Pas si FACIL pour Microsoft au Québec

Arturo de Albornoz - CC by-saPlus de dix millions de dollars attribués sans appels d’offres à Microsoft par l’administration québécoise principalement pour cause de… passage à Vista de ses postes informatiques, c’était sans compter sur l’association FACIL qui à juste titre ne l’entend pas de cette oreille et a déclenché la procédure juridique.

Tout ceci est très bien expliqué dans cette dépêche de LinuxFr. Je me suis juste permis d’y ajouter ci-dessous le tout frais petit extrait du journal télévisé local de Radio-Canada (ne serait-ce que parce que c’est pas tous les jours qu’on peut voir notre manchot préféré apparaitre ainsi à l’écran à côté du présentateur).

Cette scandaleuse malheureuse histoire m’a fait penser aux recommandations du rapport Becta (il n’est pas conseillé de migrer vers Windows Vista, les coûts sont importants et les bénéfices incertains, idem pour MS Office 2007 qui n’est pas capable en l’état d’offrir une convaincante interopérabilité, etc.). Elles étaient certes destinées au secteur éducatif mais elles demeurent selon moi pertinentes pour l’administration publique dans son ensemble[1].

Quoiqu’il en soit nous soutenons sans réserve la FACIL dans son initiative, quand bien même je ne puis m’empêcher de penser aux administrations de tous les pays qui n’ont pas de FACIL pour leur ouvrir les yeux.

Ceci dit il faut également reconnaître qu’il n’est pas toujours évident pour le logiciel libre d’apparaitre dans ces fameux appels d’offres des marchés publics si il n’est pas soutenu par des structures (le plus souvent des sociétés de services) qui soient capables de bien communiquer dessus et de monter des projets solides qui donnent confiance aux décideurs pressés. Mais heureusement expérience, maturité et, comme ici, activisme citoyen font évoluer favorablement une situation qui ne pourra plus se permettre de l’oublier.

Dans le communiqué de presse, reproduit ci-dessous, on remarquera qu’ils prennent exemple sur la situation de l’administration française. C’est un honneur mais même chez nous il reste encore beaucoup à faire notamment dans l’éducation.

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URL d’origine du communiqué de presse

Montréal, le 28 août 2008 – FACIL, association à but non lucratif, qui prône l’appropriation collective de l’informatique libre, dénonce les pratiques d’achats de logiciels nécessaires à l’administration publique sans appel d’offres de la part du Gouvernement du Québec. FACIL a déposé une requête en Cour supérieure du Québec pour faire cesser ces agissements car elle considère ces pratiques comme contraire au Règlement sur les contrats d’approvisionnement, de construction et de services des ministères et des organismes publics (R.Q. c. A-6.01, r.0.03) et à l’intérêt du Québec.

Au Québec, l’accès aux marchés publics est la règle alors que l’attribution de contrat sans appel d’offres est l’exception. En principe, un marché doit être ouvert à tous, de manière transparente et équitable. Les solutions et les propositions déposées doivent être évaluées objectivement à partir de critères reconnus et acceptés de tous. De plus, la loi impose que les marchés publics doivent favoriser le développement économique local et les technologies québécoises.

FACIL a constaté que des contrats d’achats de logiciels qui totalisent plus de 25 millions de dollars durant la période de février à juin 2008, ont été obtenus par de grandes multinationales par avis d’attribution sans passer par le processus normal d’appel d’offres. Ces achats se font au détriment de l’industrie du service en logiciel basée sur le logiciel libre au Québec et sont un obstacle au développement des entreprises québécoises dans le secteur des technologies de l’information. FACIL dénonce cette façon de procéder qu’elle considère intolérable, illégale et contraire à l’intérêt de la société québécoise.

Une politique rigoureuse et déterminée d’utilisation de logiciels libres dans les administrations publiques permettrait la création de très nombreux emplois durables, ainsi que des économies substantielles en licences de logiciels et inutiles mises à jour. Cependant, trop souvent l’administration québécoise refuse d’envisager et même d’évaluer l’option du logiciel libre.

Alors que la plupart des pays industrialisés ont débuté, depuis plusieurs années, la migration de leurs infrastructures technologiques en utilisant des logiciels libres, l’administration publique québécoise accuse déjà un retard prononcé. Parmi de nombreux exemples, en France, des centaines de milliers de postes de travail de fonctionnaires migrent vers des logiciels libres et, au Pays-Bas, l’administration publique, l’une des plus modernes du monde, a décidé d’interdire l’utilisation de logiciels propriétaires dans le secteur public.

Malgré de nombreuses initiatives, et devant le refus de dialogue et de concertation des responsables de l’administration publique, FACIL a décidé d’en appeler à la justice afin d’exiger que la loi sur les marchés publics soit respectée par le Gouvernement.

Notes

[1] Crédit photo : Arturo de Albornoz (Creative Commons By-Sa)




Framabook passe à la télé

Lors des dernières RMLL à Mont de Marsan, j’ai été invité par Gilles Gouget (Divergence FM) à présenter notre petite collection de livres libres Framabook lors de la couverture de l’évènement par Divergence Numérique et la chaîne FreeNewsTV.

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L’occasion de faire un peu de comm’ autour de ce projet qui nous tient à cœur et dont nous vous reparlerons bientôt puisque de nouveaux volumes sont dans les starting-blocks.

L’occasion aussi de rappeler les volumes déjà édités :

PS : N’hésitez pas à faire suivre l’info parce qu’en attendant de voir arriver les framabooks dans les grandes librairies, on compte avant tout sur le bouche à oreille du net 😉




Le bilan positif de Linux à Assemblée Nationale est-il passé inaperçu ?

Tux à l'Assemblée Nationale - François Schnell - CC-by

Les lecteurs réguliers du Framablog sont certainement déjà au courant : il y a un an on nous annonçait l’arrivée de GNU/Linux à l’Assemblée Nationale[1] ainsi présenté sur le site officiel de la noble institution :

« Un équipement micro-informatique standard est mis à la disposition de chaque député, dans son bureau à l’Assemblée nationale. Chaque député dispose de deux postes micro-informatiques configurés avec des logiciels libres (Linux pour le système d’exploitation et Open office pour la suite bureautique). »

Un an après, il était légitime de dresser le bilan d’une opération à haute valeur symbolique. Ce qui fut fait et bien fait notamment par le CIO qui a eu l’excellente idée de réaliser des entretiens vidéos de trois députés.

Extraits de l’interview du député des Alpes Maritimes Rudy Salles :

« La raison pour laquelle on est passé d’un système à l’autre, je ne crois pas qu’il y avait un mécontentement vis-à-vis de Windows, sincèrement je ne le crois pas; mais il y avait la volonté peut-être de n’être pas sous la coupole d’un monopole comme Windows, et d’essayer justement le logiciel libre. C’était un peu une décision politique à l’époque, qui a été assumée d’ailleurs par quasiment tous les groupes de l’assemblée nationale. Et donc les services ont fait des prouesses pour passer d’un système à l’autre en quelques mois. On est arrivés l’année dernière, non seulement on avait un nouveau système informatique, l’Assemblée Nationale était en chantier partout, ça a été un tour de force que d’arriver à faire fonctionner tout ça. Et je dois dire que les services s’en sont pas mal sortis, même s’il y a eu quelques ratés au démarrage, mais enfin, finalement, l’un dans l’autre, à part les quelques semaines de démarrage un peu difficiles, et de réaménagement dans les bureaux etc., on peut dire que le passage s’est fait de façon très correcte..

Il a été moins compliqué que ce que l’on pouvait penser. On ne perd pas totalement ses repères. Il y a évidemment une présentation différente, mais on peut dire que les grandes fonctionnalités, on les retrouve assez vite. Alors c’est vrai que l’on change un peu ses habitudes, mais vous savez, quand vous passez de Windows XP à Vista, ou à un autre système, finalement là aussi vous étes obligés d’évoluer et de changer un peu vos habitudes. Donc ça, ça s’est fait assez rapidement. Les services, d’ailleurs, informatiques de l’Assemblée mettaient à disposition des députés et des collaborateurs des stages de formation, et bien nous avons fait le bilan de ces stages de formation, il n’y a eu quasiment personne qui est venu aux stages de formation, parce que finalement tout le monde s’en est sorti tout seul.

Sur nos impôts. Et je peux vous dire qu’à l’intérieur des membres du bureau de l’Assemblée Nationale, il y avait un certain nombre de gens qui étaient plutôt réservés sur le Logiciel Libre, et qui étaient plutôt attachés à Windows, par tradition, je dirais, par pratique, et qui finalement se sont rendus compte qu’à l’usage nous avions les services les mêmes, équivalents, parfois mieux, parfois moins bien, mais à la marge; en tout cas au moins équivalents. Mais surtout quand on a fait les comptes, 500 000 euros moins cher, là ça commence à compter et tout le monde se rend compte que nous avons eu probablement raison de prendre cette décision il y a quelques années. »

Extraits de l’interview du député des Landes Alain Vidalies :

« La vérité c’est que même ceux qui n’étaient pas des férus d’informatique, pour qui c’était un outil essentiellement, ont vite appris. Ca a été bon uniquement des sigles différents qui sont apparus pour nous, bon, système d’exploitation Kubuntu qui apparait tout d’un coup. Mais dans la pratique aujourd’hui, avec le recul, je peux dire que ça a été, y compris pour quelqu’un qui n’était pas très attentif à ces questions-là, en tant qu’utilisateur, pour mon travail parlementaire aujourd’hui, je suis complètement satisfait de ce nouveau système. Et je pense que ceux qui réfléchissent, je pense à des collectivités locales, ou peut-être à des entreprises, à la difficulté de passer sous Linux, n’ont aucune crainte à avoir, parce que je suis un témoin privilégié du fait que quelqu’un qui remplissait toutes les conditions pour être un utilisateur dérouté, est en fait aujourd’hui un utilisateur parfaitement satisfait.

Et il faut pas penser que le temps de Windows c’était un temps merveilleux; il y avait aussi beaucoup de problèmes, de bugs, et il y en a pas plus aujourd’hui qu’avant, et même plutôt moins d’ailleurs, statistiquement. »

Cela fait non seulement plaisir à entendre mais cela nous est également d’une aide précieuse lorsqu’il s’agit d’essayer de parler alternatives libres à un public non averti. « J’ai le même système d’exploitation que mon député à l’Assemblée », peut-on lui dire malicieusement pour aiguiser sa curiosité.

Toujours est-il que voici donc ma sélection de liens qui ont évoqué ce premier anniversaire plutôt réussi :

Et c’est là que selon moi le bât blesse : au delà du double cercle des informaticiens et de la communauté du logiciel libre, il semblerait que l’information n’ait intéressée… personne !

Cette affirmation péremptoire est à vérifier mais une simple recherche Google sur bilan linux assemblée nationale laisse perplexe. Aucun grand média qu’il fut papier ou même en ligne (Rue89, Mediapart, etc.) n’a jugé bon d’en parler dans ses colonnes.

Il y a bien sûr des choses plus importantes de part le monde mais c’était tout de même possible de sacrifier, disons, un article parmi mille lié aux Jeux Olympiques pour nous relater l’évènement non ?

Notes

[1] Crédit photo : Tux monitoring the french "Assemblee Nationale" par François Schnell sous licence Creative Commons BY.




Tous les jeudis rendez-vous à la médiathèque de Perpignan

Une petite vidéo pour vous présenter à la volée une initiative tout à fait intéressante d’Annexe 21, centre de ressources en logiciels libres, à la médiathèque de Perpignan.

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Ce n’est pas autrement que nous finirons par déplacer des montagnes




Le journal d’un novice ou THE feuilleton de l’été

Illustration exemplaire et grand public des trois slogans historiques de Framasoft : « Partir de Windows pour découvrir le Libre », « Les aventures d’un peuple migrateur » et « La route est longue mais la voie est libre ». Un billet qui aurait pu s’intituler « Pas de pièges au pays des bisounours ! »

Copie d'écran - Journal d'un novice - Erwan Cario

Quand bien même la communauté du logiciel libre porte depuis longtemps un certains discours, il est toujours non seulement agréable mais également fort utile de le voir repris, expérience concrète à l’appui, par certains de nos Grand Médias sous la plume de journalistes qui, excusez mon outrecuidance, ont la bonne idée de faire leur métier.

Faire le métier c’est ici partir à la découverte de Linux[1] sans a priori, sans taire les difficultés rencontrées, mais en mettant réellement les mains dans le camboui. C’est également être capable de raconter l’épopée dans un style simple, clair, précis et non dénué d’un certain humour à la Candide qui ne gâche rien.

Tout ça pour dire (péremptoirement) qu’Erwan Cario nous livre avec sa chronique de l’été Linux : Le journal d’un novice un témoignage précieux à marquer d’une pierre blanche. Témoignage dont l’objectivité est assurément le meilleur avocat du logiciel libre, le tout sur un site à forte audience[2] (en l’occurrence les Écrans de Libération).

À faire passer à son voisin… histoire de montrer à ce dernier qu’il n’y a pas que les pro-libres qui sont enthousiasmés par le libre. Histoire de lui montrer également plus prosaïquement que Linux ça marche et ça marche pour tout le monde vu que même un utilisateur Windows 15-ans-d’âge arrive fort bien à se dépatouiller avec. Histoire de lui montrer qu’en attendant l’abolition de la vente liée il n’y a pas que l’alternative Mac à la (bien réelle) déception Vista. Histoire de lui montrer in fine qu’avec Linux vous avez Linux plus peut-être un petit supplément d’âme que certains appellent liberté…

Conclusion : merci Monsieur Erwan Cario 🙂

Copie d'écran - Journal d'un novice - Erwan Cario

Et pour vous donner envie d’aller y voir de plus près[3], voici quelques (parfois savoureux) morceaux choisis.

Extrait de l’introduction :

« Je n’ai jamais eu de religion en ce qui concerne les systèmes d’exploitation. Du coup, j’ai toujours utilisé Windows. Par défaut. (…) C’est d’ailleurs pour cette dernière raison que mon PC de bureau personnel tourne actuellement sous Vista. Encore un choix par défaut lors de l’achat de la machine. »

« Mais ça va changer. La révolution est en marche. Je me suis acheté un ordinateur portable… sous Linux. Pourquoi ? Pas vraiment un acte militant, en fait. Je me suis rendu compte que l’énorme majorité des logiciels que j’utilise quotidiennement sont soit libres (…), soit accessibles via un navigateur (…). Il y a encore quelques exceptions (…) mais rien d’insurmontable. Dans ces conditions, il paraît presque saugrenu de vouloir payer une licence pour un système d’exploitation. Et puis, il faut l’avouer, partir à l’inconnu, c’est plutôt excitant. Le seul danger : finir en t-shirt avec un pingouin dessus. Mais je prends le risque. »

Extrait de l’épisode 1 :

« L’utilisateur de Windows que je suis n’est pas vraiment perdu. (…) Presque trop familier tout ça. (…) Il doit y avoir un piège. Si c’était vraiment aussi simple, plus personne n’utiliserait Windows. »

Extrait de l’épisode 2 :

« Mais pourquoi ça n’avance plus ? Tout semblait aller pour le mieux, et puis là, plus rien depuis dix minutes. »

Extrait de l’épisode 3 :

« Maintenant, je pourrai dire que j’utilise Bittorent pour récupérer des distributions Linux. »

Extrait de l’épisode 4 :

« Ça fait vraiment une impression étrange d’être étonné à ce point après tant d’années passées devant un écran d’ordinateur. Je n’ai rien eu à aller chercher. Rien à télécharger sur le bureau, à dézipper, à exécuter, à choisir entre « Installation standard » ou « Installation personnalisée », à valider trois fois, à supprimer les fichiers d’installation qui ne servent plus à rien. Rien de tout ça. Vlc est là, dans le menu « Applications », n’attendant qu’un clic de ma part pour se lancer. »

Extrait de l’épisode 5 :

« A ce point de l’expérience, j’ai un ordinateur qui fonctionne très bien, avec 95% des programmes nécessaires à son utilisation quotidienne. Ce n’était pas bien sorcier, vous l’aurez remarqué. Presque un peu décevant. Passer à Ubuntu n’est même pas un défi, c’est juste un choix. Mais arrive forcément un moment où la bidouille et la découverte un peu au hasard de fonctionnalités (…) trouvent leurs limites. (…) La solution la plus évidente, c’est l’ami qui-s’y-connaît. (…) Sous Linux, en fait, il y a mieux. Il y a la communauté qui-s’y-connaît. C’est sans doute un des trucs les plus impressionnants de l’univers du libre : la solidarité et l’entraide. (…) »

« Sur ubuntu-fr, il y a généralement déjà la réponse à la question qu’on se pose, c’est assez magique. (…) On cherche d’abord dans la documentation (…) Sinon, on recherche dans les forums. Et là, c’est dingue le nombre de gens qui ont déjà eu le même souci ! Et plusieurs bons samaritains auront déjà expliqué comment s’en sortir. (…) Je suis conscient que cette description ressemble un peu à « L’informatique au pays des bisounours », mais ça n’en est pas si éloigné. Bon, les bisounours en question parlent un langage étrange, sont quelque fois un petit peu sectaires et souvent sur-motivés par leur sujet de prédilection, quand ils ne finissent pas par s’engueuler pour des raisons obscures. Mais pour le novice, c’est l’assurance de pouvoir réussir ses premiers pas dans l’univers d’Ubuntu. »

Extrait de l’épisode 6 :

« Croyez-le ou non, si j’avais voulu, j’aurais pu ouvrir un terminal et taper « sudo apt-get install myfreetv ». Mais ça aurait été pour faire mon intéressant. Je préfère quand même cliquer sur des boutons. Il est trop tôt encore pour en être sûr, mais je commence à croire qu’on peut utiliser Ubuntu sans avoir à taper une ligne de commande. Et c’est sans doute un des plus grand progrès des dernières années. N’en déplaise aux bisounours puristes. »

Extrait de l’épisode 7 :

« On ne rigole pas, avec Linux. Attention, C’est du sérieux ! C’est une philosophie, même, qui trouve ses racines en 1984 avec le lancement par Richard Stallman du projet GNU. Donc, si Linux (oups, GNU/Linux) est austère, c’est normal. Quand des développeurs du monde entier réunissent leurs forces pour réaliser un système libre en face de multinationales puissantes qui dépensent des milliards pour la même chose, on peut se réjouir d’avoir quelque chose de stable et d’efficace. L’interface bling bling de Vista, avec ses fenêtres qui virevoltent dans tous les sens, on n’en a pas besoin, sous Linux. On est au dessus de ça. »

« Sous Linux, on peut travailler sur différents bureaux virtuels. Un bureau virtuel, c’est un peu comme si vous aviez plusieurs écrans avec à chaque fois un bureau utilisable, ce qui permet d’avoir plusieurs espaces de travail. Et avec Compiz-Fusion, on peut basculer très simplement d’un bureau à l’autre grâce à un cube qui tourne. Ca ne sert pas à grand-chose, certes, mais qu’est-ce que c’est classe ! (…) Evidemment, rien de tout ceci n’est vraiment capital, mais c’est presque obligatoire pour ouvrir le système Linux au grand public. »

Extrait de l’épisode 8 :

« On ne va pas tarder à en voir le bout, de ce journal. Maintenant que j’ai un Linux qui tourne (au sens propre comme au figuré), je ne vais pas continuer indéfiniment à raconter comment j’ai enfin réussi à traiter une image sur The Gimp, ou comment le système de mise à jour fonctionne au quotidien (…) Une fois le contrat rempli, on se fout un peu de savoir comment s’appelle le système. Bon, en fait non. Il reste toujours cette petite fierté (bien compréhensible tant qu’elle ne tourne pas au snobisme) de tourner sur un système libre. C’est vrai que c’est quand même agréable.. »

« Mais j’ai encore quelques détails à régler. Matériels, entre autres. (…) Jean-Baptiste Théou débarque dans les commentaires de ce journal et explique : « J’ai vu aussi vos soucis avec votre webcam. Je vous propose sans prétention ma modeste participation. Je développe actuellement un logiciel, Easycam, qui a pour but de faciliter l’installation de webcams sous Ubuntu. Ce logiciel s’oriente véritablement pour le débutant. Ce logiciel détecte pour le moment un peu moins de 500 webcams. La vôtre sera peut-être dans le lot. Si elle ne l’est pas, je ferai en sorte de la rendre compatible, si possible. » Fichtre. Je veux quand même préciser que je n’ai pas fait ce journal pour bénéficier d’une assistance à domicile, mais depuis le début de l’aventure, je suis impressionné par la solidarité et la gentillesse des quelques fondu(e)s de Linux qui traînent dans le coin. Et là, j’avoue que j’en suis resté un peu bouche bée. »

Extrait de l’épisode 9 :

« Aujourd’hui, j’ai travaillé toute la journée sur mon portable sous Ubuntu. Ça se passe plutôt très bien. C’est vrai que le fait de s’occuper d’un site web, et donc de passer son temps sur un navigateur web simplifie grandement les choses. La boutade de Tristan Nitot, président de Mozilla Europe, s’applique très bien à mon cas : « le système d’exploitation n’est qu’une collection de drivers qui sert à faire tourner un navigateur ». Mais bon, j’ai quand même mis The Gimp sur un bureau et Firefox sur un autre rien que pour le plaisir de faire tourner le cube. »

« Bref, aucun problème durant cette journée de travail. Si, j’en vois un poindre à l’horizon : je ne vais pas ramener tous les jours mon portable à Libé, et je vais donc continuer à travailler sous Windows. Et si je m’habitue trop à Ubuntu, et à tous ces sympathiques petits bidules, mon cerveau risque peut-être d’avoir du mal à supporter la transition quotidienne. »

Extrait de l’épisode 10 :

« Si j’avais fait une liste des trucs à faire avant de déclarer mon ordinateur comme étant complètement fonctionnel, avec des cases à cocher en face de chaque élément, je pense que je viendrais de cocher la dernière. »

Extrait de l’épisode 11 :

« Je sais bien que tout ne sera jamais parfait. Il y aura toujours ces petits trucs pénibles. Même sous Ubuntu. Mais je les avais déjà avant. En bien pire, souvent. Pour l’instant, la simplicité d’accès au quotidien et tous ces petits trucs qui simplifient la vie font que je ne suis pas prêt de lâcher mon héron. »

Extrait de l’épilogue :

« Il est donc temps de conclure ce journal. Si vous avez lu les différents épisodes, vous aurez compris que se mettre à Linux n’a rien d’éprouvant. C’est même une expérience plutôt amusante faite de découvertes et de surprises. Je n’avais pas, c’est vrai, de grandes craintes avant de m’attaquer à ce nouveau système. Mais quand même. Je ne m’attendais pas à autant de convivialité. Je pensais tomber sur quelque chose de plus rugueux. Un système sans doute très intéressant au bout de quelques semaines d’utilisation, mais nécessitant un certain apprentissage, surtout pour l’utilisateur de Windows que je suis. Et puis, finalement, non. J’ai tout de suite eu l’impression d’être en territoire ami. »

« S’il reste un obstacle pour passer à Linux, c’est sans doute la peur des ordinateurs. Elle n’est pas liée à Linux, évidemment. Elle existe aussi pour Windows. Il ne faut pas avoir peur de la machine pour partir à la découverte d’un système (…) Si j’ai pu réussir cette transition, c’est que je n’ai pas eu peur de me planter, de cliquer sur le mauvais bouton, de faire des erreurs. Et que je connais plutôt bien les ordinateurs (par rapport à la moyenne, pas vraiment en comparaison de quelques linuxiens qui ont commenté les épisodes de ce journal !). Dans ces conditions, passer à Ubuntu est un jeu d’enfant. Même s’il faut lire quelques modes d’emploi de temps en temps. »

« S’il fallait aujourd’hui que j’installe un système pour un ami qui n’est pas fondu de jeux vidéo, je pense qu’Ubuntu serait le choix le plus judicieux. »

Rien à ajouter 😉

Notes

[1] L’option choisie est donc ici la distribution GNU/Linux Ubuntu. On aura beau dire (et nous verrons ce que donneront les commentaires de ce billet) mais c’est effectivement selon moi le meilleur des choix possibles à l’heure actuelle. Bien moins à cause des qualités intrinsèques d’Ubuntu que du dynamisme intrinsèque de la communauté aggregée autour du site Ubuntu-fr.org, qui n’a clairement pas d’équivalent dans le monde francophone et qui aura été partie prenante dans l’aventure d’Erwan Cario.

[2] Pour ce qui concerne cette forte audience, il n’y a qu’à voir le nombre impressionnant de commentaires présents sous chaque épisode !

[3] On notera qu’il existe un autre fort intéressant feuilleton estival sur Ecran.fr : invitation à l’intérieur de Wikipédia pour voir un peu « comment un projet aussi pharaonique peut fonctionner au quotidien ».




J.O. de Pékin : pas sans ma Framakey !

Pissed off guard - Montrasio International - CC-By

Les Rencontres Mondiales du Logiciel Libre portent parfois bien leur nom. Ainsi le mois dernier à Mont de Marsan, avons-nous fait la connaissance de Nathalie qui, tel un cadeau, nous a raconté une belle petite anecdote autour de la Framakey.

Il y a deux ans, la voici partie pour un séjour en Chine, avec décision de raconter son voyage au jour le jour sur un blog. Mais une fois sur place, problème : le surf sur internet dans les cybercafés visités semble soumis à une liberté contrôlée[1].

Extrait issu du billet Cinquième jour : Arrivée a Fengkai du 16 juillet 2006 :

« Nous n’avons pas donné de nouvelles depuis deux jours. Pas faute de cybercafé. Dans le premier cybercafé où nous sommes allés, le proxy du navigateur empêchait d’envoyer quoique ce soit vers des sites européens, et même en lançant Firefox de ma clé USB, je n’ai pas réussi a contourner le problème, donc il devait aussi y avoir barrage par firewall. Le cybercafé essaye le lendemain semblait être encore plus bloqué au niveau des accès disque et du bureau mais ce n’était qu’en apparence. Ma petite clé a été reconnue et j’ai pu accéder au blog en écriture avec Firefox de Framakey. Génial, quel soulagement. Au passage, une pub pour Framakey car sans le concept de logiciels libres portables, nous ne serions en train d’écrire ni ce billet ni les suivants ; le blog était off pour quelques jours, et peut-être même jusqu’au séjour final a Pékin !!! Voila pour le point technique du blog, jure que ce n’est pas simple. Entre les menus de Windows, tous écrits en chinois, les sécurités locales imposées, cookies interdits par le navigateur local (accès aux options de IE interdits évidemment, firewall hyper blindé dès qu’il s’agit de sortir de Chine). Bref, cela relève presque du miracle si ce blog continue a exister 🙂 »

Vous vous rendez très bientôt à Pékin pour participer, couvrir ou assister à la grande messe olympique ?

Je ne sais si la situation a positivement évolué depuis mais, dans le doute, ne vous abstenez pas de glisser subrepticement une Framakey dans la valise 🙂

Notes

[1] Crédit photo : détail de Pissed off guard par Montrasio International sous licence Creative Commons By.




Stallman, Torvalds, Brown et Zemlin : mais que pensent-ils donc de Microsoft ?

Encore un article de Bruce Byfield que nous avons trouvé ma foi fort intéressant de traduire. Il s’agit de l’avis sur Microsoft de quatre fortes personnalités de la communauté du logiciel libre : Peter Brown (Free Software Foundation), Jim Zemlin (Linux Foundation), Richard Stallman et Linus Torvalds.

Enfin, pour être plus précis, de deux éminents représentants du logiciel libre (Peter Brown et Richard Stallman) et deux éminents représentants de l‘open source (Jim Zemlin et Linux Torvalds). Difficile en effet de passer ici à côté de cette distinction, importante pour certains, de l’ordre de la nuance pour d’autres. Toujours est-il que si l’on veut alors regrouper ces deux mouvements, on parlera de FOSS.

L’accent a été mis sur les questions suivantes :

  • Comment Microsoft affecte votre travail et votre informatique personnelle ?
  • Quelle menace représente Microsoft pour le logiciel libre ?
  • Quelles sont les chances pour que Microsoft devienne un membre apprécié de la communauté ?

On ne vous en dit pas plus mais la conclusion est réconfortante…

Un grand merci à Claude Le Paih pour le traduction. Il a choisi de ne pas traduire proprietary par propriétaire et il s’en explique ainsi : « Mon choix personnel va au néologisme privateur, privatrice plutôt que propriétaire. J’assume cette non-orthodoxie opposée à la doxa par le fait que propriétaire ne peut être adjectif car c’est un nom commun désignant une personne, laquelle possède… quelque chose. On ne peut donc dire une chaussure propriétaire, une chaîne hi-fi propriétaire, une guitare propriétaire…etc ! Par contre, proprietary est bien un adjectif, en américain, désignant une chose sous marque déposée. Le néologisme privateur fut trouvé par Richard Stallman lors d’un voyage en Espagne en référence au privador employé en espagnol. Richard Stallman préconise l’emploi de privateur. »

Copie d'écran - Datamation

Que pensent de Microsoft les leaders du logiciel libre et de l’open source ?

What do Free and Open Source Software Leaders Think of Microsoft?

Bruce Byfield – 16 juin – Datamation

Aucun utilisateur de logiciels libres (NdT : FOSS) ne peut éviter d’avoir une opinion sur Microsoft : les produits et la technologie Microsoft représentent ce qu’ils ont délaissé. Certains les considèrent de plus en plus sans intérêt, d’autres comme une entité informe comparable à Satan au Moyen Âge ou à l’Union Soviétique au temps de la guerre froide. A la limite peu importe ce que les autres membres de la communauté FOSS pensent de Microsoft, nous avons tous une opinion bien définie sur le sujet que nous pouvons exprimer sur le champ avec éloquence.

Mais quelle attitude ont les dirigeants du FOSS vis à vis de Microsoft ? Ce n’est pas qu’une question de commérage ou un test de confiance : leurs réponses peuvent indiquer leurs valeurs et priorités, mais aussi si elles méritent d’être suivis à la lettre. De plus, malgré (ou peut être à cause de) la grande menace que fait peser Microsoft sur le monde du logiciel libre, le majorité d’entre nous entrevoit rarement le point de vue des acteurs et agitateurs (NdT : "movers and shakers", terme désignant les personnes exerçant un pouvoir ou influentes dans une sphère d’activité) à son sujet.

Pour aider à donner un meilleur éclairage, j’ai demandé à quelques dirigeants bien en vue du FOSS comment Microsoft affecte leur travail et leur informatique personnelle, quelle menace représente Microsoft pour le FOSS, et quelle sont les chances pour que la compagnie devienne un membre apprécié de la communauté FOSS.

Ceux qui ont répondu sont Peter Brown de la Free Software Fondation (NdT : Fondation pour le Logiciel Libre), Jim Zemlin de la Linux Foundation (NdT : Fondation Linux), Richard Stallman , fondateur du mouvement du logiciel libre, et Linus Torvalds. Tous ont donné des réponses non seulement complexes et nuancées, mais parfois étonnantes comparées aux attitudes qu’ils assument souvent.

Peter Brown, Directeur Général de Free Software Foundation

De lui même, Peter Brown n’aurait quasiment pas de contact avec les produits ou la technologie Microsoft. « Il y a beaucoup de sites avec de la camelote privatrice, et certaines agences gouvernementales demandent toujours des systèmes d’exploitation précis. Mais j’évite généralement ce genre de chose, ou je trouve des alternatives », dit il. En parlant de l’évolution des systèmes d’opérations libres comme GNU/Linux depuis le passage du dernier millénaire, il ajoute : « je dois admettre que je ne ressens aucun inconvénient maintenant. »

De plus, suivre les pistes des menaces touchant les libertés des utilisateurs de logiciels fait partie de son travail. Avec ce mandat, il porte une attention particulière à ce que disent les cadres de Microsoft et quelle technologie est utilisée dans leurs produits. « Ce n’est qu’une chose naturelle de suivre les fournisseurs de logiciels privateurs et le Digital Right Management (DRM) » dit il. Il ajoute cependant : « Nous n’examinons pas tous les coins et recoins car une fois que vous êtes dans le monde privateur, il n’y a pas grand chose à dire hormis la nécessité de le quitter. »

Le problème avec Microsoft, selon Brown, est que c’est une entreprise comme les autres, et « les sociétés n’ont pas de valeurs intrinsèques. La seule déclaration de mission, dont il faut être conscient en ce qui concerne une société, est celle qui dit : nous sommes ici pour faire de l’argent. » Avec cette manière de penser, Brown n’a pas confiance en Microsoft, ni particulièrement aux autres entreprises, qu’elles soient privatrices comme Apple ou qu’elles aient un modèle d’affaire incluant l’open source, comme Google ou Red Hat.

Quand une société est amicale envers les FOSS, il attribue en grande partie cette attitude à une individualité qui défend les valeurs du FOSS. « Vous avez vu ce qui est arrivé à Sun ? » dit il, se référant au remplacement de Scott McNealy par Jonathan Schwartz en tant que CEO (NdT : Chief Executive Officer = chef de direction) de Sun Microsystems. « D’abord, c’est privateur et n’aime pas les logiciels libres, un changement de directeur et on aime les logiciels libres. » Dans l’ensemble, il considère les individus plus dignes de confiance que les entreprises, mais seulement « jusqu’à un certain point. »

Dans cette perspective, Brown pense que Microsoft pourrait devenir un jour un participant accepté du logiciel libre, mais non sans changements majeurs dans son modèle d’affaire et son équipe de direction. A la différence de Sun, dont les revenus proviennent d’abord du matériel, Microsoft, dit Brown, est quasiment dépendant de la vente de son système d’exploitation et de sa suite bureautique.

« Ce qui empêche Microsoft d’être un acteur important du logiciel libre », dit Brown, « est le fait qu’ils ne peuvent le faire d’une manière significative en raison de leur flux monétaire. Si vous y réfléchissez, ils vont se battre bec et ongles là où ces deux produits sont concernés, ce qui veux dire en plein dans notre poire. Je ne vois pas Microsoft être différente de n’importe quelle autre entreprise concernant ses intérêts économiques ».

A présent, Brown pense que tout ce que peut faire Microsoft est de tâter du logiciel libre dans l’espoir d’attirer les forces vives du développement vers la plate-forme Windows et d’essayer de ralentir leur adoption. Quoiqu’il en soit, il rejette l’éventuelle destruction du FOSS par Microsoft comme seulement « théoriquement » possible. Sa préoccupation principale est que Microsoft « peut présenter un danger pour la liberté des utilisateurs car elle est capable d’empêcher ceux-ci d’utiliser les logiciels libres par des ruses comme la création de plates-formes séduisantes, les obligeant à rester du fait des inconvénients importants liés au changement ».

Brown est particulièrement inquiet à l’idée qu’en rejetant Microsoft des utilisateurs ne se tournent vers une autre compagnie.« Il est important que les gens ne disent pas : Oh , Apple est bien mieux que Microsoft ! » dit-il. « Je pense réellement que ce n’est pas l’objectif. Si Apple avait ces deux produits, Windows et la suite Office, ils se comporteraient de la même manière vue la direction en place. Avec l’iPhone, ils montrent déjà exactement la même conduite. Ce sera donc son dernier mot : ne pas imaginer que Microsoft soit différente des autres entreprises ».

Jim Zemlin, Directeur de la Linux Foundation

Comme Peter Brown, Jim Zemlin considère l’observation de Microsoft comme faisant partie de son travail. Cependant, tandis que Brown à la Free Software Foundation surveille les menaces pesant sur les libertés des utilisateurs, Zemlin dit : « Une partie de mon travail en tant que directeur de la Linux_Foundation est de contrôler les annonces de Microsoft. Notre équipe fournit un important service à nos membres et au marché en traduisant les actions parfois ambigües de Microsoft. Nous étudions les changements dans la technologie Microsoft qui rendent plus facile l’interopérabilité avec leur plate-forme pour les applications Linux et open source. L’intention de Microsoft de supporter le format ODF dans MS Office est un bon exemple de ce que nous suivons. Nous veillons à ce qu’ils publient leurs protocoles techniques sous des termes compatibles avec le développement et les pratiques des licences open source. »

Quoiqu’il en soit, en ce qui concerne l’informatique personnelle de Zemlin, Microsoft « n’est pas important du tout ». Sa description d’un jour typique est une litanie d’applications web et de produits utilisant GNU/Linux: « Mes journées commencent en écoutant de la musique à la maison sur un système Sonos basé sur Linux. Je peux enregistrer un spectacle TV sur mon DVR Linux et ensuite foncer au bureau où je travaille sur un bureau Linux. Je passe la plupart de ma journée sur un navigateur : accédant à des applications Google, utilisant notre application SugarCRM sur le web, me connectant à Facebook ou lisant un livre sur un lecteur Kindle, tout cela tournant sous Linux. La seule fois où je suis concerné par Microsoft c’est quand je reçois un fichier Microsoft Office que j’ouvre dans OpenOffice qui le convertit au format ODF.

Zemlin remarque que la participation à la communauté est possible pour tout le monde, mais ajoute que « cela demande un désir sincère de collaboration et de vouloir faire de meilleurs logiciels. Quand cela fera réellement partie de la vision de Microsoft, j’espère que cette société deviendra un membre de la communauté. Le modèle open source est dominant pour le développement de logiciels et ne fera que s’accroître en influence dans les années à venir. »

Zemlin refuse de spéculer sur les intentions de Microsoft à l’égard du FOSS, mais clairement, il ne le voit pas comme une grande menace. « Microsoft est une société intelligente et un excellent concurrent » dit il, « ils rendent Linux meilleur chaque jour, rien qu’en étant un opposant acharné. Mais ils opèrent selon un modèle de développement dépassé qui ne tiendra pas longtemps dans l’actuelle économie du logiciel. Les consommateurs demandent une ouverture et un choix de vendeur, quelque chose que Microsoft met du temps à comprendre. Linux, un des premiers exemples de ce que l’on peut atteindre avec le modèle de développement open source, est en position naturelle pour saisir ces nouvelles dynamiques du marché. Microsoft va continuer à lutter. »

Richard Stallman, Président fondateur de la Free Software Foundation.

En tant que personnage principal du mouvement pour le logiciel libre, Richard Stallman fait une distinction entre la technologie et les actions de Microsoft. « Je n’essaie pas de suivre la technologie Microsoft », dit-il, « car dans la plupart des cas, les changements dans la technologie Microsoft n’ont pas d’effet immédiat sur la communauté du logiciel libre. Je suis plus concerné par les menaces légales de Microsoft à l’encontre des logiciels libres et ses tentatives pour recruter dans les écoles, gouvernements et entreprises afin d’orienter et contraindre le public à une utilisation de Windows. »

Interrogé sur la manière dont Microsoft affecte ses objectifs, Stallman répond, « Mon but à long-terme est un monde dans lequel tous les utilisateurs de logiciels sont libres de partager et échanger les programmes qu’ils utilisent. En d’autres mots, un monde dans lequel tous les logiciels sont libres. Tant que des sociétés comme Microsoft ou Apple se consacrent à distribuer des programmes refusant l’utilisation de ces libertés, elles s’opposent à ces objectifs. »

Cela dit, Stallman peut imaginer qu’un jour Microsoft puisse contribuer au logiciel libre, mais seulement si « elle retire des services comme Hotmail, et abandonne les programmes privateurs comme Windows et MS Office. Alors, elle pourrait contribuer au logiciel libre de façon à faire progresser la communauté à une plus ou moins grande échelle. Cependant, sans ces changements fondamentaux, j’espère que toute contribution faite par Microsoft n’aura qu’une portée marginale sur qui que ce soit dans le monde libre. »

En attendant, Stallman remarque que « Microsoft fait de grands efforts pour empêcher l’adoption du système GNU/Linux et OpenOffice.org ». Il donne trois exemples.

D’abord, il commente la récente annonce au sujet du projet One Laptop Per Child (OLPC) qui, originellement pensé pour donner des ressources technologiques aux nations en développement, va commencer à embarquer Windows. Selon Stallman, avec cette annonce, « Microsoft subordonne le projet OLPC en le convertissant en une campagne massive de formation Windows. Le projet dit que cela donne plus de choix aux gouvernement acquéreurs en supportant tant Windows que GNU/Linux, mais ces gouvernements vont avoir tendance à choisir Windows par défaut. Dans certains pays, des gens vont faire campagne pour empêcher cela. Si celles-ci réussissent, le projet OLPC représenterait alors une contribution positive au monde, sinon, cela fera avant tout du mal. »

Ensuite, parlant de la bataille des standards où Microsoft réussit à faire accepter son format OOXML comme ouvert face au format ODF favorisé par OpenOffice.org et d’autres applications bureautiques libres, Stallman note que « Microsoft a corrompu beaucoup de membres de l’ISO afin de gagner l’approbation de son format bidon de document ouvert OOXML. Ainsi, les gouvernements qui gardent leurs documents sous format exclusif Microsoft peuvent prétendre utiliser des formats ouverts. Le gouvernement d’Afrique du Sud a déposé un appel contre cette décision, mentionnant les irrégularités de la procédure. »

Stallman poursuit en disant « Même dans les parties moins cruciales du secteur, Microsoft essaie d’affaiblir la communauté. Par exemple, elle contribua par un substantiel montant à un projet, SAGE, lequel en conséquence décida de ne pas passer à la version 3 de la GPL ». La seule consolation dans ce cas, nous dit Stallman, est que cette affaire montre « que Microsoft considère la version 3 de la GPL comme une défense efficace de la liberté des utilisateurs. »

En complément de ces exemples, Stallman condamne Microsoft pour les portes ouvertes de sa sécurité. « Windows Vista permet à Microsoft d’installer des modifications de logiciels sans l’autorisation de l’utilisateur », observe-t-il, « vous ne pouvez pas avoir plus faux que cela ».

Cependant, malgré ces opinions, Stallman nous avertit aussi « qu’il est commun dans le champ de l’informatique de comparer Microsoft au diable, mais c’est une erreur. Cela conduit les gens à fermer les yeux sur les actions néfastes faites par les autres sociétés dont beaucoup sont simplement mauvaises. Microsoft n’est pas la seule entreprise dont les conduites en affaire piétinent la liberté des usagers. Des milliers de sociétés distribuent des logiciels privateurs, ce qui veut dire des utilisateurs divisés et impuissants. C’est mauvais, peu importe la société qui pratique cela. »

Linus Torvalds, Coordinateur du projet Linux Kernel (noyau Linux)

Linus Torvalds ne fait aucun effort pour suivre Microsoft. La plupart de ses informations sur la société sont de seconde main, en lisant les sites généraux traitant de technologie ou en recevant des mails de journalistes lui demandant un commentaire sur une action ou une annonce de Microsoft. Malgré tout, il confesse avoir lu occasionnellement le blog Mini-Microsoft « car c’était intéressant pour moi de voir un point de vue différent sur le monde tech world (NdT : monde la technologie) »

« J’ai simplement tendance à ne pas comparer Linux aux autres OS » dit-il, « je m’attache à rendre Linux meilleur que lui-même, et essayer de voir ce que font les autres n’est pas du tout pertinent. Évidemment, il est important que les choses fonctionnent bien avec d’autres systèmes d’exploitation, mais c’est un domaine ou je ne peux pas réellement aider car je n’ai pas d’autres systèmes à la maison. »

Torvalds admet que, pour un choix donné, il achètera un souris Logitech plutôt qu’une souris Microsoft car il préfère éviter de supporter Microsoft. Mais il appelle cela une préférence « irrationnelle ». Par ailleurs, il ajoute, « je ne me rappelle pas la dernière fois ou j’ai pris une décision qui ait à voir en quoi que ce soit avec Microsoft. »

Torvalds observe que Microsoft s’ouvre déjà à la communauté FOSS, mais il note que sa participation est limitée car « ils semblent avoir un complexe lié à la GPL, et ne travaillent qu’avec des projets, qu’ils ne voient pas être en concurrence directe, comme une infrastructure de serveur web, plutôt que tout autre projet central. Vont-ils s’étendre à d’autres domaines et vont-ils se débarrasser de leur peur irrationnelle de la GPL ? Je ne le sais pas. »

A propos d’un danger créé par Microsoft, Torvalds se dérobe en observant premièrement ceci : « je ne pense pas qu’il y ait un Microsoft. Je suspecte qu’il y a beaucoup d’ingénieurs MS qui aiment réellement le logiciel libre et, probablement, l’utilisent-ils à la maison même, en dehors de tout travaux en relation avec des tests de compatibilité. De plus, je suspecte que plusieurs secteurs de la société ont des idées divergentes à propos de l’open source, et je ne pense pas qu’ils approuvent. »

Il continue : « ceci dit, quelques membres de Microsoft sont assez clairement anti open source, et, oui, s’ils pouvaient le détruire, ils le feraient avec bonheur. »

Quoiqu’il en soit, Torvalds écarte l’idée qu’une tentative de démolition puisse avoir un quelconque succès. « Comment combattre réellement quelque chose qui est plus une idée et une façon de faire qu’un concurrent direct sur le marché ? » demande-t-il usant de rhétorique.

Torvalds ajoute qu’il ne se réfère plus à Microsoft en public comme cela lui arrivait auparavant. « Je faisais des plaisanteries sur Microsoft au cours d’entretiens » dit il, « Et j’ai simplement arrêté, car je ne pense pas que la peur et le dégoût (NdT : fear-and-loathing) qui sont si communs (ou peut être pas communs…ce ne sont probablement que des paroles) soient complètement sains. Je pense que si vous prenez des décisions basées sur la peur de ce que font les autres gens et sociétés, vous n’allez pas faire le meilleur travail. Je préfère voir le monde être pro-Linux plutôt qu’anti-Microsoft, parce que ce dernier groupe, en étant motivé par un sentiment négatif, n’est simplement pas constructif à long terme. »

Par dessus tout, le plus fort sentiment de Torvalds à propos de Microsoft semble être celui d’une société ayant perdu son orientation. « Alors que je ne suis évidemment pas un adorateur de Microsoft », dit-il, « je pense qu’ils ont sérieusement cassé la baraque il y a plus de dix ans car ils ont réellement donné aux gens ce qu’ils voulaient, et à bas prix. Voilà une bonne raison qui permit à Microsoft de surclasser les traditionnels vendeurs UNIX. Cela dit, ils semblent avoir oublié ces racines. Tout ce que je vois maintenant c’est qu’ils ne semblent pas essayer de servir leur clients mais de les contrôler (par exemple, tous les plans fous de locations de licences, tous leurs ridicules travaux sur les DRMs etc.) ».

Conclusion

Le premier point évident au sujet de ces réponses est que, bien qu’elles aient été données par les défenseurs des deux mouvements distincts, le logiciel libre et l’open source, les différences sont si mineures qu’elles pouvaient être attendues quelles que soient la personnalité ou la position. Toutes les personnes interrogées trouvent Microsoft complètement sans intérêt pour leur informatique personnelle, toutes suggèrent que Microsoft doit se transformer elle-même, mais n’écartent pas la possibilité que la société fasse de réelles contributions au FOSS si elle parvient à changer. Toutes également semblent voir le triomphe du FOSS comme plus ou moins inévitable. Les similarités sont un rappel que, malgré les différences réelles entre les priorités des deux mouvements, les deux camps sont alliés.

L’autre point qui ressort est combien les réponses sont dépassionnées comparées aux sentiments souvent exprimés par d’autres impliqués dans le FOSS. Tous ces interviewés voient en Microsoft un antagoniste, mais il le font sans la paranoïa qui dénature certains cercles FOSS. La raison pourrait être leur croyance que le FOSS gagnera au final, ou peut être simplement, l’impossibilité pour chacun de maintenir une rage bouillonnante chaque jour et minute de leur vie professionnelle.

Quelle qu’en soit la raison, cette impartialité relative les met potentiellement en marge de quelques uns à l’intérieur de la communauté, spécialement ceux qui voient Microsoft au centre d’une conspiration anti-FOSS. Jim Zemlin, dont les réponse sont plus souples que les autres, a été attaqué par le passé dans les médias pour ses opinions.

En refusant de voir leur adversaire principal comme une représentation unidimensionnelle du diable, ces leaders se sont mis librement entre parenthèses pour adopter une vue plus complexe de leur situation. Non seulement, ils voient Microsoft luttant en vain pour se redéfinir elle-même après tant d’années, mais ils soulignent aussi que Microsoft est simplement la plus grande des menaces privatrices envers le FOSS mais pas la seule, et que se focaliser avec trop d’attention sur Microsoft apporte ses propres dangers.

Certains lecteurs pourraient désapprouver telle ou telle vision exprimée ici. Je le fais moi même. Mais, en parlant plus généralement, je trouve dans ce mélange d’optimisme idéaliste et d’observation lucide, une garantie que la communauté est entre de bonnes mains.




Firefox 3 : déjà en version portable Framakey !

Milena et Framakey - aKa - CC-by

Pyg, le Monsieur Framakey de Framasoft n’a pas perdu de temps puisqu’à peine le Download Day achevé, voilà-t-y pas qu’il nous propose sans plus attendre PortableFirefox 3, la version portable (Windows) de Firefox 3.

Quelle est la différence ?

PortableFirefox 3, ce n’est ni plus ni moins que Firefox 3, à une petite différence près, mais qui s’avère extrêmement pratique à l’usage : le navigateur embarque votre profil (c’est à dire vos favoris, vos extensions, vos thèmes, bref tout ce qui fait que c’est votre Firefox) plutôt que de le séparer dans le dossier "Documents and Settings" du Windows d’un ordinateur particulier.

Qu’est-ce que cela vous apporte ?

D’abord, l’installation n’est plus nécessaire. Vous le dézippez et il fonctionne. Point barre.

Ensuite, vous pouvez le mettre sur une clé USB pour transporter votre navigateur libre et respectueux des standards avec vous, où que vous alliez. Ça marche aussi sur un disque dur externe, un baladeur MP3, ou même… un appareil photo (effet garanti devant les amis !)

Enfin, vous pouvez installer plusieurs PortableFirefox pour plusieurs usages, il suffit de dupliquer et de renommer le dossier portableFirefox autant de fois que nécessaire.
Ainsi, Madame pourra habiller son panda rouge… en rose, et Monsieur installer les extensions indispensables comme FootieFox qui lui permettra de suivre l’Euro 2008 en live (mais sans les bleus !).
Le geek malin pourra quant à lui utiliser une version dédiée pour tester des extensions, sans rendre instable une autre version.

Télécharger PortableFirefox3 sur le site Framakey

Crédit photo : Une fois n’est pas coutume c’est moi le photographe et ma fille la photographiée (sous licence Creative Commons By).