme les révolutions sociales, elle est un formidable espoir qui va ouvrir à la joie du monde non seulement les acteurs, mais tous les autres courants entraînés dans la dynamique, comme nous le verrons plus loin.

Le mouvement des logiciels libres met en avant la notion de « biens communs » : créés par des communautés, protégés par ces communautés (licence GPL, activité de veille permanente pour éviter les intrusions logicielles[6]) et favorisant l’élargissement des communautés bénéficiaires. La gouvernance des biens communs, surtout quand ils sont dispersés à l’échelle du monde et de milliards d’usagers, est une question centrale pour la redéfinition de l’émancipation. Le mouvement des logiciels libres montre que cela est possible.

C’est un mouvement qui construit de « nouvelles alliances ». Les clivages face au logiciel libre ne recouvrent pas les clivages sociaux traditionnels. Par exemple, le souverainisme ne sait pas comment se situer face à des biens communs mondiaux : il n’y a plus de capacité à défendre des « industries nationales ». Seuls les services peuvent localiser l’énergie économique ouverte par de tels biens. Le mouvement des logiciels libres ne se définit pas en tant que tel « anti-capitaliste », car nombre d’entreprises, parmi les plus importantes et dominatrices (IBM en tête) ont compris que l’écosystème informatique ne pouvait fonctionner sans une innovation répartie, et donc des capacités d’accès et de création à partir des bases communes (le fonctionnement de l’internet et les normes d’interopérabilité). Il est plutôt « post-capitaliste », au sens où il s’inscrit dans le modèle général du « capitalisme cognitif »[7], qui est obligé de produire des externalités positives pour se développer.

Enfin, c’est un mouvement social qui s’est inscrit dès sa formation dans la sphère politique en produisant une utilisation juridique innovante (la GPL) comme moyen de constituer la communauté et protéger ses biens communs. Ce faisant, ce mouvement agit en « parasite » sur l’industrie qui le porte. On retrouve des éléments du socialisme du 19ème siècle : ne plus attendre pour organiser des « coopératives » et des « bourses du travail ». Une logique qui est aussi passée par l’expérience des mouvements dits alternatifs (« californiens ») : construire ici et maintenant le monde dans lequel nous avons envie de vivre.

Cette symbiose entre le mouvement, son radicalisme (c’est quand même un des rares mouvements sociaux qui a produit et gagné une révolution dans les trente dernières années) et les évolutions du capital montre qu’il existe une autre voie d’émancipation que « la prise du Palais d’Hiver », surtout dans un monde globalisé et multipolaire, dans lequel le « Quartier Général » n’existe plus[8].

Enfin, le mouvement des logiciels libres a construit une stratégie d’empowerment auprès de ses membres. La « communauté » protège ses membres. Il y a évidemment les règles juridiques de la GPL d’une part, mais pensons aussi à la capacité à « offrir » du code en coopération pour que chaque membre puisse s’appuyer sur un écosystème en élargissement permanent afin de trouver les outils dont il a besoin ou d’adapter les outils existants à ses besoins. C’est une des raisons de la force du mouvement : en rendant plus solides et confiants ses membres, il leur permet d’habiter la noosphère[9]. Cet empowerment doit beaucoup au mouvement féministe (même si paradoxalement il y a peu de femmes et qu’elles sont souvent traitées avec dédain parmi les activistes du logiciel libre). Comme dans l’empowerment du mouvement féministe, c’est la vie quotidienne et l’activité humaine créatrice qui est au coeur de la réflexion du mouvement social. La « concurrence » entre programmeurs libres se joue sur le terrain de « l’excellence » au sens des communautés scientifiques : il s’agit de donner du code « propre », de qualité, rendant les meilleurs services, autant que de permettre aux débutants de s’inscrire dans la logique globale, par leurs initiatives et activités particulières, sans la nécessité d’être un élément dans un « plan d’ensemble ». C’est un mouvement qui pratique l’auto-éducation de ses membres (nombreux tutoriels sur le web, ouverture des débats, usage des forums ouverts,…).

Enfin, même si de nombreuses structures associatives organisent et représentent le mouvement, la structuration de celui-ci comme mouvement social mondial est beaucoup plus floue. C’est au travers de l’usage des produits du mouvements que l’on devient « membre » du mouvement, et non au travers de la production d’un discours ou d’une activité de lobbyisme ou de conscientisation. On retrouve les formes d’adhésion « à la carte » des autres mouvements sociaux. On s’aperçoit aussi que les mouvements parlent toujours au delà des discours de leurs membres, individus ou organisations…

Extension : les nouveaux mouvements du numérique

Un autre élément essentiel pour comprendre l’importance et l’enjeu du mouvement des logiciels libre est de voir sa descendance dans d’autres mouvements liés à la sphère du numérique. Comme tout mouvement, les acteurs des logiciels libres ne sont pas tous conscients de l’étendu stratégique de leur actions. Nombre des membres se contentent des règles et normes « techniques » établies par le mouvement et se reconnaissent dans l’aspect pratique des résultats. Mais pourtant, les règles et les méthodes mise en place par le mouvement des logiciels libres se retrouvent dans d’autres sphères.

On parle d’une « société de la connaissance » ou « de l’information », ce qui est une expression ambiguë, qu’il conviendrait de mettre en perspective[10]. Mais pour résumée qu’elle soit, l’expression souligne que la propriété sur la connaissance, la capacité à mobiliser « l’intelligence collective » sont des questions organisatrices essentielles de l’économie du monde à venir. Et que ces questions renouvellent autant les formes de domination (par exemple la montée des grands « vecteurs »[11] sur l’internet, comme Google, Yahoo !, Orange, Adobe,… qui souvent s’appuient sur les logiciels libres) que les formes de l’émancipation, et la notion de contournement, de situation (au sens du situationisme) et de symbiose parasitique.

On voit donc apparaître de nouvelles lignes de faille dans les oppositions « de classe » liées au capitalisme mondialisé et technicisé. Et en conséquence de nouveaux regroupements des « résistants » ou des « innovateurs sociaux ». Plusieurs tentatives de théorisation de cette situation existent, depuis la théorie des Multitudes de Toni Negri et Michael Hardt[12], à celle de la Hacker Class de MacKenzie Wark[13], qui décrivent des facettes de ce monde nouveau qui émerge. Toutefois, ces interprétations ne savent pas encore répondre à deux questions centrales. D’abord celle dite traditionnellement des « alliances de classes », notamment la relation entre ces mouvements sociaux et les mouvement de libération issus de l’ère industrielle. Des « alliances » posées non en termes « tactiques » (unité de façade ou d’objectifs), mais bien en termes programmatiques (quelle société voulons-nous construire ? quelle utopie nous guide ? quelle articulation entre l’égalité – objectif social – et l’élitisme – au sens fort des communautés scientifiques ou des compagnons : être un « grand » dans son propre domaine de compétence – ?). Ensuite celle dite de la transition, particulièrement en ce qu’elle porte sur les relations entre les scènes alternatives et les scènes politiques. Le capitalisme, comme forme de sorcellerie[14], ne peut pas s’effondrer de lui-même sous le poids de ses contradictions internes. Le politique, avec toutes les transformations nécessaires des scènes où il se donne en spectacle (médias, élections, institutions,…), garde une place dans l’agencement global des divers dispositifs alternatifs – ou internalisés et récupérés – qui se mettent en place.

Ces questions peuvent avancer quand on regarde l’évolution du mouvement des logiciels libres, qui est né d’une innovation juridique (la GPL), et qui défend aujourd’hui son espace alternatif au travers de multiples actions contres les tentatives, souvent détournées et perverses, de mettre en place des enclosures sur le savoir et la culture. La place du mouvement des logiciels libres en France, avec notamment l’association April[15], au côté du mouvement spécialisé dit « La quadrature du net »[16], sur les dernières lois concernant la propriété immatérielle (lois dites DADVSI et HADOPI) en est un exemple. L’approche de la politique n’est plus « frontale », mais part de la défense des espaces de libertés, des « biens communs » créés, et leur reconnaissance comme forme essentielle de la vie collective. On retrouve les logiques du socialisme du XIXème siècle, des coopératives et de la Première Internationale.

Le mouvement des logiciels libres, s’il est le plus abouti et le plus puissant de ces nouveaux mouvements, n’est plus seul. C’est dans le domaine de la connaissance et de l’immatériel, dont la « propriété » que l’image de la GPL et des logiciels libres a connu une descendance abondante et pugnace. Les questions de la propriété sur la connaissance et de la construction, maintenance et gouvernance des biens communs créés par les communautés concernées sont deux éléments clés de ces nouveaux mouvements sociaux.

Quelques exemples :

  • le mouvement des créations ouvertes (Creative commons[17], Licence Art Libre,…) est construit autour de règles juridiques qui permettent aux auteurs d’autoriser des usages pour mieux faire circuler leurs idées, musiques, travaux divers. Ce mouvement emprunte directement à la « révolution douce » de la GPL pour son côté subversif, et à la fluidification du marché culturel comme conséquence de l’extension des communs de la culture. Une manière pragmatique de poser les problèmes qui évite l’enfermement dans des alternatives infernales[18].
  • le mouvement des malades qui veulent partager les connaissances avec leurs médecins. Avec une participation politique forte des malades de SIDA dans l’opposition aux ADPIC, qui s’est traduite par l’adoption des exceptions pour les médicaments dans les Accords de Doha[19]
  • le mouvement des chercheurs pour le libre-accès aux publications scientifiques et aux données scientifiques
  • le renouveau des mouvements paysans autour du refus de l’appropriation des semences par les trusts multinationaux (contre les OGM, pour le statut de bien communs des « semences fermières »[20] – un exemple symptomatique en est la réalisation d’un numéro de « Campagnes solidaires », journal de la Confédération Paysanne avec Richard Stallman)
  • le mouvement pour un nouveau mode de financement de la recherche pharmaceutique (notamment les propositions de James Love pour l’association KEI – Knowledge Ecology International[21]) et pour l’utilisation de nouveaux régimes de propriété afin de permettre le développement de médicaments adaptés aux « maladies négligées » (Médecins sans frontières, DNDi[22]…)
  • le mouvement mondial pour le libre-accès à la connaissance (a2k : access to knowledge) qui réunit des institutions (États, notamment pour l’Agenda du développement à l’OMPI, constitution du bloc des « like-minded countries »), des réseaux d’associations (IFLA, association internationale des bibliothécaires, Third World Network,…) ou des universitaires (il est intéressant de penser que ce mouvement a tenu sa première conférence mondiale à l’Université de Yale[23])
  • le mouvement OER (Open Educational Ressources[24]) qui réunit autant des grandes institutions (MIT, ParisTech) que des enseignants souhaitant partager leurs cours, avec le parrainage de l’UNESCO… et de HP !
  • le mouvement dit « société civile »[25] lors du SMSI (Sommet mondial sur la société de l’information, sous l’égide de l’ONU en 2003 et 2005) ou du Forum pour la Gouvernance de l’Internet, et tous les mouvement qui s’interrogent sur l’évolution des réseaux, combattent l’irénisme technologique autant que le refus passéiste des nouveaux modes de communication
  • les mouvements portant sur le « précariat intellectuel », depuis les intermittents du spectacle jusqu’à l’irruption d’une « hacker class » (MacKenzie Wark) pratiquant le piratage comme valeur de résistance
  • les mouvements de refus de la mainmise publicitaire sur l’espace mental collectif, qui organisent la dénonciation et le rejet de l’industrie de l’influence (Résistance à l’Agression publicitaire[26], AdBusters…)
  • le Forum Mondial Sciences & Démocratie[27], dont la première édition s’est tenue à Belèm en janvier 2009. Ce mouvement introduit la question des biens communs de la connaissance au coeur d’une nouvelle alliance entre les producteurs scientifiques et techniques et les mouvements sociaux.

Les formes de politisation au travers de l’empowerment des membres et des « usagers » de ces mouvements sont largement différentes de celles de la vague précédente des mouvements sociaux du vingtième siècle. La capacité de ces mouvements à s’inscrire directement dans la sphère politique est aussi une particularité. Il ne s’agit pas seulement de « faire pression » sur les décideurs politiques, mais d’imposer à la société politique la prise en compte de biens communs déjà établis et développés.

La problématique des biens communs n’a pas fini de produire une remise en mouvement de la conception d’une révolution émancipatrice, des rythmes de l’activité militante et de la relation entre les communautés de choix et les communautés de destin. Un élément moteur de la réflexion théorique en cours reste la dialectique entre l’empowerment individuel et coopératif/communautaire par la création et la maintenance de biens communs, et la défense des plus fragiles (financièrement, mais aussi juridiquement par des droits leur permettant une nouvelle gouvernance, l’accès à la connaissance ou de respect de leurs formes de connaissances, cf les mouvements « indigènes »[28]).

Car il faudra bien trouver des articulations théoriques, pratiques et politiques entre les diverses formes de résistance aux sociétés de contrôle, de militarisme, d’influence et de manipulation qui se mettent en place.

Pour cela, les pratiques, les réflexions et les succès sur le terrain du mouvement des logiciels libres sont à la fois un encouragement et une première pierre d’une réflexion par l’action. Ici et maintenant. En osant s’opposer aux nouveaux pouvoirs et aux franges les plus avancées des dominants.

Notes

[1] Crédit photo : Aussiegall (Creative Commons By)

[2] L’immatériel, André Gorz, Galilée, 2004

[3] Effet de réseau, Wikipédia http://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_de_réseau

[4] The Pro-Am revolution, How enthusiasts are changing our economy and society, Charles Leadbeater, Paul Miller, Pamphlet, 24th November 2004 ISBN : 1841801364. http://www.demos.co.uk/publications/proameconomy

[5] http://www.gnu.org/licenses/licenses.fr.html

[6] C’est par exemple par ce type d’analyse des logiciels propriétaires que l’on a trouvé le « rootkit » (logiciel espion) installé par Sony à chaque fois qu’on lisait un CD de cette entreprise sur un ordinateur. Les logiciels libres, en permanence sous l’oeil des usagers et des membres de la communauté comportent beaucoup moins de failles et de risques d’infections par des virus ou autres « badware ».

[7] Le capitalisme cognitif : la nouvelle grande transformation, Yann Moulier-Boutang, Ed. Amsterdam, 2007

[8] Ces deux références renvoient à l’imagerie du mouvement communiste de libération (bien distinct du stalinisme de pouvoir). La prise du Palais d’Hiver de Saint Petersbourg signait le début de la révolution de 1917 et l’écroulement de la dictature tsariste ; le texte de Mao Zedong « Feu sur le Quartier général » était un appel à la révolte contre l’installation bureaucratique « par en haut », qui allait ouvrir la période dite de la « Révolution culturelle ». L’histoire a fini par avoir raison des mouvements de libération, ce qui n’enlève rien à leur force de contestation, mais montre que la vision d’un monde centralisé, avec des noeuds de pouvoir centraux à défaire, reste en deçà des formes exactes du pouvoir… et donc des besoins des révolutions émancipatrices.

[9] Homesteading the noosphere, Eric Raymond http://catb.org/ esr/writings/homesteading/homesteading/ Une traduction française est disponible dans le livre Libres enfants du numériques, Florent Latrive et Olivier Blondeau, Ed. De l’Eclat.

[10] Société de l’information/société de la connaissance, Sally Burch : In : Enjeux de Mots, sous la direction de Valérie Peugeot, Alain Ambrosi et Daniel Pimienta, C&F éditions, 2005. http://vecam.org/article516.html

[11] Tentative de définition du vectorialisme, In : Traitements et pratiques documentaires : vers un changement de paradigme ? Actes de la deuxième conférence Document numérique et Société, 2008 Sous la direction d’Evelyne Broudoux et Ghislaine Chartron. Ed. ADBS

[12] Multitude : Guerre et démocratie à l’âge de l’Empire, Michael Hardt et Antonio Negri, La découverte, 2004

[13] Un Manifeste Hacker : "a Hacker Manifesto", McKenzie Wark, Ed. Criticalsecret, 2006 (traduction française)

[14] La sorcellerie capitaliste : Pratiques de désenvoûtement, Philippe Pignarre et Isabelle Stengers, La Découverte, 2004

[15] http://april.org

[16] http://laquadrature.net

[17] http://fr.creativecommons.org

[18] Construire le libre-accès à la connaissance, Hervé Le Crosnier, In : Entre public et privé, les biens communs de l’information. Colloque, Université de Lyon 2, 20 octobre 2005 http://archives.univ-lyon2.fr/222/

[19] Sida : comment rattraper le temps perdu, Gernan Velasquez, In : Pouvoir Savoir : Le développement face aux biens communs de l’information et à la propriété intellectuelle, C&F éditions, 2005. http://vecam.org/article1035.html

[20] Les paysans sont-ils les protecteurs des semences locales, Guy Kastler, à paraître (version en ligne : http://vecam.org/article1075.html)

[21] Prizes to stimulate innovation, James Love, KEI International http://www.keionline.org/content/view/4/1/

[22] Relancer la recherche et développement de médicaments contre les maladies négligées, Bernard Pecoul et Jean-François Alesandrini In : Pouvoir Savoir, op. Cité. http://vecam.org/article1033.html

[23] Accès à la connaissance : Access to Knowledge, Compte-rendu de la conférence Access to knowledge qui s’est tenue à l’Université de Yale du 21 au 23 avril 2006, par Hervé Le Crosnier http://herve.cfeditions.org/a2k_yale/

[24] Cape Town Open Education Declaration : Unlocking the promise of open educational ressources, http://www.capetowndeclaration.org/read-the-declaration

[25] Relieurs, Première phase du Sommet mondial de la société de l’information – SMSI 2002/2003, Note de synthèse Octobre 2004 par Valérie Peugeot http://vecam.org/article364.html

[26] http://www.antipub.org

[27] http://fm-sciences.org

[28] Forum social mondial : un appel pour « bien vivre » plutôt que vivre mieux, Christophe Aguiton http://www.cetri.be/spip.php?article1037




Obama et Davos en images sous les plus libres des licences Creative Commons

The Official White House Photostream - CC byCoup sur coup, « Obama » et, plus étonnant, « Davos » viennent de publier sur Flickr plusieurs centaines d’images de qualité professionnelle sous licence Creative Commons (CC). Et pas n’importe quelle licence du panel, la CC By pour le premier et la CC By-Sa pour le second.

Pour résumer (grossièrement), vous disposez alors des mêmes droits avec ces images que ceux qui vous sont conférés avec les logiciels libres (sachant, bien entendu, que la question du droit à l’image subsiste quoiqu’il arrive).

Et c’est par exemple une aubaine pour la communauté Wikipédia qui trouve là une source d’une grande richesse pour illustrer son encyclopédie, en particulier lorsqu’il s’agit des articles biographiques traitant des grands de ce monde.

Obama et les Creative Commons ce n’est pas une nouveauté. Mais c’est peut être la première fois que nous sommes ainsi autorisés à pénétrer dans l’intimité du président des États-Unis (on se croirait dans West Wing en fait), avec des clichés assez exceptionnels ma foi (exemples 1, 2, 3 ou 4). Ils sont l’œuvre des photographes officiels du staff de la Maison Blanche qui s’inscrivent ici dans la même logique et dynamique qu’au moment de la campagne. On notera qu’en fait les clichés auraient dû directement se placer dans le domaine public mais la case « public domain » n’existe pas (encore) chez Flickr !

Pour ce qui concerne « Davos », ou plus précisément le Forum économique mondial de Davos, ce sont plus de trois cents images qui ont été déposées sur Flickr par les organisateurs (exemple : Bill Gates). Elles proviennent des photographes de l’agence Swiss Image mandatées à l’occasion de l’édition 2009, mais on trouve aussi quelques instantanées des éditions précédentes (exemple célèbre : poignée de main entre Shimon Peres et Yasser Arafat en 2001).

Bon, certes, mais est-ce que tout ceci va changer la face du monde (et absoudre de leurs responsabilités quelques uns des davossiens pour la période que nous traversons) ? Bien sûr que non. Mais c’est tout de même intéressant de les voir ainsi « mettre leur obole dans le pot commun ».

À la commande ou en salarié, on paye les photographes une fois pour un travail d’information publique qui peut alors tranquillement rejoindre la marmite toujours plus profonde des ressources libres. C’est, à n’en pas douter, un modèle qui a de l’avenir 😉

PS : Pour illustrer mon billet, j’ai choisi une photo de… Carla Bruni[1] (au fond à droite) !

Notes

[1] Crédit photo : The Official White House Photostream (Creative Commons By)




La France sur le toit du monde Open Source !

Open Source World Map - Red Hat - FranceLes classements valent ce qu’ils valent mais, dans le climat de sinistrose ambiant, ne boudons pas notre plaisir de voir la France arriver tout simplement première sur la toute récente carte du monde de l’activité Open Source que nous propose Red Hat, les USA, par exemple, n’arrivant qu’en neuvième position.

Cette carte se base sur l’indice maison « OSI » (pour Open Source Index), élaboré à partir d’une étude du Georgia Institute of Technology (Georgia Tech).

Ce classement général est un moyenne de trois autres sous-classements : Gouvernment, Industry et Community.
Et pour le France cela donne respectivement les places 1, 25 et 3 (voir copie d’écran ci-contre).

Une fois la surprise et la satisfaction passées, il conviendra tout de même d’aller voir plus dans le détail ce qui se cache exactement derrière cet indice OSI. Parce que, au feeling, j’aurais vu la France moins bien classée pour l’Administration (où est le plan d’action français en faveur de l’Open Source ?) et mieux classée en Entreprise. Quant à la section Community, je ne me prononcerai pas, mais je suis assez curieux de connaître les critères permettant de la définir puis d’en distinguer les pays.

Au final, j’ai un petit doute quant à la rigueur scientifique des informations recueillies, analysée et ordonnées. Je pense qu’il faut plutôt prendre cette carte d’activité comme un indicateur ou plutôt une tendance, et à ce petit jeu-là, si la France n’est pas forcément la première de la classe, elle se trouve assurément dans le peloton de tête.

Mais on notera qu’il existe également une autre carte, celle de l’environnement Open Source. Et là c’est un tout autre son de cloche, comme nous le dit David Feugey sur Silicon.fr :

Red Hat évalue également si un pays réunit les conditions favorables au développement du marché open source : niveau technologique, pourcentage d’utilisateurs Internet, etc. La Suède est première, devant les États-Unis, La Norvège, le Danemark, La Finlande, la Nouvelle-Zélande, la Suisse, le Royaume-Uni, Les Pays-Bas et le Canada. En Europe, les pays du nord semblent donc un terrain plus propice au développement de l’open source. Il en va de même avec les États-Unis.

A contrario, la France, pourtant première en terme d’activité dans ce domaine, n’est que quinzième dans celui des perspectives futures. Avec une moins bonne infrastructure que celle des pays nordiques et une politique moins favorable aux logiciels libres que celle des États-Unis, notre pays envoie trop peu de signes en faveur du développement de ce marché.

Alors, erreur d’appréciation de la part de Red Hat, ou réel frein politique et économique de la part de notre gouvernement et de nos entreprises ?

Peut-être un peu des deux !




Quand Internet croit faire de la politique

Ted Percival - CC by« 18 juin 1940 – le général de Gaulle envoit un message sur Twitter et crée une cause sur Facebook. 19 juin 1940 – déjà plus de 30 millions d’internautes ont rejoint les rangs des Français Libres sur les réseaux sociaux. Les SMS et mails de soutien affluent. Des milliers de blogs fleurissent… »

Voici un article de Cédric Biagini[1] dont le préambule accroche illico et donne envie d’en savoir plus. Il interroge profondément le sens que nous donnons, ou feignons de donner, à tout ce temps passé à nous connecter et échanger des informations. Et si nous étions en train de nous fourvoyer à croire qu’un autre monde est possible, vissés que nous sommes derrière nos écrans ?

Participer plein d’espoir et d’énergie à notre propre enfermement alors même que nous pensons nous libérer, voilà un scénario que l’Histoire a déjà connu. Internet deviendra-t-il la nouvelle caverne de Platon de notre époque numérique ?

En tant que créateur de Framasoft (qui a donc de bonnes heures de vol net derrière lui), je tenais à vous faire partager ma perplexité existentielle face à ce texte militant qui pose quelques bonnes questions.

On pensera également bien entendu à la forte mobilisation du réseau contre le projet de loi Création et Internet (opération Blackout, pétition, Réseau des Pirates, groupe Facebook, tag Twitter, etc.) dont on peut légitimement se demander si elle ne s’est pas effectivement arrêtée aux frontières du Web. D’autant que lorsque l’on tente d’en sortir (ça, ça et bientôt ça), on franchit difficilement le stade de la confidentialité, quand bien même on passe assurément un bon moment ensemble.

Au final la loi risque bien d’être votée. Et le Net, constitué de gens toujours plus informés, est, dans sa grande majorité, totalement abasourdi devant tant d’incompétences et d’irresponsabilités. Sauf que comme il est dit plus bas, ce n’est pas parce que les gens savent que les choses changent. Le décalage entre le bruit virtuel et le silence du terrain est patent.

Il y a indéniablement une aspiration et de nouvelles possibilités pour faire de la politique autrement. Mais lorsqu’il est question de contester une loi émanant de la majorité, les classiques rapports de force gardent toute leur efficacité. De mémoire de parlementaire, on n’a encore jamais vu un buzz avoir raison d’un gouvernement…

Cet article est issu du dossier « le piège Internet » du numéro d’avril de La Décroissance (2€ chez votre point de vente le plus proche). Ce journal « de combat veut faire progresser une cause encore minoritaire, et fait désormais partie du paysage médiatique national, contribuant, par son indépendance, à la vitalité du débat démocratique sur l’avenir de la planète »[2].

La Toile contre la politique ?

Cédric Biagini – avril 2009 – La Décroissance

18 juin 1940 – le général de Gaulle envoit un message sur Twitter et crée une cause sur Facebook.

19 juin 1940 – déjà plus de 30 millions d’internautes ont rejoint les rangs des “Français Libres” sur les réseaux sociaux. Les SMS et mails de soutien affluent. Des milliers de blogs fleurissent. Sur les forums, Gaullistes, FFI, FTP et Miliciens pétainistes s’écharpent..

18 juin 2009 – In Frankreich wird nur noch Deutsch gesprochen…

Les milieux contestataires ont imposé l’idée que pianoter derrière un écran pour diffuser sur Internet était une pratique subversive. Les mouvements conservateurs tendant à reconquérir ce terrain, il est temps de mettre à bas ce mythe de la communication. Et de savoir construire (aussi) des rapports de force sociaux ou politiques dans le monde réel. Saurons nous encore le faire ?

Cette promesse d’un monde meilleur a été portée par les pionniers d’Internet. L’émergence du mouvement alter mondialiste est concomitante de l’éclosion de ces nouveaux médias, la lutte se mène désormais à l’échelle planétaire et prend le réseau comme modèle.

Mais cette illusion d’avoir dépassé le capitalisme vermoulu, ancré dans le réel, pesant, hiérarchisé, bref, associé à l’ancien monde du XXème siècle, n’a duré que quelques années, le temps que celui-ci se redéploie dans l’univers virtuel et en tire des bénéfices immenses, en terme financiers bien sûr, mais surtout idéologiques. Le basculement numérique lui offre, au contraire un nouveau territoire à conquérir et lui permet de se moderniser en se parant de valeurs issues de la tradition émancipatrice et de mots comme révolution, liberté, gratuité, horizontalité, participation, nomadisme, échange, etc…

Bien que toutes les forces sociales dominantes, de l’État aux multinationales, en passant par les industries culturelles, participent au déferlement technologique et tentent de mettre l’ensemble de l’humanité devant tel ou tel écran, les mouvements contestataires, passé l’euphorie des débuts, sont anesthésiés, incapables de formuler un discours un tant soit peu critique. Seules quelques technologies comme les puces RFID et celles associées aux contrôles policiers éveillent leur méfiance.

Pourtant la question numérique est éminemment politique. Nos rapports au temps, à l’espace, aux autres et à nos environnements s’en trouvent profondément modifiés. L’essence même de la technologie est en train de transformer le monde. Son emprise croissante sur nos vies ne fait que renforcer le libéralisme : marché autorégulé, disparition des intermédiaires, accélération des échanges, déterritorialisation, individualisation, destruction des modes de vie traditionnels, culte de la performance et de la nouveauté. Que les béni-oui-oui du progrès applaudissent à toutes les innovations, persuadés que chaque problème trouvera sa solution technique, paraît logique. Plus étonnante est la permanence du discours sur la neutralité de la technique – tout dépend de ce qu’on fait… – ou sur l’illusion de pouvoir la maîtriser – c’est bien pratique et efficace…

L’obsession de l’information. Peu à peu, une frénésie informationnelle s’est emparée de la société, le monde de la contestation ayant parfaitement intégré que tout n’était qu’information et que si les gens savaient, tout changerait !…. Puisque les grands médias sont responsables de tous les maux, leur critique devient obsessionnelle et rétablir la vérité devient le cœur des nouvelles pratiques militantes. Se multiplient alors forums, listes, sites, blogs, etc…

Le temps n’étant pas extensible, les moments de rencontre se raréfient et plus personne ne devient disponible pour organiser de vraies réunions ou penser des mobilisations ou des alternatives collectives. Cette réduction utilitariste de l’agir politique empêche de questionner le sens de nos pratiques, alors que nous devrions avoir compris, après les multiples échecs des mouvements du XXème siècle, que le chemin importe plus que le but. Faire un journal militant, par exemple, n’a pas uniquement pour objectif de diffuser des idées ; le support en lui-même crée du collectif et amorce une prise sur le réel.

Les militants passent un temps croissant vissés devant leur ordinateur à faire circuler des informations et à s’écharper sur les forums avec une violence que l’absence de liens véritables permet. Une information chasse l’autre dans un ballet sans fin qui donne le tournis… et de nouvelles raisons de s’inquiéter et de s’indigner. Plus le temps de prendre du recul pour mettre en perspective, de conceptualiser ou de débattre. Il faut se connecter aux évènements les plus récents et rester vigilants pour être sûrs de ne rien manquer ! Cette dictature de l’instant empêche de chercher des réponses philosophiques et politiques.

L‘homo communicans. Cette obsession de l’information libératrice postule qu’il suffirait d’être au courant des horreurs du monde pour les combattre. Ce peut être une condition nécessaire mais jamais suffisante, et il n’y a pas de lien direct entre information et action – si l’on entend bien sûr par « action » actes et engagement, et non un simple réflexe émotionnel ou compassionnel.

Le rapport de force politique ne se crée pas devant un écran. Car scoops et révélations n’entraînent pas mobilisations. Car ces informations et cette masse de connaissances accessibles, aussi critiques soient-elles, si elles n’entrent pas dans la « réalité de nos situations », c’est-à-dire dans un ordre constitué de croyances, de valeurs, de repères et de pratiques, ne produisent aucune puissance politique. Or la société communicationnelle nous condamne à n’être que des émetteurs-récepteurs d’informations, perpétuellement plongés dans l’univers des machines, extérieurs au monde.

Bien évidemment, il ne s’agit pas de refuser toute forme de communication, d’échanges d’informations et d’analyses. Mais plutôt, de cesser de nous bercer d’illusions que l’instantanéité et la profusion de données nous permettent de maîtriser le monde.

En évitant d’être happé par ces flux, un double processus peut s’enclencher : prendre le recul nécessaire à la réflexion, à la construction de soi et à la production de sens. Et, en même temps, nous réinscrire dans une histoire, dans un environnement social, dans la nature et dans la durée.

Notes

[1] Cédric Biagini est l’auteur de La Tyrannie technologique : Critique de la société numérique aux éditions L’échapée (dont on peut lire une critique contextuelle sur le site des Écrans).

[2] Crédit photo : Ted Percival (Creative Commons By)




Scoop : Christine Albanel publie sous licence libre un livre sur le partage !

Sebastian Bergmann - CC by-saSi seulement c’était vrai… Bien que le premier avril soit passé depuis longtemps, vous devez vous en doutez un peu : mon titre n’est qu’un fake.

Je plaide coupable donc. Mais coupable par approximation parce qu’à quelques milliers de kilomètres au nord près, j’avais bon !

En effet, je me suis juste trompé de ministère et de pays puisqu’aujourd’hui, en Norvège, Madame Heidi Grande Røys (sur la photo ci-contre[1]), ministre de l’Administration publique et de la réforme, publie un livre sous licence Creative Commons By-Sa.

Il s’intitule Delte meninger, est accompagné d’un site participatif autour du projet, et, à en croire le blog des Creative Commons, il porte sur le partage et l’aspect social des réseaux informatiques et d’Internet.

Merci à tout visiteur qui comprend un tant soit peu le norvégien de nous en dire plus dans les commentaires. Parce qu’avec l’outil de traduction Google appliquée à cette page du site, on se retrouve avec des morceaux intéressants (le procès du The Pirate Bay, évocation des logiciels et de la culture libre…) pour un titre aux accents étranges : « La paix, la liberté, et tout est gratuit ! ».

En attendant, et quand bien même nous n’en connaissons pas encore le contenu dans le détail, on ne peut que saluer l’initiative. Nous y viendrons nous aussi en France, même si visiblement il faudra s’armer d’un peu de patience…

Notes

[1] Crédit photo : Sebastian Bergmann (Creative Commons By-Sa)




Quand la ville de Sainte-Ménehould remercie Framasoft et sa Framakey

Sainte-Ménehould - FramakeyIl était une fois des écoliers d’une petite ville de province de la Marne…

Cette simple histoire d’enfants, d’éducation, de politique locale, de diffusion du logiciel libre et de reconnaissance mutuelle est peut-être un détail pour vous, mais pour nous elle veut dire beaucoup et est à encadrer précieusement de notre petit livre d’or personnel.

En fin d’année scolaire dernière, la ville de Sainte-Ménehould eut une sympathique initiative ainsi narrée par le journal local L’Union du 14 juin 2008 (extraits) :

C’est hier matin que l’on a remis le « petit cadeau » aux écoliers. En ouvrant l’enveloppe gonflée, Melinda, 11 ans, élève au groupement scolaire Robert Lancelot s’exclame : « J’espère que ce ne sont pas des chocolats parce que mon père va les manger ! ». L’enfant ne tarde pas à être rassurée et même agréablement surprise. Le cadeau en question n’est autre qu’une clef USB. De celles que l’on peut emporter partout avec soi.

« Il s’agit d’une première sur Sainte-Ménehould » souligne Linda Moutarde animatrice à la Cyber base. A savoir que la municipalité a eu l’idée cette année de récompenser les élèves de CM2 de la commune venant de décrocher leur B2i (Brevet informatique et internet).

(…) Précision qui a son importance à propos de ces clefs : il ne s’agit pas de simples clefs permettant de stocker des fichiers informatiques. Celles-là contiennent de précieux programmes. Et leur fonctionnement est d’une simplicité biblique. L’élève n’a qu’à brancher la clé sur absolument n’importe quel ordinateur : chez lui ou à l’école, il pourra faire fonctionner divers logiciels libres de droit, c’est-à-dire gratuits.

« C’est un peu comme si les jeunes transportaient leur disque dur avec eux » résume David Schmitt autre animateur de la Cyber base. Depuis leur clef, les futurs collégiens vont pouvoir créer des documents (textes ou tableurs), écouter de la musique, lire des vidéos, naviguer sur Internet et même s’ils le désirent, s’adonner au « chat » (traduction pour les non-initiés : participer à des forums de discussions).

On notera que le journaliste s’emmêle un peu les pinceaux sur les « logiciels libres de droit, c’est-à-dire gratuits » et que la clé ne fait tourner les logiciels que sur un poste Windows. On notera également que l’article ne mentionne pas la solution portable libre installée sur ces clés, à savoir notre Framakey.

Ce qui est par contre bien précisé sur la fiche projet dédiée du site Villes Internet (extraits) :

Actions : L’objectif est de permettre à tous les élèves de pouvoir travailler correctement tout au long de leur parcours scolaire. Il ne s’agissait donc pas d’offrir uniquement une clé pour du stockage mais d’aller au delà. La solution choisie est donc d’ajouter un contenu logiciel à cette clé au travers du pack Framakey, qui permet l’exécution de logiciels libres depuis la clé, ce qui permet de n’installer aucun logiciel sur le poste qui exécute les programmes. En leur donnant un outil très pratique pour leur parcours scolaire, nous avons aussi souhaité sensibiliser les jeunes aux logiciels libres espérant qu’ils continueront dans cette voie.

Résultats : Tout d’abord les élèves ont tous été très ravis de recevoir un tel cadeau. Ils ont posé énormément de questions autour du fonctionnement de la clé, ce qui prouve que cela les intéresse grandement. Les enseignants ont également été surpris par cette initiative. Nous pensons renouveler l’expérience l’an prochain, en faisant personnaliser la clé avec le logo de la Ville.

Recommandations : Il faut travailler sur le contenu et pas uniquement l’objet en lui même. Faire une présentation de l’outil, travailler sur les dangers d’Internet, les droits d’auteurs et tout ce qui est lié au contenu personnel sur la clé.

Sages recommandations, surtout en cette période post-Hadopi…

Toujours est-il que voici un usage de la Framakey qui nous ravit parce qu’elle est justement là pour ça. En respectant les termes de la licence, chacun est libre de l’utiliser, la copier, la modifier, la personnaliser et la distribuer. Nous y passons du temps, mais dans la mesure où il s’agit avant tout d’intégration de plusieurs logiciels libres créés par d’autres, cela donne l’occasion, comme ici, d’en découvrir et diffuser un bon paquet d’un coup.

Cela dit, chacun est libre aussi de nous prévenir et éventuellement nous remercier lorsqu’il utilise d’une manière ou d’une autre nos briques Framakey. Non pas que nous attendons forcément un retour de tous ceux qui l’ont un jour téléchargée, mais c’est un geste courtois toujours grandement apprécié 😉

C’est pourquoi nous fûmes tout aussi ravis de recevoir il y a peu une lettre de Monsieur le Maire, nous annonçant la nouvelle suivante (extraits) :

Sainte-Ménehould
Le jeudi 2 avril 2009

Monsieur,

J’ai le plaisir de vous informer que, lors de sa séance du 25 mars dernier, le Conseil Municipal a décidé de vous octroyer une subvention exceptionnelle d’un montant de 150 euros pour votre association, dans le cadre de la remise des clés USB à tous les élèves de CM2 ayant obtenu leur B2i.

Je vous prie de croire, Monsieur, à l’assurance de ma considération distinguée

Le Maire,
Bertrand Courot

Grand merci à Monsieur le Maire, à Jean-Marc Verdelet, David Schmitt et à toute la ville de Saint-Ménehould. D’abord pour la promotion ainsi faite aux logiciels libres mais également pour la reconnaissance du travail de sa communauté.




Quand l’Allemagne offre 350 000 photos à Wikipédia

Eugen Nosko - Deutsche Fotothek - CC by-saPrésenter les choses ainsi est sujet à caution, mais pendant qu’en France on met en place l’Hadopi, de l’autres côté du Rhin on participe aux biens communs.

En effet après le don de 100 000 images, sous licence libre Creative Commons By-Sa, des Archives Fédérales Allemandes en décembre dernier, c’est au tour de la Bibliothèque Universitaire et Fédérale du territoire de Saxe d’en faire de même en offrant un fond de 250 000 photographies à Wikimedia Commons[1], la médiathèque en ligne de tous les projets Wikimedia (dont Wikipédia).

Question d’état d’esprit sans doute…

Une donation de 250 000 images à la communauté

250,000 Images Donated to the Commons

Michelle Thorne – 2 avril 2009 – Creative Commons Blog
(Traduction Framalang : Poupoul2 et Xavier)

Comme nous ne souhaitions pas que le 1er avril éclipse cette annonce, c’est aujourd’hui que nous vous informons du don récent de 250 000 images données au petit frère de Wikipedia, Wikimedia.

Ces images font partie de la Collection Photo Allemande de la Bibliothèque Universitaire et Fédérale du territoire de Saxe. Elles sont en cours de traitement, accompagnées des légendes et metadata correspondantes. Des volontaires se chargeront alors d’assurer le lien entre ces photos, toutes disponibles sous la déclinaison allemande de la licence Creative Commons BY-SA 3.0 ou dans le domaine public, avec les données d’identification et les articles pertinents de Wikipedia. Cette collection représente des scènes de l’Histoire de l’Allemagne et des scènes de vie quotidienne.

En cadeau pour la bibliothèque bienfaitrice, les metadata fournies par la Collection Photo Allemande seront enrichies et annotées par les utilisateurs de Wikipedia puis reversées dans la base de données de la collection.

Cette donation marque la première étape dans la collaboration entre la Bibliothèque Universitaire et Fédérale et Wikimedia Allemagne e.V., section pionnière de Wikimedia, qui a rendu possible, en décembre dernier, un don similaire de 100 000 images par les Archives Fédérales Allemandes.

Notes

[1] Crédit photo : Eugen Nosko – Deutsche Fotothek (Creative Commons By-Sa)