S’il te plaît… dessine-moi une ville libre

Sophiea - CC byUne « ville libre » vous en rêviez ? Vancouver tente dès aujourd’hui de le réaliser.

Il convient bien entendu de s’entendre sur ce qu’est, ou plutôt pourrait, être une « ville libre ». Mais la motion, présentée il y a peu au conseil municipal de la plus grande cité de Colombie-Britannique (Canada), dessine les contours d’un séduisant possible « vivre ensemble urbain » du futur[1].

Au menu, entre autres choses : interopérabilité, standards ouverts, logiciels libres, mises à disposition des données, et incitation citoyenne à s’approprier ces outils et informations pour créer de nouveaux services.

Libres enfants de Vancouver, vous en avez de la chance. Parce que si ce texte se trouvait adopté vous grandiriez alors dans un monde plus ouvert et plus juste, que vos parents n’auraient pas même pu imaginer il y a à peine dix ans de cela.

PS1 : Pour aller plus loin, on pourra parcourir l’excellent article de Fabrice Epelboin (ReadWriteWeb) Qui écrira la démocratie électronique de demain ? qui relate les avancées américaines tout en se désolant à juste titre de la situation française.

PS2 :Vidéo YouTube de la lecture publique de la motion à la mairie.

Vancouver ouvre l’âge de la ville Open Source

Vancouver enters the age of the open city

David Eaves – 14 mai 2009 – Blog
(Traduction Framalang : Claude et Don Rico)

La municipalité de Vancouver a planifié une réunion du conseil au cours de laquelle a été lue la motion suivante :

Déclaration de motion

Open Data, Standards Ouverts et Open Source
Auteur : Mme la conseillère municipale Andrea Reimer
Intercesseur: Mme la conseillère

Attendu que la Ville de Vancouver légifère loyalement au sein du City Hall (NdT : la mairie) à l’écoute des citoyens et des sollicitations relatives à leurs idées, propositions et énergie créatrice ;

Attendu que les municipalités du Canada ont l’opportunité de réduire fortement leurs dépenses en partageant et soutenant les logiciels qu’elles utilisent ou créent ;

Attendu que la valeur absolue des données publiques est maximisée lorsqu’elle est fournie gratuitement ou, si nécessaire, pour un coût minimal ;

Attendu que lorsque les données sont partagées librement, les citoyens ont la possibilité de les utiliser et de les transformer, favorisant ainsi la création d’une cité plus dynamique économiquement et plus respectueuse de l’environnement ;

Attendu que Vancouver a besoin de chercher des opportunités de création d’activité économique et de partenariat avec les secteurs technologiques innovants ;

Attendu que l’adoption des standards ouverts facilite la transparence, l’accès aux informations de la ville par les citoyens,(attendu) qu’ils améliorent la coordination et l’efficacité des relations municipales avec leurs partenaires fédéraux et provinciaux ;

Attendu que l’ICIS (NdT : Integrated Cadastral Information Society pour Système d’information cadastral) est une organisation à but non lucratif créé en partenariat avec les gouvernements locaux, les gouvernements provinciaux et les principaux services publics de Colombie Britannique afin de partager et intégrer les informations géographiques, à laquelle adhèrent 94 % des gouvernements locaux de Colombie Britannique, mais pas Vancouver ;

Attendu que l’innovation informatique peut améliorer les communications entre citoyens, renforcer l’image d’une ville créatrice et innovante, améliorer la fourniture des services, aider les citoyens à s’autogérer et résoudre leurs problèmes, mais aussi créer un sentiment plus fort d’engagement civique, de communauté et de fierté ;

Attendu que la ville de Vancouver possède d’incroyables ressources de données et d’informations, et qu’elle a récemment reçu le prix Best City Archive of the World (meilleures archives municipales du monde).

En conséquence, qu’il soit assuré que la ville de Vancouver approuve les principes suivants :

– Données accessibles et ouvertes : la ville de Vancouver partagera librement avec les citoyens, les entreprises et les autres juridictions la plus grande quantité de données possible en respectant la vie privée et la sécurité.
– Standards Ouverts : La ville de Vancouver adoptera le plus rapidement possible les standards ouverts en vigueur pour les données, documents, cartes et autres formats de diffusion.
– Logiciels Open Source : la ville de Vancouver, au moment du remplacement des logiciels existants ou de l’étude de nouvelles applications, mettra les logiciels Open Source à pied d’égalité avec les systèmes commerciaux au cours de la passation de marché.

En conséquence, dans cette volonté de favoriser les données ouvertes, la ville de Vancouver :

– Identifiera les opportunités immédiates permettant une plus grande distribution de ses données.
– Indexera, publiera et syndiquera ses données sur l’Internet au moyen des standards, interfaces et formats ouverts en vigueur.
– Mettra en place les accords appropriés en vue du partage de ses données avec l’ICIS (Integrated Cadastral Information Society) et encouragera l’ICIS à partager ses données avec le grand public.
– Développera un plan de numérisation et distribuera librement les archives disponibles au public.
– S’assurera que les données fournies à la ville par des tierces parties (développeurs, prestataires, consultants) sont libres, dans un format ouvert en vigueur, et non soumises à des droits d’auteurs ou aux lois du copyright, exception faite d’empêchement pour considérations légales.
– Mettra sous licence toutes les applications logicielles développées par la ville de Vancouver de sorte qu’elles pourront être utilisées par les autres municipalités, les entreprises et le public sans restriction.

En conséquence, le City Manager (NdT : le gérant municipal) aura pour tâche de développer un plan d’action en vue de la mise en application du texte ci-dessus.

Nous sommes nombreux à avoir travaillé d’arrache-pied pour mettre en place cette motion. Même si plusieurs villes comme Portland, Washington DC ou Toronto, ont mis en œuvre certaines des idées défendues dans cette motion, aucune ne l’avait codifié ou n’avait été aussi claire et explicite dans ses intentions.

Je vois certainement cette motion comme la pierre angulaire d’une transformation de Vancouver en ville ouverte (NdT : Open City), ou comme le formule mon ami Surman, en ville qui pense comme le Web.

À plus haut niveau, l’objectif qui anime cette motion est de permettre aux citoyens de créer, concevoir et contrôler l’expression virtuelle de leur ville afin qu’ils puissent en retour influer sur la ville réelle et physique.

Dans la pratique, je crois que cette motion va accentuer plusieurs résultats :

  • De nouveaux services et programmes : les données étant ouvertes, partagées et possédant des APIs (interfaces utilisateurs) dédiées, nos concitoyens codeurs vont créer des applications Web qui faciliteront leur vie (et celle des autres), les rendront plus efficaces et plus plaisantes.
  • La possibilité de piocher dans la longue traîne de l’analyse politique publique : plus les habitants de Vvancouver consulteront les données, les cartes et les autres informations de la municipalité, plus ils remarqueront les lacunes, les problèmes et autres difficultés, d’où un potentiel d’économie d’argent, d’amélioration des services et, de manière plus générale, d’édification d’une ville plus puissante.
  • La création de nouvelles entreprises, rendre la ville plus attractive pour les compétences : comme la ville partage plus de données et utilise plus de logiciels Open Source, les nouvelles entreprises créant du service autour de ces données vont éclore. De manière plus générale, je pense que cette motion, au fil du temps, va attirer le talent à Vancouver. Selon Paul Graham, les grands programmeurs veulent de bon outils et des défis intéressants. Nous leur offrons les deux: le défi d’améliorer la ville où ils vivent ainsi que les outils et données pour les assister.

Ceux qui souhaiteraient assister au conseil municipal afin de soutenir cette motion trouveront les détails ici. La réunion du conseil est Mardi 19 Mai à 14 heures. Vous pouvez aussi voir la séance en direct.

Ceux qui veulent écrire une lettre pour soutenir la motion peuvent l’envoyer à cette adresse.

Notes

[1] Crédit photo : Sophiea (Creative Commons By)




Sans les « pirates » l’offre de musique légale risque de prendre l’eau

Mikebaird - CC byAlors qu’en ce moment même est débattu pour la deuxième fois à l’Assemblée nationale le projet de loi Création & internet, que le gouvernement veut imposer en dépit des nombreuses voix qui s’élèvent contre dans le monde de l’Internet (Quadrature du Net, Free, pétition de SVM) chez les artistes (lettre ouverte de personnalités du cinéma, producteurs indépendants de musique) des et même dans les rangs de la majorité, il n’y a qu’à se pencher pour trouver des éléments invalidant les contre-vérités dont les pro-Hadopi nous rebattent les oreilles.[1]

On sait que ce projet de loi, sous prétexte de défendre la création et les artistes, vise à maintenir sous perfusion le monopole de majors et de producteurs dont le modèle commercial obsolète est condamné, et l’on peut aisément avancer que depuis le début, les adversaires du téléchargement dit "illégal" et le gouvernement qui va dans leur sens se trompent de débat.

Plusieurs études ont montré que depuis le début des années 2000, alors qu’explosait le téléchargement par réseaux P2P, les ventes de musique et de DVDs, la fréquentation des salles de concerts et de cinéma n’avait cessé de croître.

Le gouvernement hollandais l’a d’ailleurs bien compris, et déclaré légal le téléchargement gratuit d’œuvres sous copyright, après qu’un rapport avait montré que les échanges de musique et de films par peer-to-peer étaient bénéfiques à l’industrie du divertissement.


Par ailleurs, une étude norvégienne a démontré que les téléchargeurs sont aussi ceux qui achètent le plus de musique disponible au téléchargement payant.

C’est donc la traduction d’un billet détaillant cette étude que nous vous proposons ici pour prouver, s’il en était encore besoin, que le projet de loi Création & Internet, s’il est adopté, sera, en plus d’être coûteux, inepte, injuste et obsolète, complètement inutile.

Étude : Les pirates sont aussi les plus gros acheteurs de musique. Réponse des labels : Mais bien sûr !

Study: pirates biggest music buyers. Labels: yeah, right

Jacqui Cheng – 20 avril 2009 – Ars Technica
(Traduction Framalang : Tyah, Olivier, Don Rico)

D’après une récente étude norvégienne, ceux qui téléchargent de la musique "gratuitement" sur les réseaux P2P (peer-to-peer, ou poste à poste) sont plus enclins à acheter légalement leur musique que ceux qui ne s’écartent pas du droit chemin. Les labels de musique, cependant, ne veulent pas y croire.

Selon une étude de la BI Norwegian School of Management, ceux qui téléchargent des copies illégales de musique sur les réseaux P2P sont les plus gros consommateurs de musique légale. Les chercheurs ont examiné les habitudes de téléchargement de plus de 1 900 internautes âgés de plus de quinze ans, et concluent que les habitués du téléchargement illégal de musique sont significativement plus enclins à acheter de la musique que ceux qui n’utilisent pas les réseaux P2P.

Sans surprise, les conclusions de la BI établissent que les 15-20 ans sont plus enclins à payer pour télécharger de la musique numérique qu’à acheter des CDs, même si la plupart d’entre eux ont acquis un CD au cours des six derniers mois. Cependant, quand on arrive aux échanges par P2P, il semblerait que ceux battant pavillon noir sont aussi les clients les plus enthousiastes de sites comme iTtunes et Amazon MP3. BI affirme ainsi que ceux qui déclarent télécharger de la musique illégalement et "gratuitement" consomment dix fois plus en musique légale que ceux qui ne téléchargent jamais illégalement. La traduction automatique de Google de la déclaration d’Auden Molde de la Norwegian School of Management à l’Aftenposten dit ainsi : "Le plus surprenant reste la très importante proportion de téléchargement légal".

Le label EMI émet toutefois des doutes sur les statistiques de la BI. Bjørn Rogstad de EMI déclare à l’Aftenposten que les résultats laissent à penser que le téléchargement gratuit stimule le téléchargement payant, mais rien n’est moins sûr. "Si une chose est sûre, c’est que la consommation de musique augmente alors que les revenus diminuent. La seule explication est que le téléchargement illégal est plus important que le téléchargement légal", poursuit-il.

En rejetant ainsi les résultats de l’étude, Rogstad ne tient pas compte du fait que l’Internet a considérablement modifié la façon d’acheter de la musique. Les labels de musique ne vendent plus les albums complets par camions entiers comme c’était le cas avec les supports physiques, ils vendent aujourd’hui de gros volumes de chansons individuelles, de morceaux choisis. Le vieux format de l’album se meurt à cause de la vente de musique sur Internet, ce n’est un secret pour personne, et ça explique en grande partie la baisse générale du chiffre d’affaire de la musique.

Le rapport de la BI corrobore celui de la branche canadienne de la RIAA, la Canadian Record Industry Association, publié en 2006. À l’époque, l’organisme conclut que les utilisateurs des réseaux P2P achètent aussi plus de musique que l’industrie ne veut l’admettre, et que les réseaux P2P ne sont pas la cause principale de la baisse des ventes de musique. 73% des participants à l’étude de la CRIA déclaraient acheter la musique après l’avoir téléchargée illégalement, alors que si les non-"pirates" n’achetaient pas de musique, c’était simplement par paresse.

Notes

[1] Crédit photo : Mikebaird (Creative Commons By)




Le jour où la suite bureautique MS Office devint fréquentable ?

Kevin N. Murphy - CC byLe 28 avril prochain, Microsoft devrait mettre en ligne sa nouvelle mise à jour majeure de la suite Office 2007 (dans le vocable Microsoft, on parle de Service Pack, ici le numéro 2, donc SP2).

C’est un évènement beaucoup plus important qu’il n’y parait. En effet, parmi les nouveautés, la célèbre suite bureautique intégrera pour la première fois nativement le format ouvert Open Document Format.

Auparavant on pouvait en théorie lire et écrire en ODF sur la suite Office, mais il fallait télécharger un plugin et faire tout un tas de manipulations compliquées pour arriver au résultat souhaité (lire le rapport Becta pour avoir de plus amples informations).

En arriver là ne fut pas une mince affaire, il aura fallu mettre la pression sur Microsoft qui, avec son arrogance sa manière de faire habituelle, souhaitait plutôt nous imposer son propre format de fichier, le très controversé OOXML.

Toujours est-il qu’on tient enfin là un format de fichier bureautique, ouvert, standard, et en pratique réellement interopérable (en admettant bien entendu que la qualité technique soit bel et bien au rendez-vous). D’un coup d’un seul, la principale critique faite à la suite MS Office tombe, et l’on se retrouve avec un produit beaucoup plus fréquentable, pourvu que les utilisateurs de cette suite aient la bonne idée et lire, écrire et échanger par défaut avec le format ODF (ce qui, a mon humble avis, nécessitera tout de même un temps d’adaptation où il faudra être patient et pédagogue).

Pour « célébrer » l’événement, nous avons choisi de traduire un vieil article Jonathan Schwartz, PDG de Sun, qui témoigne de l’intérêt fondamental de posséder des formats ouverts, en bureautique comme ailleurs[1].

Mes photos de famille – et ODF

My Family Photos – and ODF

Jonathan Schwartz – 12 février 2007 – Blog
(Traduction : Poupoul2, Goofy et Olivier)

Il y a quelques années, alors que je me trouvais chez mes parents, j’ai passé un peu de temps à regarder de vieilles photos de famille tirées d’une boîte à chaussures. C’était sympa. J’y prenais beaucoup de plaisir… jusqu’à ce que je m’aperçoive que la plupart de ces photos étaient uniques. C’est à dire qu’il s’agissait d’exemplaires uniques. Uniques au monde. Et pour au moins l’un des membres de ma famille, il n’existait que deux ou trois photos prises au long de sa vie. Ouch !

Une boîte à chaussures, me dis-je. Un peu archaïque, non ? Et si jamais il y avait une inondation, ou pire encore, un feu ? Voici des photos que je veux partager avec ma famille et transmettre de génération en génération. Je veux que mes enfants en connaissent l’histoire, et mes petits-enfants, et les enfants de mes petits enfants.

Alors, j’ai fait ce que tout bon fils ferait : j’ai convaincu mes parents de me laisser leur subtiliser la boîte un certain temps, je suis rentré à la maison et j’ai numérisé les photos (j’ai aussi rendu la boîte à mes parents).

Les photos numérisées se trouvaient désormais sur mon disque dur. Dans mon portable. Dans ma cuisine (c’est là que vit mon portable).

Étant donné ce qui se passe tous les jours dans ma cuisine, elles s’y trouvaient sans doute moins en sécurité que dans leur boîte à chaussures. Et un point pour l’archaïsme. Un échec, un !

J’ai alors gravé quelques DVDs, les ai distribués autour de moi, et en ai donné quelques-uns aux autres membres de la famille. Cela va sans dire, la plupart des DVDs ont été perdus, ce n’est pas un hasard si les administrateurs système amateurs restent amateurs… Et deux échecs, deux !.

La bonne nouvelle, c’est qu’un jour, quelqu’un de brillant a dit que le réseau est l’ordinateur… Il y a quelque temps, j’ai décidé de les télécharger sur mon service de photos en ligne. Si vous allez vous résoudre à surveiller une boîte à chaussures, autant se tourner vers quelqu’un dont c’est le métier, qui surveille déjà plein d’autres boîtes à chaussure et qui pourrait bien être le meilleur au monde dans ce domaine.

Et puis je me suis demandé…

Comment puis-je garantir que le service sera au rendez-vous, ou que je serais capable de visualiser les images que j’y ai stockées… pas seulement dans un an, mais dans cinq ou cinquante ans ? Que se passera-t-il si les images survivent à la technologie ?

Le décor étant planté, voilà qui illustre bien la raison d’être de ce petit truc qu’on appelle Open Document Format.

Mettez vous dans la peau du législateur écrivant un texte de loi, ou dans celle d’un médecin rédigeant l’ordonnance de son patient, ou encore dans celle d’un étudiant travaillant sur une nouvelle de son cru. Et cinq ou cinquante ans plus tard vous prend l’envie de revoir vos documents. Sauf que le développeur de l’application qui a servi à créer ces documents, l’entreprise qui a créé le traitement de texte a, au choix, cessé son activité, ou décidé de vous demander $10000 pour vous fournir une version capable de lire de vieux formats de fichiers. L’information survit toujours à la technologie, ces scénarios en sont de bons exemples.

Que faites vous alors ?

Premier réflexe : vous râlez. Après tout, l’information que vous avez créée vous appartient à vous et pas à l’éditeur. C’est pareil pour vos photos de famille, vous imaginez qu’un fabricant d’appareil photo vous demande de passer à la caisse avant que vous ne puissiez voir vos propres photos ? C’est là tout le danger lié aux des applications n’utilisant pas des formats de fichiers ouverts. N’oubliez pas, l’information survit à la technologie.

C’est la raison pour laquelle, aux côtés de quelques-uns des plus grands groupes technologiques, ainsi que d’une foule de gouvernements et d’organismes du monde entier, nous avons créé quelque chose que l’on appelle Open Document Format (ou "ODF" de son petit nom). ODF décrit un format ouvert pour les informations contenues dans des documents, indépendant des applications utilisées pour créer les documents enregistrés en ODF.

En d’autres termes, si vous écrivez un texte de loi, un dossier médical ou une fiche réglementaire avec un traitement de texte supportant aujourd’hui l’ODF, et que vous avez besoin d’y accéder n’importe quand dans l’avenir, vous serez libre de le faire à vos conditions. ODF est un véritable format standard, mis en oeuvre par des éditeurs variés (d’IBM à Sun, en passant par Google, Red Hat et même Microsoft désormais), et adopté à une très large échelle sur toute la planète. Et c’est gratuit.

My family photos and ODF - Google docsLa pérennité de l’information et des formats de fichiers est plus qu’essentielle pour des institutions et des entreprises adoptant des politiques de rétention de documents allant bien au-delà de la vie utile du logiciel (ou des employés) qui a permis la création des documents. La disponibilité de l’information est ainsi garantie dans l’avenir. Il en va de même pour nos photographies dans nos boîtes à chaussures. En tant que CIO (NdT : Directeur informatique) à la maison, j’exige que les images me survivent.

Et juste au cas où vous auriez raté une étape, nous travaillons avec Google pour garantir l’interopérabilité entre les documents bureautique de Google et les documents OpenOffice, élevant l’ODF au rang de mécanisme d’échange. Tout document créé avec la suite bureautique de Google peut être aisément exporté vers (et bientôt importé de) OpenOffice (voir la copie d’écran). Combinés, les 2 produits permettent aux entreprises et aux particuliers de préserver, dans le monde entier et pour plusieurs générations, l’accès aux lois, aux contrats, aux dossiers médicaux, aux journaux ou aux plans stratégiques. Et c’est strictement pareil pour les présentations et les feuilles de calculs.

Enfin, pour ceux qui découvrent OpenOffice, il s’agit d’une suite bureautique libre, qui sera toujours gratuite, pour les entreprises comme pour les utilisateurs finaux. D’après nos estimations, nous en avons distribué des centaines de millions de copies autour du monde (cliquez ici pour le télécharger). Et maintenant que Microsoft a annoncé le support de l’ODF, les utilisateurs peuvent sereinement penser qu’OpenOffice peut être introduit dans toutes les chaumières et les bureaux, pas uniquement dans les pays en voie de développement, mais aussi dans les pays développés. Dans quelques semaines, vous aurez la possibilité de télécharger ici un plug-in ODF, qui permettra à Microsoft Word de lire et écrire de l’ODF par défaut. Une fois installé, vous le verrez apparaître dans les options de Word :

my family photos and ODF - MS Office

(Je mettrai un lien dès que le plug-in sera prêt)

À partir de maintenant, ODF devient votre format par défaut. Que vous soyez une compagnie pétrolière ou un étudiant, ODF vous permettra une interopérabilité sans heurts entre des environnements Open Source ou propriétaires, aussi longtemps que le standard (et pas la technologie ou le produit) existera.

Du point de vue des entreprises, de grandes institutions peuvent envisager une migration en douceur, les cadres pourraient conserver Microsoft Word, tandis que le reste du personnel peut passer à une alternative interopérable (par exemple : le traitement de texte de Google ou OpenOffice, ou même les deux). Accessibilité et interopérabilité sont de bonnes choses pour Internet, et nous avons bien l’intention de les utiliser pour les générations futures.

Notes

[1] Crédit photo : Kevin N. Murphy (Creative Commons By)




S’accommoder ou renoncer à Internet Explorer ?

L'actu en patates - Martin Vidberg

Ce dessin de Martin Vidberg illustre bien la situation actuelle des navigateurs. En effet si Internet Explorer ne s’était pas retrouvé d’office dans tous les ordinateurs sous Windows (obligeant toute substitution à un acte engagé de téléchargement), nous n’en serions pas là.

Non, ce n’est pas forcément en cliquant sur le gros E bleu de mon bureau que je vais accéder au réseau. Et oui, commençons (avant de voir plus loin) par éradiquer ce cancer du Net que constitue la version 6 du navigateur de Microsoft, qui fit perdre tant de temps et d’argent aux créateurs de sites web du monde entier.

Vous trouverez ci-dessous le témoignage d’un webdesigner, qui ne souhaite plus se faire de cheveux blancs, et qui, constatant la poussée salutaire de la concurrence, a décidé désormais de passer outre et d’ignorer IE.

Et si c’était au tour des utilisateurs de s’adapter, en prenant 5 minutes de leur temps pour installer une alternative ?

Internet Explorer : un casse-tête pour les designers Web

Internet Explorer Is To Web Standards What Ebonics Is To Standard English

Chris Berry – 18 avril 2009 – Blog
(Traduction Framalang : Balzane, Goofy et Olivier)

Chaque fois que je m’engage dans un nouveau projet de design de site Web, je constate l’impact négatif de Microsoft Internet Explorer. Comme je l’ai déjà dit, je ne réponds pas au cliché du casseur de Microsoft typique, et j’estime que l’augmentation constante de la productivité durant les 20 dernières années est pour une grande part à mettre au crédit de l’universalité de leur système d’exploitation et des logiciels Office. Ceux qui se souviennent de l’époque qui a précédé MS-DOS et Microsoft Office se rappelleront l’absence totale de standard qui rendait virtuellement impossible l’échange de documents avec quiconque n’utilisait pas le même système que vous. Je maintiens que leur monopole dans ce domaine a produit des effets bénéfiques pour tous.

À l’inverse, leur domination sur le marché des navigateurs Web a eu un impact manifestement négatif. Bill Gates reconnaît volontiers que son manque de flair vis-à-vis du développement d’Internet au début des années 90 fut l’une de ses plus grandes erreurs stratégiques. Pour compenser son arrivée relativement tardive sur ce secteur, la société a utilisé sa position monopolistique sur les systèmes d’exploitation pour modeler l’évolution d’Internet selon sa propre volonté. En l’absence de standard universellement accepté à l’origine, Microsoft a développé un navigateur qui tentait d’imposer au Web un fonctionnement identique à celui de n’importe quel autre produit Microsoft. Près de 15 ans plus tard, malgré le développement de standards Web largement reconnus, Microsoft n’a pas encore complètement abandonné cette approche. Aujourd’hui, Internet Explorer reste aux standards Web ce que le langage SMS est à l’orthographe.

La fourniture systématique des premières versions d’Internet Explorer avec le système d’exploitation Windows a assuré à Microsoft une acceptation quasi universelle de son produit, malgré ses limitations manifestes. Suivant les statistiques auxquelles vous vous fiez, de 2002 à 2004 Internet Explorer représentait entre 85 et 95 % de l’ensemble du trafic web. En conséquence, les webdesigners n’avaient pas d’autre solution que d’adapter leurs sites aux comportements propres aux navigateurs Microsoft.

Depuis 1994, le Worldwide Web Consortium (W3C) a travaillé à la mise en place de standards Web universellement reconnus et à empêcher de nouvelles implémentations de technologies propriétaires. Selon leur site Web :

Pour que le Web atteigne son plein potentiel, les technologies Web les plus fondamentales doivent être compatibles entre elles et fonctionner avec n’importe quel matériel et logiciel utilisé pour accéder au Web. Cet objectif est appelé au W3C « l’interopérabilité du Web ». En publiant des standards ouverts (non propriétaires) pour les langages et les protocoles du Web, le W3C ambitionne d’éviter la fragmentation du marché et la balkanisation du Web.

Bien que Microsoft soit membre du W3C, ils ont continué à proposer des produits qui ne remplissent que partiellement cet objectif capital.

Fort heureusement, la domination d’Internet Explorer sur le marché des navigateurs a considérablement diminué ces dernières années, et des navigateurs respectueux des standards comme Mozilla Firefox bénéficient d’une adoption large et rapide. Là encore les statistiques présentent des écarts considérables, mais selon les chiffres du W3C Schools, Firefox représente maintenant 46,5 % du trafic Web, à comparer aux 43,5 % que représentent les différentes versions d’Internet Explorer : IE6, IE7 et le dernier sorti IE8. Les utilisateurs avancés disposent maintenant d’un large choix de navigateurs respectueux des standards et, cumulés, Firefox, Google Chrome, Opera et Safari représentent maintenant 56,1% des navigateurs Web. Un pas de géant dans la bonne direction.

Hélas, 17 % des utilisateurs du Web font toujours confiance à Internet Explorer 6, un navigateur datant d’octobre 2001. Combien d’entre nous portent encore les mêmes vêtements ou regardent les mêmes émissions télés qu’il y a huit ans ? C’est l’année où on a découvert Loft Story et le Maillon Faible. Ces émissions sont apparues, puis ont disparu, mais IE6 lui est toujours parmi nous aujourd’hui. En matière d’espérance de vie, nos années passent encore plus vite pour un logiciel que pour un chien, mais pour diverses raisons IE6 refuse de mourir.

À l’exception des webdesigners et des experts en sécurité, la plupart des gens ne sont pas conscients des limitations importantes d’IE6 ou plus récemment d’IE7. Ils ne comprennent pas combien d’heures et de ressources sont gaspillées avant qu’un site au rendu parfait sous un navigateur conforme aux standards fonctionne aussi sous Internet Explorer. Jusqu’à récemment, bricoler avec les limitations de ces navigateurs était considéré comme un mal nécessaire et peu de designers acceptaient de publier un site si son affichage dans ces navigateurs imparfaits et obsolètes conduisait à une mise en page dégradée.

Compte tenu de la part de marché grandissante des navigateurs respectueux des standards, quelques designers hardis font évoluer leurs habitudes. Cela n’a aucun sens de passer d’innombrables heures à inventer des bidouilles inélégantes et des solutions de rechange disgracieuses pour s’adapter à des utilisateurs qui se cramponnent obstinément à une technologie obsolète. D’un point de vue commercial, il peut être difficile de résister à un client qui insiste pour que son site soit rétrocompatible avec une technologie préhistorique, mais il faut au moins le rendre conscient des coûts supplémentaires importants induits par son exigence.

Selon l’avis de certains, les designers passent autant de temps à obtenir un rendu correct d’un site dans IE qu’à créer le design original. Ceci constitue clairement un gâchis de temps et d’énergie phénoménal et représente une charge financière énorme dont les clients ont rarement conscience. Il faudrait au minimum leur expliquer ouvertement qu’assurer la rétrocompatibilité de leur site avec des navigateurs obsolètes reviendra sensiblement plus cher que la création d’un site conforme aux standards. Tant que les clients ne seront pas au courant que leurs exigences impliquent un tarif très élevé, les utilisateurs d’IE resteront inconscients des problèmes qu’ils causent.

Refuser purement et simplement de prendre en charge les navigateurs non conforme serait plus facile, mais cela ne constitue pas une solution réaliste. Nous pouvons agir pour sensibiliser les internautes néophytes à la nature et à l’étendue des problèmes qu’ils causent. Après avoir créé ce nouveau thème pour mon site, j’ai décidé de ne faire aucune modification pour les utilisateurs d’Internet Explorer. Si vous visitez ce site avec un navigateur respectueux des standards, son rendu sera exactement celui voulu. Si vous utilisez Internet Explorer, la mise en page sera dégradée. Les utilisateurs d’IE7 constateront entre autres qu’en arrière-plan les images et les couleurs ne sont pas assorties, que les boîtes de commentaires ne sont pas alignées avec la marge gauche. Si vous survolez les numéros de pages en bas de l’écran dans IE, vous allez probablement voir leur position sauter de 15 ou 20 pixels. Si vous regardez la page d’accueil ou l’une des pages d’archives, vous allez remarquer des espaces vides supplémentaires entre chaque extrait des billets. Ce sont juste quelques-uns des défauts que j’ai constatés jusqu’ici avec IE7, et je ne me suis même pas préoccupé d’afficher le site dans IE6. Je suppose que c’est bien pire.

Si vous voulez contribuer à débarrasser le monde des navigateurs non respectueux des standards, vous pouvez afficher le logo Bring Down IE6 (NdT : Meurs, IE6 !). Procurez-vous le vôtre dès aujourd’hui sur Bring Down IE6.com.




L’avenir du livre reste à écrire…

Richardmasoner - CC by-saLe succès récent du lecteur de livre électronique Kindle 2 d’Amazon est venu nous rappeler que le monde de l’édition ne pourra être longtemps épargné par les bouleversements technologiques actuels. Ce n’est qu’une question de temps, celui que mettra l’industrie à nous offrir un réel confort de lecture numérique, accompagnée par une offre plurielle au prix raisonnable et… aux formats ouverts !

Le meilleur moyen d’appréhender la nouvelle donne qui s’annonce et d’en mesurer dès à présent les enjeux est certainement de parcourir l’excellent blog La Feuille.

Quant à nous, après avoir évoqué, non sans ironie, la question du piratage, nous vous proposons une traduction du Guardian qui témoigne du fait que, comme pour la musique, c’est tout la chaîne de production qui risque d’être bientôt impactée[1].

Sans oublier bien sûr notre projet de livres libres Framabook en partenariat avec InLibroVeritas (et Les Complexes).

L’avenir de l’édition : aussi terrifiant qu’un récit de Stephen King ?

The future of publishing: as frightening as any Stephen King story?

Naomi Alderman – 17 février 2009 – The Guardian
(Traduction Framalang : DonRico et Goofy)

Pour le livre électronique, on est à mille lieues de se soucier du piratage.

La révolution du livre électronique est peut-être en marche. L’année dernière, Amazon a sorti son lecteur d’e-books, le Kindle, et estime qu’il s’en est vendu plus que d’iPods lors de leur première année de commercialisation. Il y a peu, Amazon a sorti le Kindle 2, lequel était accompagné, pour fêter l’événement, d’une nouvelle écrite pour l’occasion par Stephen King.

Parmi mes interlocuteurs dans le monde de l’édition – auteurs, agents, responsables éditoriaux et éditeurs d’œuvres numériques –, la portée d’une révolution du livre électronique suscite à la fois un grand intérêt et une vive inquiétude. Les éditeurs craignent les possibilités de piratage. Si l’on prend l’exemple de l’industrie du disque, cette inquiétude peut sembler légitime. Trouver des livres électroniques piratés n’a rien de difficile : en cherchant « eBook Stephen King » sur Google, on récolte des tas de liens. Cela ne pose pas de problème pour l’instant car dans leur grande majorité, les lecteurs n’aiment pas lire de longues œuvres sur un écran d’ordinateur. Si un appareil offrant un plus grand confort de lecture se démocratisait – et même le Kindle permet à ses utilisateurs de lire des PDF grâce à un système de conversion « expérimentale » –, la donne changerait rapidement.

Mais les inquiétudes concernant le piratage ne sont peut-être qu’un leurre. La démocratisation du lecteur de livres électroniques pourrait avoir un effet bien plus immédiat et plus profond sur la façon dont on publiera et vendra les livres, et Stephen King nous en a offert un parfait exemple. En 2000, il a publié son roman The Plant sous forme d’e-book, découpé en épisodes. Il l’a mis à disposition sur son site Web, se passant ainsi d’éditeur. Dans les grandes lignes, l’expérience s’est soldée par un échec : on peut lire d’intéressantes analyses à ce propos sur Salon, Wikipédia et Another Sky Press. La démarche fonctionnait selon un modèle économique très particulier, mais la plupart des lecteurs potentiels ne possédaient pas d’appareil sur lequel il était plaisant de lire un long e-book.

Si les ventes de lecteurs d’e-books décollaient, en revanche, des auteurs de renom tel que Stephen King pourraient passer à l’auto-publication. Et cela pourrait marquer la fin du système éditorial tel que nous connaissons à l’heure actuelle. À cause de la structure de l’édition, ce sont les auteurs de renom dont les livres se vendent par millions qui, de fait, soutiennent l’industrie à bout de bras. J’ai lu diverses statistiques concernant le pourcentage de livres qui génèrent vraiment des bénéfices. Un agent littéraire que j’interrogeais m’a expliqué que 95% des œuvres publiées n’étaient pas rentables. D’autres m’ont indiqué des nombres moins élevés. Quoi qu’il en soit, tout le monde s’accorde à dire qu’une grande majorité des bénéfices provient d’une petite minorité d’auteurs.

Si Stephen King, Dan Brown, JK Rowling et Patricia Cornwell décidaient de concert de vendre leurs livres eux-mêmes en ligne au lieu de passer par une maison d’édition, ils en tireraient sans aucun doute des avantages financiers. En gros, un auteur ne touche qu’une livre (Ndt : un peu plus d’un euro) sur chaque exemplaire vendu. Au lieu de s’en remettre à un éditeur, les auteurs de renom pourraient se permettre de n’employer qu’un assistant d’édition, un attaché de presse, un compositeur et un graphiste. Ils pourraient vendre leurs livres seulement 2 ou 3 livres et gagner malgré tout plus d’argent qu’avec le système actuel.

Mais sans les revenus générés par ces auteurs pour maintenir à flot les éditeurs, le système actuel ne serait plus viable. Que se passerait-il alors ? Difficile de le savoir. À l’évidence, les maisons d’éditions devraient réduire leur taille, et les auteurs qui ne connaissent pas un immense succès international ne pourraient bénéficier d’avances sur droits d’auteurs fort utiles. Il serait plus difficile de continuer à écrire lorsqu’on serait un écrivain moyennement vendeur, à moins de bénéficier d’une source de revenus personnelle. Les lecteurs chercheraient toujours à découvrir de nouveaux auteurs formidables, aussi les marques des éditeurs connus conserveraient leur valeur, car elles permettraient aux lecteurs de séparer le bon grain de l’ivraie. Mais Penguin, Harper Collins et Random House pourraient se réduire à des icônes sur des canaux d’agrégateurs de livres électroniques et n’être plus les moteurs de la production éditoriale qu’elles sont aujourd’hui.

Étant moi-même auteur, j’évoque souvent les mérites du livre électronique et l’intérêt que je porte aux nouvelles possibilités de création qu’il permet. De plus, je ne doute pas que les lecteurs auront toujours envie de lire d’excellents livres. Mais toute révolution est terrifiante, et celle-ci pourrait être aussi effrayante qu’une histoire de Stephen King.

Notes

[1] Crédit photo : Richardmasoner (Creative Commons By-Sa)




Les pirates somaliens ne téléchargent pas sur Internet

Peasap - CC byQuel est le point commun entre un adolescent qui récupère puis partage sur eMule le dernier tube à la mode et un bandit somalien sans scrupule écumant la mer à la recherche de navires à aborder puis dérouter contre rançon ?

Vous avez bien entendu deviné : ce sont tous les deux des « pirates ».

Dans la mesure où l’actualité récente est venue nous rappeler qu’il existait encore de « vrais » pirates, on peut légitimement se demander si ce vocable est forcément adapté à notre adolescent[1] qui serait le premier surpris d’être comparé à de tels individus.

Faut-il enfin arrêter de parler de « piratage » ?

Is it time to stop using the word ‘piracy’?

Bobbie Johnson – 16 avril 2009 – The Guardian
(Traduction Framalang : Yonnel)

Faut-il enfin arrêter de parler de « piratage » ? C’est du moins un avis très répandu. Dans l’actualité récente, on a beaucoup parlé à la fois de la piraterie sur les mers et sur les réseaux, une coïncidence venue à point nommé pour faire ressortir les différences marquées entre ces deux phénomènes.

On souligne que les activités des rebelles de l’ère numérique, comme The Pirate Bay, ne pourraient pas être plus éloignées de la violence et de la cruauté des pirates somaliens, affairés dans une succession de batailles sanglantes au large des côtes de l’Afrique orientale.

La dernière remise en question de l’usage du mot « piratage » pour décrire la copie numérique vient de Stephen Dubner, un des auteurs du best-seller Freakonomics.

« C’était un nom bien trouvé, au moins au début. Les films, la musique, les jeux, et même les livres piratés – ah ouais, voilà, les hors-la-loi qui volent les institutions, qui créent de la richesse pour tout un chacun », analyse-t-il sur son blog. « Mais depuis ces dernières semaines, avec les attaques des vrais pirates qui ont crû en intensité, en violence et en importance géopolitique, appeler pirates les voleurs du numérique a semblé de moins en moins pertinent et de plus en plus excessif. »

Certains mettent en évidence depuis longtemps cette tension entre les différents usages de ce terme. Richard Stallman, le fondateur de la Free Software Foundation, réputé pour être tatillon sur les mots, a déjà une longue liste d’expressions qui le troublent (dont « libre/gratuit », « créateur » et « écosystème »). Il pense que l’usage du mot piraterie a toujours fait partie de la propagande des éditeurs.

« Ils insinuent que c’est équivalent, d’un point de vue éthique, à l’attaque de navires en pleine mer, à l’enlèvement et au meurtre de passagers », accuse-t-il. On peut trouver cela extrême – après tout, la plupart d’entre nous sont susceptibles d’avoir des images de corsaires, du capitaine Jack Sparrow (NdT : Pirates des Caraïbes !) ou de Long John Silver (NdT : L’Ile au Trésor, de Robert Louis Stevenson), mais même cette semaine la Business Software Alliance (NdT : la BSA) faisait avec d’autres la comparaison directe avec les événements au large de l’Afrique dans sa campagne contre les infractions au copyright.

Alors, comment en parler ? Stallman propose « copie non autorisée », « copie prohibée », voire même « partage d’information avec son prochain ». Dubner, de son côté, a gribouillé le terme « dobbery » (NdT : digital robbery, vol numérique), qui est non seulement problématique, mais possède tout ce qu’il faut pour être au moins autant sujet à controverse que son prédécesseur.

John Gruber, l’auteur du blog Daring Fireball, suggère que nous n’avons pas besoin de nouveaux mots ou de nouvelles expressions : « le mot trafic est déjà adapté » (NdT : ou contrebande), écrit Gruber. Il est peut-être lui aussi fortement connoté, mais au moins il a derrière lui une longue histoire dans le monde de la musique, qui précède le piratage des fichiers numériques, et on l’associe à autre chose.

Il n’en demeure pas moins que quel que soit le mot qui fera l’union des anti-piratages, leur combat pourrait être de longue haleine. Les pirates somaliens ont beau faire la une aujourd’hui, les événements passés, notamment en mer de Chine méridionale, qu’il s’agisse de vols, enlèvements ou meurtres, n’ont pas réussi à bouleverser le langage. Il est peut-être temps d’admettre que le bateau a déjà mis les voiles.

Notes

[1] Crédit Photo : Peasap (Creative Commons By)




Leçon n°1 : Cliquer sur le gros E bleu permet d’accéder à Internet

Tajai - CC byCe blog n’est pas le dernier à le constater : les enseignants et le logiciel libre, c’est parfois tout un poème…

Enfin surtout aux États-Unis où un enseignant se propose carrément ci-dessous « d’éduquer ses collègues au Libre », et de se demander au passage si la situation ne serait pas meilleure ailleurs.

En Angleterre certainement, mais en France ?

C’est, en l’absence de statistiques fiables, difficile à évaluer[1]. En bas ça fourmille à n’en pas douter d’initiatives pas forcément médiatisées, mais en haut ?

En haut, ça coince toujours pour je ne sais quelles obscures raisons. Où sont les documents d’informations, les plans d’action ou les directives courageuses ? Et confier la chose à Microsoft ou Google n’est certainement pas la solution…

Il faut éduquer les profs au Libre

Teachers Need An Open Source Education

Matt Hartley – 27 janvier 2009 – Datamation
(Traduction Framalang : Daria, Don Rico et Tyah)

Vous rappelez-vous en 2008, quand un professeur nommé « Karen » avait interdit à ses élèves d’utiliser Linux ? Apparemment, dans son raisonnement, des élèves qui utilisaient Linux étaient sans doute impliqués dans des pratiques illégales.

Elle s’est plus tard excusée même si dans les deux camps on a continué à se crêper le chignon. Il me semble que ce ne sont pas seulement les acteurs du logiciel propriétaire qui ne connaissent rien aux logiciels Open Source. Il semblerait qu’à présent le groupe des fanas de la désinformation inclut aussi les professeurs.

C’est la liberté qui compte, pas la gratuité

Malgré la croissance récente dans l’adoption des logiciels Open Source sur les plateformes propriétaires, il reste d’innombrables responsables et décisionnaires qui ignorent tout des logiciels libres/Open Source (Free/Open Source Software : FOSS). Et pour être complètement juste, il n’est pas difficile d’imaginer le trouble d’un professeur bombardé par le discours des présentateurs des grands médias qui passent plus de temps à brandir la menace du « piratage de logiciels » qu’à parler de leurs alternatives libres (FOSS).

Même les « freeware » (gratuiciels) peuvent être échangés illégalement puisqu’ils contiennent souvent un accord de licence stipulant qu’il faut la permission expresse de ses créateurs pour distribuer les travaux créés avec ces gratuiciels. On imagine alors sans mal comment un professeur mal informé peut être enclin à tirer des conclusions hâtives quand un de ses étudiants fait passer un CD contenant un « logiciel inconnu » à ses camarades.

En réalité, ces mêmes étudiants utilisent leur liberté de choix pour sélectionner les alternatives légales aux logiciels propriétaires. Ils évitent ainsi tout recours au piratage de logiciels. Grâce aux nombreuses licences Open Source existantes, les étudiants peuvent échanger ces logiciels sans restriction. Cette liberté n’a aucune conséquence néfaste. Hélas, la plupart des professeurs l’ignorent.

Ce qui n’arrange en rien cette incompréhension entre élèves et enseignants, ce sont les fortes présomptions voulant que les responsables informatique qui travaillent dans les mêmes établissements que ces professeurs mal informés ne sont pas en reste pour encourager ce genre de réactions et faire en sorte qu’elles aillent plus loin encore.

Des professionnels de l’informatique qui ont besoin de « retourner à l’école »

Essayez de suggérer à un utilisateur de Linux qu’il devrait retirer Linux de son PC : il y a de fortes chances qu’il vous rie au nez. Pourtant, il semblerait que ce soit des pratiques courantes dans les établissements.

Le problème, c’est que les utilisateurs de Linux eux-mêmes sont perçus comme des éléments perturbateurs dans un univers régi par des administrateurs certifiés Microsoft. Ces admins, qui étalent souvent leur « grande connaissance de Linux » acquise lors d’une aventure de vingt minutes avec une distribution Linux prise au hasard il y a quelques années, choisissent d’apporter leur pierre à la désinformation. On les accuse parfois de fabriquer des semi-vérités à propos de ceux qui utilisent exclusivement cette plateforme, ou de leur avoir simplement refusé l’accès au réseau. Voilà qui pose problème dès lors que les étudiants concernés viennent d’une famille où l’on n’utilise que Linux, ce qui pourrait les contraindre à devoir apporter au lycée leur propre portable tournant sous Linux.

Est-ce un problème mondial, ou est-un problème propre aux établissements scolaires américains ? Même si j’ai lu dans certains articles que ça se passe un peu partout, le gros des exemples cités semble venir essentiellement des États-Unis.

Les établissements scolaires américains sont-ils seuls à nager dans l’ignorance ?

À l’heure actuelle, les établissements américains sont plus doués pour enseigner la « docilité envers Microsoft » que pour faire en sorte que les élèves sachent lire avant leur entrée au lycée. Remarquez, ce n’est pas grave, ces mêmes élèves ont déjà appris tout seuls à cliquer sur « le gros E bleu » pour se rendre comme des grands sur MySpace et Facebook.

Ajoutez à cela le talent avec lequel ils utilisent la toute dernière suite de sécurité propriétaire pour se prémunir des programmes malveillants qui se baladent sur Internet, et nos élèves américains, en grandissant, deviendront une ressource sur laquelle on pourra compter.

Pendant ce temps, des régions du monde telles que l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud connaissent des taux record de migrations vers Linux. Les lycéens de pays bien plus pauvres que le nôtre apprennent à mettre à profit leurs capacité à résoudre les problèmes pour contourner les « anicroches » de leur OS, alors qu’aux États-Unis, les lycéens s’échinent à améliorer leur perso World of Warcraft !

Même au Canada, notre voisin immédiat, des dépêches annoncent chaque mois que des groupements d’établissements passent à des alternatives Open Source, simplement parce qu’ils préfèrent consacrer leur budget éducatif à autre chose qu’à des licences Microsoft.

Arrêtez-moi si je me trompe, mais il y a quelque chose qui cloche, non ? Les enseignants et les administrateurs système serinent aux jeunes élèves portés vers les nouvelles technologies que s’ils veulent être compétitifs sur le marché, ils doivent utiliser Windows. N’oublions pas que nous espérons former ces mêmes élèves à être performants dans un monde ou Linux et Windows sont tous les deux très utilisés.

D’accord, on voit souvent passer des articles qui affirment que l’utilisation de Linux est marginale. Pourtant, quand on demande comment on peut bien s’y prendre pour comptabiliser un système d’exploitation qui ne fournit pas de réel moyen de le comptabiliser, ces mêmes sources médiatiques se referment comme des huîtres. En d’autres termes, nul ne peut fournir un pourcentage tangible, et ceux qui montrent des camemberts représentant les parts de marché en avançant des arguments confus doivent comprendre qu’ils ne racontent pas toute la vérité.

Mais revenons à nos moutons. Avec le budget éducatif dont disposent actuellement les établissements scolaires américains, il semblerait qu’il y ait un paquet d’argent à dépenser en logiciels et en renouvellement de matériel ! Les économies réalisées par les établissements américains qui utilisent toujours Windows 98 et 2000 Pro, voilà qui à l’évidence est plus rentable qu’embaucher des administrateurs formés à plusieurs systèmes d’exploitation et capables de travailler sur autre chose que Windows, non ?

Ces administrateurs ne passent quand même pas plus de temps à lutter contre les logiciels malveillants qu’à améliorer l’environnement informatique pour les élèves, non ? Ah si, au temps pour moi.

Une proposition modeste

Je vais faire une proposition. Et si on permettait aux élèves qui le souhaitent d’apprendre à se servir de Linux, et ce sur leur temps libre ? Peut-être pourrait-on même en faire une option qui leur vaudrait des points supplémentaires, ce qui serait forcément mieux que de les assommer d’ennui avec des matières en option dont ils se fichent comme d’une guigne.

Cela ne coûterait rien aux établissements, et pour couronner le tout, contribuerait à parfaire les capacités de résolution de problème des élèves.

En outre, je suggère que les enseignants et les techniciens informatique formés par Microsoft se documentent davantage sur Linux avant de porter dessus des jugements hâtifs.

Bien que je reconnaisse volontiers que Linux n’est pas une plateforme accessible à tout le monde, elle est de plus en plus utilisée dans le monde entier, et ceux qui la maîtriseront en plus des systèmes d’exploitation propriétaires seront en bien meilleure position pour réussir sur le marché du travail.

Qui plus est, n’importe quel utilisateur de Linux peut se coller devant une machine tournant sous Windows et réussir à s’en servir en quelques minutes. Pouvons-nous en dire autant de l’utilisateur de Windows de base qui tenterait la même expérience avec Linux ? Sans « le gros E bleu » sur le bureau, c’est peu probable.

Notes

[1] Crédit photo : Tajai (Creative Commons By)




Je pense avoir acheté mon dernier Mac

Procsilas - CC byFramasoft en général et le Framablog en particulier vous ont souvent raconté des histoires de migration du système d’exploitation Microsoft Windows vers GNU/Linux (de préférence des histoires qui se finissent bien).

Pour changer un peu, il nous a semble original et intéressant de vous proposer le témoignage d’un « vieux fidèle » du Mac qui a lui aussi décidé de « briser ses chaînes » (et Dieu sait si avec Apple elle sont nombreuses) pour s’en aller le cœur léger aborder le pays des manchots, en l’occurrence le manchot sud-africain Ubuntu.

Que les geeks qui ne cessent de vanter les mérites de Linux mais dont l’ordinateur principal tourne sous Mac[1] (si, si, j’en connais, au moins autant que ceux qui restent sous Windows), n’hésitent pas à apporter leur pierre dans les commentaires 😉

Migration

Switching

Ian Betteridge – 11 janvier 2009 – Technovia
(Traduction Framalang : Balzane)

Comme vous avez pu le déduire de mes billets récents, j’ai changé de système d’exploitation. Mon ordinateur principal est maintenant un portable Dell tournant sur Ubuntu 8.10.

J’avais utilisé des Mac depuis 1986, et j’en avais pratiquement toujours possédé un depuis 1989. Le Mac Plus, le LC 475, le PowerBook Duo, l’iBook et le MacBook Pro figurent parmi les machines qui subirent mon utilisation quotidienne. J’ai gagné ma vie en écrivant sur les Macs et je ne compte plus les Macworld Expos auxquelles j’ai assisté.

Mais, sauf évolution de la politique d’Apple et lancement de machines résolument différentes, je pense avoir acheté mon dernier Mac.

Les causes d’une migration de Mac OS X vers Linux sont diverses. La première était simple : le prix. Indéniablement, les toutes dernières générations de machines Apple sont surpuissantes. Malheureusement, leur prix est tout aussi surpuissant. C’est simple, je n’étais pas prêt à dépenser 200 £ (NdT : environ 230 €) de plus que pour mon dernier MacBook Pro.

Bien sûr, j’aurais pu me rabattre sur un MacBook standard. Il aurait été assez puissant pour mon usage. Mais il ne dispose que d’un écran 13 pouces et, après avoir travaillé des années sur un 15 pouces, 13 pouces c’était vraiment trop petit.

À l’inverse de beaucoup de constructeurs, Apple ne comptait pas de portables 15 pouces moins puissants que le MacBook Pro dans sa gamme. On comprendra que, pour des raisons de logistique et de simplicité de ses produits, Apple limite le nombre de variantes sur ses chaînes de production. Du coup, Apple ne proposait pas de machine qui corresponde à mes besoins.

Ceci constitue d’ailleurs un élément de réponse à la lancinante question : « Un Mac est-il un bon investissement ? » Par rapport à un PC aux performances identiques, c’est parfois le cas. Cependant, il arrive que l’utilisateur n’ait pas forcément besoin des fonctionnalités supplémentaires ou de la puissance du Mac. À moins qu’elles ne soient gratuites ou bon marché, acheter une machine aux fonctionnalités superflues n’est pas un bon investissement. Dans mon cas, payer 1400 £ (NdT : environ 1600 €) simplement pour bénéficier d’un écran 15 pouces alors que je n’ai pas l’usage d’un bus système cadencé à 1 GHz ou de deux cartes graphiques n’est pas un investissement intéressant.

Il y avait aussi une autre raison de migrer, mise en évidence par Mark Pilgrim lors de son passage sous Linux. Apple est une société particulièrement privatrice, elle ne documente pas ses formats de fichiers et a tendance à plus ou moins subtilement enfermer ses clients.

L’exemple le plus évident est l’iPhone. Comme un Mac, un iPhone possède un design exceptionnel. C’est aussi un écosystème très fermé. Les développeurs qui refusent de jouer le jeu d’Apple ne peuvent pas distribuer officiellement leurs applications. Ils ne peuvent que compter sur d’autres pour contourner les limitations du système d’exploitation du téléphone. Si vous voulez que vos applications tournent sur la majorité des iPhones, vous devez accepter les règles fixées par Apple. Et ces règles sont, semble-t-il, pour le moins arbitraires.

Je connais les justifications à ces règles. Ce sont exactement les mêmes arguments que ceux qu’utilisait IBM à l’époque où il ne voulait pas que vous exécutiez d’autres programmes que les leurs sur votre mainframe IBM. Certes, faire partie d’un écosystème fermé et rigoureusement contrôlé assure votre sécurité. C’est aussi hypothéquer votre capacité à disposer d’un Personal Computer réellement personnel.

Je fais une prédiction : pour des raisons similaires, l’écosystème de développement Mac va progressivement ressembler à celui du iPhone. D’optionnel, le recours à des binaires signés va finalement devenir « aucune possibilité d’exécution de code non signé ». Apple deviendra un distributeur d’applications, et fixera des règles du jeu similaires à celles appliquées à l’iPhone. Le raisonnement fait pour l’iPhone peut être transposé au Mac. Je ne pense pas que cela se produira dans les cinq prochaines années, mais je suppose que ça arrivera tôt ou tard. (Mise à jour : si vous êtes arrivé sur ce billet par le billet de Giles qui souligne cette prédiction, la lecture de Why Apple will have a Mac App Store peut vous intéresser.)

Après tout, Apple est une société qui se base sur le DMCA (NdT : Digital Millennium Copyright Act, pendant américain à DADVSI) pour empêcher la rétro-ingénierie sur les fichiers de base de données d’un iPod, élément essentiel à l’interopérabilité d’un iPod avec d’autres plates-formes que Windows ou Mac. Une société qui déploie sans avertissement la technologie anti-copie HDCP, de façon à bloquer jusqu’à la lecture même de contenus qui ne sont pas en haute définition sur des matériels non homologués.

Heureusement il existe une autre possibilité, une possibilité qui n’implique pas de faire confiance à une unique société commerciale pour prendre en compte l’ensemble de nos besoins informatiques. Alors je n’ai ni acheté un MacBook ni un MacBook Pro, mais un Dell XPS1530 flambant neuf, qui maintenant tourne avec bonheur sous Ubuntu 8.10. Il n’est pas aussi puissant qu’un MacBook Pro, mais la configuration matérielle correspond exactement à mes besoins, et son système d’exploitation n’est pas la propriété d’une multinationale monolithique.

Comment s’est passé l’essai jusqu’ici ? Le Mac ne m’a pas manqué une seule minute. Tout a bien fonctionné.

Je garde encore une partition Windows sur la machine, mais elle ne sert vraiment plus qu’en cas d’urgence. WoW tourne à la perfection sous Wine, et la fréquence de rafraîchissement fait passer mon vieux Mac Book Pro pour un Apple II. Le jour est proche où je n’aurai plus besoin d’un Windows « au cas où » et récupérerai les 80 Gb de la partition pour un meilleur usage. De toutes les façons ce Dell est équipé d’un disque de 400 Gb, ce qui me laisse le temps de voir venir.

ITunes ? Je n’en ai pas besoin, Amarok est meilleur, de loin. Pour tous mes documents, j’utilise OpenOffice.org et j’accède ainsi à un format de fichier dont l’existence n’est pas soumise au bon vouloir d’une société, à l’inverse de Pages (NdT : traitement de texte sur Mac).

La configuration d’Ubuntu a été un plaisir. Je pense vraiment que c’est à la portée de tous, et si vous avez la malchance de rencontrer le moindre problème, une rapide recherche Google devrait vous retourner une réponse de l’étonnante communauté Ubuntu. Avec mon Dell, j’ai rencontré une difficulté avec le trackpad, problème que j’ai pu résoudre en dix minutes grâces à Google et à la communauté Ubuntu. Si vous savez installer un Windows, vous saurez sans aucun doute installer et utiliser Ubuntu

Certains aspects du boulot effectué sont particulièrement impressionnants. Le modem 3G intégré, dont mon Dell est équipé, n’a pas juste été reconnu pas Ubuntu, il était aussi fonctionnel en quelques minutes. Un clic sur l’assistant qui m’a demandé quel réseau mobile utiliser, et ça marchait. Ce fut la même chose pour mon imprimante, une HP Deskjet vieille de moins d’un an. Alors que Windows Vista ne voulait pas en entendre parler, Ubuntu l’a reconnue dès son branchement et elle a fonctionné du premier coup.

Devriez-vous en faire de même ? Si vous êtes sensibilisés aux logiciels libres et aux formats ouverts, si vous refusez d’être captifs d’un matériel ou d’un unique système d’exploitation, alors la réponse est oui. Si vous vous préoccupez davantage de la simplicité d’utilisation de votre ordinateur et êtes satisfait de ce que vous impose Apple, alors non. De tous les systèmes d’exploitation existants, la distribution Ubuntu est la plus proche d’un système d’exploitation pour tous publics, mais il n’est pas pour tout le monde.

C’est une bonne chose, parce que la monoculture est nuisible. Je souhaite que Mac OS X s’améliore et prospère, tout comme que je souhaite que Microsoft perfectionne Windows. L’émulation est positive, et une concurrence entre trois plates-formes qui adoptent chacune une approche différente est très saine.

Notes

[1] Crédit photo : Procsilas (Creative Commons By)