Hadopi à l’école : transformons la propagande en opportunité

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Pink Sherbet Photography - CC byVous ne le savez peut-être pas, mais nous, professeurs, sommes désormais dans l’obligation légale «  d’enseigner l’Hadopi  » à vos enfants.

C’est évidemment un peu caricatural de présenter la chose ainsi. Sauf que voici ce qu’on peut lire actuellement en accueil et en pleine page de la rubrique Legamédia du très officiel site Educnet  : «  La loi Hadopi favorise la diffusion et la protection de la création sur internet (et) demande à l’éducation nationale de renforcer l’information et la prévention auprès des jeunes qui lui sont confiés  ».

Le message est on ne peut plus clair, d’autant que Legamédia[1] se définit comme «  l’espace d’information et de sensibilisation juridique pour la communauté éducative  ».

Dura lex sed lex

Ceci place alors les nombreux collègues, qui n’étaient pas favorables à cette loi liberticide, dans une position difficile. Nous sommes de bons petits soldats de la République mais la tentation est alors réelle d’adopter une attitude larvée de résistance passive. Cependant, à y regarder de plus près, rien ne nous oblige à entrer dans la classe en déclamant aux élèves  : «  La loi Hadopi favorise la diffusion et la protection de la création sur internet, voici pourquoi…  »[2].

Que dit en effet précisément la loi, pour les passages qui nous concernent ici  ?

Elle dit ceci (article L312-6)  :

Dans le cadre de ces enseignements (artistiques), les élèves reçoivent une information sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou un droit voisin pour la création artistique.

Elle dit cela (article L312-9)  :

Tous les élèves sont initiés à la technologie et à l’usage de l’informatique.

Dans ce cadre, notamment à l’occasion de la préparation du brevet informatique et internet des collégiens, ils reçoivent de la part d’enseignants préalablement sensibilisés sur le sujet une information sur les risques liés aux usages des services de communication au public en ligne, sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou un droit voisin pour la création artistique, ainsi que sur les sanctions encourues en cas (Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2009-580 DC du 10 juin 2009) de délit de contrefaçon. Cette information porte également sur l’existence d’une offre légale d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou un droit voisin sur les services de communication au public en ligne.

Et puis c’est tout.

Sous les pavés du copyright, la plage du copyleft

Pourquoi alors évoquer dans mon titre aussi bien une propagande qu’une opportunité  ?

La réponse est toute entière contenue dans les deux sous-amendements déposés par M. Brard et Mme Billard en avril 2009 (n° 527 et n° 528).

Ils visaient à ajouter la mention suivante au texte de loi ci-dessus  : «  Cette information est neutre et pluraliste. Elle porte également sur l’offre légale d’œuvres culturelles sur les services de communication au public en ligne, notamment les avantages pour la création artistique du téléchargement et de la mise à disposition licites des contenus et œuvres sous licences ouvertes ou libres.  »

Et les justifications données valent la peine d’être rappelées.

Pour le sous-amendement n° 527  :

L’article L312-9 du Code de l’éducation dispose que «  tous les élèves sont initiés à la technologie et à l’usage de l’informatique  ». Il serait fort regrettable que sous couvert de prévention et de pédagogie autour des risques liés aux usages des services de communication au public en ligne sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles, soit présentée comme seule alternative une «  offre légale  » qui occulterait la mise en valeur et la diffusion des contenus et œuvres sous licences ouvertes et libres. On violerait là, dans la préparation du brevet informatique et internet des collégiens, les principes de la neutralité scolaire sous l’égide même du ministère de l’Éducation nationale.

Pour le sous-amendement n° 528  :

Ce sous-amendement permet de préciser le lien entre «  téléchargement  » et «  création artistique  », dans le respect de la neutralité de scolaire.

Il ne s’agit pas de condamner une technologie par définition neutre, mais les usages illicites qui en sont faits, en mettant en avant les usages licites de partage des œuvres culturelles.

Les œuvres sous licences ouvertes et libres (licence Art Libre, Creative Commons) sont un excellent moyen de diffusion légale de la culture et de partage culturel entre particuliers, qui enrichissent la création artistique.

L’utilisation de ces licences est l’outil adéquat du partage de la connaissance et des savoirs et se montre particulièrement adaptée à l’éducation.

Les œuvres sous licences ouvertes et libres (licence Art Libre, Creative Commons) sont un excellent moyen de diffusion légale de la culture, et de partage culturel entre particuliers. Qu’il s’agisse de musique, de logiciels ou de cinéma, ces pratiques de création culturelle protégées par le droit d’auteur autorisent la copie, la diffusion et souvent la transformation des œuvres, encourageant de nouvelles pratiques de création culturelle.

Les œuvres sous licences ouvertes et libres ne sont pas des oeuvres libres de droits  : si leur usage peut être ouvertement partagé, c’est selon des modalités dont chaque ayant droit détermine les contours. Les licences ouvertes sont parfaitement compatibles avec le droit d’auteur dont les règles, qui reposent sur le choix de l’auteur, permettent que soient accordées des libertés d’usage.

Elles ouvrent de nouveaux modèles économiques en phase avec les nouvelles technologies, comme en témoigne, dans le domaine musical, le dernier album du groupe Nine Inch Nails, distribué sous licence libre sur les réseaux de pair à pair, en tête des albums les plus vendus en 2008 sur la plateforme de téléchargement d’Amazon aux Etats-Unis.

Ces amendements ont été malheureusement rejetés, sous le prétexte fumeux que ça n’était «  pas vraiment pas du ressort de la loi mais plutôt de la circulaire  » (cf article de l’April). On pourra toujours attendre la circulaire, elle ne viendra pas. Car c’est bien ici que se cache la propagande.

De la même manière que le logiciel propriétaire a tout fait pendant des années pour taire et nier l’existence du logiciel libre en ne parlant que de logiciel propriétaire dûment acheté vs logiciel propriétaire «  piraté  », les industries culturelles (avec l’aide complice du gouvernement) ne présentent les choses que sous l’angle dichotomique de l’offre légale vs le téléchargement illégal en occultant totalement l’alternative des ressources sous licence libre. Pas la peine d’avoir fait Sciences Po pour comprendre pourquoi  !

Nous pouvons cependant retourner la chose à notre avantage, tout en respectant évidemment la loi. Il suffit de présenter la problématique aux élèves sous un jour nouveau. Non plus la dichotomie précédente mais celle qui fait bien la distinction entre ressources sous licence fermée et ressources sous licence ouverte ou libre.

Exemple de plan. Dans une première partie, on évoquera bien entendu l’Hadopi, le téléchargement illégal (les amendes, la prison), l’offre légale, les droits d’auteur classiques de type «  tous droits réservés  », etc. Mais dans une seconde partie, plus riche, féconde et enthousiaste, on mettra l’accent sur cette «  culture libre  » en pleine expansion qui s’accorde si bien avec l’éducation.

C’est bien plus qu’une façon plus ou moins habile de «  lutter contre l’Hadopi  ». C’est une question de responsabilité d’éducateur souhaitant donner les maximum de clés à la génération d’aujourd’hui pour préparer au mieux le monde demain.

Préalablement sensibilisés

Encore faudrait-il, et désolé pour la condescendance, que les enseignants comprennent de quoi il s’agit et adhèrent à cette manière de voir les choses. Ce qui n’est pas gagné, quand on regarde et constate la situation actuelle du logiciel libre dans l’éducation.

La loi stipule que «  les élèves reçoivent de la part d’enseignants préalablement sensibilisés sur le sujet une information sur…  ». Peut-on aujourd’hui compter sur le ministère pour que cette sensibilisation ne se fasse pas à sens unique (et inique)  ? Une fois de plus, je crains fort que non.

Peut-être alors serait-il intéressant de proposer aux collègues une sorte de «  kit pédagogique dédié  », élaboré conjointement par toutes les forces vives du libre éducatif et associatif  ?

L’appel est lancé. Et en attendant voici en vrac quelques ressources internes et non exhaustives du Framablog susceptibles de participer à ce projet.

J’arrête là. N’ayant ni la volonté de vous assommer, ni le courage d’éplucher les quelques six cents articles des archives du blog. Sacrée somme en tout cas, qui me donne pour tout vous dire un léger coup de vieux  !

Certains disent que la bataille Hadopi a été perdue dans les faits (la loi est passée) mais pas au niveau des idées et de la prise de conscience de l’opinion publique. Montrons ensemble qu’il en va de même à l’Éducation nationale en profitant de la paradoxale occasion qui nous est donnée.

Notes

[1] Ce n’est malheureusement pas la première fois que le Framablog évoque Legamédia.

[2] Crédit photo  : Pink Sherbet Photography (Creative Commons By)

19 Responses

  1. Gildas

    Méchant effet collatéral d’Hadopi ! L’accueil de Legamédia a un titre intéressant : "Propriété intellectuelle : adoption définitive de la loi Hadopi". Comme si l’un était irrémédiablement et uniquement associé à l’autre.

    Tiens, une autre citation : "Les enseignants, eux-mêmes, doivent bénéficier d’une formation précise sur le droit d’auteur, les dangers du téléchargement illégal et l’offre légale d’œuvres dont les usages sont dégagés de droits."

    Quelqu’un connait ici une "offre légale d’œuvres dont les usages sont dégagés de droits" ? Cela ne veut strictement rien dire, à part le fait qu’il y a peut-être des incompétents sur ce site !

    Faut pas se leurrer, tout ceci est hautement politique derrière ses aspects pseudo-culturels. C’est du temps de cerveau disponibles vendu par TF1 à Coca-Cola.

  2. Valentin Villenave

    """
    De la même manière que le logiciel propriétaire a tout fait pendant des années pour taire et nier l’existence du logiciel libre […], les industries culturelles (avec l’aide complice du gouvernement) ne présentent les choses que sous l’angle dichotomique de l’offre légale vs le téléchargement illégal en occultant totalement l’alternative des ressources sous licence libre.
    "

    C’est tout à fait vrai. Il est d’ailleurs significatif de noter combien les sociétés de gestion de droits (dits) "d’auteur" et les industriels de la culture — dont les intérêts devraient pourtant diverger notablement, si je ne m’abuse — se retrouvent unis dans une parfaite harmonie autour des plans hadopistes.

    J’ai eu personnellement l’occasion de mesurer l’insondable mépris de ces messieurs envers les auteurs ou artistes qui font le (pourtant difficile) choix du Libre : "ce sont des amateurs" (et l’on sait tout le mépris qui se rattache à ce terme), qui "ne cherchent pas à gagner leur vie par leur art", et qui préfèrent aller faire mumuse avec des machins marginaux [les licences alternatives] qui ne servent qu’à emmerder les gens "sérieux".

    Way to go. Imposer son hégémonie et son arrogance est la meilleure façon de ne pas se faire détester de tout un chacun, c’est bien connu. Et un beau jour on se retrouve à crier misère (au hasard, chez le législateur) sur l’air de "oh, bin, comment que ça se fait, les gens nous détestent et ne veulent plus nous arroser de pognon"…

  3. carole mops

    ça me fait quand même mal au cul de lire sur un site d’institution publique que la loi hadopi favorise la diffusion et la protection de la création sur internet

    que le loi favorise la protection c’est faux mais ça peut à la limite se discuter
    mais que la loi favorise la diffusion alors là c’est de la pure escroquerie !!!

  4. GoergesD

    Je suis vraiment outré, faut pas m’énerver un dimanche matin ! Quand on prend la peine d’y réfléchir 5 secondes, on est devant un pur scandale !!!

    Une loi merdique qui tente de sauver les industries de la culture prises de panique et qui a le culot de venir faire la morale à nos gamins. Là dessus des députés proposent de modifier le texte pour ne pas oublier les ressources libres et ils se font bouler !

    Putain, mais dans quel monde vit-on ???

    Heureusement qu’ils en restent quelques uns qui se bougent pour faire exploser ce système à bout de souffle parce que sinon ce serait à désespérer !

  5. patrice

    très bonne synthèse.
    J’ai moi-même un fils en 3ième qui a eu un test sur ce sujet avec des question stupides du genre:
    -le téléchargement de film est-il légal?
    OUI NON
    Si c’est ça ce qu’on enseigne a nos enfants, il y a de quoi être inquiet.

  6. davandg

    @Patrice : "il y a de quoi être inquiet." => Tu n’as rien fait ? Mon fils doit remplir un questionnaire de ce style la, je prends direct rendez-vous avec le professeur pour lui expliquer. Je pense qu’avec une bonne petite explication il changera immédiatement son questionnaire (indique lui le framablog pour plus d’info !).

  7. Meiji

    Bonjour,
    Voici enfin une "obligation" qu’elle est bonne.
    Quelle merveilleuse idée que de devoir enseigner à nos enfants ce qu’est le droit d’auteur.
    Quelle merveilleuse idée que d’avoir à leur expliquer qu’aucun auteur ne peut faire valoir directement ses droits auprès de la haute Autorité Hadopi sans avoir été obligé de les "céder" avant cela.
    Quelle merveilleuse idée que de devoir enfin leur expliquer qu’Hadopi légalise et sacralise le "pillage" et l’exploitation des oeuvres des auteurs par une industrie qu’elle instaure omnipotente.
    Quelle merveilleuse idée que d’avoir à leur expliquer en "Instruction Civique" que l’intérêt de quelques uns prime sur l’intérêt de tous.
    Quelle merveilleuse idée que de pouvoir donner aux enseignants la possibilité de faire commenter à leurs élèves un texte tel que celui-ci :
    http://www.village-justice.com/arti
    Quelle merveilleuse idée que de donner enfin l’occasion d’un véritable cours de démocratie.
    Quelle merveilleuse idée !

    Meiji, auteur, romancier

  8. aKa

    @patrice et davandg : Je m’aperçois que j’aurais dû évoquer les parents d’élèves dans l’article. Oui c’est important de dialoguer avec les enseignants aussi sur ce sujet là. Mais en toute courtoisie parce que c’est une corporation sensible hein 😉
    D’ailleurs, plutôt que le rendez-vous individuel, le plus efficace est peut-être de se mettre en relation avec les associations de parents d’élèves de l’établissement (et les syndicats d’enseignants), histoire de sensibiliser plus largement sur la question et de tenter de trouver des positions et actions communes.

  9. Roturel

    Tout à fait d’accord. Ne pas se morfondre et saisir la perche tendue. L’April, l’Aful, Framasoft, Sésamath & co, tous ensemble unies pour proposer aux profs une autre manière de voir l’Hadopi, ce serait vraiment sympa. Y’a plus ka…

  10. Remaille

    @patrice et davandg : Comme le dit aka plutôt qu’une action ponctuelle, investissez les structures qui sont les votres pour sensibiliser ! 🙂 Contactez vos délégués FCPE/PEEP ou autre, devenez vous-même délégué, proposez-leur des motion à faire voter au CA de votre établissement… Que ça me ferait plaisir d’avoir ça dans mon établissement ! 😉

  11. TS

    Je dirais bien qu’il existe des commentaires qu’on peut ajouter grâce à sidewiki (et autres services du même acabit). Pouvez-les mettre sur la page du site d’EducNet.

  12. Jeeeve

    @TS: Sidewiki est un énième service Google qui nécessite en plus l’installation de la barre d’outils Google. Ça m’étonnerait que beaucoup de visiteurs du blog l’utilisent !

    Très intéressants liens en fin d’article. J’ai pas tout lu mais la fille qui se fait sucrer sa vidéo YouTube vaut son pesant de cacahuètes !

    Chers professeurs, on compte sur vous pour ne pas vous faire complice volontairement ou non de la politique d’un gouvernement qui a du mal à comprendre ce que service public signifie réellement.

  13. aKa

    On m’a signalé par mail cette séquence pédagogique d’un collègue d’histoire. Titre : "La loi HADOPI, du pain béni pour étudier les libertés et les droits en 4ème".
    http://leprofdhistoiregeo.wordpress

    La "culture libre" n’est pas évoquée, mais la progression proposée n’en est pas moins intéressante.

  14. aKa

    En complément, ce très intéressant article de PC Inpact "Propagande Hadopi : le plan comm’ du ministère de la Culture".
    http://www.pcinpact.com/actu/news/5

    "L’HADOPI aura à mettre en place de concert avec les services spécialisés du Ministère de l’Éducation nationale et du ministère de la Culture et de la Communication, un programme de sensibilisation des élèves aux dangers pour la création que comporte l’appropriation illicite d’œuvres protégées par les droits d’auteurs et les droits voisins. Ce programme mettra parallèlement en évidence l’existence d’une offre légale dont la richesse va croissant "

    "Comme il est essentiel de faire ressortir le lien entre création artistique et téléchargement, cette information aura lieu d’ordinaire dans le cadre de l’enseignement artistique. Les collégiens préparant le B2i, Brevet Informatique et Internet, recevront également, de la part d’enseignants préalablement sensibilisés, une information sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles pour la création et sur l’existence de l’offre légale."

    On attend cela avec impatience..

  15. Meiji

    Du pain béni pour étudier les libertés ? Je crois que oui.
    Mais plus encore :

    Hadopi à l’école, la meilleur idée depuis Charlemagne.

    La rubrique legamedia du très officiel site Educnet fait état de :
    "La loi Hadopi qui favorise la diffusion et la protection de la création sur internet demande à l’éducation nationale de renforcer l’information et la prévention auprès des jeunes qui lui sont confiés."

    Ainsi est-il fort normal que les enseignants soient amenés tout prochainement à aborder enfin les deux aspects fondamentaux de cette loi, l’internet et l’informatique d’un côté, les droits d’auteur de l’autre. Deux aspects fondamentaux également pour leur propre enseignement puisque qu’ils y sont confrontés quotidiennement dans l’exercice de leur profession. Voilà donc qui devrait les ravir qu’un gouvernement prenne enfin à coeur ces questions essentielles.

    L’informatique plus encore que l’internet est une composante devenue vitale à l’enseignement. Citons:
    Le rapport Stratégie Nationale de Recherche et d’Innovation (SNRI), remis le 23 juillet 2009 à Valérie Pécresse, pour ce qui concerne l’enseignement de l’informatique, fait le constat que : "Dans les filières non spécialisées des écoles, l’enseignement de l’informatique est généralement réduit. De façon plus générale, le système éducatif n’a pas donné une place suffisante à ces disciplines en regard des enjeux futurs, industriels et d’innovation pour l’ensemble de l’économie nationale, et de participation à la vie sociale et politique de la part des citoyens. Absentes aux niveaux primaire et secondaire, elles sont inexistantes ou trop limitées dans les classes préparatoires aux grandes écoles. La majorité des ingénieurs et chercheurs non informaticiens n’acquièrent pendant leur cursus qu’un bagage limité au regard de ce que l’on observe dans les autres disciplines. Pourtant, ils utiliseront ou pourront avoir à décider de l’utilisation d’outils informatiques sophistiqués. Il est à craindre qu’ils ne le feront pas avec un rendement optimal ou que, en position de responsabilité, ils sous-estimeront l’importance du secteur."
    Un tel enseignement, qui doit se généraliser, correspond aux besoins du pays et de son économie. Rappelons que l’informatique représente 30 % de la R&D au plan mondial (mais 17 % seulement en Europe), que les TIC (Technologies de l’information et de la Communication) vont constituer 50 % de l’augmentation de la croissance dans un futur proche, qu’elles constituent un gisement d’emplois considérable, que l’informatique est l’une des trois grandes familles de la science moderne.
    (Source : http://www.epi.asso.fr/revue/docu/d…)

    Les enseignants ont donc à relever un véritable défit stratégique tout en se heurtant à des questions d’ordre juridiques que l’on peut résumer avec cet extrait d’article sur les droits numériques et la pédagogie :
    "… On doit réfléchir, à l’heure des nouvelles technologies et de la substitution progressive de la propriété par la notion d’accès, à son rôle dans le cadre d’une probable et enfin réalisable démocratisation de la culture, non de sa consommation que son propre rôle antérieur rendait impossible ou invalidait, mais de sa création." En rappelant que "l’imitation et la modification sont à la base de la création entendue comme mémoire et transmission, puisqu’elles sont le moteur de l’apprentissage, processus ou objet même de la création".
    (Article complet : http://www.framablog.org/index.php/…)

    L’impact d’Hadopi a donc une influence majeure sur l’enseignement lui même dont élèves et parents doivent, au premier chef, être complètement informés afin de se mettre en conformité avec La loi. On peut être persuadé que devant un enjeu qui les concerne aussi directement, les enseignants sauront répondre présent.

    Il ne fait également aucun doute que ces mêmes enseignants mettront du coeur à enfin faire connaître aux élèves ce qu’est le sacro-saint droit d’auteur, créé pour protéger les auteurs des éditeurs, et non pas des lecteurs, et en tirer la leçon civique qui convient. Ils auront donc toute latitude pour intéresser leurs élèves à Paul Valery, un auteur du domaine public, et son fameux "le paradoxe, c’est le nom que les imbéciles donnent à la vérité". Une des vertus cachées de la loi Hadopi que de pouvoir faire redécouvrir les classiques, ce dont il ne faut pas se priver en ces temps de crise.
    Le commentaire du Code de la Propriété Intellectuelle sera aussi source d’une profonde élévation, surtout cette partie :
    Le contrat d’édition est défini par l’article L 132-1 du Code de la Propriété Intellectuelle : "Le contrat d’édition est le contrat par lequel l’auteur d’une œuvre de l’esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l’œuvre, à charge pour elle d’en assurer la publication ou la diffusion".
    En aucun cas, il est dit ou supposé que la cession des droits est monopolistique, puisqu’on parle du droit de fabriquer ; chose que les éditeurs transforment régulièrement en propriété exclusive des droits.
    Il est donc concevable dans l’esprit, que des droits soient "loués" ou "consentis" à plusieurs éditeurs en même temps. Lequel aurait donc autorité pour revendiquer la protection d’Hadopi ?
    La réponse pourrait alors être jouée au poker ou au 421 en y associant cet aspect ludique si prisé des élèves dans leur apprentissage.
    Accessoirement ils pourront conseiller pédagogiquement la lecture d’un bon article et sans enfreindre l’Hadopi. Comme celui-ci par exemple :
    http://www.village-justice.com/arti

    Enfin, la lecture de la lettre de Guy Môquet prendrait maintenant tout son sens en guise de conclusion ainsi que celle de l’article 35 de la Convention des Droits de l’Homme et du Citoyen qui est le fondement même de notre république ; l’article 1 étant aboli par l’Hadopi.

    Qui peut désormais ne pas souhaiter que l’Hadopi soit intégrée au programme scolaire pour insuffler aux futures élites de la nation cet esprit démocratique qui fait la grandeur de cette identité nationale bientôt elle aussi à tous les programmes ?

    Sans aucun doute, Hadopi à l’école est la meilleur idée depuis Charlemagne.

  16. ericb

    Bonjour,

    Je me permets de rappeler l’existence d’EducOOo, ressource du projet OpenOffice.org Education, et dont une des missions est de fournir un espace pour le travail collaboratif, sous Licence libre :

    http://www.educoo.org

    Voir : Campus Libre, mais aussi quelque chose qui n’apparait pas : la nouvelle forge libre, faite par Daniel Caillibaud : http://educoo.edulibre.org

    Merci de faire passer 😉

    Eric Bachard

  17. jz

    Pourquoi Framasoft/Framablog et autres ne réaliseraient-ils pas un petit guide à l’usage des professeurs, pour leur expliquer les tenants et aboutissants de cette obligation? Surtout s’il n’y a pas de circulaire, il ne faudrait pas laisser les enseignants dans l’ignorance! 😉

    Bravo pour l’article.

  18. antistress

    Déjà du temps de la DADVSI je me souviens très bien que les députés avaient fait corriger le texte qui parlait d’oeuvre/d’offre commerciale au poifit d’oeuvre/d’offre légale

  19. dartagnan

    C’est vrai, mais il faut quand même que les auteurs gagnent leur vie, tout est une question de limite. De là à ce qu’ils deviennent milliardaires avec 2 heures de travail, non!
    Les informaticiens doivent aussi gagner leur vie…Le logiciel libre n’a pas qu’un bon côté, même si je dois reconnaître qu’ubuntu par exemple est une réussite. Le logiciel libre a été et reste une bonne alternative face à l’empire, au trust microsoft. Mais je ne trouve pas de logiciel libre pour un SIG sous linux par exemple, ni même un logiciel payant, ou un logiciel pour dicter ses textes au lieu de les saisir au clavier. Les encyclopédies ont perdu beaucoup à cause de wikipedia qui en plus n’est pas neutre. La loi hadopi a donc sa justification, sauf pour les pauvres, cad aujourd’hui 80% de la France. Par contre, j’ai horreur de la propagande que l’Etat avec NS fait aux jeunes, chacun doit être libre de se faire ses règles morales.