Frama.site : testons la contribution

Bousculons nos habitudes : Frama.site n’est pas (encore) un service « prêt à l’emploi », on ne peut pas (encore) créer un site web les doigts dans le nez (faut dire que c’est un peu crado…).

C’est normal : avec cette première action de la campagne Contributopia, nous voulons expérimenter d’autres manières de faire, pour faire ensemble.

Le confort de blogger et tumblr se paie cher

Vous avez remarqué qu’on ne dit plus « je fais un site web »…? On « ouvre un tumblr, » un « blogger », on « fait une page sur wix », on « publie un article sur Medium »… quand ce n’est pas directement la page Facebook qui devient le lieu d’expression unique de notre boîte, association, collectif, démarche artistique…

Certes, ces plateformes sont très pratiques, c’est même pour ça qu’elles ont autant de succès : pas besoin de se prendre le chou avec un hébergement, d’y installer un CMS (un kit de base pour créer son site web), de le personnaliser, et d’apprendre à l’utiliser. Non, là, c’est confortable : on se crée un compte, on remplit un formulaire, on appuie sur un bouton et hop ! Yapluka remplir son site web.

Si vous comprenez l’anglais, cliquez pour aller visiter ce site qui a lu pour vous les conditions générales d’utilisation… édifiant.

En contrepartie, les plateformes d’hébergement nous font « accepter » des conditions d’utilisations qu’on ne lit même pas, qu’on n’a pas vraiment envie de décortiquer, parce que… Parce que ça fait mal de lire que la plupart des contenus que l’on crée et publie leur appartiendront aussi, d’une manière ou d’une autre. Parce que c’est dur de se rendre compte qu’en utilisant leur service, on leur livre les vies et les intimités des personnes qui s’intéresseront à nos productions numériques.

Parce qu’on préférerait croire qu’on le fait pour nous, alors que ces plateformes nous font bosser pour leur pomme. Aral Balkan, un développeur et militant britannique, compare les géants du web à des fermes industrielles nous exploitant comme du bétail. On peut compléter la métaphore en expliquant ce que sont les plateformes Blogger (de Google de Alphabet), Tumblr (de Yahoo de Verizon) et les Pages (de Facebook de Markounet). Ce sont des seigneurs médiévaux qui nous concèdent un bout de terre numérique, afin de jouir des bénéfices de nos productions. Les nobliaux du web ont fait de nous leurs serfs.

Frama.site : se faire sa place dans la toile

Framasite est un service d’hébergement et de création de sites web.

Le but est de démontrer que l’on peut faire autrement, que l’on peut retrouver une indépendance numérique, y occuper un morceau de la toile. L’idée est de vous proposer un espace d’hébergement, c’est à dire un peu de place sur les « serveurs », ces ordinateurs en permanence allumés et connectés à Internet pour qu’on puisse aller y lire des sites web (entre autres choses). Des outils vous permettant de gérer (et donc de créer) vos sites web sont directement installés sur cet espace d’hébergement.

Concrètement, la volonté est de simplifier la vie de chacun·e : on se crée un compte, on choisit quel type de site on veut faire (blog, CV en ligne, page web unique, wiki, etc.), on lui donne un nom, et on appuie sur un bouton ! Ayé, votre site est créé, vous n’avez plus qu’à le remplir de textes, images, etc.

Framasite, illustré par David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Étant proposé par Framasoft, ce service bénéficie forcément des libertés et des contraintes décrites dans nos conditions générales d’utilisation (qui se lisent en 3 minutes, et sans avoir besoin d’avoir avalé un code de la propriété intellectuelle !).

Cela signifie que :

  • Vos contenus vous appartiennent… et que vous en êtes responsables :
    • si vos contenus sont illégaux, « on veut pas finir en taule », donc ils peuvent être supprimés ;
    • il faut toujours, toujours, toujours penser à faire des sauvegardes régulières… Si ça vous tient à cœur de publier un contenu, chouchoutez-le : prenez la précaution d’en conserver une copie !
  • Nous ne permettons pas (et n’admettrons jamais) l’installation de bouts de codes qui épient vos visiteuses et visiteurs ;
  • Nous partageons une ressource commune, dont chacun·e doit avoir une utilisation raisonnable :
    • Les fichiers (photos, etc.) mis en ligne ne peuvent pas faire plus de 5 Mo ;
    • Si vous pensez avoir besoin de plus de 150 Mo d’hébergement, dépasser les 300-500 pages web, ou la vingtaine de sites et wiki… venez en discuter avec nous car il est possible que Framasite ne soit pas la solution adaptée à vos besoins ;
  • Nous ne recommandons surtout pas Framasite pour une utilisation professionnelle, c’est à dire pour faire un site dont dépendraient vos revenus : Framasoft reste une petite association, qui fait de son mieux mais ne fait que de son mieux (et y’a forcément des jours où ça plante, d’ailleurs on l’affiche à cette adresse), et qui ne peut pas être considérée comme éternelle ! Si un jour nous ne recevions plus de dons, par exemple, l’association et ses services mourraient, tout simplement.

Framasite : de la réalité au rêve

Le rêve est de faire en sorte que Framasite soit si simple d’utilisation, si pratique, que votre association, votre boulangerie ou votre artiste favori·te préfère cette solution aux plateformes centralisatrices. C’est de remettre à leur place les réseaux sociaux nobliaux : celle d’un lieu de passage, un lieu qui mène vers votre site web à vous, vers votre coin perso que vous cultivez sur la toile… plutôt que de les laisser devenir des fermes industrielles exploitant vos productions numériques comme aux pires époques du servage.

Car l’avantage, c’est que Framasite n’utilise que du logiciel libre : que ce soit Grav (pour les blogs, pages et sites web), Dokuwiki (pour les wiki, ces fameux sites permettant de construire du savoir collaboratif) ou notre interface de génération de site : tout est sous licence libre !

Imaginez : vous testez Framasite, puis vous vous rendez compte que les conditions dans lesquelles nous proposons ce service ne vous conviennent pas ou ne correspondent plus à vos usages… Aucun souci : vous cliquez sur le bouton « exporter », récupérez vos contenus et allez les installer sur un autre espace d’hébergement équipé de ces mêmes logiciels libres… votre serveur, par exemple !

Cliquez pour découvrir le monde des services de Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Le fait est que, à ce jour, Framasite est encore loin de la facilité évidente dont nous rêvons pour ce service. Ce n’est pas (encore) un service « prêt à l’emploi », comme nous avions l’habitude de les proposer lors des trois années de la campagne Dégooglisons Internet. C’est normal, nous cheminons vers Contributopia : Framasoft ne peut pas faire et décider à elle seule de l’évolution à venir, il va falloir travailler dessus ensemble et, en un mot comme en cent : contribuer.

Pour cette première expérimentation de la contribution nous vous proposons trois phases :

  1. Durant les prochains jours/les prochaines semaines, nous allons améliorer l’interface de création de site, la clarté des options, et les contenus automatiquement paramétrés. En même temps, nous comptons publier des tutoriels et de la documentation pour faciliter l’utilisation du service.
  2. D’ici la fin de l’année 2017, nous voulons trouver comment proposer la location et la personnalisation automatisée des noms de domaine (comment aider quiconque à passer d’une adresse web « monsupersite.frama.site » à « monsupersite.fr », par exemple).
  3. De mi-décembre à mi-février, nous voulons accompagner un·e stagiaire en développement pour qu’iel contribue au logiciel libre Grav et le rende encore plus aisé à utiliser, et faciliter encore plus l’autonomie numérique.

Comment contribuer ?

Pour cette première expérimentation dans la contribution, nous n’avons pas les épaules pour ouvrir une « boite à idée » (qui deviendrait très vite un cahier de doléances) car nous risquerions de crouler sous les demandes répétées, difficiles à traiter… Or, nous ne sommes qu’une petite association de 35 membres.

Nous allons donc commencer modestement, avec un outil qui demande certaines connaissances techniques (et un compte sur notre gitlab) : le dépôt Framasite sur Framagit.org.

  • Si vous voulez faire des remarques, apports, suggestions, retours, ou reporter des bugs concernant Framasite, faites une issue ici ;
  • Si vous voulez contribuer au code de notre interface, forkez directement le dépôt puis proposez une merge request ;
  • Si vous voulez proposer des tutoriels d’utilisation, cela se passe directement sur le dépôt de notre documentation (où de nombreux exemples peuvent vous guider dans votre rédaction) ;
  • Si vous souhaitez simplement aider à financer cette proposition qu’est Framasite et l’animation de son évolution, vous pouvez aussi nous soutenir d’un don.

Une autre façon de contribuer, qui est essentielle et importante, c’est de savoir parler autour de vous d’une telle solution. Si cela vous est disponible, prenez le temps d’accompagner votre entourage à la fois dans la démarche proposée (c’est pas parfait, car c’est à nous de le perfectionner ensemble) et dans l’adoption d’outils libres !

Sachez bien que Framasite n’est qu’un premier pas dans les mondes de Contributopia,

Contribuons ensemble vers cette Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0




Explorons le monde des services de Contributopia

L’aventure Contributopia a pour but de poursuivre et d’approfondir le travail entamé lors de la campagne « Dégooglisons Internet ». Pour la première année de cette campagne, nous comptons donc continuer à ouvrir des services web alternatifs… mais en nous y prenant un poil différemment.

Faire avec vous, pour faire mieux

Hors de question de reprendre le rythme effréné des années de campagne « Dégooglisons Internet » où nous avons sorti près de 10 services par an (vous pouvez vérifier, on a compté !). Durant cette première année de Contributopia, nous voulons prendre le temps dans l’élaboration et l’évolution de quatre services majeurs :

  • Framasite (et Framawiki), création de sites & pages web, blogs, wiki ;
  • Framameet, une alternative à MeetUp pour organiser des rencontres de groupes ;
  • Framapetitions, pour faire entendre ses opinions (alternative aux problèmes posés par Change.org) ;
  • Framatube, parce que YouTube est devenu incontournable, et qu’il faut trouver comment faire autrement.

Cliquez pour découvrir le monde des services de Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Prendre le temps pour mettre en ligne ces services nous permettra de mieux nous impliquer. Sauf exceptions (Framadate, Framaestro, etc.), Framasoft ne développe pas les logiciels libres qui permettent d’ouvrir les services répertoriés par Dégooglisons Internet. La plupart du temps, nous y contribuons (développement de fonctionnalités, documentation, bidouilles esthétiques, traductions, etc.) puis nous les hébergeons, les tenons à jour et nous facilitons leur adoption.

Cette fois-ci, nous voulons investir encore plus de temps professionnel, et donc de l’argent qui provient de vos dons, dans la création et l’évolution de ces projets. Nous pourrons ainsi contribuer à une réflexion plus poussée autour d’outils numériques qui sont franchement sensibles. Nous pourrons aussi et surtout prendre le temps d’être à votre écoute, de vous exposer les points d’étapes et de vous impliquer dans l’évolution de ces logiciels… S’ils sont faits pour vous, autant les faire avec vous, non ?

Quatre services Contributopistes !

 

Entrons dans le vif du sujet, avec les quatre services sur lesquels nous vous proposons de contribuer cette année…

Framasite, créer des sites web aisément

 

Framasite, illustré par David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Première action de cette Contributopia, Framasite est d’ores et déjà ouvert : il suffit d’aller sur Frama.site pour contribuer à la phase de test ! Vous pouvez donc vous y créer un compte afin de produire un (ou plusieurs !) sites internet, pages web, blog, et même des wiki (ces fameux outils pour partager des connaissances de manière collaborative).

Nous reviendrons dessus en détail cette semaine sur le Framablog, mais l’idée est simple : offrir à la fois un espace d’hébergement et des outils pour faciliter l’expression de chacun·e sur la toile. Nous nous engageons à un hébergement éthique : vos contenus publiés sur Framasite vous appartiennent et les données des personnes qui les visiteront ne seront ni épiées, ni transmises, ni monétisées (c’est dans nos conditions d’utilisation !)

Basé sur les logiciels libres Dokuwiki (pour les wiki) et Grav (pour les sites, pages web, blogs…) nous savons qu’à ce jour, Framasite n’atteint pas encore son but : permettre de créer un site web aisément, même quand on ne s’y connaît pas trop. C’est normal, il est en phase de test.

Durant les semaines qui arrivent, nous allons travailler à sa simplification, tout en produisant des tutoriels selon des exemples précis (CV en ligne, blog, etc.). Ensuite, nous souhaitons faciliter le choix des noms de domaine (l’adresse web de votre Framasite). Enfin, fort·e·s des retours et suggestions que vous nous ferez, un⋅e stagiaire nous aidera à contribuer au logiciel Grav afin qu’il soit encore plus facile et pratique d’utilisation.

Framameet, se regrouper sans se faire pister

Framameet, illustré par David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Aujourd’hui, les personnes souhaitant se rencontrer de visu autour de ce qui les rassemble utilisent soit des produits Facebook (les groupes, les pages et les événements), soit MeetUp, dont la création de groupes est devenue payante. Cela signifie, au choix : forcer les gens à être sur Facebook et lui donner encore plus d’informations personnelles et collectives, ou confier à MeetUp toutes les données des personnes intéressées par une activité de groupe.

Il existe des projets dans le logiciel libre qui souhaitent se poser en alternative à MeetUp, mais nous n’en avons pas (encore) vu qui offrent toutes les fonctionnalités attendues et qui sont d’ores et déjà utilisables par le grand public. Qu’à cela ne tienne, c’est une grande devise libriste : « juste fais-le ! » Nous verrons donc qui veut nous suivre dans cette aventure pour créer ensemble une alternative libre à MeetUp qui n’exploite ni les données ni les vies numériques des personnes souhaitant se regrouper.

 

Framapetitions, s’exprimer en toute confiance

Framapetitions, illustré par David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Ah ça fait un moment qu’on en rêve, de celui-là, hein ? Déjà pendant l’été 2016, nous traduisions l’article inquiétant d’une journaliste italienne, Stephania Maurizi, sur l’exploitation financière des signataires de pétitions faites sur Change.org. Nos opinions sur le monde qui nous entoure (qui sont donc, littéralement, politiques) représentent des données sensibles. Elles valent mieux qu’une exploitation financière ou qu’un code obscur dont on ignore ce qu’il fait, non ?

Lorsque nous avons créé le service de formulaires en ligne Framaforms, nous savions qu’en bidouillant et retravaillant ce code, nous pourrions proposer un service Framapetitions, une alternative à Avaaz ou Change.org. Sauf que la différence entre un formulaire en ligne et une pétition, c’est que cette dernière peut être rejointe par des millions de personnes !

Ayant vu sur plus d’un an comment les serveurs de Framaforms tenaient la charge que représentent vos questionnaires et leurs réponses, nous sommes désormais assez confiant·e·s pour nous lancer dans la production de Framapetitions… mais nous aurons grand besoin de votre aide pour tester massivement ce service ensemble avant de le publier !

Framatube, briser l’hégémonie de YouTube

Framatube, illustré par David Revoy – Licence : CC-By 4.0

C’est un gros morceau : comment faire pour que YouTube ne soit plus aussi incontournable ? Ce réseau social de vidéos bénéficie de toute la puissance de Google… et autant vous dire qu’il en faut, des sous, des fibres et des serveurs, pour centraliser des milliards de vidéos dont certaines sont vues par des milliers (millions ?) de personnes en même temps.

Et si la solution c’était de faire autrement…? De faire non pas un énième hébergement alternatif (un « Framatube » centralisateur) mais une fédération d’hébergements vidéos, où chacun peut communiquer avec les autres ? Mastodon (une alternative à Twitter libre et fédérée) nous a montré qu’un réseau fédéré peut permettre à chaque hébergeur de choisir ses propres règles du jeu (modération, monétisation, conditions générales) tout en offrant aux utilisateur·trice·s un accès à l’ensemble du réseau.

Peertube est un logiciel libre en cours de développement, qui permet de faire la même chose pour l’hébergement de vidéos. Et il offre un gros plus : la diffusion vidéo en pair à pair. Il fait en sorte que le navigateur web de chaque spectateur·trice d’une vidéo la partage avec les autres personnes qui sont en train de la regarder, soulageant ainsi et le réseau et les serveurs qui hébergent ces vidéos.

Nous prenons le pari de financer le salaire du développeur de ce logiciel, qui jusqu’à présent menait le projet sur son temps libre, afin qu’il parvienne à une version qu’on puisse déployer à grande échelle. C’est un pari fort car nous pensons sincèrement que, une fois cette brique logicielle construite, Peertube peut révolutionner notre monde numérique, et que d’autres pourront construire par dessus.

Ainsi, Framatube ne sera pas un endroit où déposer des vidéos, mais bien le petit maillon d’une grande chaîne que nous espérons composée d’artistes, associations, collectifs, organisations et médias qui hébergeront et diffuseront leurs vidéos.

Faire mieux que dégoogliser, oui, mais ensemble !

Alors oui : « seulement » quatre services en une année, nous vous avions habitué·e·s à plus. Mais, nous espérons que vous l’aurez compris, le but de cette année n’est pas de répondre à une urgence qui pousse vers la quantité de services, mais bien à une exigence de penser ensemble des services différemment. Sans compter qu’en parallèle, nous devons prendre le temps de poser les fondations qui nous permettront de consacrer les années suivantes à l’essaimage, puis à l’éducation populaire.

Cette année est aussi une année de transition, pour nous comme pour tou·te·s celles et ceux d’entre vous qui choisiront de nous suivre dans cette aventure. Cette transition veut tendre vers la contribution. Nous devons trouver ensemble comment commencer à ouvrir les espaces nous permettant de collaborer sur les actions présentes et à venir.

Contribuons ensemble vers cette Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Quitte à avoir moins d’annonces-surprises fracassantes sur le Framablog, nous essaierons de vous tenir informé·e·s des points d’étapes de chaque projet. Cela pourra se passer ici, mais aussi sur nos réseaux sociaux (Diaspora*, Mastodon, Twitter et même Facebook -_-  !) ainsi que via notre lettre d’information, afin que vous ayez l’opportunité de prendre part à cette aventure.

Le maintien des projets existants et la naissance des actions à venir restent financés par les dons. Plus de deux mille personnes nous permettent de travailler. Nous tenons à vous remercier de cet engagement nécessaire à nos côtés, et de ce soutien qui fait chaud au cœur.

Vous désirez embarquer avec nous dans ce voyage en Contributopia ?

Ça tombe bien : la voie est libre !

Pour aller plus loin




Contributopia : dégoogliser ne suffit pas

Framasoft vous invite à un voyage exaltant : explorons ensemble des mondes numériques. Des mondes où les outils informatiques se conçoivent en collaboration, où les pratiques respectueuses essaiment et pollinisent, où s’ouvrent les portes de la contribution.

Ne plus faire contre, pour faire autrement

Après avoir conclu la campagne Dégooglisons Internet, une leçon s’impose : se réduire à proposer des alternatives aux services de Google & compagnie, ce serait se perdre sur la voie du Libre. Car, d’une part, cela implique de s’épuiser dans une course à la réaction, face à des géants du Web aux jambes bien longues. Mais surtout, cela oblige à jouer selon leurs règles, donc à rester dans leur conception du monde.

Ne nous y trompons pas : derrière chaque nouveau service et produit des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), il y a une vision de la société, celle que les médias traditionnels se plaisent à qualifier de « ubérisée », celle qui fait de nous des objets de consommation. Derrière l’adage « si c’est gratuit, c’est toi le produit », il y a une vérité cruelle : les ogres dévoreurs de data de la Silicon Valley nous forcent à donner une livre de nos vies en échange de leurs outils, et nous mettent en position de devoir choisir entre notre confort et nos libertés.

Oui, c’est déprimant… mais d’autres mondes sont possibles.

Cliquez pour découvrir les mondes de Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Lors des multiples rencontres et échanges avec vous, nous nous sommes rendu compte d’autre chose : des alternatives existent. Dans de nombreux domaines, des personnes agissent au quotidien avec une autre vision en tête que la société proposée par les GAFAM, NATU et autres BATX (passez votre souris sur ces acronymes pour découvrir les zolis noms derrière -_-).

Que ce soit dans des associations, des entreprises de l’économie sociale et solidaire, des regroupements, des collectifs, etc., ces personnes contribuent, chacun·e à leur manière, pour proposer des alternatives variées qui mettent au centre de leurs préoccupations les libertés et les humain·e·s.

Ce n’est donc pas une surprise si c’est auprès de ces personnes que les discours du logiciel libre et de sa culture font mouche : nous partageons ensemble des notions d’éthique, de solidarité et de contribution. Lors de la campagne Dégooglisons Internet, nous avons pu voir combien cette audience était une des plus friandes d’informations et de solutions. Voilà des personnes qui comprennent tout de suite les enjeux, et qui non seulement s’approprient les alternatives libristes, mais vont en plus les diffuser ensuite auprès de leurs réseaux. Ce n’est pas pour rien : nous rêvons, ensemble, de concrétiser d’autres utopies.

« Mais vous êtes… utopistes ? »

Eh, chiche, on répond juste : « Évidemment. » ;)…

Déjà, parce que ce n’est pas une insulte que d’être qualifié d’utopiste. Mais aussi parce que, dans le cadre des univers numériques, le mot est parfaitement approprié. Bidouillé au XVIe siècle par l’auteur britannique Thomas More, il signifie littéralement « (qui n’est) en aucun lieu. » Comment mieux décrire le travail, les interactions et les œuvres de l’esprit produites depuis nos ordinateurs, sur nos réseaux ? Les 35 membres de l’association Framasoft vivent dans 33 villes différentes : l’endroit où tous nos projets se font, en collaboration avec plus de 700 contributeurs et contributrices et de nombreuses communautés, n’est réellement en aucun lieu !

Ce que le public te reproche, cultive-le : c’est toi.
(J. Cocteau, Le Potomak, 1919)

Bon, ne faisons pas l’autruche : lorsqu’on le crache comme une insulte, c’est pour donner à « utopiste » le sens de « irréaliste ». Mais, lorsque des salles de machines traitaient des cartes perforées, n’était-ce pas irréaliste d’imaginer avoir des ordinateurs dans nos poches ? Lorsque le savoir était contraint aux pages des encyclopédies papier écrites par quelques hommes, n’était-il pas irréaliste d’imaginer que des millions de personnes contribueraient chaque jour à faire de Wikipédia une encyclopédie fiable ? Lorsque Framasoft a présenté les 30 services visés par la campagne Dégooglisons Internet, n’étions-nous pas irréalistes de croire que nous allions (presque) y arriver…?

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Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Plus qu’une utopie, la contribution fait le quotidien des communautés du logiciel libre, et de sa culture. C’est aussi bien une façon de faire qu’une manière de penser, qui est partagée avec toutes ces autres personnes qui rêvent d’autres sociétés. Nul besoin d’être militant·e du libre pour vouloir créer et agir ensemble dans le respect des libertés de chacun·e, mais les communautés du libre ont le pouvoir de façonner des communs numériques pensés pour être pratiques, solidaires et éthiques, au cœur même de leur code.

C’est là tout l’enjeu de Contributopia : trouver comment concevoir et proposer des outils qui sont pensés hors des sentiers battus et rebattus par ces entreprises-silos dont le seul but est de moissonner nos données. Nous n’imaginons pas faire cela sans travailler de concert avec nos alter-ego du monde des communs, sans approfondir nos relations avec les réseaux de l’éducation populaire ni être à l’écoute des personnes qui animent, quotidiennement, le milieu associatif que l’on connaît bien. À nos yeux, c’est en contribuant pour et avec ces personnes-là (et bien d’autres…) que les travaux des communautés du logiciel libre peuvent trouver la résonance qu’ils méritent dans la société civile.

Contributopia… Contributo… quoi ?

Contributopia, c’est notre petit bout de réponse à un problème qui picote un peu : aujourd’hui, les contributeurs les plus massifs au logiciel libre s’appellent Google, Facebook, Microsoft, Tesla, etc. Il nous semble urgent de contribuer avec d’autres réseaux et communautés, celles qui, avec nous, cherchent des alternatives à cette consommation généralisée de… de l’humain.

Lorsque, au cours de la campagne Dégooglisons Internet, nous avons mis le nez hors de notre petite bulle libriste, nous l’avons bien vu : ces alter-ego sont bien souvent déjà acquis·e·s à la culture du logiciel libre, parfois même sans le savoir. Il nous suffit d’être présent·e·s, dans l’écoute et l’échange, pour trouver des personnes qui adhèrent aux mêmes valeurs et savent convaincre leurs pairs. Or, on le sait : parler aux utilisatrices et utilisateurs de logiciels libres d’aujourd’hui, c’est trouver les contributeurs et contributrices de demain.

Cliquez pour découvrir le monde de l’essaimage dans Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Contributopia, c’est aussi une déclaration d’intention : nous souhaitons continuer à tisser des liens de plus en plus privilégiés entre les communautés des libertés numériques et celles qui œuvrent dans d’autres domaines avec le même état d’esprit. Ces échanges nous renforceront mutuellement et nous changeront sûrement : nous avons encore beaucoup à apprendre (et à gagner) à écouter des personnes qui travaillent avec les mêmes intentions, dans d’autres domaines que l’informatique.

Contributopia, c’est enfin un site web, magnifiquement illustré par David Revoy (♥). Nous en profitons pour le remercier chaudement car ce formidable illustrateur libriste a mis dans cette commande beaucoup d’écoute, de chaleur, d’attention… et de talent : c’est beau, hein ? Grâce à son travail, ce site web présente sur trois ans les douze actions que Framasoft compte mener pour outiller ces personnes qui concrétisent chaque jour le monde différent dont elles rêvent, qu’elles soient libristes ou se définissent autrement.

Bon, nous annonçons douze actions, mais vous nous connaissez : rendez-vous dans trois ans pour savoir combien il y en aura en plus ! 😉

Trois mondes à explorer

Les douze actions de Contributopia s’explorent sur trois planètes, une pour chaque année.

De 2017 à 2018, nous proposerons, dans la continuité de l’aventure Dégooglisons Internet, des services en ligne, libres et respectueux de vos données :

  • Framasite : créer et héberger des sites et pages web, blogs, wiki… dont la phase de test s’ouvre à vous dès aujourd’hui ! ;
  • Framameet : favoriser réunions et rencontres, en alternative à MeetUp et aux produits Facebook ;
  • Framapetitions : faire entendre ses opinions, en alternative à Avaaz ou Change.org ;
  • Framatube : casser, ensemble, le monopole de YouTube.

Nous détaillerons ces services très prochainement sur le Framablog, car nous souhaitons aller un peu plus loin que lors de la campagne Dégooglisons Internet. Nous allons encore plus nous impliquer dans la conception de ces services, et contribuer avec vous à leur évolution ! Par exemple, la phase de test de Framasite s’ouvre à vous dès aujourd’hui. Comme d’habitude avec Framasoft, nous aimons accompagner nos déclarations d’intention avec des actions concrètes. Néanmoins, il ne s’agit plus ici de sortir un service « prêt-à-utiliser-par-quiconque », mais bien de s’enrichir de vos retours pour le faire évoluer sous vos yeux, tout en produisant des tutoriels selon les besoins exprimés. Bien entendu, nous vous en parlerons plus en détails sur le Framablog dans les prochains jours.

Cliquez pour découvrir le monde de l’Éducation Populaire dans Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Pour les mondes des prochaines années, ils sont un peu plus lointains et les actions qu’ils représentent restent encore à définir ensemble, au gré des échanges que nous aurons sur le chemin…

De 2018 à 2019, nous souhaitons parcourir plus avant la planète de l’essaimage : celle où chacun·e peut acquérir et approfondir son indépendance numérique. Les noms de codes de ces projets sont CHATONS, YUNOHOST, Internationalisation (pas des services hébergés par Framasoft, hein !) et Framasoft Winter of Code.

Enfin, vers 2019 et 2020, nous désirons défricher les territoires de l’éducation populaire, avec des actions de médiation aux outils numériques, de git (outil de contribution) rendu accessible à tou·te·s, un cours en ligne pour les CHATONS et même une Université Populaire du Libre !

Pour comprendre ces intentions et mieux pouvoir en discuter avec nous au fil des rencontres, n’hésitez pas à parcourir ces mondes sur contributopia.org

Une Contributopia à rêver ensemble !

Il fallait bien partir d’une première proposition, donc voici celle que nous vous faisons sur les trois prochaines années. Contributopia est notre nouvelle campagne : à l’instar de Dégooglisons Internet, elle ne nous empêchera pas de poursuivre nos nombreux autres projets ni d’essayer de mettre en lumière et soutenir toujours plus d’initiatives libres, qui font la richesse de nos communs numériques.

Cette campagne, comme toutes les propositions faites et maintenues par Framasoft, ne vit que par votre soutien, vos échanges et… vos dons. Ce nouveau cap pour Framasoft est pour nous un gros pari : continuerez-vous de nous faire confiance et de nous soutenir, sachant que vos dons représentent près de 90 % de nos ressources ?

Néanmoins, c’est un risque que nous voulons prendre, fort·e·s de la confiance que vous nous avez apportée au fil des ans. Nous le prenons car, plus que de changer de cap, il nous semble essentiel d’élargir la route (qui reste longue) afin qu’un plus grand nombre de personnes nous accompagnent dans cette voie (qui reste libre !).

Framasoft a longtemps été considéré comme une porte d’entrée dans la culture du logiciel libre. L’avantage d’une porte, c’est qu’on peut la franchir dans les deux sens. Il est grand temps que nous proposions aussi d’être une porte de sortie, une ouverture vers ces mondes de la contribution, afin que nous les explorions ensemble.

 

La route est longue mais la voie est libre,
L’équipe de Framasoft.

 

Pour aller plus loin




(se) Dégoogliser en toute facilité

Lundi, nous vous annoncions la refonte du site Dégooglisons Internet. Aujourd’hui, nous vous proposons un petit tour des co-propriétaires (ben oui : il est sous licence CC-By-SA !), afin que vous puissiez encore mieux vous emparer de cet outil pour vous dégoogliser, et dégoogliser votre entourage.

Les GAFAM, au bûcheeeeeeer !

Le site Dégooglisons Internet a servi, durant trois ans, à présenter une campagne d’information, d’actions, d’intentions de Framasoft tout en proposant un portail d’accès aux services qui venaient s’ajouter aux conquêtes de la communauté libriste.

Maintenant que nous avons conclu cette campagne, il va remplir une fonction unique : faciliter l’adoption de services éthiques, respectueux de ces données personnelles qui décrivent nos vies numériques. En trois ans, nous avons fait bien plus qu’héberger des services, et il était grand temps de vous présenter tout cela de manière claire et facile d’accès.

Dès l’accueil, nous vous invitons à faire feu des GAFAM (les géants du web que sont Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) en expliquant en trois bulles la problématique à laquelle nous essayons de répondre.

Bien vite, on arrive au cœur de la proposition : les services. Si vous ne pouvez pas les essayer, comment pourrez-vous les adopter ? Nous vous invitons donc à trouver le service que vous cherchez suivant deux entrées possibles (on y reviendra !)

Néanmoins, tester des services n’est qu’une première étape, et nous vous proposons ensuite d’aller plus loin :

Seulement voilà, vous pouvez aussi vous poser des questions sur les raisons d’une telle démarche. C’est même très sain, puisque c’est ainsi que peut naître la confiance (ou la défiance, d’ailleurs) : ce sentiment qui nous pousse à confier nos données, nos vies numériques, à un hébergeur. Nous exposons donc :

Tout ceci est, et demeure, une aventure collaborative. Nous prenons donc le temps d’expliquer :

Un espace final est réservé aux médias qui ont parlé de cette aventure, avec un lien vers notre espace médias, que chacun·e peut librement visiter et utiliser.

Chacun·e peut trouver service à son pied

Nous avons décidé de présenter de deux manières différentes les 32 services qui sont actuellement à votre disposition, car tout le monde ne cherche pas de la même manière.

La première démarche, lorsque l’on cherche selon un besoin précis, correspond à cette partie de la page d’accueil :

Cela vous mènera vers une toute nouvelle page où les services sont classés selon les usages, avec une barre de recherche pour mieux vous aider à trouver celui qui correspond à vos attentes :

La deuxième démarche consiste à chercher un service alternatif au service propriétaire que l’on utilise et que l’on connaît.

Ici vous retrouverez d’abord la fameuse carte Dégooglisons, où il vous suffit de cliquer sur le camp romain du service qui vous intéresse pour en découvrir une alternative.

Mais il n’y a pas que les « Framachins » dans la vie. Très vite, vous trouverez en dessous de cette carte une liste bien plus complète d’alternatives en tous genres pour se dégoogliser plus complètement. Cette liste est inspirée de l’excellent site Prism-Break, un site à garder dans ses marque-pages !

Un exemple, totalement au hasard, pour les alternatives à l’email ;)

À vous de dégoogliser !

Vous l’avez saisi, l’idée du site degooglisons-internet.org, c’est qu’il vous soit utile. Que ce soit pour trouver des alternatives qui vous sont nécessaires, ou pour aider votre entourage à se dégoogliser, c’est désormais à vous de vous en emparer.

D’ailleurs, n’hésitez pas à aller visiter l’espace médias, qui s’est enrichi d’une fresque racontant ces trois années de Dégooglisons, ainsi que des dessins de Péhä, aux côtés de nombreux autres visuels libres… et à partager dans vos réseaux !

Nous espérons, sincèrement, que la refonte de ce site vous simplifiera la dégooglisation et même (soyons folles et fous) la vie !

 

Pour aller plus loin

Bienvenue au banquet concluant Dégooglisons Internet, par Péhä (CC-By)




Framasoft : on vous a fait un dessin !

Ça nous étonne souvent. L’image de Framasoft est parfois bien loin de notre réalité quotidienne. Partant de l’adage selon lequel une image vaut plus que mille mots, nous sommes allé·e·s demander de l’aide à un certain Geoffrey Dorne.

Framasoft : une image disproportionnée

Même si nous essayons de nous présenter en toute transparence, nombre de personnes qui bénéficient de nos projets et services ne savent pas vraiment qui nous sommes.

Nous le constatons principalement dans les questions, suggestions (voire exigences) qui sont exprimées dans le support, sur les stands ou dans les réseaux sociaux : nous avons parfois l’image d’une grosse boite de logiciels, armée de centaines d’employé·e·s et d’un budget ministériel ^^. Cela provient peut-être d’un nom créé en réaction à Microsoft, à l’époque où la firme de Redmond régnait sur le monde informatique.

Bref, rétablissons un peu la réalité. 35 membres (dont 7 salarié·e·s) gèrent une association qui anime et maintient une cinquantaine de projets auxquels plus de 700 personnes contribuent. Ces projets sont financés par plus de 2000 donateurs et donatrices, avec un budget avoisinant les 250 000 € par an (ça varie selon les années ^^)…

Ces dons, qui représentent 90% de nos revenus, sont ce qui nous permet d’accueillir entre 200 000 et 400 000 personnes sur nos sites web chaque mois, de participer à une centaine d’événements par an, d’y distribuer des milliers de flyers et stickers… Énorme pour une bande de potes, mais on est loin de la multinationale !

Du coup, au lieu d’aligner des chiffres en mode entreprise-qui-fait-trop-sérieux, le mieux, c’est de vous les montrer.

L’infographie « Le monde de Framasoft »

Geoffrey Dorne est un designer éthique, auteur du blog Graphism.fr et fondateur de l’agence Design & Human. Cela fait un moment que nous nous suivons, mutuellement, sur les réseaux sociaux et dans nos actions respectives, avec une complicité grandissante. Nous lui avons donc demandé de nous aider à présenter Framasoft et son évolution après ces trois années de campagne Dégooglisons Internet, qui ont entraîné de nombreuses mutations dans notre association, ainsi que dans le réseau de projets.

Nous tenons à le remercier pour l’attention, le talent et l’humanité qu’il a apportées à la commande de cette infographie, qu’il a placée sous la licence libre CC-By-SA.

Et puis soyons franc·he·s, nous avons été un peu pénibles ! C’était compliqué de mettre tout notre bazar dans une seule image qui convienne aux sensibilités diverses de nos personnes, non moins variées. Le résultat ? C’est à vous de nous dire, et surtout de vous en emparer.

Cliquez sur l’image pour l’agrandir.
Infographie réalisée par Geoffrey Dorne, CC-By-SA

 

Edit 28/09/2017 : à la demande générale et néanmoins populaire, le fichier source pdf grand format de cette infographie est désormais en libre disposition sur la page médias de Dégooglisons Internet.

 

Pour aller plus loin

 

 




Dégooglisons Internet : c’est la fin du début !

Rassurez-vous : hors de question de fermer les services ni de s’arrêter en si bon chemin ! Seulement voilà : en octobre 2014, nous annoncions nous lancer dans la campagne Dégooglisons Internet pour les 3 années à venir.

3 ans plus tard, il est temps de conclure ce chapitre… pour mieux continuer cette histoire commune.

Nous étions jeunes et flou·e·s !

Nous en avons déjà parlé, le succès de la campagne Dégooglisons Internet nous a pris par surprise.

Nous nous lancions dans un pari flou, non pas celui de remplacer Google et consorts (il n’en a jamais été question, même s’il nous a fallu le préciser à chaque fois, à cause d’un titre trop accrocheur), mais celui de sensibiliser qui voulait l’entendre à un enjeu sociétal qui nous inquiète encore aujourd’hui : la captation des données numériques qui décrivent nos vies (rien de moins) par quelques grands acteurs privés, les trop fameux GAFAM (pour qui découvre tout cela, on parle de Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) et tous les prédateurs qui ne rêvent que de prendre leur place et qui un jour ou l’autre leur tailleront des croupières.

Cliquez sur l’image pour lire la BD « La rentrée des GAFAM », par Simon « Gee » Giraudot.

 

Pour cela, nous souhaitions démontrer que le logiciel libre est une alternative éthique et pratique, en proposant sur trois ans la mise en ligne de 30 services alternatifs à ceux des GAFAM, tous issus du logiciel libre. L’idée de cette démonstration, dans nos têtes, était simple :

Venez tester les services chez nous, utilisez-les tant que vous n’avez pas d’autre solution, puis voguez vers votre indépendance numérique en cherchant un hébergement mutualisé, en les hébergeant pour votre asso/école/syndicat/entreprise/etc. ou carrément en auto-hébergeant vos services web chez vous !

Sur le papier ça paraissait simple, comme allant de soi. Bon OK, c’était déjà un sacré défi, mais un défi naïf. Car nous n’avions pas prévu ni l’engouement de votre côté ni la complexité de proposer un tel parcours… Bref, nous nous sommes confrontés à la réalité.

C’est en dégooglisant qu’on devient dégooglisons

Nous avons eu la chance qu’une telle proposition (que d’autres ont pu faire avant nous et à leur manière, la mère zaclys, lautre.net, infini.fr, etc.) arrive à un moment et d’une façon qui a su parler à un public bien plus large que le petit monde libriste, tout en étant saluée par ce dernier.

Sauf qu’un grand coup de bol implique de grandes responsabilités : avec près d’une centaine de rencontres par an (publiques et/ou privées), que ce soit dans des conférences, des ateliers, des stands, des festivals, des partenariats… Nous avons appris et compris de nombreuses choses :

  • Proposer un service fonctionne mieux dans les conditions de la confiance (transparence sur les Conditions Générales d’Utilisation et le modèle économique, réputation, jusqu’à cet affreux nommage des Frama-trucs, qui rassure mais que même nous on n’en peut plus !) ;
  • Proposer ne suffit pas, il faut accompagner la transition vers un service libre, avec des tutoriaux, des exemples d’utilisation, un peu de bidouille esthétique – car nous ne sommes ni ergonomes, ni designers – des ateliers… et des réponses à vos questions. Donc beaucoup, beaucoup, beaucoup de support ;
  • Notre proposition deviendrait contre-productive et centraliserait vos vies numériques si nous ne nous lancions pas, en parallèle, dans les projets qui vous permettront à terme de sortir de Framasoft pour aller vers l’indépendance numérique (parce que les tutos « comment faire la même chose sur vos serveurs » , c’est bien… et ça ne suffit pas).

Nous avons donc passé trois ans à écouter, à chercher et à comprendre ce que signifiait Dégoogliser Internet. Dégoogliser, c’est :

  • tester, choisir, adapter et proposer des services web alternatifs et les maintenir en place et à jour ;
  • et en même temps soutenir les personnes et communautés qui créent les logiciels derrière ces alternatives (la plupart du temps, ce n’est pas nous !!!) ;
  • et en même temps accompagner ces alternatives de documentations, tutoriels, exemples ;
  • et en même temps répondre aux invitations, aller à votre rencontre, faire des conférences et ateliers, communiquer sans cesse ;
  • et en même temps rester à votre écoute et répondre à vos questions aussi nombreuses que variées ;
  • et en même temps mettre en place les fondations vers des hébergements locaux et mutualités (comme les CHATONS, un collectif « d’AMAP du numérique ») ou vers l’auto-hébergement (en consacrant du temps salarié de développement au projet YUNOHOST) ;
  • et en même temps poursuivre une veille sur les nouvelles trouvailles des GAFAM pour mieux vous en informer, ainsi que sur ces personnes formidables qui cherchent à mieux cerner les dangers pour nos vies et nos sociétés;
  • et en même temps vous donner la parole pour mettre en lumière vos projets et initiatives ;
  • et en même temps ne pas oublier de vous demander votre soutien, car ce sont vos dons qui assurent notre budget pour continuer ;
  • et en même temps boire des coups, avec ou sans alcool modération (non parce qu’on va pas faire tout ça dans la tristesse, non plus, hein !).

Ce que l’on retient de ces trois années…

…c’est qu’il est temps d’arrêter. Non pas d’arrêter de Dégoogliser (c’est loin d’être fini : on vous prépare plein de belles choses !), mais d’arrêter de le faire comme ça, à une telle cadence. Il y a dans ces trois ans un aspect publish or perish, « sors un service ou finis aux oubliettes » , qui ne convient pas à l’attention et au soin que l’on veut apporter à nos propositions.

Jusqu’à présent, cette cadence nous a servi à proposer 32 alternatives, un ensemble sérieux et solide, mais continuer ainsi pourrait desservir tout le monde.

Certes, il serait possible de transformer Framasoft en entreprise, de faire une levée de fonds de quelques millions d’euros, d’en profiter pour faire un « séminaire de team building » aux Bahamas (ouais, on a besoin de repos ^^) et de… perdre notre identité et nos valeurs. Ce n’est clairement pas notre choix. En trois ans, notre association est passée de 2 à 7 permanent·e·s (avec environ 35 membres), et même si cette croissance pose déjà de nombreux soucis, nous sommes fier·e·s de rester cette bande de potes qui caractérise l’association Framasoft, et de ne pas nous prendre au sérieux (tout en faisant les choses le plus sérieusement possible).

Ce que l’on retient, aussi, c’est que la problématique des silos de données centralisés par quelques monopoles mérite une réponse bien plus complexe et complète que simplement proposer « 32 services alternatifs ». Nous pourrions continuer et faire grimper les enchères : « 42… 42 sur ma gauche, 53, ah ! 69 services ! Qui dit mieux ? », mais à quoi bon si on n’inscrit pas cette réponse dans un ensemble d’outils et de projets pensés différemment de ce « GAFAM way of life » qui nous est vendu avec chaque Google Home qui nous écoute, avec chaque iPhone qui nous dévisage, et avec tous ces autres projets ubérisants ?

Cliquez pour découvrir comment un récent épisode de South Park a trollé les foyers possédant un Google Home, un Amazon Echo ou Siri sur ses produits Apple.
Image : © Comedy Central

Ce que l’on retient, enfin, c’est que nombre de personnes (qui ne s’intéressent pas spécialement à l’informatique ni au Libre) partagent, parfois sans le savoir, les valeurs du Libre. Ce sont des membres d’associations, de fédérations, des gens de l’Économie Sociale et Solidaire, de l’éducation populaire, du personnel enseignant, encadrant, formateur. Ce sont des personnes impliquées dans une vie locale, dans des MJC, des tiers-lieux, des locaux syndicaux, des espaces de co-working et des maisons associatives. Ce sont des personnes à même de comprendre, intégrer et partager ces valeurs autour d’elles et de nous enseigner leurs valeurs, connaissances et savoirs en retour.

Le plus souvent : c’est vous.

 

« OK, mais il est où mon Framamail ? »

Alors voilà, touchant du doigt la fin des 3 années annoncées, c’est l’occasion de faire le bilan (on vous prépare une belle infographie afin de raconter cela) et de prendre un peu de recul pour chercher quelle suite donner à cette aventure. Car c’est loin d’être fini : si nous avons bel et bien dégooglisé trente services, c’est que nous en avons rajouté en cours de route, et certains ne sont pas (encore) là…

Toi aussi, joue avec Framasoft au jeu des 7… 12… au jeu des plein de différences ! (Cartes « Dégooglisons Internet » 2014 et 2016, par Gee.)

 

Nous allons vous décevoir tout de suite : nous n’allons pas proposer de Framamail, tout du moins pas sous la forme que vous imaginez. L’e-mail est une technologie à la fois simple (dans sa conception) et extrêmement complexe (dans sa maintenance parmi le champ de mines que sont les SPAM et les règles imposées par les géants du web). C’est d’autant plus complexe si vous avez un grand nombre de boîtes mail à gérer (et ouvrir un Framamail, c’est risquer d’avoir 10 000 inscriptions dès la première semaine -_-…)

Nous sommes dans l’exemple typique de ce que l’on décrivait juste avant : si on ouvre un Framamail, et si on ne veut pas de pannes de plus de deux heures sur un outil aussi sensible, il nous faut embaucher deux administratrices système et un technicien support à plein temps juste pour ce service. Ce qui peut se financer par vos dons… mais au détriment des autres services et projets ; ou en faisant de vous des clients-consommateurs (alors que, depuis le début, nous cherchons à prendre chacun de nos échanges avec vous comme autant de contributions à cette aventure commune).

Heureusement, il existe d’autres pistes à explorer… pour l’email tout comme pour les alternatives à YouTube, Change.org, MeetUp, Blogger qu’il nous reste à rayer de la carte !

Bienvenue au banquet de Dégooglisons !

Bienvenue au banquet concluant Dégooglisons Internet, par Péhä (CC-By)

 

Il est donc temps de clore cet album, de sortir des gauloiseries en vous invitant à aiguiser vos canines sur les GAFAM… Nous en profitons pour remercier l’illustrateur Péhä de cette magnifique image qui nous permet de conclure en beauté ces trois années d’expérimentations en commun.

Nous vous proposons, dès aujourd’hui, une refonte complète du site Dégooglisons Internet visant à répondre au plus vite à vos attentes. C’est un peu la v1, la première mouture finie de ce portail, après trois années de gestation. Nous espérons que vous aurez encore plus de facilité à partager ce site pour Dégoogliser votre entourage.

Cette conclusion est pour nous l’opportunité d’avoir une pensée emplie de gratitude et de datalove pour toutes les personnes, les communautés, les bénévoles, les donatrices, les salariés, les passionnées, les partageurs, les contributrices… bref, pour cette foultitude qui a rendu cela possible.

Chaque fin d’album est surtout l’occasion de tourner la page, afin d’ouvrir un nouveau chapitre… Promis, ceci n’est que le début, on en reparle d’ici quelques semaines.

Merci, vraiment, du fond de nos petits cœurs de libristes, et à très vite,

L’équipe de Framasoft.




Politique : pour les arcanes c’est Arcadie

Nous avons tendance à voir et juger d’un peu loin le monde politique, ou plutôt par le miroir déformant des affaires et des scandales : la corruption du milieu parlementaire, hélas bien présente, fait presque écran au fonctionnement réel des institutions et de ceux qui sont censés nous représenter. S’informer davantage, mieux connaître, comprendre, identifier qui fait quoi et dans quelles conditions demande du temps et des recherches dans de multiples directions. C’est pourquoi le projet Arcadie, initiée par Tris Acatrinei, revêt toute son importance. On peut même considérer qu’il est d’utilité publique et citoyenne. En rendant disponibles et compréhensibles sur un portail unique des informations peu accessibles et dispersées, il donne un bon exemple d’utilisation des données publiques pour le bien commun.

 

Bonjour Tris, peux-tu te présenter brièvement ?
Brièvement, je ne sais pas faire, je ne suis pas comme François Hollande, une experte de la synthèse. Plaisanterie mise à part, je suis juriste de formation mais j’ai commencé à bricoler en informatique, ce qui m’a amenée à rencontrer  notamment Eric Walter et à rejoindre l’Hadopi. Après un passage dans un cabinet de droit de propriété intellectuelle et industrielle, période pendant laquelle, je me suis beaucoup occupée de mon premier « bébé » Hackers Republic, j’ai été embauchée comme assistante parlementaire. J’en suis partie pour monter le Projet Arcadie.

Sérieux, t’as bossé pour la Hadopi ? Mais alors, ça existe ?
Et même que si tu dis le nom de l’institution trois fois, MFM apparaît dans ta douche.

C’est bien comme nom Arcadie, mais pourquoi ce choix ? À cause de l’utopie ?
Officiellement, oui. En réalité, le nom m’a été inspiré par XFiles et Resident Evil.

L’accroche du projet c’est « Pour enfin tout savoir sur les parlementaires français ». C’est alléchant, mais est-ce que ça veut dire qu’on ne sait pas tout sur les parlementaires ? Pourtant il y a des pages Wikipédia, des fiches de l’Assemblée Nationale, les sites web des parlementaires eux-mêmes, des journalistes qui parfois font leur métier et tout… il y a des choses qu’on ignore, donc ?
Il y a toujours des choses qu’on ignore mais en fait, quand j’étais AP (assistante parlementaire), je passais beaucoup de temps à chercher qui étaient les députés, leurs résultats d’élections, leur présence sur le Web, etc. Je ne trouvais rien qui centralise toutes les infos essentielles, notamment les fonctions dans les partis. Or, ce que peu de gens savent, c’est que les élus qui ont des responsabilités au sein de leur parti ne sont pas forcément les plus productifs dans leurs assemblées. Par ailleurs, les fiches sur le site de l’AN et du Sénat sont déclaratives.
Ma valeur ajoutée est la vérification des infos, le croisement : je farfouille partout et je veux que les gens puissent trouver en trois clics les infos qui les intéressent. Par exemple, connaître à l’instant T le nombre de parlementaires LREM, également avocats, toujours en activité.

La page d’accueil du projet Arcadie

Qu’est-ce qui a motivé ce projet au départ ? Tu dis sur ton site que c’était un projet professionnel, et que ça n’a pas abouti. Pas trop aigrie ?
Je me disais que si j’avais un besoin d’infos centralisées, à jour et vérifiées, je ne devais pas être la seule. Au début, je voulais en faire un projet entrepreneurial mais comme je ne suis pas une commerciale, ça ne l’a pas fait. En fait, je suis plus heureuse de ne dépendre que des dons car les gens savent pourquoi ils en font. Le risque de dépendre du mécénat ou de subvention est que tu te muselles pour ne pas déplaire. Et si un jour, ça doit s’arrêter, eh bien, ça s’arrêtera.

Tu pouvais gagner ta vie honorablement en faisant du développement, du droit, du community management, de la sécu, etc. Bref tu as pas mal de cordes à ton arc. Pourquoi avoir choisi un projet comme celui-là et de t’y consacrer à plein temps ?
Pendant un moment, je jonglais entre Arcadie et d’autres activités mais avec l’affaire Fillon, puis l’affaire Le Roux, j’ai été plus exposée médiatiquement et mécaniquement, j’ai eu plus de travail à faire. Pour le moment, je consacre 75 % de mon temps à Arcadie mais on verra dans quelques mois. De ce que j’en vois, ce n’est pas uniquement la plateforme de données qui intéresse les gens mais aussi les livetweets de séance à l’AN, la pédagogie autour de la politique, de la chose parlementaire, les explications, etc. Je pars du principe que si tu veux faire les choses sérieusement, tu dois y consacrer un certain temps donc j’y passe le temps nécessaire.

La question qui pique : est-ce que ce site serait libre d’accès et public si tu avais réussi à le faire financer par une boite ?
Arcadie a été entièrement financé par mes économies 🙂 Aujourd’hui, la plateforme ne vit que de dons et ne reçoit ni mécénat d’entreprises ni subventions publiques. Pour être honnête, 3 jours avant l’affaire Fillon, je disais à ma meilleure amie que si une boîte me mettait une certaine somme d’argent sur la table, j’étais prête à en céder la propriété. Ce n’est plus le cas aujourd’hui ou alors pour un montant colossal.

Toutes ces informations que tu centralises et rends disponibles avec un moteur de recherche et des filtres que l’on peut croiser, tu les trouves où ?
Sur les sites institutionnels, mais aussi les sites des partis politiques, la presse quotidienne régionale, la presse quotidienne, les blogs mais aussi, parfois, certaines informations me sont remontées en off.

Tu t’appuies donc aussi sur ton réseau de connaissances ?
Ça m’arrive mais je veille à avoir une source sérieuse, officielle ou explicite.

Tu récoltes tout à la main ?
Non, quelle drôle d’idée. J’ai des trackers qui font le boulot à ma place. Je me contente de vérifier que les contenus signalés comme ayant subi une modification correspondent à une réelle modification et pas à un faux-positif. Pour les nouvelles infos, je scrape carrément les sites et je fais le tri.

Les contenus textuels ainsi que les images font l’objet d’une licence Creative Commons CC-BY-NC-SA. mais ce qui fait fonctionner la plateforme, c’est sous quelle licence ?
Aujourd’hui, comme il s’agissait d’un concept entrepreneurial, il a été protégé auprès de l’INPI. Si certaines personnes veulent réutiliser les données, elles peuvent déjà s’appuyer sur les mêmes sources que moi. Le reste est aussi CC-BY-NC-SA.

Est-ce que tu utilises des outils libres pour la plateforme et le blog ou bien est-ce que tu as dû faire des concessions pour diverses raisons ?
La plateforme fonctionne avec Drupal et il y a deux outils qui ne sont pas très « propres » mais pour lesquels, j’ai dû faire des concessions. Le premier est Google Analytics mais je compte m’en débarrasser très bientôt et le second est PayPal mais lui va rester car cela permet à mon expert-comptable, qui maîtrise bien l’interface, de suivre les dons pour procéder aux déclarations.

Pour nos lecteurs les plus techies, comment tout ça tourne en arrière-plan ?
Mes trackers ne sont pas reliés à la plateforme. Au départ, c’était mon idée mais je me suis dit que si les sites sur lesquels je posais mes trackers changeaient, j’allais avoir un souci. Donc, les données sont ajoutées par des CSV que je génère moi-même, grâce à mes outils de collecte. De la même manière, si pour une raison ou pour une autre, la plateforme rencontre un gros problème technique qui nécessiterait de tout supprimer pour reconstruire, j’irais clairement plus vite.

Pour le design, j’ai tout refait avec Bootstrap et je suis aidée par un très bon développeur de chez Makina Corpus, que je sollicite parfois quand je « bugue ». Pour l’administration-système, j’ai tout casé chez Gandi, en Simple Hosting – car je n’ai pas assez de connaissances pour prendre un dédié et y installer Apache Solr, pour améliorer la recherche. Cela demanderait aussi d’autres dépenses.

Et maintenant, la grosse question : que penses-tu du rapport des libristes avec la vie politique ?
La question est compliquée car j’ai peur de paraître condescendante dans ma réponse mais j’aurais tendance à dire que le monde libriste fait parfois preuve de naïveté ou de candeur. On s’y figure que la politique est la recherche du Bien pour le plus grand monde, l’intérêt général, etc. C’est le cas mais parfois, pour y arriver, il faut être capable de biaiser, de louvoyer et cela s’accorde mal avec notre tendance jusqu’au-boutiste. Il ne faut pas voir les choses comme étant toutes noires ou toutes blanches. On a beaucoup de nuances de gris.

Beaucoup de connaissances trop approximatives sur les institutions et les rouages de la politique politicienne peut-être ?
Peut-être et surtout, il faut se blinder. Mon apprentissage politique, je l’ai commencé à l’Hadopi, je suis un peu tombée de mon arbre à ce moment-là et quand j’ai fait mes premiers pas à l’Assemblée Nationale, pour un UMP, on était à peine sorti de la guerre Copé-Fillon. Mine de rien, ça forge et j’avais une place d’autant plus privilégiée que je ne prenais pas les coups. Mais je voyais les autres en prendre et en donner. Alors, j’ai observé, j’ai regardé et j’ai appris.

Dans le film d’Henri Verneuil le Président (1961), le vieux président du Conseil, interprété par Jean Gabin, dénonce la corruption des parlementaires.

Parallèlement, tu as sans doute constaté la grande lassitude et même le dégoût de beaucoup pour le fonctionnement du système politique actuel et la recherche d’alternatives plus « citoyennes », qu’en penses-tu ?
Il y aurait tellement à dire sur certaines initiatives qui se disent vertueuses et sur certains qui veulent nous tromper, en nous faisant croire qu’ils œuvrent pour le bien commun, alors que la seule chose qui compte est leur gloriole personnelle. Je n’ai pas cette prétention, je me suis toujours présentée comme une mercenaire, ne représentant que moi-même et c’est déjà assez de boulot.

On voit que tu maîtrises bien ton affaire, mais comment tu fais pour gérer ça toute seule, ça fait beaucoup pour une seule personne, non ?
Je m’organise, je cale ma vie sur l’activité politique et parlementaire. Par exemple, cette année, je partirai en vacances après la session extraordinaire mais avant les sénatoriales. Comme je n’ai pas de contraintes particulières, je m’en sors bien. J’ai parfois des coups de fatigue comme tout le monde, mais dans l’ensemble, je ne me plains pas.

Tu es très proche du milieu politique dans ce qu’il a de plus institutionnel mais aussi dans ce qu’il a de moins ragoûtant : petits arrangements et grosses corruptions, trafic d’influence et abus de pouvoir, est-ce que ta situation n’est pas un peu dangereuse, du moins parfois pénible ?
Au contraire. Il n’y a rien de plus délicieux que de découvrir un « cadavre » sur quelqu’un qui se montre comme étant vertueux.

On imagine que tu subis des pressions régulièrement, non ?
À l’exception d’une personne qui m’emmerde, pour parler vulgairement, assez régulièrement, les autres me fichent la paix. Avant, je n’étais pas assez importante pour leur faire du tort – pensaient-ils – maintenant, tout le monde sait de quoi il retourne. Il ne faut jamais oublier que la personne la plus dangereuse est celle qui n’a rien à perdre. Aux débuts du projet, j’ai été aimable, j’ai souhaité instaurer un dialogue et je me suis fait piétiner. Maintenant que je montre les dents, bizarrement, certaines personnes ont envie de dialoguer.

Hum on devine que certains partis ou certaines personnalités te donnent envie de leur voler dans les plumes si l’on en croit ta récente intervention à Passage En Scène  où tu dénonces la corruption toujours bel et bien présente à quantité de degrés…
Non, je n’ai pas eu de récriminations. Non pas que ça aurait changé quoique ce soit d’ailleurs.

… mais le projet Arcadie se doit d’être factuel et politiquement neutre, non ?
Les données de la plateforme sont neutres. Moi, non. L’expérience m’a aussi montré qu’en étant totalement neutre, les gens ne montraient qu’un intérêt poli sur Twitter. Mais quand tu commences à l’ouvrir, les choses deviennent intéressantes. Il y aura toujours des gens qui seront gênés par ma démarche. C’est leur problème, pas le mien.

Comment tu tiens ce grand écart ? On t’a probablement déjà accusée de partialité, non ?
Régulièrement. On m’a collé tellement d’étiquettes différentes ces derniers mois que je suis la représentation politique des deux assemblées à moi toute seule. La neutralité n’est pas ne pas taper ou ne se moquer de personne mais bien d’emmerder tout le monde, sans parti pris.

Au moment où tu as lancé le projet Arcadie, il a fallu batailler pour faire reconnaître la légitimité/légalité de ta collecte d’informations, il y avait pas mal de réticences dans le milieu parlementaire. Est-ce que maintenant ça va mieux de ce côté ?
Honnêtement, ça va mieux, aussi parce que les nouveaux députés ont une autre mentalité, donc ils discutent avec moi, ils échangent. Côté institutions, j’estime avoir de bons rapports avec la CNCCFP (la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques).
Avec le recul, je me rends compte que j’ai eu une sorte de procès en légitimité de la part de certaines personnes, parce que je n’avais pas un passif militant pur et dur et que je n’avais pas le cursus classique des politiques. Les gens ne savaient pas dans quelle case me ranger.

« Faire parler les élus malgré eux, grâce à l’open data » Tris Acatrinei, conférence sur la petite corruption au quotidien, Passage en Seine, 2017 (cliquer pour voir la conférence)

Est-ce qu’il arrive que des parlementaires ou ceux qui les entourent fassent appel à toi/à Arcadie comme une ressource fiable et informée ?
Dans le cadre du projet de loi moralisation, la députée LREM Aurore Bergé m’a contactée pour qu’on échange sur le sujet. On s’est donc vues et je lui ai parlé de ce que j’avais constaté comme manquements, ce qui pourrait être amélioré, etc. J’ai aussi discuté avec un autre député LREM concernant sa situation professionnelle. De façon générale, je me tiens à disposition de tous les parlementaires qui souhaitent échanger.

Allez je mets les pieds dans le plat : ton projet a une récente concurrence avec une équipe de journalistes qui prétendent faire à peu près la même chose ?
Ce n’est pas le tout de faire une base de données d’informations : encore faut-il la maintenir à jour et ne pas faire d’erreurs. C’est déjà plus compliqué qu’il n’y paraît. Sur la BDD dont tu me parles, j’ai vu des erreurs mais ça montre qu’il y a des points sur lesquels l’information n’a pas été correctement distribuée. Sur le moment, je l’ai mal pris mais le lendemain, ça m’a fait sourire.

Tu as un statut d’auto-entrepreneuse, mais comment tu peux couvrir les frais du site et rémunérer ton travail ? Seulement par des dons ?
J’évite les dépenses inutiles liés au projet donc les dons arrivent à couvrir les frais de fonctionnement, une gestion de bon père de famille comme on dit. Par ailleurs, et je ne m’en suis pas cachée, il m’arrive de collaborer sur des sujets avec des rédactions. Ainsi, la carte de France du népotisme avec Le Lanceur était un travail rémunéré car il fallait vérifier tous les liens familiaux éventuels entre les parlementaires et leurs collaborateurs. J’aimerais faire d’autres travaux du même genre mais Rome ne s’est pas faite en un jour.

Imaginons que subitement tu aies beaucoup plus de moyens à ta disposition, quel serait le développement dont tu rêves pour le projet Arcadie ?
J’en ai une douzaine en tête ! Je dois n’en choisir qu’un ?

On a envie de souhaiter longue vie au projet Arcadie – et pour ça chacun peut y contribuer financièrement et le faire connaître – mais on te laisse (c’est la tradition ici) le dernier mot :
Je me suis fixé un nouvel objectif : les partis politiques. Si l’objectif mensuel se pérennise, je fais une « petite sœur » à Arcadie car il y a un vrai manque sur le sujet. Je commence à avoir le squelette général en tête mais je vais attendre un peu.

 

Pour aller plus loin




Comment j’ai quitté Google et plaqué Microsoft


En 2015, après une longue période d’hésitation, j’ai sauté le pas. J’ai décidé que Google, Facebook ou encore Microsoft seraient pour moi des connaissances lointaines, et non des compagnons de route.

On a du mal à croire qu’il soit possible d’envisager sérieusement une telle transformation sans se couper du monde et du confort que nous offre le Web. Pourtant, ça l’est.

Nous sommes en juillet 2017. Ça fait deux ans. J’ai mes repères, mes marques et aucune sensation de manque. Lorsque je choisis de faire une entorse à mes principes et d’utiliser Google, ou de démarrer mon PC sous Windows, c’est une option ; j’ai toujours le choix. Je crois que c’est ça, l’idée : avoir le choix. La décentralisation, ce n’est pas juste quitter le navire : c’est choisir sur lequel on embarque en connaissance de cause.

Depuis 2015, alors que la moitié du marché des smartphones est contrôlé par Google et son système d’exploitation Android, que tout le monde connaît GMail, utilise Google Docs, se localise avec Google Maps et partage des choses sur Google+ (lol nope), je n’utilise pas tout cela. Ou plutôt, je n’utilise plus.

Bon, OK, j’ai une chaîne YouTube, donc je mets des vidéos en ligne. Promis, c’est tout. Vous verrez plus bas que même pour gérer mes abonnements YouTube, je me passe de compte Google !

Ni pour mes recherches. Ni pour mes mails. Ni pour partager des photos avec mes ami⋅e⋅s ou pour héberger une page web. Ni pour me géolocaliser. Ni pour faire fonctionner mon smartphone.

Depuis 2015, et quand Skype est le moyen le plus commun de discuter en audio/vidéo, quand choisir un ordinateur se résume à choisir entre Microsoft ou Apple, qu’on utilise le pack Office, voire qu’on est aventureux et qu’on a investi dans un Windows Phone (désolé), je n’utilise pas Microsoft. Ou plutôt, je n’utilise plus. Et même si les hipsters et les web-designers (sont-ce les mêmes personnes ?) investissent dans du matériel Apple, moi, je n’ai jamais touché à ça.

Alors je me suis dit que peut-être, ça vous intéresserait de savoir COMMENT j’ai pu réussir sans faire une syncope. Et comment j’ai découvert des alternatives qui me respectent et ne me traitent pas comme une donnée à vendre.

Allez, ferme Hangout, Messenger, Skype, Whatsapp, viens t’asseoir près du feu, et prends le temps de me lire, un peu. Ouais, je te tutoie, on n’est pas bien, là, entre internautes ?

Chapitre 1 : Pourquoi ?

Normalement, je dialogue avec un mec lambda qui a la critique facile dans mes articles, mais ici, c’est le Framablog ; il faut un peu de prestance. Ce sera donc Jean-Michel Pouetpouet qui prendra la parole. Donc, introducing Jean-Michel Pouetpouet :

« Haha, cocasse, cet individu se prend pour plus grand qu’il n’est et ose chapitrer son contenu tel un véritable auteur »

Oui, c’est plus cool que de mettre juste un « 1. ». Il y a beaucoup à dire, et faire juste un énorme pavé, c’est pas terrible. Puis j’ai l’âme littéraire.

Ce que je pense important de signaler dans ce retour d’expérience, c’est que j’ai longtemps été très Googlophile. Très content d’utiliser leurs outils. C’est joli, c’est simple, c’est très chouette, et tout le monde utilise les mêmes. Et quand on me disait, au détour d’une conversation sur le logiciel libre : « mais Google te surveille, Google est méchant, Google est tout vilain pas beau ! »

Je répondais : « Et il va en faire quoi, de mes données, Google ? Je m’en fous. »

J’étais un membre de la team #RienÀCacher et fier de l’être. Quand je m’étais demandé ce qui se faisait d’autre, j’étais allé sur le site de Framasoft (c’était il y a fort longtemps) et j’avais soupiré « pfeuh, c’est pas terrible comme même ». J’écris « comme même » afin de me ridiculiser efficacement, merci de ne pas commenter à ce sujet.

Puis un jour, au détour d’une Assemblée Nationale, j’ai entendu parler de surveillance généralisée par des boîtes noires. On en a tou⋅te⋅s, je pense, entendu parler.

« Nom d’une pipe, mais ceci n’a aucun lien avec la dégooglisation ! »

Tut-tut. C’est moi qui raconte. Et tu vas voir que si, ça a à voir ; du moins, dans mon esprit de jeune chèvre numérique.

Parce que quand j’ai entendu parler de ça, je me suis dit « mince, j’ai pas envie qu’on voie tout ce que je fais sous prétexte que trois clampins ont un pet au casque ». D’un seul coup, mon « rien à cacher » venait de s’effriter. Et il s’est ensuite effondré tel un tunnel mal foutu sous une montagne coréenne dans un film de Kim Seong-hun.

Mes certitudes sur la vie privée en ligne, allégorie

Dans ma tête, une alarme pleine de poussière s’est mise à hurler, une ampoule à moitié grillée a viré au rouge, et je me suis soudain inquiété de ma vie privée en ligne.

J’ai commencé à voir, la sueur au front, circuler des alertes de La Quadrature du Net concernant le danger potentiel que représenterait un tel dispositif d’espionnage massif. Et j’ai fini par tomber sur plusieurs conférences. Plein de conférences. Dont la fameuse « sexe, alcool et vie privée » : une merveille.

Après cela, deux conclusions :

  • La vie privée, c’est important et on la laisse facilement nous échapper ;
  • Les grandes entreprises qui ont mainmise sur ta vie privée, c’est pas tip top caviar.

Mais d’abord, avant de parler Google ou Facebook, il me fallait fuir le flicage étatique automatisé. Alors j’ai acheté une Brique Internet (powered by le génial système d’auto-hébergement YunoHost) et j’ai adhéré à l’association Aquilenet.

Brique Internet
Une Brique Internet dans son milieu naturel

Aquilenet, c’est un FAI (Fournisseur d’Accès à Internet) géré par des copains qui n’ont rien de mieux à faire que d’aider les gens à avoir accès à un Internet neutre, propre. J’ai donc souscrit à un VPN chez eux (chez nous, devrais-je maintenant dire). Pour avoir une protection contre les boîtes noires qui squatteront un jour (peut-être, vu comme ça avance vite) chez SFR, Free, Bouygues, Orange, et voudront savoir ce que je fais.

« Mais bon », me suis-je dit, « c’est très cool, mais ça n’empêche pas Google et Facebook de me renifler le derrière tout ça ».

Et j’ai entrepris la terrible, l’effroyable, l’inimaginable, la mythique, l’inaccessible… DéGooglisation.

Chapitre 2 : Poser les bases – Linux, Firefox, Searx

2.1/ Microsoft, l’OS privateur

Étrangement, le plus simple, c’était de dire au revoir à Microsoft.

Se dire que son système entier est couvert de trous (aka backdoors) pour laisser rentrer quiconque Microsoft veut bien laisser entrer, ce n’est pas agréable. Savoir que la nouvelle version gratuite qu’il te propose est bourrée de trackers, c’est pas mieux.

Pour bien comprendre, imagine que ton ordinateur soit comme un appartement.

Donc, on te vend un appartement sans serrure. On te dit « eh, vous pouvez en faire installer une si vous le voulez, mais alors, il faudra faire appel à une entreprise ».

Option n°1 : je n’ai pas besoin de serrure

« Je m’en fiche. J’ai confiance, et je sais quand je pars et comment je pars. Personne ne voudra entrer chez moi. »

Vraiment, est-ce qu’on peut croire une seconde à cette phrase ? Tu y vas au feeling ? Y a pas de raison que quelqu’un ne veuille entrer ? Tu partiras au travail ou en vacances le cœur léger ?

Option n°2 : je fais poser une serrure par un serrurier qui met un point d’honneur à ne pas me laisser voir son intervention

« Hop, me voilà protégé ! »

Et s’il garde un double de la clé ?
S’il décide de faire une copie de la clé et de l’envoyer à quelqu’un qui veut entrer chez vous sur simple demande ?

Elle fait quoi exactement cette serrure ?

Elle ferme vraiment ma porte ?

Option n°3 : je connais un gars très cool, il fabrique la serrure, me montre comment il la fait, et me prouve qu’il n’a pas de double de ma clé

« Je connais ma serrure, je connais ma clé, et je sais combien il en existe »

Ok, c’est super ça ! Dommage : je l’ai fait dans un appartement dont les murs sont en papier mâché. En plus, j’ai une fenêtre pétée, tout le monde peut rentrer. J’avais pas vu quand j’ai pris l’appart’. Bon, je rappelle mon pote, faut inspecter tout l’appartement et faire les travaux qui s’imposent.

Option n°4 : et si je prenais un appartement où tout est clean et sous contrôle ?

Ah, bah de suite, on se sent mieux. Et c’est ça l’intérêt d’un système d’exploitation (OS) libre. Parce que c’est bien sympa, Microsoft, mais concrètement, c’est eux qui ont tout mis en place. Et quand on veut voir comment c’est fait, s’il y a un vice caché, c’est non. C’est leur business, ça les regarde.

Alors pourquoi leur faire confiance ? La solution, c’est le logiciel libre : tout le monde peut trifouiller dedans et voir si c’est correct.

Comme point d’entrée Ubuntu (et surtout ses variantes) est un OS très simple d’accès, et qui ne demande pas de connaissances formidables d’un point de vue technique.

« Huées depuis mon manoir ! Ubuntu n’est pas libre, il utilise des drivers propriétaires, et de surcroît, l’ensemble est produit par Canonical ! Moi, Jean-Michel Pouetpouet, j’utilise uniquement FreeBSD, ce qui me permet d’avoir une pilosité soyeuse ! »

C’est super cool, mais FreeBSD, c’est pas vraiment l’accessibilité garantie et la compatibilité parfaite avec le monde extérieur (mais ça a plein d’avantages, ne me tuez pas, s’il vous plaît). Ubuntu, c’est grand public, et tout public. C’est fait pour, excusez-les du peu !

Dans la majorité des cas, il suffit d’une installation bien faite et tout ronronne. Le plus compliqué, c’est finalement de se dire : « allez, hop, j’y vais ».

En 2016, je jouais à League of Legends et à Hearthstone sur mon PC sous Linux. Je n’y joue plus parce que je ne joue plus. Mais j’y regarde les même lives que les autres, visite les mêmes sites web.

Et j’utilise mutt pour avoir moi aussi une pilosité soyeuse.

« Comme quoi, vous n’êtes finalement qu’un traître à vos valeurs ! Vous faites l’apologie du terrorisme du logiciel propriétaire, vous faites des trous dans votre coffre fort, quelle honte, quel scandale, démission ! »

J’entendais moins ce type de commentaires concernant Pokémon Go qui envoie des données à Nintendo. Comme quoi, les compromis, ça n’est pas que mon apanage.

Soit, je passerai sur ces menus détails ! Mais pourriez-vous cesser de tergiverser en toute véhémence avec un individu dont l’existence est factice ?

Non.

Une fois sous Ubuntu, le nom de mes logiciels change. Leur interface aussi. Et oui, il faut le temps de s’habituer. Mais qui ne s’est pas senti désemparé devant Windows 8.1 et son absence de bureau ? Un peu de temps d’adaptation. Et c’est tout.

Bureau Xubuntu
On est pas bien, là ? (Xubuntu 17.04) [Fond d’écran par Lewisdowsett]
Certes, parfois, la compatibilité n’est pas au rendez-vous. Soit on se bat, soit on se résout à faire un dual-boot (deux systèmes d’exploitation installés) sur son ordinateur, soit on virtualise (l’OS dans l’OS). C’est ce que j’ai fait : j’ai un Windows qui prend un tiers de mon disque dur, tout formaté et tout vide ou presque.

Ce filet de sécurité en place, la majorité du travail doit être fait sous Linux. Une fois qu’on en a l’habitude, un retour sous Windows n’est même plus tentant.

2.2/ La recherche : fondamental

Google, en premier lieu, c’est quoi ?

Un moteur de recherche. Un moteur de recherche qui sait absolument tout sur ce que je cherche. Parce que j’utilise un compte. Avec un historique. Parce qu’il utilise des trackers. Parce qu’il retient mon IP.

On parle donc d’une entreprise qui sait qui je suis, ce que je cherche, sur quoi je clique. Une entreprise qui détermine ma personnalité pour vendre le résultat à des régies publicitaires.

Non, désolé, ça ne me convient pas. Je n’ai pas envie qu’une entreprise puisse me profiler à tel point qu’elle sache si j’ai le VIH avant que j’en sois informé. Qu’elle sache que je déménage. Que je cherche un emploi. Où. Si je suis célibataire ou non. Depuis quand. Quel animal de compagnie j’ai chez moi. Qui est ma famille. Quels sont mes goûts.

Ah non, vraiment, une seule entité, privée, capitaliste, qui vit de la vente de pub, et qui me connaît aussi bien, ça ne me plaît pas.

« Et quelle fut ta réponse à cette situation ? »

J’utilise Bing.

« ?! *fait tomber son monocle dans sa tasse de thé* »

Non, pas du tout.

J’utilisais au départ Startpage. Le principe est simple : ce moteur de recherches ne garde aucune donnée, et envoie la recherche à Google avant d’afficher le résultat.

La différence est énorme. Google sait que Startpage a fait une recherche. Mais il ne sait pas QUI a utilisé Startpage. Il ne sait pas QUI je suis, juste ce que je cherche. Google ne peut plus me profiler, et moi, j’ai mes résultats.

Et voilà, je n’utilise plus Google Search. Juste comme ça. Pouf.

Maintenant, j’utilise Searx, hébergé sur les serveurs d’Aquilenet. Parce que c’est encore mieux.

Searx @Aquilenet
On searx et on trouve !

Il existe aussi Framabee qui utilise également Searx, ou encore Qwant (mais c’est pas du libre, et c’est une entreprise, alors j’aime moins).

À noter que cette étape n’est pas du tout dure à franchir : nombreux sont celleux qui utilisent Ecosia au lieu de Google, ou Duck Duck Go, et ne se sentent pas gênés dans leur recherche quotidienne de recettes de crêpes.

2.3/ Navigateur web et add-ons

Je naviguais avec Google Chrome. Comme beaucoup de monde (en dehors des admirateurs d’Internet Explorer, dont je ne comprendrai jamais les tendances auto-mutilatoires).

Je suis donc passé sous Firefox, et avec lui, j’ai ajouté pléthore d’extensions orientées vers la protection de la vie privée.

La liste (ou une bonne partie de celle-ci) est disponible sur le blog d’Aeris, que je vais donc citer en coupant allègrement dans le tas (l’article : https://blog.imirhil.fr/2015/12/08/extensions-vie-privee.html) :

Au-revoir-UTM est une extension très simple qui va virer automatiquement les balises « utm » laissées par les régies publicitaires ou trackers pour savoir d’où vous venez lors de l’accès au contenu.

 

Decentraleyes remplace à la volée les contenus que vous auriez normalement dû aller chercher sur des CDN centralisés et généralement très enclins à violer votre vie privée, tels Google, CloudFlare, Akamai et j’en passe.

 

Disconnect supprime tout le contenu traçant comme le contenu publicitaire, les outils d’analyse de trafic et les boutons sociaux.

 

HTTPS Everywhere force votre navigateur à utiliser les versions HTTPS (donc chiffrés) des sites web que vous consultez, même si vous cliquez sur un lien HTTP (en clair).

 

Pure URL, nettoie vos URL du contenu traçant.

 

uBlock Origin, qu’on ne présente plus, un super bloqueur de publicité et de traqueurs, juste un must-have.

 

Blender est une extension qui va tricher sur l’identité de votre navigateur, pour tenter de le faire passer pour celui le plus utilisé à l’heure actuelle, et ainsi se noyer dans la masse.

 

Smart Referer permet de masquer son référent. En effet, par défaut, votre navigateur envoie au serveur l’URL du site duquel vous venez. L’extension permet de remplacer cette valeur par l’URL du site sur lequel on va, voire carrément de supprimer l’information.

 

uMatrix est THE extension ultime pour la protection de sa vie privée sur Internet. Elle va en effet bloquer tout appel externe au site visité, vous protégeant de tout le pistage ambiant du net.

uMatrix
uMatrix : filtre par type de contenu et par domaine !

Une fois qu’on est à l’aise avec ça, on a déjà un meilleur contrôle de sa présence en ligne et des traces qu’on laisse.

Chapitre 3 : OK Google, déGooglise-toi

3.1 : Google Docs, Google Sheets, Google machins, le pack, quoi.

Il n’y a rien de plus simple que de se débarrasser de Google Docs. Des outils d’aussi bonne qualité sont disponibles chez Framasoft. Rien à installer (sauf si vous souhaitez héberger vous-même le contenu), accessible à tout le monde. Et en plus, depuis quelques temps, il y a Framaestro, le Google Drive de Framasoft. Tout comme Google. Sauf que…

… Bah c’est Framasoft, quoi. Si c’est la première fois que vous entendez ce nom, déjà : bienvenue. Ensuite, Framasoft ne va pas faire attention à vos données. Ou plutôt si, mais au sens de « les protéger ». Il s’agit de bénévoles qui souhaitent proposer des outils de qualité ; Framasoft s’en fiche de ce que vous saisissez dans vos documents. Et ne s’en approprie pas les droits ; Google, oui.

Pour trouver l’outil qu’il vous faut, rendez-vous simplement sur https://degooglisons-internet.org/alternatives et choisissez la ligne correspondant à l’outil Google dont vous souhaitez vous débarrasser.

3.2 : Google Maps / Google Street View

Google Maps peut être aisément remplacé par Open Street Map. Sur votre smartphone, l’application OSMAnd~ fait très bien son travail.

Pour Google Street View, Open Street Maps a lancé Open Street Cam. L’idée est tout bonnement GÉ-NIALE : on a pas les moyens de faire se promener une « OSM Car » ? Alors les utilisateurs seront l’OSM Car !

Lorsque vous prenez votre voiture, vous activez l’application (https://github.com/openstreetcam/android/ ou https://play.google.com/store/apps/details?id=com.telenav.streetview) et celle-ci prend des photos à intervalles réguliers en les géolocalisant ! Et voici comment on fait du Street View libre, communautaire et participatif !

3.3 : Picasa, Dropbox, Wetransfer

Moins utilisés que mes précédents amis mais tout de même existants, ces outils de stockage en ligne d’images ou de fichiers sont tenus par des entreprises en lesquels on ne peut pas avoir confiance.

Les services d’hébergement de fichiers ne manquent pas. Et ceux que je vais proposer ici n’ont pas mainmise sur vos fichiers.

Ça n’a l’air de rien comme ça, mais une entreprise qui peut regarder vos fichiers, est-ce que ce n’est pas problématique ? Lui avez-vous donné l’autorisation de s’introduire ainsi dans vos échanges de données ?

Pour les albums, au revoir Picasa, préférez Piwigo.

Pour un simple partage d’image(s), pourquoi pas Framapic ou Lutim ?

Pour stocker vos fichiers et les envoyer, dégagez WeTransfer de là et choisissez plutôt Framadrop. Abandonnez votre Dropbox, et rendez-vous sur un Nextcloud installé chez un pote ou une asso (ou directement chez vous ?) !

Les alternatives sont là, et sont bien plus diverses. La seule nuance, c’est que vous ne les connaissez pas, et n’avez pas le réflexe de les chercher.

Dans mon cas, ayant une Brique (je vous ai dit que j’avais une Brique ?), j’utilise Jirafeau pour héberger mes images, Nextcloud pour le reste. Ça me va très bien, et au moins, ça reste chez moi.

3.4 : Discuter en instantané

Rendez-vous sur Jabber (XMPP). Skype ne vous respecte pas, Hangout non plus. Messenger ? Pfeuh-cebook ! La messagerie directe de Twitter ? Ne comptez pas trop protéger vos données là-dessus non plus. Whatsapp ? C’est encore Facebook derrière !

Au lieu d’installer Google Hangouts et d’utiliser votre compte Google, installez Xabber ou Conversation sur votre téléphone et créez un compte Jabber. Vous voici à utiliser XMPP, le même protocole que derrière Hangout ou Messenger, mais sans la méchante boîte qui vit de publicité ciblée et de vente de données personnelles.

Au lieu d’utiliser Skype, pourquoi pas Tox ? Ou en ligne, vous pouvez utiliser Vroom, et même Framatalk !

J’ai un peu de mal à conseiller Telegram car récemment, la sécurité qu’il promet a été remise en question, et qu’il s’agit toujours d’une entreprise qui peut vouloir jouer avec vos données.

3.5 : GMail

On attaque le côté le plus effrayant : les e-mails. Je ne sais pas pour vous, mais moi, je n’imaginais pas pouvoir dire au revoir à mon GMail.

Cela faisait 5 ans que TOUS mes échanges se faisaient par son biais. Que tous mes comptes, sur tous les sites où j’étais inscrit, connaissaient cet e-mail comme étant le mien.

En réalité… je me suis rendu compte que mes mails déjà envoyés étaient sacrifiables, et que ceux déjà lus l’étaient également. Je me suis rendu compte que je recevais plus de spam et de newsletters (auxquelles je n’étais pas forcément inscrit) que de nouvelles de mes proches.

Et puis surtout, bon sang : Google lisait mes mails. Une entreprise lisait ma correspondance privée pour mieux me connaître. Pour mieux me profiler. Pour me vendre à des régies publicitaires. Non, ce n’est pas acceptable.

Étant alors devenu membre d’un FAI associatif, je lui ai confié mes mails. Mais avant cela, j’avais prévu de me tourner vers Protonmail. C’est certes une entreprise, mais vos messages sont chiffrés, et il n’est pas possible (dans le cas où c’est bien fait ;)) pour l’entreprise de lire vos mails. Contrairement à Google qui lit bien tout ce qu’il veut.

J’y reviens, mais… De la publicité ciblée à partir de vos échanges privés. Comment peut-on accepter ça ?

Protonmail est un service qui m’a l’air fiable. Ça reste néanmoins une entreprise, dont le code est partiellement consultable. Si vous souhaitez abandonner Google, c’est une alternative viable.

Envoyez un mail à tous vos contacts, mettez (ou non) en place une réponse automatique Google indiquant « voici ma nouvelle adresse e-mail », et changez votre adresse e-mail sur tous les sites la connaissant. Après tout, vous l’aviez peut-être fait avec votre adresse @aol.fr ou @wanadoo.fr sans vous interroger plus longtemps sur ce changement.

En consultant ses mails GMail de temps en temps, on peut en voir un qui s’est perdu et indiquer la bonne adresse e-mail à laquelle écrire.

Vous verrez, contrairement à ce qu’on croit, c’est simple, rapide, et on ne rencontre quasiment aucun obstacle.

Je ne sais pas si je vous ai dit que j’avais une brique Internet chez moi, d’ailleurs ; mais du coup, maintenant, elle héberge aussi une partie de mes e-mails (je jongle entre les adresses). Vous imaginez ? Ces mails sont stockés directement dans un petit boîtier posé par terre chez moi. Nulle part ailleurs !

3.6 : YouTube

Je poste des vidéos sur YouTube, étant vidéaste. Bon, OK. Mais je n’ai pas pour autant envie d’utiliser un compte Google le reste du temps. Et je ne voulais évidemment pas perdre mes abonnements.

La solution à cela ? L’oublié flux RSS. Comme quand on suivait les blogs, tu te rappelles ?

Google propose de récupérer tous ses abonnements YouTube au format .opml. Avec cette solution, on peut être notifié des sorties par un simple lecteur de flux RSS.

Pour celleux qui n’auraient pas connu ou utilisé RSS à l’époque où c’était la star d’Internet, il s’agit, en gros, d’abonnement à des sites/blogs. Dès qu’un nouvel article paraît, vous le recevez sur votre lecteur de flux RSS, où se rassemblent vos abonnements.

J’ai donc installé FreshRSS sur ma Brique (vous saviez que j’avais une brique ?), et y ai importé ce fameux fichier .opml. J’en ai profité pour ajouter Chroma, qui sort sur Dailymotion (eh ouais : on peut croiser les flux !). Et j’ai une sorte de boîte mail de mes abonnements vidéo ! C’est beau, non ?

Des abonnements YouTube sans compte YouTube <3

J’y ai ajouté un plugin nommé « FreshRSS-Youtube » qui me permet d’ouvrir les vidéos YouTube directement dans mon lecteur RSS. Donc j’ai un YouTube sans compte, avec juste mes abonnements, le tout chez moi.

Histoire de simplifier tout ça, j’ai développé une extension Firefox qui permet de s’abonner plus facilement à une chaîne en RSS. Il est disponible ici

Récupérer un flux RSS avec RSS-Tube !

3.7 : Android

Ton smartphone est sous Android ? Chouette. Mais Android utilise en permanence des services Google. Pour te géolocaliser, pour faire fonctionner tes applications, pour t’entendre quand tu chuchotes sous la couette un « OK, Google ».

Au début, j’ai été dérouté par cette prise de conscience. Alors j’ai simplement abandonné l’idée d’avoir un smartphone. J’ai acheté un téléphone tout pourri-pourrave pour quelques 30€ qui envoyait des SMS, recevait des MMS quand il était de bonne humeur, et téléphonait. C’était tout. Il y avait aussi le pire appareil photo qu’on ait vu depuis 2005.

Puis, un jour, au hasard d’une rencontre, on m’a parlé de Replicant. J’ai regardé, et j’ai constaté que ce n’était malheureusement pas compatible avec le Samsung Galaxy S3 Mini que j’avais abandonné précédemment.

Le hasard a fait le reste.

Un jour, j’ai commandé un t-shirt chez la Free Software Foundation Europe et reçu un papier « Free your Android ! » dans le colis.

En allant sur leur site, j’ai pu découvrir CyanogenMod (devenu maintenant LineageOS). Un Android, mais sans Google, créé par la communauté pour la communauté. Comme d’habitude, tout n’est pas tout blanc, mais c’est toujours mieux que rien.

Je l’ai installé (en suivant simplement des tutos, rien d’incroyable), installé F-Droid (qui remplace Google Play) pour télécharger les applications dont j’avais besoin, et j’installe directement les fichiers .apk comme on installe un .exe sur son Windows ou un .deb sur son Ubuntu.

CyanogenMod
Mon téléphone sous CyanogenMod 13

Conclusion

Bravo. Si vous êtes arrivé jusque là sans tricher, vous avez le droit de vous féliciter. J’espère que vous n’avez pas trouvé le temps trop long !

Courage, plus que quelques lignes. Les dernières pensées.

Au final, ce qui ressort de mon expérience, c’est que me préparer psychologiquement à quitter Google et Microsoft m’a pris plus de temps que pour m’en passer réellement, trouver des alternatives, et m’y faire.

On n’a pas besoin d’eux. Les alternatives existent, sont nombreuses, variées, et nous respectent pour ce que nous sommes : des êtres humains, avec des droits, qui souhaitons simplement utiliser Internet pour notre plaisir personnel quotidien.

Je pense que j’ai oublié plein de choses. Je pense que de nouveaux outils grandissent chaque jour et attendent qu’on les découvre.

En parallèle de tout ça, j’ai appris beaucoup sur l’auto-hébergement. J’ai aussi beaucoup appris sur l’anonymat, sur le chiffrement, sur le fonctionnement d’Internet. J’ai rejoint une association formidable, et en m’intéressant à la technique et au numérique, j’ai fait des rencontres nombreuses et toutes plus géniales les unes que les autres.

Je vous ai dit que quand j’ai commencé tout ça, je ne savais pas faire autre chose qu’un « apt-get install » sous GNU/Linux ? Que j’avais une peur bleue du code (malgré ma formation dans ce domaine) ?

Maintenant, j’en fais, j’en lis, et j’en redemande.

Mon Internet est propre. Ma vie privée, si elle n’est pas à l’abri, reçoit le maximum que je peux lui donner. Je vis d’outils décentralisés et d’auto-hébergement.

DÉGOOGLISONS L’INTERNET.

With Datalove,
Korbak <3